Sommaire
Secrétaires :
M. Guy Benarroche, Mme Catherine Di Folco.
revalorisation des astreintes hospitalières
Question n° 486 de Mme Anne Souyris. – Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l’emploi.
gestion des déchets d’activités de soins
Question n° 510 de M. Jean-Pierre Corbisez. – Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l’emploi.
Question n° 496 de Mme Marie-Lise Housseau. – Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l’emploi ; Mme Marie-Lise Housseau.
nécessité de réactiver la prépa-apprentissage
Question n° 505 de Mme Laure Darcos. – Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l’emploi.
transport des élèves en situation de handicap
Question n° 522 de M. Hervé Reynaud. – Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l’emploi ; M. Hervé Reynaud.
Question n° 540 de M. Damien Michallet. – Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l’emploi.
coûts de l’archéologie préventive pour les collectivités territoriales
Question n° 482 de M. Fabien Genet. – Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l’emploi ; M. Fabien Genet.
créole et ratification de la charte européenne des langues régionales ou minoritaires par la france
Question n° 429 de M. Frédéric Buval. – Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l’emploi.
désinformation relative au sida chez les jeunes
Question n° 477 de M. Stéphane Demilly. – Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l’emploi.
compensation de la suppression du fonds de soutien aux activités périscolaires
Question n° 539 de M. Michel Masset. – Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l’emploi ; M. Michel Masset.
réglementation du balisage des zones de baignade
Question n° 513 de Mme Béatrice Gosselin. – Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l’emploi ; Mme Béatrice Gosselin.
mise en œuvre de la filière à responsabilité élargie du producteur des emballages professionnels
Question n° 532 de M. Guislain Cambier. – Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l’emploi ; M. Guislain Cambier.
avenir des cétacés du parc marineland d’antibes
Question n° 536 de Mme Mathilde Ollivier. – Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l’emploi.
Question n° 541 de M. Simon Uzenat. – Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l’emploi.
gestion des extractions judiciaires
Question n° 353 de M. Cédric Chevalier. – Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l’emploi ; M. Cédric Chevalier.
communication du rapport d’évaluation des centres éducatifs fermés actuels
Question n° 529 de Mme Marion Canalès. – Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l’emploi ; Mme Marion Canalès.
urgence de la vaccination contre les épizooties
Question n° 500 de M. Daniel Gremillet. – Mme Annie Genevard, ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire ; M. Daniel Gremillet.
compostage de la laine en suint en ferme
Question n° 290 de M. Jean-Claude Anglars. – Mme Annie Genevard, ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire ; M. Jean-Claude Anglars.
difficultés d’installation des jeunes agriculteurs dans les territoires ruraux
Question n° 508 de M. Bruno Rojouan. – Mme Annie Genevard, ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire.
Question n° 512 de M. Daniel Gueret. – Mme Annie Genevard, ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire ; M. Daniel Gueret.
sécuriser la procédure de démission d’un élu
Question n° 507 de M. Aymeric Durox. – M. François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur ; M. Aymeric Durox.
projet d’implantation d’une brigade de gendarmerie à aincourt
Question n° 460 de M. Daniel Fargeot. – M. François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur ; M. Daniel Fargeot.
déplacement du commissariat de gap
Question n° 465 de M. Jean-Michel Arnaud. – M. François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur ; M. Jean-Michel Arnaud.
reconnaissance du bénévolat des sapeurs-pompiers volontaires
Question n° 528 de Mme Elsa Schalck. – M. François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur ; Mme Elsa Schalck.
Question n° 530 de M. Hervé Gillé. – M. François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur ; M. Hervé Gillé.
brigade de gendarmerie de vivonne
Question n° 537 de M. Bruno Belin. – M. François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur ; M. Bruno Belin.
privatisation des lignes de bus de petite couronne
Question n° 488 de M. Fabien Gay. – Mme Françoise Gatel, ministre déléguée chargée de la ruralité.
Question n° 494 de Mme Mireille Conte Jaubert. – Mme Françoise Gatel, ministre déléguée chargée de la ruralité.
sécurisation de la route nationale 248
Question n° 498 de M. Philippe Mouiller. – Mme Françoise Gatel, ministre déléguée chargée de la ruralité.
faits de violences sexistes et sexuelles au sein d’air france
Question n° 509 de Mme Sophie Briante Guillemont. – Mme Françoise Gatel, ministre déléguée chargée de la ruralité ; Mme Sophie Briante Guillemont.
projet vital de la ligne nouvelle paris-normandie
Question n° 515 de M. Sébastien Fagnen. – Mme Françoise Gatel, ministre déléguée chargée de la ruralité.
avenir du programme « petites villes de demain »
Question n° 538 de M. Patrice Joly. – Mme Françoise Gatel, ministre déléguée chargée de la ruralité ; M. Patrice Joly.
problèmes posés lors de la reprise de tombes abandonnées
Question n° 452 de Mme Else Joseph. – Mme Françoise Gatel, ministre déléguée chargée de la ruralité ; Mme Else Joseph.
financement des contrats d’assurances par les collectivités territoriales
Question n° 412 de M. Pascal Martin. – Mme Clara Chappaz, ministre déléguée chargée de l’intelligence artificielle et du numérique ; M. Pascal Martin.
troisième programmation pluriannuelle de l’énergie et conséquences sur les collectivités candidates
Question n° 495 de M. Jean-Gérard Paumier. – Mme Clara Chappaz, ministre déléguée chargée de l’intelligence artificielle et du numérique ; M. Jean-Gérard Paumier.
incertitudes sur les crédits budgétaires 2025 consacrés à l’économie sociale et solidaire
Question n° 499 de M. Jean-Jacques Michau. – Mme Clara Chappaz, ministre déléguée chargée de l’intelligence artificielle et du numérique.
intégration des chambres d’hôtes dans le régime fiscal des meublés de tourisme
Question n° 503 de Mme Dominique Vérien. – Mme Clara Chappaz, ministre déléguée chargée de l’intelligence artificielle et du numérique ; Mme Dominique Vérien.
redevances liées aux concessions hydroélectriques
Question n° 518 de M. Stéphane Sautarel. – Mme Clara Chappaz, ministre déléguée chargée de l’intelligence artificielle et du numérique ; M. Stéphane Sautarel.
nécessité d’une coordination régionale des classes de défense
Question n° 524 de Mme Gisèle Jourda. – Mme Clara Chappaz, ministre déléguée chargée de l’intelligence artificielle et du numérique.
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE Mme Sylvie Vermeillet
2. Mise au point au sujet d’un vote
3. Communication relative à une commission mixte paritaire
4. Accord-cadre avec les Nations unies. – Adoption définitive en procédure d’examen simplifié et en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
5. Programmation pour la refondation de Mayotte et Département-Région de Mayotte. – Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi et d’un projet de loi organique dans les textes de la commission
projet de loi de programmation pour la refondation de mayotte
Demande de priorité des articles 23 et 24. – Mme Muriel Jourda, présidente de la commission des lois ; M. Manuel Valls, ministre d’État, ministre des outre-mer. – La priorité est ordonnée.
Amendement n° 25 de M. Saïd Omar Oili. – Rejet.
Amendement n° 114 de Mme Evelyne Corbière Naminzo. – Rejet.
Amendement n° 58 de Mme Antoinette Guhl. – Rejet.
Amendement n° 133 de M. Saïd Omar Oili. – Rejet.
Amendement n° 26 de M. Saïd Omar Oili. – Rejet.
Amendement n° 150 de Mme Mélanie Vogel. – Rejet.
Amendement n° 140 rectifié de Mme Sophie Briante Guillemont. – Rejet.
Amendement n° 163 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 27 de M. Saïd Omar Oili. – Rejet.
Amendement n° 57 de Mme Antoinette Guhl. – Rejet.
Amendement n° 87 de M. Saïd Omar Oili. – Rejet.
Amendement n° 91 de M. Saïd Omar Oili. – Rejet.
Amendement n° 92 de M. Saïd Omar Oili. – Rejet.
Amendement n° 93 de M. Saïd Omar Oili. – Adoption.
Amendement n° 28 de M. Saïd Omar Oili. – Adoption.
Amendement n° 29 de M. Saïd Omar Oili. – Rejet.
Amendement n° 162 du Gouvernement. – Adoption.
Amendement n° 30 de M. Saïd Omar Oili. – Rejet.
Amendement n° 59 de Mme Antoinette Guhl. – Rejet.
Amendement n° 94 de M. Saïd Omar Oili. – Rejet.
Amendement n° 60 de Mme Antoinette Guhl. – Rejet.
Amendement n° 95 de M. Saïd Omar Oili. – Rejet.
Amendement n° 61 de Mme Antoinette Guhl. – Rejet.
Amendement n° 112 de Mme Evelyne Corbière Naminzo. – Rejet.
Amendement n° 96 de M. Saïd Omar Oili. – Rejet.
Amendement n° 24 de Mme Micheline Jacques. – Adoption.
Amendement n° 123 de M. Saïd Omar Oili. – Adoption.
Amendement n° 117 de Mme Mélanie Vogel. – Adoption.
Amendement n° 119 de Mme Mélanie Vogel. – Rejet.
Amendement n° 124 de M. Saïd Omar Oili. – Rejet.
Amendement n° 116 de Mme Mélanie Vogel. – Rejet.
Amendement n° 88 de M. Saïd Omar Oili. – Adoption.
Amendement n° 89 de M. Saïd Omar Oili. – Adoption.
Amendement n° 90 de M. Saïd Omar Oili. – Rejet.
Amendement n° 138 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.
Amendement n° 139 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.
Amendement n° 135 de M. Saïd Omar Oili. – Adoption.
Amendement n° 134 de M. Saïd Omar Oili. – Rejet.
Amendement n° 136 de M. Saïd Omar Oili. – Rejet.
Amendement n° 125 de M. Saïd Omar Oili. – Rejet.
Amendement n° 62 de Mme Antoinette Guhl. – Rejet.
Amendement n° 129 de M. Saïd Omar Oili. – Rejet.
Amendement n° 128 de M. Saïd Omar Oili. – Rejet.
Amendement n° 127 de M. Saïd Omar Oili. – Rejet.
Amendement n° 126 de M. Saïd Omar Oili. – Rejet.
Amendement n° 130 de M. Saïd Omar Oili. – Rejet.
PRÉSIDENCE DE Mme Sylvie Robert
Amendement n° 159 du Gouvernement. – Rejet.
Amendement n° 155 rectifié bis du Gouvernement. – Adoption.
Amendement n° 131 de M. Saïd Omar Oili. – Devenu sans objet.
Amendement n° 132 de M. Saïd Omar Oili. – Devenu sans objet.
Amendement n° 110 de Mme Evelyne Corbière Naminzo. – Rejet.
Adoption de l’ensemble de l’article et du rapport annexé, modifié.
Amendement n° 48 de Mme Salama Ramia. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Amendement n° 32 rectifié de Mme Sophie Briante Guillemont. – Rejet.
Amendement n° 33 rectifié de Mme Sophie Briante Guillemont. – Rejet.
Adoption de l’article.
Amendement n° 10 de Mme Corinne Narassiguin. – Rejet.
Adoption de l’article.
Amendement n° 104 de Mme Evelyne Corbière Naminzo. – Rejet.
Amendement n° 103 de Mme Evelyne Corbière Naminzo. – Rejet.
Amendement n° 154 rectifié de Mme Mélanie Vogel. – Rejet.
Amendement n° 152 de Mme Mélanie Vogel. – Rejet.
Amendement n° 81 de Mme Evelyne Corbière Naminzo. – Rejet.
Amendement n° 34 rectifié de Mme Sophie Briante Guillemont. – Rejet.
Adoption de l’article.
Amendement n° 98 de Mme Evelyne Corbière Naminzo. – Rejet.
Amendement n° 66 de M. Joshua Hochart. – Rejet.
Adoption de l’article.
Amendement n° 76 de M. Christopher Szczurek. – Rejet.
Amendement n° 102 de Mme Evelyne Corbière Naminzo. – Rejet.
Amendement n° 35 rectifié de Mme Sophie Briante Guillemont. – Rejet.
Amendement n° 36 rectifié de Mme Sophie Briante Guillemont. – Rejet.
Amendement n° 67 de M. Joshua Hochart. – Rejet.
Amendement n° 44 rectifié de Mme Sophie Briante Guillemont. – Rejet.
Amendement n° 146 de Mme Mélanie Vogel. – Rejet.
Amendement n° 156 du Gouvernement. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Amendement n° 38 rectifié de Mme Sophie Briante Guillemont. – Rejet.
Amendement n° 148 de Mme Mélanie Vogel. – Rejet.
Amendement n° 107 de Mme Evelyne Corbière Naminzo. – Rejet.
Amendement n° 149 de Mme Mélanie Vogel. – Rejet.
Adoption de l’article.
6. Modification de l’ordre du jour
Suspension et reprise de la séance
7. Programmation pour la refondation de Mayotte et Département-Région de Mayotte – Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi et d’un projet de loi organique dans les textes de la commission
Amendement n° 1 de Mme Corinne Narassiguin. – Rejet.
Amendement n° 39 rectifié de Mme Sophie Briante Guillemont. – Rejet.
Amendement n° 164 de la commission. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Amendement n° 113 de Mme Evelyne Corbière Naminzo. – Rejet.
Amendement n° 13 de Mme Viviane Artigalas. – Rejet.
Amendement n° 40 rectifié de Mme Sophie Briante Guillemont. – Rejet.
Amendement n° 83 de Mme Evelyne Corbière Naminzo. – Rejet.
Adoption de l’article.
Amendement n° 45 rectifié de Mme Sophie Briante Guillemont. – Retrait.
Amendement n° 72 rectifié de M. Joshua Hochart. – Non soutenu.
Article 23 (priorité) – Adoption.
Amendement n° 47 rectifié de Mme Sophie Briante Guillemont. – Retrait.
Article 24 (priorité) – Adoption.
Amendement n° 108 de Mme Evelyne Corbière Naminzo. – Rejet.
Amendement n° 153 de Mme Mélanie Vogel. – Rejet.
Adoption de l’article.
Amendement n° 109 de Mme Evelyne Corbière Naminzo. – Rejet.
Amendement n° 41 rectifié de Mme Sophie Briante Guillemont. – Rejet.
Adoption de l’article.
Amendement n° 77 de M. Christopher Szczurek. – Non soutenu.
Amendement n° 121 de Mme Mélanie Vogel. – Rejet.
Adoption de l’article.
Amendement n° 137 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.
Amendement n° 84 de Mme Annie Le Houerou. – Rejet.
Amendement n° 16 de Mme Evelyne Corbière Naminzo. – Rejet.
Adoption de l’article.
Amendement n° 70 de M. Joshua Hochart. – Rejet.
Amendement n° 75 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.
Amendement n° 115 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.
Amendement n° 142 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.
Amendement n° 86 de Mme Annie Le Houerou. – Rejet.
Adoption de l’article.
Amendement n° 49 de Mme Salama Ramia. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 78 de M. Christopher Szczurek. – Non soutenu.
Amendement n° 143 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.
Amendement n° 65 de Mme Corinne Imbert. – Adoption de l’amendement rédigeant l’article.
Adoption de l’article.
Amendement n° 157 du Gouvernement. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 158 du Gouvernement. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 111 de Mme Evelyne Corbière Naminzo. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Amendement n° 161 du Gouvernement. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 3 de M. Victorin Lurel. – Rejet.
Amendement n° 2 de M. Victorin Lurel. – Rejet.
Amendement n° 46 rectifié de Mme Sophie Briante Guillemont. – Rejet.
Adoption de l’article.
Amendement n° 56 de Mme Viviane Malet. – Retrait.
Articles 23 et 24 (précédemment examinés)
Amendement n° 73 de M. Joshua Hochart. – Non soutenu.
Amendement n° 79 de M. Christopher Szczurek. – Non soutenu.
Amendement n° 122 de Mme Mélanie Vogel. – Rejet.
Adoption de l’article.
Amendement n° 165 de la commission. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Amendement n° 11 de M. Saïd Omar Oili. – Rejet.
Amendement n° 12 de Mme Corinne Narassiguin. – Rejet.
Adoption de l’article.
Amendement n° 166 de la commission. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Demande de seconde délibération de l’article 1er et du rapport annexé. – M. Manuel Valls, ministre d’État ; Mme Agnès Canayer, rapporteur. – Adoption.
Amendement n° A-1 du Gouvernement. – Adoption.
Adoption de l’ensemble de l’article et du rapport annexé, modifié.
Renvoi de la suite de la discussion.
projet de loi organique relatif au département-région de mayotte
Amendement n° 1 de la commission. – Adoption de l’amendement rédigeant l’article.
Renvoi de la suite de la discussion.
compte rendu intégral
Présidence de M. Alain Marc
vice-président
Secrétaires :
M. Guy Benarroche,
Mme Catherine Di Folco.
1
Questions orales
M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.
revalorisation des astreintes hospitalières
M. le président. La parole est à Mme Anne Souyris, auteure de la question n° 486, adressée à M. le ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de la santé et de l’accès aux soins.
Mme Anne Souyris. Madame la ministre, je souhaite vous interroger sur la revalorisation des astreintes hospitalières.
L’ensemble des organisations syndicales représentatives des praticiens hospitaliers et hospitalo-universitaires ont déposé le 11 avril dernier un préavis de grève illimitée de la permanence des soins, à compter du 1er mai. Cette mobilisation fait suite à l’inaction prolongée du ministère chargé de la santé quant à la revalorisation des astreintes médicales et des déplacements qui leur sont liés, pourtant promise et validée depuis six mois.
Le Gouvernement s’était engagé à revaloriser ces astreintes, des financements ayant été inscrits dans les lois de financement de la sécurité sociale (LFSS) de 2024 et de 2025.
Alors que les praticiens hospitaliers assurent plus de 80 % de la permanence des soins, dont 70 % sous forme d’astreintes, les syndicats exigeaient une majoration immédiate et rétroactive à compter du 1er janvier 2024 de la totalité des forfaits liés aux astreintes.
À la mi-avril, un protocole d’accord a finalement été signé entre les organisations syndicales et le ministère. Hier encore, des négociations avaient lieu. Les syndicats ont obtenu que la revalorisation ne soit pas de nouveau reportée et que l’indemnité forfaitaire de base ainsi que les astreintes forfaitisées soient respectivement augmentées de 50 % et de 30 % le 1er juillet prochain.
Toutefois, des questions subsistent. Comment réguler les astreintes sans créer d’inégalités liées à des effets de bord ? Les actes de télémédecine effectués lors d’astreintes et les déplacements seront-ils décomptés du temps de travail ? Les forfaits liés aux astreintes très pénibles seront-ils étudiés au niveau régional plutôt qu’à celui de l’établissement ?
Madame la ministre, pour quelles raisons le Gouvernement a-t-il autant attendu avant de revaloriser les astreintes ? Selon quel calendrier précis et en procédant à quelle concertation compte-t-il répondre aux attentes légitimes des praticiens hospitaliers et hospitalo-universitaires ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de l’emploi. Madame la sénatrice, vous soulignez à juste titre l’attente forte des praticiens hospitaliers et hospitalo-universitaires quant à la revalorisation des astreintes. Je réaffirme, au nom de mon collègue Yannick Neuder, que cette revalorisation aura bien lieu, conformément aux engagements du Gouvernement.
Le ministère de la santé a mené une concertation avec les organisations syndicales et les différentes fédérations à la suite de la remise d’un rapport de l’inspection générale des affaires sociales (Igas). La réforme entrera en vigueur le 1er novembre 2025 et les textes réglementaires y afférents seront publiés au printemps prochain, comme prévu.
Celle-ci se fixe trois objectifs : la simplification du régime d’indemnisation ; la prise en compte de l’intensité des astreintes ; une forfaitisation plus fine, laissant aux établissements des marges de souplesse pour fixer les indemnités dans une fourchette allant de 70 euros à 280 euros.
Le Gouvernement est également conscient de l’urgence exprimée par les professionnels de santé. Après le dépôt du préavis de grève, le ministre a signé un protocole d’accord avec les organisations syndicales instaurant une mesure transitoire du 1er juillet au 31 octobre prochains. Il prévoit une revalorisation de 50 % de l’indemnité forfaitaire de base et une revalorisation de 30 % des astreintes déjà forfaitisées. L’arrêté d’application sera publié en juin prochain, afin que cette mesure soit effective dès cet été.
Le Gouvernement sera au rendez-vous, avec un calendrier clair : une mesure provisoire sera appliquée dès juillet, sans attendre l’automne, et une réforme plus pérenne visera ensuite à répondre aux attentes légitimes des hospitaliers et aux engagements pris.
gestion des déchets d’activités de soins
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Corbisez, auteur de la question n° 510, adressée à M. le ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de la santé et de l’accès aux soins.
M. Jean-Pierre Corbisez. Ma question porte sur la gestion des déchets d’activités de soins à risques infectieux (Dasri).
L’ensemble de la réglementation et des recommandations de bonnes pratiques applicables au tri des déchets d’activités de soins sont répertoriées dans le guide Dasri, que la direction générale de la santé est en train d’actualiser.
Ces déchets, en raison de leur particularité et des dangers qu’ils présentent pour les professionnels de santé et les opérateurs de gestion de la filière ainsi que pour la population en général, bénéficient d’un statut de « déchets dangereux » et du principe de précaution inscrit dans la législation européenne relative à leur traitement.
Pourtant, avant même tout changement de réglementation, de nombreux professionnels constatent sur le terrain le déclassement d’un grand nombre de ces déchets et leur réorientation vers la filière des déchets non dangereux.
Cette situation pose deux problèmes majeurs : d’une part, une complexification du geste de tri pour les professionnels de santé déjà particulièrement sous pression ; d’autre part, un risque important pour les opérateurs de la filière, chargés de la collecte, du traitement et du tri des déchets, qui seraient exposés à des déchets dangereux à risque infectieux.
Des accidents ont déjà été recensés dans plusieurs centres de traitement de déchets ménagers, où des Dasri sont apparus à la suite d’erreurs de tri. Le déclassement en cours pourrait multiplier le nombre d’accidents de ce type durant les prochaines années.
Madame la ministre, les professionnels de santé pourraient-ils voir leur responsabilité engagée en cas d’accident lié au tri des Dasri ? Quelles mesures le Gouvernement compte-t-il prendre pour lutter contre ces risques ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de l’emploi. Monsieur le sénateur Corbisez, vous soulevez une question de santé publique cruciale tant pour la sécurité des professionnels de santé et des opérateurs de collecte que pour la population et l’environnement.
La direction générale de la santé a engagé dès 2022 une révision complète du guide national, qui date de 2009. Ce nouveau guide, fruit d’un travail collaboratif, se voulant à la fois pédagogique et rigoureux, présentant des exemples très concrets pour aider au tri, sera publié très prochainement.
En ce qui concerne l’engagement de la responsabilité des professionnels de santé en cas d’accident, l’évaluation du risque infectieux repose sur le producteur du déchet, conformément aux codes de la santé publique et de l’environnement. Ce principe, qui n’est pas nouveau, ne sera pas remis en cause, car le producteur du déchet est le plus à même d’apprécier la nature et la dangerosité dudit déchet, en fonction du contexte dans lequel celui-ci évolue.
Pour autant, cela ne signifie pas que les professionnels de santé seront isolés. Le guide, qui s’appuie sur des avis du Haut Conseil de la santé publique rendus en 2023 et en 2024, fournira des critères objectifs et des exemples pour sécuriser les décisions. En cas de doute, la règle est claire : le déchet doit être orienté vers la filière Dasri.
Des formations de terrain appuyées par les agences régionales de santé seront également organisées. Ce sujet reste donc, monsieur le sénateur, une priorité de santé et de sécurité publiques.
adapter les critères d’éligibilité à l’aide aux apprentis pour financer leur permis à la récente réforme permettant de passer le permis de conduire dès l’âge de 17 ans
M. le président. La parole est à Mme Marie-Lise Housseau, auteure de la question n° 496, adressée à Mme la ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de l’emploi.
Mme Marie-Lise Housseau. Madame la ministre, ma question concerne la mise en cohérence des critères d’éligibilité à l’aide au financement du permis de conduire pour les apprentis, qui existe depuis le 1er janvier 2019, et de la récente réforme du permis de conduire.
Depuis le 1er janvier 2024, il est possible de passer son permis à partir de 17 ans au lieu de 18 ans. Cette mesure, destinée à faciliter l’insertion professionnelle des jeunes, n’a pourtant pas été suivie de la nécessaire adaptation des dispositifs d’aide existants pour les apprentis.
Concrètement, ainsi que le centre de formation à l’apprentissage de la chambre de métiers et de l’artisanat du Tarn m’en a fait part, lorsqu’un apprenti de 17 ans demande à bénéficier de l’aide financière de 500 euros pour le permis de conduire, son dossier est systématiquement rejeté par les services de l’Agence de services et de paiement (ASP). Comment et dans quel délai le ministère envisage-t-il de résoudre cette incohérence ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de l’emploi. Madame la sénatrice, les apprentis majeurs inscrits dans une école de conduite pour la préparation des épreuves du permis de conduire peuvent actuellement bénéficier d’une aide d’un montant forfaitaire de 500 euros. Ce dispositif est important pour de nombreux jeunes, en particulier pour ceux qui habitent dans un département rural tel que le Tarn.
Cette aide vient en complément d’autres dispositifs déployés par plusieurs régions ou départements. Pour faire un point sur le foisonnement des diverses aides existantes, Matignon a demandé aux services de plusieurs ministères de cartographier, par département, l’ensemble des aides dont peuvent bénéficier les jeunes de 17 ans et de 18 ans.
Cette aide a pour objectif de faciliter le déplacement, la mobilité et le transport des apprentis, afin d’améliorer leur insertion professionnelle. Pour l’instant, son ouverture aux jeunes âgés de 17 ans est en suspens, ce que je regrette. Nous aborderons de nouveau ce sujet à l’automne prochain, lors de l’examen de la loi de finances pour 2026, en nous appuyant sur la cartographie des différents régimes existants en fonction des collectivités territoriales.
Soyez-en assurée, madame la sénatrice, je suis vraiment engagée sur cette question, car dans des départements ruraux tels que le vôtre, le transport est un frein à la formation et à l’insertion professionnelle de nos jeunes.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Lise Housseau, pour la réplique.
Mme Marie-Lise Housseau. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse, qui me satisfait partiellement. J’appelle votre attention sur le fait que, dans nos départements ruraux, il est difficile de se déplacer. Les horaires et les lieux des formations ne se prêtent souvent pas aux déplacements en transports en commun. Il s’agit d’une question de justice sociale, et tout ce que vous pourrez faire sur ce sujet sera le bienvenu.
nécessité de réactiver la prépa-apprentissage
M. le président. La parole est à Mme Laure Darcos, auteure de la question n° 505, adressée à Mme la ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de l’emploi.
Mme Laure Darcos. Madame la ministre, la prépa-apprentissage, supprimée depuis le 31 décembre 2024, permettait aux jeunes de 16 à 29 ans et aux personnes en situation de handicap sans qualification de réussir leur entrée en apprentissage grâce à un accompagnement d’une durée variant de quelques jours à plusieurs mois.
Les personnes concernées avaient la possibilité d’acquérir des compétences de base sociales, comportementales et techniques, tout en découvrant le monde du travail grâce à des stages en entreprise. À l’instar du centre de formation d’apprentis (CFA) de la faculté des métiers de l’Essonne, de nombreuses structures étaient partenaires de ce dispositif utile tant pour les jeunes que pour les entreprises.
Depuis le 1er janvier 2025, nombre de ces jeunes, issus de quartiers prioritaires de la politique de la ville ou de zones de revitalisation rurale, et nombre de personnes handicapées, dont les parcours de vie et de formation sont les plus difficiles, se trouvent privés de la possibilité de se former et de s’insérer dans la société.
À titre d’exemple, le CFA de la faculté des métiers de l’Essonne accompagnait chaque année 150 personnes vers la formation, l’apprentissage et l’emploi. Le bilan de ce dispositif était excellent, avec un taux de sortie positif de 80 % en apprentissage, en CDD ou en CDI.
Plutôt que de supprimer purement et simplement ce dispositif, n’aurait-il pas été plus judicieux de réinterroger ses contours pour le faire évoluer, d’identifier les acteurs les plus pertinents et expérimentés afin de cibler le financement ?
La réactivation de ce dispositif, sous une forme ou une autre, est-elle dans les intentions du Gouvernement ? Si tel n’est pas le cas, l’expertise développée par les CFA au bénéfice de ces publics disparaîtra. In fine, le coût pour les finances publiques sera bien plus lourd puisque, faute de solution, ce sont autant de personnes qui seront durablement à la charge de la solidarité nationale, alors qu’elles se battent souvent plus que les autres pour s’en sortir.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de l’emploi. Madame la sénatrice Darcos, la prépa-apprentissage a été réalisée sous forme d’appel à projets de 2019 à 2023, le financement des projets ayant été prolongé jusqu’à la fin de l’année 2024. Ce dispositif était conçu comme un sas d’entrée dans l’apprentissage pour 20 000 jeunes par an.
Ainsi que vous l’évoquez, la nature des accompagnements était très hétérogène en fonction des départements. Le dispositif fonctionnait manifestement dans le vôtre, mais ce n’était pas le cas dans toute la France. Certaines actions consistaient en un accompagnement court, d’autres portaient sur un volet de formation très développé, ce qui peut conduire à se demander si ces formations correspondaient bien à leur objectif de constituer un sas d’entrée, voire si elles ne faisaient pas doublon avec d’autres dispositifs.
Il faut également se rappeler que les résultats n’ont été que très partiellement probants, avec un taux national d’entrée en alternance de seulement 35 %, sans même prendre en compte les ruptures précoces, plus fréquentes pour les jeunes qui en étaient issus. Si ces chiffres contrastent avec le taux d’insertion supérieur à 80 % dont vous faites part, le Gouvernement doit tenir compte, de manière très précautionneuse, de l’application du dispositif sur l’ensemble du territoire.
Madame la sénatrice, j’ai plusieurs éléments à vous apporter en guise de réponse. D’abord, nous veillerons à privilégier une logique de sortie et non d’entrée. Ce qui m’intéresse, ce n’est pas tellement de savoir que 20 000 jeunes entrent dans un dispositif, mais plutôt d’étudier le taux d’insertion à sa sortie. En Essonne, le dispositif fonctionnait peut-être, mais ce n’était pas le cas dans les autres départements en général.
Ensuite, le réseau pour l’emploi réunit enfin France Travail, les missions locales et les conseils départementaux afin d’améliorer le fléchage et l’orientation des jeunes concernés.
Enfin, plutôt que d’empiler les dispositifs à destination des jeunes, tels que la prépa-apprentissage, le mentorat ou les parrainages, mieux vaut se concentrer sur les dispositifs de droit commun – apprentissage, écoles de production, écoles de la deuxième chance, Établissement pour l’insertion dans l’emploi (Epide) –, ou sur la préparation opérationnelle à l’emploi individuelle proposée par France Travail. Ces dispositifs fonctionnent et nous devons les développer très massivement pour favoriser l’emploi de nos jeunes.
transport des élèves en situation de handicap
M. le président. La parole est à M. Hervé Reynaud, auteur de la question n° 522, adressée à Mme la ministre déléguée auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée de l’autonomie et du handicap.
M. Hervé Reynaud. Madame la ministre, je souhaite vous alerter sur les difficultés de plus en plus grandes que rencontrent les départements pour exercer leurs compétences en matière de transport des élèves handicapés.
Dans le département de la Loire, le nombre d’élèves à prendre en charge a doublé en moins de dix ans, pour atteindre le chiffre de 1 200 élèves. Le budget qui y est consacré s’élève aujourd’hui à 8,5 millions d’euros, sans aucune compensation financière.
L’inclusion scolaire, les nouveaux dispositifs intégrés, les stages et les horaires aménagés supposent une adaptation constante des moyens à mobiliser. Par ailleurs, ce transport à vocation collective impose la formation de conducteurs, qui sont souvent de jeunes retraités ou des employés présentant des profils assez précaires. Leur professionnalisation et leur fidélisation constituent un enjeu majeur afin d’assurer l’entière sécurité des trajets.
Ces contraintes entraînent une augmentation du coût du service. Si l’aide aux véhicules particuliers apparaît régulièrement comme une solution pragmatique de qualité lorsque l’organisation des trajets par la collectivité ne donne pas satisfaction aux familles, cet autre dispositif représente là encore un coût non négligeable.
Aussi, madame la ministre, quelles actions et quels moyens le Gouvernement pourrait-il mettre en œuvre afin d’aider les départements à assurer pleinement cette compétence majeure en matière de solidarité humaine ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de l’emploi. Monsieur le sénateur Reynaud, l’organisation et le financement des transports scolaires relèvent des compétences des collectivités territoriales, en premier lieu des régions. La prise en charge des frais de déplacement des élèves handicapés qui fréquentent un établissement d’enseignement général, agricole ou professionnel, public ou privé, relève des conseils départementaux, dont nous connaissons les difficultés financières.
Le Gouvernement s’engage à conduire des travaux avec les différents acteurs – associations, collectivités, organismes gestionnaires – autour de ce sujet, afin d’identifier les leviers d’optimisation, de financement et de recrutement. Vous avez en effet souligné que cette filière faisait face à des difficultés de recrutement, alors qu’elle pourrait constituer la dernière partie de carrière des travailleurs de plus de 55 ans ou déjà à la retraite.
Ces travaux s’appuieront sur les récentes recommandations de l’Igas relatives à la transformation de l’offre médico-sociale, ainsi que sur un soutien technique financé par la Commission européenne pour s’inspirer de solutions trouvées ailleurs en Europe.
M. le président. La parole est à M. Hervé Reynaud, pour la réplique.
M. Hervé Reynaud. J’insiste sur les difficultés que rencontrent les départements pour exercer ces solidarités humaines.
Nous prônons l’inclusion des élèves handicapés et défendons l’idée de construire une communauté de vie. Pour que les familles et ces enfants puissent évoluer en toute sécurité, il est toutefois important que les départements puissent assumer financièrement cette compétence, dont l’exercice obère d’autant les solidarités territoriales qui vont de pair.
Je lance un appel à l’aide pour que les départements puissent travailler dans de meilleures conditions. (M. Damien Michallet applaudit.)
réglementation relative à la prévention des risques liés aux bruits et aux sons amplifiés par les organisateurs de festivals
M. le président. La parole est à M. Damien Michallet, auteur de la question n° 540, transmise à Mme la ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de l’emploi.
M. Damien Michallet. Madame la ministre, chaque année, comme partout en France, des communes de l’Isère organisent ou accueillent des animations culturelles, lors de festivals ou de concerts.
Or les maires sont de plus en plus souvent confrontés à des plaintes de riverains, qui vont parfois jusqu’à réclamer l’annulation totale de ces événements en se fondant sur de potentiels dépassements des valeurs limites des émissions sonores.
Face à ces revendications, l’application du code de la santé publique, du code de l’environnement et du code général des collectivités territoriales complique la tâche des élus locaux. Cela conduit à des fragilités juridiques, qui exposent dangereusement ces événements à des annulations.
Madame la ministre, je n’ai pas le temps de développer précisément tout le cadre juridique concerné, que vous connaissez parfaitement. Permettez-moi de poser simplement un constat, un problème, une question.
D’abord, le constat : ces animations, ces concerts, ces festivals sont indispensables aux territoires, pour y faire vivre l’économie, créer du lien social et amener la culture au cœur de la province.
Ensuite, le problème : en l’état de la réglementation, aucune dérogation formelle ne permet d’assurer le maintien de l’événement. Un seul requérant peut ainsi obtenir devant le tribunal administratif la suspension de l’événement ou son annulation jusqu’à la dernière minute, voire pendant l’événement.
Il faut donc accompagner les élus et les organisateurs pour les aider à trouver les bonnes mesures, en leur donnant par exemple la capacité de dépasser ponctuellement les valeurs limites, en accord avec la préfecture et l’agence régionale de santé (ARS), habituées à gérer ce genre de dépassements afin de les rendre tolérables et acceptables pour tous.
J’en viens à la question : madame la ministre, quels sont les moyens dont disposent les élus locaux pour sécuriser l’organisation de tels événements sur leur territoire, pour leur permettre d’éviter tout risque contentieux ou toute annulation de dernière minute ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de l’emploi. Monsieur le sénateur, les festivals sont encadrés dans le code de la santé publique, au même titre que d’autres activités potentiellement bruyantes qui doivent respecter les valeurs limites d’émergence sonore globale définies par les textes.
Les services de l’État veillent également à encourager la concertation avec les riverains, en tenant compte, par exemple, de la bonne volonté des organisateurs et des progrès enregistrés d’année en année dans de nombreux festivals. La propagation du son en milieu ouvert présente toujours des impondérables.
Ces festivals sont aussi des facteurs d’attractivité économique et culturelle pour certains territoires. Dès lors, il faut effectivement jongler avec un dilemme.
L’association Agi-son, qui a piloté une expérimentation avec le festival Marsatac à Marseille afin de limiter les nuisances sonores pour les riverains de festivals, a présenté ses conclusions aux ministères de la culture, de l’environnement et de la santé. Elle constate qu’il est en effet difficile pour certains festivals de respecter les seuils d’émergence globaux définis dans le code de la santé publique, et notamment de limiter les vibrations engendrées par les basses fréquences.
Dans ce contexte, sous l’égide de la direction générale de la création artistique, associant la direction générale de la santé et la direction générale de la prévention des risques, un groupe de travail réunit des professionnels pour proposer des évolutions concrètes de la réglementation, qui s’inscrivent dans le respect des riverains et des participants, dans la protection de la santé, et dans un exercice raisonné de l’activité musicale ou festivalière. Les propositions de ce groupe de travail sont attendues pour le mois d’octobre 2025.
coûts de l’archéologie préventive pour les collectivités territoriales
M. le président. La parole est à M. Fabien Genet, auteur de la question n° 482, adressée à Mme la ministre de la culture.
M. Fabien Genet. Madame la ministre, ma question s’adresse à Mme la ministre de la culture. Si l’archéologie préventive joue un rôle fondamental dans la préservation de notre patrimoine, son coût représente une charge croissante pour de nombreuses collectivités territoriales. Les pratiques tarifaires en vigueur pèsent lourdement sur les finances locales et freinent la réalisation de nombreux projets d’aménagement.
À l’heure où les ressources publiques se raréfient, il est légitime de s’interroger sur la soutenabilité de ces dépenses pour les communes et sur leurs conséquences pour les contribuables.
Permettez-moi de vous rapporter des exemples concrets du département de Saône-et-Loire, qui mettent en lumière les difficultés des communes concernées à supporter les tarifs de ces travaux.
Dans l’une de ces communes, l’étude préalable à l’aménagement d’un espace public de 1 000 mètres carrés a été évaluée à 252 000 euros. Ce montant a été jugé d’autant plus disproportionné qu’il ne concernait que 10 % de la superficie totale du chantier et que l’entreprise bénéficiait de la mise à disposition gratuite du matériel nécessaire par la municipalité.
Dans une autre commune, le prix proposé atteignait 690 000 euros toutes taxes comprises pour 1 400 mètres carrés de fouilles, alors que l’estimation initiale était inférieure de moitié. Cela a conduit au classement sans suite de l’appel d’offres.
Un troisième exemple : pour 4 900 mètres carrés à aménager, des devis de 606 000 euros à plus de 900 000 euros, alors que l’estimation initiale était de 300 000 euros. Là aussi, l’appel d’offres a été annulé…
Aussi, madame la ministre, quelles mesures le Gouvernement envisage-t-il de prendre afin de garantir un meilleur équilibre des mises en concurrence dans le secteur de l’archéologie préventive et d’encadrer les coûts qui s’y pratiquent, afin que nos communes ne soient plus confrontées à des charges aussi élevées pour réaliser leurs projets ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de l’emploi. Monsieur le sénateur Genet, en l’absence de la ministre de la culture, je me bornerai à lire une fiche préparée par ses services. J’avoue mon humilité devant le sujet de l’archéologie préventive…
Lorsqu’elles sont nécessaires, les fouilles sont réalisées par l’Institut national de recherches archéologiques préventives ou par des opérateurs de services librement choisis par les collectivités territoriales. Comme elles constituent une activité concurrentielle, l’État ne peut en réguler le prix.
Le financement de ces fouilles repose essentiellement sur des maîtres d’ouvrage, sur la base de prix établis par des opérateurs présents sur le marché. Les aménageurs peuvent bénéficier d’aides financières attribuées par le Fonds national pour l’archéologie préventive sous la forme de prises en charge ou de subventions. En moyenne, entre 2016 et 2024, environ 44 % des fouilles préventives ont reçu un soutien financier de l’État et 44 millions d’euros d’aides ont été accordés en 2024.
Enfin, le périmètre d’intervention de ce fonds a été élargi en juillet 2021, pour permettre aux communes situées en zone de revitalisation rurale de donner mandat à l’opérateur de fouilles d’encaisser directement les sommes accordées, afin d’assurer une moindre sortie de trésorerie pour la commune.
Toutefois, en tant que ministre du travail et de l’emploi, je suis bien consciente que cette réponse mérite d’être étayée, au vu des charges qui incombent aux collectivités. Ces retards ralentissent des projets de développement économique, créateurs d’emplois, dont les territoires ont besoin. Loin de constituer un facteur d’attractivité pour nos investisseurs, ils sont un obstacle.
M. le président. La parole est à M. Fabien Genet, pour la réplique.
M. Fabien Genet. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse. Il est vrai qu’interroger la ministre de la culture en plein Festival de Cannes n’était peut-être pas le plus opportun… (Sourires.)
Néanmoins, je note que le Gouvernement est à l’écoute. À l’heure où il appelle les collectivités locales à faire des économies, la meilleure façon d’y parvenir est encore de réduire leurs charges.
créole et ratification de la charte européenne des langues régionales ou minoritaires par la france
M. le président. La parole est à M. Frédéric Buval, auteur de la question n° 429, adressée à Mme la ministre de la culture.
M. Frédéric Buval. Ma question concerne la non-ratification de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires par la France. Adoptée par le Conseil de l’Europe en 1992, cette charte vise à protéger et à promouvoir les langues régionales au sein des États membres.
Bien que la France l’ait signée en 1999, elle ne l’a toujours pas ratifiée, ce qui empêche malheureusement la mise en œuvre de ses dispositions sur le territoire national, la Charte encourageant notamment l’utilisation des langues régionales dans l’éducation, les médias et les institutions publiques.
Cette ratification suscite beaucoup d’attentes, notamment pour la préservation et la valorisation du créole. Cette langue régionale française, parlée au quotidien par des millions de personnes dans les territoires d’outre-mer, fait partie de ces langues dont la survie et la transmission sont essentielles pour la diversité culturelle de notre pays.
Le créole est utilisé pour transmettre des savoirs, des traditions et des pratiques culturelles, notamment dans la musique, la poésie et les arts. En 2010, l’Unesco l’a même inscrit dans la liste des langues patrimoniales mondiales, dans le cadre de son programme Mémoire du monde.
La ratification de la Charte pourrait donc offrir une opportunité de renforcer la place du créole, d’assurer sa préservation et sa transmission, tout en respectant l’unité nationale de la langue française.
Si certains soulèvent l’obstacle constitutionnel et notamment le principe d’indivisibilité de la République garanti par l’article 2 de la Constitution, qui dispose que « la langue de la République est le français », l’article 75-1 de la même Constitution reconnaît que « les langues régionales appartiennent au patrimoine de la France ».
Il s’agit donc de trouver un juste équilibre permettant de protéger et de promouvoir les langues régionales, via un ensemble de mesures respectant les droits individuels et collectifs, sans pour autant remettre en cause la place centrale du français, fondement de notre modèle républicain. Ma question est simple, madame la ministre : comment le Gouvernement compte-t-il traduire concrètement cette reconnaissance dans ses politiques publiques et quelles solutions pourrait-on envisager pour surmonter les obstacles à la ratification de la Charte, notamment en matière législative ou constitutionnelle ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de l’emploi. Monsieur le sénateur Buval, vous avez raison, la France n’a pas ratifié la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires, mais elle s’efforce d’appliquer pleinement les trente-neuf engagements qu’elle a pris au moment de la signature de cette convention, qui concernent l’enseignement, la culture, les médias, la vie sociale et économique ou les services publics. Nous parlons en effet de langues vivantes et répandues, en particulier dans votre département, monsieur le sénateur.
Le veto du Conseil constitutionnel à la ratification de cette charte portait précisément sur les principes d’indivisibilité de la République, d’égalité devant la loi, d’unicité du peuple français et d’usage officiel de la langue française, non sur l’ensemble du texte. Dans ce cadre, le Gouvernement met tout en œuvre pour que nos politiques publiques soient aussi au service de la diversité culturelle et linguistique.
Au cours des dernières années, faut-il le rappeler ? une dynamique nouvelle a vu le jour, d’abord grâce à l’adoption de la loi du 21 mai 2021 relative à la protection patrimoniale des langues régionales et à leur promotion, dite loi Molac, puis avec la création en 2022 du Conseil national des langues et cultures régionales, mais également avec les dispositifs État-régions, notamment la signature d’un pacte linguistique entre le ministère de la culture et La Réunion en 2023.
En outre, les états généraux du multilinguisme outre-mer permettent régulièrement des avancées dans les champs sociaux, culturels, numériques et éducatifs. Le dialogue avec les collectivités et les élus pour la promotion des langues régionales est constant et a été soutenu budgétairement avec volontarisme, au moyen d’une enveloppe de 900 000 euros jusqu’en 2022, puis de 2 millions d’euros par an.
Nous continuons donc de faire vivre le plurilinguisme dans le respect de l’unicité de la nation française, monsieur le sénateur.
désinformation relative au sida chez les jeunes
M. le président. La parole est à M. Stéphane Demilly, auteur de la question n° 477, adressée à Mme la ministre d’État, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche.
M. Stéphane Demilly. Madame la ministre, à l’occasion de sa campagne annuelle, l’association Sidaction a publié une étude très inquiétante, qui démontre la montée en puissance de la désinformation chez les jeunes concernant le VIH.
En 2023, en France, 719 personnes âgées de moins de 25 ans ont découvert leur séropositivité ; cela représente plus d’un diagnostic sur sept, une proportion qui ne cesse d’augmenter. En outre, parallèlement à la hausse des infections chez les plus jeunes, on constate un recul important des connaissances sur le VIH.
L’étude réalisée par Sidaction à ce sujet est inquiétante, pour ne pas dire édifiante : 42 % des personnes interrogées pensent encore que le virus peut se transmettre par un baiser et un tiers des personnes sondées pense que l’on peut être contaminé en partageant son assiette avec une personne séropositive. À l’inverse, trop peu de jeunes savent qu’une personne sous traitement voit sa charge virale diminuer au point de ne plus être détectée lors des analyses.
Si les avancées spécifiques des dernières années ont été incroyables, les représentations sociales, elles, continuent de se dégrader ; c’est un véritable échec collectif.
Depuis la loi du 4 juillet 2001 relative à l’interruption volontaire de grossesse et à la contraception, le code de l’éducation prévoit qu’« une information et une éducation à la sexualité sont dispensées dans les écoles, les collèges et les lycées à raison d’au moins trois séances annuelles ». Or le compte n’y est pas ! Selon un récent rapport du Conseil économique, social et environnemental, moins de 15 % des élèves en avaient bénéficié au cours des dernières années.
Par ailleurs, toujours selon l’étude de Sidaction, seulement un tiers des jeunes de 15 à 24 ans s’étaient fait dépister au cours des douze mois précédant l’étude. Or, depuis le 1er janvier 2022, le dépistage du VIH est gratuit, sans rendez-vous et sans ordonnance, dans tous les laboratoires d’analyse médicale de France. Il faut le dire et le répéter : ce dépistage est gratuit, sans rendez-vous et sans ordonnance !
Madame la ministre, comment renforcer la prévention et la sensibilisation de nos jeunes quant au VIH ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de l’emploi. Monsieur le sénateur Stéphane Demilly, je vous réponds au lieu et place de la ministre de l’éducation nationale.
Je me joins à votre constat : les chiffres sont non seulement alarmants, mais encore, pour reprendre votre expression, édifiants. Le rapport que vous évoquez confirme un constat que nous faisons également : à l’école, la lutte contre les infections sexuellement transmissibles (IST), a fortiori contre le VIH, passe d’abord par la sensibilisation, la lutte contre les fausses informations et le dépistage.
Il est d’ailleurs essentiel de combattre le non-recours à ce dépistage, alors même que celui-ci est gratuit.
C’est pourquoi le ministère de l’éducation nationale agit de concert avec ses partenaires pour promouvoir la santé de façon plus globale. La ministre d’État, ministre de l’éducation nationale, Mme Borne, et le ministre de la santé, M. Neuder, ont annoncé une série de mesures à ce sujet la semaine dernière, lors des assises de la santé scolaire.
J’en viens à la question de la sensibilisation.
Le 30 janvier dernier, le Conseil supérieur de l’éducation a adopté à l’unanimité le nouveau programme d’éducation à la vie affective et relationnelle, et à la sexualité. Ce programme inclut la prévention contre le VIH et les IST en général dès la classe de quatrième. Il permet aussi de lutter contre les fausses croyances sur la séropositivité, souvent sources de conduites à risques. Ce programme sera appliqué dès la rentrée prochaine ; il concernera tous les élèves, il sera obligatoire et consistera en au moins trois séances par an.
En outre, une page de ressources en ligne consacrée à la prévention des IST et du VIH à l’école a été publiée, afin d’accompagner au mieux le personnel de l’éducation nationale, de lui fournir toutes les informations nécessaires.
Nous sommes donc actifs sur cette question, sur la sensibilisation et la lutte contre les mauvaises informations sur la transmission des maladies sexuellement transmissibles, dès le plus jeune âge, à l’école.
compensation de la suppression du fonds de soutien aux activités périscolaires
M. le président. La parole est à M. Michel Masset, auteur de la question n° 539, adressée à Mme la ministre d’État, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche.
M. Michel Masset. Madame la ministre, je souhaite vous interroger sur la pérennité du fonds de soutien au développement des activités périscolaires, qui prendra fin le 1er septembre prochain.
Nombre de communes du Lot-et-Garonne ont opté pour la semaine de quatre jours et demi – je pense aux villes de Cancon, Monbahus ou encore Villeréal. Elles offrent aux élèves un rythme d’apprentissage plus adapté à leurs besoins, en lien avec un projet éducatif territorial.
Supprimer ce fonds de manière abrupte et sans concertation ne peut constituer une mesure satisfaisante pour nos élus locaux. Il faudrait, à tout le moins, prévoir une compensation pour assurer le maintien et la gratuité des activités périscolaires.
Dans le milieu rural du Lot-et-Garonne, il est certain que, sans financement, les associations encadrant ces activités périscolaires péricliteront ; on observe déjà un manque prégnant de bénévoles.
Certes, un protocole a été signé entre le Gouvernement et l’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité (AMF) le 8 avril dernier, mais aucune information n’a filtré à ce stade, aucune solution concrète n’a été présentée aux collectivités. Je rappelle la date d’extinction de ce fonds : le 1er septembre prochain.
Aussi, face au risque d’une désorganisation durable de la vie locale, quelles mesures le Gouvernement prévoit-il de prendre et surtout quels moyens compte-t-il mobiliser pour continuer d’accompagner financièrement les communes qui ont fait un choix courageux, voilà bientôt dix ans, pour le bien de leurs élèves et de leurs familles ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de l’emploi. Monsieur le sénateur Michel Masset, le fonds auquel vous faites référence devait contribuer à la mise en place d’activités périscolaires au moment du passage à une organisation scolaire sur quatre jours et demi. Il avait une durée limitée, la loi du 8 juillet 2013 d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République, qui l’avait créé, étant très claire à ce sujet.
Depuis le décret de 2017, la plupart des communes qui en bénéficiaient ont opté pour une organisation du temps scolaire sur quatre jours ; elles ne bénéficient donc plus de ce fonds. L’évolution observée est sensible : 20 000 communes, soit plus de 5 millions d’élèves, en ont bénéficié au cours de l’année scolaire 2016-2017 et, aujourd’hui, le nombre de communes bénéficiaires a été divisé par vingt, puisque l’on n’en compte plus que 1 200. Dans le département dont vous êtes élu, le Lot-et-Garonne, il n’y a plus qu’une quinzaine de communes qui en bénéficient…
Au total, ce dispositif représente un coût de l’ordre de 37 millions d’euros, dont la moitié est concentrée sur quinze communes, notamment Paris, qui représente à elle seule un coût de 5 millions d’euros. Il semble donc que ce fonds n’incite pas les communes à maintenir les rythmes scolaires et profite essentiellement à quelques grosses communes. C’est pourquoi son extinction avait été programmée pour la rentrée de 2023.
Toutefois, pour répondre à l’inquiétude des élus et aider les collectivités à se préparer, le Gouvernement a choisi de reporter cette échéance. Cela étant, cette décision ne remet nullement en question le principe de la suppression du fonds pour la rentrée 2025, décidée en loi de finances, ici même, en 2024. Un nouveau report ne peut donc être envisagé, a fortiori par voie réglementaire.
Dans un contexte budgétaire contraint, Élisabeth Borne a fait le choix de recentrer ses crédits sur d’autres priorités ; je pense notamment aux crédits ouverts pour le projet de loi de programmation pour la refondation de Mayotte.
Cela dit, nous sommes à votre disposition et à l’écoute de vos propositions dans le cadre de la préparation du budget de 2026.
M. le président. La parole est à M. Michel Masset, pour la réplique.
M. Michel Masset. Madame la ministre, je tiens à vous alerter : il existe une véritable spécificité rurale à prendre en compte en ce qui concerne le maintien du fonds de soutien des temps d’activité périscolaire (TAP) de nos petites communes.
J’entends toutefois vos propos. Je suis prêt à travailler avec le Gouvernement pour trouver une issue heureuse, dans le projet de loi de finances pour 2026, afin de protéger nos communes rurales.
réglementation du balisage des zones de baignade
M. le président. La parole est à Mme Béatrice Gosselin, auteure de la question n° 513, adressée à Mme la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche.
Mme Béatrice Gosselin. Madame la ministre, nombre de collectivités littorales, notamment dans le département dont je suis élue, la Manche, rencontrent d’importantes difficultés pour organiser la sécurisation des zones de baignade.
Ces difficultés tiennent à la superposition de deux cadres techniques : d’un côté, l’arrêté du 27 mars 1991 relatif au balisage et à la signalisation de la bande littorale maritime des 300 mètres, qui impose un balisage flottant par des bouées spécifiques dans ladite bande ; de l’autre, la norme de l’Agence française de normalisation (Afnor) Spec X50-001, qui recommande des dispositifs terrestres, comme les drapeaux de baignade et les panneaux d’information. Dans la pratique, ces deux dispositifs sont parfois imposés simultanément par les autorités préfectorales, ce qui engendre des charges logistiques et financières considérables pour les communes, sans toujours améliorer la sécurité.
La situation est encore plus préoccupante dans les territoires à fort marnage, comme la côte ouest de la Manche ou la baie du Mont-Saint-Michel, où le maintien d’un balisage flottant permanent est souvent irréalisable. Elle expose aussi les collectivités à un risque juridique accru en cas d’accident.
Madame la ministre, quelles mesures le Gouvernement entend-il prendre pour clarifier l’articulation entre l’arrêté de 1991 et la norme Afnor, afin de permettre une adaptation des règles aux réalités géographiques locales et de sécuriser juridiquement les collectivités dans l’exercice de leur mission de service public sur les plages ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de l’emploi. Madame la sénatrice Gosselin, je réponds à la place de Mme Pannier-Runacher, qui avait prévu d’être présente ce matin, mais qui a dû se rendre à une conférence sur les océans.
Les deux dispositifs que vous citez ne sont ni contradictoires ni redondants, ils sont complémentaires. Ils constituent tous deux des outils à la disposition du maire pour l’exercice de ses compétences et responsabilités en matière de police des baignades.
Le fondement de cette responsabilité se trouve dans le code général des collectivités territoriales, selon lequel il appartient au maire de décider si des zones de sa commune nécessitent la mise en place de mesures réglementaires pour la pratique des activités nautiques. Ce dernier établit ses choix en fonction de la fréquentation, de la typologie des activités pratiquées ou encore de la configuration des lieux.
S’il décide de mettre en place de telles mesures, qui peuvent comporter notamment un zonage, son obligation est d’en informer le public par une publicité adaptée sur les lieux où ces baignades se pratiquent. Les deux dispositifs que vous mentionnez visent, en définissant des normes techniques, à faciliter leur lisibilité par les usagers sur l’ensemble du territoire national.
L’arrêté de 1991 n’impose pas la mise en place d’un balisage maritime. Il en définit seulement la forme si un tel balisage doit être mis en place, ce qui est le cas au titre de l’obligation de publicité définie par la loi. De la même manière et dans le même objectif d’harmonisation et de lisibilité accrue pour les usagers, la norme Afnor Spec précitée définit le format des signalisations destinées à satisfaire à l’obligation de publicité à terre, sur la plage.
L’articulation entre ces deux outils signalétiques dépend donc en tout premier lieu du dispositif réglementaire établi localement et des nécessités de publicité le concernant, qui peuvent différer d’un site à l’autre, selon la configuration des lieux et les pratiques effectivement observées sur place.
M. le président. La parole est à Mme Béatrice Gosselin, pour la réplique.
Mme Béatrice Gosselin. Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre, mais il est vrai que tout cela représente des complexités pour des territoires comme le mien, où le marnage est important, les bouées étant alors parfois malmenées.
Cette question existait déjà avec le dispositif de 1991 et il n’y avait aucune difficulté. Le nouveau dispositif ajoute des coûts supplémentaires pour les zones de baignades, ce qui pose problème quand une commune a plusieurs zones de baignades depuis longtemps.
J’entends qu’il soit nécessaire d’informer le public, mais il faut aussi s’adapter aux territoires. Il me semble donc qu’il serait opportun que les préfets aient la main sur ce sujet, afin d’adapter la sécurisation des zones de baignade en fonction des capacités et de la configuration géographique de chaque commune.
mise en œuvre de la filière à responsabilité élargie du producteur des emballages professionnels
M. le président. La parole est à M. Guislain Cambier, auteur de la question n° 532, adressée à Mme la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche.
M. Guislain Cambier. La simplification, en parler, c’est bien ; la faire, c’est mieux. Or ce n’est pas ce que nous faisons en ce qui concerne la responsabilité élargie du producteur (REP), notamment celle qui s’applique aux emballages professionnels.
Les services du ministère de la transition écologique ont annoncé la publication des textes réglementaires y afférents « à l’été », pour une mise en œuvre au 1er janvier 2026. Six mois, c’est bien court si l’on veut être efficace, d’autant que, nous le savons tous, les processus d’agrément des éco-organismes ou des systèmes individuels par l’État prendront ensuite entre trois et six mois. Comment voulez-vous que les entreprises s’organisent ?
En outre, après l’agrément des éco-organismes viendra le temps du processus d’organisation interne des entreprises metteuses sur le marché, processus long et complexe : choix de l’éco-organisme en fonction des barèmes des écocontributions, identification en interne des emballages soumis à la REP, mise à jour des outils informatiques, puisqu’il faudra intégrer chaque référence d’emballage en vue de la déclaration annuelle auprès de l’éco-organisme choisi, révision des contrats pour l’enlèvement des déchets, réorganisation logistique pour la reprise des déchets, intégration des nouvelles consignes de tri, formation du personnel, etc.
Je souhaite donc savoir, madame la ministre, si un moratoire sur cette REP serait envisageable, afin de simplifier au maximum sa mise en place pour les entreprises. Il ne faudrait pas reproduire ce qui se passe actuellement avec la filière des produits et matériaux de construction du secteur du bâtiment, qui est beaucoup trop complexe.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de l’emploi. Monsieur le sénateur Cambier, vous nous interrogez sur la mise en place de la filière à responsabilité élargie du producteur pour les emballages professionnels.
Je souhaite tout d’abord rappeler que la mise en place d’une telle filière est issue du droit européen et que celle-ci aurait dû entrer en vigueur au plus tard le 1er janvier de cette année, comme c’est déjà le cas chez nos voisins. Nous sommes donc déjà en retard par rapport à nos obligations européennes.
Le projet de décret définissant le cadre général de cette filière a fait l’objet d’une large concertation en fin d’année dernière. Ce travail approfondi est maintenant achevé et le texte sera prochainement examiné par le Conseil d’État. Ce décret sera complété par un arrêté portant cahier des charges, qui est en cours de finalisation et qui fera lui-même l’objet d’une large concertation, à laquelle vos collègues et vous-même pourrez prendre part, ce qui permettra à chacun d’anticiper l’impact des futures obligations.
Par ailleurs, parmi les emballages couverts par cette filière REP, les emballages en plastique représentent un gisement d’environ 1 million de tonnes, à peine un quart de ces emballages étant aujourd’hui recyclés. En raison de cette piètre performance, la France est aujourd’hui le pays qui paie le plus à l’Europe dans le cadre de la ressource propre sur les emballages en plastique non recyclé, soit 1,5 milliard d’euros chaque année.
Il y a donc urgence à renforcer la collecte et le recyclage de ces emballages. Dans ce contexte, il n’est pas envisageable de retarder encore la mise en œuvre de cette filière en décrétant un moratoire. Vous pouvez compter sur Agnès Pannier-Runacher pour que le dispositif retenu soit équilibré et performant, notamment dans le cadre de la deuxième concertation qui aura lieu avant la publication de l’arrêté.
M. le président. La parole est à M. Guislain Cambier, pour la réplique.
M. Guislain Cambier. Je retiens de vos propos que l’on va continuer de surtransposer la réglementation européenne, puisque celle-ci ne compte que cinq filières REP et que nous allons en avoir vingt-cinq. Malgré cela, nous allons imposer aux entreprises des délais très courts et des contraintes que d’autres n’ont pas, instituant ainsi un désavantage compétitif. C’est dommage, surtout au regard des objectifs que l’on vise. Les entreprises sont volontaires pour agir, mais encore faut-il ne pas leur mettre des bâtons dans les roues.
avenir des cétacés du parc marineland d’antibes
M. le président. La parole est à Mme Mathilde Ollivier, auteure de la question n° 536, adressée à Mme la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche.
Mme Mathilde Ollivier. Madame la ministre, voilà quelques jours, l’ONG de défense animale TideBreakers a diffusé des images saisissantes : on y voit deux orques, Wikie et son fils Keijo, tourner en rond dans un bassin plein d’algues.
Les images sont nouvelles, mais la situation ne l’est pas. L’urgence pour ces cétacés détenus au parc Marineland d’Antibes est connue de toutes et tous. Depuis des années, les scientifiques, les ONG et une majorité croissante de Français dénoncent ces conditions de captivité indignes pour les orques et les dauphins. Les travaux scientifiques ont largement documenté les besoins complexes de ces espèces, qui rendent leur maintien en bassin particulièrement problématique au regard de leur bien-être.
Oui, la loi du 30 novembre 2021 visant à lutter contre la maltraitance animale et conforter le lien entre les animaux et les hommes a représenté un point de bascule. Elle a acté la fin des spectacles et l’interdiction de la reproduction et de l’acquisition de nouveaux cétacés. Cette avancée majeure marque un tournant en matière de considération éthique pour les animaux sauvages détenus en captivité à des fins de divertissement. C’était un signal fort, attendu.
Toutefois, cette loi conserve un angle mort inquiétant : que deviennent les animaux encore captifs ? À Marineland, nous laissons quasiment à l’abandon deux orques et douze dauphins. Récemment, l’Espagne a refusé leur transfert. Pour ces animaux, rien n’est clair : pas de solution concrète, pas de sanctuaire, pas même un plan de transition.
Une solution pourrait se trouver dans la création ou dans le recours à des sanctuaires marins, c’est-à-dire des zones côtières fermées et protégées dans un environnement semi-naturel tout en restant sous supervision humaine. Des projets existent, surtout en Europe, notamment en Grèce, où j’ai pu aborder le sujet lors d’un déplacement.
Où en sommes-nous à ce sujet, madame la ministre ? La situation avance-t-elle ou enterre-t-on le dossier en silence ? On ne peut laisser ces animaux finir leur vie dans l’oubli parce que cela dérange ou coûte trop cher de s’en occuper. Je vous demande aujourd’hui un engagement clair. Allons-nous, oui ou non, offrir à ces cétacés une fin de vie digne, dans un environnement adapté ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de l’emploi. Madame la sénatrice Mathilde Ollivier, je vous réponds au lieu et place de Mme Pannier-Runacher.
En vertu de la loi de 2021, Marineland a annoncé l’arrêt de ses activités de présentation de cétacés au public à compter du 5 janvier 2025. Pour accompagner cette démarche, le ministère a exploré les possibilités de relocalisation des orques dans des enclos marins. Un appel à manifestation d’intérêt a été lancé au printemps 2024. Les projets reçus ont été analysés par l’inspection générale de l’environnement et du développement durable, mais aucun ne présentait de garanties suffisantes à court terme en matière de bien-être animal.
En ce qui concerne les dauphins, le ministère a réuni l’ensemble des parties prenantes au premier trimestre 2025. Leurs travaux ont conclu que, bien qu’étant prometteurs, les projets d’enclos marins prévus en Italie et en Grèce n’étaient pas encore opérationnels et ne pouvaient donc accueillir les animaux de Marineland. Néanmoins, des échanges interministériels sont en cours pour les faire aboutir.
C’est l’objet du groupe de travail que ma collègue Agnès Pannier-Runacher souhaite réunir au cours des prochains jours avec ses homologues italiens, grecs et espagnols, qui sont favorables à un partage d’informations et de connaissances sur le sujet, afin de favoriser la faisabilité technique et administrative de ces enclos marins.
En l’absence de solution à ce jour, Marineland a sollicité le transfert des cétacés à l’étranger, vers d’autres delphinariums, notamment au Japon, ce que la ministre de la transition écologique a refusé, en raison du risque associé à un transport de longue durée des orques. Une seconde demande, visant à un transfert des orques et des dauphins vers l’Espagne, a été rejetée par les autorités de ce pays, qui ont estimé que leurs infrastructures ne répondaient pas aux besoins des animaux.
Ces derniers restent donc aujourd’hui sous la responsabilité de Marineland, qui veille à les maintenir en bonne santé, dans l’attente d’une nouvelle solution. Le Gouvernement reste pleinement mobilisé pour faire émerger une solution conforme à l’esprit de la loi et fondée sur le respect du bien-être animal.
mise en place d’un régime fiscal incitatif pour le hvo100 dans les secteurs professionnels maritime et fluvial
M. le président. La parole est à M. Simon Uzenat, auteur de la question n° 541, adressée à Mme la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche.
M. Simon Uzenat. Madame la ministre, je souhaite vous interroger sur l’absence de régime fiscal incitatif en faveur du HVO100, l’huile végétale hydrotraitée, dans les usages maritimes et fluviaux professionnels.
Alors que la décarbonation du transport maritime constitue un levier stratégique pour atteindre les objectifs climatiques de la France, il se trouve que le HVO100 est l’un des rares carburants renouvelables immédiatement mobilisables à ce jour, sans adaptation des motorisations existantes.
Ce carburant de synthèse, issu principalement de la valorisation de déchets – graisses animales et huiles usagées –, peut être utilisé directement dans les moteurs diesel des navires, bateaux de pêche ou engins fluviaux, ce qui constitue une solution de transition particulièrement efficace pour les usages maritimes professionnels.
Les chiffres de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe) confirment l’intérêt environnemental de ce carburant, la réduction des émissions de CO2 par rapport à l’utilisation du gazole fossile pouvant dépasser 80 %. De plus, ce carburant est déjà produit en France et en Europe, ce qui contribue à sécuriser notre approvisionnement énergétique tout en réduisant notre dépendance aux énergies fossiles.
Pourtant, malgré ces atouts, le HVO100 ne bénéficie aujourd’hui d’aucun régime fiscal propre dans les usages maritimes et fluviaux professionnels, contrairement à d’autres biocarburants. Il est traité sur le plan fiscal comme un carburant fossile, ce qui limite son attractivité économique pour les professionnels du secteur, en particulier pour les pêcheurs artisanaux et les transporteurs fluviaux déjà soumis à des contraintes économiques importantes.
Les professionnels engagés dans une démarche de verdissement de leur flotte craignent que le HVO ne soit progressivement écarté du mix énergétique, du fait de son coût élevé par rapport à d’autres biocarburants et d’un arbitrage défavorable de la part des opérateurs pétroliers.
Dans ce contexte, il paraît essentiel d’installer un cadre fiscal spécifique, clair et durable, pour le HVO dans les usages maritimes et fluviaux professionnels. Un tel signal permettrait de soutenir les acteurs économiques dans leur transition énergétique, de renforcer la souveraineté énergétique française et d’aligner notre fiscalité sur nos objectifs climatiques nationaux.
Je souhaite donc connaître la position et les intentions du Gouvernement quant à l’instauration d’un régime fiscal différencié et incitatif pour le HVO100.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de l’emploi. Monsieur le sénateur Simon Uzenat, je vous remercie de votre question ; elle me permet de souligner notre engagement en faveur de la décarbonation des transports, qui découle de nos ambitions climatiques.
Les principaux leviers identifiés pour la décarbonation du secteur maritime sont le changement d’énergie et la sobriété, au travers principalement de la réduction de la vitesse des navires.
Vous m’interrogez sur le HVO, utilisé dans les moteurs diesel, qui permet de réduire les émissions de gaz à effet de serre par rapport aux carburants traditionnels. Une baisse des accises ne constituerait pas un levier adapté pour inciter à consommer des biocarburants et ne suffirait pas à compenser les écarts de prix avec les carburants traditionnels. De plus, les secteurs maritimes et fluviaux sont déjà assujettis à des tarifs d’accises nuls.
Des dispositifs d’incitation ciblés sont plus adaptés. C’est le cas, pour le transport routier, de la taxe incitative relative à l’utilisation d’énergie renouvelable dans les transports. Nous souhaitons la faire évoluer vers un mécanisme de réduction de l’intensité carbone dans les transports, qui pourrait donc inclure les transports du secteur maritime et fluvial. Nous avons à ce titre organisé une consultation sur ce projet de mécanisme, du 12 mai dernier au 10 juin prochain.
gestion des extractions judiciaires
M. le président. La parole est à M. Cédric Chevalier, auteur de la question n° 353, adressée à M. le ministre d’État, garde des sceaux, ministre de la justice.
M. Cédric Chevalier. Madame la ministre, alors que le Président de la République s’est récemment rendu à Caen pour honorer la mémoire de Fabrice Moello et Arnaud Garcia, tués lors de l’attaque d’Incarville en mai 2024, je souhaite alerter le garde des sceaux sur l’urgence d’une réforme en profondeur concernant la gestion des extractions judiciaires.
En France, plus de 300 000 extractions par an, parfois pour des audiences très brèves, doivent être organisées par l’administration pénitentiaire en collaboration avec les forces de l’ordre, au détriment d’autres missions essentielles, comme la sécurité intérieure et périmétrique des établissements.
Le protocole d’accord signé l’an dernier pour améliorer l’équipement, l’armement et la prise en charge des détenus ne constitue pas une solution pérenne aux problèmes récurrents liés au nombre élevé d’extractions judiciaires.
Pourtant, en Europe, la tendance est clairement à la réduction du nombre d’extractions physiques, grâce à la visioconférence, désormais jugée fiable et juridiquement légitime. Au Royaume-Uni, par exemple, ce dispositif est massivement utilisé depuis 2020 et le gouvernement britannique a investi dans des technologies permettant de tenir des audiences virtuelles depuis les établissements. En Italie, pays de référence en la matière, les audiences des détenus les plus dangereux se déroulent directement dans les établissements pénitentiaires, soit par visioconférence, soit par déplacement des magistrats.
La France reste très en retrait par rapport à ses partenaires européens.
Les annonces récentes du garde des sceaux évoquant une accélération de la numérisation des procédures pénales et un investissement dans les équipements de visioconférence dans les établissements vont toutefois dans le bon sens. Il faut désormais traduire ces engagements en actes rapides et concrets.
Je souhaiterais savoir si M. le garde des sceaux entend prendre, avec son collègue de l’intérieur, les mesures nécessaires pour que la visioconférence devienne la norme pour les procédures judiciaires et que l’extraction physique ne soit plus qu’une exception, demandée et motivée par le juge.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de l’emploi. Monsieur le sénateur Cédric Chevalier, je réponds à votre question au lieu et place du garde des sceaux.
Nous venons de rendre hommage à la mémoire de Fabrice Moello et Arnaud Garcia, tragiquement assassinés lors de l’attaque meurtrière survenue au péage d’Incarville en mai 2024. Votre question nous rappelle une nouvelle fois notre devoir impératif de protection des agents de l’administration pénitentiaire.
L’adoption définitive, le 29 avril dernier, de la proposition de loi de loi visant à sortir la France du piège du narcotrafic illustre la détermination collective du Gouvernement et des parlementaires à renforcer la sécurité du personnel pénitentiaire dans l’exercice de ses missions, à l’intérieur comme à l’extérieur des établissements. Votre proposition s’inscrit avec justesse dans le cadre de ce texte, en cours d’examen par le Conseil constitutionnel.
La circulaire du 1er août 2024 relative au recours à la visioconférence en matière pénale, rappelle la nécessité de délocaliser certains actes juridictionnels au sein des établissements pénitentiaires, afin de limiter les extractions judiciaires. Il y est recommandé le recours à la visioconférence pour les détenus particulièrement signalés, qui présentent un risque d’évasion ou de trouble à l’ordre public grave, ou lorsque les enjeux procéduraux sont faibles, après recueil de l’accord du prévenu.
Désormais, grâce à l’adoption de la proposition de loi visant à sortir la France du piège du narcotrafic, il sera possible de répondre aux besoins des agents en mettant un terme définitif aux activités criminelles menées par les narcotrafiquants depuis la détention. Ainsi, pour ce qui concerne les personnes détenues dans les quartiers de lutte contre la criminalité organisée, la visioconférence pendant l’instruction deviendra le principe et la comparution physique l’exception. Celle-ci devra se fonder sur une décision motivée des magistrats.
De manière plus générale, ce texte permettra de passer outre l’opposition de la personne détenue à l’utilisation de la visioconférence si elle présente une dangerosité particulière.
Les services du ministère travaillent activement aux modalités d’application de cette proposition de loi et au nécessaire respect des droits de la défense et de l’accès au juge.
M. le président. La parole est à M. Cédric Chevalier, pour la réplique.
M. Cédric Chevalier. Je vous remercie, madame la ministre, de votre réponse. Il faudra également que la mise en œuvre de la proposition de loi soit suivie d’importants investissements. La visioconférence est une condition de sécurité pour le personnel ainsi qu’une source d’économies et de décarbonation du secteur judiciaire.
communication du rapport d’évaluation des centres éducatifs fermés actuels
M. le président. La parole est à Mme Marion Canalès, auteure de la question n° 529, adressée à M. le ministre d’État, garde des sceaux, ministre de la justice.
Mme Marion Canalès. Madame la ministre, en 2017, Emmanuel Macron avait fait du doublement du nombre de centres éducatifs fermés (CEF) l’une de ses promesses de campagne.
Pourtant, en 2018, la Commission nationale consultative des droits de l’homme a établi que « les CEF sont l’antichambre de la prison, alors que pour leurs promoteurs ce devait être l’antichambre de la réinsertion et de la rescolarisation ».
En 2022, de façon transpartisane, une mission conjointe de contrôle sur la délinquance des mineurs, menée par le Sénat, a recommandé une pause dans la création des centres éducatifs fermés.
En octobre 2023, soit vingt ans après leur création, la Cour des comptes a souhaité dresser un bilan. Il en ressortait que ces structures avaient été « engagées sans étude d’impact » et justifiées par une efficacité « supposée mais non démontrée ».
A fortiori, la volonté présidentielle de créer vingt-deux nouveaux centres a été jugée dispendieuse, le coût d’investissement de chaque unité ayant été évalué à 6 millions d’euros par la direction du budget en janvier 2023.
Malgré ces différents éléments d’analyse et d’évaluation qui font douter de l’efficacité réelle des CEF, la mise en œuvre du plan de construction des nouveaux établissements se poursuit : il y a de quoi s’interroger. Ce plan est de surcroît alimenté par une proposition de loi ultra-répressive qui vise à durcir la justice des mineurs, les centres éducatifs fermés constituant l’un des piliers de ce texte.
Dans un contexte où toute dépense publique doit être envisagée sous l’angle de la pertinence de l’action à laquelle elle se rapporte et alors que l’enjeu premier de la justice des mineurs doit être celui d’une non-récidive assortie d’une réinsertion réussie, pouvez-vous, madame la ministre, me donner des informations sur la récente étude diligentée par le ministère de la justice lui-même sur les centres éducatifs fermés et leur pertinence ? Il s’agit, selon moi, de répondre à une question d’intérêt général, alors que ce document demeure confidentiel.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de l’emploi. Madame la sénatrice Marion Canalès, je vous rappelle, au nom de mon collègue Gérald Darmanin, que connaître le parcours des jeunes à l’issue d’une prise en charge par les structures de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) constitue un enjeu majeur. Cela paraît particulièrement important en ce qui concerne les placements en centres éducatifs fermés.
L’évaluation des CEF a fait l’objet de travaux récents de la Cour des comptes, laquelle recommande de « produire des données de suivi et d’évaluation permettant de calculer les taux de récidive et de réitération des jeunes sortant de CEF […] et de les comparer aux autres dispositifs ». La mise en œuvre de cette recommandation suppose de disposer, d’une part, de données permettant de tracer le parcours du jeune et l’intervention des professionnels, de l’autre, d’une méthodologie d’évaluation adaptée et robuste.
La disponibilité des données est à ce jour encore très partielle, mais elle s’améliore au fur et à mesure du déploiement du projet de système d’information de la justice des mineurs « Parcours ». Ce système est conçu pour assurer l’efficacité globale de la prise en charge d’un mineur – réactivité, personnalisation du projet éducatif, évaluation des parcours – concerné par une décision de justice civile ou pénale. Le ministère mène régulièrement des études sur les différents dispositifs, mais souvent sur des cohortes réduites qui peinent à être représentatives, en raison des difficultés à retracer le parcours des jeunes, d’où ce système d’information.
Pour amasser des connaissances robustes sur le parcours et la récidive des jeunes à l’issue d’une prise en charge en CEF, il est nécessaire que les appariements entre les différents systèmes d’information relevant du ministère de la justice, de l’éducation nationale ou de l’emploi soient plus poussés. L’objectif est d’élargir le champ des données.
En effet, la réitération ou la récidive ne peuvent être les uniques indicateurs d’efficacité ou points de comparaison entre structures, chaque dispositif répondant à des besoins différents selon les parcours des jeunes.
M. le président. La parole est à Mme Marion Canalès, pour la réplique.
Mme Marion Canalès. Madame la ministre, je ne peux entendre que les cohortes ne seraient pas suffisantes. Il existe cinquante-deux centres éducatifs fermés accueillant chacun douze personnes : par nature, seuls 600 jeunes sont concernés, aussi votre argument n’est-il pas audible. Je me tournerai vers le ministre de la justice.
urgence de la vaccination contre les épizooties
M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, auteur de la question n° 500, adressée à Mme la ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire.
M. Daniel Gremillet. Madame la ministre, je connais votre attachement à l’élevage. Ce secteur, en France et en Europe, fait face à une importante épizootie : la fièvre catarrhale ovine (FCO).
Différents variants, dits sérotypes, frappent les élevages caprins, ovins et bovins laitiers. Les pertes sont énormes tant en production laitière qu’en production de viande ; les taux de mortalité aussi sont importants. De nombreux pays de l’Union européenne sont touchés.
La région Grand Est est énormément affectée, notamment les Vosges. La chambre d’agriculture de ce département a estimé à 13,5 millions d’euros les pertes indirectes liées, rien que sur l’année 2024, à la diminution de la production de viande et de lait, et au taux de mortalité.
J’aborderai trois enjeux, madame la ministre.
Premièrement, puisque le but de la vaccination est d’anticiper – mieux vaut anticiper les problèmes plutôt que de les subir –, il faut davantage de vaccins, aujourd’hui en nombre insuffisant.
Deuxièmement, il faut adapter les vaccins aux sérotypes qui se font jour. Pour ce faire, il nous faut une politique européenne plus offensive en la matière, d’autres pays étant concernés.
Troisièmement, malgré le fonds d’indemnisation, les éleveurs supportent des pertes terribles. Un mal-être s’empare des familles : on ne peut qu’être marqué par les maladies qui touchent ses animaux.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Annie Genevard, ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire. Monsieur le sénateur Daniel Gremillet, depuis mon arrivée à la tête du ministère de l’agriculture, je n’ai eu de cesse de gérer les crises sanitaires qui frappent les filières ovines, bovines et caprines : je pense aux variants de la fièvre catarrhale ovine et à la maladie hémorragique épizootique (MHE), ainsi qu’aux pertes directes et indirectes induites.
La disponibilité des vaccins diverge selon les variants.
Pour le traitement contre la FCO 3, les vaccins se trouvent sur le marché. Ils doivent être commandés par les vétérinaires. Les éleveurs savent qu’ils peuvent vacciner à loisir et je les invite à le faire. C’est la meilleure des préventions.
Pour le traitement contre la FCO 8, l’État a anticipé la situation en commandant en 2024, à ses frais, 14 millions de doses de vaccin pour un montant de 37 millions d’euros. Les commandes seront mises gratuitement à disposition de la filière ovine. Les vaccins sont déjà disponibles pour les éleveurs bovins, même si les pertes directes causées par le variant sont bien moins nombreuses pour cette filière.
Pour le traitement contre la FCO 1, l’État a pu obtenir des vaccins auprès d’un laboratoire étranger – la France n’est pas souveraine en matière de santé – de façon à prévenir l’arrivée de ce variant sur le territoire national en érigeant une barrière sanitaire.
Par ailleurs, le ministère a déployé dès mon arrivée un fonds d’indemnisation de 75 millions d’euros. Celui-ci a permis la couverture des pertes des filières ovine et bovine causées par différents sérotypes, notamment en raison de veaux mort-nés.
M. le président. Il faut conclure, madame la ministre.
Mme Annie Genevard, ministre. L’État a donc largement pris en charge les pertes directes.
Pour les pertes indirectes, il a été convenu que la couverture relevait du fonds national agricole de mutualisation du risque sanitaire et environnemental (FMSE), financé à 65 % par l’État.
M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour la réplique.
M. Daniel Gremillet. La FCO accroît le taux de mortalité, que ce soit des ovins ou des caprins. Les bovins sont également touchés, ce qui n’avait pas été le cas jusqu’à présent.
M. Daniel Gremillet. Ils le sont, madame la ministre, il n’est que de regarder les chiffres des équarrissages !
M. Daniel Gremillet. C’est un éleveur qui vous parle et je peux vous assurer que l’on s’en rend compte lorsque l’on est concerné directement !
Par ailleurs, le fonds d’indemnisation n’est pas à la hauteur. Ne faudrait-il pas une politique européenne plus offensive, de manière que l’État assume ses responsabilités ?
compostage de la laine en suint en ferme
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Anglars, auteur de la question n° 290, adressée à Mme la ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire.
M. Jean-Claude Anglars. Les exigences sanitaires actuelles imposées au compostage de la laine en suint sont plus strictes que pour d’autres sous-produits animaux, comme le lisier, ce qui rend leur application très difficile en ferme.
La laine, matière naturelle dotée de multiples propriétés agronomiques et environnementales, est classée comme sous-produit animal de catégorie 3. Cette classification entraîne de fortes contraintes en matière de collecte et de traitement. L’absence de filière structurée conduit à une accumulation de stocks en ferme, pour lesquels le co-compostage avec du fumier constitue, en dehors de l’incinération, la seule solution viable.
Or la réglementation actuelle rend cette pratique excessivement complexe. En vertu des règlements (CE) n° 1069/2009 et (UE) n° 142/2011, le compostage de la laine en ferme impose aux exploitants de disposer d’un agrément sanitaire identique à celui qui est exigé pour les plateformes industrielles et de garantir une montée en température de l’andain à 70 degrés Celsius pendant cinq jours consécutifs, température relevée à cœur en un seul point. De telles exigences techniques sont difficiles à mettre en œuvre dans le cadre d’une gestion en ferme.
Sont fixées dans l’arrêté du 9 avril 2018 les conditions nationales d’utilisation des sous-produits animaux en usine de compostage. Ce texte contient des dérogations aux critères européens de température ; toutefois, la laine ne figure pas dans la liste.
Par ailleurs, cet arrêté prévoit qu’un simple enregistrement peut se substituer à l’agrément sanitaire pour le compostage de lisier destiné à un usage sur exploitation. Cette souplesse administrative n’est pas non plus étendue à la laine, alors même que les enjeux sont comparables.
Madame la ministre, le Gouvernement entend-il reconnaître pour le compostage de la laine en suint d’autres couples temps-température déjà admis pour des sous-produits différents ? Pour renforcer la cohérence de la réglementation, est-il possible qu’une simple procédure d’enregistrement puisse se substituer à l’agrément sanitaire, comme pour le lisier ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Annie Genevard, ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire. Monsieur le sénateur Jean-Claude Anglars, les difficultés rencontrées pour la valorisation de la laine sont bien identifiées au sein de mon ministère. Mes services accompagnent d’ores et déjà le secteur ovin dans la structuration d’une filière laine, via différentes actions.
En application de la réglementation sanitaire européenne, la laine issue de la tonte des ovins est un sous-produit animal de catégorie 3. L’activité de compostage de sous-produits animaux de cette catégorie est soumise à agrément sanitaire.
Aussi, les services de mon ministère accompagnent la filière dans l’élaboration d’un dossier type de demande d’agrément sanitaire pour l’activité de compostage de la laine en exploitation agricole.
Une expérimentation a été lancée en juin 2024 dans deux exploitations agricoles pilotes pour déterminer les modalités de procédure les plus adaptées au contexte du compostage à la ferme. La fin de l’expérimentation, qui dépendra du bon déroulement de cette dernière, n’est pas encore définie.
En complément, mon ministère a saisi l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) afin d’identifier les risques que peut représenter la laine en suint pour la santé humaine, la santé animale et pour la préservation de l’environnement.
En outre, il a été demandé à l’Anses de proposer d’éventuelles recommandations générales sur les moyens de maîtriser ces dangers. Ces éléments seront utiles aux professionnels pour définir les méthodes de traitement de la laine en fonction de l’utilisation et de la valorisation envisagées. La publication de l’avis de l’Anses est attendue pour fin octobre 2025.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Anglars, pour la réplique.
M. Jean-Claude Anglars. Je vous remercie, madame la ministre, de votre réponse. Je vois que vous vous êtes engagée sur un sujet qui tient particulièrement à cœur aux habitants du département de l’Aveyron, qui compte plus de 1 million de brebis.
difficultés d’installation des jeunes agriculteurs dans les territoires ruraux
M. le président. La parole est à M. Bruno Rojouan, auteur de la question n° 508, adressée à Mme la ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire.
M. Bruno Rojouan. Madame la ministre, la France connaît une érosion continue de son tissu agricole, menaçant la vitalité de nos territoires ruraux. En cinquante ans, le nombre d’agriculteurs est passé de 1,6 million à moins de 500 000. La situation risque encore de se détériorer dans un avenir proche puisque la moitié des chefs d’exploitation sont âgés de 55 ans ou plus : ils ont déjà atteint l’âge légal de la retraite ou l’atteindront dans la décennie qui vient.
Ce constat souligne l’urgence du renouvellement générationnel dans le secteur agricole. Pourtant, malgré les dispositifs existants et les récents textes législatifs adoptés, notamment sur l’initiative de notre collègue Laurent Duplomb, de nombreux jeunes porteurs de projet peinent à s’installer, notamment dans des zones rurales où l’agriculture constitue un levier essentiel du développement local et de la cohésion sociale, comme l’Allier. Dans ce département, dont je suis élu, seuls deux départs sur trois sont actuellement remplacés.
L’accès au foncier reste un frein majeur, problème aggravé par la rareté des terres disponibles, leur prix élevé et des procédures administratives complexes. À cela s’ajoutent des difficultés d’accès tant aux équipements nécessaires à l’activité des jeunes agriculteurs qu’au crédit. Les conditions d’emprunt, conjuguées à la frilosité de certaines banques à financer des projets agricoles, freinent considérablement l’élan entrepreneurial. Pourtant, il est crucial de soutenir toutes les initiatives qui participent à la relocalisation de l’alimentation, à la préservation de l’environnement, à la résilience des territoires et à la souveraineté alimentaire.
Madame la ministre, quels moyens le Gouvernement entend-il mobiliser, notamment en matière d’accès au foncier agricole, aux équipements et aux financements, pour lever ces freins et faciliter l’installation des jeunes agriculteurs dans les territoires ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Annie Genevard, ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire. Monsieur le sénateur Bruno Rojouan, je vous rejoins : il est important que les jeunes puissent accéder au foncier. C’est une nécessité pour le renouvellement des générations. Pour cette raison, les outils existants sont tournés majoritairement vers l’installation de cette tranche d’âge.
Ainsi, en 2023, les sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural (Safer) ont contribué à l’installation de jeunes au travers de 2 800 opérations, correspondant au tiers du total des surfaces rétrocédées.
De plus, les dispositions de la loi du 23 décembre 2021 portant mesures d’urgence pour assurer la régulation de l’accès au foncier agricole au travers de structures sociétaires, dite loi Sempastous, se traduisent par la libération de foncier sous forme de bail ou de cession, quasi exclusivement à destination de jeunes.
Je tiens aussi à mettre l’accent sur le démarrage très satisfaisant du fonds Entrepreneurs du vivant, doté de 400 millions d’euros, dont une partie importante est destinée à renforcer les initiatives de portage existantes. Les jeunes agriculteurs peuvent ainsi consacrer l’essentiel de leurs investissements au développement de leur entreprise à son démarrage et acquérir le foncier plusieurs années après le début de leur activité.
Par ailleurs, vous vous inquiétez, à juste titre, d’un accès difficile aux financements. L’initiative nationale pour l’agriculture française, instrument de garantie innovant, a permis de financer des projets d’investissement – 70 % d’entre eux proviennent de jeunes agriculteurs – qui visent en majorité à accompagner la transformation des modèles agricoles. La garantie de l’État, gratuite, se traduit pour les agriculteurs par l’octroi de conditions de financement améliorées. Le lancement de la phase 2 est imminent : la signature aura lieu jeudi. L’initiative se verra alors dotée de moyens financiers supplémentaires, puisqu’une enveloppe de 2 milliards d’euros de prêts à distribuer par quatre partenaires bancaires est prévue.
Enfin, la création du réseau France Services agriculture au travers de la loi d’orientation pour la souveraineté alimentaire et le renouvellement des générations en agriculture – le Sénat avait voté en sa faveur – permettra, à partir du 1er janvier 2027, d’accompagner de manière personnalisée chaque porteur de projet.
droit de préemption
M. le président. La parole est à M. Daniel Gueret, auteur de la question n° 512, transmise à Mme la ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire.
M. Daniel Gueret. Madame la ministre, j’attire votre attention sur une véritable contradiction juridique qui subsiste entre, d’une part, le droit de préemption prioritaire de la commune – il est relevé dans plusieurs réponses écrites du Gouvernement – sur celui de la Safer en zone agricole et, d’autre part, la limitation du droit de préemption communale aux seules zones urbaines ou à urbaniser.
Dans les faits, pour de nombreuses petites parcelles se trouvant à proximité de zones urbanisées, les Safer n’utilisent pas leur droit de préemption. Par conséquent, l’aménagement du territoire est entravé dans de nombreuses communes : beaucoup d’entre elles se voient dans l’obligation d’acquérir des parcelles au prix proposé par le vendeur plutôt qu’au prix du domaine.
La jurisprudence reconnaît toutefois l’existence d’un droit de préemption de la commune sans distinction de nature de la zone concernée. Dès lors, dans un souci de faciliter l’aménagement du territoire de nos communes, il semblerait opportun de prévoir explicitement dans le code rural et de la pêche maritime que les Safer puissent déléguer leur droit de préemption à la commune ou à son maire.
Madame la ministre, les communes peuvent-elles envisager de bénéficier d’une délégation du droit de préemption des Safer ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Annie Genevard, ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire. Monsieur le sénateur Daniel Gueret, le droit de préemption de la Safer permet à celle-ci d’acheter un ou plusieurs terrains ou une exploitation à la place d’un potentiel acquéreur privé pour y maintenir l’activité agricole. Vous conviendrez que cette finalité est importante.
En cas de préemption d’un même bien par la commune et la Safer, par le biais de deux déclarations d’intention d’aliéner (DIA) faisant figurer des prix différents, le droit de préemption de la commune est prioritaire. Le prix déclaré à retenir est celui qui est mentionné dans la déclaration d’intention d’aliéner reçue par cette dernière.
En effet, si les Safer disposent d’un droit de préemption, celui-ci ne peut primer sur les droits de préemption établis au sein des textes en vigueur au profit de l’État ou des collectivités publiques. Je vous renvoie à l’article L. 143-6 du code rural et de la pêche maritime. La commune titulaire du droit de préemption peut proposer une offre en révision de prix. À défaut d’acceptation de cette dernière, elle peut faire fixer le prix du bien par la juridiction compétente en matière d’expropriation.
L’exercice de la préemption doit néanmoins répondre à des motifs d’intérêt général et ne saurait se substituer à celui des Safer que pour des cas bien identifiés et qui font l’objet d’une déclaration d’utilité publique. Les projets pour lesquels l’État et les collectivités utilisent le droit de préemption peuvent d’ailleurs être au bénéfice de l’agriculture.
Enfin, face à cette difficile lecture des règles que vous soulignez, le Gouvernement soutient la remise d’un rapport au Parlement afin de préciser l’articulation entre les différents droits de préemption et les moyens de l’améliorer. Ce document permettra d’éclaircir la situation que vous pointez du doigt et d’objectiver les solutions.
M. le président. La parole est à M. Daniel Gueret, pour la réplique.
M. Daniel Gueret. Madame la ministre, ce rapport est une excellente initiative. Il permettra de clarifier une situation ambiguë, qui pose problème à bien des maires sur bien des sujets. Je vous remercie et je suivrai attentivement l’élaboration de ce document.
sécuriser la procédure de démission d’un élu
M. le président. La parole est à M. Aymeric Durox, auteur de la question n° 507, adressée à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur.
M. Aymeric Durox. Monsieur le ministre, j’ai pris connaissance avec une grande satisfaction de l’ordonnance du tribunal administratif de Strasbourg rendue hier : elle suspend la démission forcée de M. Julien Ruaro, conseiller municipal de la commune de Coin-lès-Cuvry, en Moselle. L’intéressé contestait fermement cette démission. Après quinze mois sans nouvelles, malgré de très nombreux recours, voilà enfin la justice et l’honneur de M. Julien Ruaro rendus, la veille de ma question orale au Gouvernement. Cet heureux hasard fait bien les choses.
Comme les bonnes nouvelles ne vont jamais seules, je salue également l’extrême célérité du préfet de Moselle : il a prévenu dans l’heure l’intéressé de cette décision, alors que le délai moyen pour ce genre d’affaires est bien plus long.
En tout état de cause, je suis ravi que ma question ait pu aider à accélérer le processus juridique et ainsi faire droit à un citoyen. L’intéressé a été privé sans raison de son mandat d’élu et, parlant dans le vide, demandait justice à cor et à cri depuis bien longtemps.
Néanmoins, cette décision de justice, qui est une bonne décision dans ce cas d’espèce, ne doit pas servir à mettre sous le tapis la raison d’être de ma question. À l’avenir, avec le développement des nouvelles technologies, il pourrait y avoir de nouveaux Julien Ruaro en France, démissionnaires involontaires et victimes potentielles de personnes mal intentionnées. Comme vous l’avez très justement dit, monsieur le ministre, aucun élu en France n’est épargné par l’explosion de violence. M. Ruaro a bien été victime d’une violence inacceptable : une usurpation d’identité.
Aussi, je vous demande de sécuriser les mandats des conseillers municipaux et le fonctionnement des collectivités locales par une réforme urgente. Je propose plusieurs solutions : une vérification systématique de l’authenticité des démissions, par la préfecture ou un organisme indépendant qui, dans un cas comme dans l’autre, en compileraient les motifs, l’obligation d’informer l’élu concerné avant toute prise d’acte définitive et la mise en place d’une procédure de contestation simplifiée et rapide, accessible à l’élu en cas de doute.
Cette faille, fondamentale et absurde, est un vide qui doit être comblé sans délai pour protéger les bases de notre république démocratique.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur. Monsieur le sénateur Aymeric Durox, le Gouvernement est naturellement ravi de la décision qui a été rendue. Elle me permet de faire un point sur le droit positif en matière de démission de conseiller municipal.
En premier lieu, celle-ci doit être adressée au maire ou, en cas de vacance de poste, à l’élu qui assure la fonction de maire. Telle est la règle.
En deuxième lieu, la démission doit être exprimée dans un document écrit, daté et signé par l’intéressé.
En troisième lieu, elle doit être rédigée en termes non équivoques et ne pas avoir été signée sous la contrainte, ce qu’il convient de vérifier. Dans l’hypothèse où un maire aurait connaissance d’éléments permettant d’établir l’exercice d’une pression sur le démissionnaire, il y aurait lieu de demander à ce dernier de confirmer sa décision, faute de quoi la démission pourrait être considérée comme nulle et non avenue.
L’exigence de clarté et d’authenticité de la lettre de démission implique qu’il revient au maire, lorsqu’il reçoit le courrier, de s’assurer – il en est responsable – de la validité matérielle ainsi que de la portée exacte de cet écrit. Il doit notamment vérifier si ce texte provient bien de son présumé auteur. D’ailleurs, le juge administratif veille au respect par le maire de cette exigence.
En effet, selon la loi, la démission est définitive dès réception de la lettre par le maire. Celui-ci n’a pas le choix à partir du moment où il tient le document entre ses mains : il n’a, en la matière, aucun pouvoir d’appréciation, sauf suspicion de pression exercée sur l’élu démissionnaire, d’où la nécessité qu’il veille bien à ce que le conseiller municipal qui a envoyé le courrier l’ait effectivement rédigé. Le maire doit s’en assurer directement.
J’y insiste, la démission entre en vigueur dès réception de la lettre par le maire. Même si le conseiller municipal se rétracte, il n’est pas possible de revenir sur une démission devenue définitive.
Le maire transmet immédiatement au préfet une copie intégrale de la lettre. L’information du préfet, si elle est obligatoire, n’est toutefois pas une condition de validité ou d’effectivité d’une démission : il s’agit d’une simple information et non d’une transmission d’un acte pour authentification ou approbation.
En l’espèce, il faut saluer la rapidité tant de l’action de la préfecture que du prononcé du tribunal administratif. Il conviendra peut-être, à l’occasion de l’examen de la proposition de loi portant création d’un statut de l’élu local, de voir comment sécuriser davantage encore ce dispositif.
M. le président. La parole est à M. Aymeric Durox, pour la réplique.
M. Aymeric Durox. En l’espèce, votre propos n’apporte aucune réponse : le maire peut falsifier la validité d’une lettre ou être complice d’un envoi par un tiers pour nuire à un opposant, comme pour M. Ruaro. La vérification par une autorité indépendante me paraît donc nécessaire.
projet d’implantation d’une brigade de gendarmerie à aincourt
M. le président. La parole est à M. Daniel Fargeot, auteur de la question n° 460, adressée à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur.
M. Daniel Fargeot. Monsieur le ministre, le 2 octobre 2023, le Président de la République annonçait le déploiement de 283 nouvelles brigades de gendarmerie d’ici à 2027, dont une à Aincourt, dans le sud-ouest du Vexin, un secteur rural du Val-d’Oise particulièrement exposé.
Cette implantation, très attendue localement, répond à un besoin objectif de sécurité dans un territoire touristique à la fois voisin de grands pôles urbains, comme Mantes-la-Jolie, et éloigné de toute présence opérationnelle, la brigade la plus proche se situant à près de trente minutes de trajet.
Malgré l’identification du terrain, les visites du site et la possibilité d’une installation rapide grâce à des bâtiments modulaires, les acteurs du territoire peinent à obtenir des informations précises. Depuis plus d’un an, le projet semble au point mort.
Alors qu’une révision du plan local d’urbanisme (PLU) est nécessaire pour accueillir l’équipement, aucune information concrète n’a été transmise aux élus ni aux services concernés.
Monsieur le ministre, l’incompréhension grandit, d’autant que ce territoire a déjà perdu une brigade en 2009 et que les discours actuels sur la maîtrise de la dépense publique font craindre un abandon du projet.
Monsieur le ministre, je souhaiterais savoir très précisément si le projet de brigade à Aincourt est confirmé. Où en est-il concrètement ? Quelles sont les prochaines étapes et selon quel calendrier ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur. Monsieur le sénateur Daniel Fargeot, le programme de création des 239 nouvelles brigades a permis l’installation au cours de l’année 2024 de 80 premières brigades dans 64 départements de l’Hexagone et 8 dans les départements ou collectivités d’outre-mer.
La volonté du Gouvernement est de poursuivre ce déploiement. Ainsi, dans votre département du Val-d’Oise, une brigade mobile a déjà été créée à Domont. Elle est opérationnelle depuis le mois de juillet 2024, soit bientôt un an.
Comme vous l’indiquez, un projet de création doit se poursuivre dans le Val-d’Oise, avec l’implantation d’une brigade fixe à Aincourt. L’État, pleinement conscient des interrogations des élus locaux, veille à accompagner ces projets. À l’heure actuelle, cette implantation n’est pas remise en cause, bien au contraire. Il s’agit simplement d’une question d’arbitrage, notamment en matière de financement.
Si votre question est : « La création de cette brigade est-elle toujours d’actualité ? », la réponse est oui. Si votre question est : « Cette brigade sera-t-elle opérationnelle dès demain matin ? », la réponse est : pas tout à fait, nous attendons encore qu’un certain nombre d’arbitrages soient rendus avant de mettre en route le projet.
Voilà, monsieur le sénateur, la réponse que je peux apporter à cette question très importante pour votre territoire.
M. le président. La parole est à M. Daniel Fargeot, pour la réplique.
M. Daniel Fargeot. Je transmettrai cette réponse rassurante, monsieur le ministre, à l’ensemble des membres du territoire. Nous suivrons attentivement la suite qui sera donnée à ce dossier.
déplacement du commissariat de gap
M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Arnaud, auteur de la question n° 465, adressée à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur.
M. Jean-Michel Arnaud. Monsieur le ministre, ma question porte sur le projet de déplacement du commissariat de police de Gap. Le 13 mars dernier, vous avez confirmé le principe d’un déplacement du commissariat – actuellement hébergé dans la cité administrative Desmichels – vers le bâtiment présentement occupé par les services départementaux de la Banque de France.
Dès le 13 juillet 2021, j’avais interpellé le ministre de l’intérieur de l’époque sur la baisse des effectifs ainsi que sur la vétusté des locaux actuels du commissariat qui affectaient directement la sécurité publique de l’ensemble du bassin gapençais. Je me réjouis donc de cette annonce, qui permettra d’améliorer les conditions de travail des fonctionnaires de police, mais aussi l’accueil de l’ensemble des usagers.
Néanmoins se pose la question de la création d’un hôtel des polices mutualisé, réunissant à la fois les services de la direction interdépartementale de la police nationale, des douanes et de la police municipale, ainsi que le centre de supervision urbaine de la commune de Gap. Dans quels délais le déménagement des services de police nationale sera-t-il pleinement opérant ? Par ailleurs, le Gouvernement soutient-il le projet de regroupement des services, qui a reçu l’approbation du maire de Gap, Roger Didier ?
Dans le même temps, un programme de modernisation bâtimentaire de la cité Desmichels a été engagé depuis plusieurs années. En 2021, il m’avait été indiqué que « la création du secrétariat général commun départemental au sein de la préfecture devrait conduire, à terme, à des modifications dans l’occupation de la cité administrative ». Monsieur le ministre, quelles mesures seront prises afin de valoriser la cité administrative ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur. Monsieur le sénateur Jean-Michel Arnaud, avant toute chose, je tiens à rappeler que, grâce aux crédits votés par le Parlement en loi de finances pour 2025, le ministère de l’intérieur a été préservé et qu’il est ainsi en mesure de continuer l’aménagement et la construction des commissariats de police ou des brigades de gendarmerie.
J’en viens maintenant, monsieur le sénateur, à la question qui vous préoccupe, à savoir le déplacement de l’actuel commissariat de police de Gap dans les locaux de la Banque de France.
Les forces de police de Gap sont actuellement hébergées au sein de la cité administrative Desmichels. Un projet de regroupement de l’état-major, des renseignements territoriaux et du commissariat est en cours dans ces mêmes locaux. Cependant, les surfaces disponibles ne répondent pas aux besoins pour le regroupement de l’ensemble des services de la direction interdépartementale de la police nationale (DIPN).
Un bâtiment, actuellement occupé par les services de la Banque de France, devrait se libérer courant 2026 et pourrait être envisagé pour reloger les services de police positionnés à la cité Desmichels. Le site répond aux besoins en termes tant opérationnels que de surface de l’ensemble des forces de police.
Je précise, néanmoins, que les disponibilités budgétaires ne permettront pas d’effectuer les études de faisabilité cette année.
Pour ce qui concerne l’éventuelle création d’un « hôtel des polices » accueillant police nationale, police municipale et centre de supervision urbaine, mais aussi les douanes, la question mérite d’être posée. Ce point sera donc intégré à l’étude que j’évoquais à l’instant comme une option à examiner sur le plan de sa faisabilité technique, de son coût et de ses délais de réalisation. En tout état de cause, le projet d’ensemble devra être compatible avec les capacités d’investissement de l’État.
La localisation de la Banque de France, au cœur de Gap, est intéressante, tout comme la surface du bâtiment. Il faut donc que nous puissions continuer d’avancer sur ce dossier.
J’indique également que des travaux sont régulièrement menés dans les locaux actuels. L’accueil a, par exemple, été rénové en 2017. En 2020 et au cours des cinq premiers mois de 2021, ce sont encore plus de 50 000 euros qui ont été engagés.
M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Arnaud, pour la réplique.
M. Jean-Michel Arnaud. Je vous remercie, monsieur le ministre, de ces précisions.
Il est important que ces études soient rapidement engagées. Ce ne sera pas possible cette année ; espérons que ce le soit l’an prochain.
Le maire de Gap, Roger Didier, est particulièrement attaché à la sécurité de sa ville. Nous nous souvenons, lui comme moi, de l’abandon pour des raisons financières d’un projet concernant le parc de la Commanderie, aujourd’hui utilisé comme parking pour les services des fonctionnaires d’État de la préfecture : quelle ambition…
Je souhaite vivement que ce projet puisse voir le jour : les Gapençais ne doivent pas pâtir d’une sécurité à demi-prix. Ils revendiquent légitimement le même niveau de protection que tous les autres citoyens du département.
reconnaissance du bénévolat des sapeurs-pompiers volontaires
M. le président. La parole est à Mme Elsa Schalck, auteure de la question n° 528, adressée à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur.
Mme Elsa Schalck. Monsieur le ministre, ma question porte sur la reconnaissance de l’engagement de nos sapeurs-pompiers volontaires.
Maillon essentiel de la sécurité et de la protection des citoyens, les sapeurs-pompiers volontaires représentent 80 % des effectifs des pompiers et effectuent 67 % du temps d’intervention global.
Leur caractère indispensable n’est plus à démontrer. Ici même, au Sénat, nous avions voté en 2023 l’octroi d’une bonification de trimestres de retraite au titre de la solidarité nationale afin de reconnaître leur engagement, mais aussi d’encourager, de soutenir et de favoriser la fidélisation des sapeurs-pompiers volontaires.
Or ces dispositions sont toujours en attente du décret d’application. Un tel retard empêche les sapeurs-pompiers volontaires de bénéficier de ces nouveaux droits. Il s’agit pourtant d’un soutien déterminant quand on sait qu’il manque 50 000 pompiers volontaires dans notre pays.
À l’heure où nos sapeurs-pompiers subissent une violence totalement inacceptable – je tiens à leur redire tout notre soutien –, il est d’autant plus essentiel de soutenir ceux qui s’engagent, ceux qui sacrifient leur temps pour aider, secourir, protéger les autres, parfois au péril de leur vie, comme nous l’avons vu encore récemment.
Monsieur le ministre, l’actualité nous rappelle l’urgence à mettre en vigueur cette bonification votée par le Parlement, pour que le volontariat des sapeurs-pompiers reste le socle de notre modèle de sécurité civile.
Ma question est donc simple : sous quel délai pourront-ils enfin en bénéficier ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur. Madame la sénatrice Elsa Schalck, 200 000 sapeurs-pompiers volontaires s’engagent au quotidien pour porter secours à nos concitoyens, contre 42 000 sapeurs-pompiers professionnels.
Nos sapeurs-pompiers volontaires n’en font pas leur métier, mais ils sont des citoyens engagés, ce qu’il faut reconnaître et valoriser. Je veux leur rendre un hommage appuyé au nom du Gouvernement, après l’agression de Niccolo Scardi, à Évian, il y a quinze jours. La vie de ce sapeur-pompier volontaire n’est certes plus aujourd’hui en danger, mais les conséquences médicales de ses blessures seront sans doute importantes…
Nous souhaitons protéger notre modèle. Comme vous le précisez, la loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 prévoit que les sapeurs-pompiers volontaires ayant accompli plus de dix ans de service puissent bénéficier de trimestres de retraite selon des modalités fixées par décret en Conseil d’État.
Le décret d’application n’a pour l’heure pas été publié, mais le dossier a été repris dans le cadre du Beauvau de la sécurité civile. Nous sommes favorables à ce que l’attribution de trimestres soit progressive et qu’ils viennent s’ajouter à des années complètes de cotisation.
La concertation sur le sujet nécessite du temps si nous voulons éviter d’aboutir de nouveau à une situation non satisfaisante.
Cette semaine et la semaine prochaine, deux réunions interministérielles sont fixées pour trouver un accord et mettre la dernière main à la rédaction définitive dudit décret. Les choses ont trop duré. L’objectif visé par le Gouvernement est donc de publier le décret avant la fin du mois de juin, comme le ministre d’État et moi-même nous y sommes engagés la semaine dernière devant l’Assemblée nationale, à l’occasion d’un débat sur les sapeurs-pompiers. Je vous remercie donc de m’offrir ici la possibilité de réitérer cet engagement.
M. le président. La parole est à Mme Elsa Schalck, pour la réplique.
Mme Elsa Schalck. Je vous remercie, monsieur le ministre. Je ne doutais pas de la détermination du ministère de l’intérieur sur ce sujet urgent. Je me réjouis d’avoir enfin une date butoir. Il est important de nous mettre en adéquation avec ce qui est voté au Parlement, d’autant qu’il s’agit ici d’une demande forte des sapeurs-pompiers volontaires.
abandon du projet de base de canadairs à mont-de-marsan et conséquences pour la lutte contre les incendies dans le sud-ouest
M. le président. La parole est à M. Hervé Gillé, auteur de la question n° 530, adressée à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur.
M. Hervé Gillé. Monsieur le ministre, je souhaite vous interroger sur l’abandon du projet d’installation d’une seconde base aérienne de sécurité civile à Mont-de-Marsan.
Ce projet avait pourtant été annoncé à la suite des incendies dramatiques qui ont ravagé le Sud-Ouest, notamment la Gironde, durant l’été 2022. Le 2 août 2023, M. Gérald Darmanin avait publiquement confirmé la création d’un second projet d’installation de canadairs dans le Sud-Ouest, souhaité par le Président de la République.
Cette annonce avait suscité une attente très forte sur notre territoire, en particulier dans les Landes et en Gironde, où s’étend le plus vaste massif de résineux d’Europe, extrêmement vulnérable aux incendies en période estivale.
Or nous avons récemment appris par un courrier que l’installation d’une deuxième base aérienne pérenne dans le Sud-Ouest n’est pas prévue pour l’instant. Ce désengagement soudain n’est pas compréhensible pour de nombreux élus locaux au regard des besoins ; elle suscite une réelle incompréhension.
Pourquoi un tel changement, alors même que le dérèglement climatique accroît chaque année un peu plus la fréquence et la violence des feux de forêt dans notre région ? Pourquoi renoncer à un outil aussi stratégique alors que la nécessité de renforcer nos moyens de lutte contre les mégafeux ne fait plus débat ?
Certes, la Gironde bénéficie depuis peu du déploiement saisonnier de quatre avions Air Tractor et d’un hélicoptère bombardier d’eau. Ces moyens sont précieux, mais ils restent fragiles, car rien ne garantit à ce stade leur maintien dans la durée.
Monsieur le ministre, pouvez-vous nous éclairer sur les raisons qui ont conduit à ce revirement ? Pouvez-vous nous dire si les moyens actuellement déployés seront sécurisés dans le temps, notamment en Gironde ? Enfin, entendez-vous réévaluer l’opportunité de doter durablement le Sud-Ouest, notre région, d’une implantation renforcée des moyens de sécurité civile ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur. Monsieur le sénateur Hervé Gillé, lors des deux dernières saisons des feux de forêt, des moyens aériens de la flotte de la sécurité civile – un Dash – ainsi que des moyens complémentaires loués – six Air Tractor et un hélicoptère bombardier d’eau – ont été prépositionnés sur des aérodromes militaires de la zone concernée, accompagnés de toute la chaîne de soutien logistique nécessaire à leur exploitation et à la réalisation des missions – maintenance des aéronefs, personnels navigants, armement de pélicandromes pour le ravitaillement des aéronefs en produit retardant.
Ce prépositionnement estival a donné des résultats opérationnels très satisfaisants, avec la mise en œuvre du dispositif de guet aérien armé, permettant une surveillance aérienne continue en journée et des largages de produit retardant dès les départs de feux. C’est une stratégie que nos services appliquent.
Ainsi, entre le 16 juillet et le 30 septembre 2024, les moyens que j’ai évoqués ont été positionnés en zone Sud-Ouest, principalement à Bordeaux. Au total, ces moyens ont été engagés sur dix feux de forêt et de nombreux circuits de guet aérien armé dans le massif des Landes de Gascogne. Ils ont effectué quarante-huit largages au cours de 200 heures de vol. L’engagement financier de la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises (DGSCGC) dans le cadre de ce renforcement s’est élevé à 6,5 millions d’euros.
Fort de ce bilan encourageant, je confirme que ces détachements saisonniers seront donc reconduits pour 2025 et pour les années à venir. Selon le risque de feux de forêt, ces détachements peuvent également être complétés par d’autres moyens aériens, comme des canadairs.
Ce dispositif, agile et adaptable, est piloté au quotidien par un centre national de coordination avancé de sécurité civile. Il correspond aux enjeux de renforcement de la stratégie de lutte contre les feux de forêt.
En outre, dans le contexte budgétaire actuel, les crédits d’investissement de la sécurité civile sont fortement mobilisés et prioritairement orientés pour permettre le renouvellement de ses flottes d’aéronefs à l’horizon de 2035.
Je rappelle que la flotte d’hélicoptères est en cours de renouvellement pour un montant de 450 millions d’euros et que la flotte d’avions doit également faire l’objet d’une programmation budgétaire pluriannuelle, pour permettre son remplacement et son renforcement dans la perspective de l’augmentation des risques à l’horizon de 2030-2035.
Au-delà, les conclusions du Beauvau de la sécurité civile nous permettront de conduire une réflexion sur l’ambition capacitaire des moyens nationaux de la sécurité civile de façon que le maillage territorial soit parfaitement assuré.
M. le président. La parole est à M. Hervé Gillé, pour la réplique.
M. Hervé Gillé. Cette réponse confirme l’abandon de la seconde base aérienne de sécurité civile à Mont-de-Marsan. C’était pourtant un engagement et une promesse du Président de la République et du ministre Gérard Darmanin.
brigade de gendarmerie de vivonne
M. le président. La parole est à M. Bruno Belin, auteur de la question n° 537, adressée à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur.
M. Bruno Belin. Monsieur le ministre, plusieurs sujets concernent la gendarmerie dans le département de la Vienne. Je voudrais d’abord saluer le travail du colonel Assou, patron de la gendarmerie départementale, et les 550 gendarmes sous sa responsabilité.
La Vienne est située sur le chemin entre la région parisienne et l’Espagne, avec tous les problèmes que l’on peut imaginer. Le département accueille également le centre pénitentiaire de Poitiers-Vivonne, qui comptait à l’origine 600 places ; or, vendredi dernier, la prison accueillait très exactement 976 détenus. Cela implique un certain nombre d’allers-retours et fait aujourd’hui supporter à la brigade de Vivonne toute la charge des enquêtes judiciaires. Ne faudrait-il pas créer une unité particulière pour gérer les questions de police judiciaire et décharger ainsi la brigade de Vivonne ?
Par ailleurs, les locaux de certaines brigades doivent être restaurés, notamment à Loudun et à Civray. Il faudra donc des moyens nouveaux pour assurer le maintien des ressources humaines sur le territoire.
En outre, quid des brigades nouvelles ? Nous avons réussi à en créer une à Scorbé-Clairvaux l’année dernière. Une nouvelle brigade doit ouvrir à Fontaine-le-Comte. Aurons-nous suffisamment d’effectifs pour les faire fonctionner ?
Je me permets donc d’attirer votre attention, monsieur le ministre, car le département de la Vienne, confronté à un vrai déficit en matière de ressources humaines, a besoin de nouveaux postes.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur. Monsieur le sénateur Bruno Belin, pour recentrer l’action des gendarmes et des policiers sur leur cœur de métier, un plan de transfert à l’administration pénitentiaire des missions de transfèrement et d’extraction judiciaires a été engagé en 2011 et s’est clôturé en 2019.
Cette reprise progressive des missions par le ministère s’est accompagnée d’un transfert de plus d’un millier d’équivalents temps plein (ETP). La circulaire conjointe avec le ministère de la justice de juin 2024 réaffirme la volonté de limiter le recours aux gendarmes et policiers. Les travaux en cours et à venir visent à poursuivre l’optimisation des ressources, par exemple par une systématisation du recours aux visioconférences avec les magistrats.
Néanmoins, le surcroît d’activité induit par la présence d’un centre pénitentiaire est pris en compte dans le calibrage des effectifs. Celui de Vivonne génère des missions remplies par les militaires de la gendarmerie de la Vienne. Ainsi, depuis le début de l’année 2025, ils ont assuré soixante-deux transfèrements administratifs ou judiciaires.
Enfin, au-delà des missions de transfèrement et d’extraction, la gestion des événements du centre pénitentiaire nécessite des interventions de la brigade de Vivonne et amène une activité de police judiciaire. C’est pourquoi un effort a été fait pour renforcer l’effectif de cette brigade, avec la création de dix-sept postes depuis 2007. En outre, elle bénéficie d’un groupe d’appui judiciaire spécifique, régulièrement tenu par des réservistes opérationnels expérimentés.
Dans ce contexte, il n’est pas envisagé de créer une brigade consacrée aux extractions judiciaires, mission qui n’est plus de la compétence du ministère de l’intérieur.
De plus, dans le cadre du plan 239 brigades, les dix militaires de la future brigade de Fontaine-le-Comte pourront appuyer la brigade limitrophe de Vivonne.
M. le président. La parole est à M. Bruno Belin, pour la réplique.
M. Bruno Belin. Il y a quelques semaines, un détenu de Vivonne a été transféré à la demande d’un magistrat pour une audition de quelques minutes à Toulouse, ce qui a mobilisé quinze gendarmes. Faire évoluer le contexte réglementaire pour mettre en place des visioconférences nous ferait gagner du temps.
J’ai pris bonne note des dix postes créés pour Fontaine-le-Comte, mais nous avons besoin d’unités supplémentaires autour de cette maison d’arrêt à Vivonne.
privatisation des lignes de bus de petite couronne
M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, auteur de la question n° 488, adressée à M. le ministre auprès du ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation, chargé des transports.
M. Fabien Gay. Madame la ministre, depuis le début du processus de privatisation de la RATP, il a été constaté, sans surprise, une dégradation de la qualité du service et des conditions de travail des agents et agentes.
Plutôt que de tirer les enseignements de cette première vague de privatisation délétère, le conseil d’administration d’Île-de-France Mobilités avance coûte que coûte. Il a voté le 10 avril dernier une nouvelle vague qui concernera trente-sept lignes de bus au profit de Transdev et d’ATM, dans un processus concernant au total 350 lignes.
À Paris et dans mon département, territoire où la question des services publics est cruciale, Transdev vient de remporter le marché et gérera dès mai 2026 deux dépôts de bus et dix-neuf lignes.
Alors que Jean Castex s’était déclaré favorable lors d’une audition au Sénat à la création d’un observatoire visant à rétablir une base de données sur les impacts de ce processus de privatisation, ce vœu est resté lettre morte. Le projet continue sans évaluation sérieuse et sans égard pour les 70 000 personnes qui ont déjà signifié leur opposition à cette privatisation en signant la pétition « Stop galère ». Ce projet coûtera, au bas mot, près de 5 milliards d’euros aux usagers et usagères.
Il n’existe pourtant aucune obligation d’effectuer cette privatisation, qui se fait sur le moins-disant social. Cette logique imposée par la force par le conseil d’administration d’Île-de-France Mobilités, qui reste sourd aux revendications des élus locaux, des salariés et des usagers, n’a qu’un but : brader nos services publics d’intérêt général.
Le pire reste donc à venir et nous ne pouvons nous y résoudre.
Madame la ministre, je vous poserai trois questions. Quel travail d’évaluation a été réalisé pour tirer les conséquences de la première vague de privatisation entamée en 2021 ? Que comptez-vous faire pour imposer la prise en compte des revendications des élus, des salariés et de la société civile qui s’opposent à la dégradation des conditions de travail et de l’offre de transport public ? Enfin, comptez-vous mettre un terme à la vente à la découpe de la RATP et réaffirmer son statut public ?
En bref, que comptez-vous faire pour imposer la suspension ou la cessation de cette privatisation, qui risque surtout d’affecter les villes et les quartiers les plus populaires, c’est-à-dire ceux où le service public tend à garantir une accessibilité et une égalité territoriale en matière de desserte ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Françoise Gatel, ministre déléguée auprès du ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation, chargée de la ruralité. Monsieur le sénateur Fabien Gay, permettez-moi tout d’abord de vous présenter les excuses de M. le ministre Tabarot, retenu par la conférence Ambition France Transports.
Je rappelle, en premier lieu, que l’ouverture à la concurrence des transports collectifs franciliens découle des engagements européens de la France, auxquels nous ne saurions nous soustraire.
Je souligne également que des opérateurs privés de transport exploitent déjà depuis de nombreuses années des réseaux de transport collectif dans de grandes métropoles françaises. L’ouverture à la concurrence a permis aux opérateurs de transport français d’exporter leurs savoir-faire à l’international sur de nombreux nouveaux marchés, ce qui implique un principe de réciprocité.
En Île-de-France, l’organisation des transports urbains relève de la compétence de l’autorité organisatrice Île-de-France Mobilités et non de l’État. Île-de-France Mobilités s’est appuyée sur la première vague d’ouverture à la concurrence en grande couronne – réseau Optile –, notamment dans sa dimension sociale, pour préparer celle du réseau historique des bus parisiens – Paris et petite couronne. Il y a donc eu une sorte d’expérimentation.
Les décisions d’attribution des lots mis en concurrence par Île-de-France Mobilités sont prises sur la base de critères techniques, économiques et sociaux objectifs et ambitieux afin, notamment, de garantir la qualité de service pour les usagers.
L’État a également pris des engagements forts pour garantir un cadre social de haut niveau aux salariés de la RATP transférés aux nouveaux attributaires : la loi garantit notamment le maintien de la rémunération nette, la garantie d’emploi et le régime spécial de retraite de la RATP.
état des ponts en france
M. le président. La parole est à Mme Mireille Conte Jaubert, auteure de la question n° 494, adressée à M. le ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation.
Mme Mireille Conte Jaubert. Madame la ministre, en 2019, à la suite de l’effondrement tragique du pont de Gênes, une mission d’information du Sénat rendait un rapport alarmant concernant la situation de nos ponts. Celle-ci soulignait alors que plus de 25 000 ponts étaient dans un mauvais état structurel, mettant ainsi en exergue un risque sécuritaire fort en l’absence de travaux.
Certes, le programme national Ponts travaux lancé en 2024, prolongé jusqu’en 2026 et doté d’une enveloppe de 55 millions d’euros était une réponse attendue de la part des collectivités pour pouvoir engager les travaux nécessaires.
Toutefois, bien que les règles pour pouvoir y prétendre aient évolué, celles-ci s’avèrent toujours trop restrictives, empêchant nombre de nos communes de pouvoir en bénéficier. C’est notamment le cas de la commune d’Hure, située en Gironde, dont deux ponts sur quatre nécessitent des travaux de consolidation. Bien que reconnue éligible par le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema), les critères établis ne lui permettent pas, en réalité, de prétendre au dispositif.
Le devis, estimé à 12 200 euros, est inférieur au montant minimum des travaux imposé, qui est de 40 000 euros hors taxes. Dans le cas présent, il s’agit donc du critère financier.
Toutefois, comme l’a souligné l’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité, les critères relatifs à la largeur totale des ponts, qui doivent mesurer plus de 2 mètres, ou encore la complexité des montages des dossiers sont autant de conditions qui limitent le recours à ce dispositif par nos communes.
Madame la ministre, le Gouvernement va-t-il assouplir les critères d’éligibilité à ce dispositif pour renforcer le soutien financier et humain dont les communes ont besoin ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Françoise Gatel, ministre déléguée auprès du ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation, chargée de la ruralité. Madame la sénatrice Mireille Conte Jaubert, votre question met en évidence le travail effectué par le Sénat sur la sécurité des ponts.
Comme vous l’avez rappelé, le Gouvernement a pris acte du besoin d’accompagnement des petites communes exprimé dans le rapport sénatorial précité au travers du programme national Ponts travaux.
Depuis 2020, ledit programme a permis à 14 800 communes de bénéficier d’une évaluation gratuite de leurs ouvrages. À l’automne 2023, un guichet de subvention pour les travaux, doté de 55 millions d’euros, a été mis en place. Le montant des subventions accordées à ce jour est de 26,8 millions d’euros : aucun dossier n’est donc bloqué faute de budget.
La commune d’Hure, que vous citez, n’a à ce jour déposé aucun dossier de demande de subvention. Je ne peux que l’inciter à y procéder : le Cerema peut l’aider, si nécessaire, dans la mise au point des études, grâce au dispositif SOS Ponts.
La constitution des dossiers et des critères d’éligibilité a été assouplie récemment en lien avec l’AMF pour les adapter aux petites communes : les demandes peuvent être déposées sur le site demarches.simpifiees.fr, le seuil d’éligibilité ayant été réduit à 20 000 euros pour les murs de soutènement.
Pour les ponts, après plus d’une année de fonctionnement, il apparaît que les dossiers inférieurs à 40 000 euros sont parfois sous-estimés ou ne répondent pas à l’objectif de réparation structurelle. Ils concernent souvent des réparations d’urgence, ce que je comprends, mais ne règlent pas le problème à long terme.
Néanmoins, le montant des travaux d’urgence peut être intégré dans le coût total de l’opération si des travaux de remise en état structurel sont engagés par la suite.
sécurisation de la route nationale 248
M. le président. La parole est à M. Philippe Mouiller, auteur de la question n° 498, adressée à M. le ministre auprès du ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation, chargé des transports.
M. Philippe Mouiller. Madame la ministre, ma question concerne la sécurisation de la RN 248, qui relie l’autoroute A10 à la RN 11. Je pense plus particulièrement au tronçon situé entre les communes de Granzay-Gript et de Frontenay-Rohan-Rohan, dans le département des Deux-Sèvres.
Cette portion de la RN 248 est particulièrement dangereuse. Sur une dizaine de kilomètres en ligne droite, on compte quatre carrefours et plusieurs intersections et routes départementales. De plus, la configuration du secteur oblige les habitants à traverser quotidiennement cet axe, sur lequel le trafic est très dense. Ainsi, depuis plus d’une dizaine d’années, on dénombre vingt-trois accidents, treize décès, trente et un blessés graves et quinze blessés légers.
Malgré ces tristes chiffres, rien n’a été fait à ce jour. Pourtant, plusieurs de vos prédécesseurs, madame la ministre, ont reconnu le caractère prioritaire de cet axe. En outre, le contrat de plan État-région (CPER) de 2015-2020 préconisait la mise en œuvre de dispositifs d’amélioration de la desserte du littoral, dont la sécurisation de la RN 248 à hauteur de la commune de Frontenay-Rohan-Rohan. Il s’agit de la route en direction de La Rochelle.
Cette opération avait été retenue dans le cadre du volet relatif à la mobilité multimodale dudit CPER, à hauteur de 16 millions d’euros. Toutefois, depuis, aucun aménagement n’a été entrepris. Cette situation est surprenante.
À une question orale que j’avais moi-même posée le 22 février 2017 sur ce sujet, le ministre des transports de l’époque avait répondu qu’il était conscient de la nécessité d’un aménagement améliorant la gestion des flux des réseaux secondaires. Il suggérait d’organiser l’échange en un seul point avec la RN 248 par un carrefour dénivelé – la réponse technique était même proposée.
De même, en 2018, Élisabeth Borne, à la tête du même ministère, disait avoir pleinement conscience de l’importance des enjeux de sécurité de cet itinéraire et identifiait deux carrefours avec le réseau secondaire départemental nécessitant des aménagements de sécurité.
Madame la ministre, qu’envisage le Gouvernement pour faire avancer ce dossier ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Françoise Gatel, ministre déléguée auprès du ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation, chargée de la ruralité. Monsieur le président Mouiller, vous connaissez l’attention que porte le ministre Philippe Tabarot à la sécurité des transports. Il m’a chargée de vous transmettre sa réponse, qui pourra être complétée ultérieurement.
Vous le savez, la sécurité de nos concitoyens est une priorité des services de l’État, gestionnaire des routes nationales. Des études sont régulièrement conduites pour décider d’éventuels aménagements en fonction des diagnostics établis et des priorités identifiées.
En ce qui concerne spécifiquement la RN 248, qui vous préoccupe à raison, neuf accidents graves, dont trois mortels, ont été dénombrés sur cet axe au cours de la dernière décennie. Cependant, les causes de ces trois accidents mortels, que nous regrettons tous, semblent liées au comportement des conducteurs et non à la qualité de l’infrastructure.
Une étude de sécurité intégrant ce secteur a néanmoins été réalisée, sans conclure à un besoin d’aménagement de sécurité majeur sur la section comprise entre les deux communes des Deux-Sèvres Granzay-Gript et Frontenay-Rohan-Rohan.
Une opération d’aménagement de la RN 248 était en effet inscrite dans le CPER 2015-2020, que vous citez à raison.
Cependant, dans le cadre d’un avenant au CPER, ce financement a été redéployé en accord avec l’ensemble des partenaires au profit d’autres opérations dans la région. Par ailleurs, lors des discussions entre l’État et la région sur le CPER 2023-2027, cet axe n’a pas été considéré comme prioritaire en accord avec la région Nouvelle-Aquitaine.
Néanmoins, depuis 2020, l’État a réalisé plusieurs travaux d’amélioration de la sécurité – îlots, profilages de chaussées, renforcement de la signalisation, dispositifs de retenue, rénovation de chaussée et mise en place de dispositifs d’alerte sonore. En outre, des projets de renouvellement de la signalisation directionnelle sont à l’ordre du jour.
Monsieur le sénateur, soyez assuré de l’écoute du ministre Tabarot et de ses équipes ainsi que de leur engagement sur ces questions.
faits de violences sexistes et sexuelles au sein d’air france
M. le président. La parole est à Mme Sophie Briante Guillemont, auteure de la question n° 509, adressée à M. le ministre auprès du ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation, chargé des transports.
Mme Sophie Briante Guillemont. Madame la ministre, comme beaucoup de mes concitoyens, en particulier les Français de l’étranger, j’ai beaucoup de respect – d’affection, même – pour la compagnie aérienne Air France.
Il y a trois mois, une enquête de presse de la cellule d’investigation de Radio France révélait de graves faits de violences sexuelles et sexistes au sein de la compagnie, qui étaient déjà connus de la direction, des syndicats et de nombreux acteurs.
Alors que l’État est actionnaire d’Air France-KLM à hauteur de 28 %, quelles mesures ont été prises pour répondre à cette situation, trois mois après la révélation des faits ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Françoise Gatel, ministre déléguée auprès du ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation, chargée de la ruralité. Madame la sénatrice, vous appelez l’attention du Gouvernement sur les faits graves de violences sexistes et sexuelles au sein de la compagnie Air France, révélés récemment.
Le Gouvernement est très attentif à votre préoccupation et prend la plus grande mesure de la gravité des faits dénoncés.
L’État, actionnaire de référence du groupe Air France-KLM, a aussitôt réagi. Dès le mois de février 2025, la direction a été reçue au ministère chargé des transports afin de rendre compte de la situation et de détailler les mesures correctrices qu’elle entendait mettre en œuvre.
À l’issue de cette rencontre, la compagnie a annoncé un plan d’action renforcé prévoyant : la création d’une cellule d’écoute externe, confidentielle et accessible à tout moment à l’ensemble des salariés ; le rattachement direct à la direction des ressources humaines d’un service dédié à la lutte contre les discriminations, le harcèlement et les faits de violences sexistes et sexuelles ; le renforcement des dispositifs existants de prévention, d’accompagnement des victimes et de sanction disciplinaire ; la généralisation des actions de formation et de sensibilisation à l’ensemble du personnel.
Des échanges sont engagés entre les services compétents et la direction de l’entreprise pour assurer un suivi attentif des mesures annoncées et de leur mise en œuvre.
Par ailleurs, l’État, en tant qu’actionnaire du groupe, est très attentif au traitement des faits de violences sexistes et sexuelles. Cependant, la responsabilité première incombe à l’employeur, qui doit, conformément au droit du travail, assurer la protection des victimes et prendre les mesures disciplinaires appropriées à l’encontre des auteurs.
Le contrôle du respect de ces obligations relève de l’inspection du travail, qui a autorité pour intervenir en cas de manquements. Le Gouvernement suit étroitement la mise en œuvre de ces dispositifs et demeure attentif aux retours d’expérience ainsi qu’aux constats formulés par les acteurs de terrain.
Soyez assurée, madame la sénatrice, de la détermination du Gouvernement à garantir un environnement de travail respectueux et sûr à l’ensemble du personnel d’Air France, ainsi qu’à l’ensemble des salariés de toute entreprise.
M. le président. La parole est à Mme Sophie Briante Guillemont, pour la réplique.
Mme Sophie Briante Guillemont. Madame la ministre, je vous remercie pour ces éclaircissements.
Cependant, même si je me réjouis de l’annonce de ces mesures, j’espère qu’il ne s’agit pas uniquement d’une opération de communication.
De nombreuses victimes m’ont contactée depuis que j’ai adressé ma question écrite au ministre des transports – question à laquelle je n’ai pas reçu de réponse, raison pour laquelle je l’ai transformée en question orale. Elles n’ont pas du tout été entendues ; au contraire, la direction a fait en sorte qu’elles se taisent. Aujourd’hui, certaines d’entre elles sont en arrêt maladie et d’autres ont définitivement quitté la compagnie.
Par ailleurs, cette situation a également trait à la sécurité aérienne.
Le secteur aérien est soumis à un très grand nombre de protocoles, mais aucun n’est prévu en cas d’agression sexuelle ou sexiste lors d’un vol ou d’une escale, alors qu’il est probable que ces situations se produisent régulièrement. J’appelle donc le Gouvernement à réfléchir sur cette absence de protocole, qui est susceptible de mettre en péril les passagers d’un vol dont le personnel aurait été victime de telles violences.
Enfin, j’invite l’État et Air France à s’inspirer des pratiques d’autres compagnies. Je pense en particulier à la politique Speak-up, speak-out mise en place par Easyjet, qui permet à ses employés de signaler immédiatement les cas de harcèlement dont ils seraient la cible ou qui viseraient un tiers. Ce mécanisme prévoit alors la protection immédiate de la victime, afin de lancer une enquête interne.
Peut-être aurai-je l’occasion de réinterroger le ministre des transports sur ce sujet.
projet vital de la ligne nouvelle paris-normandie
M. le président. La parole est à M. Sébastien Fagnen, auteur de la question n° 515, adressée à M. le ministre auprès du ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation, chargé des transports.
M. Sébastien Fagnen. Madame la ministre, ma question fait écho à la récente alerte sur la fermeture totale de la ligne ferroviaire Paris-Évreux-Caen-Cherbourg pendant plusieurs mois, en 2028 ou 2029, pour conforter le remblai d’Apremont, symbole du manque d’investissement ferroviaire dont pâtit la Normandie depuis trop longtemps. Pour ma part, je veux rappeler la nécessité pour le Gouvernement de soutenir résolument la ligne nouvelle Paris-Normandie (LNPN).
La LNPN est un projet d’intérêt national, vital à bien des égards pour l’ouest de notre pays. Le vieillissement des infrastructures ferroviaires et la forte densité du trafic entre les lignes normandes et franciliennes, à partir de Mantes-la-Jolie, rendent la connexion entre la Normandie et la capitale aléatoire et difficile. Les milliers d’usagers des lignes Paris-Caen-Cherbourg et Paris-Rouen-Le Havre le vivent au quotidien.
Parce qu’elle garantit l’augmentation de la fréquence, la régularité et la ponctualité des trains depuis la Normandie jusqu’à Paris, autant que la réduction de la durée des trajets, la LNPN est une infrastructure déterminante pour assurer le désenclavement réel de la région et pérenniser son essor économique. Je pense bien sûr à l’aménagement de la vallée de la Seine, à Haropa Port et au programme Aval du futur d’Orano dans le Cotentin.
Le projet revêt également un intérêt écologique majeur, car il favorisera un report modal au profit de solutions décarbonées pour les voyageurs et les marchandises.
La région Île-de-France elle-même tirerait des bénéfices de la mise en place de la LNPN. Les Yvelines dépendent, par exemple, des trains normands, qui leur proposent un service d’ores et déjà plus performant que le Transilien. La libération de sillons ferroviaires sera également utile à la logistique et à l’approvisionnement de la région Île-de-France.
N’oublions pas que le projet a déjà bénéficié de plus de 100 millions d’euros d’investissements et qu’il a été soutenu par tous les gouvernements successifs depuis quinze ans.
Ainsi, lors de son audition par notre commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, le mercredi 30 octobre 2024, François Durovray, alors ministre délégué chargé des transports, déclarait son intention de « nommer un nouveau préfet coordonnateur des actions de l’État pour l’aménagement de la vallée de la Seine afin de convaincre chaque territoire des gains attendus de cette infrastructure ».
Madame la ministre, quelle impulsion nouvelle le Gouvernement donnera-t-il au projet de LNPN, notamment au travers de la nomination annoncée par l’ancien ministre ? Comment entend-il répondre aux attentes de financements pour que ce projet structurant pour l’aménagement du territoire national puisse enfin voir le jour ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Françoise Gatel, ministre déléguée auprès du ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation, chargée de la ruralité. Monsieur le sénateur, je vous remercie de cette question essentielle pour l’aménagement du territoire.
Le soutien du Gouvernement à cette ligne ferroviaire ne faiblit absolument pas. La ligne nouvelle Paris-Normandie est un projet d’intérêt national, qui doit améliorer significativement les dessertes entre Paris, la vallée de la Seine et les grandes villes normandes en matière de régularité, de capacité et de rapidité.
Elle bénéficiera à la Normandie comme à l’Île-de-France, pour les bassins d’emploi, les voyageurs et le fret. En effet, les voies nouvelles qui seront réalisées libéreront de la capacité sur les voies existantes pour améliorer les mobilités du quotidien.
La région Île-de-France a fait état de préoccupations quant aux nuisances que pourrait engendrer ce projet, notamment dans la traversée des Yvelines. Ces préoccupations sont légitimes et trouveront des réponses prochaines qui permettront de concilier réalisation nécessaire de la ligne nouvelle Paris-Normandie pour les usagers franciliens et normands et qualité de vie des riverains de ladite ligne.
Il s’agit maintenant de reprendre le dialogue avec l’ensemble des parties prenantes. La nomination par le Premier ministre d’un nouveau délégué interministériel au développement de la vallée de la Seine, M. Serge Castel, a amorcé la relance du projet. Le délégué a déjà rencontré tous les élus concernés et présidera très prochainement un comité de pilotage auquel participera le ministre des transports et qui constituera le nouveau point de départ du projet.
avenir du programme « petites villes de demain »
M. le président. La parole est à M. Patrice Joly, auteur de la question n° 538, adressée à M. le ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation.
M. Patrice Joly. Madame la ministre, le programme Petites Villes de demain (PVD), lancé en 2020, a démontré toute son efficacité en renforçant l’ingénierie territoriale des petites centralités et en consolidant à la fois leur maillage et leur rôle dans les territoires ruraux.
Plus de 1 600 communes et intercommunalités en ont été bénéficiaires, pour plus de 7 millions d’habitants.
Dans la Nièvre, près de cinquante études ont été financées et quatorze postes de chefs de projet ont été créés, grâce à un partenariat étroit entre l’État, la Banque des territoires et le conseil départemental.
Pourtant, alors même que les collectivités rurales traversent une période de difficultés financières inédites, avec une épargne brute en chute libre, un endettement qui explose et des charges de centralité toujours plus lourdes, l’avenir de ce programme demeure incertain. Sa fin est annoncée pour mars 2026 et aucune visibilité n’a été donnée aux élus locaux sur son éventuelle prolongation.
Cette absence de perspective est source d’une inquiétude légitime pour les élus et les habitants, car l’arrêt brutal de ce dispositif risquerait de compromettre les avancées obtenues et fragiliserait durablement la dynamique de nos petites villes.
Aussi, madame la ministre, dans un contexte de contraintes budgétaires fortes pour les collectivités, le Gouvernement prévoit-il de prolonger Petites Villes de demain après 2026, et sous quelles conditions ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Françoise Gatel, ministre déléguée auprès du ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation, chargée de la ruralité. Monsieur le sénateur Joly, je connais votre attachement à la ruralité et je suis heureuse de vous entendre saluer l’action du Gouvernement en faveur de la ruralité au travers du dispositif Petites Villes de demain, dont vous avez rappelé l’importance. Le programme Villages d’avenir concourt également à cet objectif.
Vous avez raison : gérer, c’est prévoir. Il a toujours été prévu que le dispositif Petites Villes de demain arrive à échéance en 2026. Nous portons tous un intérêt particulier à ce projet et, surtout, à la suite qui pourra lui être donnée.
Petites Villes de demain représente un apport essentiel en matière d’ingénierie à nos communes, qui manquent de soutien en la matière. Aujourd’hui, l’État finance les postes des chefs de projet à hauteur de 76 %. Ce soutien financier porte également sur des mesures thématiques, comme le concours de partenaires.
Nous animons aussi un réseau des PVD, afin d’éviter l’isolement des communes et de favoriser les échanges d’expérience.
Aujourd’hui, 1 646 communes de nos territoires sont bénéficiaires de ce programme, ce qui représente plus de 7 millions d’habitants. Nombre d’entre elles sont engagées dans des opérations de revitalisation du territoire : plus de 353 000 opérations de rénovation des logements ont ainsi été réalisées.
L’État a engagé plus de 3,7 milliards d’euros dans les programmes consacrés à la ruralité depuis leur lancement. Nous devons désormais nous interroger sur leur avenir et nous le ferons ensemble, monsieur le sénateur.
J’ai lancé une mission d’évaluation dans le cadre du tour de France de la ruralité que j’ai entamé et qui m’a conduite à visiter trente-quatre départements, dont le vôtre. Lors de chacun de ces déplacements, j’ai eu l’occasion de débattre avec les élus de Petites Villes de demain. Par ailleurs, une étude sur le sujet est en cours de réalisation par les sous-préfets référents ruralité et l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT).
Ce programme est utile. Nous devons travailler ensemble sur le sujet : quelle que soit la volonté du Gouvernement de défendre la ruralité avec force, c’est bien le Parlement, au travers du vote des budgets, qui prend finalement les décisions. Sans doute aurons-nous l’occasion d’en reparler de manière concrète très prochainement.
M. le président. La parole est à M. Patrice Joly, pour la réplique.
M. Patrice Joly. Madame la ministre, je vous remercie pour votre réponse. Cependant, il faut cesser les économies de bouts de chandelle, qui ne rapportent quasiment rien à l’État, tout en privant les collectivités rurales d’une précieuse source de financements… La continuité dans le financement d’un programme est essentielle à son efficacité.
Évitons, par ailleurs, de nourrir un sentiment d’abandon chez certains de nos concitoyens.
Malgré plusieurs avancées, consacrées par les programmes France Ruralités Revitalisation (FRR) ou Villages d’avenir, nos territoires ruraux restent confrontés à de nombreuses difficultés liées aux infrastructures, aux commerces de proximité ou à l’accès à la santé. Et pourtant, nos territoires font preuve de résilience, grâce aux élus, qui interviennent souvent de manière bénévole.
J’y insiste : la ruralité ne peut être traitée comme une variable d’ajustement budgétaire. Bien au contraire, c’est en investissant dans ces territoires et en consolidant les programmes existants que nous défendrons réellement l’égalité des chances, que l’on vive en ville ou à la campagne. La ruralité n’est pas un luxe.
M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.
M. Patrice Joly. C’est un pilier de notre République qu’il ne faut pas fragiliser, il y va de l’avenir de notre pays.
problèmes posés lors de la reprise de tombes abandonnées
M. le président. La parole est à Mme Else Joseph, auteure de la question n° 452, transmise à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur.
Mme Else Joseph. Madame la ministre, ma question a trait à un sujet peu réjouissant, ce dont je m’excuse par avance, mais pourtant essentiel, puisqu’il concerne le respect dû à nos morts. C’est un principe fondamental de notre civilisation, qui se traduit par l’existence des lieux funéraires.
Pour nos élus, ce principe est aussi un devoir, dont l’exercice soulève beaucoup de contraintes. Je veux notamment parler du problème posé par la reprise des tombes abandonnées.
En raison d’un manque cruel de places dans les cimetières, certaines communes ont dû reprendre des tombes abandonnées et, pour ce faire, construire des ossuaires en prévision d’opérations d’exhumation.
Des entreprises sollicitées ont parfois eu recours à des sacs à ossements, alors qu’il serait préférable d’utiliser des reliquaires en bois. Cependant, ceux-ci prennent plus de place et sont plus coûteux alors que la charge financière revient intégralement à la commune.
Cependant, un doute apparaît sur la légalité de cette démarche en raison d’une confusion entre les exhumations civiles et les exhumations administratives. Alors que les premières sont demandées par la famille, les secondes sont réalisées par les communes afin de récupérer des places et de supprimer les tombes délabrées.
Les élus s’interrogent donc sur la possibilité de recourir à certains procédés relatifs à la disposition des ossements. Les communes qui doivent reprendre en urgence des sépultures abîmées aimeraient s’acquitter de leur devoir non seulement en conformité avec la loi, mais aussi dans le respect sacré dû à nos morts.
Nos communes souhaiteraient donc disposer d’informations claires sur le sujet. Or le coût qu’elles devront prendre en charge, si certains procédés actuellement utilisés ne sont pas conformes au droit, risque d’être élevé. Plus largement, nos élus attendent d’être soutenus et assurés qu’ils agissent en toute légalité lorsqu’ils entreprennent des démarches sensibles.
Madame la ministre, les communes veulent être rassurées quant aux modalités de reprise des tombes abandonnées. Et, contrairement à ce que pourrait laisser penser un titre provocateur, elles veulent non pas cracher sur nos tombes, mais bien contribuer au respect du devoir élémentaire de l’humanité dans les meilleures conditions.
Qu’est-il envisagé par les pouvoirs publics pour éviter que nos élus ne s’exposent à des irrégularités ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Françoise Gatel, ministre déléguée auprès du ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation, chargée de la ruralité. Madame la sénatrice, vous m’interrogez sur l’un des sujets particulièrement difficiles auxquels sont confrontés les maires dans leur travail quotidien. C’est une question douloureuse, qui touche en outre au sacré, comme vous l’avez souligné, car il s’agit d’ossements.
Les maires doivent agir dans un cadre particulièrement sécurisé, car ils ne sauraient être mis en difficulté pour avoir procédé à des exhumations, que celles-ci aient été demandées par la famille du défunt ou qu’elles résultent d’une procédure d’abandon.
Le droit positif ne fournit pas de définition précise des équipements qui peuvent être utilisés en cas d’exhumation, parmi lesquels figurent les sacs à ossements. Les boîtes à ossements sont, elles, citées au sein du code général des collectivités territoriales, qui prévoit explicitement que « lorsque le cercueil retrouvé est détérioré, le corps est placé dans un autre cercueil » – dont les dimensions doivent être « appropriées », définition qui laisse une certaine latitude – « ou dans une boîte à ossements ».
La boîte à ossements comme le cercueil de dimensions appropriées ne font l’objet d’aucune définition juridique ou pratique précise. Ces contenants ne sont donc pas réglementés. C’est ainsi qu’il faut lire le droit.
Aujourd’hui, les opérateurs funéraires et les collectivités locales ont souvent recours aux sacs à ossements. Le Conseil national des opérations funéraires a eu l’occasion d’examiner cette question et a considéré que, parmi les différents équipements, le recours audit sac ne pouvait être exclu par principe.
Cela signifie que ce dispositif peut être autorisé dans la mesure où le droit en vigueur ne l’interdit pas, sous réserve, naturellement, d’une manipulation de restes exhumés respectant la dignité et la décence.
Il convient donc de considérer que le dispositif que vous évoquez ne présente absolument aucune incompatibilité avec le droit en vigueur. Cependant, si vous le souhaitez, nous pourrons envisager une information plus précise à destination des maires.
M. le président. La parole est à Mme Else Joseph, pour la réplique.
Mme Else Joseph. Ces éclaircissements sont importants. En effet, les maires sont soumis à un nombre croissant de contraintes. Par ailleurs, il ne faut pas oublier le coût de ces procédures.
Mme Else Joseph. Dans les Ardennes, la reprise de dix-sept sépultures a coûté 40 000 euros à une commune ; dans une autre, ce sont cinquante sépultures qui sont à reprendre.
Je vous remercie pour votre soutien, madame la ministre.
financement des contrats d’assurances par les collectivités territoriales
M. le président. La parole est à M. Pascal Martin, auteur de la question n° 412, transmise à M. le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
M. Pascal Martin. Ma question concerne les difficultés croissantes et récurrentes que rencontrent les collectivités territoriales et leurs syndicats pour assurer leurs bâtiments et leurs flottes de véhicules.
De nombreuses collectivités ne parviennent plus à souscrire de contrats d’assurance pour leurs biens publics en raison de la montée en puissance des aléas climatiques, des risques liés à la vétusté des infrastructures et de l’augmentation des tarifs des polices d’assurance. Ce phénomène compromet ainsi leur capacité à remplir leur rôle de gestion des biens publics et des services essentiels à leurs administrés.
À ce jour, des bâtiments scolaires, des équipements techniques et administratifs ou encore des véhicules nécessaires au bon fonctionnement des services de proximité ne sont plus assurés.
Ces dernières années, l’augmentation vertigineuse des primes d’assurance et la raréfaction des assureurs prêts à couvrir ces risques ont plongé des dizaines, voire des centaines de communes dans une situation de grande précarité. Elles s’interrogent sur leurs modalités de fonctionnement et sur la manière d’assurer la sécurité de leurs concitoyens.
Un dispositif d’accompagnement renforcé pourrait permettre aux collectivités territoriales de faire face à ces défis. Il s’agirait ainsi : de créer un fonds de soutien ou de réassurance publique ; de simplifier les procédures du code des marchés publics en privilégiant les marchés sans publicité ni mise en concurrence préalables ; de réviser les politiques tarifaires de l’assurance publique afin de mieux protéger les biens collectifs tout en préservant l’équilibre financier des collectivités territoriales.
Madame la ministre, quelle est la position du Gouvernement ? Quelles mesures entendez-vous prendre pour répondre à cette problématique aussi prégnante qu’ubuesque pour de très nombreuses collectivités ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Clara Chappaz, ministre déléguée auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée de l’intelligence artificielle et du numérique. Monsieur le sénateur, vous nous alertez sur le sujet de l’assurance des collectivités locales, qui fait l’objet de la plus grande attention de la part du Gouvernement. En témoigne la tenue, le 14 avril 2025, du Roquelaure de l’assurabilité de nos territoires, sur l’initiative du Premier ministre lui-même.
Cet événement a donné lieu à des échanges riches entre les assureurs et les élus locaux, éclairés par les rapports rédigés sur le sujet, d’une part, par Alain Chrétien et Jean-Yves Dagès et, d’autre part, par Jean-François Husson, au nom de la mission d’information sur les problèmes assurantiels des collectivités locales.
Les difficultés que connaît aujourd’hui ce marché ont plusieurs causes : la sous-tarification chronique, qui n’a pas permis le maintien d’un niveau satisfaisant de concurrence ; un trop faible développement de la culture du risque au sein des collectivités ; une procédure d’appel d’offres qui reste trop rigide et complexe pour les assureurs ; une sinistralité en hausse, en raison notamment de la fréquence accrue des événements climatiques.
Plusieurs mesures, formalisées à l’issue d’une concertation étroite entre les assureurs et les représentants des collectivités, sont en cours de finalisation par les services du ministère de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
En particulier, un décret et un arrêté, en cours de publication, permettront de limiter la franchise applicable aux collectivités territoriales en cas de catastrophe naturelle.
De plus, un nouveau guide pratique pour la passation de marchés publics d’assurance par les collectivités sera publié avant l’été.
Des actions seront prises en faveur du développement de la culture du risque dans les collectivités, avec un réseau de référents locaux et des formations.
Une cellule d’accompagnement consacrée aux collectivités sera également mise en place dès cet été pour soutenir les collectivités les plus en difficulté en matière assurantielle, sous la présidence du médiateur de l’assurance.
Enfin, des discussions sont en cours sur la mise en place d’un dispositif de partage du risque.
Ces mesures, conjuguées au rééquilibrage tarifaire, visent à restaurer l’assurabilité des collectivités territoriales, en confortant l’attractivité de ce marché auprès des nouveaux acteurs et à renforcer la concurrence pour contenir les coûts et conforter le pouvoir de négociation des élus locaux.
M. le président. La parole est à M. Pascal Martin, pour la réplique.
M. Pascal Martin. Madame la ministre, je vous remercie pour ces informations. Vous le savez, il y a urgence. Les maires font face à des contraintes budgétaires extrêmement fortes. Ils attendent par conséquent des dispositifs pour répondre à ces difficultés.
troisième programmation pluriannuelle de l’énergie et conséquences sur les collectivités candidates
M. le président. La parole est à M. Jean-Gérard Paumier, auteur de la question n° 495, adressée à M. le ministre auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l’industrie et de l’énergie.
M. Jean-Gérard Paumier. Madame la ministre, en février 2022, le Président de la République annonçait dans son discours de Belfort une reprise en main « de notre destin énergétique ».
La troisième programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), annoncée initialement pour 2023, devait permettre la relance de la filière nucléaire civile française.
Après deux ans d’attente, le Gouvernement a présenté la PPE en annonçant qu’il recourrait à la simple voie réglementaire, après un débat sans vote au Parlement.
Alors que l’ambition initiale prévoyait deux paliers pour l’installation de six puis de huit nouveaux réacteurs, la PPE ne confirme que le premier et renvoie le second à l’horizon flou d’une étude. J’en viens à me demander si le Gouvernement a réellement l’intention de relancer de manière effective la filière nucléaire civile française…
De nombreux territoires candidats attendaient impatiemment la publication de la liste des sites retenus pour accueillir ces nouveaux réacteurs, initialement prévue pour 2026. Ces territoires, au premier rang desquels figure la communauté de communes Chinon Vienne et Loire, en Indre-et-Loire, font état de leurs inquiétudes quant à ce recul et déplorent d’ores et déjà le retard pris sur les futurs immenses chantiers à engager.
Aussi, madame la ministre, quelles sont les motivations précises de ce recul ? Quelles sont les modalités logistiques et temporelles de l’étude annoncée ? Quand comptez-vous communiquer la liste des sites retenus et fournir un calendrier précis ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Clara Chappaz, ministre déléguée auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée de l’intelligence artificielle et du numérique. Monsieur le sénateur, vous interrogez le ministre Marc Ferracci sur le calendrier des décisions relatives au renforcement du programme de lancement des nouveaux réacteurs nucléaires.
Comme l’ont annoncé le Premier ministre et le ministre chargé de l’industrie et de l’énergie, notre stratégie énergétique s’appuie en grande partie sur la relance de notre programme nucléaire civil. Nous nous inscrivons en cela dans la trajectoire dessinée par le Président de la République en 2022.
Cette relance s’appuie sur la construction de six réacteurs et l’étude de huit réacteurs supplémentaires. Cet engagement demeure intact.
Concernant les six premiers réacteurs, programmés sur les sites de Penly, de Gravelines et du Bugey, les procédures sont déjà bien avancées. Les débats publics sont achevés sur les trois sites et les travaux préparatoires ont débuté à Penly au début de juillet 2024.
Nous finalisons actuellement les modalités du soutien financier de l’État pour ces réacteurs afin de les notifier à la Commission européenne et de permettre une décision finale d’investissement par EDF en 2026. Cette première tranche a vocation à être complétée par une seconde comprenant quatre paires supplémentaires, soit huit réacteurs.
La décision qui concerne les sites d’implantation n’a pas encore été prise. Leur sélection devra répondre à un certain nombre de critères : acceptabilité locale, facilité de réalisation et d’exploitation, accessibilité au réseau électrique, mais aussi soutenabilité à très long terme, en particulier au regard des effets attendus du changement climatique. C’est pourquoi il est nécessaire de mener des études approfondies qui auront vocation à identifier les contraintes, à évaluer la capacité du réseau électrique, à anticiper les impacts du changement climatique, à préciser les conséquences en termes de gestion des déchets et à clarifier les besoins industriels de la filière en vue de sa montée en cadence.
Ce programme de travail doit permettre de disposer de tous les éléments nécessaires pour une décision sur cette seconde tranche à l’horizon 2026.
M. le président. La parole est à M. Jean-Gérard Paumier, pour la réplique.
M. Jean-Gérard Paumier. Je vous remercie, madame la ministre, de votre réponse. Cependant, l’annonce du choix des futurs sites d’implantation est fondamentale pour que les territoires concernés puissent anticiper autant que nécessaire et disposer de la visibilité indispensable à la bonne préparation des chantiers engagés en vue de préserver notre souveraineté énergétique.
incertitudes sur les crédits budgétaires 2025 consacrés à l’économie sociale et solidaire
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Michau, auteur de la question n° 499, adressée à Mme la ministre déléguée auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l’économie sociale et solidaire.
M. Jean-Jacques Michau. Madame la ministre, je souhaite vous interroger sur les crédits budgétaires consacrés à l’économie sociale et solidaire (ESS) pour 2025.
Les acteurs du soutien de proximité à l’ESS sont très inquiets quant à la part qui sera réellement dédiée à leur mode de développement économique. En effet, le montant de 19,2 millions d’euros qui lui était consacré en 2024 devait augmenter de 30 % en 2025, comme cela avait été annoncé par l’ancienne ministre chargée de l’économie sociale et solidaire. Or cette enveloppe, déjà considérée comme largement sous-dimensionnée au regard des plus de 200 000 entreprises de l’ESS, a été remise en cause lors d’annonces faites par le Gouvernement, le 28 avril dernier, devant le Conseil supérieur de l’économie sociale et solidaire (CSESS).
La remise en cause quasi totale de l’enveloppe initiale supplémentaire de 10 millions d’euros a provoqué la colère des acteurs de l’ESS. Ces crédits financent pourtant des acteurs de proximité chargés de soutenir l’économie sociale et solidaire, notamment les chambres régionales de l’ESS (Cress) et le dispositif local d’accompagnement (DLA).
De plus, les réductions budgétaires, qui affectent aussi les collectivités territoriales en 2025, touchent particulièrement l’ESS, plongeant ces structures dans des difficultés et des incertitudes importantes. L’Union des employeurs de l’économie sociale et solidaire (Udes) avait pourtant alerté sur le risque de disparition de 186 000 emplois lié aux dispositions de la loi de finances pour 2025 qui touchent particulièrement les budgets du sport et de l’insertion, ainsi qu’à la taxe sur les mutuelles, et sur le risque de choc social dès le second semestre de 2025 et le premier semestre de 2026.
Je souhaite savoir comment le Gouvernement entend répondre aux inquiétudes des acteurs de l’ESS devant ce qui s’apparente au non-respect de l’engagement de l’État.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Clara Chappaz, ministre déléguée auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée de l’intelligence artificielle et du numérique. Monsieur le sénateur, je vous remercie de cette question relative à l’ESS, secteur auquel la ministre Véronique Louwagie est très attachée et qui représente une autre manière de faire de l’économie en conjuguant l’utilité sociale, l’ancrage local et l’innovation.
Le 3 mars dernier, le Gouvernement a présenté une feuille de route qui mobilise l’ensemble des leviers disponibles sur une période de neuf mois pour soutenir cette logique. Dans un contexte budgétaire contraint marqué par des mesures d’exécution strictes et des gels importants sur l’ensemble des programmes, nous pouvons nous réjouir que les crédits dédiés à l’ESS aient été stabilisés pour 2025.
Initialement, le projet de loi de finances pour 2025 prévoyait une baisse de crédits de 15 millions d’euros en autorisations d’engagement (AE) et de 16,8 millions d’euros en crédits de paiement (CP). La version issue de la commission mixte paritaire prévoyait une hausse de 10 millions d’euros, mais dans le même temps, 7 millions d’euros de crédits gagés n’ont pu être levés.
Finalement, grâce aux reports et à une gestion rigoureuse, le montant stabilisé pour 2025 s’établit à 17,6 millions d’euros en AE et 20,5 millions d’euros en CP. Cela nous a permis de préserver les moyens d’action essentiels dans le contexte contraint que nous connaissons, en particulier le dispositif local d’accompagnement, présent sur tout le territoire, qui permet chaque année à près de 6 000 structures de l’ESS de bénéficier d’un accompagnement gratuit pour consolider leurs emplois et faire évoluer leur modèle.
Au-delà du DLA, nous avons maintenu les crédits alloués aux Cress et aux têtes de réseau nationales, qui jouent un rôle clé de structuration, de représentation et d’animation sectorielle.
Enfin, la ligne budgétaire dédiée aux pôles territoriaux de coopération économique (PTCE) sera ajustée à un niveau légèrement inférieur à celui qui était inscrit l’an dernier, en cohérence avec son niveau d’exécution, ces crédits étant historiquement sous-consommés.
Monsieur le sénateur, je veux vous assurer que nous avons tenu, malgré les contraintes, à protéger les moyens de l’ESS et à garantir aux acteurs une visibilité afin qu’ils poursuivent leur action au service de l’intérêt général. Ma collègue Véronique Louwagie m’a assuré qu’elle et son cabinet restaient à votre disposition pour approfondir ce sujet et pour travailler avec vous aux meilleures solutions pour l’avenir du secteur.
intégration des chambres d’hôtes dans le régime fiscal des meublés de tourisme
M. le président. La parole est à Mme Dominique Vérien, auteure de la question n° 503, adressée à Mme la ministre déléguée auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée du tourisme.
Mme Dominique Vérien. Madame la ministre, je souhaite attirer votre attention sur les effets de la loi du 19 novembre 2024 visant à renforcer les outils de régulation des meublés de tourisme à l’échelle locale.
Ce texte modifie le régime fiscal applicable aux chambres d’hôtes, en assimilant celles-ci aux meublés de tourisme. Or cette assimilation ne tient pas compte des spécificités de l’activité de chambres d’hôtes. Il s’agit non pas de louer un logement entier – comme c’est le cas avec un gîte –, mais de proposer quelques chambres avec des prestations obligatoires, le tout dans un cadre réglementaire très strict.
La réforme réduit l’abattement fiscal de 71 % à 50 %, et abaisse le seuil de revenus annuels de 188 700 euros à 77 700 euros. Ces ajustements fragilisent profondément la viabilité économique de nombreuses structures et constituent de facto un véritable frein au développement économique, à l’attractivité et au désenclavement de nos zones rurales.
Il me semble donc que l’intégration des chambres d’hôtes dans le régime fiscal des meublés de tourisme est inadaptée. Une révision de ce dispositif est souhaitable et le décret d’application à venir doit introduire une différenciation claire permettant aux chambres d’hôtes de bénéficier d’un régime fiscal distinct, à la hauteur de leurs spécificités économiques et réglementaires.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Clara Chappaz, ministre déléguée auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée de l’intelligence artificielle et du numérique. Madame la sénatrice, vous interrogez ma collègue Nathalie Delattre, ministre déléguée chargée du tourisme, sur la loi du 19 novembre 2024 visant à renforcer les outils de régulation des meublés de tourisme à l’échelle locale, et sur ses incidences pour les chambres d’hôtes et les gîtes ruraux.
Avec cette loi, le législateur a souhaité mieux réguler l’offre de meublés de tourisme, tout en permettant aux propriétaires de continuer de valoriser leurs biens au travers de services et d’équipements spécifiques proposés à la clientèle grâce à une incitation au classement et à la reconnaissance du caractère particulier des activités de chambres d’hôtes.
Fiscalement, les chambres d’hôtes relèvent du régime des microentreprises défini à l’article 50–0 du code général des impôts (CGI), modifié par l’article 7 de la loi précitée, et bénéficient donc du régime micro-BIC (bénéfices industriels et commerciaux) dans la limite de 77 700 euros de chiffre d’affaires, avec un abattement de 50 %.
Concernant les gîtes ruraux, ces derniers n’étant pas définis en droit, ils sont considérés comme des meublés de tourisme et bénéficient du même régime que les chambres d’hôtes lorsqu’ils sont classés. Les meublés de tourisme non classés bénéficient désormais d’un abattement ramené de 50 % à 30 %, dans la limite de 15 000 euros de chiffre d’affaires.
Le Gouvernement a soutenu ce compromis trouvé en commission mixte paritaire, dans la mesure où il maintenait un abattement différencié de nature à préserver une incitation au classement et au déploiement d’une offre d’hébergement de qualité. Le seuil de 77 700 euros est apparu suffisamment élevé pour tenir compte de la situation des petits propriétaires de chambres d’hôtes ou de gîte recherchant un revenu d’appoint.
Enfin, les propriétaires de chambres d’hôtes ou de gîte rural dont l’activité relève davantage de la parahôtellerie et qui supportent des charges d’un montant supérieur à l’abattement de 50 % conservent toujours la possibilité d’opter pour le régime réel en déduisant les frais et les charges pour leur montant exact.
Au demeurant, la ministre Nathalie Delattre, soucieuse de renforcer l’offre touristique, notamment dans les zones rurales, a lancé un groupe de travail sur la question. Ces travaux s’inséreront dans une réflexion plus large sur le développement de l’agritourisme, sujet sur lequel une mission parlementaire devrait être lancée.
M. le président. La parole est à Mme Dominique Vérien, pour la réplique.
Mme Dominique Vérien. Madame la ministre, dans votre réponse, vous assimilez totalement, là encore, gîtes et chambres d’hôtes. Or ces dernières fournissent, très clairement, un service hôtelier : les draps sont changés, les chambres sont faites, le petit-déjeuner est servi. Leurs charges sont donc très différentes de celles d’un gîte, pour lequel il est seulement nécessaire d’assurer les entrées et les sorties. Le travail à effectuer n’est pas du tout le même !
Retenir le même seuil d’abattement pour ces deux modes d’hébergement est tout à fait décalé, et donc regrettable.
Vous dites que les propriétaires de chambres d’hôtes ou de gîte rural conservent la possibilité d’opter pour le régime réel. Pour autant, je rappelle que dans les chambres d’hôtes situées en zone rurale, c’est une personne seule qui s’occupe de tout – accueillir, faire le ménage, etc. –, laquelle n’a guère le loisir d’accomplir un travail administratif supplémentaire…
redevances liées aux concessions hydroélectriques
M. le président. La parole est à M. Stéphane Sautarel, auteur de la question n° 518, adressée à Mme la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche.
M. Stéphane Sautarel. Madame la ministre, la France compte aujourd’hui plus de 340 concessions hydroélectriques, essentielles à notre mix énergétique. Le renouvellement de ces concessions et la réglementation posent, de longue date, des difficultés auxquelles le Gouvernement s’était engagé il y a un peu plus d’un an, par la voix du ministre de l’économie d’alors, à trouver une issue avant la fin de 2024. Il n’en a rien été.
La semaine dernière a été rendu un rapport parlementaire posant trois orientations possibles ; parmi celles-ci, le régime d’autorisation et la révision de la directive du 26 février 2014 sur l’attribution de contrats de concession sont les plus prometteuses. On attend avec impatience de connaître la position du Gouvernement à cet égard.
Ma question porte plus spécifiquement sur les redevances.
Le système dit des délais glissants impose depuis 2020 aux concessions échues de verser une redevance spécifique correspondant à 40 % du bénéfice après impôt.
Cette solution présente de nombreux inconvénients, notamment en ce qui concerne les investissements nécessaires au bon fonctionnement et à l’amélioration des ouvrages dont la programmation est perturbée et le financement rendu plus incertain. Toutefois, la disparition des délais glissants, dispositif actuellement en place, entraînerait la suppression de la redevance spécifique, ce qui serait une perte directe et non négligeable de recettes pour les collectivités territoriales.
En 2023, le Gouvernement a modifié le calcul de la redevance, ce qui constitue un manque à gagner important, mais plus encore un facteur d’imprévisibilité, alors que les collectivités sont en proie à des difficultés financières de plus en plus fortes.
En conséquence, au-delà des réponses structurelles sur la sortie du champ concurrentiel des barrages hydroélectriques et de leur juste valorisation au titre des aménités territoriales, je souhaite savoir quel nouveau modèle de redevance et de répartition de celle-ci le Gouvernement compte mettre en place.
M. le président. Très bonne question, mon cher collègue du Cantal ! Nous connaissons le même problème en Aveyron.
La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Clara Chappaz, ministre déléguée auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée de l’intelligence artificielle et du numérique. Monsieur le sénateur, vous interrogez le ministre Marc Ferracci sur les redevances applicables aux installations hydroélectriques qui sont dans la situation dite des délais glissants. Comme vous l’indiquez, le code de l’énergie prévoit pour ces installations une redevance spécifique, calculée de façon forfaitaire par rapport à un prix de marché.
La situation exceptionnelle liée à la crise de l’énergie en 2022 a créé plusieurs difficultés. Les prix de marché de l’électricité sont montés à des niveaux inédits, dépassant parfois 500 euros par mégawattheure.
D’une part, cette situation a conduit à des montants de la redevance due par les producteurs très importants, parfois décorrélés de leurs revenus réels. Des aménagements ont été mis en œuvre au travers de l’arrêté du 3 août 2023 ; ils ont également permis d’augmenter le montant des redevances « délais glissants » au profit des collectivités, de manière pérenne.
D’autre part, pendant la crise, l’État a mis en place un bouclier tarifaire afin de protéger les consommateurs, et notamment les collectivités territoriales.
La loi de finances 2023 a introduit un plafond pour la part reversée aux collectivités territoriales qui étaient déjà protégées par les mesures gouvernementales. Ce plafond a été fixé à 100 euros le mégawattheure. Les recettes supplémentaires ont été reversées au budget général afin de participer à la protection de tous les consommateurs. Soulignons que le plafond a été calculé afin de garantir, dans les cas les plus défavorables par rapport au marché, le même niveau de recettes pour les collectivités que lors des années antérieures, à hydrologie constante.
Les montants reversés au budget de l’État correspondent uniquement à des montants de redevance exceptionnels liés au prix de l’électricité lors de la crise. Un niveau au minimum équivalent à celui des années précédentes en cas de prix élevé a donc été préservé et le manque à gagner reste théorique.
De plus, les prix de marché sont actuellement inférieurs au prix plafond de 100 euros le mégawattheure, de telle sorte que ce plafonnement n’est plus effectif.
Pour ce qui concerne le renouvellement des installations, le code de l’énergie prévoit bien une affectation à hauteur d’un tiers pour les départements, d’un douzième pour les communes et d’un douzième pour les groupements de communes. Il n’est donc pas exact de dire qu’il y aurait une perte directe et non négligeable pour les collectivités.
M. le président. La parole est à M. Stéphane Sautarel, pour la réplique.
M. Stéphane Sautarel. Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre, mais il n’en demeure pas moins que le caractère imprévisible de ces recettes demeure.
Tant que nous n’aurons pas une vision claire sur ce sujet, ce qui est important à la fois pour les investisseurs et pour les travaux à réaliser sur les barrages – j’espère que le rapport qui a été rendu la semaine dernière à l’Assemblée nationale permettra de la donner –, il n’y aura de stabilité ni au niveau de la redevance ni à celui des investissements.
Pour 2023, le chiffre dont je dispose diffère un peu du vôtre puisqu’il indique une diminution des redevances pour les collectivités.
Il est temps de donner de la lisibilité, car celle-ci est attendue depuis de nombreuses années. On ne peut plus attendre, surtout dans le contexte que nous connaissons.
nécessité d’une coordination régionale des classes de défense
M. le président. La parole est à Mme Gisèle Jourda, auteure de la question n° 524, adressée à Mme la ministre d’État, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche.
Mme Gisèle Jourda. Madame la ministre, ma question porte sur la nécessité de coordonner régionalement les classes de défense entre elles.
Une classe de défense est un projet pédagogique, interdisciplinaire et pluriannuel mené sur l’initiative d’une équipe enseignante, en partenariat avec une unité militaire marraine dans le cadre de l’enseignement de défense, expression vitale du lien entre l’armée et la jeunesse.
C’est le cas dans le département de l’Aude, où la classe de défense du collège La Nadière de Port-la-Nouvelle est rattachée à la Marine nationale.
Le principal atout d’une classe de défense est avant tout sa dimension citoyenne. Les élèves peuvent ainsi mesurer combien les questions de défense et de sécurité nationale sont importantes pour notre pays, les temps de rencontre avec les militaires permettant aussi de créer des vocations.
Il existe actuellement plus de 475 classes de défense réparties sur l’ensemble du territoire, impliquant plus de 11 875 élèves et plus de 200 entités des armées, directions et services. Elles vivent grâce au dynamisme des équipes pédagogiques qui les accompagnent.
La problématique que j’entends soulever est la suivante : il n’existe aucune coordination régionale des classes de défense entre elles. Pourtant, cela permettrait de créer un réseau, un maillage territorial, qui favoriserait l’organisation d’événements, les retours d’expérience, l’échange de bonnes pratiques. Cela permettrait également d’ancrer solidement les classes de défense dans un territoire à plus grande échelle.
Par ailleurs, il existe peu de données – voire aucune – sur l’existence des classes de défense dans les lycées.
Quelles mesures le Gouvernement compte-t-il prendre pour favoriser la mise en place d’une coordination régionale des classes de défense entre elles ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Clara Chappaz, ministre déléguée auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée de l’intelligence artificielle et du numérique. Comme vous l’avez rappelé, madame la sénatrice, il existe pour les collèges et lycées près de 1 100 classes de défense et de sécurité globales (CDSG). Chacune d’entre elles est « marrainée » par une unité militaire ou par un corps en uniforme, et 30 000 élèves sont aujourd’hui impliqués dans ce dispositif emblématique de l’éducation à la défense.
Vous le savez, la coordination et le pilotage des CDSG sont assurés par les trinômes académiques, qui réunissent un représentant du rectorat, un autre de l’autorité militaire territoriale et un représentant de l’Institut des hautes études de défense nationale (IHEDN).
Ce pilotage permet de veiller à la qualité du projet pédagogique des CDSG, mais aussi de valoriser les différentes unités qui maillent notre territoire et mènent de front bien d’autres actions. Je pense, par exemple, aux 110 rallyes citoyens organisés l’an passé.
Le dernier volet de cette animation territoriale concerne les actions de formation inscrites dans les programmes nationaux de formation.
Chaque année, plus de 3 000 enseignants, inspecteurs et personnels de direction sont formés à la défense au niveau interacadémique, académique et local. Vous le voyez, le pilotage, s’il n’est pas régionalisé, est coordonné à différentes échelles.
Ces outils de pilotage peuvent, en effet, être perfectionnés, notamment pour mieux accompagner le développement des CDSG dans le respect d’équilibres territoriaux parfois difficiles à tenir en raison des écarts d’implémentation régionale des unités marines. Cela est d’autant plus vrai à l’approche de 2026, année des 400 ans de la Marine nationale, et tandis que nous célébrons en 2025 le centenaire du Bleuet de France, des événements qui ne manqueront pas d’animer ces réseaux.
Des réflexions sont en cours en ce sens entre le ministère de l’éducation nationale et celui des armées pour améliorer les synergies possibles.
M. le président. Nous en avons terminé avec les réponses à des questions orales.
Mes chers collègues, l’ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures vingt, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de Mme Sylvie Vermeillet.)
PRÉSIDENCE DE Mme Sylvie Vermeillet
vice-présidente
Mme la présidente. La séance est reprise.
2
Mise au point au sujet d’un vote
Mme la présidente. La parole est à Mme Sophie Briante Guillemont.
Mme Sophie Briante Guillemont. Lors du scrutin n° 289 portant sur l’ensemble du texte élaboré par la commission mixte paritaire sur la proposition de loi visant à aménager le code de la justice pénale des mineurs et certains dispositifs relatifs à la responsabilité parentale, ma collègue Véronique Guillotin souhaitait voter pour.
Mme la présidente. Acte est donné de cette mise au point, ma chère collègue. Elle figurera dans l’analyse politique du scrutin.
3
Communication relative à une commission mixte paritaire
Mme la présidente. J’informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi visant à renforcer la sécurité des professionnels de santé est parvenue à l’adoption d’un texte commun.
4
Accord-cadre avec les Nations unies
Adoption définitive en procédure d’examen simplifié et en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
Mme la présidente. L’ordre du jour appelle l’examen du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, autorisant l’approbation de l’accord-cadre entre le Gouvernement de la République française et les Nations unies portant sur les arrangements relatifs aux privilèges et immunités ainsi que d’autres questions afférentes aux réunions des Nations unies tenues sur le territoire français (projet n° 533, texte de la commission n° 590, rapport n° 589).
Pour ce projet de loi, la conférence des présidents a retenu la procédure d’examen simplifié.
Je vais donc le mettre aux voix.
projet de loi autorisant l’approbation de l’accord-cadre entre le gouvernement de la république française et les nations unies portant sur les arrangements relatifs aux privilèges et immunités ainsi que d’autres questions afférentes aux réunions des nations unies tenues sur le territoire français
Article unique
Est autorisée l’approbation de l’accord-cadre entre le Gouvernement de la République française et les Nations unies portant sur les arrangements relatifs aux privilèges et immunités ainsi que d’autres questions afférentes aux réunions des Nations unies tenues sur le territoire français, signé à New York le 16 janvier 2025, complété par l’échange de lettres signé le 14 mars 2025, et dont le texte est annexé à la présente loi.
Mme la présidente. Je mets aux voix le texte adopté par la commission sur ce projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale.
La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées est favorable à l’adoption de ce texte.
(Le projet de loi est adopté définitivement.)
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Programmation pour la refondation de Mayotte et Département-Région de Mayotte
Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi et d’un projet de loi organique dans les textes de la commission
Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de programmation pour la refondation de Mayotte (projet n° 544, texte de la commission n° 613 rectifié, rapport n° 612) et du projet de loi organique relatif au Département-Région de Mayotte (projet n° 545, texte de la commission n° 614, rapport n° 612).
La procédure accélérée a été engagée sur ces textes.
Je vous rappelle que la discussion générale commune est close. Nous passons à la discussion du texte de la commission sur le projet de loi de programmation pour la refondation de Mayotte.
projet de loi de programmation pour la refondation de mayotte
Demande de priorité
Mme la présidente. Je suis saisie par la commission d’une demande de priorité portant sur les articles 23 et 24, ainsi que sur les articles additionnels qui s’y rapportent, afin qu’ils soient examinés après les amendements portant articles additionnels après l’article 10.
Aux termes de l’article 44, alinéa 6, de notre règlement, la priorité est de droit quand elle est demandée par la commission saisie au fond, sauf opposition du Gouvernement.
Quel est donc l’avis du Gouvernement sur cette demande de priorité formulée par la commission ?
Mme la présidente. La priorité est ordonnée.
TITRE IER
OBJECTIFS DE L’ACTION DE L’ÉTAT POUR MAYOTTE
Article 1er
Le rapport annexé à la présente loi est approuvé.
RAPPORT ANNEXÉ
INTRODUCTION
Le 14 décembre 2024, le cyclone Chido frappait l’archipel de Mayotte en plein cœur, causant de nombreux dégâts humains, matériels et environnementaux. Ce phénomène d’une ampleur inédite constitue la catastrophe naturelle la plus importante dans l’histoire récente de notre pays.
Le 12 janvier 2025, la tempête tropicale intense Dikeledi touchait à son tour Mayotte. Le coup porté par deux fois par ces épisodes météorologiques a profondément affecté l’existence quotidienne et l’activité des Mahorais qui vivaient déjà dans des conditions très difficiles, affaibli une économie déjà fragile, et durablement modifié les paysages et le cadre de vie des habitants.
Le plan « Mayotte debout », présenté par le Premier ministre le 30 décembre 2024, se compose de plusieurs mesures visant à répondre à l’urgence mais ayant également vocation à être mises en œuvre dans les phases de reconstruction et refondation.
L’État a répondu présent pour gérer la crise et répondre aux urgences immédiates. La loi n° 2025-176 du 24 février 2025 d’urgence pour Mayotte a ensuite été promulguée pour constituer l’outil législatif principal au service de la reconstruction de Mayotte. Elle vise à faciliter le rétablissement des conditions de vie des Mahorais à travers l’adaptation des règles de construction, d’urbanisme ou de commande publique. Elle porte également différentes mesures de soutien aux habitants et aux entreprises sur le plan économique et social.
La loi de programmation pour la refondation de Mayotte porte quant à elle l’ambition de donner les moyens aux Mahorais d’exercer leurs droits, vivre en paix et en sécurité à Mayotte, 101e département français situé dans l’océan Indien.
L’État souhaite porter une ambition à la hauteur de l’attachement des Mahorais à la France – réaffirmé avec constance au gré des consultations successives depuis 1974 – qui sera un levier puissant dans la période de reconstruction et de refondation. Il accordera une importance particulière à l’association des élus mahorais et des forces vives du territoire (conseil économique, social et environnemental, conseil cadial, associations) à ce chantier d’une ampleur inédite, notamment dans le cadre de l’établissement public dédié à la reconstruction.
Le positionnement stratégique de Mayotte dans le canal du Mozambique appelle un renforcement de l’intégration régionale dans une logique de rayonnement dans l’océan Indien.
Les atouts exceptionnels de Mayotte doivent être confortés. À titre d’exemple, l’extraordinaire patrimoine naturel mahorais – symbolisé par sa biodiversité marine (coraux, tortues), son lagon à double barrière et sa zone économique exclusive formant le premier parc marin français, ainsi que ses forêts primaires et secondaires, riches d’une biodiversité indigène et endémique à forte valeur écologique – doit faire l’objet d’une approche équilibrée entre protection et développement durable.
Une stratégie de gestion durable des déchets sera mise en œuvre pour réduire la part de l’enfouissement en dotant Mayotte des équipements nécessaires au recyclage et la valorisation.
À travers ce texte, l’État entend créer les conditions de l’épanouissement à Mayotte de la jeunesse mahoraise – source de vitalité et artisane du Mayotte de demain – et apporter des réponses concrètes aux espoirs placés dans la République et ses promesses de sécurité, stabilité, égalité et prospérité. Mayotte, territoire où près d’un habitant sur deux est âgé de moins de 18 ans, attend des signaux clairs pour entretenir la confiance en l’avenir. Des perspectives d’émancipation en matière d’acquisition de savoirs, d’opportunités d’emploi, d’accès à la culture et à la pratique sportive seront définies.
Particulièrement exposée aux aléas naturels, Mayotte doit être considérée comme un territoire vulnérable qu’il convient de protéger. La prévention des risques naturels et le développement d’une véritable culture de la gestion de crise et du risque doivent constituer des priorités de l’État, en lien avec les collectivités.
Chido et Dikeledi, mais aussi la crise de l’eau de 2023, ont mis en lumière l’ampleur des défis qu’il convient de relever afin de donner aux Mahorais la capacité de développer leur territoire. Si la départementalisation a permis d’engager Mayotte dans un processus de développement, une loi de programmation ambitieuse doit venir se substituer aux multiples plans stratégiques dont le pilotage et la mise en œuvre concrète ne peuvent être considérés comme satisfaisants. À ce titre, le renforcement des institutions locales, à travers l’affirmation de la collectivité unique et de ses compétences et la mise en cohérence des ressources des collectivités territoriales avec la réalité démographique du territoire sont des impératifs pour réussir la refondation.
À travers le présent rapport, l’État reconnaît sans ambiguïté que les paramètres socio-économiques hors-normes du territoire et le rythme actuel de la convergence économique et sociale ne permettent pas le développement et l’attractivité de Mayotte.
La pression démographique – exercée principalement par l’immigration clandestine – constitue un facteur majeur de déstabilisation du territoire qui met directement en péril la paix civile et la cohésion sociale à Mayotte, affaiblit les services publics et dégrade la qualité de vie des Mahorais.
Ainsi, la loi réaffirme le principe selon lequel la refondation de Mayotte impose de prendre des mesures fortes visant à lutter plus efficacement contre l’immigration clandestine et l’habitat illégal.
L’État s’engage aussi à garantir l’accès aux Mahorais aux biens et ressources essentiels :
– l’accès à l’eau potable et à l’assainissement constitue une priorité ;
– une trajectoire de souveraineté alimentaire reposant sur le développement de l’agriculture, de la pêche et de l’aquaculture sera soutenue ;
– l’offre de soins sera mise en adéquation avec les besoins des Mahorais ;
– l’offre de logement fera l’objet d’une augmentation massive au titre de la reconstruction.
La loi consacre une trajectoire de convergence économique et sociale marquée par l’alignement du SMIC net sur le niveau national au plus tard en 2031, avec l’objectif d’atteindre l’égalité réelle.
La refondation de Mayotte nécessite de créer les conditions de l’attractivité. Pour y parvenir, des mesures ciblées en soutien aux entreprises telles que la mise en place d’une zone franche globale seront mises en œuvre.
Plus globalement, ce rapport présente un programme d’investissements prioritaires dans les infrastructures essentielles afin de soutenir la triple ambition de la refondation : protéger les Mahorais, garantir l’accès aux biens et ressources essentiels et développer les leviers de la prospérité de Mayotte.
1. La refondation de Mayotte impose de prendre des mesures fortes visant à lutter plus efficacement contre l’immigration clandestine et l’habitat illégal
1.1. Un renforcement nécessaire du dispositif opérationnel de lutte contre l’immigration clandestine, qui constitue une source de déstabilisation majeure de la société mahoraise
L’immigration clandestine constitue une menace pour le pacte social à Mayotte. L’objectif prioritaire est double : lutter plus efficacement contre les départs clandestins vers Mayotte et augmenter significativement les retours depuis Mayotte de personnes en situation irrégulière.
L’opération Mayotte Place Nette a permis l’éloignement de 4 200 étrangers en situation irrégulière qui viennent s’ajouter aux 50 000 reconduites menées sur la période 2022-2023.
La lutte contre ce phénomène migratoire reposera sur le rétablissement et le renforcement des capacités de surveillance, de détection et d’interception, à terre comme en mer.
L’étude technico-opérationnelle relative à la lutte contre l’immigration clandestine à Mayotte réalisée par la direction des entreprises et partenariats de sécurité et des armes (DEPSA) du ministère de l’Intérieur servira de base à cet effort de renforcement capacitaire.
En matière de détection :
– le renouvellement de l’ensemble des radars et l’acquisition de moyens optroniques, balises et drones seront poursuivis ;
– la mise en œuvre de bases avancées pour l’interception en mer sera également étudiée ;
– le remplacement des moyens nautiques de la gendarmerie maritime figure parmi les priorités.
En matière d’interception :
– une trajectoire d’augmentation du nombre d’intercepteurs opérationnels H24 sera mise en œuvre. Cela impliquera le renouvellement et l’augmentation de la flotte actuelle ;
– un chantier naval dédié à la maintenance en condition opérationnelle sera mis en place ;
– le projet de ponton opérationnel sur l’îlot Mtsamboro visant à réduire les temps de ralliement des zones d’interception sera concrétisé ;
– la création d’une zone d’attente à horizon 2027 en vue de non admettre sur le territoire les étrangers interceptés en mer ou à l’issue de débarquements sauvage et d’un nouveau local de rétention administrative de 48 places en 2026 pour les interpellations à terre.
De manière générale, la mobilisation de l’ensemble des forces de défense et de sécurité ainsi que des services du ministère de la Justice et du ministère de l’Europe et des affaires étrangères devra s’accroître afin de faire face aux conséquences d’une pression migratoire croissante en provenance des Comores et de Madagascar et, depuis près de deux ans, des pays de l’Afrique des Grands Lacs.
Le durcissement de la lutte contre l’immigration clandestine reposera donc sur le renforcement des moyens et des effectifs. Par ailleurs, les nombreuses mesures législatives prévues dans ce domaine dans la présente loi participeront de cet objectif prioritaire pour Mayotte.
Sur le sujet spécifique du droit du sol, le Gouvernement soutient la restriction des conditions d’accès à la nationalité française.
Les efforts engagés dans la lutte contre l’économie informelle, alimentée par l’emploi non déclaré d’étrangers en situation irrégulière et source de concurrence déloyale pour les professionnels mahorais seront poursuivis. L’économie informelle contribue à la fuite des capitaux, justifiant ainsi le renforcement du contrôle des changes.
Dans le cadre de l’opération Mayotte Place Nette, 30 hectares de cultures illégales ont été détruits, 136 745€ de saisies douanières réalisés, 4 tonnes de pêches illégales et 300 000€ d’avoirs criminels saisis.
Enfin, la lutte contre l’immigration clandestine passera également par le maintien d’un rapport exigeant avec les États voisins et notamment, avec les Comores. Tout en ménageant des espaces de dialogue, la France devra être particulièrement exigeante sur la lutte contre les départs clandestins, sur les retours de ressortissants en situation irrégulière et, plus généralement, pour réaffirmer sans cesse l’appartenance de Mayotte à la République française.
Le ministère de l’Europe et des Affaires étrangères prend toute sa part de cet effort et restera fortement mobilisé en soutien à l’atteinte de cet objectif :
– dans le cadre d’un dialogue bilatéral exigeant avec les pays d’origine, notamment avec les Comores, sur le volet migratoire qui permet de faire valoir la priorité que constitue pour la France la lutte contre l’immigration clandestine à Mayotte. La coopération en matière de retour a vocation à être renforcée dans le cadre du dialogue migratoire global que la France conduit avec les Comores, conformément au Plan d’action conjoint de La Valette (PACV), incluant notamment un soutien accru aux garde-côtes comoriens et une lutte renforcée contre les causes profondes des migrations ;
– dans le cadre de la négociation en cours d’accords bilatéraux avec les pays la région des Grands Lacs, d’où proviennent un nombre croissant de ressortissants arrivant à Mayotte avec l’aide de réseaux criminels. Ces accords permettront de définir les procédures opérationnelles permettant l’identification et la documentation des ressortissants en situation irrégulière, en vue de leur retour. Bien que l’obligation pour un État d’admettre le retour de ses nationaux découle de la coutume internationale, un cadre juridique précis facilite les procédures (délais, documents reconnus, points de contact, etc.) ;
– dans le cadre de la lutte renforcée contre les causes profondes des migrations dans le à travers du « Plan de Développement France-Comores » (PDFC) qui incorpore des actions de coopération sur des secteurs clés de la prévention des départs tels que la santé, l’éducation, la formation professionnelle et l’agriculture. Une revue de ces actions de coopération est engagée pour viser davantage d’efficacité dans la lutte contre les causes profondes des migrations ;
– dans le cadre d’un appui à la modernisation de l’état civil aux Comores (AMECC), qui a permis des avancées significatives dans la réforme du cadre juridique de l’état civil. La seconde phase de ce projet (démarrée en 2024) vise à opérationnaliser ces réformes par l’informatisation et le recensement à vocation d’état civil.
1.2. La nécessité de mieux contrôler l’accès au territoire mahorais
Mayotte a intégré le champ d’application du CESEDA le 26 mai 2014, date de l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2014-464 du 7 mai 2014 portant sur l’extension et l’adaptation du CESEDA à Mayotte. Un arrêté en date du 4 février 2015 relatif aux documents et visas exigés pour l’entrée sur le territoire de Mayotte précise le régime de circulation et les conditions d’entrée des étrangers tiers. L’ordonnance a eu pour objectif de transposer les directives européennes relatives à la migration légale et au retour suite à l’accès de Mayotte au statut de région ultrapériphérique et de rapprocher le droit applicable avec le droit commun sauf adaptations nécessaires.
Les dispositions législatives adoptées depuis lors se sont appliquées à Mayotte, sous réserve de certaines adaptations, en particulier celles motivées, selon la décision du Conseil constitutionnel n° 2018-770 DC du 6 septembre 2018, par les « caractéristiques et contraintes particulières », qui permettent au législateur, « afin de lutter contre l’immigration irrégulière à Mayotte, d’y adapter, dans une certaine mesure, non seulement les règles relatives à l’entrée et au séjour des étrangers, mais aussi celles régissant l’acquisition de la nationalité française à raison de la naissance et de la résidence en France ».
Au regard de la situation spécifique de Mayotte il apparaît nécessaire de mieux contrôler l’accès au territoire mahorais au regard de la pression migratoire particulière qu’il subit.
Ce meilleur contrôle passe par un durcissement des conditions d’accès au séjour pour l’immigration familiale en les adaptant à la situation particulière de Mayotte, une amélioration des dispositifs de lutte contre les reconnaissances frauduleuses de paternité et de maternité et de répondre à l’urgence de la situation migratoire par des mesures exceptionnelles en matière de lutte contre l’immigration irrégulière et de facilitation des éloignements.
1.3. Les outils de la fermeté face à l’habitat illégal, qui constitue une entrave à la réalisation des projets du territoire visant à améliorer le quotidien des Mahorais
Au titre de la reconstruction, une feuille de route « du bidonville au logement » sera finalisée afin d’accélérer la résorption de l’habitat illégal et insalubre, en lien avec les collectivités territoriales et les acteurs du logement.
Une opération d’intérêt nationale (OIN) devant mobiliser l’ensemble des outils existants et s’appuyer sur un régime et des moyens d’exception pour mieux résorber les zones d’habitat informel considérées comme prioritaires, dynamiser les projets d’aménagement, développer l’ingénierie de projet et tenir le calendrier des procédures sera mise en œuvre, en lien avec les collectivités territoriales.
Les trois collectivités concernées, qui comptent 57 % de l’habitat précaire de Mayotte (Mamoudzou, Dembéni et Koungou) doivent délibérer prochainement pour confirmer leur adhésion à ce projet de OIN.
Depuis 2019, des opérations d’évacuation et de démolitions sont réalisées dans le cadre de la loi n° 2018–1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique. L’opération Wuambushu en 2023, puis « Place nette » en 2024 ont permis de passer le cap du millier d’hébergements résorbés.
Les opérations de résorption de l’habitat indigne vont également se poursuivre avec la destruction programmée de près de 1 300 constructions.
Le renforcement de la réponse de l’État repose sur une action ciblée visant les constructions sans droit ni titre dans un secteur d’habitat informel, en particulier à travers le renforcement des outils par le biais de la loi Habitat dégradé en 2024.
La loi de programmation de la refondation de Mayotte porte des dispositifs ambitieux visant à renforcer la lutte contre l’habitat illégal. Toutefois, elle passera aussi, et même avant tout, par un renforcement des effectifs de sécurité présents sur l’île mais aussi par la lutte contre l’immigration clandestine.
2. La refondation repose sur une triple ambition : protéger les Mahorais, garantir l’accès aux biens et ressources essentiels et développer les leviers de la prospérité de Mayotte
2.1. Protéger les Mahorais
2.1.1. Protéger les Mahorais face aux aléas naturels
Les aléas « vent cyclonique » et « sismique » touchent l’ensemble de Mayotte. 92 % du territoire est aussi concerné par d’autres aléas « risques naturels » que sont le glissement de terrain, les inondations, la submersion marine et le recul du trait de côte.
Les épisodes sismo-telluriques liés à l’éruption du volcan Fani Maoré à 50 kilomètres à l’Est de Mayotte ont produit un enfoncement de 13 centimètres en Grande Terre et jusqu’à 19 centimètres en Petite Terre. Cela renforce l’exposition de certains quartiers au risque d’inondation et une accélération de l’érosion du trait de côte.
La réalisation des campagnes scientifiques et la mise en service des outils de surveillance et de prévision sera soutenue par l’État, de même que la réparation et l’amélioration du système de surveillance sismologique. Le déploiement en Petite Terre du radar Météo France destiné à la prévision, l’anticipation et la mesure des phénomènes météorologiques et sismiques constitue une priorité.
Les actions de connaissance des sous-sols et des phénomènes géologiques (recherche d’emplacements de forage, connaissance du continuum terre-mer) seront également accompagnées.
La préservation de la population et le développement du territoire imposent d’utiliser tous les outils de la prévention des risques :
– connaissance des aléas ;
– planification spatiale ;
– choix d’aménagement et d’urbanisme ;
– normes de construction et équipements spécifiques ;
– préparation des acteurs du territoire, dont les acteurs de la sécurité civile, les entreprises et la population dans son ensemble.
La politique de prévention des risques doit reposer en premier lieu sur la mise en œuvre des plans de prévention des risques (PPR). Le déploiement de 17 PPR Naturels communaux traitant des mouvements de terrain, des inondations et des séismes, et un PPR Littoral traitant de la submersion marine et du recul du trait de côte à l’échelle du territoire sera effectué d’ici 2027.
L’émergence d’une culture et d’une mémoire du risque représente un enjeu fort. L’État mettra en place de manière prioritaire un plan d’actions de sensibilisation aux risques naturels. Le concours de l’observatoire national des risques naturels sera recherché. Une démarche globale d’étude et de recherche sur la résilience des habitats et des systèmes homme-environnement sera proposée, dans l’objectif de faire de Mayotte un laboratoire de l’adaptation au changement climatique.
En matière de prévention des inondations, l’État veillera à la bonne mise en œuvre du plan de gestion des risques d’inondations (PGRI) couvrant la période 2022-2027.
2.1.2. Protéger les Mahorais face à l’insécurité
La refondation nécessite de prendre les mesures nécessaires au maintien durable de l’ordre public, en lien avec la lutte contre l’immigration irrégulière.
Pour l’année 2024, les forces de sécurité intérieure font état de :
– 227 procédures « violences intrafamiliales » ;
– 1 940 faits d’atteinte volontaire à l’intégrité physique dont 5 homicides et 35 tentatives d’homicide ;
– 2 255 faits d’atteinte aux biens ;
– 2 354 faits d’atteinte à la tranquillité publique ;
– 169 faits de violence dans les transports scolaires.
À travers le renforcement des infrastructures et des effectifs, l’État s’engage à garantir aux Mahorais la sécurité et la tranquillité publiques.
Le doublement des effectifs de police et de gendarmerie depuis 2017 a permis et permet toujours de conduire des opérations (Shikandra, Wuambushu, Mayotte Place Nette) qui ont obtenu des résultats significatifs en matière d’arrestations et d’éloignement.
Les opérations Wuambushu et Mayotte Place Nette ont notamment permis l’arrestation de 160 cibles prioritaires.
La stratégie de l’État en matière de lutte contre l’insécurité reposera sur une action en profondeur et de long terme que des opérations dédiées pourront venir accélérer.
Pour renforcer les effectifs, l’État organisera la formation de 300 gendarmes et policiers auxiliaires mahorais pour assister les unités locales et se préparer à exercer les missions de sécurité.
La création d’une antenne de l’Office de lutte contre le trafic illicite de migrants (OLTIM) en 2023 renforce la lutte contre les filières de passeurs, et en priorité les filières africaines. En 2023, six filières ont été démantelées et de lourdes condamnations, allant jusqu’à sept ans d’emprisonnement, ont été prononcées.
L’État engagera un renforcement spécifique des moyens de la gendarmerie avec :
– la création des brigades de Dzoumogné (10 gendarmes) et Bandrélé (10 gendarmes) et du peloton de surveillance et d’intervention de la gendarmerie (PSIG) de Dembéni (20 gendarmes) ;
– le renfort du centre opérationnel de renseignement de la gendarmerie (5 gendarmes) ;
– des renforts de police judiciaire (10 effectifs).
La mise en adéquation du fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD) avec les besoins exprimés par les autorités locales sera réalisée.
Le maintien de l’effort opérationnel et le renforcement des effectifs et des moyens des forces de sécurité s’accompagnera d’investissements pour soutenir le système judiciaire et carcéral :
– la construction d’une cité judiciaire sera engagée avec un objectif de début des travaux en 2025 ;
– un centre éducatif fermé sera construit. L’objectif de lancement des travaux sera également fixé à 2025 ;
un deuxième centre pénitentiaire d’une capacité de 400 places et incluant un centre de semi-liberté de 20 places sera construit. Le début des travaux est prévu en 2027.
La montée en puissance des effectifs de police et de gendarmerie à Mayotte s’accompagnera d’une action de formation. En particulier, tous les magistrats affectés à Mayotte seront formés à la lutte contre les violences intrafamiliales, en particulier sexuelles.
Le nombre d’intervenants sociaux en commissariat et en gendarmerie va croître à mesure que seront déployés des effectifs supplémentaires de police et de gendarmerie.
En lien avec le secteur associatif, le dispositif « Nouveau départ » sera déployé à Mayotte au plus tard le 1er janvier 2026 en vue d’organiser une prise en charge rapide, globale et adaptée des victimes.
Enfin, la loi porte en elle-même des mesures visant à renforcer les capacités d’action des forces de sécurité intérieure. Les dispositions sont notamment relatives aux visites domiciliaires aux fins de recherche d’armes, à la remise des armes ou à la possibilité offerte aux officiers et agents de police judiciaire de traverser un local tiers – y compris un domicile – pour pénétrer dans les lieux à usage professionnel.
2.1.3. Mayotte, une priorité de la stratégie de défense française dans l’océan Indien
Dans un contexte de concurrence régionale et internationale et de militarisation accélérée qui modifient les équilibres actuels et augmentent le niveau de menace dans la zone, la protection de Mayotte et des territoires sous souveraineté française dans le canal du Mozambique constituent une priorité de la stratégie de défense française dans l’océan Indien.
Ainsi, le positionnement des forces armées dans la zone sud de l’océan Indien (FAZSOI) en tant que force de souveraineté et force de présence continuera à être affirmé à travers la conduite de missions de souveraineté dans les zones maritimes afférentes à Mayotte et d’actions de coopération régionale avec les forces armées de la zone sud océan Indien.
Les FAZSOI poursuivront leur action de lutte contre la piraterie, la pêche illicite et les trafics de toute nature, en particulier le narcotrafic.
L’État sera particulièrement vigilant face à toute tentative d’ingérence étrangère ou de développement du fondamentalisme religieux visant à déstabiliser le territoire et mettre en péril la paix civile à Mayotte.
Le fondamentalisme religieux ne doit pas venir fragiliser le modèle de l’islam mahorais reposant sur l’autorité des cadis et l’entraide, et qui représente l’un des ciments du vivre-ensemble de l’archipel, dans le respect de la loi du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République.
La présence stratégique d’unités des FAZSOI sur l’île sera confortée et renforcée. Le 5e régiment étranger bénéficiera d’une augmentation de ses effectifs de 30 % à l’horizon 2030, avec la mise en place des capacités supplémentaires prévues dans la loi de programmation militaire, parmi lesquelles figurent des moyens du génie.
Le format de la base navale de Mayotte sera adapté afin de participer à la surveillance permanente des approches maritimes du territoire mahorais (via le poste de commandement de l’action de l’État en mer) et d’assurer le soutien des bâtiments de la Marine nationale basés ou faisant escale à Mayotte, ainsi que celui des intercepteurs des forces de sécurité intérieure.
2.2. Garantir l’accès aux Mahorais aux biens et ressources essentiels
Le 3 février 2025, le ministère des Armées a décidé la création d’un bataillon temporaire de reconstruction de l’île, afin d’engager les premiers chantiers, en préalable de la reconstruction pérenne de Mayotte. Entre 350 et 400 soldats sont ainsi mobilisés, au service des Mahorais.
2.2.1. Garantir l’accès à l’eau potable et à l’assainissement aux Mahorais : des investissements programmés
L’accès à l’eau potable constitue une priorité pour éviter la précarisation chronique des Mahorais déjà soumis à de fortes carences. Les épisodes récurrents de stress hydrique affectent directement la qualité de vie des habitants et freinent le développement économique.
Les collectivités territoriales de Mayotte ont délégué leurs compétences de distribution d’eau et de gestion de l’assainissement collectif au syndicat mixte « Les Eaux de Mayotte » (LEMA), maître d’ouvrage des principaux travaux relatifs à l’alimentation en eau potable et à l’assainissement des eaux usées.
Le syndicat LEMA fait l’objet d’un accompagnement de l’État dans le cadre d’un contrat d’accompagnement renforcé (2024-2027). Un contrat de progrès 2022-2026 définit les objectifs et performances du syndicat autour de la gouvernance, de la gestion du patrimoine, de la qualité du service rendu aux usagers en matière d’eau potable et d’assainissement.
Le sous-investissement dans la production et le réseau de distribution durant plusieurs décennies, l’impact de la pression démographique sur l’équilibre offre-demande, ainsi que des épisodes de sécheresse récurrents expliquent cette situation.
Pour remédier à celle-ci, le « Plan Eau Mayotte » portant sur des actions à mener entre 2024-2027 est en cours de mise en œuvre, pour un montant cumulé de 730 millions d’euros d’investissement. Ce plan a été précédé d’une réorganisation du syndicat LEMA.
Le Plan Eau Mayotte doit permettre d’éviter les crises récurrentes liées au manque de disponibilité d’eau potable et d’améliorer le réseau d’assainissement, notamment en prévoyant études et travaux destinés :
– à équiper Mayotte d’une deuxième usine de dessalement à Ironi Be opérationnelle en 2026, d’une troisième retenue collinaire opérationnelle, de réservoirs tampons ;
– à promouvoir la réalisation de nouveaux forages et de captages supplémentaires en rivières ;
– à développer un programme de recherche de fuites et de réparations ;
– à améliorer l’assainissement collectif : financement de nouvelles stations d’épuration, extension des réseaux et remise à niveau des anciennes installations.
L’État s’engage à la réalisation des deux infrastructures prioritaires que représentent la deuxième usine de dessalement d’Ironi Bé et la troisième retenue collinaire d’Ouroveni.
Dans le cadre de l’accompagnement du syndicat LEMA, l’État poursuit un objectif de fin des « tours d’eau » au profit d’une eau courante disponible en continu sur tout le territoire d’ici la fin de l’année 2026.
L’enjeu de ces prochaines années est ainsi le maintien de l’effort d’investissement et d’entretien des installations. Cela concernera en particulier la sécurisation de l’usine de dessalement de Petite Terre, exposée à l’érosion du trait de côte et pour laquelle des travaux d’extension seront réalisés.
Dans l’attente de la mise en service effective des futures infrastructures stratégiques (deuxième usine de dessalement, troisième retenue collinaire), l’État s’engage – en lien avec les collectivités – à étudier toute solution nouvelle susceptible de soutenir la résilience du territoire à court terme.
En matière d’assainissement, les différents projets contenus dans le contrat de progrès 2022-2026 seront réalisés. Il s’agit principalement de travaux sur les réseaux et les stations de traitement des eaux usées.
En complément des 60 millions d’euros d’investissements prévus en 2025, l’État s’engage à augmenter les moyens alloués au Plan Eau Mayotte en fonction des besoins.
2.2.2. Garantir aux Mahorais l’accès régulier à l’électricité
Face aux aléas naturels, l’État mettra en œuvre les mesures nécessaires afin de garantir la résilience des installations de production et distribution d’électricité. L’équipement systématique en groupes électrogènes des services d’intérêt général doit notamment contribuer à la résilience.
Pour l’électricité comme pour l’ensemble des fluides, l’opportunité d’enfouissement des réseaux fera l’objet d’une analyse systématique en cas de travaux.
Pour répondre aux attentes de la population mahoraise en termes de qualité du service public de la production, de la distribution et de la commercialisation de l’électricité, une nouvelle programmation pluriannuelle de l’énergie sera très prochainement adoptée. L’engagement de l’État au sein d’Électricité de Mayotte, de façon directe ou indirecte, sera examiné dans ce cadre.
2.2.3. Établir une trajectoire de souveraineté alimentaire pour le territoire passant par le développement de l’agriculture, de la pêche et de l’aquaculture
Mayotte dispose d’un plan de souveraineté alimentaire depuis le 7 juillet 2023. Ce plan fixe une trajectoire à horizon 2030, avec par exemple un objectif de taux de couverture des besoins de 90 à 100 % pour les fruits et légumes frais, 10 % de production locale pour la volaille de chair et 100 % pour les œufs.
Un plan régional de l’agriculture durable 2023-2029 a également été approuvé le 11 septembre 2024. Il définit 78 actions concourant à l’objet de faire du secteur primaire un moteur majeur du développement endogène et durable.
Malgré les dégâts causés par le passage de Chido et Dikeledi, l’État réaffirme l’objectif de mise en œuvre des plans stratégiques d’ici 2030. Les principaux axes sont :
– l’amélioration de l’accès au foncier et la réhabilitation des pistes rurales dans les zones à potentiel agricole ;
– le soutien à la professionnalisation de l’agriculture et l’amélioration des conditions d’exploitation ;
– le reboisement du territoire ;
– le soutien à la structuration des filières, la montée en gamme des produits de l’agriculture et la valorisation des modèles agricoles mahorais ;
– l’accompagnement des acteurs agricoles dans leurs démarches financières.
L’État accompagnera étroitement les professionnels du secteur dans l’accomplissement des démarches relatives au fonds de secours pour les outre-mer (FSOM) dont l’objet est d’indemniser les pertes de récolte et de fonds des exploitations, ainsi que du régime d’aide exceptionnelle en faveur des exploitations agricoles de Mayotte suite aux pertes agricoles considérables causées par le passage de Chido.
Une attention toute particulière sera portée au redressement et au développement :
– des filières fruitières et maraîchères pour réduire au maximum le délai de retour en production ;
– du secteur agroalimentaire qui a vocation à être l’un des piliers de la souveraineté alimentaire, en particulier à travers la production laitière, de volailles et d’œufs ;
– des filières d’excellence telles que la production de vanille ou d’ylang-ylang.
Une attention particulière sera également portée à la nécessité de sécuriser l’usage agricole de l’eau dans les exploitations, à travers l’investissement dans des équipements de prélèvement d’eau agricole et de récupération des eaux de pluie.
Alors que la filière agricole a été particulièrement affectée par le passage du cyclone Chido, l’État se positionne en soutien des agriculteurs pour la relance des exploitations et des cultures afin d’accélérer la production de fruits et légumes sur le territoire.
La structuration de la filière pêche est nécessaire pour que le territoire bénéficie des retombées économiques issues de la présence de la ressource halieutique de la zone économique exclusive.
L’État accompagnera les investissements nécessaires à la formation des pêcheurs professionnels, à la structuration des points de débarquement des produits de la pêche, en particulier à travers la mise en place de pontons, la mise en service des halles de pêche et le financement de poissonneries.
L’État apportera un appui – en particulier à travers la mobilisation du fonds européen pour les affaires maritimes, la pêche et l’aquaculture – aux éventuels projets portés par les collectivités ou les professionnels pour relancer le secteur de l’aquaculture.
Pour soutenir la professionnalisation des filières, l’État veillera à la cohérence de l’offre de formation initiale et continue disponible sur le territoire, qu’il s’agisse des métiers de la mer ou de l’agriculture.
2.2.4. Garantir l’accès à une éducation de qualité dans le département le plus jeune de France
L’engagement structurant de l’État consiste à mettre totalement fin à la rotation scolaire en vue de la rentrée 2031. Les parents de l’enfant qui naîtra demain sauront que, lorsqu’il entrera au cours préparatoire, il bénéficiera de vingt-quatre heures d’école par semaine.
Le dynamisme de la population scolaire est avéré, avec + 34 % d’élèves entre 2013 et 2023. Il manquait globalement 1 200 classes avant le cyclone Chido pour répondre aux besoins.
Il y sera remédié avec un investissement d’ampleur. L’État devait déjà contribuer dans le cadre du contrat de convergence et de transformation à la construction des classes de primaire et à l’augmentation des capacités dans le secondaire à hauteur de 680 millions d’euros, ainsi qu’à l’extension de l’université de Mayotte à hauteur de 12 millions d’euros. Dans ce cadre, l’école pour tous sera affirmée comme une priorité, notamment à travers le déploiement des pôles d’appui à la scolarité et de dispositifs de scolarisation dédiés aux élèves en situation de handicap.
En complément, face à l’ampleur des dommages liés au cyclone, l’État participera à la reconstruction des bâtiments publics, sur la base d’une enveloppe de 100 millions d’euros votée en loi de finances pour 2025 et assumera un rôle de conduite d’opérations dans cette période de crise.
L’université de Mayotte conduira une politique d’ouverture régionale, en vue d’offrir des mobilités à ses étudiants à l’échelle de l’océan Indien. Cet Erasmus de l’océan Indien contribuera à sa montée en puissance en vue de devenir une université de plein exercice.
Dans le cadre de la refondation, l’offre de formation de l’université de Mayotte sera renforcée afin d’orienter un nombre plus important d’étudiants vers l’enseignement. Se prémunir contre l’instabilité des équipes suppose de former au maximum des enseignants issus du territoire. En complément, au cours de l’année 2025, il sera établi un plan d’attractivité et de fidélisation des enseignants. Ses modalités font l’objet d’un dialogue social. Il reposera à la fois sur des incitations indemnitaires renforcées et sur une valorisation des années d’exercice à Mayotte dans le déroulement de la carrière des enseignants.
Le ministère chargé de l’emploi sera tout particulièrement impliqué sur le soutien à l’apprentissage.
2.2.5. Mettre en adéquation l’offre de soins avec les besoins des Mahorais
Mayotte est caractérisée par une dynamique démographique, le niveau de vie médian le plus faible de France et trois quarts de la population vivant sous le seuil de pauvreté, une alimentation peu variée et une prévalence importante de l’obésité.
Concernant les maladies non transmissibles, un sur-risque est constaté à Mayotte par rapport à l’hexagone concernant l’hypertension artérielle (HTA), la santé bucco-dentaire défaillante, le diabète de type 2, l’infarctus du myocarde et maladies coronariennes, les insuffisances respiratoires chroniques, les accidents vasculaires cérébraux (AVC) et la cirrhose hépatique.
L’État s’engage à la fois à développer l’offre de soins et à renforcer sa politique de santé publique ou de prévention.
Le système de soins mahorais est principalement organisé autour du Centre hospitalier de Mayotte (CHM) qui concentre la totalité des capacités hospitalières et qui réalise également l’essentiel des consultations et des soins de premier recours.
L’État effectuera des travaux d’ampleur pour moderniser le site du CHM de Mamoudzou. Il développera l’offre de soins sur l’ensemble du territoire mahorais, avec la montée en puissance des centres médicaux de référence et la réouverture de tous les dispensaires.
Les centres médicaux de référence, au nombre de quatre, maillent le territoire de Mayotte et organisent les prises en charges médicales de premier recours. Leur plateau technique va être étoffé selon une logique de complémentarité entre sites.
L’État porte l’engagement d’un renforcement de l’offre de soins à Mayotte à travers la construction d’un second site hospitalier.
La restructuration de l’offre de soins mahoraise et la consolidation du maillage territorial doivent s’accompagner d’une démarche renforcée visant à attirer et fidéliser les professionnels de santé à Mayotte. Dans la continuité des efforts déjà engagés ces dernières années, le Gouvernement présentera au printemps 2025 un plan attractivité – fidélisation visant à mieux valoriser l’engagement des professionnels de santé à Mayotte, consolider l’offre de formation (avec notamment la création d’un deuxième institut de formation en soins infirmiers au plus tard en 2026 et la création d’un institut régional du travail social) et structurer des partenariats avec l’hexagone.
L’État s’engage par ailleurs à créer les conditions du développement de la médecine de ville. Suite au cyclone, l’agence régionale de santé a accompagné les professionnels dans leur reprise d’activité, en proposant notamment une aide de 5 000 € pour permettre d’opérer les premiers travaux nécessaires de restructuration du bâti et de réouverture de l’offre de soins libérale.
Enfin, le Gouvernement veille à accompagner une politique de santé publique pour le territoire. À titre d’exemple, des actions d’informations et d’accès aux services de santé en matière de sexualité et de procréation, notamment à la contraception, à l’interruption volontaire de grossesse et aux dépistages et traitements contre les infections sexuellement transmissibles (IST) seront menées en faveur de la santé sexuelle des Mahoraises et des Mahorais.
Dans le champ du handicap, 31,3 millions d’euros seront déployés au titre du développement de nouvelles solutions. Concernant les personnes âgées, 9,1 millions d’euros seront dédiés au développement d’une offre médico-sociale.
La maison départementale des personnes handicapées (MDPH) continuera d’être accompagnée pour faciliter les parcours des personnes.
2.2.6. Atteindre l’égalité réelle en 2031 à travers une convergence économique et sociale
La convergence économique sera créatrice de richesses pour le plus grand nombre et facilitera la convergence sociale.
La convergence sociale consiste à aligner progressivement le système de protection sociale de Mayotte (santé, famille, retraites, emploi), autant en matière de prestations sociales et de droits que d’obligations et de sources de financement.
Le processus de convergence engagé avec la départementalisation devait se faire « en une génération », soit d’ici 2036. L’État s’engage à accélérer la convergence sociale en vue d’une effectivité dès 2031, avec une trajectoire soutenable, tant pour l’économie que pour la société mahoraise, post Chido. En vue de faciliter la transition la hausse des cotisations sociales pourra, sans s’éloigner trop fortement de celle des prestations pour assurer une soutenabilité d’ensemble, être plus progressive, pour s’achever au plus tard en 2036.
Ce processus de rapprochement démarrera le plus rapidement possible avec une évolution progressive du niveau des prestations et de celui des cotisations et de la fiscalité qui les financent. Ainsi, dès le 1er janvier 2026, sera enclenché un processus de convergence selon un calendrier précis et des modalités offrant de la visibilité aux acteurs économiques.
En complément, en 2026, la complémentaire santé solidaire gratuite sera attribuée automatiquement aux bénéficiaires de l’allocation aux adultes handicapés et de l’allocation spéciale pour les personnes âgées et la protection universelle maladie sera déployée à Mayotte, pour améliorer l’accès aux soins.
L’État affirme un principe de priorité du travail, et de la reconnaissance notamment pécuniaire de celui-ci. C’est pourquoi la convergence du SMIC net sera effective au plus tard en 2031 et selon un calendrier qui sera défini en lien avec les acteurs économiques et sociaux. La mise en place de la zone franche globale rendra, par ailleurs, ce renchérissement du coût du travail soutenable pour les entreprises. Dès alignement du SMIC net à Mayotte sur le SMIC net national, la prime d’activité sera, en cohérence, également fixée à 100 % de sa valeur nationale.
Un appui à la structuration des filières sera également mis en place, avec l’appui des financements France 2030. Il devrait en résulter une amélioration du financement des entreprises par le secteur bancaire et BPI France sera particulièrement mobilisée sur ce sujet. L’innovation et l’accès au numérique doivent également constituer des priorités de la future stratégie dédiée à Mayotte.
En cohérence avec la priorité en faveur du travail, la convergence du niveau des allocations individuelles de solidarité interviendra après celle du SMIC net. Cela vaut en particulier pour le revenu de solidarité active (RSA) et l’allocation aux adultes handicapés (AAH) à horizon 2031. De même, le niveau des naissances à Mayotte n’appelle pas d’alignement rapide des prestations familiales, y compris la prestation d’accueil du jeune enfant.
Dans le champ du handicap, 22 millions d’euros seront déployés pour de nouvelles solutions pour les personnes en situation de handicap lourd et 7 millions pour des formes d’hébergement adaptées.
Concernant l’organisation de la sécurité sociale, la caisse de mutualité sociale agricole d’Armorique est aujourd’hui gestionnaire de la protection sociale des agriculteurs mahorais, sauf pour les prestations familiales et l’accueil de proximité, assurés par la caisse de sécurité sociale de Mayotte. Dans des délais permettant d’assurer la continuité et la qualité du service rendu, la caisse de sécurité sociale de Mayotte renforcera progressivement son implication dans la gestion des exploitants agricoles en vue de l’assurer si les conditions opérationnelles sont réunies.
2.2.7. Augmenter massivement l’offre de logement dans le cadre de la reconstruction
En complément des actions engagées en faveur de la résorption de l’habitat illégal, l’État doit porter une politique ambitieuse en matière de construction de logements neufs, en lien avec les opérateurs et les collectivités territoriales.
L’objectif de reconstruction de 24 000 logements au cours des dix prochaines années avec une livraison de 1 500 logements dès 2027 sera ajusté à la lumière des conclusions de la mission inter-inspections en charge de l’évaluation des dégâts causés par le cyclone Chido. En matière de logement social, la déclinaison territoriale du futur Plan logement dédié aux outre-mer (PLOM) pourra définir, dès 2025, un objectif de constructions annuelles de logement sociaux, partagé avec l’ensemble des acteurs. L’accessibilité sera pensée en amont de chaque projet.
Les constructions nécessaires au titre de l’offre sanitaire et médico-sociale seront notamment considérées comme prioritaires.
La réalisation des projets de renouvellement urbain portés par l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) à Mayotte constitue un objectif prioritaire de l’État, qui continuera à accompagner les collectivités dans ces opérations. Les conventions de renouvellement urbain de Koungou, Mamoudzou et Petite Terre, qui représentent 119 millions d’euros d’investissement dont 71 millions d’euros d’aides de l’ANRU, sont aujourd’hui engagées entre 70 % et 100 %, et l’ensemble des investissements seront engagés d’ici juin 2026.
La création d’un nouvel établissement public dans le prolongement de la loi d’urgence pour Mayotte, une politique volontariste de titrisation associant le conseil départemental, une meilleure identification des zones à bâtir à travers le schéma d’aménagement régional doivent permettre de mieux mobiliser le foncier au profit de la construction de logements.
La régularisation du cadastre fera l’objet d’un plan d’action spécifique construit entre l’État et les collectivités territoriales.
L’État veillera à associer la commission d’urgence foncière – acteur essentiel de cette phase de régularisation foncière – à la réalisation de ces travaux et à renforcer ces moyens d’action.
L’établissement public de la reconstruction viendra renforcer significativement l’ingénierie à Mayotte, nécessaire à réaliser efficacement et rapidement les infrastructures ou opérations d’aménagement d’ampleur attendues par la population.
Aménageurs, bailleurs et constructeurs pourront bénéficier des simplifications du droit de l’urbanisme prévues par les récents textes pour accompagner l’effort de reconstruction. La création prochaine de l’opération d’intérêt national (OIN) à Mamoudzou, Dembéni et Koungou permettra aussi de mobiliser des outils spécifiques.
L’État sera vigilant vis-à-vis des coûts de construction et de l’accès aux matériaux. Les règles de construction et celles qui régissent l’approvisionnement en matériaux feront ainsi l’objet d’un travail d’adaptation, comme l’a prévu la loi d’urgence pour Mayotte, sans négliger les impératifs de qualité et de sécurité pour les Mahorais, notamment en matière d’adaptation aux aléas naturels.
Un plan de formation des artisans et TPE/PME sera décliné rapidement, tandis que les Mahorais bénéficieront de conseils s’agissant de l’auto-construction. L’information de la population sur les dispositifs d’aide et d’accompagnement en matière d’habitat sera notamment améliorée grâce à l’Agence d’information sur le logement de Mayotte (ADIL 976), agréée le 7 février dernier.
2.2.8. Veiller à la préservation de l’environnement à travers la gestion durable des déchets et la transition énergétique et la restauration de la forêt
98 % des déchets ménagers et assimilés à Mayotte sont traités par enfouissement. Le territoire dispose d’une importante marge de progression en termes de développement des filières d’économie circulaire.
La sortie du tout-enfouissement constitue une priorité en matière de traitement des déchets.
L’enjeu pour Mayotte est de s’engager dans une trajectoire ambitieuse en matière de rattrapage structurel qui reposera sur le développement des :
– infrastructures nécessaires au rattrapage ;
– filières de valorisation et de recyclage ;
– démarches innovantes de prévention des déchets (réemploi, réparation).
À court terme, l’État engagera une réflexion prioritaire sur l’hypothèse de l’installation d’une unité de valorisation énergétique.
Dans cet effort de rattrapage, l’État soutiendra les investissements relatifs aux déchèteries fixes ou mobiles, au fonctionnement optimal de l’actuelle installation de stockage des déchets non dangereux (ISDND) de Dzoumogné ou aux centres de tri multi-filières.
L’État veillera à la mobilisation de l’ensemble des acteurs de la gestion durable des déchets : éco-organismes, collectivités, syndicat dédié, entreprises, population, associations. L’accompagnement de l’agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME) sera recherché.
La refondation de Mayotte doit conduire à sortir le territoire de la dépendance aux énergies fossiles, importées à hauteur de 98 %.
La politique énergétique guidée par les programmations pluriannuelles de l’énergie (PPE) sera mise à jour afin de doter le territoire d’objectifs au moins jusqu’à l’horizon 2028.
La stratégie qui sera définie veillera notamment à porter des projets en matière de conversion à la biomasse liquide des installations actuelles et fixer des objectifs en matière d’augmentation de puissance installée en photovoltaïque.
Une stratégie de reboisement sera mise en œuvre pour restaurer la forêt mahoraise, qui représente 16 % du territoire. Son élaboration et sa mise en œuvre reposeront sur une coopération entre les services de l’État, l’Office national des forêts et le conseil départemental, avec l’appui du Conservatoire botanique national de Mascarin.
Cette stratégie accordera une importante toute particulière à la lutte contre les mises en culture illégales durant la saison des pluies et la lutte contre les incendies dès le retour de la saison sèche.
3. Développer les leviers de la prospérité de Mayotte
3.1. Le préalable d’un recensement exhaustif pour bâtir l’avenir de Mayotte
L’État s’engage à réaliser un recensement démographique exhaustif de la population résidant à Mayotte. À l’issue de ce recensement, l’État procède à une actualisation de ses dotations attribuées aux collectivités territoriales de Mayotte, afin de refléter les données démographiques actualisées.
Celui-ci devra intervenir dans un délai de 6 mois après la promulgation de la loi de programmation pour Mayotte.
3.2. Grandir et se construire à Mayotte : créer les conditions d’un épanouissement de la jeunesse sur le territoire
Dans le cadre de la refondation, l’État s’engage à réaliser les investissements nécessaires visant à donner à la jeunesse mahoraise des perspectives d’épanouissement à Mayotte.
L’État poursuivra le développement des services et infrastructures nécessaires à une société épanouie et apaisée. Les équipements et infrastructures du sport et de la culture seront soutenus (mise à niveau et aux normes des équipements existants) et développés (financement de nouveaux équipements en cas de carences sur le territoire concerné).
La refondation de Mayotte accordera une part importante à l’accompagnement des actions culturelles.
Le Pôle culturel de Chirongui – unique équipement culturel professionnel de l’île – dédié aux arts contemporains pourra servir de source d’inspiration pour renforcer le maillage des institutions culturelles du territoire.
Une attention particulière sera portée à la sécurisation et la mise en valeur des monuments historiques. L’accès à la culture et la connaissance du patrimoine historique de Mayotte contribueront à l’éveil des jeunes Mahorais.
Au-delà de l’action en faveur de l’école précédemment évoquée, l’État s’engage en matière d’offre périscolaire. Il sera déployé dès 2025 un fonds de soutien au développement des activités périscolaires. Il se traduira par un financement au titre des activités périscolaires de chaque élève. En parallèle, le Fonds pour le développement de la vie associative verra sa dotation doubler en 2025 pour soutenir les associations de bénévoles.
L’insertion de la jeunesse mahoraise sera par ailleurs soutenue par l’extension du service militaire adapté (SMA), avec la création d’une antenne à Chirongui pour un montant de 14 millions d’euros. La reconstruction du site de Combani – particulièrement affecté par le passage de Chido – fera l’objet d’une mobilisation financière de l’État à hauteur de 10 millions d’euros.
Le régiment du service militaire adapté de Mayotte accompagne près de 700 bénéficiaires par an, volontaires stagiaires et volontaires techniciens. Il atteint un taux d’insertion de 85 %.
Son offre repose sur 22 filières de formation professionnelle et de remobilisation vers l’emploi (BTP, services, sécurité, logistique, restauration). Les formations s’adaptent au besoin du territoire chaque année.
L’État s’engage à accueillir 1 000 volontaires par an à partir de 2031 en visant un taux de féminisation largement accru. En complément, les équipes d’encadrement seront densifiées pour offrir une formation d’une qualité encore renforcée et permettre l’accueil de parents célibataires.
L’État s’engage par ailleurs à faciliter l’engagement des jeunes. Afin de dynamiser leur engagement, le cadre du service civique sera temporairement adapté pour permettre aux jeunes de s’engager et d’agir au bénéfice de la population de Mayotte.
3.3. Travailler et vivre à Mayotte : attirer et fidéliser les talents en créant les conditions de l’attractivité
L’attractivité de Mayotte est un enjeu majeur car Mayotte a besoin de tous les talents pour franchir les nouvelles étapes décrites dans le présent rapport.
Ce besoin d’attractivité est multiple : pour le secteur privé, pour le secteur public et pour le maintien ou le retour des forces vives de Mayotte.
On peut d’ores et déjà noter deux facteurs communs à cette démarche d’attractivité : la poursuite de l’amélioration de la situation sécuritaire, et l’augmentation de l’offre de logements, toutes deux prévues dans la stratégie de refondation.
L’offre de logements pour les fonctionnaires, notamment ceux qui viennent en renfort dans cette phase d’accompagnement de Mayotte, sera dynamisée par le recours à des prototypes, expérimentés dès 2025. D’autres solutions de logement seront encouragées, incluant le logement des étudiants.
Parmi les missions de l’établissement public figureront une mobilisation et une optimisation du foncier public pour mettre à disposition davantage de logements.
De plus, il sera procédé à une révision complète des quartiers prioritaires de la ville qui s’attachera à la mise en cohérence avec les zones prioritaires scolaires.
Au sein des services de l’État, sera mise en place une cellule « Attractivité, mobilité, proximité » chargée d’accompagner les agents publics dans la recherche de leur logement en vue de leur arrivée à Mayotte.
Il sera déployé de nouvelles incitations pour les agents de la fonction publique, en particulier la possibilité de choix d’affectation après une durée de poste à Mayotte de 3 ans au minimum. En parallèle, des missions plus courtes seront largement autorisées, dans une logique de « réalisation personnelle » au service de nos compatriotes mahorais.
Dans les secteurs les plus en tension, il sera déployé des plans d’attractivité et de fidélisation. Cela vaut en particulier pour les professionnels de santé et les professionnels du médico-social.
3.4. Créer de la valeur à Mayotte : créer les conditions du développement économique
Créer les conditions du développement économique à Mayotte implique de prendre les mesures concourant :
– au désenclavement de Mayotte : le développement des infrastructures portuaires et aéroportuaires constitue une priorité en termes d’investissement.
– à la fluidification des échanges sur le territoire :
○ la mise en place d’un réseau de transport multimodal reposant sur la modernisation des infrastructures ainsi que le développement des transports interurbains et des navettes maritimes devra être réalisée.
○ le réseau 5G sera déployé sur l’ensemble du territoire dès 2025.
○ d’ici 2027, le réseau de fibre optique sera déployé sur l’ensemble du territoire, avec un appui financier public de 50 millions d’euros dans le cadre du plan France Très Haut Débit.
– A la relance de l’activité des entreprises locales :
○ une zone franche globale sera mise en place à compter du 1er janvier 2026 pour relancer un tissu économique durement touché par Chido et Dikeledi et accélérer la transition de l’économie informelle vers l’économie déclarée. Une attention particulière sera portée aux microentreprises qui constituent la majeure partie des entreprises mahoraises et se caractérisent par une certaine vulnérabilité en termes de trésorerie et capitalisation.
○ Les filières économiques locales particulièrement affectées par Chido seront accompagnées pour se relever et poursuivre les objectifs des stratégies de développement élaborées avant le passage du cyclone. Cela sera notamment le cas de la filière touristique. Le rétablissement et le développement de l’offre hôtelière, la formation des acteurs du tourisme, ainsi que la relance des activités touristiques emblématiques du territoire telles que la plongée sous-marine ou les excursions nautiques, contribueront à la diversification de l’activité économique, au renforcement de l’attractivité du territoire et, ce faisant, participeront à l’amélioration de la qualité de vie des Mahorais.
– A développer la coopération régionale et renforcer l’intégration de Mayotte dans son environnement régional :
○ Conformément aux décisions prises par le comité interministériel des outre-mer (CIOM) le 18 juillet 2023, et comme rappelé par le président de la République à l’occasion de la Conférence des Ambassadeurs le 6 janvier 2025, les territoires ultramarins doivent être mieux associés à la politique étrangère de la France. Dans l’objectif de mieux intégrer les enjeux de coopération régionale et d’attractivité des territoires d’Outre-mer et d’améliorer l’accompagnement des collectivités territoriales ultramarines à l’international, le ministre chargé de l’Europe et des Affaires étrangères, en lien avec le ministre chargé des outre-mer, renforceront les mécanismes permettant d’associer les collectivités d’outre-mer à la politique étrangère de la France, sur la base d’une stratégie concertée qui sera adoptée lors de la Conférence de coopération régionale pour l’océan Indien.
○ Par la convention signée entre l’État et le Conseil départemental de Mayotte le 11 mars 2024, un Comité pour l’insertion régionale de Mayotte (CIRM), a été établi comme cadre privilégié de dialogue entre l’État et le Département. Le CIRM est chargé de proposer des orientations pluriannuelles en matière de coopération ; définir une feuille de route annuelle qui décline ces orientations pour l’année à venir ; identifier la formation nécessaire à certains agents territoriaux aux enjeux internationaux et au protocole diplomatique, sur financement du département de Mayotte, afin de contribuer à la montée en compétence de l’encadrement de Mayotte ; assurer le suivi des initiatives de coopération engagées dans le cadre de la convention.
○ Le développement de liens de coopération avec les pays de la zone est à poursuivre :
■ Dans le sud-ouest de l’océan Indien (zone Commission de l’océan Indien – COI), l’État poursuivra, en cohérence avec la convention de coopération signée avec le conseil départemental de Mayotte en mars 2024, son soutien au déploiement de la stratégie de coopération régionale du Conseil départemental, à la mise en œuvre du programme INTERREG « Canal du Mozambique » piloté par le conseil départemental de Mayotte, à l’insertion de Mayotte dans la stratégie Indopacifique, au déploiement de représentants du Conseil départemental dans les postes diplomatiques de la région ;
■ Dans la région élargie, l’État encouragera les relations entre Mayotte et la Tanzanie, le Kenya, l’Afrique du Sud et le Mozambique, ainsi que le dialogue avec la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) afin de soutenir la reconstruction et le développement de Mayotte ;
○ L’État poursuivra ses efforts afin de développer la coopération régionale, autour de Mayotte, sur les secteurs stratégiques suivants :
■ Environnement : actions de lutte contre l’érosion de la biodiversité, notamment dans le parc naturel marin à travers des programmes tels que « VARUNA » et permettant des échanges d’expériences entre gestionnaires des aires marines protégées du sud-ouest de l’océan Indien ;
■ Agriculture : construction d’une technopole pour promouvoir l’innovation et la recherche, notamment dans le domaine de l’agro-transformation, qui revêt une importance cruciale pour les territoires insulaires ; la promotion de la production régionale et du développement de filières d’approvisionnement régional dans un cadre normatif contrôlé ;
■ Économique : conclusion de conventions de partenariat avec des Chambres de Commerce et d’Industrie des pays voisins (Kenya notamment) ;
■ Numérique : développement de la coopération régionale en matière de connectivité numérique. Le data center en service à Mayotte depuis 2022 (ITH Center) est un modèle en partenariat avec celui de La Réunion et offre son savoir-faire en Afrique de l’Est (Kenya) ;
■ Formation professionnelle : poursuite des actions visant à renforcer la formation et l’employabilité des jeunes Mahorais, en particulier dans le secteur de l’hôtellerie-restauration aux Seychelles et à Maurice.
○ De nouvelles coopérations permettant de surmonter les obstacles actuellement rencontrés en matière de connectivité notamment (aérienne, maritime), pourront être initiées. Un enjeu majeur de coopération régionale est en effet l’amélioration des connexions maritimes (profiter de la position géographique de Mayotte pour développer le port et faire baisser les coûts de transports et d’approvisionnement) et aériennes dans la zone.
– Dans ce contexte, la Commission de l’océan Indien constitue un cadre de coopération à exploiter :
○ Lors de sa présidence en 2021-2022, la France a décliné un programme ambitieux autour de l’économie bleue, thématique cruciale pour les États insulaires, afin de penser des stratégies adaptées et durables face aux défis environnementaux. Elle a joué à cette occasion un rôle pilote aux côtés de ses partenaires, en menant des projets concrets (journées de nettoyage de plages, formations de pêcheurs, etc.) dans les pays de la COI, ainsi que dans les pays côtiers d’Afrique australe et orientale (Afrique du Sud, Kenya, Mozambique, Tanzanie). Mayotte est déjà intégrée au programme de la COI en matière de sécurité et sûreté maritimes, le plaidoyer pour son intégration aux autres programmes de la COI sera renforcé, notamment en matière de sécurité sanitaire, d’adaptation au changement climatique et de coopération agricole.
– Une réflexion sur les dispositions spécifiques supplémentaires pour les régions ultrapériphériques (RUP) pourrait être menée au niveau européen :
○ Pour mémoire, la législation européenne est applicable dans les RUP mais, afin de tenir compte de leurs spécificités, des adaptations aux politiques européennes ont été introduites (CJUE, Mayotte, 2015).
○ Ces mesures concernent notamment les politiques douanières et commerciales, la politique fiscale, les zones franches, les politiques dans les domaines de l’agriculture et de la pêche et les conditions d’approvisionnement en matières premières et en biens de consommation de première nécessité.
○ La France fait de l’intégration des spécificités des territoires ultramarins aux négociations dans le cadre du prochain cadre financier pluriannuel une priorité. La France demande également l’intégration de ces spécificités préalablement à la production de tout nouvel acte réglementaire ou directive.
I. – Infrastructures portuaires : envisager le passage sous compétence de l’État en vue de la modernisation et de l’extension du port de Longoni
Le port de Longoni doit être considéré comme une infrastructure stratégique pour le développement économique de Mayotte et vecteur d’intégration régionale.
En vue de l’amélioration de la capacité de débarquement, de manutention et de stockage des marchandises, l’État s’engage à soutenir les investissements en matière de modernisation et extension des infrastructures portuaires.
Situé sur une route maritime majeure par laquelle transite 30 % du commerce mondial de pétrole, au cœur d’une zone renfermant d’importants stocks d’hydrocarbures et ressources halieutiques, le port de Longoni doit conforter et affirmer son positionnement stratégique dans le canal du Mozambique.
La transformation du port de Longoni en port sous compétence de l’État à l’issue de la concession de service public en 2028 fera l’objet d’une expertise et d’une concertation avec le conseil départemental de Mayotte, préalables à toute évolution statutaire. Un audit financier du port de Longoni sera réalisé avant la fin de l’année 2025.
II. – Infrastructures aéroportuaires : garantir la desserte internationale de Mayotte
La desserte aérienne internationale de Mayotte sera garantie, que ce soit par l’aménagement de l’aéroport actuel ou par la construction d’un nouvel aéroport sur Grande Terre. Si cette deuxième option était finalement retenue, il devrait s’inscrire dans le cadre d’un hub logistique avec le port de Longoni.
L’État prend l’engagement, afin de garantir le désenclavement de Mayotte et favoriser le développement économique de conduire les procédures, de mettre en place les financements et de conduire les investissements nécessaires au maintien opérationnel à Mayotte d’un aéroport adapté aux avions long-courriers et de grande capacité et permettant par tout temps, les vols directs vers l’hexagone.
La décision actant après concertation les principes relatifs au nouvel aéroport de Mayotte doit être prise avant avril 2026, la déclaration d’utilité publique avant la fin de l’année 2028.
Le renforcement des infrastructures visant à garantir l’accès aux biens et ressources essentiels contribue également à créer les conditions du développement économique et de la prospérité.
4. Programmes d’investissements prioritaires dans les infrastructures et politiques publiques essentielles à Mayotte
Les investissements présentés ci-dessous sont issus du contrat de convergence et de transformation en vigueur et de différents plans d’actions ministériels ou interministériels :
Domaine |
Nature |
Montant des investissements 2025-2031 (en M€) |
Lutte contre l’immigration clandestine / sécurité |
Renforcement du dispositif de surveillance et d’interception aérien et maritime |
52 |
Justice |
Création d’un deuxième centre pénitentiaire |
292 |
Construction d’une cité judiciaire |
124 |
|
Création d’un centre éducatif fermé |
14 |
|
Santé |
Projet de construction d’un second site hospitalier à Combani |
407 |
Extension et modernisation du CHM |
||
Eau |
Financement des investissements nécessaires en matière d’eau et d’assainissement du plan Eau Mayotte (y compris de la deuxième usine de dessalement et troisième retenue collinaire) |
730 |
Transports |
Sécurisation de la desserte aérienne |
1200 |
Infrastructures routières et transports en commun, dont pôles d’échanges multimodaux et notamment celui de Mamoudzou - Réalisation de voies de contournement pour soulager les principales agglomérations - projet CARIBUS |
280 |
|
Déchets |
Rattrapage structurel, première tranche de points de collecte, développement de l’économie circulaire |
27 |
Numérique |
Déploiement de la fibre |
50 |
Ce premier chiffrage traduit l’engagement financier de l’État en faveur des infrastructures prioritaires de Mayotte.
Les évaluations des dommages et des besoins à la suite des dégâts causés par le cyclone Chido seront confirmées et affinées, en lien avec les ministères compétents, la mission inter-inspections en charge de l’évaluation des dégâts et des besoins et la mission de reconstruction et de refondation de Mayotte. C’est sur cette base que la programmation des investissements pourra être précisée.
Une programmation annuelle des investissements sera présentée au Parlement avant le 31 décembre 2025.
5. La reconstruction et la refondation de Mayotte appellent un renforcement des services de l’État et des collectivités territoriales
5.1. La mission chargée de la reconstruction de Mayotte garantira la continuité de l’action de l’État, en lien étroit avec un État territorial renforcé dans ses moyens et ses effectifs.
La mission chargée de la reconstruction et de la refondation de Mayotte animera le travail interministériel et donnera l’impulsion attendue à tous les services centraux, en travaillant en miroir avec les équipes qui seront déployées à Mayotte, au sein de la préfecture et du futur établissement public.
Elle aura également en charge la rédaction et la mise en œuvre d’une stratégie quinquennale 2026-2031 intégrant les quatre dimensions de l’approche globale : sécurité, développement, coopération, institutions.
Positionnée auprès de la direction générale des outre-mer et animée par le cabinet du ministre d’État, ministre des outre-mer, cette mission interministérielle – dirigée par le préfigurateur chargé de coordonner la reconstruction – couvrira les principaux champs de politique publique concernés par la reconstruction : établissements scolaires, santé, économie, sécurité et migration, agriculture, logement et urbanisme.
Une équipe projet dédiée à la reconstruction et à la refondation de Mayotte doit être mise en place auprès du préfet de Mayotte. Cette équipe devra être dimensionnée et pourvue en compétences pour couvrir spécifiquement chacun des champs de l’action publique concernés par la reconstruction.
5.2. Le renforcement des collectivités territoriales repose sur la mise en adéquation du statut et des moyens avec l’ampleur inédite du défi à relever
Le Gouvernement entend refonder Mayotte avec les collectivités territoriales. L’État s’engage à faciliter l’exercice de leurs compétences par les institutions démocratiques locales.
D’abord, l’État s’engage à mettre à disposition des collectivités les compétences en ingénierie de l’établissement public de refondation institué par la loi du 24 février 2025 d’urgence pour Mayotte. De même, pour le temps de la refondation et via l’établissement public, seront mobilisés en faveur de Mayotte les établissements publics nationaux les plus à même d’accompagner les collectivités, et notamment le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (CEREMA) et l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT).
L’État entend ensuite accroître les marges de manœuvre des collectivités territoriales. Le recensement de la population permettra d’adapter les moyens des communes à la réalité de leur population.
L’action de lutte contre l’habitat illégal signifiera la fin de dépenses liées à la présence de populations bénéficiant de services sans acquitter de contributions locales.
En complément, la fiabilisation du cadastre et les procédures d’acquisition par prescription vont développer les bases fiscales, et donc les recettes des collectivités territoriales, à particulier à travers la taxe foncière sur les propriétés bâties.
C’est le développement économique de Mayotte qui doit générer une dynamique de hausse des recettes fiscales des collectivités territoriales. C’est pourquoi la convergence économique est conçue comme la clé de l’ambition territoriale, sociale et institutionnelle pour Mayotte.
6. (nouveau) Une évaluation associant l’ensemble des acteurs
La loi de programmation pour la refondation de Mayotte et les investissements prévus dans le présent rapport feront l’objet d’une évaluation régulière, associant l’ensemble des acteurs.
Un comité de suivi de la loi de programmation pour la refondation de Mayotte sera institué auprès du Premier ministre afin de veiller au suivi de la mise en œuvre et à l’évaluation des mesures prévues par la loi et son rapport annexé et d’en rendre compte au Parlement. Présidé par une personnalité désignée par le Premier ministre, ce comité sera notamment composé de deux députés et de deux sénateurs, de représentants des élus locaux et de représentants de l’État.
Un rapport intermédiaire évaluant l’impact de la reconstruction et de la refondation de Mayotte et la réalisation des investissements sera remis au Parlement avant le 1er juillet 2028. Il pourra donner lieu à un débat au Parlement.
Mme la présidente. L’amendement n° 25, présenté par M. Omar Oili, Mmes Narassiguin, Artigalas et Le Houerou, MM. Lurel, Kanner et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Rapport annexé, après l’alinéa 13
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
Dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport recensant et faisant l’évaluation des plans stratégiques existants applicables à Mayotte.
La parole est à M. Saïd Omar Oili.
M. Saïd Omar Oili. Le présent projet de loi de programmation doit venir se substituer aux multiples plans stratégiques dont le pilotage et la mise en œuvre concrète ne peuvent être considérés comme satisfaisants.
Le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain observe pourtant que ce projet de loi de programmation n’a pas été précédé d’une évaluation de ces plans stratégiques, tout particulièrement des deux contrats de convergence et de transformation 2019-2023 et 2024-2029.
C’est pourquoi cet amendement tend à prévoir dans un délai de trois mois la remise au Parlement par le Gouvernement d’un rapport recensant les plans stratégiques applicables à Mayotte et présentant un bilan de leur mise en œuvre dans les domaines économique, social, sanitaire, éducatif, sécuritaire et environnemental. Il devra identifier les éventuelles redondances, incohérences ou lacunes dans la mise en œuvre de ces plans et présenter les éventuels résultats obtenus. Enfin, il devra préciser les modalités de substitution du présent projet de loi de programmation à ces plans, dans un objectif de cohérence et de lisibilité de l’action publique à Mayotte.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. Madame la présidente, monsieur le ministre, si vous le permettez, je prendrai quelques instants pour expliquer la philosophie de la commission sur les amendements relatifs au rapport annexé.
Ce rapport, dépourvu de portée juridique et normative, je le rappelle, constitue la feuille de route du Gouvernement. Il y présente l’action qu’il compte mener au cours de la période de refondation de Mayotte, jusqu’en 2031.
La commission a émis un avis défavorable sur la grande majorité des amendements, que l’on peut regrouper en quatre catégories : ceux qui visent à prévoir des mesures nouvelles non financées et qui seraient irrecevables au titre de l’article 40 de la Constitution s’ils se rapportaient aux articles du corps même du projet de loi ; ceux qui tendent à prévoir un calendrier de mise en œuvre de chaque mesure et à imposer au Gouvernement d’en remettre un ; ceux qui visent à prévoir, pour chaque engagement, la remise d’une étude ou d’un rapport au Parlement comme au comité de suivi de la loi de programmation.
Si ces amendements étaient adoptés, il faudrait réaliser plus d’une trentaine de rapports ou d’études : cela nous paraît peu sérieux.
Enfin, la dernière catégorie rassemble les amendements visant à imposer des consultations supplémentaires ou dont l’adoption aurait pour effet d’alourdir les processus de décision. Il nous paraît important que l’État ait les moyens de procéder à la refondation de Mayotte dans les délais les plus brefs. Il ne nous appartient pas d’entraver son action.
La commission, je le répète, a par conséquent émis un avis défavorable sur tous les amendements qui relèvent de ces catégories, sans méconnaître les sujets de fond qu’ils soulèvent ni leur importance. Nous aurons à en débattre. En outre, certains d’entre eux étant des amendements d’appel, il appartiendra au Gouvernement d’apporter les précisions souhaitées.
Pour toutes ces raisons, nous émettons un avis défavorable sur l’amendement n° 25, qui vise à prévoir un état des lieux des plans stratégiques à Mayotte.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État, ministre des outre-mer. Monsieur le sénateur, je reconnais ici, au travers de votre amendement, votre attachement louable à l’évaluation de l’action publique, mais je pense que l’heure n’est pas au bilan des stratégies passées, même s’il est évidemment important de toujours s’appuyer sur le passé pour construire le présent et l’avenir.
En l’occurrence, la Cour des comptes, dans ses rapports, en particulier dans celui de 2022, intitulé Quel développement pour Mayotte ?, que je vous invite à lire, souligne déjà les lacunes – et c’est un euphémisme – des plans passés. C’est pourquoi il faut se tourner vers l’avenir.
La stratégie quinquennale de reconstruction et de refondation de Mayotte est en cours d’élaboration par la mission dirigée par le général Facon. Ce dernier m’a d’ores et déjà communiqué, je l’ai dit hier, un certain nombre d’éléments de cette stratégie.
Par ailleurs, j’ai demandé à cette mission de recevoir au plus vite les quatre parlementaires de Mayotte afin qu’ils puissent être pleinement associés à ses travaux. Mme Salama Ramia dispose déjà de ces éléments, qui lui ont été communiqués dans le cadre de la mission que le Premier ministre lui a confiée.
Je souhaite à présent me concentrer sur l’action. À cet égard, je partage l’avis de Mme la rapporteure, qui a défini le cadre de nos discussions. Comme elle, j’émets un avis défavorable sur l’amendement n° 25.
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 114, présenté par Mmes Corbière Naminzo et Cukierman, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Rapport annexé
I. – Après l’alinéa 19
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
Ce développement ne pourra se faire au détriment des aires protégées mahoraises et se fera dans le respect des réglementations environnementales ;
II. – Alinéa 215, seconde phrase
Compléter cette phrase par les mots :
du Conseil scientifique du patrimoine naturel de Mayotte ainsi que les associations environnementales et les gestionnaires d’aires protégées
III. – Alinéa 216
Compléter cet alinéa par les mots et une phrase ainsi rédigée :
ainsi que la lutte contre les espèces exotiques envahissantes. Sur ce dernier volet, il est impératif de prioriser les zones d’intervention, sur la base de critères scientifiques (rareté des cortèges phytosociologiques menacés, connectivité écologique des milieux, nature des espèces exotiques envahissantes présentes, état de la canopée) et techniques (accessibilité des sites, ratio coût/bénéfice, capacité de production de plants indigènes adaptés, etc.).
IV. – Après l’alinéa 216
Insérer trois alinéas ainsi rédigés :
La définition de cette stratégie s’appuiera sur un diagnostic écologique préalable permettant, notamment, de distinguer les zones capables de se régénérer naturellement et devant être strictement protégées de celles où des interventions de reboisement ciblées sont nécessaires. Dans ces dernières, les espèces à planter devront impérativement être endémiques ou indigènes, avec une provenance locale contrôlée, en lien avec les pépinières existantes et en cours de création sur le territoire.
Ce diagnostic écologique sera la prémisse à l’élaboration d’une feuille de route sur la restauration des écosystèmes forestiers mahorais, en cohérence avec le règlement européen sur la restauration de la nature. Cette feuille de route sera élaborée par la Direction de l’environnement, de l’aménagement, du logement et de la mer de Mayotte (DEALM) en associant, notamment le Conseil scientifique du patrimoine naturel de Mayotte ainsi que les associations environnementales et les gestionnaires d’aires protégées.
Ces actions doivent être coordonnées, scientifiquement encadrées, couplées à un renforcement massif des actions de surveillance et de police de l’environnement ainsi que des moyens accrus dévolus à la justice.
La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. Nous avons toutes et tous pu constater la dévastation de la forêt mahoraise – les trois quarts ont été ravagés par le cyclone Chido –, mais également le manque de moyens consacrés à la protection de la forêt, dont la surface a été réduite de 24 % en trente ans. La forêt représente néanmoins toujours 38,6 % de la surface de Mayotte, soit plus d’un tiers des 374 kilomètres carrés du territoire.
Le dernier bilan sur la biodiversité était alarmant : 43 % des 610 espèces indigènes connues et évaluées à ce jour sont menacées, parmi lesquelles de nombreuses espèces d’arbres.
Cet enjeu ne nous paraît pas avoir été pris suffisamment en compte dans le rapport annexé. Il ne nous semble pas que la gravité de la situation ait été pleinement mesurée, les garanties présentées n’étant pas suffisantes.
C’est aussi ce qui préoccupe les associations environnementales, alors que Mayotte a besoin d’un véritable soutien pour son développement et que celui-ci doit se faire, comme partout, en préservant les espaces naturels et agricoles.
Or nous savons que l’environnement est souvent sacrifié, oublié, lorsqu’il s’agit d’implanter des entreprises ou des infrastructures. Ces dernières sont nécessaires, mais leur implantation doit se faire en intégrant pleinement les objectifs de reboisement et de protection des zones encore boisées. Nous pensons que c’est tout à fait faisable, en respectant la réglementation environnementale et en préservant les aires protégées mahoraises.
Il faudra s’appuyer sur un diagnostic, sur une feuille de route, comme nous le proposons, et sur les connaissances de la direction de l’environnement, de l’aménagement, du logement et de la mer de Mayotte, du conseil scientifique du patrimoine naturel de Mayotte, des associations environnementales et des gestionnaires d’aires protégées.
Mme la présidente. L’amendement n° 58, présenté par Mmes Guhl et M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Rapport annexé
I. – Alinéa 215
Compléter cet alinéa par les mots :
, du conseil scientifique du patrimoine naturel de Mayotte, des associations environnementales et des gestionnaires des aires protégées.
II. – Alinéa 216
Compléter cet alinéa par les mots :
ainsi que la lutte contre les espèces exotiques envahissantes
III. – Après l’alinéa 216
Insérer trois alinéas ainsi rédigés :
La définition de cette stratégie s’appuiera sur un diagnostic écologique préalable permettant, notamment, de distinguer les zones capables de se régénérer naturellement et devant être strictement protégées de celles où des interventions de reboisement ciblées sont nécessaires. Dans ces dernières, les espèces à planter devront impérativement être endémiques ou indigènes, avec une provenance locale contrôlée, en lien avec les pépinières existantes et en cours de création sur le territoire.
Ce diagnostic écologique sera le préalable à l’élaboration d’une feuille de route sur la restauration des écosystèmes forestiers mahorais, en cohérence avec le règlement européen sur la restauration de la nature. Cette feuille de route sera élaborée par la direction de l’environnement, de l’aménagement, du logement et de la mer de Mayotte (DEALM) en associant, notamment le conseil scientifique du patrimoine naturel de Mayotte ainsi que les associations environnementales et les gestionnaires d’aires protégées.
Ces actions doivent être coordonnées, scientifiquement encadrées, couplées à un renforcement massif des actions de surveillance et de police de l’environnement ainsi que des moyens accrus dévolus à la justice.
La parole est à Mme Mélanie Vogel.
Mme Mélanie Vogel. Nous le savons, le cyclone Chido a profondément bouleversé l’équilibre écologique déjà fragile de Mayotte. La forêt mahoraise est aujourd’hui fragmentée et a subi des dégâts considérables : perte de canopée, sols retournés et risque aigu d’invasion biologique et d’appropriations illégales.
Face à cette situation, la tentation est grande d’agir rapidement, de replanter partout et d’envoyer un signal fort en faisant du chiffre.
Dans ce contexte, notre amendement vise à éviter une réponse précipitée qui serait déconnectée des réalités écologiques du territoire. Il faut reboiser, c’est évident, mais pas n’importe comment et pas avec n’importe quoi, car reboiser sans méthode peut parfois aggraver la situation.
Avant d’agir, il faut savoir. Aussi proposons-nous simplement d’établir un diagnostic écologique précis afin de distinguer les zones qui peuvent se régénérer seules et que l’on doit protéger de celles qui ont un véritable besoin de reboisement. Dans ce cas-là, il est essentiel d’introduire des espèces endémiques, locales et adaptées, en lien avec les pépinières de Mayotte.
Nous souhaitons également que les acteurs de terrain soient associés : le conseil scientifique du patrimoine naturel de Mayotte, les associations environnementales et les gestionnaires des aires protégées.
Enfin, il est essentiel de coupler cette stratégie à un renforcement des actions de surveillance et de police de l’environnement, ainsi qu’à des moyens accrus pour la justice.
Notre amendement vise à rappeler que restaurer une forêt ne consiste pas uniquement à planter des arbres au hasard : il faut restaurer tout un écosystème. C’est exigeant, cela demande de la méthode et implique de respecter le vivant.
Mme la présidente. L’amendement n° 133, présenté par MM. Omar Oili et M. Weber, Mmes Artigalas, Narassiguin et Le Houerou, MM. Lurel, Kanner et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Rapport annexé
I. – Alinéa 215, seconde phrase
Compléter cette phrase par les mots :
, du conseil scientifique du patrimoine naturel de Mayotte ainsi que des naturalistes et gestionnaires d’aires protégées
II. – Alinéa 216
Compléter cet alinéa par les mots :
ainsi que la lutte contre les espèces exotiques envahissantes
III. – Après l’alinéa 216
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
La définition de cette stratégie s’appuiera sur un diagnostic écologique préalable permettant notamment de distinguer les zones capables de se régénérer naturellement et devant être strictement protégées de celles où des interventions de reboisement ciblées sont nécessaires. Dans ces dernières, les espèces à planter devront impérativement être endémiques ou indigènes, avec une provenance locale contrôlée, en lien avec les pépinières en cours de création sur le territoire.
Ce diagnostic écologique sera la prémisse à l’élaboration d’une feuille de route sur la restauration des écosystèmes forestiers mahorais, en cohérence avec le règlement européen sur la restauration de la nature. Cette feuille de route sera élaborée par la Direction de l’environnement, de l’aménagement, du logement et de la mer de Mayotte en associant, notamment le Conseil scientifique du Patrimoine naturel de Mayotte ainsi que les naturalistes et gestionnaires d’aires protégées.
La parole est à M. Saïd Omar Oili.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur ces trois amendements.
Le cyclone Chido et la tempête Dikeledi ont fortement endommagé la forêt mahoraise. Le reboisement et la restauration des équilibres environnementaux à Mayotte sont un enjeu et un objectif. Nous ne concevons pas qu’ils puissent être réalisés sans s’appuyer sur des spécialistes.
Ces trois amendements visent à imposer un diagnostic écologique préalable au plan de reboisement, ainsi que diverses consultations, ce qui alourdirait les procédures. Nous pensons qu’il faut agir.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État. Ces trois amendements, formulés différemment, visent à demander l’établissement d’un diagnostic écologique et la définition d’une feuille de route pour la restauration de l’écosystème forestier mahorais.
Cela a été rappelé, 95 % de la forêt mahoraise a été ravagée, ce qui a, c’est vrai, des conséquences sur le grand cycle de l’eau. L’équilibre des écosystèmes a été profondément modifié, perturbé. Il faut le prendre en compte dans la perspective de la reconstruction et du reboisement.
En ce qui concerne les forêts, un comité de pilotage associant le conseil départemental, la direction de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt de Mayotte (Daaf), l’Office national des forêts (ONF) et le Conservatoire national botanique de Mascarin est déjà à pied d’œuvre pour bâtir une stratégie de reboisement. J’en discutais aujourd’hui encore avec la mission du général Facon.
L’ONF a notamment élaboré un projet de plan de reboisement de Mayotte à la suite du passage du cyclone Chido. Ce projet prévoit de s’appuyer sur la dynamique naturelle de la végétation – elle se voit à l’œil nu sur place – sur environ 300 hectares, de favoriser le développement des essences forestières désirées, de lutter contre les espèces envahissantes – c’est un point important – et de planter seulement là où c’est nécessaire, sur environ 100 hectares. Il s’agit de reboiser et de stabiliser le sol et la ressource en eau. Les opérations comprennent un entretien favorisant la reprise nécessaire pendant une période de cinq ans.
Enfin, la lutte contre les espèces exotiques envahissantes – ce sujet concerne également La Réunion – reste prioritaire, car il existe un risque accru d’introduction dû aux importations de matériaux végétaux pour la reconstruction. Cette problématique est bien identifiée par la préfecture, qui est particulièrement mobilisée sur la question et effectue des opérations de contrôle à l’aéroport.
Tels sont les éléments qui me conduisent, pour les mêmes raisons que Mme la rapporteure, à vous demander, mesdames, monsieur le sénateur, de retirer ces amendements, des travaux étant engagés, selon la méthode que je viens d’évoquer ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.
Mme la présidente. L’amendement n° 26, présenté par M. Omar Oili, Mmes Narassiguin, Artigalas et Le Houerou, MM. Lurel, Kanner et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Rapport annexé, alinéa 30
Compléter cet alinéa par deux phrases ainsi rédigées :
Cette étude détaille les moyens humains et techniques du « rideau de fer » censé renforcer la lutte contre l’immigration clandestine à Mayotte, et annoncé par le gouvernement en février 2024, ainsi qu’un calendrier relatif à sa mise en œuvre. Elle est communiquée au comité de suivi de la loi de programmation pour la refondation de Mayotte.
La parole est à M. Saïd Omar Oili.
M. Saïd Omar Oili. Monsieur le ministre, le Gouvernement clarifie enfin sa position sur le fameux « rideau de fer » qu’avait annoncé en février 2024 M. Darmanin, alors ministre de l’intérieur et des outre-mer. À Mayotte, la lutte contre l’immigration clandestine appelle des solutions adaptées, compte tenu des conditions géographiques et logistiques très spécifiques du territoire.
Il est indiqué dans le rapport annexé qu’une étude relative à la lutte contre l’immigration clandestine à Mayotte, réalisée par la direction des entreprises et partenariats de sécurité et des armes (Depsa) du ministère de l’intérieur, servira de base à un effort de renforcement capacitaire.
Cette étude devra permettre d’identifier les besoins réels de Mayotte pour lutter contre l’immigration clandestine, c’est-à-dire les moyens de surveillance, de détection, d’interception terrestre et maritime. Selon nous, cette étude doit aussi être l’occasion de préciser les moyens humains et techniques de ce « rideau de fer » et le calendrier précis de sa mise en œuvre. Nous avons besoin de savoir ce que recouvre concrètement l’engagement du Gouvernement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. La lutte contre l’immigration clandestine est centrale pour la refondation de Mayotte. Les moyens de surveillance, de détection, d’interception terrestre et maritime du « rideau de fer » sont également essentiels.
Votre amendement est avant tout un amendement d’appel, destiné à obtenir de M. le ministre des détails sur ce plan.
Pour notre part, conformément à la logique que j’ai déclinée en début de séance, nous émettons un avis défavorable sur cet amendement, qui vise à prévoir un calendrier, source de contraintes supplémentaires.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État. Monsieur le sénateur Omar Oili, j’émettrai un avis favorable sur certains de vos autres amendements, ne voyez pas ici se dessiner une tendance. (Sourires.)
Vous demandez la communication au comité de suivi de la loi de programmation pour la refondation de Mayotte de l’étude technico-opérationnelle relative à la lutte contre l’immigration clandestine à Mayotte, réalisée par la direction des entreprises et partenariats de sécurité et des armes, avant le cyclone. Il s’agit d’un document technique préparatoire aux décisions, comme cela est précisé dans le rapport annexé. Il est non communicable.
Cette étude ne comprend d’ailleurs pas les moyens humains ou l’agenda de mise en œuvre du dispositif que vous mentionnez. De mon point de vue, elle n’apporte donc rien par rapport aux informations figurant dans le rapport annexé.
Un rapport de suivi de l’état d’avancement de la refondation de Mayotte sera régulièrement produit, notamment sur la mise en œuvre des mesures de renforcement du dispositif de lutte contre l’immigration clandestine, à la demande d’ailleurs de vos rapporteurs, dans le souci également de répondre à votre attente.
La direction des entreprises et partenariats de sécurité et des armes pourrait vous recevoir pour vous indiquer un certain nombre d’éléments.
Et puisqu’il s’agit d’un amendement d’appel, comme l’a dit Mme la rapporteure, je vous rappelle ce que j’ai eu l’occasion de dire sur place, à l’instar du Président de la République il y a quelques semaines : les objectifs du « rideau de fer » sont bien de réaliser 35 000 éloignements.
Nous avons prévu pour cela le remplacement des radars par des modèles plus puissants, intégrant de nouvelles technologies, la présence de six navires en mer vingt-quatre heures sur vingt-quatre, un groupement de partenariat opérationnel de 120 policiers au total – il nous faut atteindre cet objectif en termes d’équivalent temps plein avec le ministère de l’intérieur –, le renforcement de la coopération entre les différents services du renseignement – extérieur et intérieur –, un centre de rétention administrative (CRA) de 140 places, en plus de la zone d’attente destinée aux familles, ainsi que des accords internationaux sur l’octroi de laissez-passer consulaires.
C’est l’ensemble de ces dispositifs, que je détaille à grands traits, qui constituent ce « rideau de fer » : nouveaux moyens technologiques, plus de moyens pour l’ensemble des services de sécurité intérieure, mobilisation des policiers, des gendarmes et des douaniers pour atteindre ces objectifs.
Tels sont, monsieur le sénateur Omar Oili, les éléments que je tenais à vous communiquer.
Vous l’aurez compris, j’émets un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, pour explication de vote.
M. Jean-Baptiste Lemoyne. L’article 1er, qui comprend le rapport annexé, est une feuille de route. Même si ce rapport n’a pas de valeur normative, on s’attend à y trouver des moyens permettant d’atteindre les objectifs qui y sont fixés.
L’amendement de notre collègue a la vertu de graver dans le marbre de l’article 1er que l’étude technique opérationnelle, déjà prévue, apporte des précisions sur les moyens humains et techniques du « rideau de fer ».
La question migratoire est au cœur des problématiques qui se posent à Mayotte. Nous faisons face à un enjeu collectif de crédibilité, enjeu crucial, car aucune solution pérenne n’a été trouvée pour résoudre un problème qui se pose depuis des années. Nous avons l’espoir que des solutions puissent être apportées aujourd’hui.
Comme le Gouvernement a inscrit dans le rapport annexé que, par exemple, pour mieux protéger les Mahorais, il allait affecter dix gendarmes à la brigade de Dzoumogné, dix autres à la brigade de Bandrélé, il est important qu’il y indique quels moyens humains et techniques il compte mettre en œuvre afin que le « rideau de fer » ne soit pas qu’un rideau de fumée ! (M. le ministre d’État fait la moue.)
Telle est la raison pour laquelle je voterai cet amendement, comme certains de mes collègues du groupe RDPI.
Mme la présidente. La parole est à M. Saïd Omar Oili, pour explication de vote.
M. Saïd Omar Oili. Monsieur le ministre, il nous a été dit qu’une base navale serait construite à Mayotte dans le cadre de la mise en place de ce « rideau de fer ». Or, quand on lit les textes, on se rend compte que, en réalité, c’est un ponton qui sera construit à Mtsamboro, sur lequel seront amarrés les intercepteurs qui arrêtent les kwassa-kwassa.
Les Mahorais ont besoin de clarification. Nous avons l’impression que plus on prend des mesures ici pour dissuader les gens de venir, plus ils arrivent en nombre. Nous avons besoin de savoir quels moyens, notamment financiers, sont prévus pour mettre fin à l’immigration.
Monsieur le ministre, vous nous dites que les militaires sont là pour nous protéger. Leur coût pour la collectivité est intégré dans les dotations qui nous sont allouées. Il va falloir une bonne fois pour toutes que l’on nous dise clairement combien l’État consacre à la lutte contre l’immigration et que l’on nous explique pourquoi cette dernière ne diminue pas.
Mme la présidente. L’amendement n° 150, présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Rapport annexé, alinéa 42
Remplacer les mots :
soutient la restriction des conditions d’accès à la nationalité française
par les mots :
est très attentif aux conséquences des réformes de l’accès à la nationalité française à Mayotte sur les droits de l’enfant et remettra un rapport au Parlement à ce sujet
La parole est à Mme Mélanie Vogel.
Mme Mélanie Vogel. Cet amendement tend à prévoir une évaluation objective, qui aurait dû être faite il y a bien longtemps déjà, des effets des différentes réformes de l’accès à la nationalité française à Mayotte sur un certain nombre de sujets, notamment le droit des enfants, le greffe du tribunal, mais aussi, plus largement, sur les flux migratoires.
Il nous a souvent été dit que le durcissement des conditions d’accès à la nationalité française, notamment du droit du sol, était nécessaire pour maîtriser les flux migratoires, sans toutefois qu’aucune donnée nous permette d’établir un lien de cause à effet entre le droit du sol et les flux migratoires.
Un régime dérogatoire a été instauré à Mayotte en 2019, que nous avons durci il y a quelques mois sans même connaître ses impacts et sans même savoir s’il y avait le moindre lien entre les moyens que nous mettons en œuvre et l’objectif que nous nous sommes fixé, à savoir une diminution des flux migratoires. Or le durcissement de la politique d’accès à la nationalité n’a pas réduit ces flux.
Nous demandons donc la remise d’un rapport sur l’impact de ces réformes sur les droits des enfants. Il y a un lien très clair entre les réformes que nous faisons et les droits des enfants. Quand un enfant n’est pas déclaré à la naissance et qu’il ne peut pas accéder à la nationalité française, cela a des conséquences très concrètes sur ses droits.
Nous légiférons à l’aveugle aujourd’hui, en l’absence d’étude d’impact. Des données sur les effets de ces réformes permettraient au Parlement d’être éclairé.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Madame Vogel, votre amendement est en grande partie satisfait. En effet, la commission des lois a adopté l’article 2 bis, qui prévoit la remise dans trois ans d’un rapport clair et précis sur l’impact des mesures de lutte contre l’immigration à Mayotte. Il nous permettra de nous interroger sur l’organisation de cette lutte à Mayotte et sur les modalités dérogatoires applicables dans ce département.
En revanche, l’amendement tend également à revenir sur les restrictions aux conditions de nationalité que nous avons adoptées tout récemment dans le cadre de la loi du 12 mai 2025 visant à renforcer les conditions d’accès à la nationalité française à Mayotte.
C’est la raison pour laquelle la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 140 rectifié, présenté par Mme Briante Guillemont, MM. Gold et Guiol, Mme Pantel et M. Daubet, est ainsi libellé :
Rapport annexé, alinéa 49, première phrase :
Rédiger ainsi cette phrase :
dans le cadre de la lutte renforcée contre les causes profondes des migrations, encourager l’aide publique au développement dans les pays de départs (Comores, Madagascar et pays d’Afrique des Grands lacs…) et la mise en œuvre du « Plan de Développement France-Comores » (PDFC) qui incorpore des actions de coopération sur des secteurs clés de la prévention des départs tels que la santé, l’éducation, la formation professionnelle et l’agriculture.
La parole est à Mme Sophie Briante Guillemont.
Mme Sophie Briante Guillemont. Le présent projet de loi de programmation pour la refondation de Mayotte aborde largement la question migratoire. Il s’agit, bien entendu, d’une réalité que nous ne pouvons pas ignorer ; nous avons d’ailleurs déjà commencé à en discuter.
Toutefois, je voulais insister sur le volet préventif. Il est précisé dans le rapport spécial du Sénat sur la mission « Aide publique au développement » qu’il serait paradoxal de découpler nos ambitions en matière de solidarité internationale et de politique migratoire. Or le rapport annexé n’insiste pas suffisamment sur la nécessité de les associer.
Tel est le sens de mon amendement.
Mme la présidente. L’amendement n° 163, présenté par Mme Canayer et M. Bitz, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Alinéa 49
Remplacer les mots :
dans le à travers du
par les mots :
à travers le
La parole est à Mme le rapporteur, pour présenter cet amendement et pour donner l’avis de la commission sur l’amendement n° 140 rectifié.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. L’amendement n° 163 est un amendement rédactionnel.
La commission émet un avis défavorable sur l’amendement n° 140 rectifié, qui tomberait d’ailleurs en cas d’adoption de notre amendement n° 163.
Les auteurs de l’amendement souhaitent préciser que l’aide publique au développement participe de la politique migratoire de la France, ce qui est une réalité. Or, dans le cadre de l’aide publique au développement, la France a accordé à l’Union des Comores une enveloppe de 150 millions d’euros par an depuis 2019 ; le « Plan de Développement France-Comores » en est la traduction. L’amendement est donc en partie satisfait.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État. Avis favorable sur l’amendement rédactionnel n° 163.
J’en viens à l’amendement n° 140 rectifié.
Le Gouvernement soutient l’utilisation de l’aide publique au développement comme un outil essentiel dans la lutte, non seulement contre les causes profondes des migrations, mais également contre les retards de développement, la pauvreté ou le creusement des inégalités dans un certain nombre de territoires. Cette aide peut servir de levier incitatif pour renforcer la coopération migratoire avec les pays riverains, mais elle peut également être revue à la baisse en cas de difficultés liées à cette coopération.
En effet, pour les pays concernés, l’absence d’engagement clair en matière de coopération consulaire irait à rebours de la demande conjointe du 11 juillet 2024 du ministère de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de l’Europe et des affaires étrangères au directeur général de l’Agence française de développement (AFD). Le courrier soulignait que cette dernière doit « se mettre en état de pouvoir ajuster la conduite de ses programmes en fonction de la qualité de la coopération migratoire d’un pays tiers ». Les choses sont donc claires.
Par ailleurs, la loi de finances pour 2025 a imposé une réduction des crédits de l’aide publique au développement, rendant d’autant plus nécessaires la priorisation de notre action et un ajustement de la cible de 150 millions d’euros à la réalité budgétaire. La qualité de la coopération migratoire, que je viens d’évoquer, pourra donc continuer d’être prise en compte parmi plusieurs critères de priorisation.
C’est pourquoi le Gouvernement, à l’instar de la commission, émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. L’amendement n° 27, présenté par M. Omar Oili, Mmes Narassiguin, Artigalas et Le Houerou, MM. Lurel, Kanner et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Rapport annexé, après l’alinéa 55
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
1.2…. L’impératif républicain de suppression des titres de séjour territorialisés.
Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la loi de programmation, le Gouvernement remet au comité de suivi de la loi de programmation pour la refondation de Mayotte un bilan chiffré des titres de séjour territorialisés délivrés à Mayotte. Ce rapport présente les conséquences de ces titres de séjour territorialisés sur les services publics du territoire de Mayotte. Enfin, il présente le calendrier d’abrogation de ces titres.
La parole est à M. Saïd Omar Oili.
M. Saïd Omar Oili. Mayotte est le seul territoire de la République dans lequel sont délivrés des titres de séjour « territorialisés » interdisant à leurs détenteurs de circuler ou de résider hors du département. Cette exception, profondément dérogatoire au droit commun, n’est plus acceptable.
Sur un territoire exigu de seulement 374 kilomètres carrés, la concentration de personnes en situation régulière, mais juridiquement confinées à Mayotte, exerce une pression insoutenable sur les services publics de base : santé, éducation, logement, etc.
Cette règle entraîne une forme de confinement migratoire. Contrairement au principe d’égalité devant la loi et au rebours d’une politique migratoire cohérente, elle crée une discrimination manifeste entre les étrangers en situation régulière à Mayotte et ceux du reste du territoire.
Sa suppression est un impératif à la fois social, républicain et humain. Notre archipel ne peut plus porter seul le poids d’une logique d’exception qui aggrave ses difficultés sans les résoudre.
De surcroît, c’est – je vous le dis solennellement – une attente très forte des Mahorais et de la totalité de la classe politique de l’archipel. Ne pas retenir cette revendication majeure de la population serait une grave faute politique et ne ferait que renforcer leur défiance vis-à-vis des autorités publiques.
Par ailleurs, les mesures contenues dans le rapport annexe seront dépassées, incapables de suivre cette poussée démographique qui paralyse son développement.
Je voudrais le rappeler ici, au mois de février 2024, il y a eu des mouvements de grève très violents à Mayotte. Le ministre de l’intérieur de l’époque était venu et avait pris un engagement sur le tarmac de l’aéroport : en cas de durcissement du droit de sol à Mayotte, les cartes de séjour seraient supprimées.
Or nous avons adopté une loi durcissant le droit du sol. Tous les Mahorais attendent à présent que l’on supprime enfin l’aberration que représentent ces cartes de séjour territorialisées.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Bitz, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. Avis défavorable, pour trois raisons.
D’abord, il est proposé de revenir sur une disposition de nature législative dans le cadre d’un amendement portant sur le rapport annexé, qui n’a pas de portée normative. Nous aurons le débat au fond lors de l’examen du titre II du projet de loi, qui contient des dispositions de nature législative.
Ensuite, ce qui est demandé, c’est un rapport sur les titres territorialisés dans un délai de six mois. Or la commission va en réalité plus loin. En effet, nous, nous souhaitons un rapport portant sur l’ensemble des mesures dérogatoires en matière migratoire à une échéance de trois ans. Laissez-nous le temps d’analyser les effets des mesures relatives au droit du sol qui ont été adoptées voilà quelques semaines à peine et ceux des dispositions que nous votons aujourd’hui. Il sera toujours temps d’envisager d’éventuels ajustements ensuite.
Enfin, sur le fond – comme je viens de l’indiquer, nous aurons ce débat lors de l’examen du titre II –, ce n’est pas, nous semble-t-il, au moment où nous essayons de tarir les flux migratoires qu’il faut envoyer un mauvais message : les candidats au départ ne doivent pas s’imaginer pouvoir se servir d’un passage à Mayotte pour ensuite rejoindre La Réunion ou le territoire métropolitain.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État. Ainsi que M. le rapporteur vient de le souligner, le Sénat sera saisi d’amendements « en dur » sur la politique migratoire, et en particulier sur les titres territorialisés, lors de l’examen du titre II.
Toutefois, je peux d’ores et déjà rappeler un certain nombre d’éléments.
Comme vous le savez, l’adoption de mesures spécifiques a été nécessaire pour réduire « l’attractivité » de Mayotte. Je pense notamment à la validité territoriale des titres de séjour délivrés.
De mon point de vue, la possibilité de quitter rapidement l’île pour rejoindre le continent européen ou le département voisin, La Réunion – vous ne pouvez pas ignorer les tensions qui existent à cet égard –, ne ferait que renforcer cette « attractivité » de Mayotte ; mais, encore une fois, nous aurons l’occasion d’évoquer le sujet un peu plus tard. Elle accentuerait le risque de détournement des procédures, ainsi que la pression migratoire locale.
Quelques aménagements existent déjà. Cette limite ne concerne pas l’ensemble des titres de séjour, notamment les cartes de résident. Les étrangers qui seraient titulaires d’un titre de séjour revêtu d’une telle limite peuvent solliciter une autorisation spéciale pour circuler, en particulier pour entrer dans l’espace Schengen.
Enfin, comme vous le savez, les conjoints, les partenaires liés par un pacte civil de solidarité (Pacs), les descendants directs âgés de moins de 21 ans et les ascendants directs à charge des citoyens français sont, eux, dispensés de solliciter une autorisation spéciale pour circuler.
Par ailleurs, vos rapporteurs ont prévu un dispositif plus concret et opérationnel : une évaluation globale de tous les dispositifs dérogatoires concernant l’immigration à Mayotte. C’est l’objet, en effet, de l’article 2 bis.
Je ne suis pas le meilleur porte-parole de l’ancien ministre de l’intérieur et des outre-mer, mon cher collègue Gérald Darmanin. Je souhaite toutefois souligner que sa déclaration sur le tarmac de l’aéroport de Mayotte est parfois citée sur les réseaux sociaux de manière tronquée. Lui avait conditionné la suppression des titres territorialisés à une révision constitutionnelle relative au droit du sol. Mais je ne doute pas qu’il serait bien meilleur que moi pour se défendre. Comme vous le savez, pour ma part, je suis opposé à une telle réforme constitutionnelle ; mais c’est un autre débat. (Sourires.)
Quoi qu’il en soit, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Narassiguin, pour explication de vote.
Mme Corinne Narassiguin. Certes, l’amendement n° 27 porte sur le rapport annexé alors que nous aurons le débat de fond sur les visas territorialisés lors de l’examen du titre II.
Toutefois, je note que le rapport annexé aborde également cette question. Son alinéa 42 est ainsi rédigé : « Sur le sujet spécifique du droit du sol, le Gouvernement soutient la restriction des conditions d’accès à la nationalité française. »
Dès lors que le rapport annexé énonce des objectifs politiques, on ne voit pas pourquoi il ne serait pas possible de mentionner l’impératif républicain de suppression des titres de séjour territorialisés. L’objectif ne peut pas être de maintenir Mayotte dans un régime dérogatoire ad vitam aeternam !
Je note par ailleurs que l’on a trouvé un nouveau prétexte pour remettre à plus tard l’évaluation des effets réels des mesures destinées à réduire la prétendue « attractivité » de Mayotte auprès des étrangers. Nous demandons un rapport dans un délai de six mois ? On nous répond que la loi restreignant le droit du sol est trop récente pour pouvoir produire un rapport sur les visas territorialisés… qui existent depuis bien plus longtemps !
Vous ne pouvez pas continuer comme cela à reporter systématiquement la communication des données dont nous avons absolument besoin pour savoir si les arguments contre la suppression des visas territorialisés sont autre chose que de mauvaises excuses !
Mme la présidente. La parole est à Mme Salama Ramia, pour explication de vote.
Mme Salama Ramia. Je reviens sur « l’attractivité » de Mayotte. Il faut le savoir, Mayotte est le département le plus pauvre de France. Mais, au sein de l’espace dans lequel l’archipel se situe, c’est le territoire le plus riche, et cela le restera. Par conséquent, sa prétendue « attractivité » n’est en effet pas une excuse pour reporter la remise du rapport demandé.
Par ailleurs, je souligne que, sur le tarmac de l’aéroport, le précédent ministre de l’intérieur a bien donné un espoir à la population de Mayotte. Il ne faut pas dire que ses propos auraient été mal interprétés ; ils ont été retranscrits noir sur blanc ! Il faut respecter les Mahorais. Le message qui leur a été adressé était clair : premièrement, durcissement de la loi ; deuxièmement, traitement de la question du « rideau de fer » ; troisièmement, suppression de la carte de séjour territorialisée. On a donné un espoir aux Mahorais, qui se sentent trahis aujourd’hui.
Mme la présidente. L’amendement n° 57, présenté par Mmes Guhl et M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Rapport annexé, alinéa 57
Rédiger ainsi cet alinéa :
Dans le cadre de la résorption de l’habitat précaire et insalubre, le programme national de résorption des bidonvilles et les dispositions de l’instruction du 25 janvier 2018 s’appliquent désormais dans les territoires d’Outre-mer dans le cadre d’une stratégie territoriale définie avec les collectivités territoriales et les acteurs du logement, prévoyant des réponses adaptées à la situation des personnes, enfants et familles vivant en bidonvilles et le lien entre tous les secteurs de l’action publique et sociale dans une logique d’accompagnement global (santé, éducation, protection de l’enfance).
La parole est à Mme Mélanie Vogel.
Mme Mélanie Vogel. Cet amendement de ma collègue Antoinette Guhl vise à appliquer dans les outre-mer – cela concerne évidemment aussi Mayotte – le programme national de résorption des bidonvilles et l’instruction du 25 janvier 2018, en intégrant ces dispositifs dans le rapport annexé.
À l’échelon national, l’instruction de 2018 a donné une nouvelle impulsion à la politique de résorption des bidonvilles. Elle a marqué un changement de méthode. Elle appelle à dépasser les approches centrées uniquement sur les évacuations, proposant une vision plus large, axée sur l’accompagnement des habitants et sur l’accès aux droits.
Aujourd’hui, cette instruction ne s’applique pas dans les territoires d’outre-mer. À la place, ce sont les lois de 2011 et de 2018 qui sont en vigueur. Or celles-ci introduisent des dérogations spécifiques aux quartiers informels dans ces territoires et restent très largement orientées vers la destruction des habitations.
Pourtant, nous le savons, la résorption des lieux de vie informels dépend largement de l’accessibilité des logements sociaux. Elle suppose du temps et des solutions durables, construites avec les personnes concernées. Cela doit souvent passer par la stabilisation temporaire sur un lieu de vie, par l’amélioration des conditions matérielles et par la protection des parcours.
Aujourd’hui, les expulsions répétées sont largement reconnues comme contre-productives. À Mayotte, elles fragilisent les familles et poussent des personnes vers une précarité encore plus importante, au détriment des conditions de vie de l’ensemble des habitants de l’île. Cela augmente leur vulnérabilité, notamment face aux aléas climatiques ; le drame lié au cyclone Chido l’a rappelé.
Les destructions, qui s’accélèrent, doivent s’accompagner d’un vrai travail de fond sur place pour améliorer les conditions de vie, et dans la durée, afin – c’est l’objectif – de garantir l’accès aux droits.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Bitz, rapporteur. Avis défavorable. Il est en effet proposé de prévoir l’application à Mayotte de la circulaire relative à la résorption des bidonvilles. Nous partageons évidemment tous ici l’objectif de résorber et de supprimer les formes d’habitat informel. Néanmoins, au sein de la commission des lois, nous sommes convaincus qu’il n’appartient pas au législateur de se prononcer sur les conditions d’application d’une circulaire ; cela relève exclusivement du Gouvernement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L’amendement n° 87, présenté par M. Omar Oili, Mmes Artigalas, Narassiguin et Le Houerou, MM. Lurel, Kanner et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Rapport annexé, après l’alinéa 59
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
Le Gouvernement transmet aux élus locaux concernés le contenu détaillé de l’opération d’intérêt national engagée à Mayotte pour accélérer la résorption de l’habitat insalubre. Cette opération, fondée sur des outils juridiques renforcés, une mobilisation exceptionnelle de l’ingénierie, et des moyens dérogatoires, devra associer les élus et parlementaires du cent-unième département à son élaboration, à son pilotage et à son suivi.
La parole est à M. Saïd Omar Oili.
M. Saïd Omar Oili. À Mayotte, la précarité des logements constitue un défi majeur, aggravé par la multiplication des constructions informelles. Les opérations telles que Wuambushu ou « Mayotte place nette » se sont révélées peu efficaces pour résorber l’habitat illégal.
L’opération d’intérêt national (OIN) annoncée pour répondre à cet enjeu mobilise des moyens dérogatoires, une ingénierie d’État et des outils juridiques spécifiques.
Notre amendement vise à faire en sorte que les élus mahorais et les parlementaires soient pleinement associés à sa mise en œuvre, afin d’assurer une coordination efficace entre l’État et les collectivités locales, souvent démunies pour intervenir. La transmission du contenu de cette OIN et l’implication des élus du territoire sont des conditions indispensables pour réellement accélérer les opérations. Il s’agit également d’assurer leur mise en œuvre, de les coordonner, de lever les blocages administratifs et de rendre effective la lutte contre la prolifération des constructions illégales.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Bitz, rapporteur. Notre collègue soulève un point très important, et la question de l’association des élus mahorais est fondamentale. Je souligne d’ailleurs que nous avons relayé les demandes de communication de documents administratifs auprès du Gouvernement et que nous avons obtenu satisfaction.
Cependant, ce que les auteurs de cet amendement demandent ne nous paraît pas avoir sa place dans le rapport annexé, même si nous invitons évidemment le Gouvernement à leur apporter des réponses sur les conditions d’association des élus mahorais à l’OIN.
La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L’amendement n° 91, présenté par M. Omar Oili, Mmes Artigalas, Narassiguin et Le Houerou, MM. Lurel, Kanner et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Rapport annexé, alinéa 69, après la première phrase
Insérer une phrase ainsi rédigée :
Parallèlement, l’État mettra en place un observatoire sismo-volcanique pour le volcan sous-marin Fani Maoré apparu lors de l’éruption de 2018.
La parole est à M. Saïd Omar Oili.
M. Saïd Omar Oili. Une activité sismique affecte Mayotte depuis le mois de mai 2018. Plusieurs centaines de milliers de séismes ont été enregistrés par le réseau sismologique et ressentis par la population. Cette activité sismo-volcanique est due à l’apparition en 2018 d’un volcan sous-marin appelé Fani Maoré, situé à une cinquantaine de kilomètres de Petite-Terre.
Actuellement, la veille est effectuée par l’observatoire du piton de la Fournaise, à La Réunion. Au regard des enjeux scientifiques et des risques vis-à-vis de la population, il est essentiel qu’une équipe sur Mayotte soit dédiée à Fani Maoré.
C’est le sens de notre amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Bitz, rapporteur. La commission, qui a du mal à se forger une opinion sur la nécessité de mettre en place un observatoire sismo-volcanique, s’en remet à l’avis du Gouvernement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État. Monsieur le sénateur Omar Oili, vous demandez la création d’un observatoire sismo-volcanique sur le volcan sous-marin Fani Maoré. C’est un vrai sujet. Mais votre amendement est, en réalité, déjà satisfait.
Le réseau de surveillance volcanologique et sismologique de Mayotte (Revosima) a été mis en place en 2019 pour observer et comprendre le phénomène qui venait d’être découvert. Son action est en train d’évoluer sur le développement de la surveillance et la définition d’indicateurs permettant d’alimenter – c’est évidemment essentiel – un système d’alerte de la population.
Le tableau de programmation prévoit de soutenir ce réseau pour assurer la sécurité des populations au regard des risques potentiels. Un dispositif lourd permettra de mieux appréhender le phénomène : c’est le projet Marmor (Marine advanced geophysical research equipment and Mayotte multidisciplinary observatory for research and response).
D’ailleurs, dans les travaux que le général Facon aura l’occasion de vous présenter, le chapitre relatif à la protection des Mahorais abordera évidemment les questions de sécurité ou d’immigration, mais aussi, et peut-être surtout, celles qui sont relatives aux risques naturels, qui sont malheureusement nombreux dans le cas de Mayotte.
Par conséquent, je considère humblement votre amendement comme satisfait et j’en demande le retrait. À défaut, l’avis serait défavorable.
Mme la présidente. Quel est maintenant l’avis de la commission ?
M. Olivier Bitz, rapporteur. Même avis.
Mme la présidente. L’amendement n° 92, présenté par M. Omar Oili, Mmes Artigalas, Narassiguin et Le Houerou, MM. Lurel, Kanner et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Rapport annexé, après l’alinéa 78
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
L’État mettra en place, d’ici un an à compter de la promulgation de la présente loi, une réserve nationale sur le territoire de Mayotte.
La parole est à M. Saïd Omar Oili.
M. Saïd Omar Oili. S’il est essentiel de mieux prévenir les risques et d’améliorer l’éducation des populations, il convient aussi de tirer les conséquences des défaillances de l’organisation des premiers secours lors du cyclone Chido.
Le prépositionnement des moyens nationaux de la sécurité civile doit donc se faire à Mayotte. Compte tenu des difficultés d’acheminement des secours et des matériels nécessaires, il paraît en effet indispensable de disposer sur place des moyens d’une réserve nationale disponible en cas de crise. L’objectif est de ne pas dépendre de la réserve nationale située à La Réunion.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Bitz, rapporteur. La commission estime qu’il n’appartient pas au législateur de se prononcer sur le déploiement des moyens de l’État. C’est à ce dernier d’obtenir les résultats attendus. Laissons-le organiser la réponse en matière de sécurité civile.
En revanche, nous serons vigilants quant au respect des investissements outre-mer en matière de sécurité civile prévus par la loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur, dite Lopmi.
Avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État. Cet amendement tend à la mise en place d’une réserve nationale sur le territoire de Mayotte dans l’année suivant la promulgation de la loi.
Je tiens à le rappeler, 111 sapeurs-pompiers militaires de la sécurité civile ont été déployés à Mayotte quarante-huit heures avant le cyclone. Ils ont été les premiers acteurs du déblaiement des routes, indispensable à la projection des premiers secours. La mission d’appui de la sécurité civile a participé aux opérations d’aller-vers et a contribué à la vaccination des populations. Beaucoup venaient bien sûr de l’Hexagone, mais beaucoup venaient aussi de La Réunion. Je veux saluer l’engagement de tous ces hommes et ces femmes de la sécurité civile. Au plus fort, 800 effectifs y participaient.
À l’heure actuelle, les sapeurs-pompiers et la sécurité civile contribuent à la réalisation des missions stratégiques, notamment la logistique de l’approvisionnement en eau, et continuent d’assurer le soutien sanitaire aux populations.
L’objectif des auteurs de l’amendement peut parfaitement s’entendre. Cependant, la mise en œuvre d’une réserve nationale sur le territoire nécessite des réflexions sur la base d’un retour d’expérience. Ainsi que j’ai déjà eu l’occasion de l’indiquer, la stratégie du général Facon comportera un volet dédié à la sécurité.
Il faudra veiller à ce que l’enjeu de la sécurité civile – M. le rapporteur vient de le souligner – soit pleinement intégré, avec, bien entendu, les projections et les financements correspondants.
Je sollicite donc le retrait de cet amendement. À défaut, l’avis serait défavorable.
Mme la présidente. L’amendement n° 93, présenté par M. Omar Oili, Mmes Artigalas, Narassiguin et Le Houerou, MM. Lurel, Kanner et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Rapport annexé, après l’alinéa 79
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
Au plus tard le 1er mars 2026, le Gouvernement transmet au comité de suivi de la loi de programmation pour la refondation de Mayotte un état des lieux des plans Orsec établis sur les risques à Mayotte ainsi que des préconisations d’évolution.
La parole est à M. Saïd Omar Oili.
M. Saïd Omar Oili. Compte tenu des derniers événements qui ont durement frappé Mayotte, une évolution des plans Orsec (organisation de la réponse de sécurité civile) est nécessaire pour en consolider l’efficacité et le caractère opérationnel.
Par cet amendement, nous proposons ainsi que l’État transmette au comité de suivi prévu par le projet de loi un état des lieux des plans Orsec et des préconisations d’évolution au plus tard le 1er mars 2026.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Bitz, rapporteur. La commission s’en remet à l’avis du Gouvernement, puisqu’il s’agit de modifier globalement sa feuille de route sur ce rapport annexé.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État. Il faut tirer tous les enseignements de la crise Chido en matière de prévention des risques et d’organisation de la réponse de sécurité civile.
Un retour d’expérience post-cyclone est en cours de préparation. Le plan Orsec Cyclone est en train de se mettre en place, et des plans Orsec Volcan et Tsunami sont par ailleurs prévus. J’invite tous ceux qui ne connaissent pas bien Mayotte à prendre la mesure des risques auquel le territoire est soumis, et pas seulement pendant la saison des pluies ou en cas de cyclone.
La proposition de dresser un état des lieux au mois de mars 2026 me semble de bon sens. Il faut développer une véritable culture de prévention de la gestion de crise à Mayotte ; c’est une priorité. Si une telle culture existe à La Réunion et aux Antilles, reconnaissons que ce n’était pas le cas à Mayotte, quelle qu’ait été par ailleurs la violence du cyclone Chido.
C’est pourquoi je suis favorable à votre amendement, monsieur le sénateur. Avouez que c’est un moment historique ! (Sourires.)
Mme la présidente. Quel est maintenant l’avis de la commission ?
M. Olivier Bitz, rapporteur. Avis favorable.
Mme la présidente. L’amendement n° 28, présenté par M. Omar Oili, Mmes Narassiguin, Artigalas et Le Houerou, MM. Lurel, Kanner et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Rapport annexé, alinéa 98
Compléter cet alinéa par les mots :
d’ici au 31 décembre 2026
La parole est à M. Saïd Omar Oili.
M. Saïd Omar Oili. Cet amendement vise à préciser les engagements du Gouvernement en ce qui concerne le fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD). Le rapport annexé fixait un principe de mise en adéquation de ce dernier avec les besoins exprimés par les autorités locales.
Nous proposons de prévoir un objectif calendaire pour réaliser cette mise en adéquation, sans quoi un tel engagement n’aurait que peu de valeur. Or, comme vous l’avez compris à la lecture de nos différents amendements, au sein du groupe socialiste, nous souhaitons que les engagements pris ne restent pas au stade des déclarations et qu’ils se traduisent en actes. En l’occurrence, la lutte contre la délinquance doit être une priorité à Mayotte, qui connaît une situation particulièrement difficile.
C’est la raison pour laquelle nous proposons que cette mise en adéquation soit réalisée dans les dix-huit mois, c’est-à-dire d’ici au 31 décembre 2026.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Bitz, rapporteur. La commission s’en remet à l’avis du Gouvernement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État. Qu’est-ce que j’aimerais entendre cette phrase plus régulièrement ! (Sourires.)
M. le sénateur Omar Oili sollicite une précision calendaire. Je comprends parfaitement son impatience en ce qui concerne l’amélioration des conditions de sécurité à Mayotte et l’obtention de garanties pour que les engagements de l’État soient suivis d’effets.
Je le rappelle, en plus des forces de police présentes, il y a actuellement six escadrons de gendarmerie sur le territoire, avec de nouvelles méthodes d’approche qui me paraissent être efficaces, même si nous ne nions évidemment pas les problèmes réels de violences qui existent à Mayotte ; nous avons encore connu un certain nombre d’éléments inquiétants le week-end dernier.
Sur le fond, la date qui est proposée m’apparaît raisonnable ; elle permet une vraie réflexion et une concertation avec l’ensemble des acteurs concernés, à commencer, évidemment, par les maires.
Pour autant, la prévention de la délinquance doit s’inscrire dans la durée. De plus, ces actions évoluent dans le temps, en fonction des formes que prend cette délinquance, notamment celle des plus jeunes.
Dès lors, je ne suis pas certain que l’on parvienne à déterminer à cette date précise le bon calibrage des moyens mobilisés durant toute la durée de la refondation.
Sur ces questions, j’ai plutôt tendance à laisser la main au préfet Bieuville, ainsi qu’aux responsables des forces de sécurité intérieure, de police et de gendarmerie.
À ce stade, et par cohérence avec mes propos précédents, j’émets néanmoins un avis favorable sur cet amendement.
Mme la présidente. L’amendement n° 29, présenté par M. Omar Oili, Mmes Narassiguin, Artigalas et Le Houerou, MM. Lurel, Kanner et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Rapport annexé, après l’alinéa 102
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
Dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de la loi, un calendrier prévisionnel du déroulement des travaux, ainsi qu’une programmation budgétaire, seront communiqués au comité de suivi de la loi de programmation de refondation de Mayotte.
La parole est à M. Saïd Omar Oili.
M. Saïd Omar Oili. En matière d’investissements immobiliers judiciaires et pénitentiaires, le Gouvernement prend, dans le rapport annexé, des engagements si ambitieux qu’ils ne nous paraissent pas tout à fait crédibles.
Sont ainsi annoncées, avec pour objectif un lancement des travaux au cours de l’année 2025, les constructions d’une cité judiciaire et d’un centre éducatif fermé, ainsi que celle d’un deuxième centre pénitentiaire d’une capacité de 400 places incluant un centre de semi-liberté de 20 places, dont le début des travaux est prévu, cette fois, en 2027.
Nous souhaiterions naturellement que ces travaux débutent dès cette année, mais permettez-nous, monsieur le ministre, d’avoir quelques doutes. Vous aurez l’occasion, dans un instant, de clarifier les choses.
En tout état de cause, nous demandons au Gouvernement, au travers de cet amendement, de communiquer au comité de suivi, dans un délai de trois mois suivant la promulgation de la loi, un calendrier prévisionnel de déroulement des travaux, ainsi qu’une programmation budgétaire.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Bitz, rapporteur. Monsieur le sénateur, vous posez la question du suivi du rapport annexé.
Je tiens à souligner que la commission a repris votre amendement pour y intégrer, conformément à votre souhait, un comité de suivi.
Laissons ce dernier organiser son travail et demander, le cas échéant, les documents dont il aurait besoin.
Bien que partageant la nécessité absolue de suivre précisément la réalisation des mesures incluses dans le rapport annexé – nous avons d’ailleurs ajouté un amendement visant à prévoir la présentation, par le Gouvernement, d’une programmation financière pluriannuelle avant la fin de l’année –, la commission émet un avis défavorable sur cette demande de communication de rapports supplémentaires.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L’amendement n° 162, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rapport annexé, alinéa 114
Remplacer les mots :
, ainsi que celui des intercepteurs des forces de sécurité intérieure.
par le signe et la phrase :
. L’augmentation du nombre des navires intercepteurs des forces de sécurité intérieure fera l’objet d’une étude particulière afin de permettre l’identification d’un lieu propice aux opérations de maintenance dédiées à ces vecteurs.
La parole est à M. le ministre d’État.
M. Manuel Valls, ministre d’État. Le maintien en condition opérationnelle des intercepteurs nautiques des forces de sécurité intérieure est réalisé par le personnel de la Marine nationale.
L’augmentation prévue du nombre de ces navires nécessite la réalisation d’une étude afin d’identifier un lieu adéquat permettant, d’une part, à la Marine nationale de procéder à la maintenance de ces intercepteurs et, d’autre part, aux forces de sécurité intérieure d’assurer au mieux leurs missions opérationnelles.
Je précise, au sujet de la base navale, que nous prévoyons bien, outre le chantier que je viens d’évoquer, la création d’un ponton à Mtsamboro pour augmenter nos capacités d’interception, ainsi qu’un soutien au poste de commandement de l’action de l’État en mer.
Ces réalisations concrètes nécessitent des moyens et justifient une étude supplémentaire.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Bitz, rapporteur. Le Gouvernement précise lui-même sa feuille de route. Aussi, nous ne pouvons être que favorables à cet amendement.
Mme la présidente. L’amendement n° 30, présenté par M. Omar Oili, Mmes Narassiguin, Artigalas et Le Houerou, MM. Lurel, Kanner et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Rapport annexé, alinéa 116
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Ces effectifs resteront mobilisés au moins jusqu’au 31 décembre 2026.
La parole est à M. Saïd Omar Oili.
M. Saïd Omar Oili. Cet amendement de précision vise à mentionner dans le rapport annexé la durée d’engagement du bataillon temporaire de reconstruction de l’île décidé par le ministre des armées.
L’engagement de ces quelque 400 soldats est précieux pour Mayotte, alors que la situation sociale, sécuritaire et humanitaire reste précaire. Afin de produire pleinement et surtout durablement ses effets, il doit être maintenu pour encore plusieurs mois au moins.
C’est le sens de cet amendement, qui tend à indiquer que ces militaires seront mobilisés pour les dix-huit prochains mois, à savoir jusqu’au 31 décembre 2026.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Bitz, rapporteur. Votre amendement nous permet d’abord, mon cher collègue, de souligner l’engagement extraordinaire de nos forces armées dans ces phases de crise puis de reconstruction de Mayotte.
Nous considérons néanmoins qu’il n’appartient pas au législateur de se prononcer sur le déploiement des forces armées. La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État. Par cet amendement, vous reconnaissez, monsieur le sénateur Omar Oili, combien l’État et ses forces armées restent mobilisés aux côtés des Mahorais.
Le bataillon de reconstruction a été, il est vrai, l’un des symboles de l’action rapide de l’État.
J’écoutais hier à la radio le maire de Mamoudzou dire qu’il ne voyait rien venir de la reconstruction. C’est embêtant : j’étais à ses côtés voilà quelques semaines au moment où, précisément, le bataillon de reconstruction remettait à niveau une grande halle sportive… Au travers de financements exceptionnels, l’État participe activement à la reconstruction. M. le maire a dû avoir un oubli…
Le ministre des armées, Sébastien Lecornu, a indiqué que le bataillon resterait sur place autant qu’il le faudrait et que son mandat était bien sûr reconductible.
Il n’y a pas lieu selon moi de borner l’action du bataillon dans le rapport annexé du présent texte. Faisons confiance à nos armées pour organiser avec cohérence la projection de nos forces au service des Mahorais.
Dans toute cette phase – je n’ose pas dire intermédiaire – entre l’urgence, la reconstruction et, désormais, la refondation, ce type de dispositif perdurera sur le terrain autant que nécessaire, jusqu’à ce que nous disposions de l’ensemble des outils utiles à la refondation.
Pour ma part, je préfère me tenir à l’écart de l’organisation de l’action des armées. Laissons le ministre compétent agir, en toute confiance et en toute transparence.
Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, mon avis sera également défavorable.
Mme la présidente. La parole est à M. Rachid Temal, pour explication de vote.
M. Rachid Temal. Nous entendons bien sûr les arguments du rapporteur et du ministre d’État.
En ce moment, les Mahorais se demandent toutefois si les engagements de l’État sont des mots ou s’ils déboucheront sur des réalisations concrètes.
Vous avez raison, les uns et les autres, de rappeler que la présence des troupes militaires est importante à Mayotte.
Si je comprends l’argument du ministre d’État selon lequel il ne faudrait pas borner leur action, le fait d’inscrire cette présence, qui pourrait être prolongée, dans le rapport annexé revêtirait une portée politique et symbolique. Or nous connaissons ici l’importance des symboles.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 59, présenté par Mmes Guhl et M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Rapport annexé
I. – Alinéa 124
1° Supprimer les mots :
à Ironi Be
2° Compléter cet alinéa par deux phrases ainsi rédigées :
Les sites d’implantation seront définis en associant le conseil scientifique du patrimoine naturel de Mayotte, les associations environnementales mahoraises et les gestionnaires d’aires protégées. Ce développement ne pourra se faire au détriment des aires protégées mahoraises et se fera dans le respect des réglementations environnementales ;
II. – Alinéa 128
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Daniel Salmon.
M. Daniel Salmon. Cet amendement de notre collègue Antoinette Guhl vise à préciser le plan Eau Mayotte dans le rapport annexé, et concerne la construction d’une seconde usine de dessalement.
Oui, bien sûr, il y a urgence à renforcer l’accès à l’eau pour les Mahorais ; oui, une nouvelle usine est nécessaire. Mais son implantation ne peut pas se faire sans prendre en compte les impacts sur les milieux naturels ni mesurer les conséquences pour les populations locales, notamment pour les pêcheurs ou les acteurs du tourisme.
Plusieurs questions restent posées : d’abord, sur l’énergie nécessaire pour faire fonctionner l’usine ; ensuite, sur les rejets de saumure et de produits chimiques liés au traitement de l’eau.
Cette nouvelle usine est prévue dans le lagon, à proximité de deux sites fortement protégés : la réserve naturelle nationale de l’îlot Mbouzi et la passe en S.
La saumure rejetée par l’usine sera deux fois plus salée que l’eau de mer. Elle aura un effet sur la biodiversité du lagon, sur les écosystèmes – mangroves, herbiers, coraux – et sur la faune marine, qui sont très sensibles aux variations de salinité.
Or l’impact de ce type de rejet dans un lagon fermé semble très peu étudié. Par précaution, il convient d’envisager un rejet plus éloigné, en dehors du lagon, ce qui est techniquement possible.
Les associations environnementales locales ont alerté l’État. Elles ont interpellé les services déconcentrés, et notamment le préfet. Elles regrettent de ne pas avoir été suffisamment associées à la concertation sur le choix du site.
Cet amendement, travaillé avec Réserves naturelles de France, permet donc de relayer leur voix.
Mme la présidente. L’amendement n° 94, présenté par M. Omar Oili, Mmes Artigalas, Narassiguin et Le Houerou, MM. Lurel, Kanner et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Rapport annexé, alinéa 124
Après les mots :
Ironi Bé
insérer les mots :
, ou tout autre site alternatif
La parole est à M. Saïd Omar Oili.
M. Saïd Omar Oili. La construction de la seconde usine de dessalement à Ironi Bé doit débuter en mai 2025 pour une livraison prévue en 2027. Or l’autorité environnementale vient d’émettre un avis négatif sur les travaux en mer liés à ce projet.
Il paraît donc prudent d’anticiper ce point et d’envisager l’option d’un site alternatif. La deuxième usine de dessalement est essentielle à l’approvisionnement en eau potable des habitants de Mayotte.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Bitz, rapporteur. Ces deux amendements invitent notre assemblée à se prononcer sur la localisation d’une nouvelle usine de dessalement à Mayotte.
Nous considérons qu’il ne nous appartient pas de prendre parti sur cet emplacement. Nous ne le ferions pas, d’ailleurs, pour un autre territoire de notre pays.
N’étant pas en mesure de trancher la question, nous faisons confiance à la procédure en cours. Les éventuels recours permettront de vérifier la régularité de l’opération.
Pour cette raison, la commission émet un avis défavorable sur ces deux amendements.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État. Messieurs les sénateurs, vos amendements tendent à ce que l’implantation de la deuxième usine de dessalement à Ironi Bé puisse être remise en cause.
La thématique de l’eau est essentielle à Mayotte ; je veux donc expliquer pourquoi je suis défavorable à vos amendements.
Dans le cadre de l’autorisation environnementale, le dossier de projet a été soumis à consultation à la fin de 2024. Le parc naturel marin de Mayotte a émis un avis conforme, assorti, il est vrai, de réserves, le 13 novembre 2024.
De son côté, le Conseil national de la protection de la nature (CNPN) a émis un avis défavorable le 12 décembre 2024. L’instance souhaitait en effet analyser le dossier révisé et mis à jour dans un contexte post-Chido.
En raison de la crise de l’eau, un arrêté d’urgence civile a bien été pris afin de raccourcir les délais prévus par la loi.
Enfin, pour garantir un démarrage des travaux avant la fin du premier semestre de 2025, nécessaire à une mise en service au printemps 2027, un arrêté d’autorisation des travaux terrestres a été pris, indiquant que l’étude d’impact, qui concerne principalement les enjeux marins et les rejets de saumure, sera complétée pendant la durée des travaux, avec un état des lieux à jour avant travaux.
L’arrêté a été consolidé par un avis collectif conforme de la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche le 17 mars 2025, à la suite de l’avis défavorable du CNPN du 16 décembre 2024. La présence d’une espèce – le grand dauphin de l’océan Indien, pour être précis – parmi les espèces menacées implique cet avis conforme.
Des arrêtés complémentaires permettront la mise en exploitation de l’usine de dessalement. Les compléments seront centrés sur les caractéristiques du projet avant exploitation.
Enfin, le dossier a été soumis à la consultation du public du 20 mars au 4 avril derniers. Conformément à l’avis conforme de la ministre, un comité de suivi devra être mis en œuvre et émettra un avis sur les réponses apportées aux demandes de compléments relatifs aux travaux ayant un impact sur le milieu marin.
Au regard de l’ensemble des points que je viens d’évoquer, vous comprendrez que je suis défavorable, messieurs les sénateurs, à vos deux amendements.
Mme la présidente. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.
M. Marc Laménie. Je comprends l’intention de nos collègues : la biodiversité et la préservation de l’environnement sont des enjeux importants.
Toutefois, lors de la discussion générale, M. le ministre, ainsi que Mmes et MM. les rapporteurs ont abordé le volet financier et, surtout, humain de la question.
Près de 30 % de la population mahoraise n’a pas accès à l’eau potable et de gros investissements, en particulier en matière d’assainissement – 730 millions d’euros, de mémoire –, sont prévus pour y remédier. Ces travaux sont donc urgents et indispensables.
Tout en respectant la nature de ces amendements, le groupe Les Indépendants – République et Territoires suivra l’avis du rapporteur et du ministre.
Mme la présidente. La parole est à M. Saïd Omar Oili, pour explication de vote.
M. Saïd Omar Oili. Il y a eu, me semble-t-il, incompréhension.
Je ne dirai jamais, et je ne l’ai pas dit, monsieur le ministre, qu’il ne faut pas construire l’usine de dessalement.
M. Saïd Omar Oili. J’ai simplement dit qu’il fallait prendre des mesures de précaution au cas où l’usine ne se construirait pas à Ironi Bé.
En effet, l’autorité environnementale n’a pas encore donné son accord. Nous devons anticiper, par des mesures immédiates, l’hypothèse dans laquelle elle ne le donnerait jamais.
Notre amendement est donc différent de celui de nos collègues.
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.
M. Daniel Salmon. Monsieur le ministre, il n’est pas question pour nous, naturellement, d’interférer dans une procédure en cours, même si nous avons bien compris, lors du débat précédent sur l’A69, que le Sénat n’était pas toujours très vigilant quant à la séparation des pouvoirs…
Vous l’aurez compris, notre amendement est un amendement d’appel. Dans un moment où la biodiversité et le réchauffement climatique sont devenus des variables d’ajustement, il est capital de les prendre en compte dans la conception de tout projet, afin d’éviter des catastrophes qui sont souvent annoncées.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre d’État.
M. Manuel Valls, ministre d’État. Monsieur le sénateur Omar Oili, je n’ai pas dit que vous étiez opposé à ce projet. Je tâche de m’exprimer avec précaution. Les rappels que j’ai faits au sujet de la méthode et de la procédure vont dans votre sens : nous devons être capables de maîtriser ce processus.
Mme la présidente. La parole est à Mme le rapporteur pour avis.
Mme Micheline Jacques, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Je suis tout de même assez surprise de ces avis quelque peu tranchés sur ce sujet.
Il est vrai que les Mahorais ont un besoin fondamental en eau. Parallèlement, des associations écologistes crient au scandale sans rechercher de solutions alternatives.
Permettez-moi de vous en proposer une : nous pourrions ne pas rejeter cette eau sursalée dans le lagon et l’utiliser pour produire du sel industriel qui servira, au-delà de Mayotte, par exemple à l’île Maurice, pour désinfecter les piscines en remplacement du chlore, lequel, comme vous le savez pertinemment, est un danger pour la nature.
Si nous voulons agir à grande échelle, essayons donc de transformer ce problème en opportunité : créons de la valeur à Mayotte et permettons à l’archipel d’exporter son sel. Cela sera plus positif encore pour l’environnement.
Mme la présidente. L’amendement n° 60, présenté par Mmes Guhl et M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Rapport annexé, après l’alinéa 126
Insérer trois alinéas ainsi rédigés :
- à engager, d’ici à décembre 2025, le diagnostic territorial de l’accès à l’eau obligatoire prévu aux articles L. 1321-1 B du code de la santé publique et R. 2224-5-5 et suivants du code général des collectivités territoriales ;
- à assurer un maillage suffisant de points d’eau publics ;
- à assurer l’accessibilité et l’abordabilité des points d’eau publics notamment en multipliant les points d’achat et de recharge des cartes monétiques ;
La parole est à Mme Mélanie Vogel.
Mme Mélanie Vogel. Cet amendement de ma collègue Antoinette Guhl a pour objet de renforcer la distribution d’eau dans le cadre du plan Eau Mayotte et de préciser les actions engagées dans le rapport annexé.
La directive européenne Eau potable impose un diagnostic territorial visant à recenser toutes les personnes sans accès suffisant à l’eau potable sur les territoires.
Cette tâche incombe aux communes et aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) compétents, mais à Mayotte, aucune collectivité n’a entamé ce diagnostic.
Il s’agit pourtant d’une étape clé pour comprendre les causes de la précarité en eau, hygiène et assainissement, et pour mettre en place des solutions concrètes et adaptées.
Nous l’avons répété, notamment hier lors de la discussion générale : environ 30 % des Mahorais ne sont pas raccordés à l’eau à domicile.
Dans ces conditions, les bornes-fontaines deviennent essentielles. Elles sont souvent le seul point d’approvisionnement pour les habitants des quartiers précaires.
Or l’accès à ces bornes est freiné par la centralisation du système de cartes : il n’y a qu’un seul point de vente, à Mamoudzou. En outre, le coût d’entrée est élevé : il dépasse 30 euros, alors que 42 % des Mahorais vivent avec moins de 160 euros par mois.
Il est donc urgent de densifier le maillage des points d’eau et de mieux les répartir. Il faut également faciliter l’accès aux bornes monétiques en multipliant les points de vente et de recharge. Les seize structures France Services peuvent y contribuer.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Bitz, rapporteur. L’accès à l’eau est évidemment un enjeu majeur pour Mayotte. Le rapport annexé en fait d’ailleurs un axe fort de l’action de l’État pour les années à venir.
Cependant, conformément à ce que nous avons déjà indiqué, nous considérons que le rapport annexé constitue la feuille de route du Gouvernement et qu’il ne nous appartient pas, sauf son accord, de la compléter sur tous les sujets.
À trop vouloir demander à l’État au travers de cette feuille de route, nous risquons de le mettre dans une situation de non-réalisation et de non-exécution.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L’amendement n° 95, présenté par M. Omar Oili, Mmes Artigalas, Narassiguin et Le Houerou, MM. Lurel, Kanner et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Rapport annexé
I. – Alinéa 130
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Un calendrier des travaux de sécurisation de cette usine de dessalement sera élaboré avant le 1er décembre 2025 et transmis au comité de suivi de la loi de programmation pour la refondation de Mayotte.
II. - Après l’alinéa 133
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
Le Gouvernement s’engage à transmettre aux élus locaux l’étude de l’inspection générale de l’environnement et du développement durable portant sur le retour d’expérience de la crise de l’eau à Mayotte avant le 1er juillet 2025.
Un nouveau plan Eau Mayotte sera élaboré avant le 31 décembre 2027 et son élaboration sera concertée en amont avec les élus locaux.
La parole est à M. Saïd Omar Oili.
M. Saïd Omar Oili. Cet amendement vise à apporter plusieurs précisions sur la question de l’approvisionnement en eau à Mayotte.
Il est notamment proposé d’élaborer un calendrier des travaux de sécurisation de l’usine de dessalement.
Par ailleurs, il est important qu’un nouveau plan Eau Mayotte fasse l’objet d’une concertation avec les élus locaux bien en amont, cela afin d’éviter toute rupture dans la dynamique des investissements et de déploiement de l’action de l’État.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Bitz, rapporteur. Là encore, la commission n’est pas favorable à la multiplication des injonctions à l’égard du Gouvernement.
Pour cette raison, elle émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 61, présenté par Mmes Guhl et M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Rapport annexé, après l’alinéa 131
Insérer trois alinéas ainsi rédigés :
Un plan de rénovation et de redimensionnement des infrastructures de distribution d’eau potable sera mis en œuvre afin de garantir les principes de continuité, d’égalité et d’adaptabilité du service public.
Le stockage et la récupération des eaux de pluie seront facilités et encouragés pour les ménages, dans les conditions prévues par l’arrêté du 12 juillet 2024 relatif aux conditions sanitaires d’utilisation des eaux impropres à la consommation humaine pour des usages domestiques pris en application de l’article R. 1322-94 du code de la santé publique.
En particulier, seront encouragées les solutions et sources alternatives d’accès à l’eau (multiplication des bornes-fontaines, stockage et récupération des eaux de pluie, distribution de contenants propres, accompagnement à l’utilisation des eaux de surface) dans les zones où le service public d’eau n’est pas suffisant ou efficient.
La parole est à Mme Mathilde Ollivier.
Mme Mathilde Ollivier. Cet amendement de notre collègue Antoinette Guhl vise à réaffirmer une priorité : garantir à Mayotte l’accès à l’eau potable dans le respect des grands principes du service public.
Les débats lors de l’examen de la loi du 28 février 2017 de programmation relative à l’égalité réelle outre-mer ont permis de montrer l’ampleur des inégalités entre Mayotte et l’Hexagone.
Réduire ces écarts passe par un renforcement des services publics. L’égalité territoriale exige un accès identique aux droits et aux services, partout sur le territoire. Or, à Mayotte, l’accès à l’eau et à l’assainissement reste très inégal, notamment dans les quartiers non raccordés.
Au travers de cet amendement, nous soulignons donc la nécessité d’un plan de rénovation et de redimensionnement des infrastructures d’eau potable.
L’objectif est simple : garantir la continuité, l’égalité et l’adaptabilité du service public.
La continuité du service public est un principe constitutionnel, mais à Mayotte, les services d’eau sont souvent interrompus. Les tours d’eau organisent des coupures programmées, faute de production suffisante. Les bornes-fontaines sont souvent hors service. Le principe d’égalité est donc aussi en cause.
En 2023, puis après le cyclone, les distributions de bouteilles d’eau ont été inéquitables. Nombre d’entre elles ont été conditionnées à la présentation de papiers administratifs. Les personnes précaires, souvent sans documents, en ont été exclues.
Le service public doit aussi s’adapter. Face aux coupures, les habitants utilisent des sources dangereuses : pluies, rivières, puits artisanaux. Ces pratiques exposent à des risques sanitaires graves. Il faut donc développer des solutions alternatives sécurisées d’accès à l’eau et garantir que personne ne soit laissé de côté.
Cet amendement a été travaillé avec la Coalition Eau.
Mme la présidente. L’amendement n° 112, présenté par Mmes Corbière Naminzo et Cukierman, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Rapport annexé, après l’alinéa 131
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
Un plan de rénovation et de redimensionnement des infrastructures de distribution d’eau potable sera mis en œuvre afin de garantir les principes de continuité, d’égalité et d’adaptabilité du service public.
La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. Notre amendement rejoint le précédent, puisqu’il vise aussi à établir un plan de rénovation et de redimensionnement des infrastructures de distribution d’eau potable.
Il y a bien sûr un enjeu de continuité et d’égalité devant le service public, qui est indispensable, un enjeu sanitaire également, mais surtout et tout simplement un enjeu d’humanité et de respect de nos valeurs républicaines.
Nous ne pouvons pas déployer nos efforts et notre dépense publique pour empêcher, par exemple, des installations d’habitat informel si nous ne mettons pas les moyens pour développer un habitat digne, qui permette à tous les habitants de Mayotte de vivre décemment.
Cela passe évidemment par la construction des infrastructures pour accéder à l’eau courante et à l’eau potable.
Nous l’avons déjà dit et il faut le redire : 40 % des logements sont en tôle et 95 % d’entre eux sont dépourvus de toilettes, de douche ou d’eau courante.
Il y a donc une véritable crise. Quand tout fonctionne, on estime les capacités de production à 43 000 mètres cubes, voire à 44 000 mètres cubes d’eau par jour. Or la consommation est estimée en 2025 à 47 000 mètres cubes par jour. Il manque donc 3 000 à 4 000 mètres cubes, ce qui justifie notre amendement.
J’interroge chacun d’entre vous : dans quel département, dans quel territoire du continent accepterait-on que des citoyens et des citoyennes doivent créditer des cartes prépayées pour se procurer de l’eau pour leurs besoins élémentaires ?
Il est absolument nécessaire de réagir.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Bitz, rapporteur. Nous avons déjà évoqué ce sujet crucial de l’eau et nous estimons que le plan Eau Mayotte satisfait déjà très largement les demandes qui sont formulées dans les deux amendements.
Pour celles qui ne seraient pas satisfaites, nous émettons un avis défavorable, pour les raisons invoquées précédemment.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État. Pour résoudre la crise de l’eau, qui est une réalité, le plan Eau Mayotte prévoit, sur la période 2024-2027, un financement des investissements par l’État à hauteur de 210 millions d’euros sur un total de 500 millions d’euros.
Ces nouveaux investissements concernent précisément les sixième et septième campagnes de forage, qui fourniront plus de 12 000 mètres cubes par jour, la construction de l’usine de dessalement d’Ironi Bé, qui produira 10 000 mètres cubes par jour, la construction de nouveaux réseaux et, enfin, la réparation des fuites. Comme je l’évoquais hier dans mon intervention, ce dernier point est essentiel.
Concernant l’assainissement, le système d’assainissement de Koungou est en cours de travaux et plusieurs constructions ou réhabilitations de stations d’épuration sont prévues, notamment à Mamoudzou-Sud, au centre de l’île et à Petite-Terre.
À la suite de la crise climatique liée au cyclone Chido, une mission d’inspection interministérielle a réalisé de janvier à février 2025 une évaluation des dégâts et des ajustements concernant les investissements à consentir.
Le plan Eau Mayotte prévoit également l’installation de cuves de récupération des eaux de toiture, qui doivent pouvoir être utilisées conformément au code de la santé publique. Il faudra avancer sur l’objectif « un foyer, une cuve », notamment là où l’eau n’arrive pas – mais pas seulement.
Enfin, comme je vous le disais également hier, plusieurs ministères – outre-mer, santé, écologie – ont engagé des études concernant l’usage des ressources alternatives de type fontaine atmosphérique ou unité mobile de chloration, afin d’offrir des solutions nouvelles pour garantir un accès continu à l’eau en cas de sécheresse aggravée.
Je veux vous dire les choses clairement : nous avons devant nous une période qui sera encore difficile et dont la durée dépendra notamment de la livraison de l’usine de dessalement dont nous avons déjà parlé et de la mise en place de la nouvelle retenue collinaire. En attendant, il nous faudra être très attentifs à la situation pour ne pas connaître une nouvelle crise comme celle qu’a connue Mayotte en 2023 ; pour cela, nous devrons maintenir les dispositifs qui seront nécessaires : distribution de bouteilles d’eau, unités mobiles de chloration, etc. afin d’éviter toute dégradation de la situation.
Mentionner dans le rapport annexé le stockage et la récupération des eaux de pluie, par exemple, ainsi que les solutions et sources alternatives d’accès à l’eau me semble, dans cette période, pertinent.
Je m’interroge en revanche sur l’opportunité d’évoquer un plan de rénovation et de redimensionnement des infrastructures de distribution d’eau potable, alors que le plan Eau Mayotte est en cours.
Je m’en remets donc à la sagesse du Sénat sur l’amendement n° 61 et je demande le retrait de l’amendement n° 112.
Mme la présidente. La parole est à M. Saïd Omar Oili, pour explication de vote.
M. Saïd Omar Oili. Monsieur le ministre, vous avez lancé une mission d’évaluation. L’inspectrice chargée de cette mission, très compétente, a réuni plusieurs fois les acteurs locaux dans un véritable souci de transparence et d’échange.
Il est évident que les acteurs de l’eau doivent être destinataires de son rapport final, parce que la politique de la ressource en eau est prioritaire et que cette compétence est largement partagée avec les collectivités locales. La transparence doit donc être une règle impérative dans ce domaine. Or nous n’avons jamais reçu ce rapport, monsieur le ministre.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre d’État.
M. Manuel Valls, ministre d’État. Monsieur le sénateur, je suis vraiment très attentif à la transparence et donc favorable, pour ceux qui ont un peu de culture soviétique, à la glasnost et à la perestroïka… (Rires.)
M. Rachid Temal. Ça s’est mal terminé !
M. Jean-Baptiste Lemoyne. La chute du rideau de fer !
M. Manuel Valls, ministre d’État. J’ai l’impression que M. Kanner – je le vois opiner – connaît également ses classiques… (Sourires.)
L’inspectrice, dont vous avez salué le travail, monsieur le sénateur, est en train de terminer son rapport. Dès lors qu’il sera prêt, il n’y a aucune raison qu’il ne soit pas mis à la disposition des parlementaires.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 61.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n’adopte pas l’amendement.)
Mme la présidente. L’amendement n° 96, présenté par M. Omar Oili, Mmes Artigalas, Narassiguin et Le Houerou, MM. Lurel, Kanner et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Rapport annexé, alinéa 136
Compléter cet alinéa par trois phrases ainsi rédigées :
Au 31 décembre 2025 au plus tard, le Gouvernement établira une étude de faisabilité sur l’enfouissement du réseau électrique de Mayotte comprenant l’identification des installations qui nécessitent un enfouissement prioritaire, le calendrier de réalisation et les modalités d’accompagnement financier. L’articulation avec les travaux pour l’installation du très haut débit devra être abordée. Cette étude est transmise au comité de suivi de la loi de programmation pour la refondation de Mayotte.
La parole est à M. Saïd Omar Oili.
M. Saïd Omar Oili. Le cyclone Chido a mis le réseau électrique de Mayotte à terre. Il apparaît donc nécessaire de rendre ce réseau plus résilient aux événements climatiques et envisager des travaux d’enfouissement d’ampleur, en ciblant les installations qui nécessitent un enfouissement prioritaire : hôpitaux, pharmacies, dispensaires, écoles, mairies, etc.
Cet amendement tend donc à ce que le Gouvernement établisse une étude de faisabilité sur l’enfouissement du réseau électrique de Mayotte comprenant l’identification des installations qui nécessitent un enfouissement prioritaire, ainsi que le calendrier de réalisation et les modalités d’accompagnement financier. Cette étude devra être transmise au comité de suivi prévu par le projet de loi.
J’ajoute que, selon les recommandations des experts, l’articulation avec la mise en place du très haut débit sur Mayotte est indispensable.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Après l’accès à l’eau, nous abordons ici l’accès à l’électricité, qui est également un sujet important pour Mayotte.
Le rapport annexé prévoit déjà des études de faisabilité au cas par cas pour l’enfouissement des lignes. Il est ici proposé une étude généralisée. Nous considérons que cela alourdirait les procédures.
C’est pourquoi nous émettons un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L’amendement n° 24, présenté par Mme Jacques, est ainsi libellé :
Rapport annexé, alinéa 154
Compléter cet alinéa par deux phrases ainsi rédigées :
Cette structuration implique la création d’un comité régional des pêches maritimes et des élevages marins à horizon 2027. L’État soutiendra sa mise en place, ainsi que la mise en place d’une structure préfiguratrice de ce comité.
La parole est à Mme Micheline Jacques.
Mme Micheline Jacques. Cet amendement vise à compléter le volet relatif à l’agriculture et à la pêche du rapport annexé pour prévoir que l’effort de structuration de la filière pêche implique la création d’un comité régional des pêches et des élevages marins à l’horizon 2027.
La création de ce comité est une demande tant des pêcheurs que des agriculteurs. Pour qu’un tel comité voie le jour, la filière doit atteindre un niveau de structuration suffisant. Tel est l’objet de l’actuelle association préfiguratrice, première étape indispensable pour laquelle un soutien de la part de l’ensemble des acteurs, particulièrement des services de l’État, est nécessaire.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Favorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État. Cet amendement, qui montre clairement la fine connaissance de ce territoire par la présidente Micheline Jacques, vise à créer un comité régional des pêches à Mayotte.
L’État soutient la demande des professionnels de séparer les compétences agricoles, d’une part, et la pêche et l’aquaculture, d’autre part. En effet, la structuration de la filière pêche est indispensable pour que le territoire bénéficie enfin des retombées économiques liées à la ressource halieutique de la zone économique exclusive.
Cette structuration implique la création d’un comité régional des pêches maritimes et des élevages marins d’ici à 2027. L’État soutiendra sa mise en place, ainsi que celle d’une structure préfiguratrice.
Pour que ce comité soit créé, nous devrons franchir plusieurs étapes, notamment le recensement précis des pêcheurs professionnels et la poursuite de leur professionnalisation. La mise en place de ce comité doit se faire avec une véritable professionnalisation du secteur – j’y insiste. Ce travail doit être engagé dès cette année et il faudra que la profession soit au rendez-vous.
Pour ces raisons, je donne un avis favorable sur l’amendement n° 24.
Mme la présidente. L’amendement n° 123, présenté par M. Omar Oili, Mmes Artigalas, Narassiguin et Le Houerou, MM. Lurel, Kanner et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Rapport annexé, après l’alinéa 157
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
Les recettes liées aux redevances des armateurs seychellois constituent des fonds prioritaires pour le développement de la filière pêche mahoraise.
La parole est à M. Saïd Omar Oili.
M. Saïd Omar Oili. Selon les éléments transmis par le ministère, il resterait 1,6 million d’euros non programmés à la fin de 2024. Depuis 2014, les montants ont été affectés exclusivement au service des affaires maritimes de Mayotte. Un rééquilibrage est nécessaire en faveur de notre flotte de pêche, qui a été durement affectée par le cyclone Chido.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Nous demandons l’avis du Gouvernement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État. Comme je viens de le dire, l’aide à la structuration de la filière pêche constitue une priorité pour le Gouvernement comme elle l’est pour les élus, bons connaisseurs de ce dossier.
Sur décision de la préfecture, gestionnaire des crédits, et à la lumière des besoins du territoire, les fonds pourront être orientés vers différentes actions, à savoir le contrôle des pêches et le soutien à la filière mahoraise, notamment en termes de formation.
J’ai déjà eu l’occasion de le dire, il est urgent que les professionnels produisent rapidement un état des lieux sérieux et détaillé des besoins.
Par souci de cohérence, nous pourrions mentionner d’autres ressources qui doivent impérativement être mobilisées pour développer la filière, telles que les aides de minimis ou le Fonds européen pour les affaires maritimes, la pêche et l’aquaculture (Feampa).
Cet amendement va dans le bon sens et il mérite d’être soutenu. C’est pourquoi je donne un avis favorable.
Mme la présidente. Quel est maintenant l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Même avis.
Mme la présidente. L’amendement n° 117, présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Rapport annexé, alinéa 159, première phrase
Après le mot :
scolaire
insérer les mots :
et au dispositif de classes itinérantes
La parole est à Mme Mélanie Vogel.
Mme Mélanie Vogel. Cet amendement vise à mettre fin au dispositif des classes itinérantes et j’espère que nous pourrons nous rassembler sur cet objectif.
Le droit à une scolarité effective est mis à mal à Mayotte, notamment en raison du déficit important d’infrastructures scolaires – 1 200 classes font défaut –, du manque d’accès aux transports et à la restauration et des nombreux refus d’inscription scolaire par les mairies. Entre 6 000 et 10 000 enfants ne sont pas scolarisés, soit 9 % des mineurs présents à Mayotte.
Ce département est le plus jeune et le plus pauvre de France ; sans scolarisation, on ne sortira pas ces enfants de la précarité et leurs perspectives d’avenir seront durablement entravées.
Plutôt que de répondre de manière structurelle à cette carence, l’État multiplie les mesures de bricolage.
En plus du système de rotation scolaire qui concerne plus de la moitié des élèves, qui ne bénéficient que de deux jours d’enseignement par semaine, le rectorat de Mayotte a mis en place un système de classes itinérantes, qui implique la tenue de cours en dehors des locaux de l’école. En pratique, les classes itinérantes ne permettent généralement qu’une demi-journée de classe par semaine et par élève.
Cela a abouti à une condamnation de l’État en 2021, parce que cette solution ne peut pas être un substitut à une scolarisation effective et que les enfants français sont prioritaires, tandis que les enfants étrangers sont reçus environ une fois par semaine, ce qui est une atteinte au droit à l’instruction, à l’intérêt supérieur de l’enfant et au principe de non-discrimination.
Cet amendement vise à mettre fin, d’ici à la rentrée 2031, aux classes itinérantes, qui ne peuvent pas constituer, je l’ai dit, une scolarisation effective.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Le taux de natalité exponentiel à Mayotte ainsi que les conséquences du cyclone Chido ont rendu la question scolaire centrale et primordiale. Le rapport annexé prévoit déjà de mettre fin au système de rotation des classes d’ici à 2031 ; cet amendement tend à y ajouter la fin des classes itinérantes, ce à quoi nous sommes plutôt favorables.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État. Nous aurons l’occasion de traiter de ce sujet à l’occasion d’un autre amendement, mais je veux déjà indiquer que la première réponse de l’État aux enjeux de scolarisation dans le premier degré à Mayotte consiste à créer des postes d’enseignant – c’est cela qui relève pleinement de la compétence de l’État. Ainsi, plus de 900 emplois d’enseignant du premier degré ont été créés entre 2019 et 2024 et 80 postes supplémentaires seront créés à la rentrée scolaire 2025.
Je n’ignore pas que le nombre d’écoles n’est pas à la hauteur des besoins – c’est incontestable. Je vous rappelle cependant que les constructions scolaires du premier degré relèvent de la compétence des communes, même si l’État, qui est au rendez-vous, s’est fortement mobilisé en signant, en juin 2021, une convention quadripartite avec l’AFD, l’Association des maires de France, la préfecture et le rectorat pour accompagner les communes et leur permettre de s’engager dans la construction d’écoles.
Je rappelle aussi qu’à Mayotte il existe un débat sur les constructions d’école, parce qu’elles sont parfois considérées comme une source d’« attractivité » du territoire pour l’immigration.
Le dispositif des classes itinérantes développé par le rectorat au regard de la situation exceptionnelle de Mayotte est une réponse d’urgence qui n’a pas vocation à constituer une solution pérenne. L’objectif d’une scolarisation effective de l’ensemble des enfants d’âge scolaire est partagé.
Selon les chiffres qui m’ont été fournis, 1 200 classes sont nécessaires pour sortir des rotations en 2031 pour le premier degré, 700 en collège et 800 en lycée. Je parle bien de classes ! Vous voyez donc bien l’effort qu’il faudra accomplir pour être au bon niveau si nous voulons atteindre cet objectif en 2031.
En tout cas, je m’en remets à la sagesse du Sénat sur cet amendement.
Mme la présidente. L’amendement n° 119, présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Rapport annexé, alinéa 159
Compléter cet alinéa par deux phrases ainsi rédigées :
L’État agit fermement contre la non-scolarisation et la déscolarisation à Mayotte. Il fait respecter l’obligation de scolarisation de l’ensemble des enfants sur le territoire mahorais et l’application du décret n° 2020-811 du 29 juin 2020 relatif à la simplification de l’inscription scolaire.
La parole est à Mme Mélanie Vogel.
Mme Mélanie Vogel. Cet amendement concerne l’obligation de scolarisation. Nous voulons lutter contre les pratiques de certains maires de refuser l’inscription de jeunes enfants qui n’ont pas la nationalité française.
L’État doit faire respecter le décret du 29 juin 2020 relatif à la simplification de l’inscription scolaire, qui liste de façon exhaustive les pièces exigées à l’appui d’une demande d’inscription.
Il se trouve que les enfants de nationalité étrangère font face à des freins administratifs au moment de l’inscription scolaire et sont victimes de pratiques discriminatoires. Les associations déplorent des exigences abusives en termes de pièces à fournir. Des maires utilisent parfois la police pour procéder à des enquêtes et vérifier l’adresse de domiciliation indiquée par la famille pour la demande d’inscription et ils refusent l’inscription de l’enfant s’il ne réside pas à l’adresse indiquée. Enfin, il arrive aussi qu’ils demandent des justificatifs d’identité pour les personnes qui hébergent des familles.
L’État doit fermement lutter contre le phénomène de refus d’inscription par les mairies, qui aggrave la situation alarmante de non-scolarisation à Mayotte et met à mal un principe fondamental en France : l’interdiction des discriminations.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Cet amendement vise finalement à rappeler une obligation qui est définie dans le décret du 29 juin 2020 que vous avez cité, ma chère collègue.
Le ministre nous a fait part de l’ambition qui est la sienne concernant cette question centrale, compliquée, et qui fait l’objet à Mayotte de beaucoup de contentieux. Il appartient au juge de faire respecter les règles contenues dans les dispositions réglementaires.
L’avis est donc défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État. Là aussi, je veux être précis. La loi pour une école de la confiance du 26 juillet 2019 a – faut-il le rappeler, tant cela paraît évident ? – instauré l’instruction obligatoire pour chaque enfant dès l’âge de 3 ans et jusqu’à l’âge de 16 ans.
Si l’inscription des élèves relève de la compétence des communes, l’État a en effet le devoir de veiller à sa pleine application sur l’ensemble du territoire. À Mayotte, les services de la préfecture et du rectorat sont particulièrement vigilants au regard des préoccupations concernant l’accès à l’éducation pour tous les élèves sur le territoire – j’insiste sur l’adjectif tous.
Chaque année, le préfet et le recteur agissent conjointement pour rappeler aux maires ces dispositions, les justificatifs attendus et le fait que tout cela ne doit faire l’objet d’aucune discrimination – je dis bien : aucune.
En outre, le préfet peut, en sollicitant le recteur, faire procéder à l’inscription des enfants en cas de carence du maire. Cela est déjà arrivé.
Le rapport annexé que nous examinons a pour objet de recenser les engagements de l’État ; appliquer le droit en vigueur ne peut pas être considéré comme tel. Dès lors, la proposition formulée dans cet amendement n’a pas vocation, de mon point de vue, à figurer dans le rapport annexé. Chacun doit – évidemment ! – appliquer le droit.
Je demande donc le retrait de cet amendement. À défaut, et pour ces raisons de forme, l’avis sera défavorable.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 99 est présenté par Mmes Corbière Naminzo et Cukierman, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.
L’amendement n° 118 est présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Rapport annexé, alinéa 161, après la deuxième phrase
Insérer une phrase ainsi rédigée :
Chaque plan de construction par établissement devra également prévoir la construction et l’aménagement d’un réfectoire.
La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo, pour présenter l’amendement n° 99.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. Avec cet amendement, nous souhaitons que le plan de construction de chaque établissement prévoie la construction et l’aménagement d’un réfectoire. Cela a l’air logique, mais ce n’est pas le cas et je pense qu’il est important de le préciser explicitement.
La construction d’infrastructures pour mettre fin au phénomène de rotation va dans le bon sens et nous soutenons pleinement cette politique. Il faut tout faire pour lutter contre la non-scolarisation, mais il faut aussi que la scolarisation s’effectue dans de bonnes conditions.
Or il est impossible pour un enfant d’étudier le ventre vide, ce qui est pourtant souvent le cas à Mayotte, où la restauration scolaire est dans un état extrêmement préoccupant. Ce sont parfois les enseignants eux-mêmes qui sont amenés à distribuer des casse-croûte, mais ils ne peuvent pas le faire pour tous les enfants. Seulement un élève sur cinq bénéficie aujourd’hui d’un repas chaud ! Les autres n’ont rien ou ils doivent se contenter d’un jus, de chips et de biscuits en guise de seul repas de la journée.
Ce serait un véritable scandale si l’on osait offrir en métropole ce genre de collation comme unique repas aux élèves ! Il faut mettre fin à ces traitements inhumains, indignes et injustes pour notre jeunesse.
Mme la présidente. La parole est à Mme Mélanie Vogel, pour présenter l’amendement n° 118.
Mme Mélanie Vogel. Il est défendu, madame la présidente.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Ces deux amendements identiques visent à ce que chaque nouvel établissement scolaire dispose d’un réfectoire.
Or, si chacun a bien compris notre ambition collective en matière de construction de classes, tant dans le primaire que dans le secondaire, il ne suffit pas de construire en parallèle des réfectoires : encore faut-il que les collectivités choisissent d’assurer un service de restauration scolaire. Or ce service a un caractère facultatif.
C’est pour cette raison que la commission est défavorable à ces amendements identiques.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État. C’est un sujet important. J’ai d’ailleurs eu l’occasion de m’en entretenir avec Mme Anne Rubinstein, qui est déléguée interministérielle à la prévention et à la lutte contre la pauvreté, pour essayer de flécher des crédits sur la restauration scolaire.
Le droit pour tous les enfants de disposer d’un repas n’est pas spécifique à Mayotte, mais le problème y est particulièrement criant – vous en avez parlé, madame la sénatrice.
Néanmoins, le Gouvernement privilégie une approche plus souple, qui s’appuie sur des solutions mutualisées entre les communes, par exemple des espaces polyvalents au sein des établissements, permettant de répondre aux besoins de manière plus rapide et plus soutenable.
Ainsi, nous visons le même objectif, mais je vous propose une méthode que je considère comme plus efficace.
Dans le premier degré, les communes développent une solution adaptée aux besoins et à l’organisation de chaque école. L’accompagnement à la maîtrise d’ouvrage dont les communes peuvent bénéficier doit leur permettre d’optimiser la planification des constructions, en tenant compte des besoins relatifs au développement de la restauration scolaire, qui doit – c’est incontestable – être une priorité, parce que la situation actuelle n’est absolument pas satisfaisante.
Nous devons aussi, en la matière, établir un lien avec les filières agricoles.
Le Gouvernement privilégie une réponse adaptée à chaque situation locale pour garantir de manière efficace un accès équitable à une restauration scolaire de qualité sur l’ensemble du territoire.
C’est pourquoi j’émets un avis défavorable sur ces deux amendements identiques, même si, sur le fond, nous partageons le même objectif.
Mme la présidente. La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo, pour explication de vote.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. Monsieur le ministre, madame la rapporteure, j’ai bien entendu vos arguments, mais il ne vous aura pas échappé, par exemple si vous avez participé à des conseils d’école ou à des conseils d’administration de collège ou de lycée, que les parents d’élèves appellent souvent l’attention de la communauté éducative sur la question de la restauration scolaire.
Bien manger pour tenir toute une journée de cours, travailler dans de bonnes conditions, c’est une préoccupation centrale pour les familles. Je ne vois pas pourquoi les parents mahorais ne pourraient pas avoir la même exigence pour leurs enfants !
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 99 et 118.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. L’amendement n° 124, présenté par M. Omar Oili, Mmes Artigalas, Narassiguin et Le Houerou, MM. Lurel, Kanner et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Rapport annexé, après l’alinéa 162
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
Le Gouvernement transmet au comité de suivi de la loi de programmation pour la refondation de Mayotte un état détaillé des mesures prévues dans le cadre du plan d’investissement majeur destiné à mettre fin, à l’horizon 2031, au système de rotation scolaire à Mayotte, et à garantir, dès la rentrée de cette année-là, un enseignement de 24 heures hebdomadaires pour chaque élève de cours préparatoire. Le Gouvernement précise également les objectifs, le calendrier et les moyens associés au plan d’attractivité et de fidélisation des enseignants prévu en 2025, destiné à renforcer la présence et la stabilité du corps enseignant dans le département de Mayotte.
La parole est à M. Saïd Omar Oili.
M. Saïd Omar Oili. L’accès à une éducation de qualité constitue un enjeu majeur pour l’égalité républicaine et la cohésion sociale. Mayotte, département le plus jeune de France, se caractérise par une pression démographique scolaire inédite et des infrastructures particulièrement sous-dimensionnées.
L’engagement de l’État de mettre fin au système de rotation scolaire d’ici à 2031 et de garantir vingt-quatre heures hebdomadaires d’enseignement à chaque élève de CP à cette échéance représente un tournant structurel.
Pour être opérationnel, cet objectif doit s’appuyer sur des investissements clairs, chiffrés et planifiés. Dans le cadre du contrat de convergence et de transformation, l’État s’est déjà engagé à construire davantage d’écoles primaires, à augmenter, pour un montant de 680 millions d’euros, les capacités d’accueil dans le secondaire et à étendre l’université de Mayotte – 12 millions d’euros sont prévus à ce titre.
Il nous paraît essentiel que les engagements annoncés s’accompagnent de dispositifs concrets, lisibles et adaptés.
De même, le plan d’attractivité et de fidélisation des enseignants, annoncé pour 2025, est indispensable pour assurer la stabilité et la qualité de l’encadrement pédagogique sur le territoire.
Disposer de précisions détaillées sur ces deux volets est nécessaire pour avoir une lecture claire, transparente et cohérente de l’action de l’État en matière éducative à Mayotte et garantir que les objectifs annoncés seront effectivement tenus.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Vous avez raison, mon cher collègue, d’affirmer que la pression scolaire – 17 % d’élèves en plus depuis 2020 – impose non seulement de construire des bâtiments supplémentaires pour recevoir ces enfants, mais aussi de renforcer l’attractivité du territoire pour les enseignants et de fidéliser ces derniers. D’ailleurs, nous en débattrons, lorsque nous examinerons les articles 27 et 28 de ce texte.
Néanmoins, étant donné qu’il y est proposé en fait un rapport supplémentaire, conformément à la philosophie de la commission, nous sommes défavorables à cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L’amendement n° 116, présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Rapport annexé, après l’alinéa 162
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
L’État développera une offre de formation dans les filières générales, technologiques et professionnelles adaptée à la demande, et s’assurera d’un nombre de places suffisant dans chaque filière de sorte qu’aucun lycéen ne soit pas contraint de poursuivre sa scolarité loin de chez lui en raison de la saturation de la filière de son choix.
La parole est à Mme Mélanie Vogel.
Mme Mélanie Vogel. Cet amendement vise à clarifier, dans le rapport annexé, le fait que l’État développera une offre de formation adaptée à la demande dans les filières générales, technologiques et professionnelles.
Nous étudierons plus tard, à l’article 26, l’ouverture du passeport mobilité pour les lycéens. C’est une mesure positive qui permet de pallier un problème : en l’absence d’offre adaptée de formations, les lycéens doivent faire leurs études ailleurs.
Mais on ne peut pas se satisfaire du fait que l’on doive envoyer les lycéens mahorais poursuivre leurs études en métropole. À terme, ce que l’État doit être en mesure de faire, c’est de garantir que ces formations aient lieu sur place.
Jusqu’à aujourd’hui, seul Saint-Pierre-et-Miquelon bénéficie de ce passeport pour les jeunes. Mayotte dispose d’un large panel de spécialités pour les filières générales et technologiques – l’offre est presque complète –, mais pour les filières professionnelles, le territoire ne propose que 31 des 94 filières disponibles en France.
Néanmoins, avec la croissance démographique que l’on connaît, les capacités d’accueil des filières n’augmentent pas au même rythme que les demandes d’inscription.
Nous nous retrouvons donc dans une situation qui n’est pas acceptable : des lycéens ne peuvent pas poursuivre leurs études chez eux.
L’aide à la mobilité est une réponse de court terme qui est nécessaire et nous la soutenons, mais à terme, il faut que nous soyons capables d’offrir la formation sur place. Tel est l’objet de cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Cet amendement vise à développer l’offre de formation dans les lycées de Mayotte. Comme vous l’avez rappelé, ma chère collègue, le projet de loi prévoit déjà, en son article 26, d’encourager la mobilité des lycéens mahorais grâce au passeport mobilité, dès lors qu’ils sont dans l’impossibilité de suivre à Mayotte le cursus de formation de leur choix.
La question est non pas de limiter le développement des formations sur Mayotte, mais de prévoir de manière temporaire, le temps justement que les formations s’y mettent en place, l’orientation vers des formations sur d’autres parties du territoire national.
Nous estimons que cet engagement est déjà inscrit dans le rapport annexé. C’est pourquoi cet amendement nous semble satisfait. L’avis est donc défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L’amendement n° 88, présenté par M. Omar Oili, Mmes Le Houerou, Narassiguin et Artigalas, MM. Lurel et Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Rapport annexé
I. – Alinéa 171
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Un calendrier d’investissement pour les travaux de modernisation du CHM de Mamoudzou et la réouverture de l’ensemble des dispensaires de l’île seront assurés avant le 31 décembre 2025.
II. – Alinéa 172
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Un calendrier pour la réorganisation territoriale des centres médicaux de référence sera élaboré avant le 31 décembre 2025.
III. – Alinéa 173
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Un plan d’investissement et un calendrier des travaux pour la construction du second site hospitalier seront élaborés avant le 31 décembre 2025.
La parole est à M. Saïd Omar Oili.
M. Saïd Omar Oili. Cet amendement vise à préciser les objectifs fixés dans le rapport annexé concernant l’accès aux soins.
À Mayotte, l’offre de soins reste très limitée, le centre hospitalier de Mayotte (CHM) étant le principal dispensateur de soins. À l’exception de l’activité de maternité, le nombre de lits disponibles est bien en dessous des ratios moyens qui prévalent dans l’Hexagone. Le différentiel de capacité rapporté à la population recensée est considérable en médecine, chirurgie, obstétrique (MCO), le nombre de lits représentant à peine 40 % de la moyenne hexagonale, avec 1,56 lit pour 1 000 habitants.
Par conséquent, Mayotte dépend fortement de La Réunion. Le territoire mahorais ne disposant pas d’une offre suffisante dans l’ensemble des spécialités et ayant des besoins largement supérieurs aux capacités, les transferts et évacuations sanitaires restent nécessaires pour permettre aux patients d’accéder dans de bonnes conditions aux soins dont ils ont besoin. Le nombre d’évacuations sanitaires, très dynamique, est ainsi passé de 500 en 2010 à 1 452 en 2021.
Il est crucial que l’offre de soins s’étende et se développe à Mayotte, ce qui requiert de préciser les contours des objectifs fixés au sein du rapport annexé. Ainsi, nous demandons que soient établis, avant le 31 décembre 2025, un calendrier d’investissement pour les travaux de modernisation du CHM de Mamoudzou et pour la réouverture de l’ensemble des dispensaires de l’île, un calendrier pour la réorganisation territoriale des centres médicaux de référence et, enfin, un plan d’investissement et un calendrier des travaux pour la construction du second site hospitalier.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Les auteurs de l’amendement prévoient une série de calendriers et de plans pour les principales mesures d’investissement en matière sanitaire. Nous sollicitons l’avis du Gouvernement, monsieur le ministre.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État. Je remercie d’abord Mme la rapporteure… (Sourires.)
Le Gouvernement vise l’objectif, partagé par tous, d’une extension de l’offre de soins à Mayotte. C’est indispensable pour toutes les raisons que vous connaissez parfaitement.
Le projet que nous portons concerne non seulement le CHM, sur le site principal de Mamoudzou, les quatre centres médicaux de référence et les dispensaires, tous ouverts à part l’un d’entre eux. Ils bénéficient de la présence de médecins, d’infirmières, d’aides-soignantes, mais nous devons faire en sorte de mobiliser l’offre libérale dans ces dispensaires. C’est l’une de mes préoccupations.
Le programme correspondant a été validé par le Conseil national de l’investissement en santé (Cnis). Il comprend d’abord une opération de 244 millions d’euros, financée par le Ségur de la santé, pour le site de Mamoudzou. Il s’agit d’augmenter les conditions d’accueil des patients et, surtout, les capacités de prise en charge.
Le programme comporte ensuite une opération, pour un montant estimé à 148 millions d’euros, hors coût d’acquisition du foncier, pour la construction du second site hospitalier, à Combani.
Nous visons une passation des marchés au premier semestre de 2026. Un calendrier précis pourra être transmis au 31 décembre 2025. C’est pour cette raison que je suis favorable à votre amendement, qui a justement pour objet d’apporter cette précision.
Mme la présidente. Quel est maintenant l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Favorable.
Mme la présidente. L’amendement n° 89, présenté par M. Omar Oili, Mmes Le Houerou, Narassiguin et Artigalas, MM. Lurel et Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Rapport annexé, alinéa 176
Compléter cet alinéa par un alinéa ainsi rédigé :
Un plan d’investissement et un calendrier pour la mise en place des actions d’informations et d’accès aux services de santé en matière de sexualité de procréation à Mayotte seront élaborés avant le 31 décembre 2025.
La parole est à M. Saïd Omar Oili.
M. Saïd Omar Oili. Cet amendement vise à préciser les objectifs fixés par le rapport annexé concernant les actions d’information et d’accès aux services de santé en matière de sexualité et de procréation à Mayotte.
Nous souhaitons en outre qu’un plan d’investissement en faveur de ces actions et un calendrier soient mis en place avant le 31 décembre 2025.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Nous sollicitons l’avis du Gouvernement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État. L’agence régionale de santé prépare un renforcement des actions en faveur de l’éducation affective et sexuelle, avec, en particulier, le déploiement d’un référent à Mayotte et des mesures pour un meilleur accès aux contraceptifs. Ces actions doivent être déployées en lien étroit avec les centres de protection maternelle et infantile (PMI).
Vous proposez de compléter le rapport annexé par un alinéa qui précise les initiatives que nous devons prendre dans ce sens. C’est très important. Au fond, on évoque beaucoup la sécurité, l’immigration, ainsi que les défaillances en matière d’infrastructures et d’eau potable, mais, incontestablement, la question des violences intrafamiliales et des violences faites aux femmes et aux enfants, ainsi que les problèmes d’accès à la sexualité pour les plus jeunes – il n’y a qu’à voir le nombre de très jeunes filles enceintes sur l’île –, nous oblige à une très grande mobilisation.
J’ai eu l’occasion de rencontrer l’ensemble des organisations publiques ou associatives qui travaillent sur ces sujets. Il y a d’ailleurs une nouvelle déléguée auprès du préfet pour prendre en charge cette politique publique.
Il me semble qu’il faut une véritable mobilisation de toute la société mahoraise, accompagnée par l’État, et tenant compte, évidemment, des spécificités culturelles de Mayotte. Il y a trop de jeunes femmes qui se retrouvent en très grande détresse.
Votre amendement va dans ce sens, donc je ne peux qu’y être favorable.
Mme la présidente. Quel est maintenant l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Favorable.
Mme la présidente. L’amendement n° 90, présenté par M. Omar Oili, Mmes Le Houerou, Narassiguin et Artigalas, MM. Lurel et Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Rapport annexé, alinéa 185, deuxième phrase
Remplacer l’année :
2031
par l’année :
2027
La parole est à M. Saïd Omar Oili.
M. Saïd Omar Oili. La situation socio-économique à Mayotte demeure extrêmement préoccupante, avec des écarts majeurs en matière de précarité et de pauvreté par rapport à l’Hexagone. L’échéance initialement prévue pour une convergence totale est fixée à 2036, mais il nous semble impératif d’accélérer ce calendrier.
En effet, le taux de pauvreté s’élève à 77 %, alors qu’il n’est que de 14 % en France métropolitaine. Le PIB par habitant y est le plus faible de tous les territoires français : il représente seulement un quart du PIB national par habitant. Enfin, le chômage touche 37 % de la population active.
Au 1er novembre 2024, le Smic horaire brut a été fixé à 11,88 euros dans l’ensemble des départements et collectivités d’outre-mer, à l’exception notable de Mayotte, où le Smic horaire brut demeure à 8,98 euros, soit un écart mensuel de 439,83 euros pour une durée de travail identique de trente-cinq heures hebdomadaires.
Pourtant, l’ancien ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion, Olivier Dussopt, avait appelé à une accélération de la convergence à la faveur des revalorisations périodiques, ce qui aurait pu être le cas ce 1er novembre 2024. Il aurait suffi de relever de 4 %, au lieu de 2 %, le Smic brut et de prélever les cotisations correspondantes.
L’échéance de 2031 mentionnée dans le rapport annexé pour une convergence du Smic entre Mayotte et le reste du pays reste trop lointaine au regard de l’urgence sociale. Nous souhaitons donc avancer cette échéance à 2027 au plus tard.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Avis défavorable. Vous proposez d’avancer à 2027, au lieu de 2031, la convergence du Smic. Dès lors que l’alignement du revenu minimum se traduit par une hausse des cotisations et, partant, du coût du travail, il convient de ne pas y procéder trop brutalement, au risque d’encourager le travail illégal. Mme Bonfanti-Dossat, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, pourra vous apporter des précisions à ce sujet.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État. J’irai dans le même sens que Mme la rapporteure. Je précise que l’alignement du Smic net est prévu au plus tard en 2031 – je dis bien au plus tard. J’ai bien insisté hier sur le fait que la valeur travail doit être placée au cœur de ce processus de convergence, car la bataille contre la pauvreté – mais pas seulement – ne sera gagnée qu’avec la réduction du chômage, qui est bien trop élevé à Mayotte.
Le rapport annexé prévoit cependant que cette évolution doit se faire selon une trajectoire soutenable tant pour l’économie que pour la société mahoraise post-Chido. Nous devons être très attentifs à l’accompagnement des entreprises pour qu’il n’y ait pas d’effets de bord susceptibles de mettre en difficulté une grande partie de la population.
J’ai donc souhaité, monsieur le sénateur, avec ma collègue Catherine Vautrin, que cette question soit préalablement expertisée afin de ne pas déstabiliser l’économie, les entreprises, l’emploi et le pouvoir d’achat des Mahorais. Une séquence de concertation a d’ores et déjà été prévue par le préfet de Mayotte, ce jeudi 22 mai. Il s’agira d’écouter tous les acteurs concernés – représentants des entreprises et des syndicats, conseil économique, social et environnemental de Mayotte (Cesem) et élus.
Avant d’annoncer une date d’alignement du Smic, nous avons besoin de ce temps d’expertise pour être le plus efficaces possible. Je suis conscient des attentes fortes de la population, mais nous devons avant tout éviter les effets négatifs qu’une trop grande précipitation pourrait avoir sur l’économie, les entreprises et l’emploi.
C’est la raison pour laquelle, à défaut de retrait de votre amendement, j’émettrai un avis défavorable.
Mme la présidente. La parole est à Mme le rapporteur pour avis.
Mme Christine Bonfanti-Dossat, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales. Je confirme les propos de Mme la rapporteure. Selon la direction de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités (DEETS) de Mayotte, 80 % environ de l’économie mahoraise n’est pas déclarée.
Dans le cadre du chantier de la convergence sociale, que le Gouvernement souhaite accélérer, les cotisations et contributions sociales recouvrées à Mayotte seront progressivement alignées dans leur assiette et dans leur montant sur le niveau du droit commun. Cela aura pour conséquence d’augmenter le coût du travail, ce qui justifie d’autant plus de rehausser progressivement le Smic brut mahorais, afin de ne pas créer d’effets incitatifs supplémentaires au recours au travail dissimulé.
Dans le même temps, le Gouvernement envisage d’étendre à Mayotte le dispositif d’exonération de cotisations sociales prévu par la loi du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer, dite Lodéom.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 138, présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
Rapport annexé, alinéa 187
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Notre amendement vise à supprimer l’alinéa 187 du rapport annexé, qui indique que la convergence sociale entre Mayotte et l’Hexagone n’interviendra, pour les allocations individuelles de solidarité, dont l’allocation aux adultes handicapés (AAH) et le revenu de solidarité active (RSA), qu’après celle du Smic, prévue d’ici à 2031. Par ailleurs, les prestations familiales sont écartées de cette convergence.
Cette hiérarchisation entre salaires, prestations contributives et prestations universelles de solidarité ne présente aucune rationalité et n’a aucun sens économique ou social. C’est même un véritable contresens !
Les salariés ont tout autant besoin de prestations familiales pour espérer un niveau de vie correct par unité de consommation, et le risque famille n’est pas couvert par une cotisation contributive. La solidarité universelle, monsieur le ministre, est attachée aux citoyens, et non pas aux travailleurs.
Rappelons que les écarts entre les montants des prestations versées à Mayotte et ailleurs, dans l’Hexagone comme dans les autres départements d’outre-mer, restent importants. Par exemple, les montants de l’AAH et du RSA ne représentent que 50 % de ceux des autres régions. Ces disparités alimentent et expliquent le niveau élevé de pauvreté et les profondes inégalités qui frappent l’île. La fonction redistributive de ces prestations sociales est entravée, voire annihilée.
À Mayotte, 94 % des familles monoparentales – mères isolées avec enfants le plus souvent – sont pauvres. Cela s’explique par la faible couverture du risque famille à Mayotte. C’est pourtant une branche historique de notre sécurité sociale. Enfin, les ménages pauvres comptent davantage d’enfants que les autres ménages.
Aussi, cet amendement de suppression de l’alinéa 187 vise à rétablir la convergence sociale entre l’Hexagone et Mayotte en ce qui concerne l’AAH, le RSA et les prestations familiales.
Mme la présidente. L’amendement n° 139, présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
Rapport annexé, alinéa 187, troisième phrase
Remplacer les mots :
n’appelle pas
par le mot :
appelle
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Cet amendement, inspiré par l’Unicef, vise à intégrer les prestations familiales à la convergence sociale. L’amendement précédent était plus large. À Mayotte, le code de la sécurité sociale ne s’applique pas dans son intégralité. Le territoire souffre une fois de plus d’un régime dérogatoire et de règles spécifiques qui entravent la lutte contre la pauvreté des familles et des enfants. C’est justement le rôle des prestations de corriger cela.
Les écarts de montant des prestations familiales entre l’Hexagone et les autres territoires sont importants. Pour une famille avec trois enfants à charge, l’allocation de base à Mayotte est de 223,89 euros, contre 338 euros dans les départements d’outre-mer et l’Hexagone, soit seulement 66 % du montant hexagonal. Le complément pour chaque enfant supplémentaire est de 21,69 euros à Mayotte, contre 190,29 euros ailleurs. L’allocation de soutien familial n’est carrément pas versée à Mayotte, au contraire des autres régions.
Par ces dispositions dérogatoires, la réglementation spécifique à Mayotte omet de prendre en compte un principe universel figurant dans nos engagements internationaux : l’intérêt supérieur de l’enfant.
Cette situation, liée à l’absence de convergence des droits sociaux, est aggravée par un fort taux de non-recours. L’exclusion explicite, volontaire, des prestations familiales de la convergence des droits prévus par le projet de loi amplifie la précarisation des familles, alors que c’est précisément un alignement de ces prestations qui permettra une meilleure prise en charge des familles et le respect de l’intérêt supérieur de l’enfant, comme l’exige notre signature internationale.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Ces amendements prévoient un alignement plus rapide du régime des prestations familiales à Mayotte. Nous y sommes défavorables. Nous rappelons que la spécificité de la démographie mahoraise, la moitié de la population étant mineure, ainsi que la situation migratoire de l’archipel, ne pousse pas à développer une politique de soutien en faveur de la natalité. Ma collègue Christine Bonfanti-Dossat pourra apporter des précisions au nom de la commission des affaires sociales.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à Mme le rapporteur pour avis.
Mme Christine Bonfanti-Dossat, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales. Je souscris aux propos de Mme le rapporteur. Je précise également qu’à l’alinéa 187 le Gouvernement ne déclare pas renoncer à tout alignement des prestations familiales, indiquant plutôt qu’un tel alignement n’est pas prioritaire au regard du niveau des naissances à Mayotte. Il faut savoir que la population mahoraise est pour moitié âgée de moins de 20 ans et que, pour une population de 300 000 habitants, 10 000 naissances ont été recensées par l’Insee en 2022. Aussi, la mise en œuvre d’une politique familiale ne peut pas être la priorité de cette loi pour la refondation de Mayotte.
Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Je suis assez étonnée par ces propos. La droite s’occupe constamment du ventre des femmes, s’alarmant des conséquences du déclin démographique pour l’avenir de notre système de retraite. Elle nous appelle donc à…
M. Rachid Temal. Un réarmement démographique !
Mme Raymonde Poncet Monge. Voilà !
En revanche, les femmes de Mayotte faisant trop d’enfants à son goût, elle propose de mettre un frein à la politique familiale dans ce département.
Mais la politique familiale n’est pas faite pour cela ! Elle est faite pour lutter contre la pauvreté des enfants et des familles. Elle n’est pas faite pour inciter les femmes à faire plus d’enfants, même si elle améliore le pouvoir d’achat. Le souhait d’un troisième enfant, quand on en a déjà deux, n’est pas subordonné aux prestations familiales. Il existe d’autres critères sur lesquels il faut se pencher.
Mais Mayotte fait trop d’enfants, donc elle est privée de prestations familiales. C’est assez savoureux d’entendre la droite dire le contraire de ce qu’elle dit pour la France hexagonale.
Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Narassiguin, pour explication de vote.
Mme Corinne Narassiguin. Les socialistes voteront évidemment ces propositions du groupe écologiste.
Il s’agit en effet d’assurer la convergence la plus rapide possible des prestations sociales, que ce soit les prestations familiales, l’AAH ou le RSA.
Les gens ne font pas des enfants pour les allocations familiales : il faut en finir avec ce fantasme ! La situation de la natalité à Mayotte n’a rien à voir avec les prestations sociales, puisque aujourd’hui il y a justement un problème de convergence. La question qui se pose est la suivante : comment sortir des familles entières de la précarité et de la pauvreté en s’assurant qu’elles vivent dignement ? Aujourd’hui, c’est ce qui accable le plus la population à Mayotte. Il est de la responsabilité de la République de corriger le plus rapidement possible ces inégalités. Il y va du respect de la promesse de notre pacte social.
Mme la présidente. L’amendement n° 135, présenté par M. Omar Oili, Mmes Artigalas, Narassiguin et Le Houerou, MM. Lurel, Kanner et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Rapport annexé, alinéa 192, deuxième phrase
1° Remplacer les mots :
pourra définir
par le mot :
définira
2° Après le mot :
sociaux
insérer les mots :
et comprenant un objectif spécifique de logements locatifs très sociaux,
La parole est à M. Saïd Omar Oili.
M. Saïd Omar Oili. À Mayotte, 88 % des ménages demandeurs de logement social ont des ressources qui les situent sous le plafond du logement locatif très social. Or le parc de logements aidés est principalement constitué de logements prêts locatifs intermédiaires (PLI) ou assimilés, qui représentent 59 % du total.
Nous proposons que des objectifs spécifiques soient fixés en matière de production de logements locatifs très sociaux à Mayotte.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Bitz, rapporteur. La commission s’en remet à l’avis du Gouvernement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État. L’augmentation de l’offre de logements très sociaux à destination des ménages les plus modestes, les plus fragiles, doit être au cœur des enjeux de cohésion sociale en outre-mer, et notamment, bien sûr, à Mayotte. L’objectif est de proposer une offre d’habitat adaptée, c’est-à-dire à loyers et charges maîtrisés, avec une gestion locative idoine, et, le cas échéant, un accompagnement des populations concernées.
Dans le prolongement de la première expérimentation menée à Mayotte pour du « logement locatif très social adapté », avec le déploiement de l’appel à projets « Un toit pour tous en outre-mer » (Totem), des réflexions sont en cours pour pérenniser le logement très social et fixer des objectifs chiffrés sur cette catégorie spécifique. Je ne vous cache pas que les chiffres de l’année dernière, notamment les constructions de la Société immobilière de Mayotte (SIM), étaient inquiétants, puisque, si je ne me trompe pas, 73 logements seulement ont été réalisés.
Heureusement, j’ai pu constater que des chantiers de reconstruction avaient été lancés et que la SIM s’était fixé des objectifs plus ambitieux pour cette année 2025. Les choses semblent aller dans le bon sens.
Le souhait du Gouvernement est bien de développer une offre nouvelle de logements « très sociaux adaptés », dont le besoin est incontestablement croissant. C’est pourquoi je suis favorable à votre amendement, monsieur le sénateur.
Mme la présidente. Quel est maintenant l’avis de la commission ?
M. Olivier Bitz, rapporteur. Favorable.
Mme la présidente. L’amendement n° 134, présenté par MM. Omar Oili et M. Weber, Mmes Artigalas, Narassiguin et Le Houerou, MM. Lurel, Kanner et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Rapport annexé, après l’alinéa 195
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
Le Conseil scientifique du patrimoine naturel de Mayotte ainsi que les naturalistes et gestionnaires d’aires protégées mahorais seront associés à la révision du schéma d’aménagement régional, rendue nécessaire par le passage du cyclone Chido.
La parole est à M. Saïd Omar Oili.
M. Saïd Omar Oili. L’identification des zones à bâtir nécessite une révision du schéma d’aménagement régional (SAR), qui vise à structurer l’aménagement du territoire en prenant en compte divers enjeux, notamment environnementaux.
Nous proposons que le conseil scientifique du patrimoine naturel de Mayotte et les naturalistes et gestionnaires d’aires protégées mahorais soient associés à la révision du SAR.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Bitz, rapporteur. Cet amendement vise à imposer des avis supplémentaires sur la démarche engagée par l’État. Comme nous l’avons déjà exposé, la commission est opposée à tout ce qui s’apparente à l’ajout de consultations obligatoires, qui viendraient entraver ou ralentir la reconstruction de Mayotte.
On ne peut pas, d’un côté, fustiger la lenteur de l’action de l’État et, de l’autre, imposer des consultations obligatoires qui risquent de la ralentir. Je sais que tel n’est pas votre objectif, mon cher collègue, mais c’est le résultat auquel nous risquons de parvenir en multipliant les consultations.
L’avis est défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L’amendement n° 136, présenté par M. Omar Oili, Mmes Artigalas, Narassiguin et Le Houerou, MM. Lurel, Kanner et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Rapport annexé, alinéa 196
Compléter cet alinéa par les mots et une phrase ainsi rédigés :
et mis en œuvre à partir du 1er janvier 2026. Ce plan d’action indiquera précisément les moyens supplémentaires mis à disposition par l’État et dédiés à cette régularisation.
La parole est à M. Saïd Omar Oili.
M. Saïd Omar Oili. Sur la question foncière, plusieurs dispositifs doivent concourir à mieux mobiliser le foncier : création d’un nouvel établissement public dans le prolongement de la loi d’urgence pour Mayotte ; politique volontariste de titrisation ; meilleure identification des zones à bâtir.
Dans le rapport annexé, l’État s’engage également sur la régularisation du cadastre, qui fera l’objet d’un plan d’action spécifique construit entre l’État et les collectivités territoriales.
La question du foncier est essentielle. Sans moyen supplémentaire et sans objectif précis, on peut craindre que les mesures proposées ne restent cosmétiques au regard de l’enjeu.
Nous proposons ainsi que le plan d’action défini par le Gouvernement pour la régularisation du cadastre précise les moyens concrets supplémentaires qui seront affectés à cette régularisation et que soit prévue une mise en œuvre de ce plan à partir du 1er janvier 2026.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Bitz, rapporteur. Le rapport annexé contient déjà un plan d’action de régularisation du cadastre. En cohérence avec notre position générale sur le rapport annexé, nous ne souhaitons pas ajouter des éléments à la feuille de route du Gouvernement.
L’avis est défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L’amendement n° 125, présenté par M. Omar Oili, Mmes Artigalas, Narassiguin et Le Houerou, M. Lurel, Mme G. Jourda, M. Kanner et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Rapport annexé
I. - Alinéa 204
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
La sortie du tout-enfouissement doit poursuivre un objectif de réduction de 0 % de déchets traités par enfouissement à Mayotte à l’horizon 2031.
II. – Après l’alinéa 208
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
Un calendrier des investissements traduisant la trajectoire de ce rattrapage structurel sera transmis avant le 31 décembre 2025 au comité de suivi de la loi de programmation pour la refondation de Mayotte.
III. – Alinéa 209
Compléter cet alinéa par les mots :
et transmettra une étude de faisabilité au comité de suivi avant le 31 décembre 2025.
IV. – Alinéa 210
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Un calendrier des investissements sera transmis au comité de suivi avant le 31 décembre 2025.
La parole est à M. Saïd Omar Oili.
M. Saïd Omar Oili. Mayotte affiche un taux d’enfouissement des déchets de pratiquement 100 %, contre 15 % au niveau national. Le rapport sénatorial de décembre 2022 sur la gestion des déchets dans les outre-mer signalait déjà que la cote d’alerte était atteinte, le territoire se trouvant face à une double urgence, environnementale et sanitaire.
L’État doit donc débloquer des moyens supplémentaires pour mener rapidement le plan structurel de rattrapage selon un calendrier ambitieux.
C’est la raison pour laquelle nous proposons que les engagements de l’État en matière d’objectifs, d’investissements et de calendrier soient précisés d’ici à la fin de l’année et transmis au comité de suivi prévu par le présent projet de loi.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Bitz, rapporteur. Il s’agit, par cet amendement, d’imposer encore la production de rapports et de documents supplémentaires. Nous y sommes, par principe, hostiles et nous considérons que le comité de suivi, mis en place d’ailleurs sur votre initiative, doit pouvoir jouer son rôle en organisant lui-même son travail.
L’avis est défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État. Même avis, mais je souhaite apporter quelques précisions.
La gestion des conséquences de cette catastrophe de Chido doit être l’occasion d’améliorer la gestion des déchets sur l’île. Dans ce contexte, le Gouvernement prévoit de contribuer aux investissements nécessaires en matière de gestion des déchets, à hauteur de 7 millions d’euros d’ici à 2029, puis pour un montant supérieur au-delà, le temps que les projets se précisent. Ces crédits contribueront au rattrapage structurel et – on peut l’imaginer – au développement de l’économie circulaire.
Honnêtement, prévoir un objectif zéro déchet enfoui à Mayotte en 2031 n’est pas, de mon point de vue, réaliste, car il y aura toujours des déchets ultimes à mettre en décharge, que ce soit des refus de tri non valorisables issus des opérations de tri et de recyclage ou des résidus issus des traitements thermiques des déchets.
Il me paraît donc primordial, sur ce sujet comme sur d’autres, de nous concentrer sur des objectifs atteignables, réalistes, avec des projets adaptés aux contraintes de Mayotte.
Mme la présidente. L’amendement n° 62, présenté par Mmes Guhl et M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Rapport annexé, après l’alinéa 210
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
Le ramassage et la valorisation des déchets seront renforcés et encadrés par des mesures réglementaires pour assurer un service public fiable, même en période de crise, et répondre aux enjeux sanitaires et écologiques du territoire.
Une analyse environnementale sera systématiquement menée préalablement au choix des sites d’entreposage des déchets afin d’éviter les installations en bordure d’écosystèmes sensibles.
La parole est à Mme Mélanie Vogel.
Mme Mélanie Vogel. Cet amendement vise à compléter les dispositions du rapport annexé relatives à la politique de gestion durable des déchets.
À Mayotte, la gestion des déchets est structurellement défaillante et ne garantit pas la salubrité publique. Les déchets du bâtiment, notamment les tôles métalliques, sont très peu valorisés, ce qui donne lieu à de nombreux dépôts sauvages et à une pollution accrue des sols et des eaux.
La gestion des déchets végétaux est également mal encadrée. Leur enlèvement systématique nuit à la biodiversité, à la stabilisation des sols et au cycle naturel du compostage. Des sites de stockage sont installés sur des pentes proches d’écosystèmes fragiles, ce qui augmente les risques de contamination et d’érosion en cas de fortes pluies.
Des mesures concrètes doivent donc être prises : interdire le brûlage de déchets hors dispositif strictement encadré ; développer la valorisation des déchets du bâtiment, en particulier le recyclage des matériaux métalliques ; enfin, promouvoir une gestion écologique des déchets végétaux, notamment après le passage du cyclone, ce qui implique leur valorisation sur site plutôt que leur évacuation systématique.
Enfin, les événements climatiques récents ont fragilisé les milieux naturels. Il faut donc renforcer la protection des cours d’eau, gérer les eaux stagnantes et prévenir les pollutions. Ces actions sont essentielles pour garantir la qualité de l’eau potable et réduire les risques sanitaires.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Bitz, rapporteur. La gestion des déchets à Mayotte est à l’évidence un enjeu majeur. Elle constitue d’ailleurs un axe important du rapport annexé. Cependant, l’intérêt des mesures proposées par rapport à ce qui figure déjà dans le rapport ne nous paraît pas absolument évident.
En outre, le dispositif prévu dans l’amendement consiste notamment en un encadrement réglementaire du ramassage et de la valorisation des déchets. Or nous ne saurions, par le biais du rapport annexé à la loi, obliger le Gouvernement à prendre des mesures d’ordre réglementaire.
L’avis de la commission est donc défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L’amendement n° 129, présenté par M. Omar Oili, Mmes Artigalas, Narassiguin et Le Houerou, MM. Lurel, Kanner et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Rapport annexé, après l’alinéa 211
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
À titre dérogatoire compte tenu du nombre d’habitants concernés, et pour une durée de 5 ans, le Gouvernement s’engage à prévoir, dans le cadre des lois de finances, que le syndicat mixte de collecte et traitement des déchets ménagers de Mayotte est éligible à la dotation d’équipement des territoires ruraux ; il s’engage à rendre également éligible le syndicat mixte à la dotation de soutien à l’investissement local ainsi qu’au fonds vert.
La parole est à M. Saïd Omar Oili.
M. Saïd Omar Oili. Pour soutenir les investissements nécessaires et engager un plan massif de rattrapage des équipements sur de nouvelles bases, nous proposons par cet amendement que le syndicat intercommunal d’élimination et de valorisation des déchets de Mayotte soit éligible à la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR), à la dotation de soutien à l’investissement local (DSIL) et au fonds vert pendant les cinq prochaines années.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Bitz, rapporteur. Il est défavorable : il ne nous semble pas pertinent de définir dans un rapport annexé, sans valeur législative, les critères d’éligibilité à diverses aides d’État.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L’amendement n° 128, présenté par M. Omar Oili, Mmes Le Houerou, Artigalas et Narassiguin, MM. Lurel, Kanner et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Rapport annexé, après l’alinéa 227
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
L’État s’engage à faire de l’orientation des jeunes vers l’emploi une priorité et à favoriser les dispositifs d’insertion professionnelle et sociale des jeunes à Mayotte. Dans ce cadre, et à partir du 1er janvier 2026, les moyens de la mission locale seront adaptés proportionnellement aux jeunes à accompagner et aux difficultés du territoire.
La parole est à M. Saïd Omar Oili.
M. Saïd Omar Oili. L’âge moyen de la population à Mayotte est de 23 ans. On y décompte 25 000 jeunes qui ne sont ni en formation, ni en emploi, ni scolarisés. En outre, 13 000 jeunes sont inscrits sur la base de données de la mission locale.
Compte tenu de la dynamique démographique, l’accompagnement et l’insertion des jeunes doivent être une priorité. Pourtant, l’orientation des jeunes vers l’emploi est sous-dotée à Mayotte.
Nous proposons donc, par cet amendement, qu’à partir du 1er janvier 2026 les moyens de la mission locale soient proportionnellement adaptés aux jeunes à accompagner et aux difficultés du territoire.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Il est défavorable, et ce pour deux raisons.
L’adoption de cette proposition entraînerait une dépense supplémentaire. Or, conformément à la philosophie qui nous inspire cet après-midi durant l’examen du rapport annexé, nous ne souhaitons pas faire figurer dans ce document de dépenses supplémentaires de l’État à Mayotte.
Par ailleurs, j’étais encore assez récemment présidente d’une mission locale. J’ai échangé avec notre ancien collègue Thani Mohamed Soilihi sur l’intérêt de développer la mission locale de Mayotte, en lien avec l’Union nationale des missions locales (UNML). Il est apparu plus opportun d’aider cette mission locale à se structurer et à répondre aux projets, afin de développer l’offre d’orientation et de formation pour l’accès des jeunes à l’emploi.
Mon cher collègue, je sais que l’UNML est en contact avec la mission locale de Mayotte et qu’elle est prête à l’accompagner pour qu’une réponse structurée permette d’offrir une orientation effective aux nombreux jeunes de votre territoire.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L’amendement n° 127, présenté par M. Omar Oili, Mmes Artigalas, Narassiguin et Le Houerou, MM. Lurel, Kanner et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Rapport annexé, après l’alinéa 211
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
Le déploiement de la consigne de bouteilles en plastique sera mis en place à Mayotte à l’horizon 2027 avec un accompagnement financier des dispositifs de gratification.
La parole est à M. Saïd Omar Oili.
M. Saïd Omar Oili. La prolifération des déchets plastiques atteint des niveaux alarmants. À la suite de la crise de l’eau de 2023, qui a nécessité une vaste opération de distribution de bouteilles d’eau en plastique, puis du passage du cyclone Chido, une quantité inédite de déchets s’est accumulée sur l’île, rendant plus urgente que jamais une gestion durable des plastiques.
Nous proposons donc par cet amendement la mise en place, d’ici à 2027, d’une consigne des bouteilles en plastique, avec un accompagnement financier des dispositifs de gratification.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Mon cher collègue, vous voulez déployer à Mayotte la consigne des bouteilles en plastique et la doter d’un accompagnement financier.
Je rappelle tout d’abord que la commission est défavorable à tous les amendements à ce rapport annexé tendant à créer de nouvelles mesures non financées. En outre, n’oublions pas que l’on avait essayé de développer la consigne des bouteilles sur le territoire métropolitain et qu’elle avait été abandonnée pour des raisons de faisabilité. Nous voyons donc mal pourquoi il conviendrait de le faire à Mayotte.
L’avis est donc défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L’amendement n° 126, présenté par M. Omar Oili, Mmes Artigalas, Narassiguin et Le Houerou, MM. Lurel, Kanner et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Rapport annexé
I. – Alinéa 212
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
L’objectif est donc de réduire les importations d’énergies fossiles de 50 % à l’horizon 2035.
II. – Alinéa 214
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Un calendrier du développement du photovoltaïque à Mayotte à l’horizon 2031 doit avoir été réalisé au plus tard le 31 décembre 2025 et transmis au comité de suivi de la loi de programmation pour la refondation de Mayotte.
La parole est à M. Saïd Omar Oili.
M. Saïd Omar Oili. La transition énergétique nécessite une transformation structurelle du système énergétique de l’île en faveur d’une production locale plus décarbonée et adaptée aux spécificités de Mayotte.
Nous proposons donc d’inscrire dans le rapport annexé un objectif de réduction de 50 % des importations d’énergies fossiles à l’horizon 2035.
Par ailleurs, compte tenu de l’importance du développement du photovoltaïque pour augmenter la part des énergies renouvelables dans le mix énergétique, nous demandons également qu’un calendrier de déploiement du photovoltaïque à l’horizon 2031 soit transmis au comité de suivi prévu dans le projet de loi au plus tard le 31 décembre 2025.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Mon cher collègue, votre objectif est louable et nous y souscrivons. Néanmoins, conformément à notre philosophie sur ce rapport annexé, notre avis ne peut être que défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État. J’ajouterai simplement à l’argument de Mme la rapporteure que, aussi louables que soient les propositions inscrites dans cet amendement, les objectifs de la programmation pluriannuelle de l’énergie de Mayotte viennent d’être revus et ont été approuvés par le conseil départemental. J’estime donc que ce texte n’est pas le véhicule le plus pertinent pour avancer en la matière.
Je vous invite donc, monsieur le sénateur, à retirer votre amendement ; à défaut, l’avis du Gouvernement sera défavorable.
Mme la présidente. L’amendement n° 130, présenté par M. Omar Oili, Mmes Artigalas, Narassiguin et Le Houerou, MM. Lurel, Kanner et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Rapport annexé, alinéa 245
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
S’agissant du projet de piste longue à Mayotte, l’État reprendra sans délai la concertation préalable menée par la Commission nationale du débat public et constituera un comité de suivi du projet.
La parole est à M. Saïd Omar Oili.
M. Saïd Omar Oili. L’éventuelle réalisation d’une piste longue à Mayotte fait l’objet d’un débat récurrent depuis la fin des années 1980 et a suscité de nombreuses études. L’objectif principal de ce projet est d’adapter l’infrastructure aéroportuaire de l’île aux vols long-courriers, afin de renforcer la continuité territoriale et de répondre aux besoins croissants de mobilité des Mahorais.
La Commission nationale du débat public (CNDP) a été saisie ; elle a lancé une concertation permettant la réalisation d’études complémentaires sur l’implantation possible d’une piste longue. Un premier rapport a été publié en 2022 ; un second rapport, paru en 2024, compare les deux sites possibles, l’un en Petite-Terre et l’autre en Grande-Terre. Toutefois, ce second rapport indique que la concertation n’apporte pas tous les éléments nécessaires à une prise de décision éclairée, et relève qu’aucune donnée scientifique sur les risques liés au volcan Fani Maoré n’a été intégrée à la concertation.
Aussi, par cet amendement, demandons-nous la reprise d’une concertation régulière et préalable, menée par la CNDP, et la constitution d’un comité de suivi du projet.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Bitz, rapporteur. La commission considère qu’il ne nous appartient pas de nous prononcer sur les modalités de la concertation.
En revanche, nous nous réjouissons d’avoir pris connaissance, lors de l’audition de M. le ministre d’État par la commission, de la prochaine réunion du comité de pilotage de l’aéroport, ainsi que de la transmission des études de la direction générale de l’aviation civile (DGAC).
L’avis est donc défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État. Mesdames, messieurs les sénateurs, le projet de piste longue est très attendu depuis de nombreuses années.
Le Gouvernement vous proposera, par son amendement n° 158 après l’article 19, de poursuivre, en accord avec la CNDP, la concertation postérieure au débat public sous la forme d’une consultation spécifique du public.
Cela comportera notamment la mise à disposition du public d’un dossier comportant tous les éléments relatifs aux objectifs et aux caractéristiques principales du projet, mais surtout une présentation des solutions alternatives envisagées et leur évaluation selon une série de critères. La consultation se déroulera par voie électronique, mais aussi via la mise à disposition de dossiers imprimés dans les locaux de la préfecture, ainsi que dans les espaces France Services et les mairies des communes d’implantation du projet.
Cette consultation se veut rapide, afin de répondre aux attentes de la population et des élus mahorais vis-à-vis du projet de piste longue, mais également complète. Elle se déroulera pendant un mois et aura pour garante la CNDP. L’ambition est de permettre in fine une décision, elle aussi rapide, sur les suites à donner au projet.
Par ailleurs, comme M. le rapporteur vient de le rappeler, le comité de pilotage, conduit par le préfet, est réactivé. Ses réunions devront se dérouler en téléconférence pour que les sénateurs, notamment, puissent y participer. La prochaine réunion est programmée le 28 mai.
C’est pourquoi je vous demande, monsieur le sénateur, de retirer votre amendement ; à défaut, l’avis serait défavorable.
Mme la présidente. La parole est à M. Saïd Omar Oili, pour explication de vote.
M. Saïd Omar Oili. Il y a quelque chose que je ne comprends pas. D’un côté, j’ai reçu un courrier du ministre des transports annonçant que la concertation avec l’ensemble des partenaires reprendrait en septembre prochain. De l’autre, vous dites que la concertation va reprendre tout de suite. Il faudrait qu’à un moment donné on nous dise la vérité ! Je crois volontiers le ministre des transports, mais voilà que vous dites quelque chose de totalement différent.
Nous avons délibéré la semaine dernière, dans cet hémicycle, d’une proposition de loi relative au projet d’autoroute A69. Si l’on ne tient pas compte de ce que nous décidons ici, il y a un problème. Une réglementation existe en matière de grands projets, et cette réglementation doit être respectée de bout en bout : il faut mener à leur terme les concertations nécessaires. Ainsi seulement, lorsque nous déciderons de l’implantation de la piste longue, que ce soit en Petite-Terre ou en Grande-Terre, nous aurons toute l’assurance juridique que nous avons fait ce qu’il fallait, et l’on ne pourra pas remettre en cause ce projet nécessaire pour le territoire.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre d’État.
M. Manuel Valls, ministre d’État. Monsieur le sénateur, il serait difficile d’être plus transparent en la matière ! Vous connaissez la blague de Coluche…
Cela fait des mois, sinon des années, que le débat dure, et de nombreux élus ont demandé au Gouvernement de prendre ses responsabilités. Nous savions qu’en le faisant nous allions provoquer un débat et faire des mécontents ; c’est normal ! Pour autant, le président de la République a pris ses responsabilités, par l’annonce que vous connaissez.
Nous disposons de nombreuses études ; il faut les verser au débat public pour que chacun puisse avoir une idée précise des choix qui sont faits. Le comité de pilotage va se réunir.
Je tiens à préciser que, dans son courrier, le ministre des transports fait sans doute allusion à la fin de la concertation. Vous ne parviendrez pas à nous opposer sur ce sujet ! Vous avez bien raison de croire M. Tabarot, mais je vous invite à me faire aussi toute confiance.
Il y aura le comité de pilotage, la fin du débat public, et la concertation sera menée dans les termes que j’ai exposés à l’instant. Ainsi, du point de vue de la réglementation, nous aurons tous les outils pour avancer. On verra bien ensuite ce qui adviendra, mais les choix sont faits.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 130.
(L’amendement n’est pas adopté.)
(Mme Sylvie Robert remplace Mme Sylvie Vermeillet au fauteuil de la présidence.)
PRÉSIDENCE DE Mme Sylvie Robert
vice-présidente
Mme la présidente. L’amendement n° 159, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rapport annexé
I. – Alinéa 278
Rédiger ainsi cet alinéa :
La desserte aérienne internationale de Mayotte sera garantie par la construction d’un nouvel aéroport dont l’implantation est envisagée sur Grande Terre. Il devra s’inscrire dans le cadre d’une plateforme logistique avec le port de Longoni.
II. – Alinéa 280
Rédiger ainsi cet alinéa :
La décision actant après concertation les principes relatifs au nouvel aéroport de Mayotte doit être prise en 2025, la déclaration d’utilité publique en 2026.
La parole est à M. le ministre d’État.
M. Manuel Valls, ministre d’État. Je reviens, à l’occasion de cet amendement, sur la piste longue tant attendue.
Nous convenons tous que celle-ci est nécessaire pour garantir la desserte internationale continue de Mayotte, au vu des risques auquel est soumis l’aéroport actuel, exposé qu’il est à des aléas majeurs susceptibles de remettre en cause son exploitabilité à court et moyen termes. C’est le fait de la montée des eaux, due au changement climatique, mais aussi de la subsidence de l’île liée à l’activité sismo-volcanique que nous avons évoquée tout à l’heure.
Le Gouvernement vous présentera, sur ce texte, trois amendements visant à traduire et accompagner cette priorité ; leur adoption permettra d’accélérer les choses et de commencer les travaux deux ans plus tôt qu’avec une procédure classique.
Le premier de ces amendements, celui-ci, vise à mettre en cohérence le rapport annexé avec cette ambition, en y inscrivant un choix préférentiel pour le site d’implantation de la piste longue, mais surtout en définissant un calendrier ambitieux : la prise de décision actant les principes relatifs au nouvel aéroport devra être prise en 2025 et la déclaration d’utilité publique (DUP) en 2026.
Comme je viens de le préciser en réponse à M. le sénateur Saïd Omar Oili, le Gouvernement a la volonté d’accélérer le processus de réalisation d’une piste longue à Mayotte à l’issue de la consultation publique qui sera mise en place dans le cadre de la poursuite de la concertation postérieure au débat public. Le prochain comité de pilotage se réunira le 28 mai prochain, avec des élus. Le dispositif de débat public qui sera défini dans ce texte se déroulera en septembre ; c’est la consultation du public à laquelle faisait référence le ministre des transports, comme je vous l’ai précisé à l’instant, monsieur le sénateur.
Je l’ai indiqué hier, il faudra par ailleurs que la mise en œuvre de ce chantier s’accompagne d’une réflexion et d’un projet relatifs à l’attractivité de Petite-Terre, dont je ne doute pas qu’elle dispose de nombreux atouts pour envisager l’avenir sans l’aéroport actuel.
Deux mesures d’accélération vous seront par ailleurs soumises par des amendements portant article additionnel après l’article 19, en vue de permettre un déroulement efficace de la consultation du public, mais aussi de mettre en place une procédure permettant l’acquisition rapide des terrains.
Je vous propose donc d’adopter cet amendement afin de tenir compte de la nécessité d’accélérer les choses que je viens d’exposer.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Bitz, rapporteur. La commission a émis un avis favorable sur cet amendement.
Nous nous satisfaisons de voir ce projet très attendu recevoir, enfin, une perspective de réalisation dans un délai à peu près raisonnable, alors qu’il a suscité beaucoup de réflexions et de débats. Le Gouvernement précise sa feuille de route ; nous nous en félicitons, d’autant que les dispositions proposées permettront d’accélérer la réalisation concrète de cet équipement dont Mayotte a tant besoin.
Mme la présidente. La parole est à Mme Salama Ramia, pour explication de vote.
Mme Salama Ramia. Monsieur le ministre, je voudrais comprendre votre logique. Vous le savez, les Mahorais ont attendu vingt ans – vingt ans d’études du projet de piste longue en Petite-Terre. Je me félicite de vous entendre annoncer aujourd’hui que le comité de pilotage, qui n’a pas été réuni depuis 2022, va être remis en place, ce qui permettra un échange avec les élus. Mais je veux rappeler que le conseil départemental a adopté une délibération par laquelle il demande que le site de Petite-Terre soit considéré en priorité.
Je souhaite donc souligner que, pour que ce projet puisse aller de l’avant dans un esprit d’apaisement, avec la population et les élus, il aurait fallu tenir compte de la nécessité de mener d’abord des discussions, d’entendre ensemble tous les arguments, afin que le choix qui sera fait soit soutenu par toute la population et les élus du territoire.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre d’État.
M. Manuel Valls, ministre d’État. Madame la sénatrice, cela fait vingt ans que l’on traite de ce sujet ! J’ai déjà eu à m’y intéresser quand j’étais Premier ministre. Or, quand j’interrogeais les élus mahorais, honnêtement, il y avait autant d’avis que d’élus ! Voulez-vous que je vous expose les débats que j’ai eus avec les conseillers départementaux sur ce sujet ? Personne ne voulait prendre ses responsabilités !
Dès lors, dans ce cadre, au vu de la crise que nous connaissons, tout en ayant le respect qui s’impose pour chaque opinion et en entendant l’ensemble des avis, grâce au comité de pilotage et au débat public que j’ai évoqué, nous prenons nos responsabilités.
C’est ce qu’a fait le chef de l’État. Il avait déjà relevé la nécessité, dont nous convenons tous, à l’évidence, de préserver le projet de piste longue ; c’est très important pour Mayotte, pour maintenir le lien entre ce territoire et son environnement régional, mais aussi, bien sûr, avec l’Hexagone.
Nous prenons nos responsabilités, dès l’article 1er de ce projet de loi, en inscrivant dans le rapport annexé les perspectives de développement et d’investissement. En agissant ainsi, le Gouvernement n’entend pas empêcher les débats, qui vont se poursuivre, mais prend ses responsabilités et traduit, en toute transparence, ce qui a été annoncé aux Mahorais.
Vous connaissez parfaitement, madame la sénatrice – bien mieux que moi, je n’en doute pas –, la capacité de réflexion et de débat de tous les élus, et en particulier des élus mahorais. Le débat continuera, quoi qu’il en soit, et il continuera peut-être même après la livraison de l’aéroport… Mais le moment est venu pour l’État de prendre des décisions et de les assumer, sur le port comme sur l’aéroport ; c’est son rôle, et on le mettait en cause depuis des années parce qu’il ne le faisait pas.
Le projet en question participe de notre volonté – nous pouvons tous la partager, me semble-t-il – de doter Mayotte d’un port qui soit à la hauteur de ce que ce territoire mérite, en lien étroit avec un aéroport consolidé. Des infrastructures devront, bien entendu, être réalisées pour lier le nouvel aéroport à la capitale, Mamoudzou, et des éléments de compensation pour Petite-Terre devront faire l’objet de discussions.
Je le redis, le débat va continuer, il aura lieu aussi, je n’en doute pas, à l’Assemblée nationale, mais il fallait décider : nous assumons nos responsabilités et le choix que nous avons fait.
Mme la présidente. La parole est à M. Saïd Omar Oili, pour explication de vote.
M. Saïd Omar Oili. Monsieur le ministre, je ne peux pas accepter vos propos ; je m’inscris en faux contre votre affirmation selon laquelle les élus mahorais n’auraient pas pris leurs responsabilités !
Lorsque vous êtes venu à Mayotte, vous avez dit à la population et aux élus du territoire de prendre leurs responsabilités sur la piste longue. C’est l’une des raisons pour lesquelles le conseil départemental s’est réuni et a voté à l’unanimité pour que cette piste soit en Petite-Terre.
C’est pourquoi, quand vous dites que nous n’avons pas pris nos responsabilités, je ne comprends pas ce que vous entendez par là. On répète à longueur de temps qu’il faut écouter les élus locaux, qui connaissent leur territoire mieux que quiconque, et voilà que, quand nous prenons nos responsabilités, on nous dit que nous ne l’avons pas fait ! J’y insiste, je ne vois vraiment pas ce que vous entendez par « responsabilités », monsieur le ministre. Et pour ce qui est des élus mahorais, nous savons prendre nos responsabilités quand on nous demande de le faire.
Mme la présidente. La parole est à Mme Micheline Jacques, pour explication de vote.
Mme Micheline Jacques. Je ne voudrais pas prolonger le débat inutilement, mais je veux simplement faire part de l’avis, strictement personnel, auquel je suis parvenue après avoir rencontré un certain nombre de spécialistes.
En toute objectivité, sans prendre parti, ce problème de piste est lié avant tout à un phénomène volcanique. Or les scientifiques sont actuellement dans l’incapacité de dire avec certitude ce qui pourra se produire à l’avenir. Ils ont décelé des points chauds à 1 500 mètres sous le niveau de la mer, mais il leur manque 5 millions d’euros – ce n’est pas une somme faramineuse ! – pour poser des capteurs sous-marins de manière à étudier au plus près l’activité volcanique du secteur, comme cela se fait dans d’autres territoires, à La Réunion, la Martinique et la Guadeloupe.
Il faudrait donc peut-être, à mon sens, investiguer davantage avant de voir ce qu’il est possible de faire. Je ne suis pas une spécialiste et je ne suis pas là pour donner des leçons à qui que ce soit, mais il me semble opportun d’agir avec un peu plus de pragmatisme. Ainsi, on pourrait déterminer s’il est plus judicieux de maintenir, en les consolidant, les infrastructures existantes plutôt que de déployer des infrastructures nouvelles.
En effet, si l’on construit une nouvelle piste ailleurs, il faudra aussi bâtir toutes les infrastructures afférentes du nouvel aéroport, ce qui, sur un territoire de 375 kilomètres carrés, pourrait poser des problématiques de nourriture, puisqu’il faudrait le faire sur des espaces agricoles. On aurait donc de nouveaux problèmes sur le dos…
J’appelle donc à la vigilance, quand bien même ce n’est que mon avis personnel, qui n’engage que moi ; comme vous l’avez dit, chacun prend ses responsabilités.
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 155 rectifié bis, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rapport annexé
I. – Alinéa 284
Remplacer cet alinéa par quinze alinéas ainsi rédigés :
Thème |
Crédits en soutien aux collectivités territoriales au titre de la reconstruction |
Phases |
2025-2027 |
Autorisations d’engagement (M€) |
300 |
TOTAL (M€) |
300 |
Thème |
Eau et assainissement |
|
Phases |
2025-2027 |
2028-2031 |
Actions |
Ajustement des investissements du volet 1 et mise en œuvre des volets 2 et 3 du Plan Eau Mayotte |
Contrat de progrès eau et assainissement |
Autorisations d’engagement (M€) |
350 |
380 |
TOTAL (M€) |
730 |
Thème |
Santé |
|||
Phases |
2025-2027 |
2028-2030 |
||
Actions |
Travaux au Centre Hospitalier de Mayotte |
122 |
Poursuite des travaux d’extension du centre hospitalier de Mamoudzou |
122 |
Planification d’un deuxième site hospitalier à Combani |
10 |
Construction d’un deuxième site hospitalier à Combani |
153 |
|
Autorisations d’engagement (M€) |
132 |
275 |
||
TOTAL (M€) |
407 |
Thème |
Lutte contre l’immigration clandestine |
Phases |
2025-2027 |
Actions |
Renforcement des capacités de détection, reconnaissance et d’interception par voies maritime et aérienne |
Autorisations d’engagement (M€) |
52 |
Thème |
Système judiciaire et carcéral |
|||
Phases |
2025-2027 |
2028-2031 |
||
Actions |
Études relatives à la construction d’un deuxième établissement pénitentiaire |
2 |
Réalisation d’un deuxième établissement pénitentiaire |
290 |
Réalisation d’une cité judiciaire |
124 |
|||
|
Réalisation d’un centre éducatif fermé |
14 |
||
Autorisations d’engagement (M€) |
2 |
428 |
||
TOTAL (M€) |
430 |
Thème |
Construction d’établissements scolaires |
Phases |
2025-2029 |
Actions |
Poursuite de la construction de nouvelles salles de classes, la rénovation des écoles dégradées et le développement de la restauration collective |
Autorisations d’engagement (M€) |
400 |
Thème |
Université de Mayotte |
Phases |
2025-2029 |
Actions et autorisations d’engagement (M€) |
Reconstruction et extension de l’université |
TOTAL (M€) |
17,7 |
Thème |
Culture et sport |
Phases |
2025-2029 |
Actions et autorisations d’engagement (M€) |
Accompagnement de la réhabilitation d’équipements Protection du patrimoine et développement des infrastructures culturelles Développement des infrastructures sportives |
Autorisations d’engagement (M€) |
17 |
Thème |
Logement |
Phases |
2025-2029 |
Actions |
Soutien à la construction de logements et d’aménagements, y compris opérations de résorption de l’habitat insalubre |
Autorisations d’engagement (M€) |
200 |
Thème |
Aéroport |
Phases |
À compter de la déclaration d’utilité publique (2026) |
Actions |
Réalisation d’une piste longue en Grande Terre afin de garantir la desserte internationale de Mayotte |
Autorisations d’engagement (Md€) |
1,2 |
Thème |
Transports terrestres et maritimes |
Phases |
2025-2029 |
Actions et autorisations d’engagement (M€) |
Fluidification de la circulation Développement des mobilités alternatives Remise à niveau du réseau routier national |
TOTAL (M€) |
104 |
Thème |
Environnement |
Phases |
2025-2029 |
Actions et autorisations d’engagement (M€) |
Maîtrise des risques Évaluation et suivi de l’impact de Chido sur la biodiversité Aménagement durable du littoral |
Autorisations d’engagement (M€) |
17,4 |
Thème |
Agriculture et pêche |
Phases |
2025-2029 |
Actions et autorisations d’engagement (M€) |
Déclinaison du Plan stratégique national 2023-2027 Réalisation d’équipements au profit de la pêche professionnelle |
|
|
Autorisations d’engagement (M€) |
12 |
Thème |
Déchets |
Phases |
2025-2029 |
Actions |
Accompagnement du rattrapage structurel et développement de l’économie circulaire |
Autorisations d’engagement (M€) |
6,9 |
Thème |
Déploiement de la fibre |
Phases |
2025-2029 |
Actions |
Déploiement du réseau de fibre optique sur l’ensemble du territoire |
Autorisations d’engagement (M€) |
50 |
II. – Alinéa 286, première phrase
Après le mot :
compétents,
insérer le mot :
par
La parole est à M. le ministre d’État.
M. Manuel Valls, ministre d’État. Pardonnez-moi, madame la présidente, mais je crains que la Haute Assemblée, lors du vote qui vient d’intervenir sur l’amendement n° 159 du Gouvernement, ait mal compris l’avis de la commission…
Mme la présidente. Je suis désolée, monsieur le ministre d’État, mais le vote était net et sans appel.
M. Manuel Valls, ministre d’État. L’amendement que je vous présente maintenant, je l’avais évoqué hier dans la discussion générale et il avait été promis, tant aux élus mahorais, dès le stade de la concertation, qu’à vos rapporteurs et à vous tous lors de mon audition par la commission des lois la semaine dernière. Le Gouvernement tient donc sa parole en vous le soumettant.
L’objet de cet amendement est de remplacer le tableau de programmation financière qui figure dans le rapport annexé par un autre ou, pour le dire précisément, par plusieurs autres, beaucoup plus précis et complets, que je veux décrire de manière relativement détaillée.
Les crédits que nous proposons de faire figurer dans le rapport sont en partie issus des priorités du contrat de convergence et de transformation signé avec le département de Mayotte en 2024, ainsi que de différents plans d’action, ministériels ou interministériels, à l’instar du plan Eau Mayotte, que nous avons déjà évoqué. Ainsi, on sanctuarise des crédits qui ne figurent pas aujourd’hui dans le texte, tout en en ajoutant de nouveaux.
Le nouveau tableau comporterait également un abondement de l’enveloppe d’amorçage destinée aux collectivités : elle serait portée à 300 millions d’euros pour la période 2025-2027.
Au total, ce nouveau tableau de crédits représente un montant de près de 4 milliards d’euros. Cette somme viendra soutenir la réalisation d’un certain nombre de projets essentiels pour le territoire.
Cela concerne notamment, en matière d’eau et d’assainissement, les engagements pris dans le cadre du plan Eau Mayotte pour la réalisation de l’usine de dessalement d’Ironi Bé et de la troisième retenue collinaire, la poursuite des campagnes de forage et des travaux d’assainissement, et l’animation de l’assainissement non collectif.
Dans le domaine sanitaire, que j’ai également déjà évoqué, les travaux au centre hospitalier de Mayotte conduiront en particulier à la réalisation de bâtiments de consultation et de psychiatrie et de six salles de blocs opératoires modulaires. La réalisation d’un deuxième site hospitalier à Combani est également concernée par ces crédits.
Pour ce qui concerne la lutte contre l’immigration clandestine, la montée en gamme des capacités de détection, de reconnaissance et d’interception par voie maritime et aérienne sera conduite sur la base de l’étude technico-opérationnelle, déjà évoquée, réalisée par la direction des entreprises et partenariats de sécurité et des armes (Depsa).
Le système judiciaire et carcéral sera renforcé par la réalisation d’infrastructures nouvelles, telles qu’un deuxième établissement pénitentiaire, une cité judiciaire et un centre éducatif fermé.
L’effort relatif à la construction d’établissements scolaires sera poursuivi, tant pour le premier degré que pour les collèges et les lycées. Il portera sur la construction d’établissements et de nouvelles salles de classe, mais également sur le renforcement des capacités de lits en internat et de fabrication de repas. Concernant l’enseignement supérieur, la reconstruction et l’extension des universités seront soutenues. Le développement des infrastructures sportives, par exemple des gymnases, sera également accompagné.
L’engagement financier de l’État en matière culturelle, point qui me tient particulièrement à cœur, permettra d’accompagner la réhabilitation de sites et équipements tels que le musée de Mayotte ou la résidence des gouverneurs, mais soutiendra aussi la réalisation d’infrastructures nouvelles, à l’instar des projets de centre culturel dans le nord et en Petite-Terre. Les crédits mobilisés contribueront également à la protection du patrimoine.
En matière de logement, l’effort continuera d’être porté sur la construction de nouveaux logements, l’aménagement des zones d’aménagement concerté (ZAC) et la résorption de l’habitat insalubre.
Nous avons déjà parlé de la construction du nouvel aéroport : je n’aborde pas davantage le sujet.
La fluidification de la circulation impliquera la réalisation d’un certain nombre de projets routiers : pôles d’échanges multimodaux, voies de contournement, liaisons intervillages et voies d’accès aux ouvrages publics.
L’État accompagnera également le développement des mobilités alternatives : le réseau Caribus, dont une partie vient d’être inaugurée, les pistes cyclables et les navettes maritimes. Il accompagnera aussi la remise à niveau du réseau routier national.
Des crédits sont également prévus dans le domaine environnemental, en matière de gestion des risques et de soutien aux filières primaires.
Les crédits mobilisés par l’État en matière de gestion des déchets contribueront au rattrapage structurel et au développement de l’économie circulaire. Ils permettront le développement du réseau de déchèteries, la mise en place d’un observatoire des déchets et d’un centre de gestion multifilières, ainsi que la réalisation d’unités de recyclage et de valorisation des déchets et de structures réalisant des démarches de réemploi et de réutilisation.
Le déploiement du réseau de fibre optique sera conduit dans le cadre de la délégation de service public attribuée par le conseil départemental, même si quelques clarifications seront nécessaires.
J’ai déjà eu l’occasion de préciser que les évaluations des dommages et des besoins seront confirmées et affinées en lien avec les ministères concernés, notamment par la mission interministérielle de reconstruction et de refondation de Mayotte.
La commission des lois a adopté un amendement présenté par ses rapporteurs, qui avait pour objet de prévoir la remise par le Gouvernement d’un rapport au Parlement avant la fin de l’année 2025, en vue de préciser la ventilation des crédits. Sur ce fondement, la programmation des investissements aura vocation à être précisée sur une base pluriannuelle.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous invite donc à adopter cet amendement majeur, déterminant pour nos compatriotes mahorais.
Je sais la méfiance, les critiques, et je prends en compte les remarques que vous apportez, en particulier ceux d’entre vous qui représentent Mayotte. Toutefois, vous me parlez d’il y a dix ou vingt ans, alors que c’est la première fois que, s’agissant des projets que vous avez évoqués, de telles précisions sont apportées.
L’effort financier de 3,2 milliards d’euros sur sept ans était déjà majeur, même si vous le jugiez sans doute insuffisant. Nous vous proposons de le porter à 4 milliards d’euros, ce dont je me réjouis. Il faudra continuer à faire cet effort et à préciser notre action, car nous devons répondre à l’attente très forte des Mahorais, d’autant que la parole publique n’a pas toujours été honorée – c’est le moins qu’on puisse dire.
Par cet amendement, nous précisons encore davantage l’ambition initiale du projet de loi. Je ne doute pas que nous continuerons d’améliorer ce travail dans les jours et les semaines qui viennent.
Mme la présidente. L’amendement n° 131, présenté par M. Omar Oili, Mmes Artigalas, Narassiguin et Le Houerou, MM. Lurel, Kanner et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Rapport annexé, alinéa 284, tableau, septième ligne
Remplacer cette ligne par quatre lignes ainsi rédigées :
Déchets |
Rattrapage structurel Pôle Logistique, Extension quai de transfert Badamiers, Plateforme de compostage Badamiers |
11 millions d’euros |
Première tranche de points de collecte 500 points sur un total de 2800 |
4 millions d’euros |
|
Développement de l’économie circulaire 4 Déchèteries (Tsararano, Longoni, Hamaha, Badamiers) |
12 millions d’euros |
|
TOTAL |
27 millions d’euros |
La parole est à M. Saïd Omar Oili.
M. Saïd Omar Oili. L’amendement n° 131 vise à détailler les opérations incluses au sein de la programmation d’investissements prioritaires dans les infrastructures et politiques publiques essentielles à Mayotte sous le thème « Déchets ».
Monsieur le ministre, je souhaite que vous nous donniez quelques précisions au sujet des lignes budgétaires de votre amendement relatives aux déchets. Alors que le rapport annexé prévoyait 27 millions d’euros, on ne retrouve dans l’amendement que vous venez de présenter qu’un montant de 6,9 millions d’euros.
Mme la présidente. L’amendement n° 132, présenté par M. Omar Oili, Mmes Artigalas, Narassiguin et Le Houerou, MM. Lurel, Kanner et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Rapport annexé, alinéa 284, tableau
Compléter ce tableau par une ligne ainsi rédigée :
TOTAL |
3176 |
La parole est à M. Saïd Omar Oili.
M. Saïd Omar Oili. L’amendement n° 132 vise à préciser la somme totale des engagements de l’État au titre de programmes d’investissements prioritaires dans les infrastructures et politiques publiques essentielles à Mayotte.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Bitz, rapporteur. Monsieur le ministre, nous nous réjouissons que le Gouvernement ait déposé l’amendement n° 155 rectifié bis, qui tend à apporter des précisions utiles quant à la ventilation des investissements prioritaires et au calendrier de leur mise en œuvre. En outre, ces crédits, dont le montant était initialement fixé à 3,2 milliards d’euros, sont portés à 4 milliards d’euros.
Pour autant, le travail n’est pas achevé. Vous l’avez indiqué, la commission a ajouté au rapport annexé l’obligation pour le Gouvernement de déposer une programmation annuelle des investissements avant la fin de cette année.
Une telle programmation suppose des arbitrages interministériels, qui prennent un peu de temps. Vous nous apportez aujourd’hui de premiers éléments de réponse, de nature à conforter la confiance que les Mahorais peuvent avoir à l’égard de l’État. Nous attendons avec impatience la programmation annuelle d’ici à la fin de 2025.
La commission émet donc un avis favorable sur l’amendement n° 155 rectifié bis. En revanche, elle émet un avis défavorable sur les amendements nos 131 et 132, qui deviendraient sans objet si l’amendement du Gouvernement était adopté.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État. Le Gouvernement a déposé l’amendement n° 155 rectifié bis afin de préciser les engagements de l’État au titre des programmes d’investissements prioritaires dans les infrastructures et politiques publiques essentielles à Mayotte.
Cet amendement vise à reprendre les crédits inscrits dans le contrat de convergence et de transformation signé avec le département de Mayotte en 2024, et ceux qui ont été attribués dans le cadre de différents plans d’action ministériels ou interministériels.
Monsieur le sénateur Omar Oili, pour répondre à votre question sur les crédits relatifs aux déchets, à ce stade, nous portons à 6,9 millions d’euros les autorisations d’engagement sur la période 2025-2029. Ces crédits contribueront au rattrapage structurel et au développement de l’économie circulaire, au développement du réseau de déchèteries, à la mise en place d’un observatoire des déchets et d’un centre de gestion multifilières, ainsi qu’à la réalisation d’unités de recyclage et de valorisation des déchets, et de structures réalisant des démarches de réemploi et de réutilisation.
La différence que vous évoquez vient des fonds européens, qui soutiendront la réalisation de ces projets. Comme nous l’indiquons, les évaluations des dommages et des besoins seront confirmées et affinées en lien avec les ministères concernés, notamment par la mission interministérielle de reconstruction et de refondation de Mayotte.
Votre amendement n° 131 vise à fixer des objectifs à des projets précis, mais il est important de recueillir auparavant l’avis des acteurs locaux, en particulier des collectivités. Les montants mériteraient par ailleurs d’être précisés afin d’identifier l’origine des crédits.
Le Gouvernement demande donc le retrait des amendements nos 131 et 132 ; à défaut, l’avis sera défavorable.
Mme la présidente. La parole est à Mme Christine Lavarde, pour explication de vote.
Mme Christine Lavarde. Je m’exprime sous le contrôle des rapporteurs pour avis de la commission des finances, laquelle n’a pas pu examiner l’amendement n° 155 rectifié bis, alors que ses dispositions la concernent au premier chef, au regard des montants en question.
Monsieur le ministre, nous nous demandons quelle est l’origine des différentes sommes que vous nous exposez. Ces crédits sont-ils fléchés sur les budgets des divers ministères concernés par ces différentes politiques ? Seront-ils au contraire pré-engagés sur le budget des outre-mer des futurs exercices budgétaires ? Dans quelle mesure seront-ils prélevés sur les budgets des fonds de cohésion du budget européen, alors même que le nouveau cadre financier pluriannuel, qui couvre une partie de la période de programmation de la présente loi, n’est toujours pas défini ?
Nous avons bien compris comment les 4 milliards d’euros de dépenses seront ventilés, mais nous souhaiterions disposer d’informations sur l’origine de ces crédits dans le cadre budgétaire contraint que nous connaissons.
Mme la présidente. La parole est à Mme Lana Tetuanui, pour explication de vote.
Mme Lana Tetuanui. Dans ce débat sur le financement, j’ai presque envie d’applaudir notre ministre des outre-mer.
D’un côté, monsieur le ministre, je suis tentée de vous remercier, par solidarité avec les Mahorais, mais, de l’autre, je ne peux m’empêcher de penser qu’il faudrait peut-être un grand cyclone en Polynésie pour obtenir ce que nous réclamons depuis tant d’années, lors de l’examen de chaque loi de finances. Enfin, trêve de plaisanterie…
Mes chers collègues, je vous le demande en connaissance de cause : j’ai religieusement écouté nos débats, mais je ne sais pas de quoi le lendemain des programmations annoncées sera fait, car elles supposent des investissements lourds sur plusieurs exercices. Si d’ici à l’année prochaine un nouveau ministre des outre-mer devait être nommé, la parole de l’État continuera-t-elle d’être tenue ?
Nous avons tellement eu l’habitude qu’un ministre des outre-mer jette la copie de son prédécesseur lors de son entrée en fonction pour proposer la sienne… Au nom des Mahorais, je voudrais avoir l’assurance que les mesures que nous votons aujourd’hui ne seront pas défaites demain.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre d’État.
M. Manuel Valls, ministre d’État. Les 4 milliards d’euros correspondent à des crédits contractualisés dans le contrat de convergence et de transformation signé avec Mayotte. Les montants présentés sont rattachés aux budgets des ministères concernés, par exemple au programme 123 du ministère des outre-mer. Dans le cas des déchets, l’accompagnement de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe) sera également recherché. Les choses doivent être suffisamment claires pour les membres de la commission des finances du Sénat : ces crédits sont liés aux divers programmes des ministères.
Madame la sénatrice de la Polynésie française, je connais évidemment la nature du débat. En responsabilité, tant pour la Nouvelle-Calédonie que pour Mayotte, j’essaie de m’assurer que nos engagements soient pérennisés, quels que soient les aléas et l’instabilité que connaît la vie politique, à l’exception du Sénat.
Pour cette raison, je me suis attaché à convaincre le Premier ministre qu’une mission interministérielle lancée par le ministère des outre-mer permettrait d’engager le travail dans la durée.
En ce qui concerne Mayotte, la mission du général Facon, à laquelle Mme la sénatrice Ramia est associée, permet ainsi d’engager un travail de longue haleine.
Pour la Nouvelle-Calédonie, sous l’autorité du Premier ministre, un dispositif de même type, rattaché à mon ministère, a été créé : il bénéficie de 3 milliards d’euros en 2024, soit un peu moins du double des crédits alloués chaque année par l’État à ce territoire du Pacifique.
Mesdames, messieurs les sénateurs, l’amendement que je viens de vous présenter vise à sortir des effets d’annonce que l’on a connus par le passé à Mayotte et, j’y insiste, à s’engager dans la durée. Ne souhaitons pas d’autres cyclones : ces mesures fortes étaient attendues, au-delà de Chido, par les élus et les Mahorais.
Madame la sénatrice, je vous invite à faire campagne pour que je reste ministre d’État chargé des outre-mer, non pas pour mon propre plaisir (Sourires.), mais pour que vous puissiez directement me rappeler l’engagement de l’État envers les territoires des outre-mer, qui doivent tous constituer une priorité pour l’État – nous aurons l’occasion d’en discuter de nouveau en Polynésie dans quelques semaines.
Au travers de votre humour, il y a une part de vérité : il faut rappeler à chacun ses engagements, et chacun doit assumer ses responsabilités. C’est vrai tant pour les élus que pour les acteurs économiques et sociaux.
La Nation fait un effort, logique et cohérent, pour Mayotte, territoire dévasté par un cyclone, qui avait déjà pris beaucoup de retard en dépit de la promesse d’égalité républicaine attendue depuis la départementalisation. Elle doit être capable de le mener à son terme, et je remercie le Premier ministre d’avoir fait des arbitrages en ce sens. Nous avons tous une obligation de résultat, partout : j’y veillerai, tant que j’assurerai ces responsabilités.
Mme la présidente. En conséquence, les amendements nos 131 et 132 n’ont plus d’objet.
L’amendement n° 110, présenté par Mmes Corbière Naminzo et Cukierman, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Rapport annexé, après l’alinéa 293
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
… La création d’une cour d’appel à Mayotte
Le Gouvernement s’engage à créer une cour d’appel à Mayotte dans les 5 prochaines années.
La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. Les habitants de Mayotte, les élus locaux et les professionnels de la justice réclament la création d’une cour d’appel à Mayotte, aujourd’hui seulement dotée d’une chambre d’appel.
Actuellement, la chambre d’appel de Mamoudzou réexamine certaines affaires jugées par le tribunal judiciaire de la même ville pour lesquelles un appel a été déposé. Toutefois, nombreuses sont les exceptions. Par exemple, les appels des décisions des juges d’instruction et des juges des libertés et de la détention sont portés devant la chambre d’instruction de la cour d’appel de Saint-Denis de La Réunion.
Or les besoins réels en la matière sont très nombreux. À ces manquements concernant le fonctionnement de l’institution judiciaire, nous pouvons ajouter l’examen de nombreux dossiers d’état civil pour des milliers de Mahorais.
De plus, la population de l’archipel ne cesse de croître. La distance géographique avec Saint-Denis de La Réunion impose la création d’une cour d’appel sur le territoire même de Mayotte.
Cet amendement vise à inscrire dans le rapport annexé l’objectif de créer cette juridiction dans les cinq prochaines années.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Bitz, rapporteur. L’amendement tend à créer une cour d’appel à Mayotte dans un délai de cinq ans. Ainsi que nous l’avons précédemment avancé, la commission a considéré qu’il n’était pas souhaitable de multiplier des engagements non financés dans le rapport annexé, dépourvu de portée normative.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’ensemble de l’article 1er et du rapport annexé, modifié.
(L’article 1er et le rapport annexé sont adoptés.)
Article 1er bis (nouveau)
Jusqu’au 31 décembre 2030, le représentant de l’État à Mayotte dirige l’action de l’ensemble des services et des établissements publics de l’État ayant un champ d’action territorial à Mayotte, qui sont placés pour emploi sous son autorité.
Un décret en Conseil d’État détermine les modalités d’application du présent article.
Mme la présidente. La parole est à M. Marc Laménie, sur l’article.
M. Marc Laménie. L’article 1er bis s’insère dans le titre I du projet de loi, qui fixe les objectifs de l’action de l’État pour Mayotte. S’appuyant sur un article de la Lopmi, il vise à placer l’ensemble des services déconcentrés de l’État et de ses établissements publics sous l’autorité du préfet de Mayotte.
À la suite des conséquences dramatiques du passage du cyclone Chido, cette mesure a déjà été mise en place le 14 décembre 2024, pour trois mois, jusqu’en mars 2025. Elle a permis au préfet de diriger l’ensemble des services de l’État, y compris les forces armées, l’agence régionale de santé (ARS), les services des douanes, du rectorat ou de l’académie de Mayotte pour les faire participer à la reconstruction et à la gestion des conséquences immédiates de la crise.
Les rapporteurs de la commission des lois ont rappelé les dimensions multiples de cette crise et les nombreux défis, démographiques, migratoires, sécuritaires, économiques et sociaux qui se posent. La tâche est immense.
L’article 1er bis permet de garantir la continuité et la cohérence de l’action de l’État, pour que celui-ci parle d’une seule voix aux divers interlocuteurs sur le territoire, jusqu’au 31 décembre 2030.
Le groupe Les Indépendants soutiendra cette mesure d’efficacité.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 64 est présenté par Mme Narassiguin, M. Omar Oili, Mmes Artigalas et Le Houerou, MM. Lurel, Kanner et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 120 est présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Saïd Omar Oili, pour présenter l’amendement n° 64.
M. Saïd Omar Oili. Pour parvenir à la reconstruction de Mayotte, la gouvernance constitue un enjeu central. Les élus locaux et les citoyens doivent identifier leur interlocuteur et les chaînes de responsabilité.
De ce point de vue, la loi du 24 février 2025 d’urgence pour Mayotte a prévu de transformer l’établissement public foncier et d’aménagement de Mayotte en un établissement public chargé de coordonner les travaux de reconstruction.
Cet établissement est chargé de la conception et de la réalisation de certains travaux d’aménagements ou de reconstruction de l’habitat, des équipements et des infrastructures publiques et privées sur l’archipel de Mayotte, tout en assurant la coordination de ces travaux.
L’article 1er bis, intégré dans le projet de loi sur l’initiative des deux rapporteurs de la commission des lois, prévoit de placer sous l’autorité du préfet l’ensemble des services déconcentrés et des établissements publics de l’État ayant un champ d’action territorial sur l’archipel, et ce jusqu’au 31 décembre 2030.
Alors que l’établissement public créé par la loi d’urgence visait à unifier la gouvernance de la reconstruction, cet article 1er bis, qui donne autorité au préfet sur l’ensemble des services et des établissements publics de l’État, jette le trouble.
Monsieur le ministre, pouvez-vous clarifier la position du Gouvernement en ce qui concerne la gouvernance mise en œuvre pour reconstruire Mayotte ? Les Mahorais et les élus locaux doivent, je le redis, identifier leur interlocuteur : il y va de la bonne gouvernance lors de la reconstruction de Mayotte, et donc de la réussite de ce projet.
Mme la présidente. La parole est à Mme Mélanie Vogel, pour présenter l’amendement n° 120.
Mme Mélanie Vogel. Cet amendement vise à supprimer l’article 1er bis, qui prolonge jusqu’en 2031 le dispositif confiant au préfet l’autorité sur l’ensemble des services de l’État à Mayotte.
En temps de crise, conférer certains pouvoirs au préfet peut être utile, mais par définition ce dispositif dérogatoire au droit commun doit être borné dans le temps. Il nous paraît déraisonnable de poursuivre cette dérogation pendant six années supplémentaires, car cela pourrait poser de nombreux problèmes.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Bitz, rapporteur. Je remercie M. Laménie du soutien qu’il apporte à l’amendement proposé par Mme Canayer et moi-même. La commission émet évidemment un avis défavorable sur les amendements identiques nos 64 et 120, qui visent à supprimer une mesure qu’elle a introduite.
Madame Vogel, je ne peux qu’être d’accord avec vous : il faut limiter les pouvoirs du préfet sur les autres administrations à la période de crise, mais le fait est que nous en sommes toujours, à Mayotte, en période de crise. C’est là que porte notre divergence d’appréciation : nous considérons que, au-delà de la crise paroxystique, la situation demeure extrêmement difficile, ce qui nécessite, pour que l’État parle d’une seule voix et ait davantage de capacité à agir, l’unité de commandement de l’État et une capacité de coordination.
Certes, la mesure ne doit pas être illimitée dans le temps : nous l’avons ainsi bornée au 31 décembre 2030, à la fin de la période de refondation de Mayotte. Les pouvoirs exceptionnels du préfet, dérogatoires au droit commun, sont bien limités dans le temps. Il est pour nous absolument indispensable de mieux organiser l’État et de donner à l’État local la capacité d’intervenir dans tous les champs de l’action publique.
Monsieur Omar Oili, je laisserai M. le ministre vous apporter des précisions sur l’organisation de la gouvernance. Notre collègue Salama Ramia présentera à la suite de cette discussion un amendement visant à exclure l’Établissement public de reconstruction et de refondation de Mayotte (EP2R) de la tutelle du préfet, car il ne s’agit évidemment pas de revenir sur les mesures que nous avons adoptées lors de la création de cet établissement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État. Je le rappelle, cet article ne faisait pas partie du projet de loi déposé par le Gouvernement. Ce sont les rapporteurs de la commission des lois du Sénat qui ont proposé de l’ajouter, ce que je trouve pertinent et utile, car, pour être efficace, le travail de reconstruction de Mayotte nécessite une synergie et la coordination de tous les acteurs territoriaux.
Le préfet, représentant chacune des administrations de l’État et chacun des membres du Gouvernement, a vocation à assurer la coordination entre les ministères et les différents partenaires participant à la reconstruction de Mayotte.
La mission interministérielle menée à mes côtés par le général Facon et, sur place, le préfet Bieuville travaillent dans une très bonne synergie – une partie de l’équipe du général, dont lui-même, se rend d’ailleurs à Mayotte ce soir – pour rendre le travail interministériel le plus efficace possible.
La légitimité du préfet et sa vision d’ensemble des enjeux et des priorités justifient que l’ensemble des services déconcentrés et des établissements publics de l’État soient placés sous son autorité pour une durée limitée, le temps de la reconstruction, jusqu’à la fin de 2030. Il s’agit de gagner de l’efficacité et du temps. Cette mesure est permise par l’article 27 de la Lopmi ; mise en œuvre à Mayotte au moment du passage de Chido, elle avait alors bien fonctionné.
Les modalités d’application de l’article seront prévues par un décret pris en Conseil d’État, la loi n’ayant pas vocation à se prononcer sur des mesures organisationnelles a priori basées sur le bon sens et le savoir-faire des autorités préfectorales, dans un souci d’efficacité.
Pour ce qui concerne les rapports entre l’État et les élus, nous continuerons dans la même exigence de concertation. Nous avons déjà beaucoup discuté ici même de la gouvernance de l’établissement public en question. Pour que les choses soient tout à fait claires, le Gouvernement émettra un avis favorable sur l’amendement n° 48 que la sénatrice Ramia présentera dans un instant, car l’EP2R doit obéir aux règles que nous avons fixées avec les élus.
Mme la présidente. La parole est à M. Saïd Omar Oili, pour explication de vote.
M. Saïd Omar Oili. Monsieur le ministre, j’étais à Mayotte il y a deux semaines. En rencontrant un membre de l’équipe de M. Facon, je lui ai demandé si je pouvais discuter avec elle de la situation des pêcheurs à Mayotte. Ma surprise a été grande : mon interlocutrice m’a indiqué que, avant de me répondre, elle devait demander au préfet si celui-ci l’y autorisait.
Évidemment, nous nous demandons qui est aux commandes de l’avion. Est-ce M. Facon ou le préfet ? Monsieur le ministre, reconnaissez qu’il est facile de s’y perdre : à qui doit-on s’adresser pour aborder les problèmes liés à la reconstruction de notre île ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre d’État.
M. Manuel Valls, ministre d’État. Monsieur le sénateur, ce n’est pas de votre niveau. (M. Saïd Omar Oili proteste.) Vous avez peut-être eu cette discussion, mais je suis là ! Le préfet et le général Facon sont joignables ; vous pouvez également vous adresser à votre collègue Mme Ramia, qui participe à la mission interministérielle.
Nous nous connaissons depuis un certain temps et je vous respecte énormément. Nous présentons un deuxième projet de loi, après le projet de loi d’urgence pour Mayotte. Je comprends vos interrogations, les désaccords et la méfiance qui peut exister vis-à-vis de la parole de l’État, mais je suis attentivement le dossier de Mayotte, une sénatrice assure le suivi de la mission interministérielle – croyez-moi, elle est exigeante et très présente –, le général Facon et son équipe sont à votre disposition, et le préfet agit sur place pour coordonner le travail interministériel.
Moi-même, je rencontre régulièrement les sénateurs de Mayotte – je suis à leur disposition – et les deux députées mahoraises ; je dînerai ce soir, pendant la suspension, avec le président du conseil départemental de Mayotte ; et j’ai eu, ainsi que mon équipe, un nombre important d’échanges, sur place et en visioconférence, avec les élus.
Il peut toujours arriver que quelqu’un n’ait pas très bien compris comment fonctionne telle ou telle administration. Mais les règles sont claires, vous savez qui pilote l’avion et nous allons essayer d’avancer ainsi. Ne nous perdons pas dans ce genre de détail, je ne peux pas croire qu’une telle intervention vienne de vous, monsieur le sénateur !
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 64 et 120.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. L’amendement n° 48, présenté par Mme Ramia, MM. Patriat, Buis et Buval, Mmes Cazebonne et Duranton, M. Fouassin, Mme Havet, MM. Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne et Lévrier, Mme Nadille, M. Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud et Rohfritsch, Mme Schillinger, M. Théophile et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Compléter cet alinéa par les mots :
, à l’exclusion de l’établissement public créé en application de l’article 1er de la loi n° 2025-176 du 24 février 2025 d’urgence pour Mayotte
La parole est à Mme Salama Ramia.
Mme Salama Ramia. Comme l’a voulu le Parlement, la gouvernance du futur établissement public chargé de la reconstruction de Mayotte sera collégialement assurée par les collectivités territoriales du département. Le conseil d’administration de cet établissement sera présidé par le président du conseil départemental de Mayotte et assurera une représentation forte des collectivités concernées par les projets d’aménagement.
Si le préfet doit bien assurer un contrôle administratif, comme les différentes autorités de tutelle de l’État, et peut librement siéger au conseil d’administration, il convient qu’il ne dispose pas d’une autorité hiérarchique ou fonctionnelle sur l’établissement.
Le présent amendement tend donc à modifier l’article 1er bis en ce sens.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Bitz, rapporteur. Je remercie Mme Ramia de sa vigilance. Nous n’avions pas vu ce point lors du dépôt de notre amendement en vue de l’établissement du texte en commission ; il n’était pas dans nos intentions de bouleverser la gouvernance de l’établissement public placé sous la présidence du président du conseil départemental.
L’avis est évidemment favorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 1er bis, modifié.
(L’article 1er bis est adopté.)
TITRE II
LUTTER CONTRE L’IMMIGRATION CLANDESTINE ET L’HABITAT ILLÉGAL
Chapitre Ier
Durcir les conditions d’accès au séjour en les adaptant à la situation particulière de Mayotte
Article 2
L’article L. 441-7 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi modifié :
1° Après le premier alinéa, il est inséré un 1° AA ainsi rédigé :
« 1° AA Au 2° de l’article L. 412-2, les références : “L. 423-7,” et “L. 423-23,” sont supprimées ; »
2° Le 8° bis est complété par les mots : « et, à la fin, les mots : “, sans que soit opposable la condition prévue à l’article L. 412-1” sont supprimés » ;
2° bis (nouveau) Le 8° ter est ainsi rédigé :
« 8° ter L’article L. 423-8 est ainsi modifié :
« a) Au premier alinéa, après les mots : “371-2 du code civil,”, sont insérés les mots : “depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins trois ans” ;
« b) Le second alinéa est supprimé ; »
3° Après le 8° ter, il est inséré un 8° quater ainsi rédigé :
« 8° quater Au premier alinéa de l’article L. 423-10, les mots : “en France et titulaire depuis au moins trois années” sont remplacés par les mots : “régulièrement et de manière ininterrompue en France depuis au moins cinq années et titulaire” ; »
4° Il est ajouté un 16° ainsi rédigé :
« 16° Au premier alinéa de l’article L. 423-23, après le mot : “étranger”, sont insérés les mots : “résidant habituellement depuis au moins sept ans à Mayotte,” et, à la fin, les mots : “, sans que soit opposable la condition prévue à l’article L. 412-1” sont supprimés. »
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques.
L’amendement n° 7 rectifié est présenté par Mme Narassiguin, M. Omar Oili, Mmes Artigalas et Le Houerou, MM. Lurel, Kanner et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 80 est présenté par Mmes Corbière Naminzo et Cukierman, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.
L’amendement n° 144 est présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Corinne Narassiguin, pour présenter l’amendement n° 7 rectifié.
Mme Corinne Narassiguin. Avec cet amendement, nous entamons les débats sur le durcissement des conditions d’accès au séjour à Mayotte.
L’article 2 du texte franchit une étape supplémentaire dans ce domaine, puisqu’il vise à conditionner l’obtention des titres de séjour « parent d’enfant français » ou « liens personnels et familiaux » à une entrée régulière sur le territoire. Concrètement, cette mesure signifie qu’un étranger, père ou mère d’un enfant mineur français, ne pourra jamais être régularisé au motif qu’il serait entré à Mayotte sans visa ou avec un simple visa de court séjour.
Cet article aura pour seul effet de multiplier les cas de « ni-ni » : les étrangers qui ne peuvent être ni régularisés ni éloignés. Cette mesure précarisera donc des familles entières et invisibilisera des milliers de personnes, privées de toute perspective d’avenir. Comment peut-on croire que c’est ainsi que l’on refondra Mayotte ?
Un tel article est particulièrement inacceptable, parce qu’il vise entre autres des parents étrangers d’enfants français. Comment peut-on sérieusement considérer qu’une mère ou un père étranger, parent d’un enfant français et qui a fait la preuve qu’il contribue effectivement à l’entretien et à l’éducation de son enfant, n’a pas sa place en France ? Comment peut-on considérer que la vocation du parent d’un enfant français soit d’être maintenu dans la précarité, sans papiers, ou d’être expulsé ? Avec cet article, non seulement vous ne réglerez rien, car les liens familiaux seront toujours plus forts que les obstacles administratifs que vous aurez mis en place, mais vous aurez gâché la vie de familles entières.
En outre, cet article repousse de deux années la délivrance d’une carte de résident pour les parents étrangers d’enfants français. C’est tout à fait indigne…
Mme la présidente. La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo, pour présenter l’amendement n° 80.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. Au travers de cet amendement de suppression, nous nous opposons fermement à un nouveau durcissement des conditions d’accès au séjour à Mayotte.
Cet article durcit notamment les conditions pour l’obtention d’un titre de séjour « parent d’enfant français » ou « liens personnels et familiaux ». Il fait écho aux mesures adoptées en 2018 et en mars dernier visant à durcir l’application du droit du sol. Or aucun rapport n’a démontré que les mesures de ce type avaient endigué les flux migratoires à Mayotte depuis 2018. Cet article aura donc pour seule conséquence de maintenir en situation d’irrégularité de nombreuses familles établies sur le territoire, dont des milliers d’enfants, qui sont les premières victimes de ce système dérogatoire pour Mayotte.
L’absence d’accompagnement de ces familles vers le droit commun est un obstacle à l’accès aux droits des enfants reconnus par la convention internationale des droits de l’enfant. Ces mesures renforcent la précarité des familles concernées et les condamnent à l’errance administrative.
Dans son rapport intitulé Établir Mayotte dans ses droits, le Défenseur des droits indique que la restriction des droits dans ce territoire contribue à maintenir les étrangers qui s’y trouvent dans une situation d’insécurité juridique et de précarité administrative permanente, freinant leur perspective d’intégration et pesant sur le développement de l’île.
S’en prendre aux familles, c’est tourner le dos à nos valeurs humanistes, qui font le socle de notre société. Nous ne voulons pas devenir un État qui déteste les étrangers, y compris quand ceux-ci sont des enfants.
Mme la présidente. La parole est à Mme Mélanie Vogel, pour présenter l’amendement n° 144.
Mme Mélanie Vogel. Défendu.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Par ces amendements, vous proposez, mes chers collègues, de supprimer l’article 2 du projet de loi, qui renforce les conditions de délivrance des titres de séjour en qualité de parent d’enfant français ou au titre des liens personnels et familiaux.
La situation à Mayotte est intenable : en 2024, sur les 320 000 habitants – chiffre de l’Insee sans doute sous-estimé –, la moitié étaient de nationalité étrangère, dont 50 % en situation irrégulière. L’Insee estime que, sans inflexion majeure des flux migratoires, la population pourrait plus que doubler d’ici à 2050, pour atteindre 760 000 habitants, majoritairement de nationalité étrangère. Les trois quarts des enfants nés à la maternité de Mamoudzou – première maternité de France en nombre de naissances – ont une mère étrangère.
L’immigration familiale depuis les Comores constitue l’un des principaux flux migratoires. En 2024, plus de 15 000 titres « parent d’enfant français » ou « liens personnels et familiaux » ont été délivrés à Mayotte, soit 80 % des titres délivrés, contre 17 % pour la France métropolitaine.
En outre, ces titres sont très majoritairement délivrés à des étrangers en situation irrégulière : 84 % pour le titre « parent d’enfant français » et 93 % pour le titre « liens personnels et familiaux ». Ils contribuent ainsi à alimenter une immigration clandestine massive, dans l’espoir d’une régularisation rapide au titre d’un motif familial, qui ne protège en rien ni ces familles ni leurs enfants.
Il est donc primordial de freiner ces flux en limitant les possibilités de régularisation. L’article 2 y contribue.
Pour toutes ces raisons, la commission a émis un avis défavorable sur ces amendements.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État. Mesdames les sénatrices, eu égard au caractère exceptionnel de la situation migratoire de Mayotte par rapport aux autres départements français, notamment hexagonaux, il est de mon point de vue parfaitement justifié d’adopter des mesures qui visent à limiter l’attractivité des titres de séjour « parent d’enfants français » et « liens personnels et familiaux ». J’ai déjà eu l’occasion de le dire lors de la présentation des deux projets de loi.
Je comprends vos arguments, mais je veux souligner que la mesure envisagée ne porte pas atteinte de manière disproportionnée à l’article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (CEDH), car il s’agit en pratique d’une formalité déjà mise en œuvre dans les postes consulaires ; le Conseil d’État lui-même le souligne dans son avis.
La condition de durée de résidence en France, portée de trois à cinq années, a pour objectif de renforcer l’intégration de l’étranger dans le pays au sein duquel il a formulé le souhait de résider dans la durée. L’administration reste en droit de délivrer un titre de séjour et de procéder ainsi à la régularisation du séjour d’un étranger, lorsque l’examen de sa situation personnelle le justifie, dans des cas qui doivent rester exceptionnels.
Tout refus de séjour assorti d’une mesure portant obligation de quitter le territoire français est édicté après vérification du droit au séjour, mais également en tenant compte de la durée de présence de l’étranger sur le territoire français – à Mayotte en l’occurrence –, de la nature et de l’ancienneté des liens avec la France, et des considérations humanitaires pouvant justifier un tel droit.
Dès lors, la disposition visant à conditionner la délivrance du titre de séjour « liens personnels et familiaux » ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit à la vie privée et familiale.
Voilà pourquoi le Gouvernement est défavorable à ces amendements.
Ce texte prévoit, c’est vrai, toute une série de dispositions visant à lutter contre l’immigration clandestine, irrégulière, massive, qui déséquilibre la société mahoraise : il y a évidemment des dispositifs de sécurité, de prévention et de détection, mais nous avons aussi évoqué la nécessité de faire évoluer notre relation avec la république des Comores sur ce sujet. Il s’agit donc d’un ensemble qui vise à améliorer, à rendre le plus efficace possible, tous nos dispositifs.
Avis défavorable.
Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Narassiguin, pour explication de vote.
Mme Corinne Narassiguin. Nous nous heurtons toujours au même problème : ce présupposé selon lequel le durcissement des conditions de régularisation entraînera une réduction des flux migratoires illégaux vers Mayotte.
Or cela n’est toujours pas démontré. Nous voyons bien que des milliers et des milliers de personnes viennent à Mayotte en sachant très bien qu’elles seront en situation irrégulière, mais qui préfèrent tout de même vivre ainsi que de rester dans leur pays d’origine, où la situation est trop difficile. L’efficacité de telles mesures pour contrer cette attractivité, qui constituerait en quelque sorte un appel d’air, n’est toujours pas démontrée.
Par ailleurs, même si l’administration garde la possibilité de régulariser des personnes, nous savons qu’il y aura une pression politique, liée au durcissement de la loi, pour ne pas délivrer ces titres de séjour ; on voit donc mal comment la préfecture pourrait répondre favorablement à ces demandes de régularisation.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 7 rectifié, 80 et 144.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. L’amendement n° 32 rectifié, présenté par Mme Briante Guillemont, MM. Masset, Gold, Grosvalet et Guiol, Mme Pantel et M. Daubet, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Le 15° de l’article L. 441-7 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est abrogé.
La parole est à M. Michel Masset.
M. Michel Masset. Cet amendement vise à rétablir à Mayotte une possibilité de régularisation fondée sur des motifs exceptionnels, en supprimant une dérogation au droit commun du séjour.
Actuellement, les étrangers présents à Mayotte ne peuvent pas bénéficier d’une admission exceptionnelle au séjour, contrairement à ce qui est prévu sur l’ensemble du territoire.
Cette exclusion pose des difficultés, notamment juridiques : comme l’a rappelé le Conseil d’État, l’article 8 de la CEDH et le deuxième alinéa du préambule de la Constitution de 1946 imposent le respect de la vie privée et familiale. Aussi, même sans base légale, des régularisations fondées sur l’intérêt supérieur de l’enfant ou des attaches fortes sont déjà imposées par la jurisprudence.
Ce paradoxe alimente l’opacité et l’insécurité juridique. Au travers de la disposition que je propose, le législateur créerait une voie claire, lisible et encadrée pour ces situations exceptionnelles.
Ce dispositif n’a pas vocation à ouvrir une voie massive à la régularisation ; il vise à permettre de répondre humainement à des cas limites, tout en assurant la cohérence de notre droit.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. L’avis est défavorable, et ce pour trois raisons.
D’abord, la disposition proposée ne paraît pas opportune eu égard à la situation migratoire exceptionnelle que je vous ai décrite précédemment.
Ensuite, elle renforcerait encore, nous en sommes convaincus – contrairement à vous, peut-être –, l’attractivité de Mayotte auprès des candidats à l’immigration irrégulière, alors que, au travers de ce texte, notre souhait est d’endiguer les flux migratoires importants, en provenance notamment des Comores, mais pas seulement.
Enfin, comme le rappelle le Conseil d’État dans son avis, en l’absence de dispositions sur les régularisations exceptionnelles, le préfet peut toujours, si nécessaire, régulariser à titre discrétionnaire les étrangers en situation irrégulière.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L’amendement n° 33 rectifié, présenté par Mme Briante Guillemont, MM. Masset, Gold, Grosvalet et Guiol, Mme Pantel et M. Daubet, est ainsi libellé :
I. – Alinéas 5 à 8
Supprimer ces alinéas.
II. – Alinéa 10
Supprimer les mots :
et de manière ininterrompue
La parole est à M. Michel Masset.
M. Michel Masset. Je retente ma chance…
Cet amendement a pour objet d’établir une voie de régularisation humanitaire, en autorisant l’admission exceptionnelle au séjour qui s’applique sur le reste du territoire, mais en faisant un compromis : nous proposons de maintenir les restrictions prévues à l’article 2 dans sa version initiale.
D’une part, une telle mesure éviterait de bloquer toute situation familiale méritant une régularisation et de ne devoir compter que sur le pouvoir discrétionnaire du préfet pour éviter des atteintes disproportionnées à la vie privée et familiale.
D’autre part, l’exigence d’une présence ininterrompue sur une période donnée semble poser particulièrement problème, car elle ne tient pas compte des réalités de vie à Mayotte, des déplacements familiaux, de l’instabilité des parcours migratoires ou encore des obstacles administratifs fréquents.
Une telle disposition permettrait d’éviter une rigidité excessive dans les conditions de séjour exigées pour la régularisation d’un étranger.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Mon cher collègue, il y a un décalage entre l’objet de votre amendement et ses effets réels.
Votre amendement vise en effet à supprimer les deux mesures supplémentaires ajoutées par la commission à l’article 2 : d’une part, pour la délivrance de la carte de séjour temporaire « parent d’enfant français », le renforcement du mécanisme de la double contribution lorsque le demandeur n’est pas l’auteur de la reconnaissance de paternité de l’enfant, pour lutter contre les reconnaissances frauduleuses ; d’autre part, l’exigence d’une résidence ininterrompue pour la délivrance de la carte de résident.
L’avis est défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 2.
(L’article 2 est adopté.)
Article 2 bis (nouveau)
Dans un délai de trois ans à compter de la publication de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport évaluant les dispositions dérogatoires en matière d’immigration et de nationalité applicables à Mayotte.
Mme la présidente. L’amendement n° 10, présenté par Mme Narassiguin, M. Omar Oili, Mmes Artigalas et Le Houerou, M. Lurel et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
Un rapport d’étape est remis avant le 31 décembre 2026.
La parole est à Mme Corinne Narassiguin.
Mme Corinne Narassiguin. Notre groupe est tout à fait favorable à l’article 2 bis, introduit par la commission des lois, qui prévoit la transmission au Parlement par le Gouvernement, dans un délai de trois ans à compter de la promulgation de la loi, d’un rapport évaluant les dispositions dérogatoires en matière d’immigration et de nationalité applicables à Mayotte. Enfin !
La nécessité d’une évaluation de ces dispositions dérogatoires, qui se sont multipliées au cours des dernières années, nous n’avons de cesse de l’affirmer, texte après texte. Voilà deux mois, lors de l’examen de la proposition de loi visant à renforcer les conditions d’accès à la nationalité française à Mayotte, nous avions défendu une évaluation des dispositions dérogatoires applicables à Mayotte en matière de nationalité, évaluation à laquelle la commission des lois s’était opposée ; il faut croire qu’il y a les mauvais rapports, ceux qui sont demandés par l’opposition, et les bons, qui le sont par la majorité sénatoriale…
Que cette demande soit aujourd’hui reprise par la commission des lois est une bonne chose. Cependant, l’échéance de trois ans nous paraît trop lointaine. C’est pourquoi nous demandons qu’un rapport d’étape nous soit remis d’ici environ dix-huit mois, plus précisément avant le 31 décembre 2026.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Bitz, rapporteur. Ma chère collègue, je pense que vous avez mal interprété la position de la commission sur la proposition que vous aviez formulée il y a quelques semaines : la commission a estimé que votre demande n’était pas assez ambitieuse, car elle ne portait que sur le droit de la nationalité. (Mme Corinne Narassiguin rit.)
Pour notre part, nous demandons un rapport sur l’ensemble des dispositions dérogatoires dans le domaine migratoire et la nationalité.
En revanche, l’échéance de trois ans que nous avons fixée nous semble raisonnable. Nous craignons qu’un délai de dix-huit mois ne permette pas de disposer du recul nécessaire pour analyser l’effet des mesures que le Gouvernement nous propose au travers de ce projet de loi.
La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 2 bis.
(L’article 2 bis est adopté.)
Après l’article 2 bis
Mme la présidente. Je suis saisie de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 104, présenté par Mmes Corbière Naminzo et Cukierman, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
I. – Après l’article 2 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 441-8 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est abrogé.
II. – En conséquence, faire précéder cet article d’une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :
Chapitre II…
Supprimer les dispositions spécifiques du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile propres à Mayotte
La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. Cet amendement traite de la question déjà évoquée à maintes reprises de la fin de la territorialisation des titres de séjour à Mayotte.
Vous le savez, mes chers collègues, en l’état du droit, les titres de séjour délivrés par le préfet de Mayotte ne donnent droit au séjour qu’à Mayotte. Leurs titulaires doivent donc présenter un visa pour se rendre dans un autre département.
Cette dérogation entraîne un grand nombre de conséquences néfastes : elle limite la circulation vers l’Hexagone des enfants de parents étrangers en situation régulière ; elle complexifie le parcours de nombreux jeunes majeurs, qui doivent entamer des démarches supplémentaires pour continuer leurs études dans un autre département ou pour travailler ailleurs en France ; elle peut influencer les choix d’orientation des jeunes et les dissuader de s’inscrire dans un cursus scolaire ou dans une formation qui nécessiterait un déplacement dans un autre département ; elle condamne à l’errance un grand nombre de jeunes, qui se retrouvent piégés à Mayotte sans solution.
La Commission nationale consultative des droits de l’homme a déjà dénoncé la situation des jeunes laissés dans une précarité administrative, et donc financière, totale après le baccalauréat : « Ils sont doublement sanctionnés, durant leur minorité et à leur majorité, subissant injustement les effets de la carence des pouvoirs publics. Des centaines de jeunes majeurs, au parcours scolaire brillant, sont ainsi dans l’impossibilité d’obtenir une carte de séjour dès l’obtention de leur baccalauréat pour poursuivre leurs études, les poussant à réaliser une ou deux années blanches. »
La fin de la territorialisation des titres de séjour est un angle mort du projet de loi et cette mesure fait face à un refus obstiné de la part du Gouvernement, mais nous, parlementaires, devons prendre nos responsabilités, conformément aux revendications des élus locaux : nous devons voter la fin de la territorialisation des titres de séjour.
J’ajoute qu’il est particulièrement méritant d’avoir un parcours scolaire exemplaire, brillant, et de réussir dans les conditions que nous avons décrites jusqu’à présent. Il nous faut donc être au rendez-vous.
Mme la présidente. Les trois amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 6 rectifié est présenté par M. Omar Oili, Mmes Narassiguin, Artigalas et Le Houerou, M. Lurel et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 19 rectifié bis est présenté par Mme Ramia, MM. Patriat, Buis et Buval, Mmes Cazebonne, Duranton et Havet, MM. Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne et Lévrier, Mme Nadille, M. Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud et Rohfritsch, Mme Schillinger, M. Théophile et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
L’amendement n° 151 rectifié est présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 2 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 441-8 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est abrogé.
La parole est à M. Saïd Omar Oili, pour présenter l’amendement n° 6 rectifié.
M. Saïd Omar Oili. Cet amendement a un objet proche du précédent, puisqu’il vise à abroger l’article du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile instituant la délivrance à Mayotte de titres de séjour territorialisés, qui bloquent leurs détenteurs sur le territoire du cent unième département.
Nous en avons déjà parlé lors de l’examen de notre amendement sur le rapport annexé, ce régime dérogatoire, spécifique à Mayotte, engendre une pression migratoire sur notre territoire. Or les capacités d’absorption de celui-ci sont depuis longtemps atteintes. Cette situation crée un trouble manifeste à l’ordre public, participe à la prolifération des bidonvilles et à la saturation des services publics de la santé, de l’éducation nationale, des réseaux d’adduction d’eau et d’assainissement. La fin de ce confinement migratoire à Mayotte aurait dû être un préalable à cette refondation, puisqu’il est l’une des principales causes du déclassement de notre territoire.
Pourtant, le Gouvernement refuse de supprimer les visas territorialisés, prenant prétexte de l’attractivité de Mayotte. Or, la géographie étant ce qu’elle est, Mayotte, si pauvre soit-elle, restera pour longtemps encore un territoire plus riche que ses voisins. Cela signifie-t-il que ces visas ne seront jamais supprimés ?
Le Gouvernement doit sortir de ses discours d’évitement. Il indique un jour que ces visas seront supprimés quand les causes de l’immigration irrégulière auront été réglées, un autre qu’ils le seront quand une révision constitutionnelle abolissant le droit du sol aura été adoptée. Bref, à chaque fois, de nouveaux prétextes sont convoqués pour ne pas les abroger !
Cette situation n’est plus tenable pour Mayotte. La République a un devoir de solidarité avec notre territoire. L’État ne peut pas nous laisser seuls en première ligne.
Mme la présidente. La parole est à Mme Salama Ramia, pour présenter l’amendement n° 19 rectifié bis.
Mme Salama Ramia. Je commencerai mon propos par un mot : équité. En effet, c’est bien de cela qu’il s’agit lorsqu’on évoque la suppression du titre de séjour territorialisé à Mayotte.
Ce titre, tel qu’il existe aujourd’hui, crée une situation unique dans la République. Des personnes en situation régulière, disposant d’un titre de séjour valide, ne peuvent pas franchir les frontières intérieures de leur pays d’accueil. Elles sont confinées, bloquées, assignées à résidence sur un territoire qui traverse lui-même d’immenses difficultés.
Je suis convaincue que cette territorialisation n’est plus tenable, non pas par idéologie, mais parce qu’elle est devenue contre-productive. Elle entrave la mobilité, fragilise les parcours d’insertion et alimente une forme d’impasse sociale. Nous ne pouvons pas défendre une République une et indivisible si nous acceptons qu’une catégorie de résidents soit assignée à un territoire.
Je veux répondre à ceux qui s’inquiètent de l’effet d’appel d’air de cette suppression. Cette préoccupation est légitime, mais elle ne peut pas servir à justifier indéfiniment une restriction aussi lourde de conséquences. Le développement de Mayotte ne peut pas passer par l’enfermement de ses résidents. Il passera par la sécurisation réelle des frontières, une coopération régionale renforcée et des politiques migratoires maîtrisées. Le levier principal, c’est le contrôle aux frontières, non le blocage des mobilités internes.
Enfin, je veux rappeler que cette situation pèse lourdement sur les Mahorais eux-mêmes. Ce sont eux qui, les premiers, doivent quitter leur île pour soigner un proche ou suivre des études. Ce sont eux qui voient leur hôpital, leur école, leur service public saturés. La solidarité nationale ne peut pas s’arrêter à la porte de l’océan Indien !
Je plaide donc pour une évolution sereine, maîtrisée, mais déterminée. Supprimer ce titre, ce n’est pas céder, c’est rétablir une forme de normalité républicaine et permettre à Mayotte de respirer, de circuler, de se projeter.
Mme la présidente. Veuillez conclure, ma chère collègue.
Mme Salama Ramia. Je sais que cette position peut réunir au-delà des clivages, car elle parle à la fois de justice, de responsabilité et d’efficacité.
Mme la présidente. La parole est à Mme Mélanie Vogel, pour présenter l’amendement n° 151 rectifié.
Mme Mélanie Vogel. Je serai brève, mes collègues ont déjà très bien défendu cet amendement.
Les visas territorialisés constituent une exception drastique au droit commun, en vertu de laquelle des personnes en situation régulière – il faut y insister, les titulaires de ce visa résident régulièrement sur un territoire de la République – se retrouvent confinées dans un territoire, dans l’impossibilité de circuler librement en France, comme toute personne ayant un titre de séjour régulier.
Cela engendre un effet pervers, à rebours des objectifs que prétend défendre le Gouvernement, qui consiste à coincer des personnes en situation régulière à Mayotte, alors même que, comme nous le rappelons régulièrement, la tension démographique dans ce territoire pose un problème de précarité croissante, notamment parce que les services de l’État sont défaillants pour traiter les demandes de titre de séjour.
On se retrouve donc dans une situation absurde, dans laquelle des personnes – souvent des enfants de parents en situation régulière – sont dans l’incapacité de pouvoir circuler, alors même que l’on déplore la pression démographique que subit ce territoire.
Dès 2017, la Commission nationale consultative des droits de l’homme avait souligné que le visa territorialisé portait atteinte aux droits des mineurs et des majeurs. Nous sommes en 2025, il est plus que temps de revenir sur ce dispositif.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Bitz, rapporteur. La commission souhaite que, pour l’instant, le titre territorialisé soit maintenu à Mayotte.
Ce titre existe depuis 1990 et n’autorise le séjour que sur le territoire de Mayotte. Néanmoins, il convient de souligner que le préfet de Mayotte peut délivrer des autorisations spéciales permettant de rejoindre une autre partie du territoire national et que de nombreuses exceptions sont prévues au profit des titulaires d’une carte de résident. Sont notamment dispensés de l’obligation d’obtenir une autorisation les conjoints, ascendants et descendants de Français. Ainsi, ce titre n’est pas territorialisé à 100 %, puisqu’un certain nombre d’exceptions existent déjà.
À plusieurs reprises, le Sénat a refusé de supprimer ces régimes dérogatoires, en 2018 et en 2023.
D’une part, nous craignons que cela ne règle pas la situation de Mayotte, car les candidats au départ, qu’ils viennent de l’Afrique des Grands Lacs ou des Comores, peuvent avoir la perspective d’utiliser Mayotte comme un point d’appui leur permettant de rejoindre une autre partie du territoire national ; l’effet d’appel d’air est craint par de nombreux acteurs et toutes les auditions que nous avons menées nous conduisent à le redouter.
D’autre part, les personnes concernées, notamment les Comoriens, iraient principalement à La Réunion et risqueraient de déstabiliser un autre territoire d’outre-mer.
Pour ces raisons, il nous semble préférable de ne pas ouvrir, dans l’esprit des candidats au départ, la perspective de pouvoir rejoindre la France métropolitaine ou un autre territoire d’outre-mer à partir de Mayotte.
En outre, je pense que ce dispositif est également dans l’intérêt de Mayotte, car, sans lui, nous n’arriverons jamais à tarir le flux. Gardons-nous d’envoyer des messages contradictoires aux candidats au départ.
Toutefois, la commission ne méconnaît pas le caractère dérogatoire et sensible du titre territorialisé. J’entends la demande à la fois de la population mahoraise et des collectifs, relayée avec force dans cet hémicycle par les deux sénateurs du territoire.
Pour cette raison, la commission a introduit la réalisation d’ici à trois ans d’un nécessaire bilan d’étape sur l’ensemble des dispositions dérogatoires, y compris le titre territorialisé. J’espère qu’une amélioration de la situation, grâce au tarissement des flux, sera constatée. Peut-être ce bilan ouvrira-t-il la voie à une réforme du titre ? Celui-ci pourra connaître des adaptations si nous parvenons à maîtriser la situation migratoire.
La commission émet un avis défavorable sur ces amendements.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État. Je prends la suite des propos pleins de sagesse de M. le rapporteur sur ces amendements visant à supprimer le titre de séjour territorialisé. J’ai déjà eu l’occasion, d’abord en commission des lois, puis au cours de la discussion générale et, enfin, il y a un instant encore sur l’article 1er, d’indiquer la position du Gouvernement.
Le Gouvernement a discuté avec les élus mahorais, qui sont incontestablement unanimes et soutenus par un certain nombre de citoyens et de collectifs mobilisés sur le sujet. Toutefois, je confirme mon opposition, celle du chef de l’État, du Premier ministre et, notamment, du ministre de l’intérieur, à cette suppression.
Ce dispositif – il se situe hors du droit commun national afin d’être mieux adapté à la situation de Mayotte, notamment dans le domaine migratoire – n’est pas une première. D’autres dérogations continuent à être demandées, parfois sur l’initiative des élus : je pense à la restriction du droit du sol. L’adoption de mesures spécifiques, dont la validité territoriale des titres de séjour, a été nécessaire pour réduire l’attractivité de l’île.
Donner la possibilité de quitter rapidement le territoire pour rejoindre le continent européen ou La Réunion – M. le rapporteur vient d’évoquer ce cas de figure – ne ferait que renforcer l’attractivité de Mayotte. Celle-ci relève de la situation particulière de l’île : malgré ses difficultés, ce territoire est attractif en comparaison des pays qui l’entourent.
Par ailleurs, le risque de détournement des procédures s’est accru : sans titre territorialisé, la pression migratoire locale serait encore plus élevée. Du fait de notre rapport avec les Comores, qui n’échappe à personne, et dans la situation actuelle de reconstruction et de refondation du territoire de Mayotte, supprimer ce titre serait donc dangereux. En tout cas, cette mesure reviendrait à méconnaître la réalité.
Dans un souci d’écoute, vos rapporteurs ont ouvert la voie à une réforme de ce titre, au travers de l’article 2 bis qui vient d’être adopté : les mesures dérogatoires en matière d’immigration seront évaluées d’ici à trois ans. J’espère que la refondation de Mayotte aura avancé, que la situation migratoire aura évolué et que nous pourrons reconsidérer ce dispositif, parmi d’autres. Pour l’instant, nous sommes au milieu du gué : ce n’est pas le moment de supprimer ce titre.
Pour cette raison, le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces amendements.
Mme la présidente. La parole est à M. Saïd Omar Oili, pour explication de vote.
M. Saïd Omar Oili. Des personnes en situation régulière disposant d’une carte de séjour d’un an jouent dans les équipes de football et de basket de Mayotte. À chaque fois qu’une dérogation est sollicitée pour qu’elles accompagnent l’équipe à l’occasion d’un match à l’extérieur du territoire, elle est refusée. Parfois, la demande faite en préfecture conduit même à une accusation d’incitation à l’immigration clandestine ! Du fait de ces refus, des équipes en mesure de gagner ne le peuvent pas parce que leurs meilleurs joueurs ne sont pas autorisés à les accompagner.
Monsieur le ministre, vous engagez-vous à donner des instructions claires aux préfectures pour que ces joueurs puissent suivre leur équipe en métropole ? Ceux qui ont réussi à venir dans l’Hexagone sont tous retournés à Mayotte : ils ne se sont pas évaporés dans la nature !
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 6 rectifié, 19 rectifié bis et 151 rectifié.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, ainsi que du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 290 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 328 |
Pour l’adoption | 118 |
Contre | 210 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 103, présenté par Mmes Corbière Naminzo et Cukierman, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Après l’article 2 bis
I. - Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le 6° de l’article L. 441-7 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est abrogé.
II. - En conséquence, faire précéder cet article d’une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :
Chapitre II …
Supprimer les dispositions spécifiques du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile propres à Mayotte
La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. Par cet amendement, mon groupe souhaite supprimer une autre dérogation en vigueur à Mayotte, celle prévue pour l’obtention du document de circulation pour étranger mineur (DCEM). Sur l’ensemble du territoire, ce document est fourni de plein droit à un mineur si l’un des parents dispose d’une carte de séjour temporaire ou d’une carte de résident. Mayotte est une exception : l’enfant doit, en plus, être né en France.
Cette dérogation a des conséquences concrètes, car elle touche au droit de vivre avec ses parents qui est constitutif de l’article 9 de la convention internationale des droits de l’enfant. En effet, les foyers à Mayotte sont parfois composés de ménages se caractérisant par une pluralité de nationalités et de statuts administratifs. Il est donc fréquent que les parents soient en situation régulière, mais que l’enfant soit né dans un pays étranger.
Ainsi, de nombreux enfants se trouvent bloqués sur le territoire. Cette situation est problématique dans les cas variés où il est nécessaire de quitter l’île : raisons de santé, scolarisation ou études, rapprochement familial avec des personnes qui vivent dans l’Hexagone ou dans la région de l’océan Indien. Cette spécificité apparaît d’autant plus néfaste si l’on considère la proportion d’enfants étrangers présents sur le territoire mahorais.
Il contrevient à l’intérêt supérieur de l’enfant de ne pas pouvoir se déplacer librement. Toutes les dispositions qui éloignent Mayotte du droit commun nous font, en réalité, sortir du cadre de l’humanité. Je vous demande donc de voter en faveur de cet amendement pour supprimer cette disposition dérogatoire et prioritairement discriminatoire à l’égard des enfants.
Mme la présidente. L’amendement n° 154 rectifié, présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Après l’article 2 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le 6° de l’article L. 441-7 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est abrogé.
La parole est à Mme Mélanie Vogel.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Bitz, rapporteur. Ces amendements portent sur la traduction du visa territorialisé pour les mineurs, si l’on veut résumer les choses.
La dérogation à l’obtention du DCEM vise à empêcher que le séjour de mineurs sur le territoire métropolitain ou un autre territoire d’outre-mer soit utilisé pour faciliter l’entrée de majeurs cherchant à les rejoindre. Il ne faut pas oublier cet aspect : si la possibilité de disposer d’un visa était ouverte aux mineurs, alors elle serait évidemment ouverte aux ascendants. L’esprit du titre territorialisé serait complètement détourné.
Le Sénat vient de rejeter, à la suite d’un scrutin public, la remise en cause de ce titre. Aussi, la commission émet un avis défavorable sur ces amendements.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L’amendement n° 53, présenté par Mme Aeschlimann, est ainsi libellé :
Après l’article 2 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le 12° de l’article L. 441-7 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …° Pour l’application du 2° de l’article L. 434-7, ne peut être considéré comme normal un logement édifié ou occupé sans droit ni titre ou relevant de l’habitat informel ; ».
La parole est à Mme Marie-Do Aeschlimann.
Mme Marie-Do Aeschlimann. Cet amendement vise à adapter la mise en œuvre du regroupement familial à la situation spécifique de Mayotte, compte tenu des caractéristiques de l’habitat sur l’archipel. Ce dernier connaît une intense pression migratoire et une crise sanitaire, économique et sociale aggravée.
Le 2° de l’article L. 434-7 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile subordonne le regroupement familial sur le territoire français à la condition que l’étranger dispose d’un « logement […] normal pour une famille comparable vivant dans la même région géographique ».
Or l’application littérale de ce texte sur le territoire mahorais est problématique. En effet, Mayotte se caractérise par un habitat informel aux proportions particulièrement élevées : il représente près de 40 % du parc total de logements.
Cette spécificité est directement corrélée à la situation migratoire, puisque, selon l’Insee, cet habitat informel, constitué principalement de cases en tôle dépourvues d’alimentation en eau potable, de raccordement au réseau d’eau potable et d’eaux usées, et présentant des risques caractérisés en matière d’hygiène, de salubrité, de santé publique et d’ordre public, est occupé aux deux tiers par des étrangers.
En outre, il s’avère que plus de 80 % des titres de séjour délivrés à Mayotte le sont au titre de l’immigration familiale.
Afin de contenir cette forme d’immigration et de s’adapter à ses caractéristiques, mais aussi de favoriser la lutte contre l’expansion de l’habitat informel à Mayotte, il est prévu par cet amendement que, sur ce territoire, le regroupement familial ne puisse avoir lieu lorsque l’étranger dispose d’« un logement édifié ou occupé sans droit ni titre ou relevant de l’habitat informel ».
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Bitz, rapporteur. Je remercie notre collègue d’avoir déposé cet amendement. Celui-ci permet d’adapter les mesures de regroupement familial aux spécificités mahoraises : l’immigration familiale y est forte – il faut à tout prix la contenir – et l’habitat, dans sa typologie, relève de l’informel. De fait, les bidonvilles sont extrêmement importants sur l’archipel.
Je réitère mes remerciements pour cette adaptation de la règle de droit commun au territoire mahorais. La commission émet un avis favorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État. Il s’agit d’un amendement utile et de bon sens.
Madame la sénatrice, comme l’a précisé le Conseil d’État, le demandeur peut être soit propriétaire d’un logement libre, soit locataire, soit titulaire d’une promesse ferme de location. Les personnes occupant un logement sans droit ni titre sont ainsi exclues du dispositif de regroupement par le juge administratif.
Par ailleurs, aux termes de la directive 2003/86/CE du 22 septembre 2003, « lors du dépôt de la demande de regroupement familial, l’État membre concerné peut exiger de la personne qui a introduit la demande de fournir la preuve que le regroupant dispose : a) d’un logement […] qui répond aux normes générales de salubrité et de sécurité en vigueur dans l’État membre concerné ». Il en ressort que l’amendement que vous proposez inscrit dans la loi un critère déjà prévu par la jurisprudence et conforme au droit européen.
Pour cette raison, le Gouvernement émet un avis favorable sur votre amendement.
Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Narassiguin, pour explication de vote.
Mme Corinne Narassiguin. C’est assez extraordinaire : dès qu’il s’agit de réduire les droits des étrangers, on se félicite tantôt d’un droit dérogatoire tout à fait justifié, tantôt de coller au droit commun !
La situation est complètement ubuesque et cette mesure assez indigne. Nous voterons évidemment contre.
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 2 bis.
L’amendement n° 152, présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Après l’article 2 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai d’un an à compter de la publication de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport évaluant l’impact du contrat d’intégration républicaine (CIR) sur l’intégration des étrangers à Mayotte.
La parole est à Mme Mélanie Vogel.
Mme Mélanie Vogel. Cet amendement tend à la remise d’un rapport sur le contrat d’intégration républicaine (CIR). Celui-ci est entré en vigueur de manière tardive à Mayotte, le 1er janvier 2022, et sous une forme très allégée : le volet linguistique est limité par rapport à ce qui se fait dans l’Hexagone et le volet civique est lui-même dégradé.
Contrairement au droit commun, le contrat d’intégration républicaine appliqué sur l’île ne prévoit pas de positionnement linguistique externalisé, de formations complémentaires, d’orientation vers le service public de l’emploi, etc.
Compte tenu de la mise en œuvre dégradée et du déploiement tardif du CIR, je demande au Gouvernement de faire un bilan de son application et de ses conséquences sur l’intégration des étrangers à Mayotte.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Bitz, rapporteur. Il s’agit d’une nouvelle demande de rapport. La commission est réservée sur le fond, d’autant que la demande est en partie satisfaite. En effet, un autre rapport sera rendu d’ici à trois ans : il traitera de l’ensemble des mesures dérogatoires, notamment de l’application des mesures relatives à l’immigration et à la nationalité.
Puisque le sujet de l’intégration devra figurer dans le rapport prévu à l’article 2 bis, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 152.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Chapitre II
Améliorer les dispositifs de lutte contre les reconnaissances frauduleuses de paternité et de maternité
Article 3
Le titre Ier du livre V du code civil est complété par un article 2496 ainsi rétabli :
« Art. 2496. – Lorsqu’elle est faite à Mayotte par acte reçu par l’officier de l’état civil, la reconnaissance de paternité ou de maternité régie par les articles 316 à 316-5 est reçue par l’officier de l’état civil de la commune de Mamoudzou, sauf si elle est simultanée à la déclaration de naissance prévue à l’article 55.
« Lors de l’établissement de l’acte de reconnaissance d’un enfant né à Mayotte, l’auteur de la reconnaissance est informé des obligations découlant des articles 371-1 et 371-2 du code civil, de l’article 227-17 du code pénal et de l’article L. 823-11 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile. »
Mme la présidente. L’amendement n° 81, présenté par Mmes Corbière Naminzo et Cukierman, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. Cet amendement vise à supprimer l’article 3. La centralisation à Mamoudzou des actes de reconnaissance de maternité et de paternité aura pour conséquence une inégalité d’accès au service public : un traitement véritablement discriminatoire sera organisé en fonction de la zone d’habitation.
En effet, les difficultés de circulation sur le territoire sont réelles. Les personnes habitant de l’autre côté de l’île seront dissuadées de se rendre au chef-lieu pour y accomplir les actes de reconnaissance de paternité ou de maternité. Cette centralisation compromettra un grand principe des droits de l’enfant, à savoir le droit à une identité.
Cet article est d’autant plus préoccupant que l’accès au droit est plus difficile pour les plus vulnérables : la mesure permettra de se débarrasser très facilement des plus fragiles. Aussi, nous vous proposons de voter en faveur de notre amendement afin de supprimer une telle discrimination.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Ma chère collègue, la commission ne pense pas du tout que les dispositions de l’article auront l’effet que vous décrivez. Au contraire, nous estimons que la centralisation à Mamoudzou des reconnaissances de paternité et de maternité répond à un objectif d’intérêt général : elle permettra de mieux détecter les fraudes, qui visent à contourner les règles de séjour sur le territoire français.
Quelque 78 % des naissances ayant lieu à Mamoudzou, les reconnaissances sont d’ores et déjà effectuées dans cette commune. Environ 25 % de celles-ci ont lieu concomitamment à la déclaration de naissance : elles ne sont donc pas concernées.
Ce dispositif ne prive pas les parents de la possibilité d’établir la filiation à l’égard de leur enfant. Ils peuvent le faire à tout moment en se rendant à Mamoudzou sans délai.
La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à M. Saïd Omar Oili, pour explication de vote.
M. Saïd Omar Oili. Monsieur le ministre, la commune de Mamoudzou recevra-t-elle une compensation financière du fait de la surcharge de travail ? Puisque l’enregistrement de l’enfant doit se faire dans un certain délai, n’existe-t-il pas un risque d’avoir à l’avenir des enfants dépourvus d’extrait de naissance ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre d’État.
M. Manuel Valls, ministre d’État. Comme vient de l’indiquer Mme la rapporteure, 75 % des naissances ont lieu à Mamoudzou. Les actes de reconnaissance relèvent d’une compétence régalienne exercée dans un cadre défini, aussi les compensations n’ont-elles pas lieu d’être.
Mme la présidente. La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo, pour explication de vote.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. Monsieur le ministre, quelle est la réalité statistique des reconnaissances frauduleuses de maternité à Mayotte ? Je ne parviens pas à me faire une idée du phénomène. Je vous remercie de répondre à ma question.
Mme la présidente. L’amendement n° 34 rectifié, présenté par Mme Briante Guillemont, MM. Masset, Gold et Grosvalet, Mme Pantel et M. Daubet, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque les circonstances le justifient, l’officier de l’état civil peut déléguer, par une décision motivée, à un officier de l’état civil d’une autre commune de Mayotte, les reconnaissances prévues aux alinéas précédents. »
La parole est à Mme Sophie Briante Guillemont.
Mme Sophie Briante Guillemont. Cet amendement vise à permettre des délégations ponctuelles dans les communes éloignées de la part de l’officier d’état civil de Mamoudzou, afin que les parents souhaitant faire une reconnaissance ne soient pas obligés de se déplacer au chef-lieu en étant contraints par les délais. Il convient de tenir compte des difficultés de transport ou de mobilité de certaines populations, en particulier des plus fragiles.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Votre amendement vide le dispositif de sa substance en permettant que l’officier d’état civil de Mamoudzou délègue à d’autres communes les reconnaissances de paternité et de maternité.
Par ailleurs, difficultés de transport ou non, les reconnaissances peuvent être établies à tout moment à Mamoudzou.
La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 3.
(L’article 3 est adopté.)
Article 4
Le titre Ier du livre V du code civil est complété par un article 2497 ainsi rétabli :
« Art. 2497. – Lorsque l’enfant est né à Mayotte, la durée du sursis à l’enregistrement de la reconnaissance prévue à la première phrase du troisième alinéa de l’article 316-1 ne peut excéder deux mois, renouvelable une fois par décision spécialement motivée. La durée du sursis prévue à la deuxième phrase du troisième alinéa du même article 316-1 est portée à trois mois, renouvelable une fois par décision spécialement motivée, lorsque l’enquête est menée, en totalité ou en partie, à l’étranger par l’autorité diplomatique ou consulaire. »
Mme la présidente. L’amendement n° 98, présenté par Mmes Corbière Naminzo et Cukierman, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. Cet amendement a pour objet de supprimer l’article 4, qui allonge la durée du sursis à l’enregistrement des reconnaissances d’enfant. De fait, le procureur de la République peut soit prononcer l’enregistrement d’une reconnaissance, soit décider d’un sursis.
L’allongement du délai ferait peser de lourdes conséquences sur les enfants concernés. En effet, l’ouverture de droits sociaux ou l’accès aux services de santé seraient alors également bloqués, compromettant la sécurité psychique et physique des enfants et renforçant la précarité et l’errance administrative des parents assujettis à des procédures longues et imprévues.
Par ailleurs, pouvez-vous, monsieur le ministre, me préciser – je vous le demande une fois encore – le nombre d’actes frauduleux de reconnaissance de maternité ?
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Le délai actuel de sursis à l’enregistrement d’une reconnaissance de paternité ou de maternité est insuffisant pour confirmer ou infirmer le caractère frauduleux de la démarche, compte tenu de la complexité des enquêtes à mener.
La commission pense que l’allongement, qui reste raisonnable, du délai a un but d’intérêt général : il permet de mieux détecter les reconnaissances frauduleuses, qui nuisent à l’intérêt de l’enfant. En effet, les auteurs de ces démarches souvent n’assureront pas leurs obligations parentales. Lutter contre ces fraudes, c’est œuvrer en faveur de l’intérêt de l’enfant.
La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L’amendement n° 66, présenté par MM. Hochart, Szczurek et Durox, est ainsi libellé :
Alinéa 2
1° Première phrase
Remplacer le mot :
deux
par le mot :
quatre
2° Seconde phrase
Remplacer le mot :
trois
par le mot :
six
La parole est à M. Joshua Hochart.
M. Joshua Hochart. Cet amendement vise à renforcer la lutte contre les reconnaissances frauduleuses de paternité à Mayotte. Concrètement, il a pour objet de porter de deux à quatre mois le délai initial de sursis que peut décider le procureur de la République pour vérifier une reconnaissance lorsqu’un doute sérieux pèse sur la sincérité de cette dernière. De plus, il tend à faire passer de trois à six mois ce délai lorsqu’une enquête est menée à l’étranger par les autorités diplomatiques ou consulaires.
Cette mesure est essentielle. En effet, les reconnaissances frauduleuses de paternité sont devenues à Mayotte un phénomène préoccupant, utilisées comme un moyen de contourner le droit de séjour. Le droit actuel ne permet pas aux services concernés, notamment au parquet, de mener des enquêtes complètes et sérieuses dans des délais aussi courts, surtout lorsqu’il faut interroger des autorités étrangères.
Il faut aussi rappeler que ces reconnaissances frauduleuses ont des effets très concrets : elles permettent à des personnes de rester sur le territoire, de toucher des aides sociales et, parfois même, d’accéder à la nationalité. Ce n’est pas un détail ! Maintenir les choses en l’état, en ne touchant pas aux délais trop courts pour enquêter, laisserait la porte ouverte à un système de détournement du droit qui affaiblit notre politique migratoire et désorganise un peu plus le département, déjà sous pression, qu’est Mayotte.
Par cet amendement, les garanties procédurales ne sont pas remises en cause. Il s’agit non pas de bloquer les reconnaissances de paternité légitimes, mais de permettre au parquet de travailler efficacement, grâce à des délais réalistes, et de distinguer ainsi les reconnaissances honnêtes de celles qui sont non justifiées, ces dernières étant parfois organisées dans une logique de fraude.
Cette mesure simple, ciblée et nécessaire s’inscrit dans une volonté de rétablir l’ordre républicain à Mayotte et de lutter contre les abus qui sapent à la fois notre droit et la confiance dans nos institutions.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Mon cher collègue, allonger les délais de sursis à l’enregistrement dans les proportions que vous proposez serait disproportionné au regard de l’article 73 de la Constitution. Elles porteraient une atteinte excessive au droit à mener une vie familiale.
Sachant que le sursis est renouvelable une fois, l’allongement du délai à six mois en cas d’enquête menée à l’étranger – cela arrive assez fréquemment – pourrait priver l’enfant de reconnaissance durant une année, et donc mettre à mal sa filiation.
Le texte dans sa rédaction actuelle contient un dispositif suffisamment équilibré. Aussi, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 4.
(L’article 4 est adopté.)
Article 5
Le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi modifié :
1° À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 823-11, le montant : « 15 000 euros » est remplacé par le montant : « 75 000 euros » ;
2° La dernière ligne du tableau du second alinéa des articles L. 832-1 et L. 833-1 est remplacée par trois lignes ainsi rédigées :
« |
L. 820-1 à L. 823-10 |
||
L. 823-11 |
La loi n° … du … |
||
L. 823-12 à L. 824-12 |
» ; |
3° La dernière ligne du tableau du second alinéa des articles L. 834-1, L. 835-1 et L. 836-1 est remplacée par trois lignes ainsi rédigées :
« |
L. 822-5 à L. 823-10 |
||
L. 823-11 |
La loi n° … du … |
||
L. 823-12 à L. 824-12 |
» |
– (Adopté.)
Après l’article 5
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 76, présenté par MM. Szczurek, Durox et Hochart, est ainsi libellé :
Après l’article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le titre Ier du livre V du code civil est ainsi modifié :
1° À l’article 2492, après le mot : « Mayotte », la fin de l’article est ainsi rédigée : « , à l’exception des articles 19-1, 19-3, 19-4, 20-5, 21-7 à 21-12, 21-13-1, 21-13-2. » ;
2° Les articles 2493, 2494 et 2495 sont abrogés.
La parole est à M. Joshua Hochart.
Mme la présidente. L’amendement n° 102, présenté par Mmes Corbière Naminzo et Cukierman, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Après l’article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 423-13 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. 423-…. – Un enfant né à Mayotte, pour lequel l’article 2493 du code civil est applicable, se voit délivrer automatiquement, à l’âge de dix-huit ans, un titre de séjour pluriannuel portant la mention “vie privée familiale – jeune né en France”. »
La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. Cet amendement a pour objet d’automatiser l’enregistrement d’une première demande de titre de séjour mention « jeune né en France ». Cette mesure vise, d’une part, les enfants qui remplissent les conditions classiques d’acquisition de la nationalité française, mais qui se voient empêchés de la demander du fait des nouvelles dérogations, d’autre part, les jeunes qui remplissent les conditions pour obtenir un titre de séjour.
En effet, les jeunes qui remplissent les conditions d’accès à la nationalité française, conditions en vigueur partout sur le territoire national sauf à Mayotte, sont obligés de faire une demande de titre de séjour à leur majorité. Ils sont alors confrontés à une multitude d’obstacles, qui vont du manque d’information à la fermeture ou au blocage de la préfecture.
Du fait de ces obstacles, l’obtention d’un titre de séjour prend d’un à trois ans. Pendant cette période, les enfants deviennent majeurs et obtiennent leur baccalauréat : le délai pour s’inscrire à Parcoursup expire et ils se retrouvent automatiquement en année blanche, sans possibilité d’étudier ou de travailler.
La préfecture et le rectorat ont créé un système qui permet à une poignée d’élèves de bénéficier d’un canal de régularisation auprès de la préfecture pour continuer leurs études. Il ne concernerait que 450 jeunes alors que plus du triple le nombre d’élèves deviennent chaque année bacheliers. Laisser les jeunes sans solution pour obtenir un titre de séjour revient à les condamner à l’errance et à les priver de leurs ambitions.
Le groupe CRCE-K dénonce le phénomène des jeunes en errance à Mayotte, que la commission entretient en maintenant les intéressés dans l’errance administrative, et donc dans la précarité économique. Par conséquent, il s’agit par cet amendement d’élargir le canal de régularisation créé par la préfecture et le rectorat pour l’ouvrir aux autres bacheliers.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur ces amendements.
Concernant l’amendement n° 102, la délivrance automatique d’un titre de séjour risquerait de créer un appel d’air, et donc d’accroître l’immigration irrégulière à Mayotte. Par ce texte, nous visons un objectif contraire.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 102.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Chapitre III
Mieux lutter contre l’immigration irrégulière et faciliter l’éloignement
Article 6
Le second alinéa du 3° de l’article L. 761-8 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi rédigé :
« À Mayotte, l’étranger peut, dans des circonstances exceptionnelles, bénéficier d’une aide au retour. Il peut également, sous réserve de l’existence d’un projet économique viable, bénéficier d’une aide à la réinsertion économique ou, s’il est accompagné d’un ou plusieurs enfants mineurs, de mesures d’accompagnement. Les conditions d’attribution de ces aides sont fixées par arrêté du ministre chargé de l’immigration et du ministre chargé des outre-mer, après avis du conseil d’administration de l’Office français de l’immigration et de l’intégration. – (Adopté.)
Article 7
I. – Après le 5° de l’article L. 761-8 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, il est inséré un 5° bis ainsi rédigé :
« 5° bis L’article L. 741-5 est complété par cinq alinéas ainsi rédigés :
« “Lorsqu’il ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir un risque de soustraction à l’exécution de la décision d’éloignement et qu’aucune autre mesure n’apparaît suffisante à garantir efficacement l’exécution effective de cette décision, l’étranger accompagné d’un mineur qui se trouve dans l’un des cas prévus à l’article L. 731-1 peut, pour le temps strictement nécessaire à l’organisation de l’éloignement et qui ne peut excéder quarante-huit heures, être placé dans des lieux spécialement adaptés à la prise en charge des besoins de l’unité familiale.
« “Les caractéristiques de ces lieux, indépendants des lieux de rétention et qui garantissent aux membres de la famille une intimité adéquate, dans des conditions qui tiennent compte de l’intérêt supérieur de l’enfant, sont définies par décret en Conseil d’État.
« “En cas d’impossibilité matérielle de procéder à l’éloignement pour une raison étrangère à l’administration, l’autorité administrative peut proroger ce placement pour un nouveau délai de vingt-quatre heures.
« “L’étranger qui fait l’objet d’une décision de placement ou de prorogation de celui-ci en application des deuxième et quatrième alinéas du présent article peut la contester devant le magistrat du siège du tribunal judiciaire dans un délai de quarante-huit heures. Le magistrat du siège du tribunal judiciaire statue, par ordonnance, dans les quarante-huit heures suivant sa saisine.
« “Sous réserve de ces adaptations, les chapitres I à IV du titre IV du livre VII sont applicables.” ; ».
II. – Le I entre en vigueur le 1er janvier 2027.
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques.
L’amendement n° 8 rectifié est présenté par Mme Narassiguin, M. Omar Oili, Mmes Artigalas et Le Houerou, MM. Lurel, Kanner et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 105 est présenté par Mmes Corbière Naminzo et Cukierman, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.
L’amendement n° 145 est présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Corinne Narassiguin, pour présenter l’amendement n° 8 rectifié.
Mme Corinne Narassiguin. Nous n’aurions pas imaginé, monsieur le ministre, que, à l’occasion d’un texte portant sur la refondation de Mayotte, soit de nouveau posée la question de la rétention des mineurs.
Cette question, nous la pensions dernière nous puisque le Parlement, par la loi du 26 janvier 2024 pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration, avait enfin voté – c’est l’une des rares mesures que nous avions approuvée dans ce texte – la fin du placement des mineurs en rétention.
Quels que soient les mots choisis et les efforts du Gouvernement pour ne pas employer celui de rétention, c’est pourtant bien une forme de rétention des mineurs à Mayotte que permettrait l’article 7.
Il faut dire les choses telles qu’elles sont : cet article permettra de placer des étrangers mineurs dans un lieu de privation de liberté. De toute évidence, les engagements du précédent gouvernement sont reniés.
Certes, la dernière loi Immigration avait prévu une entrée en vigueur différée de la fin de la rétention des mineurs pour Mayotte, mais Gérald Darmanin avait assuré à la représentation nationale que cette entrée en vigueur différée à 2027 ne visait pas « à revenir sur la décision historique d’interdire l’enfermement des mineurs dans des centres de rétention administrative (CRA), y compris à Mayotte ».
De façon plus claire encore, il affirmait : « Ce que nous proposons c’est de reporter la date d’entrée en vigueur de cette mesure à Mayotte, pas d’y renoncer. » Le reniement est total, d’autant que vous avez déposé un amendement pour prolonger la mesure jusqu’au mois de juillet 2028.
Le Gouvernement cherche à rassurer et affirme que ces lieux ne sauraient être assimilés à des lieux de rétention, car ils seront « indépendants des CRA ». Qu’ils soient indépendants des CRA est une chose, mais cela ne signifie pas que les conditions de rétention y seront différentes. D’ailleurs, l’étude d’impact précise très clairement que ces lieux constitueront « un cadre plus restrictif de liberté » que ne l’est l’assignation à résidence, en raison, notamment, « d’un dispositif de surveillance plus resserré ».
Disons les choses clairement : il s’agit d’un rétablissement de la rétention des mineurs. Nous y sommes frontalement opposés.
Mme la présidente. La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo, pour présenter l’amendement n° 105.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. Nous demandons la suppression de cet article, qui vise à permettre l’enfermement des enfants en rétention.
Depuis 2012, la France a fait l’objet de huit condamnations par la CEDH pour avoir infligé des « traitements inhumains et dégradants » en rétention administrative.
L’enfermement administratif des enfants en rétention est interdit dans l’Hexagone depuis le 26 janvier 2025 et le sera à Mayotte à partir du 1er janvier 2027. La création d’unités familiales, quand bien même les conditions pourraient être moins dégradées que dans un CRA, constitue toujours une privation de liberté. La détention d’un enfant au motif du statut migratoire de ses parents est une violation des droits de l’enfant. Qui décide à sa naissance du statut administratif de ses parents ?
Je vous demande de voter contre cette disposition extrêmement préoccupante, indigne du pays qui prétend être celui des droits de l’homme !
Mme la présidente. La parole est à Mme Mélanie Vogel, pour présenter l’amendement n° 145.
Mme Mélanie Vogel. Lors des négociations sur le pacte européen sur la migration et l’asile, le gouvernement français avait tenté de trouver une majorité d’États membres pour autoriser au niveau européen l’enfermement des enfants.
Cette tentative a échoué et nous avons progressivement abouti, en 2024, à une loi interdisant la rétention des mineurs. C’est une bonne chose : nous devrions en être fiers puisque l’enfermement des mineurs contrevient à nos engagements internationaux.
Que voyons-nous, ici, au travers d’un dispositif appelé « unité familiale » ? Rien de moins que la possibilité de placer en rétention des mineurs avec leurs parents, soit exactement l’inverse de ce que nous avons voté l’année dernière, conformément aux obligations internationales de la France.
Je rejoins les intervenants qui se sont exprimés avant moi. Il n’y a aucune raison valable pour qu’une mesure conforme aux droits humains dans l’Hexagone ne soit pas applicable à Mayotte. Pourquoi les enfants n’y bénéficieraient-ils pas des mêmes droits fondamentaux que ceux que la France est censée promouvoir et protéger partout sur son territoire, mais aussi à travers le monde ?
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Ces trois amendements visent à supprimer purement et simplement l’article 7, qui crée à Mayotte un régime spécifique de placement en unité familiale pour les étrangers accompagnés d’un mineur.
Replaçons le sujet dans son contexte. En 2023, 2 143 familles comprenant 2 909 mineurs accompagnants ont été placées en rétention à Mayotte, soit 97 % des mineurs en rétention sur tout le territoire national, pour une durée inférieure à vingt-quatre heures.
La loi du 26 janvier 2024 a prévu l’interdiction de la rétention des mineurs, même accompagnés. L’entrée en vigueur à Mayotte de cette interdiction a été reportée au 1er janvier 2027, compte tenu de la situation migratoire particulière de Mayotte. Ainsi que le Conseil d’État l’a relevé dans son avis sur le projet de loi, les particularités du territoire justifient pleinement des mesures dérogatoires en la matière.
Supprimer toute possibilité de rétention des mineurs reviendrait à conférer une immunité absolue contre l’éloignement aux clandestins parents d’un enfant mineur, l’assignation à résidence ne présentant pas les mêmes garanties pour assurer l’effectivité de l’éloignement. Je rappelle, au demeurant, que ces familles sont retenues dans des lieux spécialement dédiés et habilités localement.
Compte tenu du caractère massif de l’immigration familiale et de l’ampleur des reconnaissances frauduleuses de paternité, supprimer l’article 7 serait un frein majeur à l’éloignement des étrangers en situation irrégulière. La commission est donc défavorable à ces trois amendements.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État. La suppression du placement des familles dans les centres de rétention est une mesure forte qui a été soutenue par le gouvernement précédent dans le cadre de la loi du 26 janvier 2024 pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration.
Cette interdiction est effective depuis janvier 2024 sur l’ensemble du territoire, à l’exception du département de Mayotte dans lequel le législateur a choisi de laisser un peu de temps à l’exécutif.
Comme Mme la rapporteure vient de le souligner, la situation tout à fait exceptionnelle de Mayotte, compte tenu de la pression migratoire qui s’exerce sur l’archipel et de la nature de cette immigration irrégulière, majoritairement familiale, a nécessité le report de l’application de cette interdiction, afin de maintenir des capacités opérationnelles d’éloignement des étrangers en situation irrégulière accompagnés de mineurs.
Le Gouvernement n’a donc pas renoncé à l’objectif, à terme, d’interdire le placement en rétention des mineurs à Mayotte. C’est là où se situe notre débat. Le nombre de mineurs accompagnant leurs parents est particulièrement élevé au centre de rétention administrative de Pamandzi. Il avoisine chaque année les 3 000 depuis 2019 : il était de 2 900 mineurs accompagnants en 2023, contre 87 mineurs la même année pour l’ensemble de la France hexagonale. C’est bien la preuve que nous devons continuer à disposer à Mayotte d’infrastructures spécifiques permettant d’éloigner les familles.
Madame Narassiguin, vous affirmez que l’environnement des unités familiales sera similaire à celui des CRA, avec une « présence policière constante », des « appels réguliers aux haut-parleurs », des « grillages » et des « barbelés » – je vous renvoie à l’objet de votre amendement. Je connais votre engagement sur ces dossiers, et je le respecte pleinement, mais je veux vous dire qu’il n’en sera rien : les unités familiales seront des bâtiments indépendants des CRA, c’est-à-dire situés sur une emprise distincte, où l’intimité de chaque famille sera préservée.
Cette garantie figure dans le texte même de l’article 7. Comme l’énonce l’étude d’impact qui a valeur juridique, le régime de surveillance y sera plus léger. Il n’y aura aucun policier à l’intérieur, ni grillages, ni barbelés, ni haut-parleurs. De telles unités existent d’ailleurs dans des pays européens comme la Belgique.
Ces unités familiales n’auront pas vocation à accueillir l’ensemble des familles potentiellement concernées, mais elles permettront d’offrir une alternative plus sécurisée que l’assignation à résidence – compte tenu des problématiques de logement – pour permettre à la loi de la République, en l’occurrence celle qui prévoit l’éloignement des personnes en situation irrégulière, de s’appliquer.
En outre, il est inexact de prétendre que le dispositif de rétention des familles avec mineurs violerait nos engagements internationaux. Cinq arrêts du 12 juillet 2016 concernant la France ont rappelé que la rétention de familles avec mineurs ne méconnaît pas, par principe, les articles 3, 5 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Il doit simplement s’agir d’une mesure de dernier ressort si aucune autre mesure n’apparaît suffisante pour la mise en œuvre des décisions de retour. Je vous invite à lire les arrêts de la CEDH A.B. et autres c. France du 12 juillet 2016.
Par ailleurs, ce dispositif est conforme à la directive dite Retour de 2008, dont l’article 17 prévoit que « les familles placées en rétention dans l’attente d’un éloignement disposent d’un lieu d’hébergement séparé qui leur garantit une intimité adéquate ».
Il est enfin compatible avec l’affirmation du principe de l’intérêt supérieur de l’enfant par la convention de New York.
Supprimer sèchement cet article reviendrait à compliquer à l’extrême de nombreux éloignements à Mayotte, alors que la pression migratoire doit être mieux jugulée. Autrement dit, cette suppression reviendrait à compliquer encore davantage la vie des Mahorais.
Pour ces motifs, je suis défavorable à ces amendements.
Pour répondre brièvement à la question qui m’a été posée, la reconnaissance frauduleuse est le fait de se servir d’une déclaration de filiation mensongère, souvent par des hommes de nationalité française, pour des enfants de mères étrangères en situation irrégulière. Cela facilite la régularisation du séjour de la mère, voire l’accès ultérieur à la nationalité française.
En 2023, 7 % des reconnaissances de paternité ont été considérées comme frauduleuses, soit 583 cas sur 8 328 : le phénomène n’est donc pas anodin. En 2022, cela représentait 20 % de la fraude détectée sur des documents français lors des demandes de titres de séjour, d’où les dispositions que nous avons prises tout à l’heure. C’est le sens de nos débats sur ce texte.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 8 rectifié, 105 et 145.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. L’amendement n° 35 rectifié, présenté par Mme Briante Guillemont, MM. Masset, Gold et Grosvalet, Mme Pantel et M. Daubet, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Le III de l’article 86 de la loi n° 2024-42 du 26 janvier 2024 pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration est abrogé.
La parole est à Mme Sophie Briante Guillemont.
Mme Sophie Briante Guillemont. Cet amendement de réécriture va dans le même sens que les amendements de suppression précédents. Il vise à interdire sans délai le placement des mineurs en centre de rétention administrative à Mayotte.
Comme je l’ai souligné dans la discussion générale, le groupe du RDSE souhaite voter ce texte qui comporte de nombreuses mesures importantes pour l’avenir de Mayotte, mais cela nous sera très difficile si l’article 7 est maintenu en l’état.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Cet amendement, totalement irréaliste au regard de la situation à Mayotte, rendrait impossibles plusieurs milliers d’éloignements chaque année.
J’émets donc un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 36 rectifié, présenté par Mme Briante Guillemont, MM. Masset, Gold et Grosvalet, Mme Pantel et M. Daubet, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Rédiger ainsi cet alinéa :
« “Sur demande motivée de l’autorité administrative, le juge des libertés et de la détention peut autoriser, lorsqu’il ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir un risque de soustraction à l’exécution de la décision d’éloignement et qu’aucune autre mesure n’apparaît suffisante à garantir efficacement l’exécution effective de cette décision, l’étranger accompagné d’un mineur, qui se trouve dans l’un des cas prévus à l’article L. 731-1, pour le temps strictement nécessaire à l’organisation de l’éloignement et qui ne peut excéder quarante-huit heures, à être placé dans des lieux spécialement adaptés à la prise en charge des besoins de l’unité familiale et tenant compte de l’intérêt supérieur de l’enfant. Ces lieux, indépendants des centres et lieux de rétention, garantissent aux membres de la famille une intimité adéquate. Les caractéristiques de ces lieux sont définies par décret en Conseil d’État.” »
La parole est à Mme Sophie Briante Guillemont.
Mme Sophie Briante Guillemont. Cet amendement de repli vise à prévoir que le juge des libertés et de la détention doit autoriser préalablement le placement en rétention familiale, au lieu d’une simple contestation a posteriori.
Impliquer un juge en amont offrirait une garantie supplémentaire de nécessité et de proportionnalité.
Mme la présidente. L’amendement n° 67, présenté par MM. Hochart, Szczurek et Durox, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Remplacer les mots :
quarante-huit heures
par les mots :
quatre-vingt-seize heures
La parole est à M. Joshua Hochart.
M. Joshua Hochart. L’amendement vise à porter de quarante-huit à quatre-vingt-seize heures la durée maximale de placement dans les structures spécialement adaptées aux familles étrangères accompagnées d’enfants.
Il s’agit d’un ajustement essentiel pour donner aux services de l’État les moyens d’appliquer les décisions d’éloignement, dans le respect des droits et dans un cadre adapté à la présence de mineurs.
Aujourd’hui, le délai de quarante-huit heures s’avère trop court dans de nombreux cas, notamment lorsqu’il faut organiser un éloignement avec toutes les précautions que cela implique pour une famille – vérifications administratives, coordination des services préfectoraux, logistique du transport ou vérification des documents d’identité. Ce délai trop restreint paralyse l’action de l’administration.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. L’amendement n° 36 rectifié vise à prévoir l’autorisation préalable par le juge des libertés et de la détention (JLD) du placement en rétention des familles à Mayotte. Cette exigence n’a pas d’équivalent en matière de police des étrangers et de rétention administrative. Elle paraît en outre disproportionnée eu égard à l’objectif recherché. L’avis est donc défavorable.
L’amendement n° 67 vise à porter à quatre-vingt-seize heures, contre quarante-huit heures actuellement, la durée de la mesure initiale de placement dans des unités familiales en vue de l’éloignement. Cet allongement ne paraît pas nécessaire : en pratique, la durée moyenne n’excède pas vingt-quatre heures.
Ce n’est que dans des circonstances très particulières, en cas d’impossibilité d’exécution de la mesure, notamment en raison des conditions météorologiques – mer houleuse, etc. –, qu’un délai supérieur peut s’avérer nécessaire : c’est à ce besoin que répond la possibilité d’une prolongation de vingt-quatre heures supplémentaires.
L’avis est donc également défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État. Même avis que Mme la rapporteure sur les amendements nos 36 rectifié et 67.
Monsieur Hochart, l’intérêt supérieur de l’enfant exige, conformément aux dispositions de la convention européenne des droits de l’homme, que la rétention en milieu contraint soit la plus réduite possible pendant le temps strictement nécessaire à l’éloignement de la famille entière.
Dans l’état du droit actuellement en vigueur à Mayotte, l’étranger mineur accompagnant sa famille peut être placé dans trois circonstances : si le majeur qui l’accompagne s’est soustrait à son assignation de résidence ; si ce majeur, lors de la mise en œuvre de l’éloignement, a pris la fuite ou s’est ouvertement opposé à cette mise en œuvre ; si la rétention est motivée par des contraintes liées au transfert. Dans ce dernier cas, la durée de cette rétention est limitée à quarante-huit heures.
Pour prendre en compte l’intérêt supérieur de l’enfant, l’article 7 limite la durée du placement à quarante-huit heures dans tous les cas de figure. Nous ne souhaitons pas aller au-delà de cette limite, qui a été rappelée par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 6 septembre 2018, dans les considérants 61 à 63.
Dans son avis sur le projet de loi, le Conseil d’État précise, quant à lui, qu’il a proposé cette limitation de la durée du placement initial, qui vaut aussi pour le délai de rendu de sa décision par le juge. C’est sous réserve de cet encadrement que le Conseil d’État a estimé que cette mesure opère une conciliation satisfaisante entre les exigences des normes constitutionnelles et conventionnelles et l’objectif d’intérêt général visé.
Au-delà des arguments exposés par Mme la rapporteure, accroître de quarante-huit à quatre-vingt-seize heures le placement en unité de vie familiale risquerait de mettre en péril cette conciliation et de provoquer une censure constitutionnelle.
Tels étaient les arguments supplémentaires que je souhaitais apporter pour justifier le rejet de l’amendement n° 67.
Mme la présidente. L’amendement n° 44 rectifié, présenté par Mme Briante Guillemont, MM. Masset, Gold et Guiol, Mme Pantel et M. Daubet, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Sophie Briante Guillemont.
Mme Sophie Briante Guillemont. Cet amendement de repli vise à maintenir la durée maximale de retenue administrative à quarante-huit heures lorsqu’un étranger est accompagné d’un mineur, sans permettre de prolongation supplémentaire.
Le durcissement introduit par la commission des lois du Sénat soulève de sérieuses interrogations quant au respect de l’intérêt supérieur de l’enfant.
Une telle prolongation, si elle devient systématique, risque de transformer un régime d’exception en norme, en allongeant la durée de privation de liberté sans garantie supplémentaire.
Cet amendement vise à revenir à l’équilibre initial, auquel nous étions déjà défavorables.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Cet amendement vise à supprimer une disposition adoptée par la commission des lois. Il s’agit d’une prolongation pragmatique à titre très exceptionnel pour permettre l’exécution des mesures d’éloignement.
J’émets donc un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 146, présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Alinéa 8
Rédiger ainsi cet alinéa :
Ces dispositions sont applicables jusqu’au 1er janvier 2027.
La parole est à Mme Mélanie Vogel.
Mme Mélanie Vogel. Cet amendement de repli a pour objet de faire des unités familiales une solution transitoire avant l’interdiction définitive de l’enfermement administratif des enfants au 1er janvier 2027.
Mme la présidente. L’amendement n° 156, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 8
Remplacer la date :
1er janvier 2027
par la date :
1er juillet 2028
II. – Après l’alinéa 8
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
III. – Le III de l’article 86 de la loi n° 2024-42 du 26 janvier 2024 pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration est ainsi rédigé :
« III. – Le 1° de l’article 40 s’applique à Mayotte à compter du 1er janvier 2027. Le 3° du même article 40 s’applique à Mayotte à compter du 1er juillet 2028. »
La parole est à M. le ministre d’État.
M. Manuel Valls, ministre d’État. L’amendement du Gouvernement a pour objet de reporter au 1er juillet 2028 l’entrée en vigueur des unités de vie familiale, au lieu du 1er janvier 2027.
Les unités de vie familiale doivent permettre d’accueillir des personnes dans des locaux d’hébergement de nature à préserver la vie familiale et l’intérêt supérieur de l’enfant.
Leur mise en place nécessite d’identifier le foncier susceptible d’accueillir ce projet, d’en obtenir la maîtrise, d’évaluer le coût du projet, et de réaliser les études de conception et la construction dans le respect des règles relatives à la commande publique, tout en obtenant les diverses autorisations d’urbanisme et environnementales.
Les délais habituellement constatés pour une opération immobilière destinée à construire une structure d’hébergement collectif, sécurisée et intégrée à son environnement ne sont pas compatibles avec une mise en service au 1er janvier 2027. Des crédits devront être obtenus en loi de finances pour 2026 et des recrutements devront être réalisés en vue de mettre en service l’unité de vie familiale.
De plus, les tensions sur le BTP liées à la reconstruction de Mayotte constituent une contrainte supplémentaire qui doit être prise en compte. La reconstruction de l’archipel après le passage du cyclone Chido a mis sous pression l’ensemble du secteur du BTP – je ne vous apprends rien, mesdames, messieurs les sénateurs.
Pour ces raisons, les travaux conduits avec la préfecture de Mayotte nous conduisent à considérer que les unités familiales ne seront vraisemblablement pas encore prêtes à recevoir les familles le 1er janvier 2027, mais le seront plutôt à compter du 1er juillet 2028.
L’amendement vise donc à faire entrer en vigueur le régime des unités de vie familiale à compter du 1er juillet 2028. Par coordination, il tend également à repousser à cette même date le début de l’interdiction du placement des mineurs accompagnant les étrangers majeurs en détention à Mayotte.
Cette mise en cohérence avec la date d’interdiction du placement en rétention des mineurs est indispensable. Si, au 1er janvier 2027, on ne peut plus placer en CRA ce public, alors qu’aucune unité familiale ne sera encore opérationnelle, l’éloignement des étrangers accompagnés de mineurs serait sérieusement compliqué. Le CRA de Mayotte a accueilli en 2024 1 395 personnes étrangères accompagnées de mineurs, dont 1 234 personnes de nationalité comorienne.
Dans la mesure où l’information circulerait rapidement sur l’impossibilité de placer des personnes en rétention comme en unité familiale au 1er janvier 2027, les ressortissants comoriens et malgaches risqueraient d’effectuer les traversées accompagnés de mineurs à la seule fin d’éviter le placement en rétention à Mayotte. Nous risquons donc d’être confrontés à un trafic d’enfants et à un nombre encore accru de mineurs isolés sur le territoire de Mayotte.
Pour prévenir cette difficulté, le Gouvernement présente cet amendement qui permettra à l’État de placer les étrangers majeurs accompagnés de mineurs en CRA jusqu’au 30 janvier 2028, puis en unité de vie familiale à compter de cette date.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. En ce qui concerne l’amendement n° 146, nous pensons que les unités familles doivent être des structures non pas temporaires, mais pérennes, puisqu’elles constituent le meilleur moyen de concilier les deux principes du respect de l’ordre public et de l’intérêt supérieur de l’enfant, dans le cadre notamment du droit à mener une vie familiale normale. J’émets donc un avis défavorable.
En revanche, la commission est favorable à l’amendement n° 156 du Gouvernement. Nous avons bien compris que la mise en œuvre des unités familiales ne sera pas effective au 1er janvier 2027. Il convient donc de reporter l’entrée en vigueur des dispositions au 1er juillet 2028.
J’appelle tout de même le Gouvernement à accélérer au maximum le mouvement, ces unités familiales étant le meilleur cadre pour permettre la rétention des mineurs et de leur famille dans l’attente de la mise en œuvre des mesures d’éloignement du territoire.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 146 ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 7, modifié.
(L’article 7 est adopté.)
Article 8
La section 2 du chapitre Ier du titre IV du livre IV du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est complétée par un article L. 441-10 ainsi rédigé :
« Art. L. 441-10. – À Mayotte, un document de séjour peut, par une décision motivée, être retiré à tout étranger majeur exerçant l’autorité parentale sur un étranger mineur capable de discernement dont le comportement constitue une menace pour l’ordre public, lorsque la soustraction, par l’étranger majeur, à ses obligations légales, compromet la santé, la sécurité, la moralité et l’éducation de l’étranger mineur et contribue directement à ce que son comportement constitue une telle menace.
« La décision de retrait ne peut intervenir qu’au plus tôt un mois et au plus tard six mois après qu’un avertissement a été adressé à l’étranger majeur, par courrier ou au cours d’un entretien, si les conditions prévues au premier alinéa sont toujours réunies. L’intéressé est mis à même de présenter ses observations avant l’édiction de la décision de retrait dans les conditions prévues à l’article L. 122-1 du code des relations entre le public et l’administration.
« Par dérogation au premier alinéa du présent article, une carte de résident ou une carte de résident permanent ne peut être retirée, dans les conditions prévues au même premier alinéa et au deuxième alinéa, que lorsque le comportement de l’étranger mineur constitue une menace grave pour l’ordre public. En cas de retrait, l’article L. 611-1 du présent code n’est pas applicable. Lorsque l’étranger ne peut faire l’objet d’une décision d’expulsion en application des articles L. 631-2 ou L. 631-3, en cas de retrait d’une carte de résident, une autorisation provisoire de séjour lui est délivrée de droit, et en cas de retrait d’une carte de résident permanent, une carte de séjour temporaire lui est délivrée de droit.
« La décision de retrait ne peut être prise si l’étranger est titulaire d’un document de séjour délivré en application du 6° de l’article L. 411-1 ou des articles L. 424-1, L. 424-9 ou L. 424-13. »
Mme la présidente. Je suis saisie de quatre amendements identiques.
L’amendement n° 9 rectifié est présenté par Mme Narassiguin, M. Omar Oili, Mmes Artigalas et Le Houerou, MM. Lurel, Kanner et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 37 rectifié est présenté par Mme Briante Guillemont, MM. Masset, Gold, Grosvalet et Guiol, Mme Pantel et M. Daubet.
L’amendement n° 106 est présenté par Mmes Corbière Naminzo et Cukierman, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.
L’amendement n° 147 est présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Corinne Narassiguin, pour présenter l’amendement n° 9 rectifié.
Mme Corinne Narassiguin. En matière migratoire, l’imagination du Gouvernement étant sans limites, il sera désormais possible de retirer le titre de séjour d’un étranger en raison du comportement de son enfant lorsque celui-ci constitue une menace pour l’ordre public.
Ce serait la première fois dans le droit des étrangers qu’un document de séjour pourrait être retiré à son détenteur en raison du comportement d’autrui. Une telle mesure nous paraît tout à fait inutile et contre-productive dans le cadre de la lutte contre l’insécurité.
On ne voit pas en quoi le fait de fragiliser une cellule familiale en retirant un titre de séjour ou en dégradant le titre de séjour d’un parent sera d’une quelconque utilité dans la lutte contre l’insécurité résultant du comportement d’un mineur.
Pire, cela risque de précariser plus encore des familles, sur le plan du droit au séjour, bien sûr, mais aussi sur le plan financier, puisque le retrait du titre de séjour aura pour effet d’exclure les parents du bénéfice des allocations sociales et prestations familiales réservées aux étrangers en séjour régulier. Quels résultats espère-t-on obtenir d’une mesure de ce genre ?
Par ailleurs, sur un plan strictement juridique et constitutionnel, cette disposition nous semble excéder les adaptations législatives permises par l’article 73 de la Constitution.
Si Mayotte connaît une « situation particulière » du fait d’une forte proportion de mineurs étrangers constituant une menace pour l’ordre public, le retrait du titre de séjour des parents ne permettra en aucune façon de diminuer l’insécurité à Mayotte. Cette mesure n’a donc pas de lien direct avec les caractéristiques propres à ce territoire sur le plan migratoire et sécuritaire.
Enfin, nous savons combien les outre-mer constituent un dangereux laboratoire en matière de remise en cause des droits. Cette mesure constituerait un précédent risqué. Elle est prévue aujourd’hui pour Mayotte, mais sa généralisation à tous les outre-mer, puis à l’ensemble du territoire national, ne manquerait pas d’être rapidement défendue.
Pour toutes ces raisons, nous demandons la suppression de l’article 8.
Mme la présidente. La parole est à Mme Sophie Briante Guillemont, pour présenter l’amendement n° 37 rectifié.
Mme Sophie Briante Guillemont. Cet amendement vise à supprimer une disposition qui introduit, à notre sens, une confusion dangereuse entre la politique migratoire et les mécanismes de protection de l’enfance.
En l’état, l’article 8 vise à prévoir que le titre de séjour d’un parent peut être retiré lorsque l’un de ses enfants mineurs adopte un comportement menaçant l’ordre public, si ce parent a manqué à ses obligations éducatives.
Une telle mesure fait peser sur les épaules de certains parents une responsabilité pénale et sociale qui nous paraît disproportionnée, dans un contexte déjà marqué par une grande précarité. Elle revient à instrumentaliser le droit au séjour comme une sanction indirecte, en rupture avec les principes fondamentaux de notre droit.
L’encadrement des responsabilités parentales relève de l’action sociale et judiciaire, non de la compétence préfectorale. En outre, cette disposition risque de produire des effets contre-productifs : peur de solliciter les services sociaux, éloignement des structures d’accompagnement et, in fine, renforcement de l’isolement des familles.
Lutter contre la délinquance des mineurs à Mayotte est indispensable, mais cette lutte doit passer par des moyens éducatifs, préventifs, et non par la menace de l’expulsion familiale.
Mme la présidente. La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo, pour présenter l’amendement n° 106.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. Cet amendement vise à supprimer l’article 8.
Comme pour le texte sur la justice des mineurs voté hier, il s’agit encore une fois de punir les parents pour les actes commis par leurs enfants, alors même que l’introduction d’une sanction dépendante de la commission d’une infraction par une autre personne est contraire au principe à valeur constitutionnelle de responsabilité pénale personnelle selon lequel nul n’est punissable que de son propre fait. Ce principe est garanti par les articles 8 et 9 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen.
Dans tous les cas, comment prouver que l’acte du mineur découle d’une défaillance éducative parentale et non d’autres facteurs, qu’il s’agisse d’un tiers, d’un contexte social, d’une influence extérieure, voire de la misère que l’on évoque depuis tout à l’heure ?
Cet article suppose une relation mécanique entre la faute éducative et la délinquance : c’est faux !
Les répercussions de cette mesure sur l’unité familiale et les relations au sein du foyer sont dramatiques. Elles entraînent des conséquences néfastes sur la santé mentale des enfants.
De plus, la notion de menace pour l’ordre public ne fait pas l’objet d’une définition juridique claire dans le droit positif, rendant la mesure parfaitement disproportionnée.
Comme des Cassandre qui ne cessent de vous alerter, je redis que la priorité du répressif sur l’éducatif ne fonctionne pas. Cette mesure contrevient aux obligations de l’État en matière de protection de l’enfance, notamment concernant la protection judiciaire de la jeunesse, et rend obsolètes les dispositifs mis en place par le département.
Mayotte souffre de carences systémiques dans le déploiement de dispositifs de protection de l’enfance. La priorité doit être donnée aux moyens accordés à la prise en charge des enfants en situation de vulnérabilité, notamment au travers d’une priorité accordée aux actions de prévention.
C’est la raison pour laquelle nous vous proposons de supprimer cet article indigne.
Mme la présidente. La parole est à Mme Mélanie Vogel, pour présenter l’amendement n° 147.
Mme Mélanie Vogel. J’ignore comment défendre cet amendement de suppression, tant les dispositions de l’article 8 me semblent dures à avaler ! Cet article vise à instaurer un dispositif sans précédent qui permettrait de retirer leur titre de séjour à des étrangers en raison du comportement d’un tiers, sans que les actes en question aient aucun lien avec le détenteur du titre de séjour.
Mes collègues l’ont souligné, ce dispositif remet en cause un principe fondamental du droit : la responsabilité pénale personnelle, en vertu de laquelle une personne ne peut être condamnée que pour des faits dont elle est l’auteure, et en aucun cas pour des actes commis par autrui.
Cela est d’autant plus vrai qu’il n’existe aucun lien entre des faits commis par un enfant constituant « une menace à l’ordre public » – ce qui est peu clair – et le droit des étrangers ou le titre de séjour. La confusion est totale, et j’aimerais comprendre quels sont les effets attendus d’une telle mesure.
Que se passera-t-il selon vous ? Je ne comprends pas votre raisonnement logique : parce que l’on retirerait leur titre de séjour à ses parents, la situation sociale de l’enfant s’améliorerait, et le problème que vous essayez de résoudre serait amoindri ? Mais ce titre de séjour, les parents l’ont légitimement et personnellement obtenu !
Enfin, je l’ai dit lors de la discussion générale, nous sommes en train de faire entrer dans notre droit, par la brèche du droit applicable à Mayotte, des dispositions en violation totale avec les principes fondamentaux républicains qui, progressivement, s’étendront à d’autres territoires. Cela est inacceptable.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Madame Vogel, vous nous demandez quels effets nous attendons d’une telle mesure : nous cherchons simplement à responsabiliser les parents vis-à-vis des mineurs délinquants, eu égard à la situation exceptionnelle de Mayotte. Là encore, les chiffres parlent d’eux-mêmes : 44 % des mineurs condamnés à Mayotte sont étrangers, contre 15 % en métropole. (Mme Mélanie Vogel proteste.) Il s’agit d’un enjeu fort.
Contrairement à ce que j’ai entendu, la disposition proposée n’a rien d’un système de faute automatique. Pour que le titre de séjour soit retiré, il faudra prouver le lien de causalité entre la soustraction des parents à leurs obligations éducatives vis-à-vis du mineur et les actes de délinquance commis par celui-ci. En outre, ceux-ci devront représenter une menace à l’ordre public et avoir été réitérés dans un délai de six mois.
Par ailleurs, le préfet de Mayotte a fait valoir auprès de nous que ce dispositif était un élément essentiel pour garantir le respect de l’ordre public dans le département.
Les élus locaux mahorais nous ont également fait part de leur soutien à cette mesure. La seule critique qu’ils ont formulée portait sur le caractère temporaire du dispositif. C’est pour cette raison que la commission a supprimé la date de fin de mise en œuvre, afin de pérenniser cette disposition.
L’avis est défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État. Entre 2019 et 2024, la part des mineurs étrangers condamnés à Mayotte sur l’ensemble des mineurs condamnés a augmenté de 110 %. Sur cette même période, la part des mineurs étrangers sur l’ensemble des mineurs condamnés baissait, inversement, de 12 % pour l’ensemble du territoire national.
Par ailleurs, la proportion d’étrangers parmi les mineurs mis en cause à Mayotte, pour toutes sortes d’infractions, est nettement plus élevée que dans l’ensemble de la France.
Mme Mélanie Vogel. Parce qu’il y a plus d’étrangers à Mayotte !
M. Manuel Valls, ministre d’État. Il y a donc incontestablement un problème.
Le législateur peut donc, sans méconnaître l’article 1er de la Constitution ni le principe d’égalité devant la loi, adapter les règles relatives à l’entrée et au séjour des étrangers à Mayotte, afin de lutter contre l’immigration irrégulière, qui se traduit spécifiquement, sur ce territoire, par un nombre élevé d’enfants nés de parents étrangers. Le Conseil d’État l’a confirmé.
Le législateur peut également, sans méconnaître l’article 1er de la Constitution ni le principe d’égalité devant la loi, adapter les règles relatives à l’entrée et au séjour des étrangers à Mayotte afin de lutter contre l’insécurité engendrée par la pression migratoire sans précédent subie par ce département. C’est une réalité, que l’on peut constater, malheureusement, sur ce territoire.
La mesure que nous proposons d’instaurer entre donc pleinement dans le champ d’application de l’article 73 de la Constitution.
De plus, il est précisé, à l’article 8 du projet de loi, qu’un avertissement préalable est envoyé aux détenteurs de l’autorité parentale. Ce régime probatoire offre ainsi la possibilité aux détenteurs de l’autorité parentale de faire cesser le manquement avant toute sanction administrative. Les parents doivent, par leur autorité, mettre fin au comportement du mineur étranger troublant l’ordre public. Cette mesure met donc l’accent sur les responsabilités des détenteurs de l’autorité parentale, en ce qu’ils constituent, par la soustraction à leurs obligations, la cause du comportement du mineur menaçant l’ordre public.
Enfin, en cas d’échec de la période probatoire, l’efficacité de la mesure est renforcée par la possibilité de procéder à l’éloignement des étrangers détenteurs de l’autorité parentale et, par voie de conséquence, des mineurs sous leur responsabilité qui menacent l’ordre public.
Le cadre constitutionnel est respecté : les parents ne sont sanctionnés que s’ils n’ont pas tout mis en œuvre pour faire cesser le comportement de leurs enfants.
Les statistiques que je vous ai données sur les mineurs étrangers délinquants le montrent, nous ne pouvons pas dire que l’autorité parentale est indispensable pour faire cesser ces actes. Il faut donc agir et adapter les dispositifs, tout en nous assurant qu’ils sont conformes à notre ordre constitutionnel.
Le Conseil d’État a confirmé la constitutionnalité du dispositif. C’est un élément important à prendre en compte dans la fabrique de la loi, ce qui n’empêche ni le débat ni la saisine du Conseil constitutionnel.
Nous adaptons les dispositions législatives à la réalité de Mayotte, tout en préservant notre État de droit.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Arrêtez de nous assommer de statistiques. Monsieur le ministre, vous dites que 44 % des enfants délinquants sont étrangers. Mais alors, puisqu’il y a 48 % d’étrangers sur l’île, les étrangers sont sous-représentés parmi les mineurs délinquants !
Vous aimez les statistiques, semble-t-il. Pourtant, je ne vous entends jamais dire que trois habitants sur quatre vivent sous le seuil de pauvreté à Mayotte.
Mme Raymonde Poncet Monge. En outre, un étranger sur trois est né sur l’île.
Prenez-vous en compte ces statistiques ? Non ! Votre projet de loi est idéologique. Dès qu’un amendement vous est soumis par la droite pour renforcer les mesures qui relèvent de la xénophobie – disons-le clairement –, vous le soutenez. En revanche, vous vous opposez à toutes les dispositions qui vont dans le sens du droit, de l’intérêt supérieur de l’enfant ou des engagements de la France dans le cadre des conventions internationales.
Arrêtez un peu ! 44 % d’enfants délinquants étrangers quand Mayotte compte 48 % d’étrangers : votre démonstration ne tient pas.
Mme la présidente. La parole est à M. Guy Benarroche, pour explication de vote.
M. Guy Benarroche. Cet article, étonnamment, me rappelle un certain nombre de dispositions ajoutées par le Sénat à la loi visant à renforcer l’autorité de la justice à l’égard des mineurs délinquants et de leurs parents. Je pense notamment à la comparution immédiate pour les mineurs âgés de 13 ans et aux courtes peines pour les mineurs – certes, pour une durée inférieure à un mois.
Cependant, le rapporteur Les Républicains de ce texte, comme le ministre, M. Darmanin, qui n’avait d’ailleurs pas été écouté par ce groupe ici, au Sénat, avaient clairement souligné les limites de la constitutionnalité de telles mesures. Monsieur le ministre, vous nous assurez que les dispositions de l’article 8 de ce projet de loi sont constitutionnelles : nous verrons bien.
De même, à l’époque, ils nous avaient expliqué que de telles mesures étaient inapplicables et qu’elles ne résoudraient rien.
Texte après texte, vous tentez d’imposer des dispositions d’affichage, d’ordre idéologique, dont la vocation n’est absolument pas de résoudre les problèmes auxquels est confrontée Mayotte. Vos données statistiques, qui sont fausses, ne sont qu’une démonstration supplémentaire qu’il n’existe pas d’argument réel pour légitimer cet article et que celui-ci ne répondra pas aux difficultés que connaît le territoire.
Je connais très bien une famille étrangère à Marseille, dont les membres disposent d’un titre de séjour, et qui est parfaitement intégrée dans la vie locale et même nationale. Or les enfants, mineurs, sont délinquants et ont été condamnés. Aussi, lorsque les dispositions de cet article s’appliqueront en métropole, ce qui finira bien par arriver, leur titre de séjour sera supprimé et la famille expulsée…
Mme la présidente. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Muriel Jourda, présidente de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. Je veux répondre aux accusations permanentes de xénophobie, de racisme et de discrimination.
Sur la disposition prévue par l’article 8, les éléments juridiques précisés par Mme le rapporteur et M. le ministre montrent bien que nous respectons toutes les règles en la matière. Mais au-delà de ces arguments, dans l’esprit de beaucoup de Français, éloigner une famille en retirant le titre de séjour aux parents dont les enfants se comportent mal est une mesure de bon sens !
Lorsqu’un pays accepte un étranger sur son territoire, ce qui relève d’une compétence régalienne de l’État, il n’est pas anormal d’exiger de cette personne qu’elle le quitte dès lors qu’elle se comporte mal ou qu’elle ne parvient pas à obtenir de ses enfants une attitude correcte, ce que prévoit cet article. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
Mme Jacqueline Eustache-Brinio. Parfait !
Mme la présidente. La parole est à Mme Mélanie Vogel, pour explication de vote.
Mme Mélanie Vogel. Je comprends que les accusations répétées de racisme et de xénophobie, bien que nous ne les ayons pas totalement formulées en ces termes, soient difficiles à entendre.
Cependant, je vois là un lien de causalité, qui est bien plus pertinent que celui que M. le ministre a tenté d’établir entre le nombre de mineurs délinquants étrangers et le problème que représenteraient les enfants étrangers, et plus largement les étrangers, à Mayotte. Monsieur le ministre, je vous crois plus intelligent que cela ; je suis persuadée que vous êtes capable de faire la différence entre une corrélation et une causalité.
Si 44 % des enfants délinquants à Mayotte sont étrangers, alors 56 % des enfants délinquants sont français. Par conséquent, en suivant votre raisonnement, on devrait dire que les étrangers sont sous-représentés chez les mineurs délinquants ; toutes choses égales par ailleurs, les enfants français sont proportionnellement plus délinquants que les enfants étrangers, si l’on s’en tient aux statistiques.
Quelle serait donc la motivation qui sous-tend cet article, si ce n’est de sanctionner davantage les étrangers à Mayotte, par n’importe quel biais juridique, et d’expulser des gens qui résident pourtant régulièrement sur le territoire et qui ont obtenu leur titre de séjour de manière parfaitement légale ? (M. Guy Benarroche marque son approbation.)
Vous cherchez seulement à exclure un nombre croissant d’étrangers, y compris lorsqu’ils n’ont pas commis le moindre délit, à titre individuel, et qu’ils résident légalement en France. Sans cela, il n’y a aucune raison logique à vouloir retirer un titre de séjour à un parent sous prétexte des actes commis par son enfant.
Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Narassiguin, pour explication de vote.
Mme Corinne Narassiguin. Je n’aurai pas grand-chose à ajouter à l’intervention de Mélanie Vogel. Personne ne conteste la réalité des problèmes liés à l’insécurité à Mayotte ni la part grandissante qu’y prennent, malheureusement, les mineurs. Mais ces mineurs sont à la fois français et étrangers !
On voit bien l’ampleur de l’influence du ministère de l’intérieur sur ce projet de loi : après le rapport annexé à l’article 1er, les premiers chapitres de ce texte ont tous trait à l’immigration, et non aux infrastructures, au logement, à l’éducation ou à la réduction de la pauvreté : or ce sont là des moyens véritablement efficaces pour sortir les jeunes de la délinquance – bien plus que les mesures discriminatoires.
Nous devons avancer sur l’accès à l’éducation, sortir les familles de la précarité et garantir aux parents un emploi pour vivre dignement : c’est ainsi que nous changerons les choses à Mayotte, et non en votant des mesures qui relèvent de tout, sauf du bon sens.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre d’État.
M. Manuel Valls, ministre d’État. Parler de racisme et de xénophobie – ce dernier mot a été utilisé pour mettre en cause le texte – est franchement inacceptable.
Mme Jacqueline Eustache-Brinio. Exactement !
M. Manuel Valls, ministre d’État. Mais passons…
Vous parlez d’idéologie : nous cherchons à adopter une position concrète et pragmatique pour répondre à de graves difficultés. Aussi, en employant un tel vocabulaire, c’est vous qui faites preuve d’idéologie, sur un mode accusatoire parfaitement insupportable.
Par ailleurs, de quoi parlons-nous ? Ce texte est équilibré : il traite de toutes les dimensions du problème. C’est vous qui cherchez à transformer ce projet de loi, à partir de ces articles, en un texte qui ne concernerait que la question de l’immigration et de l’insécurité.
Nous avons longuement débattu des amendements, et c’est tout à fait légitime, sur l’article 1er. L’amendement du Gouvernement, voté à une large majorité, a porté à 4 milliards d’euros l’ensemble des dépenses d’investissement : cela montre bien que nous prenons à bras-le-corps, même si – je le redis – les choses peuvent toujours être discutées et améliorées, l’ensemble des problématiques révélées par Chido. Les investissements que nous prévoyons, les priorités que nous nous fixons, sont essentiels.
Notre deuxième priorité, après les financements prévus pour la reconstruction et la refondation, est bien la convergence sociale. Celle-ci était attendue depuis longtemps. Nous pouvons débattre de savoir s’il faut aller plus vite et quelles priorités fixer, mais il n’en demeure pas moins que cette convergence sociale est enfin inscrite dans la réalité. Les Mahorais le réclamaient depuis longtemps, au nom de l’égalité républicaine, revendiquée également de longue date par les élus et que la départementalisation avait permis d’affirmer.
Enfin, et chacun en est bien conscient, si nous ne traitons pas les questions de l’habitat illégal et de l’immigration irrégulière – qui sont, je le reconnais, particulièrement difficiles –, nous ne pourrons parvenir aux avancées que j’évoquais.
Dès lors, nous essayons de répondre à ces problématiques avec pragmatisme et sans idéologie, quand bien même ces sujets sont, je le redis, d’une grande complexité. C’est notamment le cas de la violence et de la délinquance des mineurs, notamment étrangers.
Vous me demandez souvent, et à juste titre, de donner des éléments statistiques. Si j’ai évoqué ces différents pourcentages, c’est seulement pour conforter notre proposition, qui consiste en une adaptation particulière de la loi concernant les mineurs étrangers en particulier à Mayotte. À cette situation exceptionnelle, nous apportons des mesures exceptionnelles.
Vous avez parfaitement le droit de contester l’avis du Conseil d’État. Cependant, le Gouvernement n’a pas d’autre choix, et c’est heureux, que de s’appuyer sur cet avis pour préparer la loi. Or, selon cet avis, l’article 8 est conforme au cadre constitutionnel.
Ces mesures ne sont pas idéologiques. Elles relèvent du bon sens et du pragmatisme. Elles offrent une réponse à une réalité particulièrement inquiétante à Mayotte.
En revanche, je ne peux pas entendre vos propos sur la nature du texte. Je l’ai dit : beaucoup d’enfants mineurs étrangers sont scolarisés. Quand bien même des propositions sont émises en ce sens à l’Assemblée nationale, jamais le Gouvernement ne mettra en cause les mineurs qui vivent dans ce qu’on appelle improprement des « bangas » – des bidonvilles. Nous faisons en sorte que l’école ou les politiques sociales puissent intégrer ces enfants et leur donner une chance.
Cependant, concernant les comportements violents, voire très violents, au vu des signalements de la police, de la gendarmerie ou de la justice, les Mahorais seraient en droit de reprocher à l’État son inaction, si nous n’apportions pas de réponse concrète à ces situations.
Mesdames, messieurs les sénateurs de la gauche de l’hémicycle, les seuls à faire preuve d’idéologie sur le sujet, c’est vous ! Ce n’est pas le Gouvernement, qui agit avec célérité et pragmatisme pour apporter enfin des réponses concrètes ! (M. Guy Benarroche proteste.) Je vous le dis comme ministre d’État chargé des outre-mer, mais aussi en tant qu’ancien ministre de l’intérieur. Et d’ailleurs, nombreux sont ceux qui regrettent aujourd’hui la circulaire Valls, après l’avoir mise en cause il y a une dizaine d’années de cela !
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 9 rectifié, 37 rectifié, 106 et 147.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. L’amendement n° 38 rectifié, présenté par Mme Briante Guillemont, MM. Masset, Gold, Grosvalet et Guiol, Mme Pantel et M. Daubet, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Après le mot :
motivée
insérer les mots :
et après avis conforme du juge des enfants
La parole est à M. Michel Masset.
M. Michel Masset. Cet amendement vise à conditionner le retrait du titre de séjour du parent à l’avis conforme du juge des enfants. Il s’agit d’un amendement de repli qui ne remet pas en cause le principe de l’article, mais qui en renforce les garanties procédurales.
La mesure prévue par cet article, consistant à sanctionner un parent pour les actes délictueux de son enfant, soulève des questions importantes en matière de causalité et de proportionnalité. Or seule une autorité judiciaire spécialisée dotée d’une connaissance fine des dynamiques familiales peut évaluer si le comportement parental a réellement contribué à la délinquance du mineur.
En imposant cet avis conforme, le législateur introduirait un filtre indépendant garantissant un usage strictement encadré de cette mesure. Cette exigence protégerait les familles les plus vulnérables d’un usage discrétionnaire du pouvoir préfectoral, et préserverait l’équilibre entre fermeté et justice. Elle permettrait également d’éviter de faire du droit au séjour un levier de pression sur les familles en cas d’échec éducatif partiel ou de rupture temporaire.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. L’amendement tend à subordonner le retrait d’un document de séjour à l’avis conforme du juge des enfants.
Cette mesure serait contraire à la Constitution, d’après la décision du Conseil constitutionnel du 28 juillet 1989, en vertu de la séparation des pouvoirs.
L’avis est défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L’amendement n° 148, présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Par dérogation au premier alinéa du présent article, une carte de résident ou une carte de résident permanent ne peut être retirée.
La parole est à Mme Mélanie Vogel.
Mme Mélanie Vogel. Cet amendement de repli vise à exclure du dispositif de l’article 8 les personnes titulaires d’une carte de résident ou d’une carte de résident temporaire.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. L’article 8 prévoit déjà un dispositif dérogatoire en faveur des titulaires d’une carte de résident ou d’une carte de résident permanent. En effet, les bénéficiaires ne peuvent faire l’objet d’un retrait de leur titre de séjour que lorsque le comportement du mineur constitue une menace grave pour l’ordre public.
En outre, ce retrait ne peut donner lieu à une obligation de quitter le territoire français (OQTF). Un autre document de séjour – autorisation provisoire de séjour ou carte de séjour –, certes moins protecteur, leur sera délivré de droit.
La commission émet un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L’amendement n° 107, présenté par Mmes Corbière Naminzo et Cukierman, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Compléter cet alinéa par les mots :
ou si l’étranger majeur exerce l’autorité parentale sur d’autres personnes mineures
La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. Par cet amendement de repli, nous souhaitons empêcher le retrait du titre de séjour d’un parent titulaire de l’autorité parentale sur d’autres mineurs.
Cet article, nous l’avons dit, contrevient au principe d’individualisation des peines. Or le retrait du titre de séjour aurait des conséquences sur l’ensemble de la fratrie, y compris sur les enfants qui ne représentent aucune menace pour l’ordre public.
Pourtant, si les parents sont placés en situation de précarité administrative, ce sont tous les enfants de la famille qui pâtiront de cette situation, susceptible d’entraîner de graves conséquences sur leur santé et leur avenir.
En effet, monsieur le ministre, si des parents se voyaient retirer leur titre de séjour dans les conditions prévues par cet article, qu’adviendrait-il des autres enfants de la fratrie ? Une sanction serait appliquée à des enfants parfaitement innocents. Cette mesure est à la fois totalement contraire à l’intérêt supérieur de l’enfant, disproportionnée et néfaste.
Nous ne pouvons pas légiférer à la légère, quand il s’agit de vies humaines et de l’avenir, déjà si précaire, d’enfants. Comme on dit chez nous, nous ne pouvons pas mettre tout le monde dans le même sac, et le jeter à la mer…
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Je rappelle que cette disposition est non pas une sanction, mais une mesure de police administrative. Or votre dispositif vide l’article de tout son sens en prévoyant une forme d’immunité pour les familles ayant plusieurs enfants.
L’avis est donc défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à M. Guy Benarroche, pour explication de vote.
M. Guy Benarroche. Madame la rapporteure, je suis choqué par l’emploi du terme d’immunité.
Monsieur le ministre, l’explication qui a été exposée est très claire. Prenons une famille constituée d’un père, d’une mère et de quatre enfants, lesquels n’ont jamais commis le moindre acte délictueux pénalement condamnable. Cette famille est parfaitement intégrée à la société et vit du mieux qu’elle peut. Mais il suffirait que l’un des enfants, par exemple un mineur âgé de 17 ans, constitue une menace à l’ordre public, sans même avoir été condamné, pour que tous perdent leur titre de séjour !
Est-ce réellement une mesure de bon sens, comme vous le souteniez précédemment ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo, pour explication de vote.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. Je précise qu’il s’agit d’un amendement de repli, dont le seul objectif est de protéger des enfants, de protéger des innocents !
J’entends vos arguments : face à la submersion migratoire, nous devons agir pour protéger le territoire. Cependant, il est question ici de personnes qui n’ont rien fait, qui respectent les lois de notre pays et qui se conforment à tous les règlements, malgré tous les obstacles que nous sommes en train de mettre en place pour discriminer – j’insiste sur ce terme – les étrangers !
Je demande seulement au Sénat de protéger les innocents.
Mme la présidente. L’amendement n° 149, présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Le présent article est applicable jusqu’au 31 décembre 2028.
La parole est à Mme Mélanie Vogel.
Mme Mélanie Vogel. Cet amendement de repli vise simplement à rétablir la limitation dans le temps qui figurait dans le projet de loi initial du Gouvernement, mais qui a été supprimée en commission : le dispositif prévu à l’article 8 serait applicable jusqu’au 21 décembre 2028.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. La suppression du caractère temporaire du dispositif est une demande des élus mahorais.
L’avis est défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Muriel Jourda, présidente de la commission des lois. Mesdames, messieurs les commissaires, nous nous réunirons à vingt et une heure vingt en salle de la commission des lois pour examiner un amendement sur le projet de loi organique relatif au Département-Région de Mayotte.
6
Modification de l’ordre du jour
Mme la présidente. Par lettre en date de ce jour, M. Mathieu Darnaud, président du groupe Les Républicains, a demandé le remplacement du débat sur le thème « Quelles réponses apporter à la crise du logement ? », inscrit à l’ordre du jour du mardi 27 mai 2025, par un débat sous forme de questions-réponses sur le thème « Comment nos politiques publiques peuvent-elles contribuer à relever les défis auxquels sont confrontées les zones rurales de notre pays ? ».
Il n’y a pas d’opposition ?…
Il en est ainsi décidé.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt heures, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de M. Loïc Hervé.)
PRÉSIDENCE DE M. Loïc Hervé
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
7
Programmation pour la refondation de Mayotte et Département-Région de Mayotte
Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi et d’un projet de loi organique dans les textes de la commission
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi de programmation pour la refondation de Mayotte.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l’amendement tendant à insérer un article additionnel après l’article 8.
Après l’article 8
M. le président. L’amendement n° 31 rectifié quinquies n’est pas soutenu.
Mme Agnès Canayer, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. Je le reprends au nom de la commission, monsieur le président.
M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 167, présenté par Mme Canayer, au nom de la commission des lois, et ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La section 2 du chapitre 1er du titre IV du livre IV du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est complétée par un article L. 441-… ainsi rédigé :
« Art. L. 441-…. – Le représentant de l’État à Mayotte informe sans délai les organismes mentionnés à l’article L. 114-10-1-1 du code de la sécurité sociale ainsi que l’organisme mentionné à l’article L. 5312-1 du code du travail lorsqu’il prend une décision de refus de séjour, de retrait d’un titre ou d’un document de séjour ou d’expulsion. »
Vous avez la parole pour le défendre, madame le rapporteur.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Cet amendement, initialement déposé par Mme Nathalie Goulet et plusieurs de ses collègues, vise à reprendre, pour Mayotte, les dispositions de l’article 48 du projet de loi pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration, article censuré par le Conseil constitutionnel qui a considéré qu’il s’agissait d’un cavalier législatif.
Cet article imposait au préfet d’informer les organismes de sécurité sociale et France Travail de toute décision de refus de séjour, de retrait d’un titre ou d’un document de séjour ou d’expulsion.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État, ministre des outre-mer. Le Gouvernement émet un avis de sagesse sur cet amendement.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 8.
Article 9
I. – Le code monétaire et financier est ainsi modifié :
1° Après l’article L. 561-10-4, il est inséré un article L. 561-10-5 ainsi rédigé :
« Art. L. 561-10-5. – À Mayotte, avant de procéder à une opération de transmission de fonds mentionnée au 6° du II de l’article L. 314-1 à partir d’un versement d’espèces, les personnes énumérées aux 1° à 1° quater de l’article L. 561-2 vérifient, à titre de mesure de vigilance complémentaire, la régularité du séjour de leur client non ressortissant de l’Union européenne. Cette vérification s’effectue par la présentation de l’original de tout document de séjour.
« L’absence de justification de la régularité du séjour dans les conditions prévues au premier alinéa du présent article fait obstacle à l’opération de transmission de fonds. » ;
2° (nouveau) Le chapitre IV du titre VII du livre V est complété par un article L. 574-6 ainsi rédigé :
« Art. L. 574-6. – Est puni de six mois d’emprisonnement et de 7 500 euros d’amende le fait de faire procéder ou de participer, pour le compte d’un étranger en situation irrégulière, à une opération de transmission de fonds mentionnée au 6° du II de l’article L. 314-1 à partir d’un virement d’espèces aux fins de faire échec à l’exécution de la mesure de vigilance prévue à l’article L. 561-10-5.
« L’étranger condamné en application du premier alinéa du présent article encourt l’interdiction du territoire français pour une durée de dix ans au plus. »
II. – Le I est applicable à compter du premier jour du deuxième mois suivant celui de la publication de la présente loi.
M. le président. L’amendement n° 1, présenté par Mme Narassiguin, M. Omar Oili, Mmes Artigalas, Le Houerou et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Corinne Narassiguin.
Mme Corinne Narassiguin. Cet article vise à lutter contre le financement des filières illégales de passeurs, notamment en provenance des Comores.
Il est difficile de contester la véracité de la problématique soulevée et le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain a toujours été favorable à une régulation forte de ces flux financiers frauduleux. Cependant, en l’espèce, deux éléments conduisent à contester la pertinence de cet article.
D’une part, le dispositif prévu ne permettra pas d’endiguer une part importante des flux financiers générés par les économies souterraines.
D’autre part, selon les termes mêmes de l’étude d’impact, la criminalité organisée qui est ici impliquée se caractérise par une grande structuration. Cela ne manquera pas de se traduire très rapidement par un nouveau contournement de la législation, par exemple par le biais de nouveaux intermédiaires.
Paradoxalement, il existe donc un scénario probable dans lequel non seulement le dispositif proposé serait inopérant, mais aussi l’offre de service, ainsi que les bénéfices des filières illégales, seraient artificiellement accrus. Il convient donc de s’interroger sur la pertinence d’un dispositif discriminant qui ne s’appliquerait qu’à Mayotte, alors même que son efficacité ne serait pas avérée.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Bitz, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. J’avoue ne pas comprendre les motivations des auteurs de cet amendement de suppression.
Selon eux, l’article 9 ne permettrait pas de lutter assez efficacement contre les transferts frauduleux d’argent liquide. Il représente tout de même une étape importante !
Par ailleurs, cet article ne permettrait pas de lutter contre la criminalité organisée et l’économie souterraine. Pourtant, au travers des dispositions qu’il contient, il a pour objet d’éviter que la diaspora comorienne en situation irrégulière n’effectue des transferts de fonds. Nous ne parlons pas ici de la grande criminalité organisée…
Encore une fois, je ne saisis pas ce qui motive cet amendement, sauf à considérer que les migrants comoriens en situation irrégulière apporteraient, par ce biais, à leur pays d’origine, une forme d’aide au développement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État. La mesure qui est prévue à l’article 9 et que vous voulez supprimer est importante, voire capitale, madame la sénatrice.
En effet, elle vise à la fois à entraver les flux financiers liés aux réseaux de passeurs, ainsi que les flux illégaux générés depuis Mayotte vers les États voisins, et à contribuer à la lutte contre l’immigration irrégulière – autant d’éléments qui sont, malheureusement, attestés par le travail d’enquête qui a été réalisé.
Comme cela est indiqué dans l’étude d’impact, la lutte contre le financement des filières illégales de passeurs, le blanchiment d’argent, le trafic de stupéfiants et les fraudes sociales reposant sur le travail dissimulé constitue un objectif central du Gouvernement. Voilà qui justifie le maintien de cet article.
Madame la sénatrice, vous évoquez les possibilités de contournement de la mesure. Je précise que cet article vise les opérations les plus à risque, celles qui sont liées le plus étroitement à la criminalité financière. Il est exact que des alternatives, via des services de paiement ou des virements depuis un compte bancaire, demeureront accessibles aux étrangers en situation irrégulière à Mayotte, mais ces moyens de transfert font d’ores et déjà l’objet de contrôles plus approfondis de la part des prestataires de services.
Enfin, vous avez argué que cette mesure pourrait entraîner une augmentation de l’offre de service au bénéfice des filières illégales. Il convient de relativiser cette possibilité, d’autant que les forces de l’ordre poursuivent et intensifient, en parallèle, les actions de démantèlement des groupes criminels.
Nous avons vraiment besoin de prévoir cette obligation de vérification du titre de séjour lors des opérations de transfert de fonds.
Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement de suppression.
M. le président. L’amendement n° 39 rectifié, présenté par Mme Briante Guillemont, MM. Masset, Gold et Guiol, Mme Pantel et M. Daubet, est ainsi libellé :
Alinéa 3, première phrase
Après le mot :
espèces
insérer les mots :
d’un montant supérieur à 300 euros
La parole est à Mme Sophie Briante Guillemont.
Mme Sophie Briante Guillemont. Cet amendement vise à introduire une limite raisonnable dans le contrôle des transferts d’argent à partir de Mayotte, en instaurant un seuil minimal de 300 euros.
Le projet de loi impose la vérification du titre de séjour pour tout transfert, sans distinction de montant. Une telle mesure, appliquée de manière uniforme, risquerait de pénaliser de nombreuses personnes en situation précaire qui envoient de petites sommes – parfois 30 ou 50 euros – à leur famille restée au pays. Il s’agit ici d’une solidarité de survie et non de flux suspects ou de transferts financiers à grande échelle.
En fixant ce seuil, nous souhaitons maintenir l’efficacité des contrôles dans les cas pertinents, notamment dans le cadre de la lutte contre les filières d’immigration illégale et le blanchiment, tout en évitant des effets disproportionnés touchant les personnes les plus modestes.
Cet amendement vise aussi à concentrer les moyens de contrôle là où ils sont réellement nécessaires.
Il s’agit d’une mesure de justice sociale qui n’affaiblira pas l’objectif de lutte contre la fraude.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Bitz, rapporteur. Adopter cet amendement reviendrait à vider la mesure de sa substance. Il serait alors tout à fait loisible aux personnes concernées de fractionner et de multiplier des envois de 300 euros ou d’un montant moindre.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 164, présenté par Mme Canayer et M. Bitz, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
I. – Alinéas 5 et 6
Remplacer la référence :
L. 574-6
par la référence :
L. 574-7
II. – Alinéa 6
Remplacer le mot :
virement
par le mot :
versement
La parole est à M. le rapporteur.
M. Olivier Bitz, rapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 9, modifié.
(L’article 9 est adopté.)
Chapitre IV
Renforcer la lutte contre l’habitat informel
Article 10
I. – La loi n° 2011-725 du 23 juin 2011 portant dispositions particulières relatives aux quartiers d’habitat informel et à la lutte contre l’habitat indigne dans les départements et régions d’outre-mer est ainsi modifiée :
1° Au début du premier alinéa du I de l’article 11-1, les mots : « À Mayotte et en Guyane » sont remplacés par les mots : « En Guyane » ;
2° Après le même article 11-1, il est inséré un article 11-2 ainsi rédigé :
« Art. 11-2. – I. – À Mayotte, lorsque des locaux ou installations édifiés sans droit ni titre constituant un habitat informel, au sens du deuxième alinéa de l’article 1-1 de la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 visant à la mise en œuvre du droit au logement, forment un ensemble homogène sur un ou plusieurs terrains d’assiette et présentent des risques graves pour la salubrité, la sécurité ou la tranquillité publiques, le représentant de l’État dans le département peut, par arrêté, ordonner aux occupants de ces locaux et installations d’évacuer les lieux et aux propriétaires de procéder à leur démolition à l’issue de l’évacuation. L’arrêté prescrit toutes mesures nécessaires pour empêcher l’accès et l’usage de cet ensemble de locaux et installations au fur et à mesure de leur évacuation.
« Un rapport motivé établi par les services chargés de l’hygiène et de la sécurité placés sous l’autorité du représentant de l’État dans le département et une proposition de relogement ou d’hébergement d’urgence sont annexés à l’arrêté mentionné au premier alinéa du présent I.
« Le même arrêté précise le délai accordé pour évacuer et démolir les locaux et installations mentionnés au même premier alinéa. Ce délai ne peut être inférieur à quinze jours à compter de la notification de l’arrêté et de son annexe aux occupants et aux propriétaires. Lorsque le propriétaire est non occupant, le délai accordé pour procéder à la démolition est allongé de huit jours à compter de l’évacuation volontaire des lieux.
« À défaut de pouvoir identifier les propriétaires, notamment en l’absence de mention au livre foncier, la notification les concernant est valablement effectuée par affichage à la mairie de la commune et sur la façade des locaux et installations concernés.
« II. – Lorsqu’il est constaté, par procès-verbal dressé par une personne mentionnée au premier alinéa de l’article L. 480-1 du code de l’urbanisme, qu’un local ou une installation a été construit depuis moins de sept jours sans droit ni titre dans un secteur d’habitat informel, au sens du deuxième alinéa de l’article 1-1 de la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 précitée, le représentant de l’État dans le département peut, par arrêté, ordonner au propriétaire de procéder à la démolition dans un délai de vingt-quatre heures à compter de la notification de l’acte.
« En cas d’occupation du local ou de l’installation, le représentant de l’État dans le département ordonne aux occupants d’évacuer les lieux dans un délai qui ne peut être inférieur à quinze jours à compter de la notification de l’arrêté. Lorsque le propriétaire est non occupant, le délai accordé pour procéder à la démolition est allongé de vingt-quatre heures à compter de l’évacuation volontaire des lieux.
« À défaut de pouvoir identifier les propriétaires, notamment en l’absence de mention au livre foncier, la notification les concernant est valablement effectuée par affichage à la mairie de la commune et sur la façade des locaux et installations concernés.
« III. – L’obligation d’évacuer les lieux et l’obligation de les démolir résultant des arrêtés mentionnés aux I et II ne peuvent faire l’objet d’une exécution d’office ni avant l’expiration des délais accordés pour y procéder volontairement, ni avant que le tribunal administratif ait statué, s’il a été saisi par le propriétaire ou l’occupant concerné, dans les délais d’exécution volontaire, d’un recours dirigé contre ces décisions sur le fondement de l’article L. 521-2 du code de justice administrative. L’État supporte les frais liés à l’exécution d’office des mesures prescrites. »
II (nouveau). – Jusqu’au 13 décembre 2034, le représentant de l’État à Mayotte peut, de manière motivée, compte tenu des circonstances locales et notamment de l’état du parc de logement et d’hébergement ainsi que des possibilités de relogement, déroger à l’obligation d’annexer une proposition de relogement ou d’hébergement d’urgence à l’arrêté prévu au I de l’article 11-2 de la loi n° 2011-725 du 23 juin 2011 portant dispositions particulières relatives aux quartiers d’habitat informel et à la lutte contre l’habitat indigne dans les départements et régions d’outre-mer.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 63 est présenté par Mmes Guhl et M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.
L’amendement n° 82 est présenté par Mmes Corbière Naminzo et Margaté, M. Brossat, Mme Cukierman et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Daniel Salmon, pour présenter l’amendement n° 63.
M. Daniel Salmon. L’article 10 permet de renforcer les pouvoirs de police spéciale de lutte contre l’habitat informel à Mayotte. S’il étend la liste des personnes habilitées à constater et dresser les procès-verbaux, il contient également de nombreuses dérogations, en réduisant le délai d’exécution volontaire de l’ordre d’évacuation des bidonvilles d’un mois à quinze jours et en mettant fin à l’obligation systématique préalable pour le préfet de proposer un relogement ou un hébergement d’urgence.
Si elle a suivi les recommandations de l’avis du Conseil d’État en encadrant la dérogation à l’obligation de proposer un relogement ou un hébergement jusqu’en 2034, la commission des affaires économiques a aussi considérablement réduit les droits de recours permettant de suspendre les délais d’exécution d’office.
Actuellement, la possibilité de démolir des abris en cours de construction est déjà inadaptée aux enjeux de protection des populations et de lutte contre le sans-abrisme. Alors qu’il s’agit, avec cet article, de détruire plus facilement les bidonvilles à Mayotte, sans décision de justice et sans relogement, donc hors du droit commun, cette logique ne résout aucunement la problématique de l’habitat informel, encore moins celle du logement des ménages concernés.
Pour ces raisons, nous demandons la suppression de cet article.
M. le président. La parole est à Mme Marianne Margaté, pour présenter l’amendement n° 82.
Mme Marianne Margaté. Cet article constitue l’un des points noirs de ce texte qui vise à refonder Mayotte.
Refonder Mayotte ne saurait se faire au détriment des fondements de notre République ! Qu’allez-vous faire avec cet article 10 ?
Le Conseil d’État l’a dit dans son avis, il n’y a aujourd’hui ni assez de places d’hébergement ni suffisamment de logements pour procéder à la mise à l’abri des personnes dont vous souhaitez défaire l’habitat insalubre. Nous sommes d’accord sur un point : personne ne devrait vivre entre quatre morceaux de tôle. Toutefois, personne ne devrait non plus être condamné à vivre dehors, quelle que soit son origine ou sa situation administrative.
Aujourd’hui, 77 % des Mahorais vivent sous le seuil de pauvreté et 40 % habitent des logements en tôle. Cette situation, alarmante et inacceptable, doit nous mobiliser.
Reste que, si vous détruisez les bidonvilles sans prévoir aucune solution de relogement ou d’hébergement pour les personnes qui y vivent, vous ne ferez que reproduire la crise que les habitants de Mayotte ont connue après le passage du cyclone.
L’île de Mayotte compte seulement 5 % de logements sociaux, alors que la moyenne nationale est de 17,5 %. Pourtant, ce texte « pour la refondation de Mayotte » ne parle à aucun moment de logement, si ce n’est pour priver d’un abri les gens qui ont le malheur de vivre dans un habitat de fortune, où personne n’habite par plaisir ou par choix !
Enfin – et c’est aussi la raison pour laquelle nous demandons la suppression de cet article –, la création d’une dérogation au droit commun pour une durée de près de dix ans nous paraît inconstitutionnelle, puisqu’elle va à l’encontre des alinéas 10 et 11 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946.
Vous ne protégerez ni la santé ni la sécurité matérielle des personnes qui subiront les dispositions de cet article. C’est pourquoi nous en demandons la suppression.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
Mme Micheline Jacques, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Le renforcement des pouvoirs de police administrative en matière d’évacuation et de démolition correspond à une forte demande des élus locaux et des acteurs de terrain, qui sont démunis face à un phénomène qui continue de s’étendre. Il serait vraiment irresponsable de supprimer cet article, qui répond à une attente locale et tend à accélérer la mise en œuvre des opérations.
En outre, la commission des affaires économiques a adopté plusieurs amendements visant à sécuriser l’article, notamment concernant la proposition de relogement ou d’hébergement. C’est pourquoi elle émet un avis défavorable sur ces amendements identiques.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État. Je le redis, nous voulons lutter contre l’un des fléaux qui rongent Mayotte : l’habitat illégal et informel, qui est également – vous l’avez rappelé – un habitat indigne.
Permettez-moi de revenir sur les termes de l’article 10.
La destruction des habitations illégales n’est facile ni techniquement ni, surtout, humainement, mais c’est une décision fondée sur le droit. Il s’agit d’une exigence de sécurité publique, de salubrité et de dignité humaine. (Mme Evelyne Corbière Naminzo proteste.) C’est la raison pour laquelle je récuse l’expression « point noir » qu’a employée Mme Margaté. Non ! C’est simplement l’une des actions auxquelles nous pouvons recourir.
Il est possible de s’interroger sur l’efficacité de ces politiques publiques, comme nous l’avons fait lorsque nous avons constaté la reconstruction rapide – et le mot est faible ! – de cet habitat le lendemain ou le surlendemain du passage du cyclone Chido. Je peux comprendre ce questionnement, qui est celui des élus mahorais et des Mahorais eux-mêmes. En revanche, je le répète, la démolition de ces habitations correspond à une exigence de sécurité publique, de salubrité et de dignité humaine.
Au mois d’avril dernier, j’ai supervisé une opération de lutte contre l’habitat illégal à Dzoumogné. La démolition de soixante-treize cases, prévue de longue date à la suite d’un travail de réflexion réalisé par cette commune, doit permettre d’y construire une école de vingt-six classes – nous en avons déjà parlé aujourd’hui – et de s’attaquer à un véritable foyer de délinquance.
J’ai également pu observer l’action de l’Association pour la condition féminine et l’aide aux victimes (Acfav), qui réalise des enquêtes sociales, parfois dans des conditions extrêmement difficiles en termes de sécurité, et est accompagnée pour ce faire par les forces de l’ordre. Elle propose notamment des solutions de relogement, qui ne répondent d’ailleurs pas toutes à une demande… La coopération avec des associations de ce type n’a pas vocation à être remise en cause.
Par ailleurs, il convient de ne pas caricaturer les opérations conduites au titre de la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, dite loi Élan, qui sont utiles dans ce domaine. De ce point de vue, le terme « décasage » est réducteur.
Ces opérations supposent un important travail préparatoire, à la fois fin, compliqué et nécessaire, qui associe les élus, la commune, la police, la gendarmerie, les forces de sécurité intérieures et le monde associatif.
En 2024, six opérations dites Élan ont été déployées. En 2025, six opérations sont prévues, dont l’une a d’ores et déjà été réalisée. C’est bien la preuve que les choses avancent depuis que – disant cela, je reste prudent – la situation de l’île est stabilisée.
Dès le lendemain du passage du cyclone Chido, les maires ont immédiatement demandé l’interdiction des bidonvilles, ils ont même exigé qu’on l’inscrive dans la loi d’urgence pour Mayotte. Même s’il est évident que les bidonvilles sont interdits par principe, c’était une façon de marquer la volonté commune que doivent partager l’État, les élus et une grande partie du monde associatif.
J’y insiste, je peux comprendre le débat sur la question du relogement, et nous y reviendrons sans doute. J’ai encore évoqué ce sujet ce matin quand il a été question de la mission de reconstruction, du type d’habitat et de logement, des changements à opérer au travers du foncier, des titres de propriété et de la construction d’un véritable cadastre. Comme il existe des dizaines de milliers de titres, tout cela prendra du temps. Il s’agit de sujets de fond.
Pour autant, la moindre des choses est de s’attaquer à l’habitat illégal en y mettant des moyens et selon une méthode qui soit humaine, avec des outils sociaux. C’est compliqué, mais les maires y travaillent sur le terrain.
De grâce, nous avons besoin de cet article, dont la mise en œuvre est attendue et qui est une partie importante de ce texte.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur ces amendements identiques de suppression.
M. le président. La parole est à Mme Antoinette Guhl, pour explication de vote.
Mme Antoinette Guhl. Monsieur le ministre, dire que l’on va détruire les bidonvilles à Mayotte n’a pas beaucoup de sens, parce que Chido l’a déjà fait avec une efficacité à nulle autre pareille. Il a absolument tout détruit, réduisant à néant tous ces habitats de fortune. Résultat, ils sont aujourd’hui tous reconstruits !
La solution du problème des bidonvilles à Mayotte n’est donc pas la destruction ; c’est au contraire la construction de logements. C’est un sujet très compliqué, vous avez eu raison de le dire, mais ce n’est pas une raison pour baisser les bras.
Il ne sera pas possible de construire des logements dans les zones déjà extrêmement denses de Mayotte. La solution au problème du logement est donc le réaménagement de l’île en vue de réaliser des espaces polycentrés et de reloger les personnes qui habitent dans des conditions de vie indignes. En revanche, rendre ces conditions encore plus indignes n’arrangera rien du tout !
C’est donc bien l’efficacité de la mesure prévue que je remets en cause ici, tout autant que son humanité.
M. le président. La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo, pour explication de vote.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. Vous l’aurez compris, monsieur le ministre, mes chers collègues, au travers de notre amendement, nous voulons non pas qu’il soit mis un frein à la démolition des bidonvilles, mais que l’on se donne les moyens de reloger les habitants.
Il n’est pas question que passe à Mayotte, après le cyclone Chido, un cyclone Macron ou un cyclone Valls ! Il est important de reloger les personnes pour qu’elles ne se retrouvent pas à la rue.
Nous dénonçons le fait que des gens en situation de précarité soient de nouveau jetés à la rue. Il est donc essentiel de mettre en place, à côté des opérations de résorption de l’habitat insalubre, une véritable politique du relogement.
M. le président. La parole est à M. Saïd Omar Oili, pour explication de vote.
M. Saïd Omar Oili. Un point m’inquiète : on a l’impression de voter des textes à visée purement symbolique, qui ne s’appliquent pas chez nous.
Dans la loi d’urgence pour Mayotte, nous avons interdit l’utilisation de la tôle pour la construction de logements. J’ai demandé par courrier, voilà quelques mois, qu’un bilan des ventes de tôle soit dressé. Nous avons en effet prévu que, pour ces transactions, l’acheteur présente une carte d’identité et qu’un répertoire soit mis en place dans les magasins qui vendent ce matériau afin de savoir qui en fait l’acquisition.
Faisons d’abord ce bilan, dont j’aimerais avoir connaissance, avant de parler des bidonvilles !
On adopte des lois que l’on n’applique pas…
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 63 et 82.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 113, présenté par Mmes Corbière Naminzo et Margaté, M. Brossat, Mme Cukierman et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 4, première phrase
Après le mot :
peut,
insérer les mots :
après un rapport de diagnostic des possibilités techniques et des mesures correctives permettant de remédier, même temporairement, à la situation d’insalubrité et de sécuriser les conditions de vie,
II. – Alinéa 5
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Le rapport précise la nature de l’insalubrité constatée et prévoit des préconisations techniques et des mesures correctives permettant de remédier, même temporairement, à la situation d’insalubrité et de sécuriser les conditions de vie.
La parole est à Mme Marianne Margaté.
Mme Marianne Margaté. L’habitat informel est presque la norme à Mayotte, puisque 40 % des logements sur l’île sont en tôle. Tous ces logements ne seront pas concernés par l’article 10, car tous ne sont pas considérés comme des campements illicites. Tous ne seront donc pas démolis.
Cependant, même les logements susceptibles d’être démolis doivent pouvoir bénéficier d’un diagnostic permettant de déterminer s’ils peuvent être améliorés, par exemple au moyen de raccordements ou d’installations sanitaires à proximité. Nous formulons cette proposition de concert avec plusieurs associations, telles que l’Unicef ou la Fondation pour le logement des défavorisés.
Cette possibilité figurait dans l’instruction du Gouvernement du 25 janvier 2018 visant à donner une nouvelle impulsion à la résorption des campements illicites et des bidonvilles, dans laquelle étaient recommandées des améliorations temporaires mais vitales, comme l’accès à l’eau, l’hygiène, les normes de sécurité, plutôt que des expulsions.
Là encore, si des solutions immédiates de relogement ou d’hébergement ne sont pas possibles, il faut se montrer pragmatique et améliorer l’existant en attendant que les constructions nécessaires voient le jour.
À cet égard, j’ajoute que le besoin de constructions neuves ne doit pas être laissé de côté. Je parle là de logements accessibles, c’est-à-dire sociaux, à loyers bas. En effet, pour refonder Mayotte, la priorité doit être de loger les 77 % de Mahorais qui vivent sous le seuil de pauvreté.
En attendant, nous proposons d’intégrer dans le texte l’obligation de remise d’un « rapport de diagnostic des possibilités techniques et des mesures correctives permettant de remédier, même temporairement, à la situation d’insalubrité » que subissent les Mahorais les plus précaires.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
Mme Micheline Jacques, rapporteur pour avis. Je ne crois pas qu’il convienne d’imposer une charge administrative supplémentaire aux services de l’État, qui sont d’ores et déjà démunis pour lutter contre l’habitat informel et qui manquent de moyens. Prévoir la remise d’un rapport avant la signature de chaque arrêté n’est donc pas une bonne idée, alors que les élus locaux nous demandent de renforcer l’efficacité des opérations de résorption des bidonvilles.
Sur le fond, je rappelle que ces habitations de fortune sont souvent édifiées sur des terrains non constructibles, avec un terrassement très sommaire, ce qui expose les occupants à des risques graves. En outre, d’un point de vue sanitaire, les épidémies de choléra, de typhoïde, d’hépatite A et de poliomyélite liées aux conditions d’habitation sont à l’origine de 10 % des passages dans les services d’urgence de Mayotte.
Je sais de quoi je parle : lors de son déplacement sur l’île, la commission des affaires économiques a visité un bidonville pendant trois heures. Si nos collègues qui déposent ces amendements avaient l’occasion de faire de même, ils n’auraient sans doute pas la même vision de la situation et n’envisageraient même pas l’amélioration de ce type d’habitat…
L’évacuation de ces logements est ordonnée à cause des risques que je viens de mentionner. En la matière, une action d’endiguement ferme est nécessaire.
La commission des affaires économiques émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 13, présenté par Mme Artigalas, M. Omar Oili, Mmes Narassiguin et Le Houerou, MM. Lurel, Kanner et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 6, deuxième phrase
Remplacer les mots :
quinze jours
par les mots :
un mois
II. – Alinéa 11, première phrase
Remplacer les mots :
de l’article L. 521-2
par les mots :
des articles L. 521-1 à L. 521-3
III. – Alinéa 12
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Viviane Artigalas.
Mme Viviane Artigalas. L’article 10 prévoit deux dispositifs pour lutter contre l’habitat informel.
Le premier dispositif permet d’agir immédiatement pour empêcher l’extension des bidonvilles existants ou la création de nouvelles zones d’habitat informel. Le projet de loi vise à renforcer l’efficacité de ce dispositif en augmentant le délai de flagrance de quatre-vingt-seize heures à sept jours et en élargissant la liste des agents habilités à constater les infractions.
Le second dispositif tend à traiter de larges zones d’habitat informel, existant parfois depuis plusieurs années. Pour ce faire, le projet de loi supprime pendant près de dix ans l’obligation de relogement ou d’hébergement et ramène le délai accordé pour évacuer et démolir les locaux à quinze jours maximum, contre un mois actuellement.
Ces deux exceptions ne paraissent ni justifiées ni opérantes pour lutter contre l’habitat informel installé de longue date.
Les opérations d’évacuation et de destruction, dites Wuambushu ou Place nette, ont largement montré leur inefficacité pour traiter durablement ces zones de bidonville. Sans accompagnement, les familles n’ont d’autre choix que de s’installer dans de nouveaux lieux informels, où les conditions sont toujours plus précaires.
Aussi, cet amendement vise à maintenir une proposition de relogement ou d’hébergement, ainsi qu’un délai raisonnable qui permette un accompagnement des familles avant l’évacuation et la démolition des installations. Il tend, enfin, à rétablir tous les droits de recours.
M. le président. L’amendement n° 40 rectifié, présenté par Mme Briante Guillemont, MM. Masset et Gold, Mme Pantel et M. Daubet, est ainsi libellé :
Alinéa 6, deuxième phrase
Remplacer le mot :
quinze
par le mot :
trente
La parole est à Mme Sophie Briante Guillemont.
Mme Sophie Briante Guillemont. Il est défendu !
M. le président. L’amendement n° 83, présenté par Mmes Corbière Naminzo et Margaté, M. Brossat, Mme Cukierman et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Alinéa 12
1° Supprimer les mots :
Jusqu’au 13 décembre 2034,
2° Remplacer les mots :
peut, de manière motivée
par le mot :
doit
et les mots :
déroger à
par le mot :
respecter
La parole est à Mme Marianne Margaté.
Mme Marianne Margaté. Il ne s’agit pas vraiment d’un amendement de repli, puisque son objet est de montrer ce que devrait être l’article 10 : un outil pour interdire les bidonvilles tout en obligeant l’État à respecter la loi en relogeant systématiquement les personnes qui y vivent.
Nous comprenons le trouble que peuvent susciter les bidonvilles lorsqu’ils naissent et s’étendent et nous ne défendrons jamais l’édification de tels ensembles. En ce sens, l’article 10 présente un intérêt. Pour autant, cette situation constitue avant tout un drame pour ceux-là mêmes qui sont condamnés à vivre dans ces endroits, faute de solutions.
Cet amendement vise à résoudre le problème à la source. Si les personnes vivent dans des bidonvilles, c’est d’abord parce qu’elles ne peuvent aller nulle part ailleurs. Si nous ne prenons pas de mesures pour résoudre les problèmes du mal-logement et du sans-abrisme, alors le bidonville que vous aurez détruit ne sera pas encore tombé qu’un autre sera déjà construit à quelques kilomètres !
Oui, il faut éradiquer le mal-logement à Mayotte, comme partout sur le territoire français. Ce doit être notre priorité.
Nous avons l’occasion, avec ce texte, de refonder Mayotte. Pour corriger les erreurs qui existaient bien avant le passage du cyclone Chido, il faut commencer par respecter nos principes fondamentaux, au premier chef l’égalité.
Cet amendement est donc simple : il tend à rappeler que l’État ne saurait déroger à son devoir de relogement, mais qu’il doit le respecter.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
Mme Micheline Jacques, rapporteur pour avis. La réduction du délai d’exécution volontaire, sur laquelle tendent à revenir les amendements nos 13 et 40 rectifié, était déjà proposée dans la rédaction initiale du texte.
L’objectif de cette disposition est de répondre au sentiment d’attentisme, voire d’impuissance, de nos compatriotes mahorais, notamment des élus locaux, face au délai qui peut s’écouler entre la prise d’un arrêté d’évacuation et son exécution d’office. La commission des affaires économiques a souhaité maintenir cette mesure qui va dans le bon sens.
Pour ce qui concerne les amendements nos 13 et 83, la commission a recadré l’assouplissement de l’obligation de relogement proposé par le Gouvernement, afin de sécuriser le texte. La dérogation doit désormais être justifiée au regard de l’état des circonstances locales, notamment de celui du parc de logement et d’hébergement à Mayotte, dont nous savons tous ici qu’il est catastrophique : ce parc est en suroccupation chronique, à hauteur de 130 %, avec seulement 1 241 places disponibles.
Cette dérogation est aussi circonscrite dans le temps. Certes, la durée de dix ans prévue est longue, mais elle correspond à la réalité du terrain. Mayotte est malheureusement dans une situation économique et sociale dramatique, qui nécessite du temps long.
Je m’appuie également sur mon expérience à Saint-Martin, où, sept ans après l’ouragan Irma, la reconstruction est loin d’être achevée. Je doute que la situation à Mayotte soit plus favorable.
Enfin, la commission des affaires économiques a encadré l’exercice du recours suspensif en le limitant au référé-liberté. Cette procédure est la plus susceptible de protéger les libertés fondamentales de personnes dont l’évacuation est demandée, tout en permettant un délai d’exécution rapide, le juge ayant à se prononcer dans un délai de quarante-huit heures.
Ces évolutions sont équilibrées. Elles permettront à la fois une accélération des opérations de résorption et un encadrement des pouvoirs de police du préfet, grâce à une dérogation plus circonscrite.
Par conséquent, la commission des affaires économiques émet un avis défavorable sur ces amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État. J’ajoute une précision.
Si nous voulons lutter efficacement contre le développement de l’habitat informel à Mayotte, il est incontestablement nécessaire de renforcer l’efficacité des mesures existantes de police administrative spéciale. Cela fait partie des outils dont nous avons besoin.
Ensuite, ce qu’il nous faut, c’est réussir la véritable reconstruction afin de pouvoir proposer des logements adaptés et de disposer d’une capacité de relogement, indépendamment des politiques que nous avons déjà évoquées, notamment en matière d’immigration.
Avec vos amendements, vous êtes en train de démunir l’État, de le priver des outils dont il a besoin pour s’attaquer à cette plaie, à cette difficulté. Évidemment, il faut prendre en charge les cas humains – les services sociaux sont là pour cela – ; reste qu’il faut montrer que nous avons la volonté de nous attaquer à ce problème. Indubitablement, ce sera long et difficile, tant il est ancré à Mayotte, en raison, bien sûr, de l’immigration illégale, mais pas uniquement.
Je le répète, nous avons besoin de ces outils. C’est pourquoi, comme la commission des affaires économiques, le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces amendements.
M. le président. L’amendement n° 45 rectifié, présenté par Mme Briante Guillemont, MM. Cabanel, Bilhac, Daubet, Masset, Gold, Grosvalet et Guiol et Mme Pantel, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le représentant de l’État, les collectivités territoriales, les chambres consulaires, les associations mahoraises ainsi que les compagnies d’assurance exerçant à Mayotte mènent conjointement des actions destinées à favoriser l’assurabilité des biens, notamment par la mise en œuvre de dispositifs de sensibilisation et d’information, à travers des canaux appropriés et adaptés aux publics concernés.
Un rapport est publié chaque année par le représentant de l’État. Il établit un bilan, identifie les obstacles rencontrés et expose les perspectives d’action pour l’année suivante.
La parole est à Mme Sophie Briante Guillemont.
Mme Sophie Briante Guillemont. Cet amendement traite d’un sujet essentiel pour la refondation durable de l’île : l’assurabilité des biens.
Après un sinistre majeur, l’intervention de l’assurance, fondée notamment sur la mutualisation nationale et sur le régime d’indemnisation des catastrophes naturelles, dit CatNat, favorise la résilience d’un territoire et de ses habitants. Il y a donc un enjeu d’intérêt général à favoriser une progression de la couverture assurantielle à Mayotte.
Pourquoi cette question est-elle si importante ? Aujourd’hui, seulement 6 % des logements à Mayotte sont assurés, contre 96 % en métropole et environ 50 % dans les autres territoires ultramarins. Ce taux doit nous alerter, car il révèle une vulnérabilité massive, qui limite fortement les capacités de rebond des habitants face aux chocs climatiques.
Cette situation tient à deux dynamiques assez contradictoires : d’une part, un faible réflexe assurantiel, hérité de pratiques d’entraide familiale et d’un habitat souvent autoconstruit ; d’autre part, une intensification des risques et une augmentation de la fréquence des événements climatiques, lesquels sont de plus en plus destructeurs.
Cet amendement vise à s’attaquer à une partie du problème en favorisant la diffusion d’une culture assurantielle sur l’île. Cette action doit s’inscrire dans une réflexion plus large visant à repenser le modèle assurantiel non seulement à Mayotte, mais aussi dans les collectivités ultramarines.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
Mme Micheline Jacques, rapporteur pour avis. De manière générale, je partage évidemment votre préoccupation, que la délégation sénatoriale aux outre-mer, que je préside, a relayée à plusieurs reprises.
Dans son rapport d’information de 2021 sur la politique du logement dans les outre-mer, la délégation préconisait d’autoriser par exemple l’assurance des opérations d’autoconstruction et d’autoréhabilitation encadrées. Dans celui de 2024 sur le foncier outre-mer, elle recommandait d’encourager le recours à des autorisations d’urbanisme et de fournir aux pétitionnaires un argumentaire sur l’intérêt de disposer d’une assurance habitation.
Si l’intention à l’origine de cet amendement est louable, le caractère normatif du dispositif proposé ne me semble pas évident. La mesure proposée me paraît difficile à mettre en œuvre d’un point de vue opérationnel, en raison de sa formulation extrêmement générale. En outre, s’il était adopté, cet amendement aurait pour effet d’accroître la charge des services sur place.
La situation de Mayotte est spécifique et diffère de celle des autres outre-mer, car les moyens de l’État y sont structurellement déficitaires, comme l’a constaté la délégation de la commission des affaires économiques lors de son déplacement au début du mois de mai.
C’est pourquoi je suis davantage favorable à une réforme plus structurelle permettant de mieux prendre en compte les spécificités ultramarines en termes d’assurance, comme il est indiqué dans l’objet de cet amendement.
La commission des affaires économiques demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Madame Briante Guillemont, l’amendement n° 45 rectifié est-il maintenu ?
Mme Sophie Briante Guillemont. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 45 rectifié est retiré.
L’amendement n° 72 rectifié n’est pas soutenu.
Article 23 (priorité)
À Mayotte, par dérogation à l’article 5 de la loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine et jusqu’au 1er janvier 2030, chaque commune est considérée comme étant un quartier prioritaire de la politique de la ville. – (Adopté.)
Après l’article 23 (priorité)
M. le président. L’amendement n° 47 rectifié, présenté par Mme Briante Guillemont, MM. Cabanel, Daubet, Bilhac et Gold, Mme Pantel et M. Masset, est ainsi libellé :
Après l’article 23
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La chambre régionale des comptes territorialement compétente rend un rapport d’évaluation sur l’impact des articles 22 et 23 de la présente loi, sur le développement de Mayotte.
Ce rapport est rendu public dans un délai de trois mois à compter de la date mentionnée au III de l’article 22 de la présente loi.
La parole est à M. Henri Cabanel.
M. Henri Cabanel. Au cours de la période 2026-2031, Mayotte bénéficiera d’un régime fiscal dérogatoire et transitoire et d’un classement en quartier prioritaire de la politique de la ville afin de favoriser son développement.
Ce projet de loi ne prévoit aucun dispositif d’évaluation au terme de cette période. Pourtant, la refondation durable de Mayotte dépend en partie des enseignements qui seront tirés de cette période de reconstruction.
Cet amendement vise à corriger cette omission.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
Mme Micheline Jacques, rapporteur pour avis. Je partage la volonté des auteurs de l’amendement de mieux évaluer les effets du classement en quartier prioritaire de la politique de la ville, notamment des mesures fiscales qui y sont adossées. Néanmoins, ne multiplions pas les demandes de rapport.
Sur l’initiative des rapporteurs de la commission des lois, le rapport annexé au projet de loi prévoit désormais un comité de suivi de la loi de programmation chargé de veiller à l’évaluation des mesures prévues. Composé de deux députés et de deux sénateurs, il devra rendre compte au Parlement. En outre, un rapport intermédiaire sera remis d’ici au 1er juillet 2028.
Monsieur le ministre, nous attendons que ce rapport soit remis dans les délais.
Par conséquent, pour éviter les doublons, la commission des affaires économiques demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Cabanel, l’amendement n° 47 rectifié est-il maintenu ?
M. Henri Cabanel. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 47 rectifié est retiré.
Article 24 (priorité)
Au début du second alinéa de l’article L. 951-11 du code rural et de la pêche maritime, les mots : « Les missions mentionnées aux a, d et e du I et aux a et b du II de l’article L. 912-3, aux 1° et 4° de l’article L. 912-7 et aux 1° et 2° de l’article L. 951-3 » sont remplacés par les mots : « Les missions mentionnées aux articles L. 912-3, L. 912-7 et L. 951-3 » – (Adopté.)
M. le président. Nous reprenons le cours normal de la discussion du texte de la commission.
TITRE III
PROTÉGER LES MAHORAIS
Chapitre Ier
Renforcer le contrôle des armes
Article 11
Le chapitre II du titre IV du livre III du code de la sécurité intérieure est ainsi modifié :
1° Au début, est ajoutée une section 1 intitulée : « Dispositions générales » et comprenant l’article L. 342-1 ;
2° Est ajoutée une section 2 ainsi rédigée :
« Section 2
« Visites et saisies
« Art. L. 342-2. – À Mayotte, si les circonstances font craindre des troubles graves à l’ordre public résultant de violences commises sous la menace ou avec usage d’une arme, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Mamoudzou, saisi d’une demande motivée du représentant de l’État dans le département, peut, par une ordonnance écrite et motivée et après avis du procureur de la République, autoriser la visite de tout lieu lorsqu’il existe des raisons sérieuses de penser qu’il est fréquenté par une personne susceptible de participer à ces troubles, aux seules fins de procéder à la saisie, en vue de leur destruction, d’armes, des munitions ou de leurs éléments relevant des catégories A à D ainsi que des objets susceptibles de constituer une arme dangereuse pour la sécurité publique, tels que définis à l’article L. 311-2.
« Ces opérations ne peuvent concerner les lieux affectés à l’exercice d’un mandat parlementaire ou à l’activité professionnelle des avocats, des magistrats ou des journalistes et les domiciles des personnes concernées.
« Lorsque la visite vise un lieu enclavé, inaccessible depuis la voie publique, du fait de la présence de locaux ou installations édifiés sans droit ni titre à usage professionnel ou constituant un habitat informel au sens du deuxième alinéa de l’article 1-1 de la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 visant à la mise en œuvre du droit au logement, l’ordonnance peut autoriser les agents chargés des opérations à traverser ces locaux ou installations aux seules fins de rejoindre le lieu visé par l’ordonnance.
« L’ordonnance mentionne l’adresse ou l’identification par tous moyens des lieux dans lesquels les opérations de visite et de saisie peuvent être effectuées, le cas échéant, les locaux mentionnés au troisième alinéa du présent article dont la traversée est strictement nécessaire pour rejoindre les lieux à visiter, le service et la qualité des agents habilités à procéder à la visite et à la saisie autorisées, le nom et la qualité du chef de service qui nomme l’officier de police judiciaire territorialement compétent présent sur les lieux, chargé d’assister à ces opérations et de tenir informé le juge des libertés et de la détention de leur déroulement.
« L’ordonnance précise en outre la faculté pour l’occupant des lieux ou son représentant de faire appel à un conseil de son choix, sans que l’exercice de cette faculté n’entraîne la suspension des opérations autorisées sur le fondement du premier alinéa.
« L’ordonnance est communiquée au procureur de la République.
« Art. L. 342-3. – L’ordonnance est exécutoire au seul vu de la minute. Elle est notifiée sur place au moment de la visite à l’occupant des lieux ou à son représentant, qui en reçoit copie intégrale contre récépissé ou émargement au procès-verbal de visite. En l’absence de l’occupant des lieux ou de son représentant, l’ordonnance est notifiée après les opérations, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. La notification est réputée faite à la date de réception figurant sur l’avis. À défaut de réception, il est procédé à la signification de l’ordonnance par acte de commissaire de justice.
« L’acte de notification comporte mention des voies et délais de recours contre l’ordonnance ayant autorisé la visite et contre le déroulement des opérations de visite et de saisie.
« La visite est effectuée en présence de l’occupant des lieux ou de son représentant, qui peut se faire assister d’un conseil de son choix. En l’absence de l’occupant des lieux, les agents chargés de la visite ne peuvent procéder à celle-ci qu’en présence de deux témoins qui ne sont pas placés sous leur autorité.
« La visite ne peut être commencée avant 6 heures ni après 21 heures, sauf autorisation expresse, écrite et motivée accordée par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire, fondée sur l’urgence ou les nécessités de l’opération.
« Elle s’effectue sous l’autorité et le contrôle du juge des libertés et de la détention qui l’a autorisée. À cette fin, ce dernier donne toutes instructions aux agents qui participent à l’opération. Il peut, s’il l’estime utile, se rendre dans les locaux pendant l’opération et, à tout moment, sur saisine de l’occupant des lieux ou de son représentant, ou de son propre chef, en décider la suspension ou l’arrêt.
« Lorsqu’une infraction est constatée, l’officier de police judiciaire en dresse procès-verbal, procède à toute saisie utile et en informe sans délai le procureur de la République.
« Un procès-verbal relatant les modalités et le déroulement de l’opération et consignant les constatations effectuées est dressé sur-le-champ par les agents qui ont procédé à la visite. Il indique, en outre, les motifs de la saisie et dresse l’inventaire des armes, munitions ainsi que de leurs éléments saisis. Lorsque les agents ont été autorisés, en application du troisième alinéa de l’article L. 342-2, à traverser les locaux et installations qu’il mentionne, les lieux concernés figurent dans ce procès-verbal.
« Le procès-verbal est signé par ces agents et par l’officier de police judiciaire territorialement compétent présent sur les lieux, leur qualité et leur service ou unité d’affectation, ainsi que par l’occupant des lieux ou, le cas échéant, son représentant ou les témoins. En cas de refus de signer, mention en est faite au procès-verbal.
« L’original du procès-verbal est, dès qu’il a été établi, adressé au juge qui a autorisé la visite et la saisie. Une copie de ce même document est remise à l’occupant des lieux ou à son représentant.
« Le procès-verbal mentionne le délai et les voies de recours.
« Si, à l’occasion de la visite, les agents qui y procèdent découvrent des éléments révélant l’existence d’autres lieux répondant aux conditions mentionnées au premier alinéa de l’article L. 342-2, ils peuvent, sur autorisation du juge qui a pris l’ordonnance, délivrée en cas d’urgence par tout moyen, procéder sans délai à la visite de ces lieux. Mention de cette autorisation est portée au procès-verbal mentionné au septième alinéa du présent article.
« Art. L. 342-4. – I. – L’ordonnance autorisant la visite et les saisies peut faire l’objet d’un appel devant le président de la chambre d’appel de la cour d’appel de Saint-Denis de la Réunion à Mamoudzou. Les parties ne sont pas tenues de constituer avocat.
« Cet appel est formé par déclaration remise ou adressée par pli recommandé au greffe de la cour dans un délai de quinze jours. Ce délai court à compter de la notification de l’ordonnance. Cet appel n’est pas suspensif.
« Le greffe du tribunal judiciaire transmet sans délai le dossier de l’affaire au greffe de la chambre de la cour d’appel où les parties peuvent le consulter.
« L’ordonnance du président de la chambre d’appel de la cour d’appel de Saint-Denis de la Réunion à Mamoudzou est susceptible d’un pourvoi en cassation, selon les règles prévues par le code de procédure pénale. Le délai de pourvoi en cassation est de quinze jours.
« II. – Le président de la chambre d’appel de la cour d’appel de Saint-Denis de la Réunion à Mamoudzou connaît des recours contre le déroulement des opérations de visite et saisie autorisées par le juge des libertés et de la détention. Les parties ne sont pas tenues de constituer avocat.
« Le recours est formé par déclaration remise ou adressée par pli recommandé au greffe de la cour dans un délai de quinze jours. Ce délai court à compter de la remise ou de la réception du procès-verbal de visite. Ce recours n’est pas suspensif.
« L’ordonnance du président de la chambre d’appel de la cour d’appel de Saint-Denis de la Réunion à Mamoudzou est susceptible d’un pourvoi en cassation selon les règles prévues par le code de procédure pénale. Le délai de pourvoi en cassation est de quinze jours.
« Art. L. 342-5. – I. – Lorsqu’elle est susceptible de fournir des renseignements sur les armes recherchées ou découvertes sur le lieu de la visite ayant un lien avec la prévention des troubles à l’ordre public mentionnés au premier alinéa de l’article L. 342-2 et ayant justifié la visite, la personne pour laquelle il existe des raisons sérieuses de penser que son comportement constitue une menace pour la sécurité et l’ordre publics peut, après information sans délai du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Mamoudzou, être retenue sur place par l’officier de police judiciaire, pendant le temps strictement nécessaire au déroulement des opérations.
« La retenue ne peut excéder quatre heures à compter du début de la visite et le juge des libertés et de la détention peut y mettre fin à tout moment.
« Lorsqu’il s’agit d’un mineur, la retenue fait l’objet d’un accord exprès du juge des libertés et de la détention. Le mineur doit être assisté de son représentant légal, sauf impossibilité dûment justifiée.
« Mention de l’information ou de l’accord exprès du juge des libertés et de la détention est portée au procès-verbal mentionné au premier alinéa du III du présent article.
« II. – La personne retenue est immédiatement informée par l’officier de police judiciaire ou, sous le contrôle de celui-ci, par un agent de police judiciaire, dans une langue qu’elle comprend :
« 1° Du fondement légal de son placement en retenue ;
« 2° De la durée maximale de la mesure ;
« 3° Du fait que la retenue dont elle fait l’objet ne peut donner lieu à audition et qu’elle a le droit de garder le silence ;
« 4° Du fait qu’elle bénéficie du droit de faire prévenir par l’officier de police judiciaire toute personne de son choix ainsi que son employeur.
« Si l’officier de police judiciaire estime, en raison des nécessités liées à la retenue, ne pas devoir faire droit à cette demande, il en réfère sans délai au juge des libertés et de la détention qui décide, s’il y a lieu, d’y faire droit.
« Sauf en cas de circonstance insurmontable, qui doit être mentionnée au procès-verbal, les diligences incombant à l’officier de police judiciaire en application du premier alinéa du présent 4° doivent intervenir, au plus tard, dans un délai de deux heures à compter du moment où la personne a formulé sa demande.
« III. – L’officier de police judiciaire mentionne, dans un procès-verbal, les motifs qui justifient la retenue. Il précise le jour et l’heure à partir desquels la retenue a débuté, le jour et l’heure de la fin de la retenue et la durée de celle-ci.
« Ce procès-verbal est présenté à la signature de l’intéressé. Si ce dernier refuse de le signer, mention est faite du refus et des motifs de celui-ci.
« Le procès-verbal est transmis au juge des libertés et de la détention, copie en ayant été remise à l’intéressé.
« La durée de la retenue s’impute, s’il y a lieu, sur celle de la garde à vue.
« Art. L. 342-6. – La conservation de l’arme, des munitions et de leurs éléments saisis est confiée aux services de la police nationale ou de la gendarmerie nationale territorialement compétents.
« Le représentant de l’État dans le département met en mesure la personne mentionnée au premier alinéa de l’article L. 342-2 de faire valoir ses observations avant la saisie définitive.
« Lorsque la saisie est définitive, les armes, munitions et leurs éléments sont détruits.
« Lorsque l’arme des catégories A à C saisie est régulièrement détenue par une personne non visée par l’ordonnance autorisant la visite mentionnée au premier alinéa de l’article L. 342-2, la destruction intervient à l’issue d’une procédure contradictoire.
« Art. L. 342-7. – L’article L. 312-10 est applicable aux saisies réalisées en application de l’article L. 342-2.
« Art. L. 342-8. – Les juridictions de l’ordre judiciaire sont compétentes pour connaître du contentieux indemnitaire résultant des mesures prises en application du présent chapitre, dans les conditions prévues à l’article L. 141-1 du code de l’organisation judiciaire. »
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 108, présenté par Mmes Corbière Naminzo et Cukierman, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 30
Après le mot :
personne
insérer le mot :
majeure
II. – Alinéa 32
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. Par cet amendement, nous vous invitons à interdire la retenue des mineurs dans le cadre des visites domiciliaires effectuées en vue de la recherche d’armes.
Il est vrai qu’un régime particulier est prévu : la retenue doit faire l’objet d’un accord exprès du juge des libertés et de la détention (JLD) et le mineur doit être assisté de son représentant légal, sauf impossibilité dûment justifiée. Pour autant, ce texte manque de clarté, en particulier pour ce qui relève de la protection des mineurs. Ainsi, les termes « sauf impossibilité dûment justifiée » manquent de précision, ce qui pourrait entraîner des dérives.
Les dispositions de cet article sont donc contraires aux exigences constitutionnelles de clarté de la loi, comme à celles en matière de justice des mineurs. La responsabilité pénale des mineurs doit en effet être atténuée en fonction de leur âge. Par ailleurs, des mesures adaptées à l’âge et à la personnalité des enfants délinquants doivent être mises en œuvre afin de participer à leur relèvement éducatif et moral.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous vous proposons de supprimer les dispositions relatives à la rétention des mineurs à Mayotte, afin de les aligner sur les dispositions applicables ailleurs en France.
M. le président. L’amendement n° 153, présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Alinéa 32, seconde phrase
Supprimer les mots :
sauf impossibilité dûment justifiée
La parole est à M. Daniel Salmon.
M. Daniel Salmon. L’article 11 encadre les visites domiciliaires aux fins de recherches d’armes. Il prévoit un régime de retenue administrative des personnes à leur propre domicile, la durée de cette retenue ne pouvant excéder quatre heures.
Ce régime, qui est actuellement applicable aux auteurs d’infractions terroristes ou dans le cadre de la prévention des actes de terrorisme, serait étendu d’une manière très large.
Sans remettre en cause la nécessaire lutte contre la prolifération des armes sur le territoire de Mayotte, cet amendement a pour objet de prévoir la présence obligatoire des représentants légaux des mineurs en cas de retenue administrative à domicile.
La mesure de retenue à domicile, dont les modalités sont insuffisamment détaillées dans l’étude d’impact, suppose l’usage de la coercition par les forces de l’ordre. Cette mesure est manifestement déséquilibrée. Un meilleur équilibre entre sauvegarde de l’ordre public et protection des mineurs est nécessaire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Bitz, rapporteur. Il faut bien situer le contexte dans lequel ces dispositions seront mises en œuvre, à savoir en cas de troubles graves à l’ordre public. Les visites domiciliaires auraient lieu chez des personnes jugées dangereuses, qui pourraient le cas échéant être retenues jusqu’à quatre heures sur place.
Quant aux mineurs, le texte prévoit que leur retenue est soumise à l’autorisation du juge des libertés et de la détention et que leur représentant légal doit être présent, sauf impossibilité dûment justifiée. Nous sommes donc dans un contexte délicat, concernant des personnes dangereuses, mais des garanties sont prises concernant la retenue des mineurs.
L’auteur de l’amendement n° 108 évoque un risque d’inconstitutionnalité de la disposition. Dans une décision du 29 mars 2018 relative à la lutte antiterroriste, le Conseil constitutionnel a validé le principe qui nous est aujourd’hui proposé pour Mayotte.
La présence d’un représentant légal du mineur, qui est l’objet de l’amendement n° 153, demeure le principe et doit être recherchée à tout prix, comme en matière antiterroriste. Néanmoins, si elle n’est pas possible, il est difficilement envisageable que cela fasse échec à la visite domiciliaire, dans le contexte dans lequel nous nous situerions.
Une garantie supplémentaire est prévue : l’impossibilité pour le représentant légal d’être présent doit être justifiée par les agents de police auprès du JLD.
Ainsi, le texte nous paraît proportionné. C’est pourquoi la commission émet un avis défavorable sur ces deux amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État. Madame la sénatrice, le projet de loi encadre, par des dispositions spécifiques, la retenue d’un mineur : celle-ci requiert l’accord exprès du juge des libertés et de la détention, ainsi que la présence du représentant légal.
Par ailleurs, la retenue ne peut concerner que la personne dont le comportement a justifié la visite domiciliaire et non toutes les personnes présentes sur le lieu de la visite.
Contrairement à ce que vous indiquez, il s’agit non pas d’une mesure judiciaire, mais d’une mesure de police administrative. Par conséquent, les jurisprudences citées dans l’objet de l’amendement sont, de mon point de vue, inopérantes.
Il s’agit non pas de sanctionner le comportement d’un mineur, mais simplement de retenir au plus quatre heures une personne susceptible de fournir des renseignements sur les armes recherchées ou découvertes sur le lieu de la visite. À défaut, la visite domiciliaire serait mise en échec.
L’encadrement prévu dans le projet de loi est une reprise à l’identique de celui qui existe pour les visites domiciliaires en matière de lutte contre le terrorisme, pris sur le fondement des articles L. 229-1 et suivants du code de la sécurité intérieure.
Le Conseil constitutionnel, qui s’est prononcé sur la constitutionnalité de la retenue, y compris lorsqu’elle concerne un mineur, l’a jugée conforme à notre texte fondamental. Il a estimé que le législateur assurait une « conciliation qui n’est pas manifestement déséquilibrée entre, d’une part, l’objectif de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l’ordre public et, d’autre part, la liberté d’aller devenir le droit au respect de la vie privée », c’est-à-dire de l’inviolabilité du domicile.
Par conséquent, vous l’aurez compris, le Gouvernement émet un avis défavorable sur l’amendement n° 108.
J’en viens à l’amendement n° 153. Il est nécessaire de prévoir un cas de dispense de l’obligation d’assistance du représentant légal. À défaut, il serait aisé pour le mineur et son représentant légal de faire échec à la mesure : il suffirait pour ce dernier de se rendre injoignable. Telle est la raison pour laquelle nous avons prévu ce dispositif.
C’est pourquoi le Gouvernement émet également un avis défavorable sur l’amendement n° 153.
M. le président. Je mets aux voix l’article 11.
(L’article 11 est adopté.)
Article 12
Le chapitre II du titre IV du livre III du code de la sécurité intérieure est complété par une section 3 ainsi rédigée :
« Section 3
« Injonctions préfectorales
« Art. L. 342-9. – À Mayotte, si les circonstances font craindre des troubles graves à l’ordre public résultant de violences commises sous la menace ou avec usage d’une arme, le représentant de l’État dans le département peut ordonner par arrêté, pour tout ou partie du territoire, la remise des armes, des munitions ou de leurs éléments relevant des catégories A à D ainsi que des objets susceptibles de constituer une arme dangereuse pour la sécurité publique, définis à l’article L. 311-2.
« La durée de conservation des armes remises en application du premier alinéa du présent article ne peut excéder trois mois. Elle peut être renouvelée pour une même durée dès lors que les conditions prévues au même premier alinéa continuent d’être réunies.
« L’arrêté précise les motifs de la mesure, le territoire ainsi que les armes et objets concernés par l’obligation, les conditions de la remise, le délai au terme duquel le détenteur doit avoir procédé à celle-ci, la durée de conservation des armes et objets remis, les cas dans lesquels il peut y être dérogé pour motif légitime, les peines encourues en cas de méconnaissance des prescriptions ainsi que les voies et délais de recours.
« Les armes et objets remis en application du premier alinéa donnent lieu à la délivrance d’un récépissé.
« Leur conservation est confiée aux services de la police nationale ou de la gendarmerie territorialement compétents.
« Lorsque les conditions prévues audit premier alinéa ne sont plus remplies et, au plus tard, à l’échéance du délai de conservation prévu par l’arrêté préfectoral, les armes et objets remis sont rendus à leur propriétaire en l’état où elles étaient lors de leur dépôt. S’il apparaît que les armes étaient détenues irrégulièrement, il est procédé à leur destruction.
« Les détenteurs des armes et objets remis en application du même premier alinéa peuvent décider de les remettre à l’État aux fins de destruction, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État.
« Le non-respect des mesures prises en application du présent article est puni des peines prévues à l’article L. 317-6. Le tribunal peut ordonner, en outre, la confiscation des armes, munitions et de leurs éléments dont le condamné est propriétaire ou dont il a la libre disposition. – (Adopté.)
Chapitre II
Renforcer la lutte contre l’emploi d’étrangers sans titre
Article 13
Après l’article 900-1 du code de procédure pénale, il est inséré un article 900-2 ainsi rédigé :
« Art. 900-2. – I. – À Mayotte, par dérogation à l’article 78-2-1, lorsque les lieux à usage professionnel mentionnés au premier alinéa du même article 78-2-1 sont situés dans un périmètre comportant des locaux et installations édifiés sans droit ni titre constituant un habitat informel au sens du deuxième alinéa de l’article 1-1 de la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 visant à la mise en œuvre du droit au logement et formant un ensemble homogène sur un ou plusieurs terrains d’assiette, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Mamoudzou peut, sur réquisition du procureur de la République, autoriser les agents mentionnés audit article 78-2-1, pour une période maximum de quinze jours, d’une part, à entrer dans ces lieux, y compris lorsqu’ils constituent un habitat informel, aux seules fins de procéder aux opérations prévues au même article 78-2-1 et pour la seule recherche des infractions mentionnées à cet article, d’autre part, à traverser, dans un périmètre défini, les locaux qui l’enclavent, qu’il s’agisse ou non de lieux d’habitation. La même autorisation est conférée aux fonctionnaires et agents des administrations et services publics auxquels des lois spéciales attribuent certains pouvoirs de police judiciaire en matière de lutte contre le travail illégal.
« L’ordonnance du juge des libertés et de la détention comporte l’adresse ou l’identification par tous moyens des lieux dans lesquels les opérations de visite peuvent être effectuées, le cas échéant, le périmètre strictement nécessaire à l’intérieur duquel des locaux peuvent être traversés aux seules fins de rejoindre les lieux à visiter, les agents autorisés à procéder aux opérations de visite, les heures auxquelles ces opérations peuvent avoir lieu, la mention de la faculté pour l’occupant des lieux ou son représentant de faire appel à un conseil de son choix. L’exercice de cette faculté n’entraîne pas la suspension des opérations de visite.
« L’opération de contrôle se déroule en présence de l’occupant des lieux ou, en son absence, en présence de deux témoins.
« La visite s’effectue sous le contrôle du juge qui l’a autorisée. Le juge peut se rendre dans les locaux pendant l’intervention. À tout moment, il peut décider la suspension ou l’arrêt de la visite.
« L’ordonnance est exécutoire au seul vu de la minute.
« Elle est notifiée verbalement et sur place au moment de la visite à l’occupant des lieux ou à son représentant qui en reçoit copie intégrale contre récépissé ou émargement au procès-verbal prévu au dernier alinéa du même article 78-2-1. En l’absence de l’occupant des lieux ou de son représentant, l’ordonnance est notifiée après la visite par lettre recommandée avec avis de réception. À défaut de réception, il est procédé à la signification de l’ordonnance par acte de commissaire de justice.
« Les délais et voies de recours sont mentionnés dans l’ordonnance.
« L’ordonnance peut faire l’objet d’un appel devant le président de la chambre d’appel de la cour d’appel de Saint-Denis de la Réunion à Mamoudzou. Les parties ne sont pas tenues de constituer avocat.
« Cet appel est formé dans un délai de quinze jours suivant les règles prévues par le code de procédure civile. Ce délai court à compter soit de la remise, soit de la réception, soit de la signification de l’ordonnance. Cet appel n’est pas suspensif.
« L’ordonnance du président de la chambre d’appel de la cour d’appel de Saint-Denis de la Réunion à Mamoudzou est susceptible d’un pourvoi en cassation, selon les règles prévues par le code de procédure civile. Le délai de pourvoi en cassation est de quinze jours.
« Le procès-verbal prévu au dernier alinéa du même article 78-2-1 mentionne les lieux visités et, le cas échéant, ceux traversés.
« II. – Les juridictions de l’ordre judiciaire sont compétentes pour connaître du contentieux indemnitaire résultant des mesures prises en application du présent article, dans les conditions prévues à l’article L. 141-1 du code de l’organisation judiciaire. »
M. le président. L’amendement n° 109, présenté par Mmes Corbière Naminzo et Cukierman, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Alinéa 2, première phrase
Remplacer le mot :
quinze
par le mot :
deux
La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. Vous l’aurez compris, monsieur le ministre, nous ne portons pas le même regard que vous sur la jeunesse. Le nôtre est beaucoup plus bienveillant. Nous sommes beaucoup plus tournés vers la prévention et l’éducation, vous êtes davantage dans la sanction, nous l’avons bien compris. On le voit dans ce texte comme dans l’ensemble des textes que nous examinons au Sénat.
Cet amendement vise à limiter la durée de l’autorisation prévue par cet article. Lorsque les locaux à usage professionnel situés au sein des bangas sont utilisés pour l’emploi de personnes en situation irrégulière, vous autorisez la traversée des habitats informels enclavant ces locaux afin de renforcer la lutte contre l’emploi de ces personnes.
Cette autorisation est prévue pour quinze jours, ce qui paraît particulièrement disproportionné. Le droit à la vie privée et familiale et le droit à la tranquillité des personnes qui vivent dans ces habitats informels, et qui sont déjà précaires, doivent tout de même être préservés.
Cet amendement a donc pour objet de réduire à deux jours la durée de l’autorisation de traverser les habitats informels donnée par le juge des libertés et de la détention afin de limiter l’atteinte aux droits de ces personnes.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Les opérations de lutte contre le travail illégal permettent aux agents compétents, tels que les agents officiers de police ou ceux de l’Urssaf, sur réquisition du procureur de la République, de contrôler les locaux listés dans la réquisition. En métropole, le délai est d’un mois. Une durée de quinze jours à Mayotte nous paraît proportionnée.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 41 rectifié, présenté par Mme Briante Guillemont, MM. Masset et Gold, Mme Pantel et M. Daubet, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Après le mot :
jours
insérer les mots :
et lorsqu’il existe des indices sérieux à la réalisation d’une infraction visée à cet article
La parole est à Mme Sophie Briante Guillemont.
Mme Sophie Briante Guillemont. Cet amendement vise à mieux encadrer les opérations de contrôle dans les habitats informels. Il tend ainsi à prévoir que l’ordonnance du juge des libertés et de la détention doit reposer sur des indices sérieux, laissant présumer la présence de travailleurs en situation irrégulière.
L’objectif est de prévenir les dérives liées à des contrôles dits exploratoires, qui porteraient atteinte à la vie privée des habitants sans fondement probant. Dans un contexte déjà tendu à Mayotte, où les opérations de police administrative dans les quartiers précaires peuvent exacerber les tensions, il est essentiel de maintenir un haut niveau de justification des interventions.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Il nous semble que les interventions du JLD sont toujours justifiées par des raisons sérieuses, qui permettent de préserver les droits des personnes.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 13.
(L’article 13 est adopté.)
TITRE IV
FAÇONNER L’AVENIR DE MAYOTTE
Chapitre Ier
Garantir aux Mahorais l’accès aux biens et aux ressources essentiels
Article 14
I. – Par dérogation aux deuxième et dernier alinéas du VI de l’article 156 de la loi n° 2002-276 du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité, à Mayotte, les enquêtes de recensement :
1° Sont exhaustives pour toutes les communes de Mayotte en 2025 et peuvent s’étendre sur l’année 2026 ;
2° Ne sont pas réalisées au titre de l’année 2026.
Un décret définit les modalités d’organisation de ces enquêtes.
II. – Par dérogation au X de l’article 156 de la loi n° 2002-276 du 27 février 2002 précitée, le premier décret authentifiant, en application du VIII du même article, les chiffres de la population de Mayotte est publié en 2026.
III. – Au dernier alinéa du IV de l’article 252 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021, l’année : « 2025 » est remplacée par l’année : « 2026 ».
M. le président. L’amendement n° 77 n’est pas soutenu.
L’amendement n° 121, présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 4
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
.… – Les résultats des enquêtes de recensement sont communiqués aux collectivités compétentes et intégrés par ces dernières aux diagnostics d’accès à l’eau sur leur territoire afin d’identifier les personnes en situation de précarité en eau et de déterminer les mesures à mettre en œuvre en application des articles L. 1321-1 B du code de la santé publique et R. 2224-5-5 et suivants du code général des collectivités territoriales.
La parole est à Mme Mélanie Vogel.
Mme Mélanie Vogel. L’article 14 prévoit des mesures relatives au recensement de la population, notamment le début de la collecte des informations à la fin de l’année 2025. Nous sommes d’accord, une telle démarche est nécessaire.
Par cet amendement, nous proposons que ce recensement soit également l’occasion d’identifier les personnes en situation de précarité, notamment de précarité hydrique. Il s’agit d’articuler le recensement général avec un diagnostic territorial d’accès à l’eau.
Nous l’avons dit à plusieurs reprises au cours de l’examen de ce texte, l’accès à l’eau est l’un des enjeux essentiels sur le territoire. Le diagnostic territorial d’accès à l’eau est obligatoire pour les collectivités compétentes en matière de service public local de l’eau potable. Notre objectif est la coordination et l’optimisation de ces deux dispositifs – le recensement et le diagnostic –, ce qui permettra d’identifier les situations de précarité en matière d’accès à l’eau potable, à l’hygiène et à l’assainissement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Bitz, rapporteur. Le diagnostic territorial d’accès à l’eau pourra être réalisé par les collectivités territoriales compétentes immédiatement après le recensement, à partir de la cartographie des habitations et des chiffres de la population.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 14.
(L’article 14 est adopté.)
Article 15
Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnances, dans un délai de douze mois, toute mesure relevant du domaine de la loi afin de rendre applicable à Mayotte, sous réserve d’adaptations tenant compte des caractéristiques et contraintes particulières du territoire, la législation en vigueur en métropole dans les matières relatives :
1° Aux prestations de sécurité sociale, à l’exception de l’aide médicale d’État, à l’aide sociale et à la prise en charge des frais de santé ;
2° Aux cotisations, contributions et impositions affectées au financement des régimes de sécurité sociale ;
3° À l’organisation et à la gestion des régimes de sécurité sociale ;
4° Aux règles applicables à l’offre de soins ;
5° Aux contrôles et à la lutte contre la fraude, aux échanges d’informations et aux contentieux relatifs à la sécurité sociale et l’aide sociale.
Ces ordonnances procèdent aux modifications nécessaires pour assurer le respect de la hiérarchie des normes, améliorer la cohérence rédactionnelle des textes, harmoniser l’état du droit, remédier aux erreurs et insuffisances et abroger les dispositions obsolètes ou devenues sans objet.
Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de six mois à compter de la publication de chaque ordonnance.
M. le président. La parole est à Mme Silvana Silvani, sur l’article.
Mme Silvana Silvani. Il y a près de quinze ans, en 2011, Mayotte est devenue le cent unième département français. Pourtant, depuis lors, les Mahorais ne bénéficient toujours pas des mêmes droits sociaux que les Français de la métropole.
La départementalisation a étendu le système de protection sociale, mais les règles applicables à Mayotte ne sont pas les mêmes qu’à La Réunion ou à Paris. Aujourd’hui, le Smic à Mayotte équivaut à 75 % de celui qui est en vigueur en métropole, le revenu de solidarité active à 50 %. Quant à l’aide médicale de l’État (AME), elle ne s’applique toujours pas. Ce système à deux vitesses est entretenu par la France depuis des décennies.
En 2022, la Cour des comptes a estimé que l’État dépensait à Mayotte 6 000 euros par habitant et par an, soit le montant le plus bas dans les départements dits d’outre-mer, alors que c’est le territoire qui en a le plus besoin.
Avant le passage du cyclone Chido, on estimait que 25 % des Mahorais vivaient dans des bidonvilles. Cette situation fait dire au journaliste Rémi Carayol que la situation coloniale perdure à Mayotte, notamment en raison de ces différences de traitement.
Le Gouvernement propose d’accélérer le processus de convergence des droits en le faisant passer de 2036 à 2031. C’est un petit pas, même si nous tenons à signaler cette avancée. Nous souhaitons que cela s’accompagne d’une généralisation de l’ensemble des droits pour que les Mahorais puissent enfin sortir de la précarité et vivre dignement.
M. le président. La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo, sur l’article.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. La commission des affaires sociales a exclu l’aide médicale de l’État des prestations sociales visées à l’article 15, prestations dont le Gouvernement s’est engagé à harmoniser les conditions d’accès à Mayotte avec celles qui sont en vigueur sur le territoire métropolitain.
Nous regrettons profondément cette décision, qui est contraire aux recommandations formulées en 2021 par la commission des affaires sociales dans son rapport d’information intitulé Mayotte : un système de soins en hypertension.
Les auteurs de ce rapport d’information – l’ancienne présidente de la commission des affaires sociales, Catherine Deroche, notre ancienne collègue Laurence Cohen et nos collègues Jean-Hugues Fichet et Dominique Théophile – préconisaient alors de « conduire la réalisation des engagements relatifs au droit à l’assurance maladie [, d’]envisager l’extension à Mayotte de la protection universelle maladie (PUMa) et [de] réaliser rapidement l’arrivée de la CMU-C (couverture maladie universelle complémentaire) et des exonérations de ticket modérateur selon le revenu ». Enfin, ils suggéraient d’« engager une réflexion sur le droit applicable concernant la prise en charge des frais de santé des personnes en situation irrégulière et sur la possibilité d’accorder l’aide médicale de l’État lors d’une résidence constatée de plus de trois mois ».
Pour l’ensemble de ces raisons, mes chers collègues, nous vous invitons à soutenir notre amendement, mais aussi à réfléchir à l’ensemble de nos travaux ce soir.
M. le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, sur l’article.
Mme Annie Le Houerou. À Mayotte, l’égalité des droits est encore lointaine. Le montant des allocations familiales n’est pas encore aligné sur celui qui est en vigueur ailleurs, sauf pour les magistrats et les fonctionnaires d’État mutés provisoirement à Mayotte.
Sur l’île, les allocations perçues par une famille mahoraise sont trois à quatre fois inférieures à celles dont bénéficie une famille réunionnaise ou métropolitaine. Cette disparité contribue à maintenir un taux de pauvreté élevé et des inégalités importantes sur l’île. Par exemple, à Mayotte, 94 % des familles monoparentales, principalement des mères isolées avec leurs enfants, sont pauvres.
Cette prise de parole sur l’article me permet d’alerter sur deux inégalités criantes.
D’abord, à Mayotte l’allocation de soutien familial n’est pas versée, alors que, dans les autres départements, son montant s’élève à 195,86 euros par enfant à charge pour le parent élevant seul un enfant et à 261,06 euros par enfant à charge si l’enfant est privé de ses deux parents.
Ensuite, la prestation d’accueil du jeune enfant (Paje) y est partiellement versée. La prime à la naissance et la prime à l’adoption ne sont pas versées, contrairement à ce qui prévaut dans les autres régions. De plus, les autres composantes de cette prestation sont soit non servies, soit versées pour des montants inférieurs, preuve que, dans ce territoire, le soutien apporté aux jeunes parents est insuffisant.
Cette situation est incompatible avec le principe d’égalité de notre République française. Comment justifier que, sur un seul et même territoire, subsistent de telles inégalités, particulièrement dans ces périodes de fragilité et de vulnérabilité que sont la naissance et la petite enfance ? Laisser des familles françaises dans de telles situations est inacceptable. La convergence des droits sociaux et des prestations sociales est en cours depuis 1996. Il faut à présent réellement accélérer le processus !
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, sur l’article.
Mme Raymonde Poncet Monge. Nous entamons l’examen des articles relatifs aux affaires sociales, qui représentent seulement quatre articles sur les trente-quatre du texte initial, alors qu’ils auraient dû en constituer l’essentiel. La refondation de Mayotte aurait en effet dû permettre l’adoption de mesures sociales fortes.
Nous nous trouvons plutôt face à un projet de loi dont le contenu est principalement composé de propositions antimigratoires. D’un côté, on l’a vu, ce texte durcit les conditions d’accès au séjour des parents d’enfants français et prévoit de retirer leur titre de séjour aux parents dont les enfants mineurs présentent un trouble à l’ordre public ; de l’autre, il ne prévoit pas d’aligner rapidement les montants des prestations familiales sur ceux de l’Hexagone et des autres départements d’outre-mer. La priorité du Gouvernement n’est pas l’égalité des droits.
Selon l’Insee, le système redistributif public ne réduit que très marginalement la pauvreté à Mayotte, où les prestations sociales ne font baisser que de deux points le taux de pauvreté. Monsieur le ministre, elles le font baisser de sept points dans l’Hexagone et de dix points en moyenne dans les autres départements d’outre-mer.
Refonder, c’était faire des annonces claires afin de faire baisser de plus de deux points le taux de pauvreté à Mayotte. Au lieu de cela, la convergence de certaines prestations de solidarité est renvoyée aux calendes grecques. Quel manque d’ambition !
En commission des affaires sociales, un amendement a été déposé visant à ne pas octroyer l’AME à Mayotte au prétexte que son versement pourrait créer un appel d’air. La recherche a pourtant démontré à maintes reprises qu’il s’agit là d’un mythe, tout comme l’ont fait plusieurs rapports de l’Assemblée nationale, de même que ceux du Défenseur des droits en 2020 et de la mission d’information du Sénat sur l’accès aux soins à Mayotte.
Dans quel but alimentez-vous cette contre-vérité, au lieu de la déconstruire ? Au nom de quelle idéologie ?
Refonder signifie établir rapidement l’égalité avec les autres territoires. Il s’agit d’être à la hauteur. La France a une responsabilité et le régime d’exception à Mayotte doit cesser.
Nous proposerons plusieurs amendements à cette fin.
M. le président. La parole est à Mme Audrey Bélim, sur l’article.
Mme Audrey Bélim. Je me dois d’insister, comme mes collègues Saïd Omar Oili et Corinne Narassiguin, sur la nécessité de poursuivre l’engagement de l’État en faveur de Mayotte. Nous pensons tous que Mayotte a aujourd’hui besoin d’un regard bienveillant et constant de l’État.
Monsieur le ministre, vous vous souvenez certainement de la loi de programmation relative à l’égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique, que vous avez défendue conjointement avec Ericka Bareigts.
Cette loi comprenait un titre entier sur le département de Mayotte. L’accélération du rythme de convergence des allocations familiales avec le montant en vigueur dans les départements et régions d’outre-mer, la mise en place du complément familial, du complément de l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé, d’un minimum contributif pour revaloriser les petites retraites et de véritables plans de convergence élaborés en concertation avec les filières socioprofessionnelles étaient nécessaires à Mayotte, comme dans tous les autres territoires ultramarins.
Malheureusement, cette loi, adoptée à l’unanimité en 2017, a été mal ou peu appliquée par les gouvernements qui se sont succédé. Les plans de convergence se résument par exemple à de simples contrats de plan État-région, élaborés sans concertation. Ils ne constituent donc pas de véritables stratégies pour le territoire.
C’est pourquoi il me semble essentiel que nous convenions tous, parlementaires comme Gouvernement, que les propositions qui suivront sont essentielles pour le territoire, par solidarité avec nos concitoyens mahorais, pour qui Chido a été un véritable traumatisme. Cette crise dure par de nombreux aspects. Mayotte a donc ce soir besoin d’un véritable soutien de la nation française.
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements identiques.
L’amendement n° 15 est présenté par Mmes Corbière Naminzo, Silvani, Apourceau-Poly, Brulin et Cukierman, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.
L’amendement n° 43 rectifié est présenté par Mme Briante Guillemont, MM. Masset, Gold et Guiol, Mme Pantel et M. Daubet.
L’amendement n° 85 est présenté par Mme Le Houerou, M. Omar Oili, Mmes Narassiguin et Artigalas, MM. Lurel et Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Lubin, Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 141 est présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 2
Supprimer les mots :
à l’exception de l’aide médicale de l’État,
La parole est à Mme Silvana Silvani, pour présenter l’amendement n° 15.
Mme Silvana Silvani. Mayotte est le seul département français où l’AME ne s’applique pas, alors même qu’il s’agit du territoire qui compte la plus forte proportion de personnes vulnérables.
Selon les chiffres de l’Insee, en 2021, un habitant de l’archipel sur neuf s’estimait en mauvaise ou très mauvaise santé. La mortalité infantile y atteint 9,6 %, contre 3,8 % dans l’Hexagone. La malnutrition touche encore 10 % des enfants de 4 ans à 10 ans et les populations âgées montrent également un état de santé dégradé, avec une espérance de vie inférieure de huit ans par rapport à la France métropolitaine.
Face à ce constat, il y a urgence à lutter contre les renoncements aux soins en généralisant la protection universelle maladie et les exonérations de ticket modérateur. Pour les personnes immigrées, l’aspect financier est souvent évoqué comme motif de renoncement aux soins, alors que l’aide médicale de l’État demeure non applicable à Mayotte. En dehors des situations d’urgence, les personnes qui vont consulter au centre hospitalier de Mayotte peuvent se voir demander une participation forfaitaire de 10 ou 25 euros. Cela représente une réelle barrière pour l’accès aux soins des personnes en situation régulière.
C’est la raison pour laquelle, par cet amendement, nous demandons de maintenir la possibilité de généraliser l’AME au territoire de Mayotte.
Les droits sociaux sont constitutifs des droits de la citoyenneté dans notre République universelle et indivisible. Les citoyens sont égaux en droits. Ce n’est pas un menu à la carte ! L’argument de la maîtrise de l’immigration ne saurait justifier le maintien de droits différenciés selon que nos concitoyens sont en métropole ou sur le territoire mahorais.
M. le président. La parole est à Mme Sophie Briante Guillemont, pour présenter l’amendement n° 43 rectifié.
Mme Sophie Briante Guillemont. Il est défendu, monsieur le président !
M. le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour présenter l’amendement n° 85.
Mme Annie Le Houerou. L’article 15 prévoit la convergence des droits à Mayotte d’ici à 2031 au plus tard. Cependant, du fait d’un amendement de la rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales, il n’inclut pas l’aide médicale de l’État.
Mayotte est aujourd’hui le seul département français exclu de ce dispositif, alors qu’il concentre la plus forte proportion d’étrangers en situation irrégulière. Une telle exclusion crée des problèmes majeurs de santé publique, touchant aussi bien les personnes concernées que l’ensemble de la population.
Depuis la mise en place de la sécurité sociale, au 1er janvier 2005, l’accès aux soins, qui était jusqu’alors gratuit pour tous, quelle que soit la nationalité ou la régularité du séjour, ne l’a plus été que pour les affiliés. Les non-affiliés, eux, sont contraints de payer un forfait. Ce système explique le taux de renoncement important sur l’île.
En général, les non-affiliés sont les personnes résidant de manière irrégulière sur l’île, appartenant souvent à la part la plus précaire de la population. Comment peut-on imaginer qu’ils puissent s’acquitter d’un forfait pour bénéficier d’une consultation ?
Avec 89 médecins pour 100 000 habitants au 1er janvier 2022, contre 338 en moyenne dans l’Hexagone, Mayotte est le plus grand désert médical de France. Privés d’accès à la médecine de ville, les patients se tournent massivement vers les urgences du centre hospitalier de Mayotte. Cela entraîne des prises en charge tardives, des soins coûteux et un engorgement du seul hôpital de l’île. Déjà en situation critique, l’établissement assure 72 % de l’offre de soins et supporte seul toute la charge financière, ce qui aggrave fortement son déficit.
Nous ne souhaitons pas que Mayotte soit le laboratoire de ce qui est prôné par une certaine partie de la classe politique et pourrait advenir sur le reste du territoire. Toute personne dont la santé est en danger doit pouvoir être soignée.
Ainsi, nous souhaitons que l’AME ne soit pas exclue a priori de la convergence des droits prévus par le projet de loi, afin de garantir aux Mahorais un accès équitable aux soins et de consolider la cohésion sanitaire nationale. La République est une et indivisible. De ce fait, tous ses habitants doivent pouvoir bénéficier des mêmes aides, afin de leur permettre de vivre dignement.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 141.
Mme Raymonde Poncet Monge. Par cet amendement, nous souhaitons, nous aussi, supprimer l’exclusion de l’aide médicale de l’État à Mayotte du champ de l’habilitation conférée au Gouvernement.
Rappelons-le, l’AME est une prestation sociale qui relève d’une politique de santé publique. C’est une mesure essentielle et universelle. Elle garantit l’accès aux soins vitaux des personnes en situation irrégulière, préservant indirectement la santé de tous les habitants du territoire.
En refusant l’AME à Mayotte, on rompt le principe constitutionnel d’égalité, on porte atteinte à la solidarité nationale et on prend le risque – nous le savons – de multiplier les urgences et, à terme, les coûts sanitaires.
En effet, les conditions de vie des personnes concernées sont déjà tellement dégradées que celles-ci sont plus vulnérables aux maladies infectieuses et transmissibles ou à des pathologies telles les infections aiguës du système respiratoire. Les femmes enceintes ont un manque de suivi qui les met en danger, elles et leurs enfants.
Tout refus de cet accès aux soins de premiers recours ou tout retard se révélera plus coûteux, indépendamment même du coût humain. En effet, cela entraînera un report aux urgences du système hospitalier, sans parler des conséquences en termes de santé publique auxquelles j’ai déjà fait référence.
Cette exclusion est une aberration financière et médicale, en plus de témoigner d’un manque d’humanité.
L’adoption de cet amendement permettra de garantir l’universalité réelle de la protection sociale dans l’ensemble du territoire de la République, de prévenir les risques épidémiques, d’assurer un accès effectif aux soins de premier recours et de mettre fin à une différence de traitement discriminatoire à l’égard des résidents de Mayotte.
Il convient donc de supprimer la mention de l’exclusion de l’AME, afin de rendre pleinement cohérent l’objectif de convergence sociale qui figure dans le projet de loi.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires sociales ?
Mme Christine Bonfanti-Dossat, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales. Ces amendements identiques visent à réintroduire la possibilité pour le Gouvernement d’étendre l’aide médicale de l’État à Mayotte, que nous avons supprimée en commission.
En effet, le Gouvernement a toujours été très clair sur le fait que la convergence devait s’appliquer en tenant compte des spécificités mahoraises. À ce jour, le fort afflux de migrants déstabilise l’ordre public et la reconstruction qui est à l’œuvre ; il cause aussi une pression sans précédent sur les services publics. Nous ne pouvons pas créer d’effet incitatif supplémentaire.
C’est pourquoi la commission des affaires sociales émet un avis défavorable sur ces amendements identiques.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État. Ainsi que j’ai déjà eu l’occasion de le souligner, ce texte est, d’une manière générale, équilibré, fort et dynamique dans ses objectifs ; en tout cas, c’est ce que nous avons recherché. Encore une fois, le réduire aux seuls enjeux migratoires et de sécurité, même s’il s’agit évidemment de sujets importants, c’est ne pas l’avoir lu et passer à côté de l’essentiel.
Nous avons consacré du temps aujourd’hui à l’examen de l’article 1er et du rapport annexé. Je pense ainsi à l’engagement de 4 milliards d’euros d’investissements, sur la base d’une programmation qu’il faudra évidemment préciser, avec une série d’objectifs.
Un engagement était attendu depuis dix ans. Si cela ne vous paraît pas très important, c’est que vous ne vous intéressez pas à ce qui constitue le cœur même du texte, à savoir la reconstruction et la refondation de Mayotte.
Je me permets d’insister sur ce point, car de tels moyens n’ont jamais été mobilisés, pas même dans le cadre de la démarche que Mme la sénatrice Bélim a à juste titre évoquée. Nous avons en effet lancé et défendu un texte avec Victorin Lurel, puis avec Ericka Bareigts, mais, comme cela a d’ailleurs été souligné, ce sont ensuite son application et la définition des objectifs à atteindre qui ont posé problème.
Le hasard veut qu’il me revienne, sept ans ou huit ans plus tard, d’essayer d’en mettre en œuvre les principes pour Mayotte. Le hasard a-t-il bien fait les choses ou non ? Je n’en sais rien… (Sourires.)
Vous avez été nombreux à voter l’article 1er. J’entends les impatiences, voire certaines marques de scepticisme. Il faut que les mesures adoptées entrent en vigueur.
Au demeurant, le texte que je présente est le fruit d’un travail interministériel. Il découle également des concertations avec les élus mahorais et une partie de la société civile, de la proposition de loi qu’Estelle Youssouffa, députée de Mayotte, a rédigée et de ce que mes prédécesseurs Vigier et Guévenoux ont engagé. Nous arrivons au bout du chemin.
Le projet de loi qui vous est proposé institue la programmation financière et crée – cela a été rappelé – des outils de lutte contre l’habitat illégal et l’immigration irrégulière. Il met en place la convergence sociale, un élément fondamental qui va beaucoup s’appuyer sur la négociation avec les partenaires sociaux. D’ailleurs, c’est en cours. J’ai sollicité le préfet Bieuville et le général Facon ; sur la base du rapport qu’ils me soumettront, nous pourrons engager cette convergence sociale à partir du 1er janvier 2026.
Je tenais à rappeler tous ces éléments.
J’en viens à la question de l’AME.
La commission des affaires sociales a adopté un amendement tendant à exclure l’aide médicale de l’État du champ des prestations sociales pouvant être étendues à Mayotte par ordonnance. D’ailleurs, comme je l’ai indiqué, le Gouvernement examinera évidemment l’ensemble de ces prestations dans le cadre de l’ordonnance.
Les auteurs des quatre amendements identiques souhaitent que l’AME soit réintégrée dans le champ de l’habilitation du Gouvernement. Aujourd’hui, cela a été souligné et c’est juste, cette prestation ne s’applique pas à Mayotte.
La prise en charge des soins des étrangers en situation irrégulière sur le territoire s’effectue principalement au centre hospitalier de Mayotte. Je salue à ce propos le travail incroyable et le très grand dévouement des médecins.
Si l’instauration de l’AME a pour objectif de permettre la prise en charge de ces personnes en ville, il est peu probable que cela puisse se traduire immédiatement dans les faits à Mayotte. Comme vous le savez, aujourd’hui, l’offre de ville reste embryonnaire ou est saturée.
Avant d’envisager la mise en œuvre de l’AME à Mayotte, le Gouvernement souhaite continuer les efforts – c’est un sujet que j’ai évoqué aujourd’hui – pour développer l’offre de soins de ville. Je pense notamment à ce que la médecine libérale peut faire dans les permanences et les dispensaires.
L’extension de l’AME sera appréciée par le législateur en amont de 2031 en tenant compte à la fois de la situation de la médecine de ville à cette date et, le cas échéant, d’éventuelles évolutions du dispositif national de cette prestation d’ici là.
Pour l’instant, l’organisation des soins n’est pas adaptée à l’instauration de l’AME à Mayotte. C’est pourquoi le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces amendements identiques.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Que l’application de l’AME à Mayotte soulève des problèmes de temporalité ou de conditionnalité est une chose – cela étant, rien ne vous obligeait à accélérer ; vous auriez pu prendre le temps d’envisager le cadre dans lequel le dispositif pourrait être mis en œuvre –, mais qu’il faille délibérément l’exclure, dans une démarche active, en est une autre !
En plus, vous avez décidé de reporter un ensemble de prestations sociales à après la convergence avec le Smic, en 2031 – autant dire aux calendes grecques ! Nous avons eu l’occasion d’en parler.
Sur l’AME, votre démarche porte un nom. Là, il ne s’agit plus d’un report aux calendes grecques, par exemple le temps de réfléchir à des conditions et à des solutions opérationnelles, c’est une exclusion délibérée !
Pourtant, il y a bien eu des rapports sur l’AME, d’autant que le problème peut se poser aussi ailleurs en France. Tous ont conclu à la nécessité de maintenir cette prestation, quand bien même le panier de soins serait à revoir.
Comme vous l’avez rappelé vous-même, les malades concernés vont à l’hôpital. D’ailleurs, par votre décision, vous aggravez le déficit de l’établissement.
Mme Corinne Narassiguin. Absolument !
Mme Raymonde Poncet Monge. En effet, comme l’AME ne s’applique pas à Mayotte, les soins ne sont pas financés. Et ce n’est pas parce que les malades vont à l’hôpital faute de pouvoir aller en ville qu’ils disparaissent ! Vous mettez donc les hôpitaux en difficulté.
Je m’étonne que le ministre de la santé ou des collègues médecins ne se lèvent pas pour dénoncer cette mesure. Exclure délibérément et activement l’AME est un fil rouge idéologique ; cela n’a rien de rationnel !
M. le président. La parole est à Mme Silvana Silvani, pour explication de vote.
Mme Silvana Silvani. Monsieur le ministre, je vous rassure, nous avons bien lu le texte et nous avons même reconnu qu’il contenait un certain nombre d’avancées. Pour autant, le parallèle que vous dressez entre l’AME et les soins de ville est absolument incompréhensible.
À vos yeux, les Mahorais sont-ils français ou non ?
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 15, 43 rectifié, 85 et 141.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 137, présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 6
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Aux conditions de durée de séjour pour l’obtention des prestations sociales.
II. – Après l’alinéa 7
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
Elles permettent d’harmoniser les conditions de durée de séjour pour l’obtention des prestations.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Cet amendement a pour objet d’harmoniser les conditions de durée de séjour pour l’obtention des prestations entre Mayotte et l’Hexagone et les autres départements d’outre-mer.
En effet, certaines prestations ne sont pas octroyées selon les mêmes conditions de durée de séjour à Mayotte qu’ailleurs.
Ainsi, une personne étrangère qui réside dans l’Hexagone ou dans d’autres départements d’outre-mer de manière stable peut obtenir l’allocation de solidarité aux personnes âgées (Aspa) en ayant un titre de séjour depuis au moins dix ans – tout de même, dix ans ! En revanche, à Mayotte, la prestation est octroyée sous condition de résidence aux personnes en situation régulière depuis quinze ans. Comme il s’agit d’une allocation destinée aux personnes âgées, j’imagine que l’objectif doit être de laisser aux futurs demandeurs le temps de vieillir, voire de mourir avant de pouvoir y prétendre…
De la même manière, le RSA n’est pas accessible à la population étrangère régularisée depuis moins de quinze ans. C’est une spécificité de Mayotte.
Par ailleurs, comme l’indique le Haut Conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge, la condition de régularité de séjour est plus excluante à Mayotte que partout ailleurs. De plus, l’attribution de prestations familiales à des familles étrangères semble exceptionnelle. Avec des conditions d’accès plus difficiles et une durée de résidence plus longue qu’ailleurs, je me demande bien qui peut en bénéficier…
La moitié des personnes étrangères ne disposent pas de titre de séjour, même quand elles résident depuis très longtemps dans l’archipel. Contrairement à ce qui se pratique dans les autres départements, à Mayotte, la caisse de sécurité sociale exige la production de pièces attestant d’un lien juridique entre l’allocataire et l’enfant à charge et exclut tous les autres enfants à charge. Là encore, c’est une spécificité de ce territoire.
Ainsi que je l’ai indiqué, selon l’Insee, le système redistributif public ne réduit que très marginalement la pauvreté à Mayotte, à hauteur de deux points, contre dix points dans les autres départements d’outre-mer, la majeure partie de la population pauvre n’étant pas éligible aux prestations sociales.
Nous souhaitons lever ces restrictions différentielles – l’accès aux prestations sociales nous paraît déjà assez dur –, d’autant qu’elles aggravent les conditions de pauvreté et de précarité liées à l’absence de titre de séjour.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires sociales ?
Mme Christine Bonfanti-Dossat, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à imposer au Gouvernement d’harmoniser les conditions de durée de séjour pour l’obtention des prestations entre Mayotte et l’Hexagone et les autres départements d’outre-mer.
À Mayotte, certaines prestations sont soumises à des conditions de durée de séjour plus strictes. Cela s’explique par le fait que, selon l’Insee, la moitié de la population de l’archipel est étrangère. Cette démographie constitue l’une des spécificités mahoraises qu’il convient de prendre en compte.
Aussi, il n’est pas souhaitable de procéder à un tel alignement. C’est pourquoi la commission des affaires sociales émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 84, présenté par Mme Le Houerou, M. Omar Oili, Mmes Narassiguin et Artigalas, MM. Lurel et Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Compléter cet alinéa par les mots :
et sont publiées au plus tard le 1er janvier 2027
La parole est à Mme Annie Le Houerou.
Mme Annie Le Houerou. La situation socioéconomique à Mayotte demeure extrêmement préoccupante, avec des écarts majeurs en matière de précarité et de pauvreté par rapport à l’Hexagone.
Alors que l’échéance initialement prévue pour la convergence totale est fixée à 2036, il est impératif d’accélérer ce calendrier. En effet, le taux de pauvreté atteint 77 % à Mayotte, contre 14 % en France métropolitaine. Le PIB par habitant est le plus faible de tous les territoires français – il représente seulement un quart du PIB national par habitant – et le taux de chômage atteint 37 % de la population.
Au regard d’une telle situation, il est nécessaire d’accélérer la convergence du droit applicable en matière de droits sociaux à Mayotte. Dans le rapport annexé, il est précisé que la convergence des droits, notamment pour le RSA et l’allocation aux adultes handicapés, est prévue à l’horizon 2031 sous réserve des adaptations nécessaires et de quelques exceptions. Une telle date paraît lointaine ; qui plus est, elle ne figure pas dans l’article 15.
Pour toutes ces raisons, nous proposons d’inscrire une date butoir à la convergence des droits et de la fixer au 1er janvier 2027.
M. le président. L’amendement n° 16, présenté par Mmes Corbière Naminzo, Silvani, Apourceau-Poly, Brulin et Cukierman, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Compléter cet alinéa par les mots :
et sont publiées au plus tard le 1er janvier 2028
La parole est à Mme Silvana Silvani.
Mme Silvana Silvani. La délégation sénatoriale aux outre-mer a publié le 3 avril dernier un rapport d’information relatif à la lutte contre la vie chère outre-mer.
Le rapport d’information pointe l’acuité de la vie chère dans les territoires dits ultramarins, à laquelle nos compatriotes mahorais n’échappent pas. Cela a été rappelé à l’instant, selon la dernière étude de l’Insee, en 2022, le taux de pauvreté est de 77 % à Mayotte, contre 36 % à La Réunion et 14,5 % dans l’Hexagone. Les enfants sont exposés à la malbouffe, entraînant chaque année 1 600 évacuations sanitaires vers La Réunion.
Face à l’urgence sanitaire et sociale, il faut agir. Force est pourtant de constater que, en matière de droits, les gouvernements ont toujours été extrêmement lents et frileux à accorder les mêmes droits à Mayotte que, par exemple, en Vendée ! (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
À Mayotte, le mouvement de rapprochement de la protection sociale de la population vers ce qui s’applique en France hexagonale et dans les départements et régions d’outre-mer est un processus continu depuis 1996 qui devait aboutir en 2036. Le Gouvernement prévoit d’accélérer la convergence à 2031, ce qui est en soi déjà positif.
Cependant, face à l’urgence sociale et sanitaire, nous proposons d’avancer la publication des dernières ordonnances de convergence des droits au 1er janvier 2028.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires sociales ?
Mme Christine Bonfanti-Dossat, rapporteur pour avis. La commission des affaires sociales émet un avis défavorable sur ces amendements.
L’habilitation prévoit que les ordonnances soient prises dans un délai de douze mois suivant la promulgation du présent projet de loi. Elles seront donc nécessairement publiées avant le 1er janvier 2027, donc avant le 1er janvier 2028.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État. J’espère que chacun a été sensible à la référence à la Vendée… Dans un débat sur la convergence sociale, je ne résiste pas au plaisir d’évoquer ce grand livre de Clemenceau, La Mêlée sociale, publié en 1895. J’imagine en effet que c’était bien à Clemenceau, et à personne d’autre, que vous pensiez, madame la sénatrice ! (Sourires.)
Plus sérieusement, les auteurs de ces deux amendements jugent l’échéance de la convergence sociale, fixée à 2031, trop lointaine, ce que je peux parfaitement comprendre, et souhaitent l’avancer, dans un cas, au 1er janvier 2027 et, dans l’autre, au 1er janvier 2028.
Les modifications envisagées ne permettent pas d’atteindre l’objectif. En effet, comme cela a été rappelé, il est prévu que les ordonnances doivent être prises dans un délai de douze mois suivant la promulgation du présent projet de loi.
Surtout – c’est, me semble-t-il, ce point qui doit le plus faire débat –, ces propositions ne tiennent aucun compte de la situation socioéconomique du territoire ni de la capacité à mettre en œuvre un alignement dans des délais aussi brefs.
L’accélération de la convergence sociale, que nous souhaitons tous et qui se fait attendre depuis trop longtemps, doit porter tant sur les droits sociaux que sur les obligations, c’est-à-dire les prélèvements sociaux. Or, j’insiste sur ce point, elle doit être soutenable pour les entreprises et les salariés, sous peine de créer des effets de bord.
Il est par ailleurs de notre responsabilité de veiller à faire en sorte qu’une hausse importante et évidemment attendue des minima sociaux n’entraîne pas une déstabilisation de l’économie locale, qui est extrêmement fragile, ne crée pas d’inflation et ne pénalise pas l’emploi, étant entendu que le chômage est déjà particulièrement élevé.
C’est pourquoi je souhaite une convergence progressive, en privilégiant l’activité et soutenable pour la compétitivité des entreprises. J’ai déjà eu l’occasion de préciser que nous commencerions par le Smic.
Vis-à-vis des Mahorais, je ne veux m’engager que sur ce qui est possible. Faire des promesses qui ne seraient pas réalistes, c’est s’exposer à décevoir une nouvelle fois. Ma préférence va donc – c’est une question non pas de finances, mais de dignité et de considération à l’égard des Mahorais – à un calendrier crédible et opérationnel allant jusqu’en 2031, fondé sur des négociations avec les partenaires sociaux et sur le travail réalisé sur l’ordonnance, qui commence au 1er janvier 2026.
Bien entendu, si nous voyons qu’il est possible d’aller plus vite, tant mieux ! Pour l’instant, nous nous donnons cinq années pour réussir la convergence sociale, qui est si attendue.
C’est pourquoi le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces deux amendements.
M. le président. L’amendement n° 70, présenté par MM. Hochart, Durox et Szczurek, est ainsi libellé :
Après l’article 15
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les prestations sociales non contributives, y compris le revenu de solidarité active, l’allocation aux adultes handicapés et les allocations familiales, versées à Mayotte ne peuvent être attribuées aux étrangers non ressortissants de l’Union européenne qu’après une durée de séjour régulier ininterrompue d’au moins cinq années sur le territoire national.
La parole est à M. Christopher Szczurek.
M. Christopher Szczurek. Il est défendu !
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires sociales ?
Mme Christine Bonfanti-Dossat, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à introduire des conditions de durée de séjour dérogatoires au droit commun pour le versement des prestations sociales non contributives, notamment le revenu de solidarité active, l’allocation aux adultes handicapés et les allocations familiales. Nous avons délégué au Gouvernement le pouvoir de légiférer sur une telle convergence sociale. Il me semble inopportun de nous y substituer.
Au demeurant, l’objet de cet amendement comporte un risque d’inconstitutionnalité. C’est pourquoi la commission des affaires sociales émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 75, présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
Après l’article 15
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport évaluant les conditions, les modalités et les effets d’une convergence sociale intégrale entre Mayotte et le reste du territoire de la République. Ce rapport examine, pour l’ensemble des résidents mahorais, l’alignement des prestations de sécurité sociale, de l’aide médicale d’État, de l’aide sociale, de la prise en charge des frais de santé, du salaire minimum interprofessionnel de croissance, du revenu de solidarité active, de l’allocation aux adultes handicapés, des prestations familiales et de la prestation d’accueil du jeune enfant, ainsi que les impacts budgétaires, économiques, sanitaires et sociaux de leur mise en œuvre progressive.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. L’écart persistant entre les droits sociaux applicables à Mayotte et ceux qui sont en vigueur dans le reste du pays nourrit un sentiment d’injustice et entretient des inégalités en contradiction avec le principe constitutionnel d’égalité devant la loi.
Ces dérogations touchent à la fois les revenus du travail, la protection contre les risques de la vie, l’accès aux soins, le soutien aux familles, alors même que le coût de la vie sur l’archipel se rapproche de celui qui est constaté dans l’Hexagone et que la population plus jeune cumule des besoins sociaux spécifiques.
Les informations dont dispose aujourd’hui la représentation nationale demeurent parcellaires.
Par conséquent, cet amendement vise à éclairer le débat législatif par un rapport qui analysera, données à l’appui, les trajectoires possibles de convergence, les coûts et bénéfices attendus, le calendrier envisageable, les compensations nécessaires pour les entreprises et les collectivités, ainsi que les dispositifs d’accompagnement adaptés aux réalités socioéconomiques spécifiques de Mayotte.
Monsieur le ministre, vous avez dit qu’il fallait éviter de déstabiliser les entreprises, éviter l’inflation, éviter ceci ou cela, etc. Faisons des analyses !
En disposant de telles données, les autorités pourront enfin statuer sur des bases objectives, sortir des représentations approximatives et garantir que l’égalité de droit programmée par la République se traduise à terme pour les Mahorais en égalité de fait.
Encore une fois, selon l’Insee, le système redistributif public ne réduit la pauvreté que de deux points. Cette situation est incompatible avec le principe d’égalité. Elle nécessite d’instaurer le plus rapidement possible, sur le fondement d’un rapport, la convergence des droits sociaux à Mayotte.
C’est pourquoi nous appelons le Gouvernement à clarifier l’objectif de la convergence sociale intégrale entre les prestations sociales versées à Mayotte et celles qui sont versées dans l’Hexagone et les autres départements d’outre-mer. Une telle perspective permettra aux Mahorais d’être patients.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires sociales ?
Mme Christine Bonfanti-Dossat, rapporteur pour avis. Conformément à sa doctrine constante, la commission disposition affaire sociales a émis un avis défavorable sur cette demande de rapport.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 115, présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
Après l’article 15
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport évaluant les conditions et les effets de la convergence intégrale du salaire minimum interprofessionnel de croissance applicable à Mayotte avec le salaire minimum interprofessionnel de croissance de droit commun. Ce rapport analyse, pour l’ensemble des secteurs concernés et à l’échelle de l’archipel comme du territoire national, les impacts sur l’emploi, les finances publiques et la protection sociale, ainsi que les dispositifs d’accompagnement nécessaires pour garantir une mise en œuvre progressive et soutenable.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Il ne faudrait pas que la doctrine devienne doctrinaire… (Sourires.)
Par cet amendement, il s’agit là encore de demander un rapport, qui permettra de documenter les différentes trajectoires envisageables pour aligner le Smic mahorais sur le Smic de droit commun. Cela suppose d’examiner la progressivité de la convergence, les mécanismes de compensation éventuels pour les acteurs économiques, le rôle de la formation professionnelle dans l’accompagnement des salariés, ainsi que l’évolution prévisible de la consommation intérieure.
Vous l’avez dit, monsieur le ministre, il faut éviter les effets de bord. Eh bien, qualifions-les !
Cela éclairera la question de la justice sociale : à qualification et travail égaux, l’égalité de rémunération demeure un impératif qui ne saurait admettre des dérogations durables, sauf justification objective, documentée et proportionnée.
Disposer d’une telle étude dans un délai rapproché renforcerait la capacité des autorités à légiférer sur la base d’éléments chiffrés, à ajuster les dispositifs de soutien si nécessaires et à garantir que la convergence salariale se déroule dans des conditions de soutenabilité économique.
Nous partageons cet objectif de soutenabilité économique. Partagez donc celui du progrès social pour l’ensemble des habitants de Mayotte.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires sociales ?
Mme Christine Bonfanti-Dossat, rapporteur pour avis. La commission des affaires sociales émet un avis défavorable sur cet amendement, pour les raisons qui ont été exposées précédemment.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 142, présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
Après l’article 15
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport évaluant les conditions et les impacts de l’extension à Mayotte de l’aide médicale de l’État (AME).
Ce rapport examine notamment :
– les besoins sanitaires effectifs des habitants de Mayotte et les enjeux de santé publique liés à l’accès aux soins des personnes en situation irrégulière ;
– les conséquences budgétaires et organisationnelles pour l’État, l’assurance maladie et les structures de soin locales ;
– les effets attendus en matière de prévention, de prise en charge des pathologies transmissibles et de réduction du recours aux soins d’urgence ;
– les modalités de convergence réglementaire nécessaires afin d’assurer une application uniforme du dispositif sur l’ensemble du territoire de la République.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. L’extension de l’aide médicale de l’État à Mayotte constitue un enjeu décisif de cohérence et d’efficacité de notre politique de santé publique. Elle est aussi fondamentale dans la recherche de l’égalité réelle entre les territoires que nous représentons ici, en tant que chambre des territoires.
En plus d’être le signe d’un manque d’humanité, l’exclusion de Mayotte du dispositif de l’AME est, je le répète, une aberration financière et médicale.
Les données disponibles demeurent fragmentaires : ni l’ampleur précise des besoins sanitaires des personnes sans couverture médicale ni l’impact budgétaire effectif d’une telle mesure – seuls les hôpitaux communiquent des chiffres à ce sujet – ne sont établis de manière documentée et rigoureuse.
Pourtant, le Parlement doit disposer d’une analyse complète et objective avant de statuer sur un sujet tel que la suppression de l’AME. À cet égard, je ne comprends pas d’ailleurs sur quel fondement cette décision a pu être prise.
Cet amendement vise donc à charger le Gouvernement de remettre, dans un délai de six mois, un rapport évaluant les conditions concrètes, les coûts et les bénéfices attendus de la convergence du dispositif à Mayotte.
Cette étude devra éclairer la représentation nationale sur les besoins réels des habitants, sur l’effet préventif escompté de cette mesure sur les pathologies transmissibles, sur ses conséquences organisationnelles pour les structures de soins locales – professions libérales et hôpitaux – et sur les mécanismes de financement à mobiliser.
Elle examinera également l’impact positif potentiel sur le recours aux urgences, qui sont aujourd’hui sursollicitées, ainsi que les mesures d’accompagnement nécessaires pour garantir l’accès effectif aux droits dans un territoire confronté à des réalités socioéconomiques particulières, que nous ne nions pas.
En dotant ainsi le débat législatif d’éléments chiffrés et documentés, le rapport permettra de dépasser les représentations approximatives, voire fantasmatiques, de fonder la décision publique sur des données robustes et de faire prévaloir l’exigence d’égalité.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires sociales ?
Mme Christine Bonfanti-Dossat, rapporteur pour avis. La commission des affaires sociales émet un avis défavorable sur cet amendement, pour les mêmes raisons.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo, pour explication de vote.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. Le groupe CRCE-K votera l’amendement de Mme Poncet Monge, dont l’objectif est simplement de disposer d’éléments documentés.
Depuis le début de notre discussion, nous ne faisons que dire ou entendre dire que Mayotte est un territoire exceptionnel, qu’il nécessite des mesures d’exception et que l’État acceptera de mettre en place pour ce territoire des régimes dérogatoires.
Nous avons là l’occasion de documenter le sujet, d’aller au fond des choses et de mieux comprendre la situation locale.
Pourtant, cette proposition recueille des avis défavorables. Allons-nous continuer à légiférer en aveugle, au doigt mouillé, sans boussole ?
Sénatrice d’un territoire ultramarin, je confirme qu’il est nécessaire de documenter davantage la question des pathologies transmissibles et des maladies chroniques et, d’une manière générale, celle de la santé outre-mer.
Dans nos territoires, nous sommes victimes des monopoles. Accepter que des monopoles s’installent, c’est nuire à la santé de la population, cela revient à encourager le développement de pathologies chroniques. Ce faisant, on abîme la santé de la population.
Ce travail de documentation nous permettra d’ajuster nos combats en matière de santé publique. Aussi, mes chers collègues, je vous encourage à voter cet amendement. Cela ne mange pas de pain et nous pourrons ainsi légiférer en connaissance de cause.
Mme Silvana Silvani. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
M. Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales. Madame la sénatrice, sans remettre en cause le fond de votre interrogation, je vous propose de saisir, dans ce cas de figure, les commissions compétentes, qui peuvent sans difficulté mener ce type d’études. D’ailleurs, dans vos précédentes interventions, vous avez fait référence à des rapports d’information du Sénat.
Vous nous demandez d’approuver une demande de rapport, alors que nous savons pertinemment que 90 % des rapports qui sont prévus dans les textes ne sont pas réalisés. (Mme Evelyne Corbière Naminzo s’exclame.)
L’amendement n° 142 est pertinent, en ce qu’il permet de mettre le sujet sur la table, ce qui est essentiel. Toutefois, vous connaissez la jurisprudence du Sénat sur les demandes de rapport.
Sur ce sujet, je vous invite donc à saisir la commission des affaires sociales.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. C’est le moins que l’on puisse faire !
M. le président. La parole est à Mme Lana Tetuanui, pour explication de vote.
Mme Lana Tetuanui. Je suis sénatrice de la Polynésie française et cela fait deux jours que j’entends demander des rapports au Gouvernement.
Je ne dis pas cela par esprit de contradiction, mais, à un moment donné, je me pose la question : à quoi servons-nous, en tant que parlementaires ? (M. le président de la commission des affaires sociales acquiesce. – Mme Evelyne Corbière Naminzo s’exclame.)
Avant de demander des rapports, prenons notre rôle au sérieux ! Ma chère collègue sénatrice de La Réunion, si la Polynésie était à proximité de Mayotte, je ne viendrais pas ici exiger de l’État ou du Gouvernement qu’il nous remette un rapport. Je prendrais la pirogue, le bateau ou l’avion pour aller moi-même à Mayotte !
Selon l’adage cher à un fameux ancien Premier ministre, « qui paie contrôle ». Eh bien, puisque nous votons les crédits, c’est à nous de les contrôler ! (Mme Evelyne Corbière Naminzo s’exclame.)
À un moment donné, cela va bien. Prenez vos responsabilités !
Mme Evelyne Corbière Naminzo. C’est fait !
Mme Lana Tetuanui. Vous êtes à proximité immédiate du territoire de Mayotte et vous êtes parlementaire. Inutile d’exiger du Gouvernement qu’il rende un rapport : allez sur place constater la situation de vos propres yeux ! (Applaudissements sur les travées des groupes UC, RDPI et Les Républicains. – Exclamations sur les travées du groupe GEST.)
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission des lois.
Mme Muriel Jourda, présidente de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. J’irai dans le sens de notre collègue Lana Tetuanui : il nous appartient de vérifier, dans le cadre de notre pouvoir de contrôle, ce que nous voulons connaître.
Je rappelle en outre que, si la commission des lois, comme la commission des affaires sociales, émet systématiquement un avis défavorable sur ce type d’amendements, c’est tout simplement au nom d’un principe constitutionnel : le Parlement ne peut pas donner d’ordre au pouvoir exécutif.
Nous ne pouvons donc pas demander de rapport au Gouvernement. Il nous appartient de faire usage de notre propre pouvoir. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et RDPI. – Mme Evelyne Corbière Naminzo s’exclame.)
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Mes chers collègues, lorsque vous avez voté l’exclusion de Mayotte du dispositif de l’AME, vous avez donc pris votre pirogue pour aller vérifier la pertinence de cette décision d’un point de vue médical, social ou autre.
Je demande donc à tous ceux qui ont voté cette exclusion de me fournir les données épidémiologiques, sanitaires et sociales qu’ils ont récoltées sur place. (Mme Evelyne Corbière Naminzo acquiesce.)
Mme Silvana Silvani. Merci d’avance !
Mme Raymonde Poncet Monge. La démagogie a ses limites !
À juste titre, M. le président de la commission des affaires sociales nous invite à saisir la commission. Je lui ferai remarquer que j’ai cité trois rapports qui préconisent non pas de supprimer l’AME, mais de l’instaurer à Mayotte. (M. le président de la commission des affaires sociales s’exclame.)
Par conséquent, il serait bon que, lorsque nous disposons de rapports, nous suivions les recommandations qu’ils contiennent ! (Applaudissements sur les travées des groupes GEST, SER et CRCE-K.)
M. le président. La parole est à M. Saïd Omar Oili, pour explication de vote.
M. Saïd Omar Oili. Je peux témoigner que Mme Corbière Naminzo est venue en pirogue à Mayotte me voir pendant deux jours. Nous avons fait ensemble le tour de l’île. Ce qu’elle dit ici correspond à ce qu’elle a constaté sur le terrain.
Mme Lana Tetuanui. Dans ce cas, plus besoin de rapport. Le travail est fait ! (Rires et applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)
Mme Silvana Silvani. Soyez sérieux ! Nous parlons de Mayotte !
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 142.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 16
L’article 23-8 de l’ordonnance n° 2002-411 du 27 mars 2002 relative à la protection sanitaire et sociale à Mayotte est ainsi rédigé :
« Art. 23-8. – Le régime de retraite complémentaire mentionné à l’article L. 921-2-1 du code de la sécurité sociale est rendu applicable à Mayotte à une date fixée par décret et, au plus tard, à l’expiration d’un délai de deux ans à compter de la promulgation de la loi n° … du … de programmation pour la refondation de Mayotte. – (Adopté.)
Article 17
L’article L. 5511-3 du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Le deuxième alinéa est supprimé ;
2° Le troisième alinéa est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« “Art. L. 5125-4. – Il ne peut être délivré qu’une licence par tranche entière de 7 000 habitants recensés dans la commune.
« “Par dérogation, lorsque le dernier recensement publié au Journal officiel est antérieur de plus de cinq ans à la demande, le directeur général de l’agence régionale de santé peut délivrer une licence par tranche de 7 000 habitants recensés dans l’intercommunalité concernée après avis conforme du conseil central de la section E de l’Ordre national des pharmaciens. » ;
3° L’avant-dernier alinéa est ainsi rédigé :
« “Lorsque la licence est délivrée en application du deuxième alinéa, le directeur général de l’agence régionale de santé peut, en vue d’assurer une desserte satisfaisante de la population, désigner la commune dans laquelle l’officine sera située après consultation pour avis des représentants locaux désigné par chaque syndicat représentatif de la profession au sens de l’article L. 162-33 du code de la sécurité sociale et du conseil central de la section E de l’Ordre national des pharmaciens. » ;
4° Au dernier alinéa, après la deuxième occurrence du mot : « est », sont insérés les mots : « , selon le cas, » et, après le mot : « municipale », sont insérés les mots : « ou intercommunale ».
M. le président. L’amendement n° 86, présenté par Mme Le Houerou, M. Omar Oili, Mmes Narassiguin et Artigalas, MM. Lurel et Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Supprimer les mots :
après avis conforme du conseil central de la section E de l’Ordre national des pharmaciens
La parole est à Mme Annie Le Houerou.
Mme Annie Le Houerou. L’objectif de l’article 17 est d’assurer une meilleure couverture territoriale des besoins en santé de la population mahoraise et de corriger les inégalités d’accès à l’offre de pharmacie.
Il s’agit, pour y parvenir, d’augmenter le nombre d’officines sur le territoire en tenant compte, parmi les critères considérés pour autoriser l’ouverture d’une officine, de la population de l’intercommunalité.
L’accès aux soins de santé est un droit fondamental pour tous les citoyens. Les pharmacies jouent un rôle crucial dans ce système : au-delà de la simple distribution de médicaments, elles offrent des services complémentaires, comme la vaccination, les dépistages ou encore des conseils de santé essentiels, par exemple sur la gestion des maladies chroniques.
En augmentant le nombre de pharmacies, nous pouvons étendre ces services au plus grand nombre et, ainsi, améliorer l’accès aux soins, donc la santé publique. Il s’agit également de lutter contre le renoncement aux soins par la réduction du temps de déplacement et d’attente en pharmacie grâce à un service de proximité.
Cet article conditionne toutefois la délivrance d’une licence de pharmacie d’officine à l’avis conforme de l’Ordre national des pharmaciens. Nous craignons que cela ne freine l’installation de pharmacies et ne rende le dispositif inopérant.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires sociales ?
Mme Christine Bonfanti-Dossat, rapporteur pour avis. Tous les représentants des pharmaciens que nous avons auditionnés – les deux syndicats représentatifs des pharmaciens d’officine et l’Ordre national des pharmaciens – se sont déclarés opposés à l’ajout d’un critère dérogatoire fondé sur la population intercommunale.
Mme Corinne Narassiguin. Évidemment, c’est bien là le problème !
Mme Christine Bonfanti-Dossat, rapporteur pour avis. Ils jugent en effet que cela pourrait déstabiliser le réseau officinal à Mayotte. (Mme Silvana Silvani s’exclame.)
Je rappelle que, dans l’archipel, de nombreux médicaments sont également distribués par l’hôpital.
La commission des affaires sociales a souhaité répondre à ces inquiétudes en prévoyant que l’ARS ne pourrait recourir à ce critère dérogatoire qu’à deux conditions : d’une part, lorsque le recensement est ancien, d’autre part, si l’ordre donne son assentiment.
Ces dispositions sont adaptées à la situation actuelle dans la mesure où le recensement de 2017 apparaît comme obsolète. Elles responsabiliseront également l’ordre des pharmaciens, qui devra se prononcer sur des ouvertures susceptibles d’améliorer l’accès aux soins sur place.
La commission des affaires sociales demeure attachée à cet équilibre. C’est pourquoi elle émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État. Le Gouvernement s’est engagé à augmenter le nombre de pharmacies à Mayotte. Il est en effet essentiel, je le répète, de développer l’offre de santé de ville dans ce territoire sous-doté. Tel est l’objectif de cet article.
Je considère – c’est là l’un des rares désaccords que j’ai avec Mme le rapporteur pour avis – que la condition d’un avis conforme du conseil de l’ordre s’apparente à un droit de veto et compromet l’objectif de développement de l’offre de soins au bénéfice des patients.
Nous pensons qu’il est nécessaire de travailler, sans doute au cours de la navette parlementaire, sur une rédaction plus large de l’amendement n° 86. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement émet un avis de sagesse sur cet amendement.
Une sénatrice du groupe CRCE-K. Quel courage !
M. Manuel Valls, ministre d’État. J’ai bien compris qu’il s’agissait d’un sujet majeur. Eh oui, la sagesse, c’est le courage.
M. le président. L’amendement n° 49, présenté par Mme Ramia, MM. Patriat, Buis et Buval, Mmes Cazebonne et Duranton, M. Fouassin, Mme Havet, MM. Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne et Lévrier, Mme Nadille, M. Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud et Rohfritsch, Mme Schillinger, M. Théophile et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :
Après l’article 17
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le dernier alinéa de l’article L. 758-4 du code de la sécurité sociale est supprimé.
La parole est à Mme Salama Ramia.
Mme Salama Ramia. Cet amendement vise à toiletter le code de la sécurité sociale en supprimant la référence à l’agence régionale de santé de l’océan Indien.
En effet, depuis le 1er janvier 2020, Mayotte est dotée de sa propre agence régionale de santé, chargée de définir et de coordonner la politique de santé sur l’ensemble de l’île.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires sociales ?
Mme Christine Bonfanti-Dossat, rapporteur pour avis. La référence à l’agence régionale de santé de l’océan Indien est en effet devenue totalement obsolète depuis la création de l’ARS de Mayotte.
Par conséquent, la commission des affaires sociales émet un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 17.
L’amendement n° 78 n’est pas soutenu.
L’amendement n° 143, présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
Après l’article 17
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement, six mois après la promulgation de la présente loi, un rapport sur la possibilité d’instaurer, à Mayotte, une première année d’études du premier cycle des formations de médecine, de pharmacie, d’odontologie et de maïeutique.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. L’article 17 prévoit la prise en compte de l’intercommunalité comme référence pour le calcul du seuil nécessaire à l’autorisation d’ouverture d’une officine pharmaceutique à Mayotte.
Cette mesure a pour objectif d’augmenter le nombre d’officines de pharmacie, d’assurer une meilleure couverture territoriale des besoins et de lutter contre les inégalités d’accès aux médicaments.
Aussi, il nous semble important de favoriser l’accès des Mahorais aux études de pharmacie en leur offrant la possibilité de suivre, à Mayotte, la première année d’études du premier cycle des formations de médecine, de pharmacie, d’odontologie et de maïeutique.
L’article 3 de la proposition de loi visant à lutter contre les déserts médicaux, d’initiative transpartisane, déposée par M. Guillaume Garot et adoptée à l’Assemblée nationale le 7 mai dernier, assure une formation a minima de première année en études de médecine dans chaque département.
Cette formation pourrait être dispensée en partie à distance, comme c’est déjà le cas dans de nombreux établissements.
Dans l’attente que la navette parlementaire débouche sur l’adoption définitive de la proposition de loi précitée et sur la mise en œuvre potentielle de son article 3, nous souhaitons inscrire cette disposition de façon prioritaire dans le présent texte relatif à Mayotte.
Elle participerait à la réponse à apporter à la pénurie de professionnels de santé : la formation de pharmaciens supplémentaires correspond à la volonté affichée à l’article 17 de développer progressivement le nombre d’officines à Mayotte.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires sociales ?
Mme Christine Bonfanti-Dossat, rapporteur pour avis. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 143.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 18
Le premier alinéa de l’article L. 4031-7 du code de la santé publique est ainsi rédigé :
« Les représentants des professionnels exerçant à Mayotte siègent dans les unions régionales de professionnels de santé de l’océan Indien selon des modalités déterminées par décret en Conseil d’État, pris après avis des syndicats représentatifs des professionnels de santé. »
M. le président. L’amendement n° 65, présenté par Mme Imbert, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
L’article L. 4031-7 du code de la santé publique est ainsi rédigé :
« Art. L. 4031-7. – Les représentants des professionnels exerçant à Mayotte siègent dans les unions régionales de professionnels de santé de Mayotte, selon des modalités déterminées par décret en Conseil d’État. »
La parole est à Mme Corinne Imbert.
Mme Corinne Imbert. Cet amendement de rédaction globale vise à préciser que les représentants des professionnels exerçant à Mayotte siègent dans les unions régionales de professionnels de santé (URPS) de Mayotte.
Quoi de plus logique dès lors qu’il existe sur place une agence régionale de santé ? Rien ne justifie que l’on déroge ici, pour Mayotte, au droit commun. La création d’une URPS par profession contribuerait à la structuration de l’offre de soins qui fait défaut sur ce territoire si singulier.
Les discussions directes entre les professionnels de santé de Mayotte, l’ARS et les élus mahorais permettront en effet de mieux impliquer l’ensemble des professions libérales du territoire.
Monsieur le ministre, vous savez combien la notion de proximité nous est précieuse au Sénat. Le projet de loi précise que le décret en Conseil d’État sera pris après avis des syndicats représentatifs des professionnels de santé. Ces derniers – médecins, pharmaciens, dentistes, kinésithérapeutes, infirmiers – se sont déjà exprimés en amont de cette discussion. Ils ont dit leur attachement commun à la création des URPS à Mayotte.
Je connais votre réticence : vous allez me répondre que la densité des professionnels de santé y est trop faible. Et alors ?
Pourquoi ne serait-il pas cohérent, sur un territoire doté d’une agence régionale de santé, de créer des URPS ? Les professionnels de santé libéraux pourraient ainsi se coordonner plus facilement, pour être au plus près des patients.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires sociales ?
Mme Christine Bonfanti-Dossat, rapporteur pour avis. Les représentants des professionnels de santé et de l’agence régionale de santé que nous avons auditionnés ont souligné la singularité de la situation sanitaire de l’île, qu’ils estiment mal représentée et mal prise en compte au sein des unions régionales de professionnels de santé de l’océan Indien.
Ils demandent en conséquence la création d’instances de représentation propres à Mayotte, ce à quoi tend à répondre l’amendement de Corinne Imbert.
Toutefois, le faible nombre de professionnels de santé libéraux exerçant à Mayotte rend délicate la création d’une URPS par profession. C’est pourquoi la commission des affaires sociales a choisi de s’en remettre à la sagesse du Sénat. Il s’agit toutefois d’un avis de sagesse bienveillant. (Sourires.)
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État. Madame la sénatrice, vous proposez la création d’URPS propres à Mayotte plutôt qu’une amélioration de la représentation des professionnels de santé de Mayotte au sein des URPS de l’océan Indien.
À ce stade et au regard du faible nombre de professionnels de santé libéraux exerçant à Mayotte – je reprends l’argument que vous redoutiez –, la création d’une URPS spécifique risque de peser sur les ressources médicales disponibles.
Aussi, il me paraît plus important de revoir et assouplir les conditions de représentation des professionnels de santé mahorais au sein des URPS de l’océan Indien, afin de renforcer cette représentation.
Pour ces raisons, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable, avec un peu de sagesse. (Sourires.)
M. le président. La parole est à Mme Micheline Jacques, pour explication de vote.
Mme Micheline Jacques. Je comprends les arguments qui viennent d’être avancés. Toutefois, il faut cesser de raisonner en comptables quand il s’agit des territoires ultramarins.
Chaque territoire a ses spécificités. Je ne vous l’apprendrai pas, monsieur le ministre, puisque vous avez quasiment fait le tour de l’ensemble des territoires depuis que vous exercez vos fonctions.
En tant que président de la délégation sénatoriale aux outre-mer, j’invite mes collègues à voter l’amendement de Mme Imbert.
M. le président. La parole est à Mme Corinne Imbert, pour explication de vote.
Mme Corinne Imbert. Vous le savez, monsieur le ministre, il existe une profession dont la densité est importante. Je veux parler de celle des sages-femmes.
Sans entrer dans la caricature sur la surreprésentation de telle ou telle profession, il est dans l’intérêt du département-région de Mayotte de créer des URPS spécifiques.
M. le président. La parole est à M. Alain Milon, pour explication de vote.
M. Alain Milon. Monsieur le ministre, j’ai eu l’honneur d’être le rapporteur de la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, dite loi HPST.
Cette loi a créé les URPS afin que les professionnels de santé participent au conseil de surveillance des agences régionales de santé. Elle énonce clairement que les URPS doivent participer au conseil d’administration de surveillance de leur ARS, dans lequel ils interviennent en tant que professionnels.
Comme le propose fort justement Corinne Imbert au travers de son amendement, il faut donc créer des URPS à Mayotte. Je veux bien croire que le nombre de professionnels y est insuffisant, mais, au moins, respectons la loi.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
M. Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales. Permettez-moi de vous livrer un retour d’expérience.
Voilà deux mois environ, j’ai eu l’occasion d’organiser une rencontre avec les professionnels de santé à Mayotte. Malgré la bienveillance qui a présidé à ces échanges, j’ai tout de même ressenti comme une anomalie que les professionnels de santé de Mayotte soient représentés par des personnes de La Réunion.
Le système actuel est ainsi fait : compte tenu du mode de désignation, les représentants de Mayotte ne peuvent être que des professionnels de santé de La Réunion. (Mmes Evelyne Corbière Naminzo et Silvana Silvani protestent.)
Pour répondre à ce problème de représentativité des Mahorais, je propose également que nous votions cet excellent amendement.
M. le président. En conséquence, l’article 18 est ainsi rédigé.
Chapitre II
Favoriser l’aménagement durable de Mayotte
Article 19
À Mayotte et pour une durée de dix ans à compter de l’entrée en vigueur de la présente loi, la procédure prévue aux articles L. 522-1 à L. 522-4 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique peut être appliquée, dans les conditions prévues aux mêmes articles L. 522-1 à L. 522-4, en vue de la prise de possession immédiate, par le bénéficiaire de la déclaration d’utilité publique, de tous les terrains bâtis ou non bâtis dont l’acquisition est nécessaire :
1° Aux opérations de reconstruction conduites et coordonnées par l’établissement public créé en application de l’article 1er de la loi n° 2025-176 du 24 février 2025 d’urgence pour Mayotte ;
2° À la réalisation des infrastructures portuaires et aéroportuaires, des ouvrages et installations des réseaux publics d’eau et d’assainissement, des constructions, ouvrages et installations à l’usage des forces de sécurité intérieure, des ouvrages et installations de production et de distribution d’électricité, des établissements pénitentiaires ainsi que des établissements de santé et médico-sociaux.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L’amendement n° 14 est présenté par Mme Narassiguin, M. Omar Oili, Mmes Artigalas et Le Houerou, MM. Lurel, Kanner et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 18 rectifié est présenté par Mme Ramia, MM. Patriat, Buis et Buval, Mmes Cazebonne, Duranton et Havet, MM. Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne et Lévrier, Mme Nadille, M. Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud et Rohfritsch, Mme Schillinger, M. Théophile et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
L’amendement n° 42 rectifié est présenté par Mme Briante Guillemont, MM. Masset et Gold, Mme Pantel et MM. Grosvalet et Daubet.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Saïd Omar Oili, pour présenter l’amendement n° 14.
M. Saïd Omar Oili. Le projet de loi prévoit d’accélérer les procédures d’expropriation au travers d’une procédure d’extrême urgence dérogatoire permettant de prendre possession des terrains dès la déclaration d’utilité publique, même en l’absence d’identification des propriétaires.
Monsieur le ministre, vous savez que cette mesure inquiète fortement la population mahoraise et que les élus locaux y sont totalement opposés.
Loin de nous l’idée de nous opposer aux expropriations qui peuvent se révéler nécessaires pour mener des projets déclarés d’utilité publique. En revanche, nous refusons toute mesure d’exception ou dérogation sur ce sujet sensible.
Le sujet est en effet sensible pour deux raisons : d’une part, parce que le désordre foncier persiste à Mayotte, d’autre part, parce que plus de 50 % du foncier relève déjà du domaine public.
Cet amendement a donc pour objet de supprimer l’article 19.
M. le président. La parole est à Mme Salama Ramia, pour présenter l’amendement n° 18 rectifié.
Mme Salama Ramia. Cet amendement vise à supprimer l’article 19, mal accueilli à Mayotte et perçu comme un moyen de faire main basse sur le foncier détenu par la population.
Afin de mettre un terme à ce climat de suspicion, il est proposé de recourir à la procédure d’expropriation classique. Celle-ci permet le débat contradictoire tout en sécurisant les droits du propriétaire, en permettant à celui-ci d’aller au bout de la procédure judiciaire.
M. le président. La parole est à Mme Sophie Briante Guillemont, pour présenter l’amendement n° 42 rectifié.
Mme Sophie Briante Guillemont. J’avancerai le même argument que mes collègues : la dérogation prévue à l’article 19 contribuerait à vider de sa substance le principe essentiel et pluriséculaire de la procédure d’expropriation selon lequel nul ne peut être privé de sa propriété, si ce n’est pour cause d’utilité publique et moyennant une juste et préalable indemnité.
Si nous pouvons introduire des exceptions dans des circonstances exceptionnelles, cette dérogation générale d’une durée de dix ans est manifestement excessive. Elle créerait une rupture d’égalité entre les citoyens de Mayotte et ceux des autres territoires républicains. En outre, elle exposerait l’État à une fragilisation de ses procédures contentieuses.
Rien ne justifie de créer sur ce territoire un régime d’exception durable qui ferait primer la logique d’urgence sur les droits fondamentaux.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Bitz, rapporteur. Nos collègues mahorais relayent ici une inquiétude, qui est très largement partagée à Mayotte, mais qui n’est pas justifiée.
En effet, la procédure mentionnée à l’article 19 préexistait dans le droit commun avant même l’élaboration de ce texte. L’adoption de cet article ne changerait strictement rien aux modalités d’identification des propriétaires et ne reviendrait nullement sur la nécessité de passer par une procédure de déclaration d’utilité publique avant de procéder à l’expropriation.
Les inquiétudes des Mahorais qui craignent de se voir dépossédés de leurs biens sont donc infondées.
Il s’agit en revanche d’accélérer les procédures pour permettre la réalisation des infrastructures dont Mayotte a besoin.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur ces trois amendements identiques.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État. Monsieur le président, je prendrai quelques minutes pour tenter de dissiper les incompréhensions qui persistent sur ce sujet.
Cet article a pour objet d’accélérer les procédures qui président à l’expropriation, sans élargir pour autant le champ de l’expropriation tel qu’il est aujourd’hui défini par la loi.
Il permet uniquement de recourir à la procédure de prise de possession accélérée afin de réaliser les infrastructures essentielles pour le développement du territoire. À la demande des élus, la liste de ces infrastructures a été resserrée sur celles qui sont essentielles et dont la construction est urgente : les ouvrages et installations des réseaux publics d’eau et d’assainissement, les infrastructures de transport, le nouvel hôpital, etc.
Je ne comprends donc pas que l’on continue à demander la suppression de cette disposition sans tenir compte des discussions qui ont eu lieu.
Cet article tient compte des difficultés d’identification des propriétaires qui peuvent intervenir à Mayotte et il autorise à prendre possession des terrains dans des conditions permettant de ne pas bloquer les travaux, tout en garantissant les droits attachés à la propriété privée.
Les élus le savent parfaitement, la maîtrise foncière est cruciale pour réaliser ces aménagements au service de la population et de l’économie mahoraises. Or le morcellement du tissu urbain et la nature de ces projets rendent insuffisante la mobilisation du seul foncier public.
Je veux souligner qu’il ne s’agit pas d’une dérogation spécifique à Mayotte. Ce même dispositif de prise de possession anticipée a déjà été utilisé dans d’autres contextes sur le territoire national. Il est ainsi prévu pour la construction d’une infrastructure de transport en Guyane. De nombreux textes législatifs récents l’ont aussi mobilisé, par exemple en faveur de la préparation des jeux Olympiques ou de la construction de réacteurs nucléaires. Pour Mayotte, il concerne d’autres cas jugés stratégiques pour la reconstruction de l’île.
Je le redis, il s’agit non pas d’élargir le champ de l’expropriation ou les conditions de sa justification – j’insiste sur ce point –, mais d’accélérer la procédure lorsque l’expropriation est mise en œuvre, et simplement cela.
Nous ne modifions en rien la procédure administrative de déclaration d’utilité publique (DUP). Elle est mise en œuvre de manière très précise et protectrice pour les propriétaires ou les personnes qui pourraient revendiquer la propriété des terrains.
Cela concerne des projets déclarés d’utilité publique. L’autorisation de prise de possession anticipée intervient uniquement en cas de difficulté pour exécuter les travaux tenant à la prise de possession d’un ou de plusieurs terrains.
Elle est autorisée par un décret adopté après avis conforme du Conseil d’État.
Le juge peut prononcer une indemnisation spéciale pour les personnes concernées qui justifient d’un préjudice causé par la rapidité de la procédure.
Une indemnité provisionnelle d’expropriation est versée aux propriétaires ou consignée en cas de difficulté, par exemple si l’identification des propriétaires n’est pas certaine.
Enfin, cette disposition est valable pour une durée de dix ans à compter de l’entrée en vigueur de la présente loi.
Nous avons donc là une mesure extrêmement encadrée juridiquement, garantissant les droits des personnes concernées et avec un contrôle du juge intervenant à plusieurs étapes – contrôle de la déclaration d’utilité publique et des conditions de la prise de possession anticipée, prononcé d’une indemnité spéciale, etc. En outre, je le redis, cette mesure est circonscrite dans le temps.
Pour ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces amendements de suppression.
Je vous invite à prendre vos responsabilités.
Nous ne pouvons pas, d’un côté, voter des crédits qui sont attendus par les élus et la population pour réaliser des infrastructures essentielles, de l’autre, ne pas nous donner les moyens juridiques de la mise en œuvre desdits projets.
Je sais que je m’adresse, à travers vous, aux élus et à l’ensemble de la population et je comprends l’histoire propre à Mayotte, les peurs. Reste que la rédaction de cet article est précise et permet de dissiper ces inquiétudes et ces peurs ; je le pense sincèrement.
Je vous appelle à la responsabilité et à la cohérence par rapport au vote du rapport annexé à l’article 1er de ce texte : nous avons besoin de l’article 19 pour mettre en œuvre les crédits et les orientations que nous y avons inscrits.
M. le président. La parole est à M. Saïd Omar Oili, pour explication de vote.
M. Saïd Omar Oili. Cet article reprend l’article 10 du projet de loi d’urgence pour Mayotte,…
M. Saïd Omar Oili. … qui a été expressément rejeté par les Mahorais. C’est le même objet.
Monsieur le ministre, vous avez eu l’occasion de vous rendre à Mayotte et d’expliquer ce texte à plusieurs reprises. Pourtant, le conseil départemental et l’ensemble des élus ont clairement exprimé leur opposition.
Salama Ramia et moi-même, sénateurs représentant Mayotte, n’avons fait que traduire la volonté des habitants de l’île. Nous sommes les représentants des Mahorais ici, dans cette assemblée. Si nous ne sommes pas écoutés, je me demande qui pourrait l’être !
Monsieur le ministre, notre action n’est pas motivée par le désir de contrarier qui que ce soit. Elle est dictée par la volonté de la population de Mayotte, qui refuse cet article.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 14, 18 rectifié et 42 rectifié.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 291 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 341 |
Pour l’adoption | 135 |
Contre | 206 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je mets aux voix l’article 19.
(L’article 19 est adopté.)
Après l’article 19
M. le président. L’amendement n° 157, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 19
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le projet d’aéroport à Mayotte destiné à accueillir la piste longue adaptée aux vols long-courriers est assimilé à une opération d’aménagement telle que définie à l’article L. 300-1 du code de l’urbanisme pour ce qui concerne les dispositions relatives au déroulement de l’enquête d’utilité publique du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique.
La parole est à M. le ministre d’État.
M. Manuel Valls, ministre d’État. Cet amendement vise à faire bénéficier le projet de piste longue de l’aéroport de Mayotte du dispositif dit de DUP foncière, qui est déjà prévu dans le code de l’expropriation et qui permet une acquisition rapide des terrains nécessaires à la réalisation d’une opération d’aménagement.
Pour répondre à l’objectif de continuité territoriale de Mayotte, nous devons, quel que soit le projet retenu, mettre en place rapidement une réponse à l’exposition de l’aéroport actuel à des risques naturels qui mettent en cause à court ou moyen terme son exploitabilité.
Cette procédure permet notamment, alors que le projet n’est pas complètement défini, de conduire l’enquête publique sans l’étude d’impact qu’il n’est pas possible de présenter à ce stade. Néanmoins, le projet fera l’objet, ultérieurement, d’une nouvelle enquête publique.
Dans tous les cas, quel que soit le projet retenu, cette DUP foncière devra être complétée par l’obtention d’une déclaration de projet qui sera octroyée après une enquête publique au cours de laquelle l’étude d’impact du projet devra être présentée. Cette dernière devra exposer les mesures envisagées dans le cadre de la démarche « éviter, réduire, compenser » (ERC).
Il s’agit d’accélérer la maîtrise du foncier et de permettre que des travaux préparatoires aient lieu dès 2027, en gagnant deux ans par rapport à une procédure de DUP classique. C’est d’autant plus nécessaire que nous devons éviter l’installation de constructions illégales et maîtriser les prix d’acquisition.
Je veux être clair : sans l’adoption de ce dispositif, ainsi que de celui qui est proposé dans l’amendement suivant, tous deux adaptés à l’urgence de la situation de l’aéroport à Mayotte, les travaux ne pourront pas débuter avant la fin de 2028, au moins. Or chacun connaît les aléas liés à la piste actuelle.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Bitz, rapporteur. Avec cet amendement, comme avec le suivant, le Gouvernement nous propose de lui donner les moyens d’accélérer la réalisation d’un équipement dont Mayotte a un besoin impératif et urgent.
Par conséquent, la commission ne peut qu’émettre un avis favorable.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 19.
L’amendement n° 158, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 19
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – La concertation postérieure au débat public engagée en application de l’article L. 121-14 du code de l’environnement relative au projet de piste longue adaptée aux vols long-courriers à Mayotte est poursuivie jusqu’à la décision du maître d’ouvrage prise à l’issue d’une procédure de consultation du public dans les conditions suivantes :
1° Un dossier destiné au public est établi par le maître d’ouvrage. Il comporte tous les éléments nécessaires à l’information du public notamment ses objectifs et caractéristiques principales, son coût estimatif et une présentation des solutions alternatives envisagées y compris celles concernant les ressources de sol nécessaires à la réalisation des travaux et leur transport. Il présente également les enjeux socio-économiques du projet, son coût estimatif, l’identification des impacts significatifs sur l’environnement ou l’aménagement du territoire, ainsi que les principales caractéristiques des équipements qui pourraient être créés ou aménagés en vue de sa desserte ;
2° Le dossier destiné au public est mis à la disposition par voie électronique et mis en consultation sur support papier dans les locaux de la préfecture ainsi que dans les espaces France si Services et les mairies des communes d’implantation du projet pendant un mois. Le public peut adresser ses observations et propositions par voie électronique ou postale au maître d’ouvrage dans un délai d’un mois à compter de la mise à disposition du dossier ;
3° Le garant désigné par la Commission nationale du débat public pour veiller à la bonne information et à la participation du public établit dans le délai d’un mois à compter de la date de clôture du dépôt des observations et des propositions, le rapport final de la concertation engagée en application de l’article L. 121-14 du code de l’environnement, qui comprend notamment une synthèse des observations et propositions présentées dans le cadre de la procédure de participation du public ;
4° Dans un délai de deux mois à compter de la date de clôture du dépôt des observations et des propositions, le maître d’ouvrage, par un acte motivé et publié indique les enseignements qu’il tire, les mesures qu’il juge nécessaire de mettre en place à ce titre et les éventuelles modifications du projet et décide du principe et des conditions de poursuite du projet. Cet acte abroge et se substitue à la décision du 7 mai 2012 prise par l’État sur le principe et les conditions de la poursuite du projet de piste longue adaptée aux vols long-courriers de l’aéroport de Mayotte.
II. – Le projet décidé par le maître d’ouvrage à l’issue de la procédure de consultation du public prévue au I n’est pas soumis :
1° Aux dispositions de l’article L. 121-12 du code de l’environnement ;
2° Aux dispositions de l’article L. 103-2 du code de l’urbanisme.
La parole est à M. le ministre d’État.
M. Manuel Valls, ministre d’État. Cet amendement vise à préciser les conditions de clôture de la concertation avec le public sur les modifications apportées au projet de piste longue. Il s’inscrit dans le dispositif de concertation et de suivi postérieur au débat public.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Bitz, rapporteur. Avis favorable.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 19.
Article 20
I. – À Mayotte, par dérogation au second alinéa de l’article 2222 et à l’article 2259 du code civil, le délai de dix ans prévu au 1° du III de l’article 51 de la loi n° 2024-322 du 9 avril 2024 visant à l’accélération et à la simplification de la rénovation de l’habitat dégradé et des grandes opérations d’aménagement est également applicable aux possessions remplissant les conditions de l’article 2261 du code civil et ayant débuté avant le 11 avril 2024, à condition qu’elles soient constatées dans un acte de notoriété ou une décision judiciaire pris après l’entrée en vigueur du présent I et suivi de l’inscription d’un droit au livre foncier de Mayotte avant le 31 décembre 2038.
Le présent I entre en vigueur un an après la publication du décret déterminant les modalités d’information des personnes susceptibles d’être concernées par ces dispositions, et au plus tard le 31 décembre 2027.
II. – Au troisième alinéa de l’article 35-2 de la loi n° 2009-594 du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer, l’année : « 2027 » est remplacée par l’année : « 2038 » – (Adopté.)
Article 21
I. – L’article 59 de la loi n° 2019-791 du 26 juillet 2019 pour une école de la confiance est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, les mots : « et à Mayotte » sont supprimés ;
2° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« À Mayotte, à titre expérimental et jusqu’au 31 décembre 2030, les conditions mentionnées au deuxième alinéa de l’article L. 2171-2 du code de la commande publique ne sont pas applicables aux marchés publics de conception-réalisation relatifs à la réalisation d’écoles élémentaires et maternelles, de collèges et de lycées de l’enseignement public, de résidences universitaires au sens de l’article L. 631-12 du code de la construction et de l’habitation ainsi que de constructions affectées à l’enseignement supérieur public. » ;
3° Au début du second alinéa, les mots : « Le présent article est applicable » sont remplacés par les mots : « Le premier alinéa et, tant qu’il porte sur les marchés publics de conception-réalisation relatifs à la réalisation d’écoles élémentaires et maternelles, le deuxième alinéa sont applicables » ;
4° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Six mois avant le terme de chacune de ces expérimentations, le Gouvernement remet au Parlement un rapport d’évaluation. Les modalités d’évaluation de ces expérimentations sont fixées par décret. »
II. – En tant qu’elles concernent la réalisation de collèges et de lycées, de résidences universitaires au sens de l’article L. 631-12 du code de la construction et de l’habitation ainsi que de constructions affectées à l’enseignement supérieur public, les dispositions de l’article 59 de la loi n° 2019-791 du 26 juillet 2019 pour une école de confiance sont applicables aux marchés publics pour lesquels une consultation est engagée ou un avis d’appel à la concurrence est envoyé à compter de la promulgation de la présente loi.
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, sur l’article.
M. Marc Laménie. L’article 21 est important. Il concerne le recours aux marchés de conception-réalisation pour la construction d’établissements scolaires et d’enseignement supérieur et de résidences universitaires à Mayotte.
Compte tenu de l’urgence de la situation et de la complexité des marchés publics, le recours à des marchés de conception-réalisation permet d’éviter la multiplication des procédures de passation de marchés publics, ce qui entraîne un gain de temps important pour les acheteurs.
Les rapporteurs ont rappelé les chiffres. À la rentrée 2024, plus de 115 000 élèves sont scolarisés sur le territoire : 63 700 dans le premier degré, 50 000 dans le second degré et 1 230 dans l’enseignement supérieur.
Au total, il y a beaucoup de bâtiments scolaires : 220 écoles primaires, 22 collèges et 11 lycées. Ces infrastructures sont saturées.
Entre 6 000 et 10 000 enfants sont aujourd’hui déscolarisés à la suite du passage du cyclone Chido, qui a notamment entraîné la destruction de 563 classes dans le premier degré. Le coût de la reconstruction y est estimé à 145 millions d’euros, il serait de 65 millions d’euros pour le second degré.
L’article 21 facilitera la construction d’infrastructures scolaires et universitaires à Mayotte, en renforçant l’efficacité globale de la commande publique.
Le groupe Les Indépendants votera cet article.
M. le président. L’amendement n° 111, présenté par Mmes Corbière Naminzo, Margaté et Cukierman, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 4
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Si le titulaire d’un marché mentionné à l’alinéa précédent n’est pas lui-même une microentreprise, une petite ou moyenne entreprise ou un artisan, la part minimale qu’il s’engage à confier, directement ou indirectement, à des microentreprises, à des petites et moyennes entreprises ou à des artisans mentionnés est fixée à 30 % du montant prévisionnel estimé du marché, sauf lorsque la structure économique du secteur concerné ne le permet pas. » ;
La parole est à Mme Marianne Margaté.
Mme Marianne Margaté. Les lauréats des appels d’offres pour les marchés de conception-réalisation auront beaucoup de travail pour reconstruire ce qui a été détruit par Chido, mais aussi pour construire ce qui faisait défaut avant le passage du cyclone.
Avec l’article 21, le Gouvernement souhaite permettre la désignation d’un seul lauréat pour un marché unique, lorsqu’il s’agit de bâtiments destinés à l’éducation ou à l’enseignement supérieur, soit de la maternelle à l’université. Cela permettra d’accélérer et de fluidifier la réalisation de ces constructions. L’urgence peut le justifier.
Cependant, la réponse à l’urgence ne doit pas conduire à aggraver la situation socioéconomique de l’île, par exemple en offrant un monopole sur le marché de la construction à de grandes entreprises, alors qu’il y a beaucoup d’entreprises locales et d’artisans qui peuvent participer à la mise en œuvre de ces grands travaux. S’il a fait beaucoup de mal, Chido peut fournir l’opportunité de corriger les erreurs de l’État français, notamment le retard dans le développement de Mayotte.
Il faut donc veiller à une répartition des emplois, du travail et des salaires qui vont avec. Cette meilleure répartition peut s’opérer grâce à ces marchés de conception-réalisation.
C’est pourquoi nous reprenons une disposition qui a été intégrée dans le projet de loi d’urgence pour Mayotte adopté le 13 février dernier : dans sa version définitive, il prévoit un montant minimal de 30 % pour les microentreprises, les PME et les artisans pour les travaux de reconstruction afin d’éviter que les grandes entreprises ne captent l’ensemble des marchés et des financements.
Nous souhaitons que ce montant minimal de 30 % soit également appliqué pour les marchés de conception-réalisation dont il est question dans cet article.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Bitz, rapporteur. Cet amendement tend à reprendre une disposition qui a été adoptée dans le cadre de la loi d’urgence pour Mayotte.
Prévoir un taux de 30 %, plutôt que 20 %, est un dispositif proportionné. Cela permettra de mieux associer les petites entreprises et les artisans mahorais à la construction des écoles et des établissements d’enseignement public à Mayotte.
C’est pourquoi la commission émet un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 21, modifié.
(L’article 21 est adopté.)
Après l’article 21
M. le président. L’amendement n° 161, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 21
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le I de l’article 17 de la loi n° 2025-176 du 24 février 2025 d’urgence pour Mayotte est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les dispositions des deux alinéas précédents sont également applicables aux marchés de travaux soumis au code de la commande publique ayant pour objet l’édification de constructions temporaires nécessaires à la continuité des services publics de l’enseignement scolaire et de l’enseignement supérieur en vue de pallier les conséquences du cyclone Chido et des événements climatiques mentionnés ci-dessus et qui répondent à un besoin dont la valeur estimée est inférieure à 3,5 millions d’euros hors taxes. »
La parole est à M. le ministre d’État.
M. Manuel Valls, ministre d’État. Cet amendement vise à compléter l’article 17 de la loi du 24 février 2005 d’urgence pour Mayotte.
La situation particulière des établissements d’enseignement scolaire et de l’université de Mayotte nécessite l’installation urgente d’infrastructures temporaires pour augmenter leur capacité d’accueil et, ainsi, éviter toute rupture de prise en charge des élèves et des étudiants.
L’installation de bâtiments modulaires peut être considérée comme un marché de travaux dès lors que ceux-ci disposent d’emprises au sol et de raccordements nécessaires et souterrains.
Cependant, ils ne sont pas nécessaires à la reconstruction stricto sensu et ne peuvent bénéficier de la dérogation prévue par la loi d’urgence. Pour autant, ils sont indispensables à la continuité du service public de l’enseignement, qu’il soit scolaire ou supérieur.
Cela concerne spécifiquement les bâtiments qui exigent plusieurs années de reconstruction et pour lesquels le système de rotation des élèves et des étudiants ne peut être mis en place, l’état des bâtiments existants étant trop dégradé.
Durant les opérations de travaux lourds inhérents à la reconstruction, il est indispensable de permettre à l’ensemble des élèves et des étudiants mahorais de disposer d’un accès à l’école adapté et mis en œuvre avant la saison des pluies.
Ces besoins temporaires, qui dépendent notamment de l’avancement des travaux de reconstruction, ne sont pas tous encore identifiés. Les marchés portant sur des constructions modulaires sont donc encore susceptibles d’être passés dans les mois à venir, y compris en urgence.
Je vous invite, pour ces raisons, à adopter cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Bitz, rapporteur. La commission émet un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 21.
Chapitre III
Créer les conditions du développement de Mayotte
Article 22
I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le I de l’article 44 quaterdecies est ainsi modifié :
a) Le 2° est complété par les mots : « ou, pour les exploitations situées à Mayotte, d’une activité industrielle, commerciale ou artisanale au sens des articles 34 et 35, ou d’une activité professionnelle au sens du 1 de l’article 92, ou d’une activité agricole » ;
b) Après la première phrase du dernier alinéa, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Pour l’impôt sur le revenu et l’impôt sur les sociétés, les dispositions du 2° élargissant le champ des activités éligibles à Mayotte s’appliquent aux impositions dues respectivement au titre des années 2025 à 2029, au titre des exercices clos à compter du 31 décembre 2025 et jusqu’aux exercices ouverts à compter du 31 décembre 2029. » ;
2° Le dernier alinéa du III du même article 44 quaterdecies est complété par une phrase ainsi rédigée : « Par exception, pour les exploitations situées à Mayotte, le taux de l’abattement est fixé à 100 % pour l’impôt sur le revenu dû au titre des années 2025 à 2029, et pour l’impôt sur les sociétés dû au titre des exercices clos à compter du 31 décembre 2025 et jusqu’aux exercices ouverts à compter du 31 décembre 2029. » ;
3° Le dernier alinéa du III de l’article 1388 quinquies est complété par une phrase ainsi rédigée : « Par exception, pour les exploitations situées à Mayotte, le taux de l’abattement est fixé à 100 % de la base d’imposition à la taxe foncière sur les propriétés bâties. » ;
II. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le I de l’article 44 quaterdecies est ainsi modifié :
a) Après la référence : « 199 undecies B », la fin du 2° est supprimée ;
b) La deuxième phrase du dernier alinéa est supprimée ;
2° La dernière phrase du dernier alinéa du III du même article 44 quaterdecies est supprimée ;
3° La dernière phrase du dernier alinéa du III de l’article 1388 quinquies est supprimée.
III. – Le II entre en vigueur le 1er janvier 2031.
M. le président. L’amendement n° 3, présenté par M. Lurel, Mme Narassiguin, M. Omar Oili, Mmes Artigalas, Le Houerou et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 13
Remplacer l’année :
2031
par l’année :
2036
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à Mme Corinne Narassiguin.
Mme Corinne Narassiguin. Cet amendement vise à prolonger pour cinq ans le dispositif proposé par l’article 22 créant une zone franche globale à Mayotte, en portant à 100 % les taux d’abattement et en étendant le champ du régime de la zone franche d’activité nouvelle génération (Zfang).
En portant de cinq à dix ans la durée totale de l’expérimentation, nous donnerons plus de stabilité et de visibilité aux acteurs et aux investisseurs à Mayotte.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des finances ?
M. Stéphane Fouassin, rapporteur pour avis de la commission des finances. La loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027 prévoit de limiter les dépenses fiscales à trois ans. L’article 22 que nous examinons comprend, pour la zone franche globale, une durée de cinq ans, ce qui constitue déjà une dérogation.
Avant de décider de son extension, il serait préférable d’évaluer l’efficacité du dispositif au bout de ces cinq années. Une telle durée permet déjà de donner un horizon temporel lointain aux entreprises.
Par ailleurs, même si le dispositif de zone franche globale n’est plus appliqué en 2031, Mayotte bénéficiera du dispositif de zone franche d’activité nouvelle génération existant dans les autres départements d’outre-mer, qui comprend des exonérations fiscales – cotisation foncière des entreprises, taxe foncière sur les propriétés bâties, impôt sur le revenu, impôt sur les sociétés – pour les TPE et les PME de certains secteurs.
La commission des finances émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 2, présenté par M. Lurel, Mme Narassiguin, M. Omar Oili, Mmes Artigalas, Le Houerou et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Le Gouvernement présente au Parlement, au plus tard le 1er janvier 2030, une évaluation de l’impact des modifications de dispositifs fiscaux prévues au présent article, notamment les principales caractéristiques de ses bénéficiaires, l’évaluation de son efficacité et de son coût.
La parole est à Mme Corinne Narassiguin.
Mme Corinne Narassiguin. Cet amendement vise à introduire une évaluation des modifications fiscales proposées par l’article 22 pour s’assurer de leur efficacité, connaître leur coût et éclairer le débat parlementaire dans l’hypothèse d’une suppression, d’une évolution ou d’une prorogation.
Par cet article, le Gouvernement propose de renforcer de manière temporaire le dispositif Zfang existant à tous les secteurs d’activité et de relever le taux de l’avantage fiscal à 100 % : le groupe socialiste soutient cette orientation.
Cependant, l’adoption de cet amendement permettra au Parlement, un an avant l’extinction prévue de la mesure, de mieux connaître les effets et conséquences de la mise en œuvre à Mayotte de cette zone franche globale et de pouvoir disposer d’une information utile pour juger de la suite qu’il convient de donner à ce dispositif.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des finances ?
M. Stéphane Fouassin, rapporteur pour avis. Conformément à l’usage, puisqu’il s’agit d’une demande de rapport, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Ce type de rapport demande du travail à l’administration pour un impact modéré.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 46 rectifié, présenté par Mme Briante Guillemont, MM. Cabanel, Bilhac, Daubet, Gold, Grosvalet, Guiol et Masset et Mme Pantel, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Le représentant de l’État, en concertation avec les collectivités territoriales, les chambres consulaires et les associations mahoraises, définit à titre indicatif des objectifs de développement socio-économique à atteindre au plus tard le 1er janvier 2031.
Un dispositif de suivi annuel est instauré afin de mesurer l’incidence des dispositions prévues aux I et II du présent article sur la création d’emplois, l’insertion professionnelle et sociale, l’implantation ou l’extension des unités de production, ainsi que sur la croissance économique locale.
Un décret en Conseil d’État précise les objectifs visés, les modalités d’application du présent article, ainsi que les indicateurs de suivi afférents.
La parole est à M. Henri Cabanel.
M. Henri Cabanel. L’article 22 prévoit la création d’une zone franche globale pour une durée de cinq ans à compter de la promulgation de la loi. L’impact budgétaire de ce dispositif, estimé à 90 millions d’euros sur la période, justifie la définition d’objectifs indicatifs.
À ce stade, le Gouvernement se limite, dans son étude d’impact, à une estimation des effets budgétaires, économiques et sociaux de l’extension du régime des zones franches d’activité nouvelle génération à d’autres secteurs d’activité.
En revanche, aucun dispositif de pilotage n’est prévu pour cette mesure dont l’objectif ultime est pourtant d’améliorer de manière concrète et visible la situation économique de Mayotte. Pourtant, sans feuille de route clairement définie, le cap d’une reconstruction durable de Mayotte risque d’être difficile à maintenir.
C’est pourquoi il est proposé de fixer des objectifs indicatifs chiffrés qui pourraient être évalués par un comité de suivi ad hoc placé sous la responsabilité du préfet. Les données ainsi collectées viendraient alimenter le dispositif d’évaluation que nous avons introduit dans le texte en commission des lois.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des finances ?
M. Stéphane Fouassin, rapporteur pour avis. Suivre annuellement l’incidence de la création de la zone franche globale d’activité sur le développement socio-économique et l’emploi paraît exagéré. Il est plus pertinent de dresser un bilan des effets de la zone franche globale en 2030, au bout des cinq années d’exonération.
La commission des finances demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L’amendement n° 4 rectifié bis est présenté par Mme Malet, MM. Burgoa et Grosperrin, Mmes Petrus, Dumont et Belrhiti, MM. Genet et Rapin, Mmes M. Mercier, Gruny, Lassarade et Joseph, MM. Panunzi, H. Leroy et Brisson et Mme F. Gerbaud.
L’amendement n° 23 rectifié bis est présenté par Mme Ramia, MM. Patriat, Buis et Buval, Mmes Cazebonne, Duranton et Havet, MM. Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne et Lévrier, Mme Nadille, M. Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud et Rohfritsch, Mme Schillinger, M. Théophile et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 22
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – À la deuxième phrase du premier alinéa du II de l’article 244 quater C du code général des impôts, le mot : « deux » est remplacé par le mot : « trois ».
II. – Les modalités d’application du I sont précisées par décret.
III. – Le I ne s’applique qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.
IV. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à Mme Viviane Malet, pour présenter l’amendement n° 4 rectifié bis.
Mme Viviane Malet. En attendant la refonte du dispositif d’exonération de charges sociales patronales applicable à Mayotte, nous proposons un rehaussement du plafond du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE).
Il s’agit de permettre aux employeurs mahorais de bénéficier du CICE pour les salariés dont la rémunération annuelle ne dépasse pas le plafond de 3,5 fois le Smic, et non 2,5 fois.
Le mécanisme actuel fait perdre aux employeurs le bénéfice intégral du crédit d’impôt dès le franchissement de ce seuil, ce qui les dissuade d’augmenter les salaires pour ne pas subir une hausse disproportionnée du coût du travail.
Cet amendement a été élaboré en collaboration avec la Fédération des entreprises des outre-mer (Fedom).
M. le président. La parole est à Mme Salama Ramia, pour présenter l’amendement n° 23 rectifié bis.
Mme Salama Ramia. Afin d’attirer des profils hautement qualifiés à Mayotte, cet amendement vise à permettre aux entreprises mahoraises de bénéficier du CICE pour les salariés dont la rémunération annuelle ne dépasse pas le plafond de 3,5 fois le Smic.
Le territoire manque cruellement de ressources en ingénierie et a plus que jamais besoin d’attirer les talents et les compétences pour sa reconstruction. Dans ce contexte, l’attractivité de la rémunération joue un rôle primordial dans la fidélisation du personnel.
La réforme de la zone franche prévue à l’article 22 ne répond pas à cette demande. En effet, la zone franche bénéficie uniquement aux entreprises qui réalisent des bénéfices ; or la plupart des petites entreprises ne réalisent pas de bénéfices, surtout dans cette période.
Tous les territoires d’outre-mer bénéficient du dispositif prévu dans la loi du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer. Les entreprises acquittent ainsi des charges patronales réduites, donc plus supportables.
Mayotte, pourtant territoire le plus pauvre de France, ne bénéficie pas d’un tel dispositif. Les entreprises mahoraises supportent donc des charges salariales très importantes, plus élevées qu’ailleurs outre-mer.
Dans l’attente de la mise en place d’un dispositif d’exonération des charges patronales à Mayotte, cet amendement vise à accroître l’efficience du principal outil permettant de réduire le coût du travail sur le territoire.
M. le président. Les deux derniers amendements sont également identiques.
L’amendement n° 22 rectifié bis est présenté par Mme Ramia, MM. Patriat, Buis et Buval, Mmes Cazebonne, Duranton et Havet, MM. Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne et Lévrier, Mme Nadille, M. Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud et Rohfritsch, Mme Schillinger, M. Théophile et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
L’amendement n° 55 rectifié est présenté par Mme Malet.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 22
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – À la deuxième phrase du premier alinéa du II de l’article 244 quater C du code général des impôts, après les mots : « salaire minimum de croissance », sont insérés les mots : « et, pour les années 2025, 2026 et 2027, trois fois et demie le salaire minimum de croissance. Ce plafond est ».
II. – Les modalités d’application du I sont précisées par décret.
III. – Le I ne s’applique qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.
IV. – La perte de recettes résultant pour l’État du III est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à Mme Salama Ramia, pour présenter l’amendement n° 22 rectifié bis.
Mme Salama Ramia. Il s’agit d’un amendement de repli : la mesure proposée dans l’amendement précédent serait limitée à trois années.
M. le président. La parole est à Mme Viviane Malet, pour présenter l’amendement n° 55 rectifié.
Mme Viviane Malet. Cet amendement de repli vise à rehausser le seuil du plafond du CICE à 3,5 fois le Smic jusqu’au 31 décembre 2027.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des finances ?
M. Stéphane Fouassin, rapporteur pour avis. Les auteurs de ces amendements ont pour objectif de soutenir la compétitivité des entreprises mahoraises.
À l’article 15, le Gouvernement a demandé une habilitation à légiférer par ordonnance pour mettre en œuvre la convergence sociale à Mayotte. Faire converger les droits sociaux implique également d’augmenter les cotisations, surtout les cotisations patronales, ce qui explique la demande d’extension du CICE.
Il est à noter que le Gouvernement a aussi demandé à l’article 15 l’habilitation à légiférer par ordonnance sur les dispositifs fiscaux. La commission des affaires sociales a supprimé cette partie de l’habilitation, la considérant – à raison – comme trop large.
Nous souhaitons cependant connaître les intentions du Gouvernement pour pallier les conséquences négatives, pour les entreprises, de la hausse du Smic prévue pour 2026.
C’est pourquoi la commission des finances sollicite l’avis du Gouvernement sur ces amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État. Ces amendements visent à augmenter le plafond des rémunérations prises en compte pour le calcul du CICE de 2,5 fois le Smic à 3,5 fois.
Mesdames les sénatrices, le Gouvernement partage la préoccupation que vous exprimez par ces amendements : il s’agit, dans le cadre de la hausse du coût du travail, d’accompagner les entreprises mahoraises et de préserver leur compétitivité.
Je rappelle que la convergence sera très progressive sur les cotisations et contributions sociales. C’est pourquoi la hausse du Smic sera accompagnée du déploiement à Mayotte de l’ensemble des exonérations et allégements dont bénéficient les autres territoires ultramarins et qui n’existent pas, pour le moment, dans l’archipel.
En revanche, alors que nous menons un chantier de convergence, il me paraît contre-intuitif de renforcer un dispositif dérogatoire à Mayotte, à savoir le CICE. Je réponds ainsi à la demande de la commission des finances.
En conclusion, je partage l’objectif que visent ces amendements, mais je propose de privilégier d’autres leviers pour l’atteindre afin de respecter l’ambition globale de convergence.
C’est pour ces raisons que le Gouvernement demande le retrait de ces amendements ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 4 rectifié bis et 23 rectifié bis.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 22 rectifié bis et 55 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Organisation des travaux
M. le président. Monsieur le ministre d’État, mes chers collègues, il est minuit. Il nous reste douze amendements à examiner sur ce texte. Nous avons, par ailleurs, un amendement à examiner sur le projet de loi organique relatif au Département-Région de Mayotte.
Nous devrions pouvoir parvenir à achever ce soir l’examen de ces deux textes en faisant des efforts de concision, ce à quoi j’appelle chacune et chacun d’entre vous.
Je vous rappelle que les explications de vote des groupes, puis les scrutins publics solennels sur ces textes, se tiendront mardi 27 mai, à dix-huit heures trente.
Il n’y a pas d’observation ?…
Il en est ainsi décidé.
Après l’article 22 (suite)
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L’amendement n° 5 rectifié bis est présenté par Mme Malet, MM. Burgoa et Grosperrin, Mmes Petrus, Dumont et Belrhiti, MM. Genet et Rapin, Mmes M. Mercier, Gruny, Lassarade et Joseph, MM. Panunzi, H. Leroy et Brisson et Mme F. Gerbaud.
L’amendement n° 21 rectifié bis est présenté par Mme Ramia, MM. Patriat, Buis et Buval, Mmes Cazebonne, Duranton et Havet, MM. Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne et Lévrier, Mme Nadille, M. Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud et Rohfritsch, Mme Schillinger, M. Théophile et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
Ils sont ainsi libellés :
Après l’article 22
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après la deuxième phrase du premier alinéa du II de l’article 244 quater C du code général des impôts, est insérée une phrase ainsi rédigée : « En cas de dépassement du seuil de rémunération annuelle, le bénéfice du crédit d’impôt est calculé sur la part des rémunérations n’excédant pas le plafond mentionné à la précédente phrase. »
II. – Les modalités d’application du I sont précisées par décret.
III. – Le I ne s’applique qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.
IV. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à Mme Viviane Malet, pour présenter l’amendement n° 5 rectifié bis.
Mme Viviane Malet. Nous proposons de supprimer l’effet cliquet du mécanisme du CICE. En l’état actuel de la législation, en effet, dès lors qu’elles dépassent 2,5 fois le Smic, les rémunérations annuelles d’un salarié sont exclues pour leur totalité de l’assiette du crédit d’impôt.
M. le président. La parole est à Mme Salama Ramia, pour présenter l’amendement n° 21 rectifié bis.
Mme Salama Ramia. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Les deux derniers amendements sont également identiques.
L’amendement n° 20 rectifié bis est présenté par Mme Ramia, MM. Patriat, Buis et Buval, Mmes Cazebonne, Duranton et Havet, MM. Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne et Lévrier, Mme Nadille, M. Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud et Rohfritsch, Mme Schillinger, M. Théophile et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
L’amendement n° 54 rectifié est présenté par Mme Malet.
Ils sont ainsi libellés :
Après l’article 22
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après le premier alinéa du II de l’article 244 quater C du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation, pour les rémunérations versées en 2025, en 2026 et en 2027, en cas de dépassement du seuil de rémunération annuelle, le bénéfice du crédit d’impôt est calculé sur la part des rémunérations n’excédant pas le plafond mentionné à l’alinéa précédent. »
II. – Les modalités d’application du I sont précisées par décret.
III. – Le I ne s’applique qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.
IV. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à Mme Salama Ramia, pour présenter l’amendement n° 20 rectifié bis.
Mme Salama Ramia. Défendu !
M. le président. La parole est à Mme Viviane Malet, pour présenter l’amendement n° 54 rectifié.
Mme Viviane Malet. Défendu !
M. le président. Quel est l’avis de la commission des finances ?
M. Stéphane Fouassin, rapporteur pour avis. La commission des finances sollicite l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 5 rectifié bis et 21 rectifié bis.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 20 rectifié bis et 54 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 56, présenté par Mme Malet, est ainsi libellé :
Après l’article 22
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Il est institué une aide au profit des entreprises particulièrement touchées par les conséquences économiques résultant du cyclone Chido à Mayotte, pour la période couvrant les mois de février et de mars 2025. L’aide peut être prolongée par décret en considération de la situation économique et financière des entreprises concernées.
II. – Les modalités d’application du I sont précisées par décret.
La parole est à Mme Viviane Malet.
Mme Viviane Malet. Défendu !
M. le président. Quel est l’avis de la commission des finances ?
M. Stéphane Fouassin, rapporteur pour avis. Il s’agit d’un dispositif pertinent de soutien aux entreprises mahoraises qui reste bien ciblé, puisque l’aide versée est plafonnée à 20 000 euros.
Au vu de l’ampleur des dégâts – le rapport inter-inspections a chiffré les pertes d’activité économique à 484 millions d’euros –, une telle aide se justifie.
Toutefois, le Gouvernement a annoncé son intention de procéder par décret pour prolonger l’aide pour les mois de février et de mars, comme il l’a déjà fait pour les mois de décembre et de janvier.
Il serait préférable, pour la qualité de la loi, de procéder de nouveau de cette façon, d’autant que notre collègue précise dans son amendement que les conditions d’application de l’aide sont déterminées par décret.
C’est pourquoi la commission des finances demande le retrait de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Viviane Malet. Je le retire, monsieur le président !
M. le président. Je rappelle que les articles 23 et 24 ont été précédemment examinés.
Article 25
À l’article L. 421-1 du code du sport, les références : « , L. 311-3, L. 311-6 » sont supprimées – (Adopté.)
Chapitre IV
Accompagner la jeunesse de Mayotte
Article 26
L’article L. 1803-5 du code des transports est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Elle peut être également attribuée aux élèves relevant du second cycle de l’enseignement secondaire ayant leur résidence habituelle à Mayotte lorsqu’ils justifient de l’impossibilité de suivre la formation qu’ils ont choisie dans cette collectivité. »
M. le président. Les amendements nos 73 et 79 ne sont pas soutenus.
L’amendement n° 122, présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. - Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport relatif à l’évolution des capacités d’accueil des filières générales, technologiques et professionnelles à Mayotte. Le rapport évalue les moyens budgétaires et le calendrier nécessaire pour mettre en adéquation les capacités d’accueil et le nombre de lycéens à Mayotte.
La parole est à Mme Mélanie Vogel.
Mme Mélanie Vogel. Défendu !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 26.
(L’article 26 est adopté.)
Article 27
I. – Il est institué un fonds de soutien en faveur des communes de Mayotte et, lorsque les dépenses relatives à l’organisation des activités périscolaires des écoles leur ont été transférées, des établissements publics de coopération intercommunale, afin de contribuer au développement d’une offre d’activités périscolaires au bénéfice des élèves des écoles publiques ou privées sous contrat du premier degré pour lesquels sont organisées des activités périscolaires dans le cadre d’un projet éducatif territorial prévu à l’article L. 551-1 du code de l’éducation.
Les aides apportées par le fonds de soutien sont calculées en fonction du nombre d’élèves éligibles scolarisés dans la commune et comportent :
1° Un montant forfaitaire par élève scolarisé dans une école remplissant la condition mentionnée au premier alinéa du présent I ;
2° Une majoration forfaitaire par élève, lorsque les élèves sont scolarisés dans des écoles maternelles et élémentaires publiques dont les enseignements sont répartis sur neuf demi-journées par semaine ou huit demi-journées par semaine comprenant cinq matinées ou dans les écoles privées sous contrat, lorsque les enseignements dispensés sont répartis sur neuf demi-journées par semaine ou sur huit demi-journées par semaine comprenant cinq matinées à condition, dans ce dernier cas, que l’organisation de la semaine scolaire dans ces écoles soit identique à celle des écoles publiques situées sur le territoire de la même commune.
Lorsque la commune a transféré la compétence en matière de dépenses relatives à l’organisation des activités périscolaires des écoles à un établissement public de coopération intercommunale, elle reverse les aides qu’elle a perçues à cet établissement.
Les aides sont versées aux communes qui reversent, le cas échéant, la part correspondant aux élèves scolarisés dans les écoles privées sous contrat aux organismes de gestion de ces écoles privées. Toutefois, la commune peut demander aux autorités académiques que cette part soit versée directement aux organismes de gestion de ces écoles.
Les aides versées au titre du présent fonds pour les élèves des écoles maternelles et élémentaires publiques ne sont pas prises en compte dans le calcul des dépenses de fonctionnement des classes sous contrat mentionnées à l’avant-dernier alinéa de l’article L. 442-5 du code de l’éducation.
Un décret fixe les modalités d’application du présent article.
II. – Le I entre en vigueur le jour de la rentrée scolaire 2025 – (Adopté.)
Chapitre V
Favoriser l’attractivité du territoire
Article 28
I. – Le chapitre Ier du titre VI du livre V du code général de la fonction publique est complété par un article L. 561-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 561-2. – Le fonctionnaire de l’État affecté à Mayotte dans un emploi d’une administration de l’État ou d’un établissement mentionné à l’article L. 3 qui justifie d’une durée minimum de services accomplis de trois années dans cet emploi bénéficie d’une priorité de mutation dans tout emploi vacant correspondant à son grade au sein du département ministériel dont il relève ou d’un établissement public sous tutelle.
« La priorité de mutation définie au présent article ne prévaut pas sur celles mentionnées aux articles L. 442-5, L. 442-6, L. 512-19 et L. 512-20. Elle ne se cumule pas avec celle résultant de l’application du 3° de l’article L. 512-19. »
II. – Sont seuls pris en compte au titre de la durée de services mentionnée au premier alinéa de l’article L. 561-2 du code général de la fonction publique les services accomplis à compter de la date d’entrée en vigueur de la présente loi – (Adopté.)
Article 29
Le chapitre Ier du titre VI du livre V du code général de la fonction publique est complété par un article L. 561-3 ainsi rédigé :
« Art. L. 561-3. – Le fonctionnaire de l’État ou le fonctionnaire hospitalier affecté pendant une durée déterminée à Mayotte bénéficie d’un avantage spécifique d’ancienneté pour le calcul de l’ancienneté requise au titre de l’avancement d’échelon.
« L’avantage spécifique mentionné à l’article L. 522-9 peut se cumuler partiellement avec l’avantage spécifique d’ancienneté prévu au présent article. – (Adopté.)
TITRE V
MODERNISER LE FONCTIONNEMENT INSTITUTIONNEL DE LA COLLECTIVITÉ
Chapitre Ier
Dispositions concernant le code général des collectivités territoriales
Article 30
I. – (Supprimé)
II (nouveau). – Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa de l’article L. 2334-7-3, le mot : « Département » est remplacé par le mot : « Département-Région » ;
2° Au II de l’article L. 2334-14-1, les mots : « de la collectivité départementale » sont remplacés par les mots : « du Département-Région » ;
3° Au b du 1° de l’article L. 2334-33 et au 2° de l’article L. 2334-37, le mot : « Département » est remplacé par le mot : « Département-Région » ;
4° À la première phrase du B de l’article L. 2334-42, les deux occurrences du mot : « Département » sont remplacées par le mot : « Département-Région » ;
5° Au premier alinéa du I de l’article L. 2336-3, le mot : « Département » est remplacé par le mot : « Département-Région » ;
6° L’article L. 2336-4 est ainsi modifié :
a) À la dernière phrase du I, après le mot : « exception », sont insérés les mots : « du Département-Région » et le mot : « Département » est remplacé par le mot : « Département-Région » ;
b) Aux deux alinéas du II, après le mot : « exception », sont insérés les mots : « du Département-Région » ;
7° L’article L. 2564-2 est ainsi modifié :
a) Au 1°, le mot : « Département » est remplacé par le mot : « Département-Région » ;
b) À la fin du 2°, les mots : « au conseil général » sont remplacés par les mots : « à l’assemblée de Mayotte » ;
8° Aux première et seconde phrases du premier alinéa du III de l’article L. 3334-3, le mot : « Département » est remplacé par le mot : « Département-Région » ;
9° Au quatrième alinéa de l’article L. 3334-4, les mots : « la collectivité départementale » sont remplacés par les mots : « le Département-Région » ;
10° Aux première et deuxième phrases du deuxième alinéa de l’article L. 3334-16-2 et à la seconde phrase du II de l’article L. 3335-2, le mot : « Département » est remplacé par le mot : « Département-Région » ;
11° À l’article L. 3441-1, les mots : « , de Mayotte et de la Réunion » sont remplacés par les mots : « et de La Réunion et le Département-Région de Mayotte » ;
12° L’article L. 3441-9 est ainsi modifié :
a) Au deuxième alinéa et aux 2° et 3°, les mots : « du conseil départemental » sont remplacés par les mots : « de l’assemblée » ;
b) Au septième alinéa, les mots : « départemental de la collectivité départementale » sont remplacés par les mots : « à l’assemblée » ;
c) Au neuvième alinéa, les mots : « de la collectivité départementale » sont remplacés par les mots : « du Département-Région » ;
13° À l’article L. 3442-1, les mots : « , de Mayotte » sont supprimés ;
14° Au premier alinéa du I de l’article L. 4332-9, le mot : « Département » est remplacé par le mot : « Département-Région » ;
15° Au premier alinéa de l’article L. 4432-9, à l’article L. 4432-12, à l’article L. 4433-2, à la première phrase du premier alinéa de l’article L. 4433-3, au premier alinéa des articles L. 4433-4-2 et L. 4433-4-3, à la première phrase de l’article L. 4433-4-3-1 et au premier alinéa de l’article L. 4433-4-5, les mots : « , de Mayotte » sont supprimés ;
16° Au deuxième alinéa de l’article L. 4433-4, les mots : « et le conseil départemental de Mayotte » sont supprimés et les mots : « sont saisis » sont remplacés par les mots : « est saisi » ;
17° L’article L. 4433-4-5-3 est abrogé ;
18° L’article L. 4433-4-6 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, la première occurrence du signe : « , » est remplacée par le mot : « et » et les mots : « et pour Mayotte » sont supprimés ;
b) Au deuxième alinéa, la première occurrence du signe : « , » est remplacée par le mot : « et » et les mots : « et à Mayotte » sont supprimés ;
19° Au deuxième alinéa du II de l’article L. 4433-4-7, les mots : « du conseil général » sont remplacés par les mots : « de l’assemblée » ;
20° Au premier alinéa de l’article L. 4433-4-10, les mots : « , de Mayotte » sont supprimés ;
21° Au premier alinéa de l’article L. 4433-7, le mot : « Département » est remplacé par le mot : « Département-Région » ;
22° Au deuxième alinéa de l’article L. 4433-10-6, les mots : « et Martinique, du Département à Mayotte » sont remplacés par les mots : « , en Martinique et à Mayotte » ;
23° Au 2° de l’article L. 4433-10-7, le mot : « Département » est remplacé par le mot : « Département-Région » ;
24° À l’article L. 4433-11, le mot : « Département » est remplacé par le mot : « Département-Région » ;
25° Au premier alinéa de l’article L. 4433-12, les mots : « Mayotte et de la Réunion » sont remplacés par les mots : « La Réunion et le Département-Région de Mayotte » ;
26° Au premier alinéa de l’article L. 4433-15, la deuxième occurrence du mot : « et » est remplacée par le signe : « , » et les mots : « le Département » sont supprimés ;
27° L’article L. 4433-15-1 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, les mots : « , le Département » sont remplacés par les mots : « et le Département-Région » ;
b) Au deuxième alinéa, le mot : « Département » est remplacé par le mot : « Département-Région » ;
28° À la première phrase du premier alinéa et au troisième alinéa de l’article L. 4433-17, à la première phrase de l’article L. 4433-19, au premier alinéa de l’article L. 4433-20 et aux articles L. 4433-21, L. 4433-22 et L. 4433-23, les mots : « Mayotte et de la Réunion » sont remplacés par les mots : « La Réunion et le Département-Région de Mayotte » ;
29° L’article L. 4433-24 est ainsi modifié :
a) Les mots : « , de Mayotte » sont supprimés ;
b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Dans le Département-Région de Mayotte, la répartition des aides de l’État en faveur de l’habitat est arrêtée, après avis du conseil territorial de l’habitat, par le représentant de l’État. » ;
30° Au premier alinéa de l’article L. 4433-27, les mots : « Mayotte et de la Réunion » sont remplacés par les mots : « La Réunion et le Département-Région de Mayotte » et le mot : « elles » est remplacé par le mot : « ils » ;
31° L’article L. 4433-28 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, les mots : « , de Mayotte et de la Réunion est tenu informé » sont remplacés par les mots : « et de La Réunion et l’assemblée de Mayotte sont tenus informés » ;
b) Au deuxième alinéa, les mots : « au conseil régional » sont remplacés par les mots : « aux conseils régionaux de Guadeloupe et de La Réunion et à l’assemblée de Mayotte, » ;
32° À l’article L. 4433-31, les mots : « Mayotte et de la Réunion » sont remplacés par les mots : « La Réunion et le Département-Région de Mayotte » et le mot : « elles » est remplacé par le mot : « ils » ;
33° À la première phrase du premier alinéa du D de l’article L. 4434-3 et à la première phrase du dernier alinéa de l’article L. 4434-4, les mots : « Mayotte et de La Réunion » sont remplacés par les mots : « La Réunion et dans le Département-Région de Mayotte » ;
34° L’article L. 5831-2 est ainsi modifié :
a) Au 1°, le mot : « Département » est remplacé par le mot : « Département-Région » ;
b) À la fin du 2°, les mots : « au conseil général » sont remplacés par les mots : « à l’assemblée de Mayotte » ;
35° Après le livre II de la septième partie, dans sa rédaction résultant de la loi organique n° … du … relative au Département-Région de Mayotte, il est rétabli un livre III ainsi rédigé :
« LIVRE III
« DÉPARTEMENT-RÉGION DE MAYOTTE
« TITRE IER
« DISPOSITIONS GÉNÉRALES
« CHAPITRE UNIQUE
« Art. L. 7311-1. – Le Département-Région de Mayotte constitue une collectivité territoriale de la République régie par l’article 73 de la Constitution qui exerce les compétences dévolues aux départements et régions d’outre-mer.
« Sous réserve des dispositions du présent livre, le Département-Région de Mayotte exerce les compétences que les lois attribuent aux régions ainsi que celles que définit le titre III du livre IV de la quatrième partie pour tenir compte des mesures d’adaptation rendues nécessaires par la situation particulière des régions d’outre-mer.
« Sous réserve des dispositions du présent livre, le Département-Région de Mayotte exerce les compétences que les lois attribuent aux départements ainsi que celles que le titre IV du livre IV de la troisième partie attribue aux départements d’outre-mer.
« Art. L. 7311-2. – Le Département-Région de Mayotte comprend la Grande-Terre, la Petite-Terre ainsi que les autres îles et îlots situés dans le récif les entourant.
« Il fait partie de la République et ne peut cesser d’y appartenir sans le consentement de sa population.
« Art. L. 7311-3. – Sous réserve des adaptations prévues au présent livre, le Département-Région de Mayotte est régi par les première, troisième et quatrième parties du présent code à l’exception des dispositions suivantes :
« 1° Dans la troisième partie : les titres Ier et IV du livre III, les articles L. 3334-16, L. 3334-16-1, L. 3334-16-2, L. 3441-2 à L. 3441-7 et L. 3443-2 ;
« 2° Dans la quatrième partie :
« a) Le livre Ier ;
« b) Au livre II : l’article L. 4221-2 et le titre III ;
« c) Au livre III : les chapitres Ier et II du titre Ier, l’article L. 4313-1 et la seconde phrase du 9° de l’article L. 4313-2, le titre II, les chapitres Ier et III du titre III, la section 2 du chapitre II du même titre III, ainsi que le 2° de l’article L. 4332-1 et le titre IV ;
« d) Au livre IV : le chapitre Ier et les sections 1 et 2 du chapitre II du titre III, les articles L. 4433-4 à L. 4433-4-10, L. 4433-24-1, L. 4434-8 et L. 4434-9.
« Art. L. 7311-4. – Pour l’application du présent code à Mayotte :
« 1° La référence au département, au département d’outre-mer, à la région ou à la région d’outre-mer est remplacée par la référence au Département-Région de Mayotte ;
« 2° La référence au conseil régional ou au conseil départemental est remplacée par la référence à l’assemblée de Mayotte ;
« 3° La référence au président du conseil régional ou au président du conseil départemental est remplacée par la référence au président de l’assemblée de Mayotte ;
« 4° La référence aux conseillers régionaux ou aux conseillers départementaux est remplacée par la référence aux conseillers à l’assemblée de Mayotte ;
« 5° La référence au conseil économique, social et environnemental régional est remplacée par la référence au conseil économique, social, environnemental, de la culture et de l’éducation de Mayotte.
« Art. L. 7311-5. – Le plan d’aménagement et de développement durable, élaboré sur le fondement des articles L.O. 6161-42 et L.O. 6161-43 dans leur rédaction en vigueur avant la publication de la loi organique n° 2010-1486 du 7 décembre 2010 relative au Département de Mayotte, et entré en vigueur le 22 juin 2009, est assimilé au schéma d’aménagement régional prévu aux articles L. 4433-7 à L. 4433-11.
« Il est révisé dans les conditions prévues à l’article L. 4433-10.
« TITRE II
« ORGANISATION DU DÉPARTEMENT-RÉGION DE MAYOTTE
« CHAPITRE Ier
« ORGANES DU DÉPARTEMENT-RÉGION DE MAYOTTE
« Section 1
« Dispositions générales
« Art. L. 7321-1. – Les organes du Département-Région de Mayotte comprennent l’assemblée de Mayotte et son président, assistés du conseil économique, social, environnemental, de la culture et de l’éducation de Mayotte.
« Section 2
« L’assemblée de Mayotte
« Art. L. 7321-2. – La composition de l’assemblée de Mayotte et la durée du mandat des conseillers à l’assemblée de Mayotte sont déterminées par le chapitre Ier du titre II bis du livre VI bis du code électoral.
« Section 3
« Le conseil économique, social, environnemental, de la culture et de l’éducation de Mayotte
« Sous-section 1
« Dispositions générales
« Art. L. 7321-3. – L’assemblée de Mayotte est assistée d’un conseil économique, social, environnemental, de la culture et de l’éducation de Mayotte.
« Sous-section 2
« Organisation et composition
« Art. L. 7321-4. – Le conseil peut comprendre des sections dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État.
« Les sections peuvent émettre des avis. Le conseil se prononce sur les avis et rapports établis par les sections avant leur transmission à l’autorité compétente.
« Art. L. 7321-5. – La composition du conseil, les conditions de nomination de ses membres ainsi que la date de son installation sont fixées par décret en Conseil d’État.
« Lorsqu’un organisme est appelé à désigner plus d’un membre du conseil, il procède à ces désignations de telle sorte que l’écart entre le nombre des hommes désignés, d’une part, et des femmes désignées, d’autre part, ne soit pas supérieur à un. La même règle s’applique à la désignation des personnalités qualifiées.
« Les conseillers à l’assemblée de Mayotte ne peuvent être membres du conseil.
« Sous-section 3
« Fonctionnement
« Art. L. 7321-6. – Le conseil économique, social, environnemental, de la culture et de l’éducation de Mayotte établit son règlement intérieur.
« Art. L. 7321-7. – Le conseil économique, social, environnemental, de la culture et de l’éducation de Mayotte élit en son sein au scrutin secret, dans les conditions prévues par son règlement intérieur, son président et les membres de sa commission permanente.
« Art. L. 7321-8. – L’assemblée de Mayotte met à la disposition du conseil économique, social, environnemental, de la culture et de l’éducation de Mayotte les moyens nécessaires à son fonctionnement. Ces moyens permettent notamment d’assurer le secrétariat des séances du conseil et de ses sections et commissions. L’assemblée de Mayotte met également les services de la collectivité territoriale ou une partie de ceux-ci à la disposition du conseil économique, social, environnemental, de la culture et de l’éducation de Mayotte à titre permanent ou temporaire, notamment pour lui permettre de réaliser des études sur tout projet à caractère économique, social, environnemental, culturel, éducatif ou sportif de sa compétence.
« Les crédits nécessaires au fonctionnement de chacun de ces conseils consultatifs et, le cas échéant, à la réalisation de ses études font l’objet d’une inscription distincte au budget du Département-Région de Mayotte.
« Ils sont notifiés chaque année, après le vote du budget, au président de ce conseil par le président de l’Assemblée de Mayotte.
« Le président du conseil économique, social, environnemental, de la culture et de l’éducation de Mayotte organise et dirige les personnels et les services mis à la disposition du conseil.
« Sous-section 4
« Garanties et indemnités accordées aux membres du conseil
« Art. L. 7321-9. – L’article L. 3123-1, les premier et dernier alinéas de l’article L. 3123-19 et l’article L. 3123-26 sont applicables au président, aux vice-présidents et aux membres du conseil économique, social, environnemental, de la culture et de l’éducation de Mayotte.
« Art. L. 7321-10. – Les membres du conseil perçoivent, pour l’exercice effectif de leurs fonctions, une indemnité fixée par l’assemblée de Mayotte dans la limite d’un plafond mensuel déterminé par référence aux indemnités maximales prévues pour les conseillers à l’assemblée de Mayotte aux articles L. 3123-16 et L. 3123-17. Cette indemnité varie en fonction de la présence des membres aux réunions du conseil ou de ses formations et de leur participation à ses travaux.
« Un décret en Conseil d’État définit les modalités d’application du premier alinéa du présent article.
« Ils ont en outre droit au remboursement des frais supplémentaires pouvant résulter de l’exercice des mandats spéciaux dont ils sont chargés par leur conseil, dans les conditions prévues aux troisième et quatrième alinéas de l’article L. 3123-19.
« Art. L. 7321-11. – Indépendamment des autorisations d’absence dont ils bénéficient en application de l’article L. 7321-9, le président, les vice-présidents et les membres du conseil ont droit à un crédit d’heures leur permettant de disposer du temps nécessaire à la préparation des réunions du conseil et des commissions dont ils font partie.
« Ce crédit d’heures, forfaitaire et trimestriel, est fixé par référence à la durée hebdomadaire légale du travail.
« Il est égal :
« 1° À l’équivalent de deux fois cette durée pour le président et les vice-présidents ;
« 2° À l’équivalent de 60 % de cette durée pour les membres du conseil.
« En cas de travail à temps partiel, le crédit d’heures est réduit à due proportion.
« Les heures non utilisées pendant un trimestre ne sont pas reportables.
« L’employeur est tenu d’accorder aux membres du conseil, sur leur demande, l’autorisation d’utiliser le crédit d’heures prévu au présent article. Ce temps d’absence n’est pas payé par l’employeur.
« Le temps d’absence utilisé en application de l’article L. 7321-9 et du présent article ne peut dépasser la moitié de la durée légale du travail pour une année civile. Il est assimilé à une durée de travail effective pour la détermination de la durée des congés payés et du droit aux prestations sociales ainsi qu’au regard de tous les droits découlant de l’ancienneté.
« Art. L. 7321-12. – Le président, les vice-présidents et les membres du conseil ont droit à une formation adaptée à leurs fonctions. L’assemblée de Mayotte met à la disposition du conseil les moyens nécessaires à la prise en charge de leurs frais de déplacement, de séjour et d’enseignement, au titre des moyens de fonctionnement prévus à l’article L. 7321-8.
« Les modalités d’application du présent article sont fixées par décret.
« Section 4
« Le conseil territorial de l’habitat
« Art. L. 7321-13. – Dans le Département-Région de Mayotte, il est institué un conseil territorial de l’habitat composé, pour moitié au moins, de conseillers à l’assemblée de Mayotte.
« Sa composition, ses modalités de fonctionnement et ses attributions sont précisées par décret en Conseil d’État.
« CHAPITRE II
« RÉGIME JURIDIQUE DES ACTES PRIS PAR LES AUTORITÉS DE LA COLLECTIVITÉ
« Art. L. 7322-1. – Les décisions prises par le Département-Région de Mayotte en application de l’article L. 4433-15-1 du présent code et des articles L. 611-18 et L. 611-19 du code minier sont soumises à l’article L. 3131-1 du présent code.
« TITRE III
« ADMINISTRATION ET SERVICES DU DÉPARTEMENT-RÉGION DE MAYOTTE
« CHAPITRE IER
« COMPÉTENCES DU PRÉSIDENT DE L’ASSEMBLÉE DE MAYOTTE
« Art. L. 7331-1. – Pour l’application à Mayotte de l’article L. 3221-3, les mots : “des articles L. 2122-4 ou L. 4133-3” sont remplacés par les mots : “de l’article L. 2122-4”.
« CHAPITRE II
« COMPÉTENCES DE L’ASSEMBLÉE DE MAYOTTE
« Art. L. 7332-1. – L’assemblée de Mayotte peut créer des établissements publics dénommés agences, chargés d’assurer la réalisation des projets intéressant la collectivité ainsi que le fonctionnement des services publics territoriaux.
« Art. L. 7332-2. – L’assemblée de Mayotte peut, de sa propre initiative ou saisie par le Premier ministre ou par le ministre chargé des outre-mer, adresser à celui-ci des propositions de modification ou d’adaptation des dispositions législatives ou réglementaires en vigueur ou en cours d’élaboration ainsi que toutes propositions relatives aux conditions du développement économique, social et culturel de la collectivité.
« Elle peut également faire au Premier ministre toutes remarques ou suggestions concernant le fonctionnement des services publics de l’État dans la collectivité.
« Le Premier ministre accuse réception dans les quinze jours et fixe le délai dans lequel il apportera une réponse au fond.
« CHAPITRE III
« COMPÉTENCES DU CONSEIL ÉCONOMIQUE, SOCIAL, ENVIRONNEMENTAL, DE LA CULTURE ET DE L’ÉDUCATION DE MAYOTTE
« Art. L. 7333-1. – Le conseil économique, social, environnemental, de la culture et de l’éducation de Mayotte exerce ses compétences dans les conditions fixées au titre IV du livre II de la quatrième partie et à la section 2 du chapitre III du titre III du livre IV de la même quatrième partie, dans la mesure où elles ne sont pas contraires aux dispositions de la présente partie.
« Il peut émettre un avis sur toute action ou projet du Département-Région, en matière économique ou sociale, dont il est saisi par le président de l’assemblée de Mayotte ou dont il décide de se saisir lui-même.
« CHAPITRE IV
« ATTRIBUTIONS DU DÉPARTEMENT-RÉGION DE MAYOTTE EN MATIÈRE DE COOPÉRATION RÉGIONALE
« Art. L. 7334-1. – L’assemblée de Mayotte peut adresser au Gouvernement des propositions en vue de la conclusion d’engagements internationaux concernant la coopération régionale entre la République française et les États ou territoires de l’océan Indien ou les États ou territoires des continents voisins de l’océan Indien ou en vue de la conclusion d’accords avec des organismes régionaux des aires correspondantes, y compris des organismes régionaux dépendant des institutions des Nations unies.
« Art. L. 7334-2. – L’assemblée de Mayotte est consultée sur les propositions d’actes de l’Union européenne qui concernent la collectivité par les soins du ministre chargé de l’outre-mer. Le second alinéa de l’article L. 4433-3-1 est applicable.
« Elle peut adresser au Gouvernement des propositions pour l’application des traités sur l’Union européenne et sur le fonctionnement de l’Union européenne.
« Art. L. 7334-3. – L’assemblée de Mayotte est saisie pour avis de tous projets d’accords concernant la coopération régionale en matière économique, sociale, technique, scientifique, culturelle, de sécurité civile ou d’environnement entre la République française et les États de l’océan Indien.
« Elle se prononce à la première réunion qui suit sa saisine.
« Art. L. 7334-4. – Dans les domaines de compétence de l’État, les autorités de la République peuvent délivrer pouvoir au président de l’assemblée de Mayotte pour négocier et signer des accords avec un ou plusieurs États ou territoires situés dans la zone de l’océan Indien ou sur les continents voisins de l’océan Indien, ou avec des organismes régionaux des aires correspondantes, y compris des organismes régionaux dépendant des institutions des Nations unies.
« Dans le cas où il n’est pas fait application du premier alinéa, le président de l’assemblée de Mayotte peut être associé ou participer, au sein de la délégation française, aux négociations d’accords de même nature.
« Le président de l’assemblée de Mayotte peut être chargé par les autorités de la République de les représenter au sein des organismes régionaux relevant des catégories mentionnées au premier alinéa. Les autorités de la République le munissent des instructions et pouvoirs nécessaires.
« Art. L. 7334-5. – Dans les domaines de compétence de la collectivité, l’assemblée de Mayotte peut, par délibération, demander aux autorités de la République d’autoriser son président à négocier, dans le respect des engagements internationaux de la République, des accords avec un ou plusieurs États, territoires ou organismes régionaux définis à l’article L. 7334-4.
« Lorsque cette autorisation est accordée, les autorités de la République sont, à leur demande, représentées à la négociation.
« À l’issue de la négociation, le projet d’accord est soumis à la délibération de l’assemblée de Mayotte pour acceptation. Les autorités de la République peuvent ensuite donner, sous réserve du respect des engagements internationaux de celle-ci, pouvoir au président de l’assemblée de Mayotte aux fins de signature de l’accord.
« Art. L. 7334-6. – Le Département-Région de Mayotte peut adhérer, en qualité de membre ou de membre associé, à une banque régionale de développement ou à une institution de financement dont la France est membre régional, membre associé ou participante au capital. Sur proposition de son président, l’assemblée de Mayotte peut demander aux autorités de la République d’autoriser son président à négocier et à signer tout instrument tendant à cette adhésion et à la participation au capital de cette banque ou institution de financement, dans les conditions prévues à l’article L. 7334-5.
« Art. L. 7334-7. – Dans les domaines de compétence du Département-Région de Mayotte, le président de l’assemblée peut, pour la durée de l’exercice de ses fonctions, élaborer un programme cadre de coopération régionale précisant la nature, l’objet et la portée des engagements internationaux qu’il se propose de négocier, dans le respect des engagements internationaux de la République, avec un ou plusieurs États, territoires ou organismes régionaux mentionnés à l’article L. 7334-4.
« Le président de l’assemblée soumet ce programme-cadre à la délibération de l’assemblée de Mayotte qui peut alors demander, dans la même délibération, aux autorités de la République d’autoriser son président à négocier les accords prévus dans ce programme-cadre.
« Lorsque cette autorisation est expressément accordée, le président de l’assemblée peut engager les négociations prévues dans le programme-cadre. Il en informe les autorités de la République qui, à leur demande, sont représentées à la négociation.
« Le président de l’assemblée soumet toute modification de son programme-cadre à la délibération de l’assemblée. Ces modifications sont approuvées par les autorités de la République, dans les mêmes conditions que la procédure initiale.
« À l’issue de la négociation, le projet d’accord est soumis à la délibération de l’assemblée pour acceptation. Les autorités de la République peuvent ensuite donner, sous réserve du respect des engagements internationaux de celle-ci, pouvoir au président de l’assemblée aux fins de signature de l’accord.
« Art. L. 7334-8. – Les accords internationaux portant à la fois sur des domaines de compétence de l’État et sur des domaines de compétence du Département-Région de Mayotte sont, dans les cas où il n’est pas fait application du premier alinéa des articles L. 7334-4 et L. 7334-7, négociés et signés par les autorités de la République. À sa demande, le président de l’assemblée de Mayotte ou son représentant participe, au sein de la délégation française, à la négociation de ces accords.
« Le président de l’assemblée de Mayotte, ou son représentant, participe, au sein de la délégation française, à sa demande, aux négociations avec l’Union européenne intéressant la collectivité.
« Le président de l’assemblée de Mayotte peut demander à l’État de prendre l’initiative de négociations avec l’Union européenne en vue d’obtenir des mesures spécifiques utiles au développement de son territoire.
« Art. L. 7334-9. – Le Département-Région de Mayotte peut, avec l’accord des autorités de la République, être membre associé des organismes régionaux, mentionnés au premier alinéa de l’article L. 3441-3, ou observateurs auprès de ceux-ci. L’assemblée de Mayotte peut saisir le Gouvernement de toutes propositions tendant à l’adhésion de la France à de tels organismes.
« Art. L. 7334-10. – Le Département-Région de Mayotte peut, dans les conditions déterminées par une convention avec l’État, désigner des agents publics chargés de le représenter au sein des missions diplomatiques de la France.
« Il offre aux agents publics mentionnés au premier alinéa un régime indemnitaire, des facilités de résidence et des remboursements de frais qui tiennent compte des conditions d’exercice de leurs fonctions. Les conditions d’application du présent alinéa sont précisées par décret en Conseil d’État.
« Il peut instituer une représentation, à caractère non diplomatique, auprès des institutions de l’Union européenne. Il en informe le Gouvernement.
« Art. L. 7334-11. – Le fonds de coopération régionale institué pour Mayotte est alimenté par des crédits de l’État et peut recevoir des dotations du Département-Région de Mayotte, de toute autre collectivité publique et de tout organisme public.
« Le comité de gestion du fonds de coopération régionale, placé auprès du représentant de l’État et composé paritairement de représentants de l’État et de représentants de l’assemblée de Mayotte, arrête la liste des opérations éligibles au fonds de coopération régionale ainsi que le taux de subvention applicable à chacune d’elles.
« Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article.
« Art. L. 7334-12. – Des représentants de l’assemblée de Mayotte participent aux travaux de l’instance de concertation des politiques de coopération régionale dans la zone de l’océan Indien prévue au II de l’article L. 4433-4-7.
« Art. L. 7334-13. – L’assemblée de Mayotte peut recourir aux sociétés d’économie mixte locales et aux sociétés d’économie mixte régies par la loi n° 46-860 du 30 avril 1946 tendant à l’établissement, au financement et à l’exécution de plans d’équipement et de développement des territoires relevant du ministère de la France d’outre-mer, pour la mise en œuvre des actions engagées dans le cadre des compétences qui lui sont dévolues en matière de coopération régionale.
« Art. L. 7334-14. – Dans le Département-Région de Mayotte, il est créé une commission de suivi de l’utilisation des fonds européens.
« Coprésidée par le représentant de l’État et le président de l’assemblée de Mayotte, cette commission est en outre composée des parlementaires de la collectivité, d’un représentant du conseil économique, social, environnemental, de la culture et de l’éducation de Mayotte, d’un représentant de l’association des maires, de représentants des chambres consulaires et de représentants des services techniques de l’État.
« Cette commission établit un rapport semestriel sur la consommation des crédits.
« TITRE IV
« SERVICES PUBLICS LOCAUX
« CHAPITRE UNIQUE
« SERVICES D’INCENDIE ET DE SECOURS
« Art. L. 7341-1. – Les articles L. 1424-1 à L. 1424-13, L. 1424-17 à L. 1424-19, L. 1424-22, L. 1424-24 à L. 1424-44, L. 1424-46 et L. 1424-48 à L. 1424-50 sont applicables à Mayotte, sous réserve des adaptations suivantes :
« 1° La seconde phrase du dernier alinéa de l’article L. 1424-12 est supprimée ;
« 2° L’article L. 1424-13 est ainsi rédigé :
« “Art. L. 1424-13. – À la date de la première réunion du conseil d’administration du service départemental d’incendie et de secours, les agents du Département de Mayotte qui relèvent des cadres d’emplois de sapeurs-pompiers professionnels, les sapeurs-pompiers volontaires ainsi que les personnels administratifs, techniques et spécialisés de la fonction publique territoriale, qui exercent leurs fonctions au service d’incendie et de secours du conseil général de Mayotte, sont réputés relever du service départemental d’incendie et de secours, dans les conditions de statut et d’emploi qui sont les leurs.
« “À la date de la première réunion du conseil d’administration du service départemental d’incendie et de secours, il est mis fin de plein droit aux fonctions des agents occupant les emplois de directeur et de directeur adjoint du service d’incendie et de secours du conseil général de Mayotte.” ;
« 3° Les trois premiers alinéas de l’article L. 1424-17 sont ainsi rédigés :
« “Les biens affectés par l’assemblée de Mayotte au fonctionnement du service d’incendie et de secours de Mayotte et nécessaires au fonctionnement du service départemental d’incendie et de secours sont mis à la disposition de celui-ci, à titre gratuit, à compter de la date fixée par une convention, sous réserve de l’article L. 1424-19.
« “Cette convention conclue entre, d’une part, l’assemblée de Mayotte et, d’autre part, le service départemental d’incendie et de secours règle les modalités de la mise à disposition, qui doit intervenir dans le délai d’un an à compter de la première réunion du conseil d’administration du service départemental d’incendie et de secours.
« “À la date de la première réunion de son conseil d’administration, le service départemental d’incendie et de secours succède à l’assemblée de Mayotte dans ses droits et obligations en matière d’incendie et de secours. À ce titre, il lui est substitué dans les contrats de toute nature conclus pour l’aménagement, le fonctionnement, l’entretien ou la conservation des biens mis à sa disposition, ainsi que pour le fonctionnement des services. Cette substitution est notifiée par l’assemblée de Mayotte à ses cocontractants.” ;
« 4° L’article L. 1424-18 est ainsi modifié :
« a) À la première phrase, les mots : “la commune ou l’établissement public de coopération intercommunale ou” sont supprimés ;
« b) À la seconde phrase, les mots : “de la commune, de l’établissement public de coopération intercommunale ou” sont supprimés ;
« 5° L’article L. 1424-22 est ainsi rédigé :
« “Art. L. 1424-22. – À défaut de signature de la convention prévue à l’article L. 1424-17 dans le délai fixé à ce même article, le représentant de l’État dans le département règle, dans un délai de six mois, la situation des biens mis à la disposition du service départemental d’incendie et de secours, après consultation du comité local mentionné à l’article L. 1711-3.
« “Sa décision est notifiée au président du conseil général et au président du conseil d’administration du service départemental d’incendie et de secours dans un délai d’un mois.” ;
« 6° Les cinquième à avant-dernier alinéas de l’article L. 1424-35 sont ainsi rédigés :
« “À compter de 2015, le montant prévisionnel des contributions mentionnées au quatrième alinéa, arrêté par le conseil d’administration du service départemental d’incendie et de secours, est notifié aux maires et aux présidents des établissements publics de coopération intercommunale avant le 1er janvier de l’année en cause.
« “À compter de 2015, le montant global des contributions des communes et des établissements publics de coopération intercommunale tient compte des charges respectives de l’assemblée de Mayotte, des communes et des établissements publics de coopération intercommunale.
« “Pour l’exercice 2015, si aucune délibération n’est prise dans les conditions prévues au troisième alinéa, la contribution de chaque commune et de chaque établissement public de coopération intercommunale est calculée, dans des conditions fixées par décret, en fonction de l’importance de sa population, de son potentiel fiscal par habitant et de ses charges.” ;
« 7° L’article L. 1424-36 est ainsi rédigé :
« “Art. L. 1424-36. – Jusqu’à l’entrée en vigueur de la convention prévue à l’article L. 1424-17, le montant minimal des dépenses directes et indirectes relatives aux biens mentionnés à ce même article, à l’exclusion des contributions mentionnées à l’article L. 1424-35, réalisées chaque année par le Département-Région de Mayotte est fixé par une convention passée entre le service départemental d’incendie et de secours, d’une part, et le conseil général de Mayotte, d’autre part.
« “À défaut de convention et jusqu’à l’entrée en vigueur de celle prévue à l’article L. 1424-17, le montant minimal des dépenses mentionnées au premier alinéa du présent article est fixé par le conseil d’administration du service départemental d’incendie et de secours en tenant compte des charges respectives du Département-Région de Mayotte et des communes.” ;
« 8° Au premier alinéa de l’article L. 1424-41, les mots : “au 1er janvier 1996” sont remplacés par les mots : “à la date de la première réunion du conseil d’administration du service départemental d’incendie et de secours” ;
« 9° À la fin du premier alinéa de l’article L. 1424-44, les mots : “dans un délai de cinq ans à compter de la promulgation de la loi n° 96-369 du 3 mai 1996 relative aux services d’incendie et de secours” sont supprimés ;
« 10° L’article L. 1424-46 est ainsi rédigé :
« “Art. L. 1424-46. – Il est créé une commission de préfiguration comprenant :
« “1° Le représentant de l’État à Mayotte ou son représentant ;
« “2° Le directeur régional des finances publiques de Mayotte ou son représentant ;
« “3° Le directeur du service d’incendie et de secours de Mayotte ou son représentant ;
« “4° Le président du conseil général ou son représentant ;
« “5° Neuf conseillers généraux ou leurs représentants, désignés par le président du conseil général ;
« “6° Six maires ou leurs représentants, désignés par une association représentative de l’ensemble des maires de Mayotte ;
« “7° Un sapeur-pompier représentant les sapeurs-pompiers professionnels ;
« “8° Un sapeur-pompier représentant les sapeurs-pompiers volontaires.
« “Cette commission est présidée par le représentant de l’État à Mayotte ou son représentant ; il fixe, par arrêté, ses modalités d’organisation et de fonctionnement.
« “La commission est chargée de :
« “a) Préparer la convention de mise à disposition des biens mentionnée à l’article L. 1424-17 ;
« “b) Délibérer, dans le respect des conditions prévues à l’article L. 1424-24-1, sur le nombre et la répartition des sièges au sein du conseil d’administration du service départemental d’incendie et de secours entre le département, les communes et les établissements publics de coopération intercommunale, le cas échéant.
« “Le président de la commission fixe, par arrêté, la répartition des sièges, au vu de la délibération mentionnée au b.
« “La commission exerce ses missions jusqu’à l’élection des membres du conseil d’administration du service départemental d’incendie et de secours.
« “Par dérogation à l’article L. 1424-24-2, l’élection des membres du conseil d’administration du service départemental d’incendie et de secours se déroule dans les quatre mois suivant le premier renouvellement général des conseils municipaux à compter de la promulgation de la loi n° 2013-1029 du 15 novembre 2013 portant diverses dispositions relatives aux outre-mer. La première réunion du conseil d’administration intervient dans le même délai.
« “Jusqu’à la première réunion du conseil d’administration du service départemental d’incendie et de secours, élu dans les conditions prévues au présent article, le fonctionnement du service d’incendie et de secours demeure régi par les articles L.O. 6161-27 à L. 6161-41.” ;
« 11° L’article L. 1424-48 est ainsi rédigé :
« “Art. L. 1424-48. – À la date de la première réunion de son conseil d’administration, le service départemental d’incendie et de secours est substitué de plein droit au service d’incendie et de secours du conseil général de Mayotte, mentionné à l’article L.O. 6161-27.”
« TITRE V
« FINANCES DE LA COLLECTIVITÉ
« Art. L. 7350-1. – Le livre VI de la première partie est applicable au Département-Région de Mayotte, dans la mesure où il n’est pas contraire au présent titre.
« Art. L. 7350-2. – Préalablement aux débats sur le projet de budget, le président de l’assemblée de Mayotte présente un rapport sur la situation en matière de développement durable intéressant le fonctionnement du Département-Région de Mayotte, les politiques qu’il mène sur son territoire et les orientations et programmes de nature à améliorer cette situation et à contribuer à l’atteinte des objectifs de développement durable inscrits au programme de développement durable à l’horizon 2030, adopté le 25 septembre 2015 par l’Assemblée générale des Nations unies. Le contenu de ce rapport et, si nécessaire, les modalités de son élaboration, sont fixés par décret.
« Art. L. 7350-3. – Préalablement aux débats sur le projet de budget, le président de l’assemblée de Mayotte présente un rapport sur la situation en matière d’égalité entre les femmes et les hommes intéressant le fonctionnement du Département-Région de Mayotte, les politiques qu’il mène sur son territoire et les orientations et programmes de nature à améliorer cette situation. Le contenu de ce rapport et les modalités de son élaboration sont fixés par décret.
« CHAPITRE IER
« BUDGETS ET COMPTES
« Art. L. 7351-1. – Le budget du Département-Région de Mayotte est l’acte par lequel sont prévues et autorisées les recettes et les dépenses annuelles de la collectivité. Le budget voté doit être équilibré en dépenses et en recettes.
« Le budget du Département-Région de Mayotte est établi en section de fonctionnement et en section d’investissement, tant en recettes qu’en dépenses. Certains services, interventions ou activités sont individualisés au sein de budgets annexes.
« Le budget du Département-Région de Mayotte est divisé en chapitres et articles.
« Un décret fixe les conditions d’application du présent article.
« Art. L. 7351-2. – L’attribution des subventions donne lieu à une délibération distincte du vote du budget. Toutefois, pour les subventions dont l’attribution n’est pas assortie de conditions d’octroi, l’assemblée de Mayotte peut décider :
« 1° D’individualiser au budget les crédits par bénéficiaire ; ou
« 2° D’établir, dans un état annexé au budget, une liste de bénéficiaires avec, pour chacun d’eux, l’objet et le montant de la subvention. L’individualisation des crédits ou la liste établie conformément au 2° vaut décision d’attribution des subventions en cause.
« Art. L. 7351-3. – Dans un délai de dix semaines précédant l’examen du budget, un débat a lieu au sein de l’assemblée de Mayotte sur les orientations budgétaires de l’exercice ainsi que sur les engagements pluriannuels envisagés.
« Ce débat porte également sur l’état d’avancement des mesures prévues par le plan de convergence couvrant le territoire de la collectivité.
« Le projet de budget de la collectivité est préparé et présenté par le président de l’assemblée de Mayotte qui est tenu de le communiquer aux membres de l’assemblée de Mayotte avec les rapports correspondants, douze jours au moins avant l’ouverture de la première réunion consacrée à l’examen dudit budget.
« Le budget primitif, le budget supplémentaire et les décisions modificatives sont votés par l’assemblée de Mayotte.
« Art. L. 7351-4. – Le budget du Département-Région de Mayotte est voté soit par nature, soit par fonction. Si le budget est voté par nature, il comporte, en outre, une présentation croisée par fonction ; s’il est voté par fonction, il comporte une présentation croisée par nature. La nomenclature par nature et la nomenclature par fonction sont fixées par arrêté conjoint du ministre chargé des collectivités territoriales et du ministre chargé du budget.
« Les documents budgétaires sont présentés conformément aux modèles fixés par arrêté conjoint du ministre chargé des collectivités territoriales et du ministre chargé du budget.
« Un décret fixe les conditions d’application du présent article.
« Art. L. 7351-5. – Les crédits sont votés par chapitre et, si l’assemblée de Mayotte en décide ainsi, par article. Dans ces deux cas, l’assemblée de Mayotte peut cependant spécifier que certains crédits sont spécialisés par article.
« En cas de vote par article, le président de l’assemblée de Mayotte peut effectuer, par décision expresse, des virements d’article à article à l’intérieur du même chapitre à l’exclusion des articles dont les crédits sont spécialisés.
« Dans une limite fixée à l’occasion du vote du budget et ne pouvant dépasser 7,5 % des dépenses réelles de chacune des sections, l’assemblée de Mayotte peut déléguer à son président la possibilité de procéder à des mouvements de crédits de chapitre à chapitre, à l’exclusion des crédits relatifs aux dépenses de personnel. Dans ce cas, le président de l’assemblée de Mayotte informe l’assemblée délibérante de ces mouvements de crédits lors de sa plus proche séance.
« Art. L. 7351-6. – I. – Si l’assemblée de Mayotte le décide, les dotations affectées aux dépenses d’investissement comprennent des autorisations de programme et des crédits de paiement.
« Les autorisations de programme constituent la limite supérieure des dépenses qui peuvent être engagées pour l’exécution des investissements. Elles demeurent valables, sans limitation de durée, jusqu’à ce qu’il soit procédé à leur annulation. Elles peuvent être révisées.
« Les crédits de paiement constituent la limite supérieure des dépenses pouvant être ordonnancées ou payées pendant l’année pour la couverture des engagements contractés dans le cadre des autorisations de programme correspondantes.
« L’équilibre budgétaire de la section d’investissement s’apprécie en tenant compte des seuls crédits de paiement.
« II. – Si l’assemblée de Mayotte le décide, les dotations affectées aux dépenses de fonctionnement comprennent des autorisations d’engagement et des crédits de paiement.
« La faculté prévue au premier alinéa du présent II est réservée aux seules dépenses résultant de conventions, de délibérations ou de décisions au titre desquelles le Département-Région de Mayotte s’engage, au-delà d’un exercice budgétaire, dans le cadre de l’exercice de ses compétences, à verser une subvention, une participation ou une rémunération à un tiers à l’exclusion des frais de personnel.
« Les autorisations d’engagement constituent la limite supérieure des dépenses qui peuvent être engagées pour le financement des dépenses mentionnées au sixième alinéa. Elles demeurent valables sans limitation de durée jusqu’à ce qu’il soit procédé à leur annulation. Elles peuvent être révisées.
« Les crédits de paiement constituent la limite supérieure des dépenses pouvant être mandatées pendant l’année pour la couverture des engagements contractés dans le cadre des autorisations d’engagement correspondantes.
« L’équilibre budgétaire de la section de fonctionnement s’apprécie en tenant compte des seuls crédits de paiement.
« À l’occasion du vote du compte administratif, le président de l’assemblée de Mayotte présente un bilan de la gestion pluriannuelle. La situation des autorisations d’engagement et de programme ainsi que des crédits de paiement y afférents donne lieu à un état joint au compte administratif.
« Un décret fixe les conditions d’application du présent article.
« Art. L. 7351-7. – Avant le vote de la première délibération budgétaire qui suit son renouvellement, l’assemblée de Mayotte établit son règlement budgétaire et financier.
« Le règlement budgétaire et financier du Département-Région de Mayotte précise notamment :
« 1° Les modalités de gestion des autorisations de programme, des autorisations d’engagement et des crédits de paiement y afférents, et notamment les règles relatives à la caducité et à l’annulation des autorisations de programme et des autorisations d’engagement ;
« 2° Les modalités d’information de l’assemblée de Mayotte sur la gestion des engagements pluriannuels au cours de l’exercice.
« Il peut aussi préciser les modalités de report des crédits de paiement afférents à une autorisation de programme, dans les cas et conditions fixés par arrêté conjoint du ministre chargé des collectivités territoriales et du ministre chargé du budget.
« Art. L. 7351-8. – Lorsque la section d’investissement ou la section de fonctionnement du budget comporte soit des autorisations de programme et des crédits de paiement, soit des autorisations d’engagement et des crédits de paiement, le président de l’assemblée de Mayotte peut, jusqu’à l’adoption du budget ou jusqu’à son règlement en cas de non-adoption du budget, liquider et mandater les dépenses d’investissement et les dépenses de fonctionnement correspondant aux autorisations ouvertes au cours des exercices antérieurs, dans la limite d’un montant de crédits de paiement par chapitre égal au tiers des autorisations ouvertes au cours de l’exercice précédent. Les crédits correspondants sont inscrits au budget lors de son adoption ou de son règlement. Le comptable est en droit de payer les mandats émis dans ces conditions.
« Art. L. 7351-9. – Le président de l’assemblée de Mayotte présente annuellement le compte administratif à l’assemblée de Mayotte, qui en débat sous la présidence de l’un de ses membres.
« Le président de l’assemblée de Mayotte peut, même s’il n’est plus en fonctions, assister à la discussion. Il doit se retirer au moment du vote.
« Le compte administratif est adopté par l’assemblée de Mayotte.
« Préalablement, l’assemblée de Mayotte arrête le compte de gestion de l’exercice clos.
« Art. L. 7351-10. – Le résultat excédentaire de la section de fonctionnement dégagé au titre de l’exercice clos, cumulé avec le résultat antérieur reporté, est affecté en totalité dès la plus proche décision budgétaire suivant le vote du compte administratif et, en tout état de cause, avant la clôture de l’exercice suivant. La délibération d’affectation prise par le Département-Région de Mayotte est produite à l’appui de la décision budgétaire de reprise de ce résultat.
« Le résultat déficitaire de la section de fonctionnement, le besoin de financement ou l’excédent de la section d’investissement sont repris en totalité dès la plus proche décision budgétaire suivant le vote du compte administratif et, en tout état de cause, avant la fin de l’exercice.
« Entre la date limite de mandatement fixée au dernier alinéa de l’article L. 1612-11 et la date limite de vote des taux des impositions locales prévue à l’article 1639 A du code général des impôts, l’assemblée de Mayotte peut, au titre de l’exercice clos et avant l’adoption de son compte administratif, reporter de manière anticipée au budget le résultat de la section de fonctionnement, le besoin de financement de la section d’investissement ou, le cas échéant, l’excédent de la section d’investissement ainsi que la prévision d’affectation.
« Si le compte administratif fait apparaître une différence avec les montants reportés par anticipation, l’assemblée de Mayotte procède à leur régularisation et à la reprise du résultat dans la plus proche décision budgétaire suivant le vote du compte administratif et, en tout état de cause, avant la fin de l’exercice.
« Un décret fixe les conditions d’application du présent article.
« Art. L. 7351-11. – Lorsque la section d’investissement du budget présente un excédent après reprise des résultats, la collectivité peut transférer cet excédent à la section de fonctionnement dans les cas et conditions définis par décret.
« Art. L. 7351-12. – Le budget et le compte administratif arrêtés du Département-Région de Mayotte restent déposés à l’hôtel de l’assemblée de Mayotte où ils sont mis sur place à la disposition du public dans les quinze jours qui suivent leur adoption ou éventuellement leur notification après règlement par le représentant de l’État. Ces documents peuvent également être mis à la disposition du public dans chaque canton, dans un lieu public.
« Le public est avisé de la mise à disposition de ces documents par tout moyen de publicité au choix du président du conseil général.
« Une présentation brève et synthétique retraçant les informations financières essentielles est jointe au budget primitif et au compte administratif afin de permettre aux citoyens d’en saisir les enjeux.
« La présentation prévue au troisième alinéa du présent article ainsi que le rapport adressé à l’assemblée de Mayotte à l’occasion du débat sur les orientations budgétaires de l’exercice prévu à l’article L. 7351-3, le rapport annexé au budget primitif et le rapport annexé au compte administratif, conformément à l’article L. 3121-19, sont mis en ligne sur le site internet du Département-Région de Mayotte, lorsqu’il existe, après l’adoption par l’assemblée de Mayotte des délibérations auxquelles ils se rapportent et dans des conditions prévues par décret en Conseil d’État.
« Art. L. 7351-13. – Les documents budgétaires sont assortis en annexe, notamment :
« 1° De données synthétiques sur la situation financière du Département-Région de Mayotte ;
« 2° De la liste des concours attribués par le Département-Région de Mayotte sous forme de prestations en nature ou de subventions. Ce document est joint au seul compte administratif ;
« 3° De la présentation agrégée des résultats afférents au dernier exercice connu du budget principal et des budgets annexes du Département-Région de Mayotte. Ce document est joint au seul compte administratif ;
« 4° De la liste des organismes pour lesquels le Département-Région de Mayotte :
« a) Détient une part du capital ;
« b) A garanti un emprunt ;
« c) A versé une subvention supérieure à 75 000 euros ou représentant plus de 50 % du produit figurant au compte de résultat de l’organisme.
« La liste indique le nom, la raison sociale et la nature juridique de l’organisme ainsi que la nature et le montant de l’engagement financier du Département-Région de Mayotte ;
« 5° D’un tableau retraçant l’encours des emprunts garantis par le Département-Région de Mayotte ainsi que l’échéancier de leur amortissement ;
« 6° De la liste des délégataires de service public ;
« 7° D’une annexe retraçant l’ensemble des engagements financiers du Département-Région de Mayotte résultant des marchés de partenariat prévus à l’article L. 1 414-1 ;
« 8° D’une annexe retraçant la dette liée à la part investissements des marchés de partenariat ;
« 9° De l’état de variation du patrimoine prévu à l’article L. 4221-4 ;
« 10° De la présentation de l’évolution des dépenses consacrées à la formation professionnelle des jeunes ;
« 11° Des autres états portant sur la situation patrimoniale et financière du Département-Région de Mayotte ainsi que sur ses différents engagements.
« Lorsqu’une décision modificative ou le budget supplémentaire a pour effet de modifier le contenu de l’une des annexes, celle-ci doit être à nouveau produite pour le vote de la décision modificative ou du budget supplémentaire.
« Les documents mentionnés au 1° font l’objet d’une insertion dans une ou plusieurs publications locales dont la diffusion totale couvre l’ensemble du territoire du Département-Région de Mayotte.
« Un décret fixe les conditions d’application du présent article.
« Art. L. 7351-14. – Les comptes certifiés des organismes mentionnés au 4° de l’article L. 7351-13 sont transmis au Département-Région de Mayotte.
« Ils sont communiqués par le Département-Région de Mayotte aux conseillers à l’assemblée de Mayotte qui en font la demande, dans les conditions prévues à l’article L. 4132-17, ainsi qu’à toute personne intéressée, dans les conditions prévues à l’article L. 4132-16.
« Sont transmis par le Département-Région de Mayotte au représentant de l’État et au comptable du Département-Région de Mayotte à l’appui du compte administratif les comptes certifiés des organismes non dotés d’un comptable public et pour lesquels le Département-Région de Mayotte :
« 1° Détient au moins 33 % du capital ; ou
« 2° A garanti un emprunt ; ou
« 3° A versé une subvention supérieure à 75 000 euros ou représentant plus de 50 % du produit figurant au compte de résultat de l’organisme et dépassant le seuil prévu au quatrième alinéa de l’article 10 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations.
« CHAPITRE II
« DÉPENSES
« Art. L. 7352-1. – Ne sont pas obligatoires pour le Département-Région de Mayotte les dépenses mentionnées aux 7°, 8°, 10° bis, 11° et 14° de l’article L. 3321-1.
« Les cotisations au régime général de la sécurité sociale en application de l’article L. 3123-20-2 s’entendent des cotisations obligatoires pour l’employeur au titre du régime de sécurité sociale applicable à Mayotte.
« Sont également obligatoires pour le Département-Région de Mayotte :
« 1° Les dépenses dont il a la charge en matière de transports et d’apprentissage à la date de la première réunion suivant le renouvellement du conseil général de Mayotte en 2011 ;
« 2° Toute dépense liée à l’exercice d’une compétence transférée par l’État à compter de la même date ;
« 3° Les dépenses liées à l’organisation des transports scolaires ;
« 4° Les dépenses d’entretien et de construction des ports maritimes de commerce et de pêche qui lui sont transférées.
« Art. L. 7352-2. – Lors du vote du budget ou d’une décision modificative, l’assemblée de Mayotte peut voter des autorisations de programme et des autorisations d’engagement de dépenses imprévues respectivement en section d’investissement et en section de fonctionnement. Pour chacune des deux sections, leur montant ne peut être supérieur à 2 % des dépenses réelles de la section.
« L’absence d’engagement d’une autorisation de programme ou d’une autorisation d’engagement de dépenses imprévues, constatée à la fin de l’exercice, entraîne la caducité de l’autorisation.
« Les autorisations de programme et les autorisations d’engagement de dépenses imprévues sont affectées dans les conditions prévues par décret.
« CHAPITRE III
« RESSOURCES
« Art. L. 7353-1. – Les ressources attribuées au Département-Région de Mayotte, en application du IV de l’article 12 de l’ordonnance n° 2012-576 du 26 avril 2012 portant extension et adaptation à Mayotte du code de la construction et de l’habitation ainsi que de diverses lois relatives au logement, sont composées d’une part du produit de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques et sont affectées au financement par le Département-Région de Mayotte du fonds de solidarité pour le logement.
« Art. L. 7353-2. – Pour leur application à Mayotte, les articles L. 3332-1, L. 3332-2 et L. 3332-3 sont ainsi rédigés :
« “Art. L. 3332-1. – Les recettes fiscales de la section de fonctionnement comprennent le produit des impositions de toute nature affectées au Département-Région de Mayotte ou instituées par lui.
« “Art. L. 3332-2. – Les recettes non fiscales de la section de fonctionnement comprennent notamment :
« “1° Le revenu et le produit des propriétés du Département-Région de Mayotte ;
« “2° Le produit de l’exploitation des services et des régies du Département-Région de Mayotte ;
« “3° Le produit du droit de péage des bacs et passages d’eau sur les routes et chemins à la charge du Département-Région de Mayotte, des autres droits de péage et de tous les autres droits concédés à la collectivité par des lois ;
« “4° Les dotations de l’État ;
« “5° Les subventions de l’État et les contributions des communes, de leurs groupements et des tiers aux dépenses de fonctionnement ;
« “6° Les autres ressources provenant de l’État, de l’Union européenne et d’autres collectivités ;
« “7° Le produit des amendes ;
« “8° Les remboursements d’avances effectués sur les ressources de la section de fonctionnement ;
« “9° Le produit de la neutralisation des dotations aux amortissements ;
« “10° La reprise des subventions d’équipement reçues ;
« “11° Les dons et legs en espèces hormis ceux mentionnés au 7° de l’article L. 3332-3.
« “Art. L. 3332-3. – Les recettes de la section d’investissement comprennent notamment :
« “1° Le produit des emprunts ;
« “2° La dotation de soutien à l’investissement des départements ;
« “3° Les versements au titre du Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée ;
« “4° Les subventions de l’État et les contributions des communes, de leurs groupements et des tiers aux dépenses d’investissement ;
« “5° Le produit des cessions d’immobilisations ;
« “6° Le remboursement des prêts consentis par la collectivité territoriale de Mayotte ;
« “7° Les dons et legs en nature et les dons et legs en espèces affectés à l’achat d’une immobilisation financière ou physique ;
« “8° Les amortissements ;
« “9° Le virement prévisionnel de la section de fonctionnement et le produit de l’affectation du résultat de fonctionnement conformément à l’article L. 3312-6.”
« Art. L. 7353-3. – Le taux des droits assimilés au droit d’octroi de mer auxquels sont soumis les rhums et spiritueux fabriqués et livrés à la consommation locale dans le Département-Région de Mayotte est fixé par délibération de l’assemblée de Mayotte dans les limites prévues à l’article 22 de la loi de finances rectificative pour 1963 (n° 63-778 du 31 juillet 1963), modifiée par l’article 13 de la loi de finances rectificative pour 1972 (n° 72-1147 du 23 décembre 1972) et complétée par l’article 20 de la loi de finances rectificative pour 1976 (n° 76-1220 du 28 décembre 1976). Le produit de ces droits constitue une recette du budget du Département-Région de Mayotte.
« CHAPITRE IV
« COMPTABILITÉ
« Art. L. 7354-1. – Le président de l’assemblée de Mayotte tient la comptabilité de l’engagement des dépenses dans les conditions fixées par arrêté conjoint du ministre de l’intérieur et du ministre chargé du budget pris après consultation du comité des finances locales.
« Art. L. 7354-2. – Le comptable du Département-Région de Mayotte est seul chargé d’exécuter, sous sa responsabilité et sous réserve des contrôles qui lui incombent, le recouvrement des recettes ainsi que le paiement des dépenses du Département-Région de Mayotte dans la limite des crédits régulièrement ouverts par l’assemblée de Mayotte.
« TITRE VI
« COMPENSATION DES TRANSFERTS DE COMPÉTENCE
« CHAPITRE UNIQUE
« Art. L. 7361-1. – Pour l’application du chapitre IV du titre Ier du livre VI, l’évaluation des dépenses exposées par l’État au titre de l’exercice des compétences transférées au Département-Région et aux communes de Mayotte et la constatation des charges résultant des créations et extensions de compétences sont soumises, préalablement à la consultation de la commission consultative sur l’évaluation des charges mentionnée à l’article L. 1211-4-1, à l’avis d’un comité local présidé par un magistrat des juridictions financières et composé à parité de représentants de l’État désignés par le représentant de l’État à Mayotte et de représentants des collectivités territoriales de Mayotte. La composition et les modalités de fonctionnement du comité local sont fixées par décret. » ;
36° Le livre IV de la septième partie, dans sa rédaction résultant de la loi organique n° … du … relative au Département-Région de Mayotte, est ainsi modifié :
a) L’article L. 7321-1 devient l’article L. 7421-1 ;
b) L’article L. 7322-1 devient l’article L. 7422-1 ;
c) Les articles L. 7323-1, L. 7323-2, L. 7323-3, L. 7323-4, L. 7323-5 et L. 7323-6 deviennent respectivement les articles L. 7423-1, L. 7423-2, L. 7423-3, L. 7423-4, L. 7423-5 et L. 7423-6 et, au dernier alinéa de l’article L. 7423-4, la référence : « L. 7323-5 » est remplacée par la référence : « L. 7423-5 » ;
d) Les articles L. 7324-1, L. 7324-2 et L. 7324-3 deviennent respectivement les articles L. 7424-1, L. 7424-2 et L. 7424-3 ;
e) Au premier alinéa de l’article L. 7424-1, la référence : « L. 7323-1 » est remplacée par la référence : « L. 7423-1 » ;
f) À l’article L. 7424-2, la référence : « L. 7324-1 » est remplacée par la référence : « L. 7424-1 » ;
g) Les articles L. 7331-1, L. 7331-2 et L. 7331-3 deviennent respectivement les articles L. 7431-1, L. 7431-2 et L. 7431-3 ;
37° Le livre VII de la première partie, le livre V de la troisième partie et le chapitre VII du titre III du livre IV de la quatrième partie sont abrogés.
III (nouveau). – Le présent chapitre entre en vigueur à une date fixée par décret, et au plus tard le 1er janvier 2026.
Par dérogation au premier alinéa du présent III, la section 3 du chapitre Ier du titre II du livre III de la septième partie du code général des collectivités territoriales relative au conseil économique, social, environnemental, de la culture et de l’éducation de Mayotte entre en vigueur à compter de la première réunion de l’assemblée de Mayotte suivant le prochain renouvellement général des conseils départementaux. Le conseil économique et social régional ainsi que le conseil de la culture, de l’éducation et de l’environnement de Mayotte continuent de fonctionner selon les dispositions prévues au titre III du livre IV de la quatrième partie du même code jusqu’à cette date.
M. le président. L’amendement n° 165, présenté par Mme Canayer et M. Bitz, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 4
Supprimer cet alinéa.
II. – Alinéas 244 et 245
Rédiger ainsi ces alinéas :
« 1° Soit d’individualiser au budget les crédits par bénéficiaire ;
« 2° Soit d’établir dans un état annexé au budget, une liste de bénéficiaires avec, pour chacun d’eux, l’objet et le montant de la subvention. L’individualisation des crédits ou la liste établie conformément au 2° vaut décision d’attribution des subventions en cause.
III. – Alinéas 309 à 311
Rédiger ainsi ces alinéas :
« 1° Soit détient au moins 33 % du capital ;
« 2° Soit a garanti un emprunt ;
« 3° Soit a versé une subvention supérieure à 75 000 euros ou représentant plus de 50 % du produit figurant au compte de résultat de l’organisme et dépassant le seuil prévu au quatrième alinéa de l’article 10 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations.
IV. – Alinéa 369
Remplacer le mot :
chapitre
par le mot :
article
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 30, modifié.
(L’article 30 est adopté.)
Chapitre II
Dispositions modifiant le code électoral
Article 31
Le livre VI bis du code électoral est ainsi modifié :
1° Après le mot : « Guyane », la fin de l’intitulé est ainsi rédigée : « , à l’assemblée de Martinique et à l’assemblée de Mayotte » ;
2° À l’article L. 558-1 A, la première occurrence du mot : « et » est remplacée par le signe : « , » et, après le mot : « Martinique », sont ajoutés les mots : « et les conseillers à l’assemblée de Mayotte » ;
3° Après le titre II, il est inséré un titre II bis ainsi rédigé :
« TITRE II BIS
« ÉLECTION DES CONSEILLERS À L’ASSEMBLÉE DE MAYOTTE
« CHAPITRE IER
« Composition de l’assemblée de Mayotte et durée du mandat
« Art. L. 558-9-1. – Les conseillers à l’assemblée de Mayotte sont élus pour six ans en même temps que les conseillers départementaux. Ils sont rééligibles.
« Art. L. 558-9-2. – L’assemblée de Mayotte est composée de cinquante-deux membres.
« CHAPITRE II
« Mode de scrutin
« Art. L. 558-9-3. – Mayotte forme une circonscription électorale unique, composée de treize sections dont la délimitation est fixée conformément au tableau ci-après :
« |
SECTION |
COMPOSITION DE LA SECTION |
Section 1 BANDRABOUA |
Villages de BANDRABOUA, DZOUMOGNE et BOUYOUNI de la commune de BANDRABOUA et villages de LONGONI, KANGANI et TRÉVANI de la commune de KOUNGOU |
|
Section 2 BOUÉNI |
Commune BOUÉNI et de KANI-KÉLI et villages de BAMBO EST, M’TSAMOUDOU et de DAPANI de la commune de BANDRELE |
|
Section 3 DEMBÉNI |
Communes de DEMBÉNI et villages de BANDRELE, HAMOURO et NYAMBADAO de la commune de BANDRELE |
|
Section 4 DZAOUDZI |
Commune de DZAOUDZI-LABBATOIR |
|
Section 5 KOUNGOU |
Villages de KOUNGOU, MAJICAVO-KOROPA et MAJICAVO-LAMIR de la commune de KOUNGOU |
|
Section 6 MAMOUDZOU-1 |
Villages de PASSAMAINTY, TSOUNDZOU 1, TSOUNDZOU 2 et VAHIBÉ de la commune de MAMOUDZOU |
|
Section 7 MAMOUDZOU-2 |
Villages de MTSAPERE et KAVANI de la commune de MAMOUDZOU |
|
Section 8 MAMOUDZOU-3 |
Villages de MAMOUDZOU et KAWENI de la commune de MAMOUDZOU |
|
Section 9 MTSAMBORO |
Communes d’ACOUA et de MTSAMBORO et villages de HANDRÉMA et MTSANGAMBOUADE de la commune de BANDRABOUA |
|
Section 10 OUANGANI |
Communes de CHICONI et OUANGANI |
|
Section 11 PAMANDZI |
Commune de PAMANDZI |
|
Section 12 SADA |
Communes de CHRIRONGUI et SADA |
|
Section 13 TSINGONI |
Communes de M’TSANGAMOUJI et TSINGONI |
« Le nombre de sièges prévu à l’article L. 558-9-2 est réparti entre les sections en fonction de leur population respective, à la représentation proportionnelle à la plus forte moyenne. En cas d’égalité de moyenne, le dernier siège est attribué à la section dont la population est la plus importante ; en cas de nouvelle égalité, il est attribué à la section dont la population a le plus augmenté en valeur absolue depuis le recensement précédent. Chaque section se voit attribuer au moins deux sièges ; si nécessaire, les derniers des sièges répartis selon la méthode décrite aux deux premières phrases du présent alinéa sont réattribués de sorte que chaque section dispose d’au moins deux sièges.
« Au plus tard le 15 janvier de l’année du renouvellement de l’assemblée de Mayotte, un arrêté du représentant de l’État à Mayotte répartit les sièges entre chaque section en fonction du dernier chiffre authentifié de leur population, conformément aux dispositions du présent article.
« Art. L. 558-9-4. – Les conseillers à l’assemblée de Mayotte sont élus au scrutin de liste à deux tours, sans adjonction ni suppression de noms et sans modification de l’ordre de présentation. Chaque liste est constituée de treize sections. Elle comprend un nombre de candidats égal au nombre de sièges dans chaque section, conformément à l’arrêté préfectoral mentionné au dernier alinéa de l’article L. 558-9-3, augmenté de deux par section.
« Au premier tour de scrutin, il est attribué à la liste qui a recueilli la majorité absolue des suffrages exprimés dans la circonscription un nombre de treize sièges, répartis à raison d’un siège pour chaque section.
« Cette attribution opérée, les autres sièges sont répartis au sein de chaque section, entre toutes les listes ayant obtenu au moins 5 % des suffrages exprimés sur l’ensemble de la circonscription, au prorata des voix obtenues par chaque liste dans la section, à la représentation proportionnelle suivant la règle de la plus forte moyenne.
« Si aucune liste n’a recueilli la majorité absolue des suffrages exprimés au premier tour, il est procédé à un second tour.
« Il est attribué à la liste qui a obtenu le plus de voix à ce second tour dans la circonscription un nombre de treize sièges, répartis à raison d’un siège pour chaque section. En cas d’égalité de suffrages entre les listes arrivées en tête, ces sièges sont attribués à la liste dont les candidats ont la moyenne d’âge la plus élevée. Cette attribution opérée, les autres sièges sont répartis au sein de chaque section entre toutes les listes ayant obtenu au moins 5 % des suffrages exprimés au second tour sur l’ensemble de la circonscription, au prorata des voix obtenues par chaque liste dans la section, à la représentation proportionnelle suivant la règle de la plus forte moyenne.
« Si plusieurs listes ont la même moyenne pour l’attribution du dernier siège dans une section, celui-ci revient à la liste qui a obtenu le plus grand nombre de suffrages. En cas d’égalité de suffrages, le siège est attribué au plus âgé des candidats susceptibles d’être proclamés élus.
« Les sièges sont attribués aux candidats dans l’ordre de présentation sur chaque section.
« CHAPITRE III
« Plafond des dépenses électorales
« Art. L. 558-9-5. – Pour l’application du dernier alinéa de l’article L. 52-11, la référence à l’indice des prix à la consommation des ménages, hors tabac, est remplacée par la référence à l’indice local des prix à la consommation des ménages, hors tabac, de l’Institut national de la statistique et des études économiques. » ;
4° À la fin du dernier alinéa de l’article L. 558-11, les mots : « ou de Martinique » sont remplacés par les mots : « , de Martinique ou de Mayotte » ;
5° Aux première et seconde phrases de l’article L. 558-13, les mots : « ou de Martinique » sont remplacés par les mots : « , de Martinique ou de Mayotte » ;
6° L’article L. 558-14 est ainsi rédigé :
« Art. L. 558-14. – L’article L. 118-3 est applicable aux candidats à l’élection des conseillers à l’assemblée de Guyane, à l’assemblée de Martinique et à l’assemblée de Mayotte. » ;
7° À l’article L. 558-15, les mots : « ou à l’assemblée de Martinique » sont remplacés par les mots : « , de Martinique ou de Mayotte » ;
8° Au premier alinéa de l’article L. 558-16, les mots : « ou à l’assemblée de Martinique » sont remplacés par les mots : « , de Martinique ou de Mayotte » ;
9° À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 558-17, les mots : « ou à l’assemblée de Martinique » sont remplacés par les mots : « , de Martinique ou de Mayotte » ;
10° L’article L. 558-18 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est ainsi rédigé :
« Les mandats de conseiller à l’assemblée de Guyane, de conseiller à l’assemblée de Martinique et de conseiller à l’assemblée de Mayotte sont incompatibles. » ;
b) Au deuxième alinéa, les mots : « ou à l’assemblée de Martinique » sont remplacés par les mots : « , de Martinique ou de Mayotte » ;
11° À l’article L. 558-28, les mots : « et des conseillers à l’assemblée de Martinique » sont remplacés par les mots : « , à l’assemblée de Martinique et à l’assemblée de Mayotte » ;
12° À l’intitulé du chapitre VII du titre III, les mots : « et des conseillers à l’assemblée de Martinique » sont remplacés par les mots : « , à l’assemblée de Martinique et à l’assemblée de Mayotte » ;
13° Au premier alinéa de l’article L. 558-32, les mots : « ou à l’assemblée de Martinique » sont remplacés par les mots : « , à l’assemblée de Martinique ou à l’assemblée de Mayotte » ;
14° Au troisième alinéa de l’article L. 558-33, les mots : « ou à l’assemblée de Martinique » sont remplacés par les mots : « , à l’assemblée de Martinique ou à l’assemblée de Mayotte » ;
15° À l’article L. 558-34, les mots : « ou à l’assemblée de Martinique » sont remplacés par les mots : « , à l’assemblée de Martinique ou à l’assemblée de Mayotte ».
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 11, présenté par M. Omar Oili, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 13
Supprimer les mots :
, composée de treize sections dont la délimitation est fixée conformément au tableau ci-après :
II. – Alinéas 14 à 16
Supprimer ces alinéas.
III. – Alinéa 17, deuxième et dernière phrases
Remplacer ces phrases par une phrase ainsi rédigée :
Chaque liste comprend un nombre de candidats égal au nombre de sièges à pourvoir, et au plus deux candidats supplémentaires.
IV. – Alinéa 18
Remplacer les mots :
treize sièges, répartis à raison d’un siège pour chaque section
par les mots et une phrase ainsi rédigée :
sièges égal à 25 % du nombre total de sièges à pourvoir, arrondi le cas échéant à l’entier supérieur. Cette attribution opérée, les autres sièges sont répartis entre toutes les listes ayant obtenu au moins 5 % des suffrages exprimés sur l’ensemble de la circonscription à la représentation proportionnelle suivant la règle de la plus forte moyenne.
V. – Alinéa 19
Supprimer cet alinéa.
VI. – Alinéa 21
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Il est attribué à la liste qui a obtenu le plus de voix à ce second tour un nombre de sièges égal à 25 % du nombre total des sièges à pourvoir, arrondi, le cas échéant, à l’entier supérieur. En cas d’égalité de suffrages entre les listes arrivées en tête, ces sièges sont attribués à la liste dont les candidats ont la moyenne d’âge la plus élevée. Cette attribution opérée, les autres sièges sont répartis entre toutes les listes ayant obtenu au moins 5 % des suffrages exprimés au second tour sur l’ensemble de la circonscription, à la représentation proportionnelle suivant la règle de la plus forte moyenne.
VII. – Alinéas 22 et 23
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Saïd Omar Oili.
M. Saïd Omar Oili. Cet amendement vise à établir un mode de scrutin avec liste unique et sans section pour l’assemblée de Mayotte, conformément aux vœux exprimés par les élus locaux. Le conseil départemental de Mayotte s’est en effet prononcé à l’unanimité contre un scrutin organisé par section.
La circonscription unique permet aux électeurs de choisir un projet politique pour l’ensemble de Mayotte, ainsi que les élus chargés de le mettre en œuvre, et d’identifier dès le vote un potentiel président.
La circonscription unique sans section serait pour Mayotte le gage d’une plus grande stabilité de la gouvernance, donc d’une plus grande efficacité dans la gestion des politiques publiques de l’archipel.
Par ailleurs, les déséquilibres très importants constatés entre les données démographiques, qui sont la base de la répartition des sièges par section, selon la jurisprudence, et le nombre d’inscrits sur les listes électorales ne permettent pas d’assurer la meilleure représentativité sur tout le territoire.
M. le président. L’amendement n° 12, présenté par Mmes Narassiguin, Artigalas et Le Houerou, MM. Lurel, Kanner et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 13
Remplacer le mot :
treize
par le mot :
cinq
II. – Alinéa 14, tableau
Rédiger ainsi ce tableau :
«
SECTION |
COMPOSITION DE LA SECTION |
Section de Mamoudzou |
Communes de Mamoudzou et Dembeni |
Section du Grand Nord |
Communes de Koungou, Bandraboua, M’Tzamboro et Acoua |
Section du Centre-Ouest |
Communes de Tsingoni, Sada, Ouangani, Chiconi et M’Tsangamouji |
Section du Sud |
Communes de Bandrele, Chirongui, Boueni et Kani Keli |
Section de Petite-Terre |
Communes de Dzaoudzi et Pamandzi |
III. – Alinéa 15, dernière phrase
Remplacer les première et dernière occurrences du mot :
deux
par le mot :
cinq
IV. – Alinéa 17, deuxième phrase
Remplacer le mot :
treize
par le mot :
cinq
V. – Alinéa 18
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Au premier tour de scrutin, il est attribué à la liste qui a recueilli la majorité absolue des suffrages exprimés dans la circonscription un nombre de sièges égal à 25 % du nombre total de sièges à pourvoir, arrondi le cas échéant à l’entier supérieur. Ces sièges sont répartis entre chaque section en fonction de leur population respective, à la représentation proportionnelle à la plus forte moyenne. En cas d’égalité de moyenne, le dernier siège est attribué à la section dont la population est la plus importante ; en cas de nouvelle égalité, il est attribué à la section dont la population a le plus augmenté depuis le recensement précédent. Chaque section se voit attribuer au moins cinq sièges ; si nécessaire, les derniers des sièges répartis selon la méthode précédemment décrite sont réattribués de sorte qu’au moins cinq sièges soient attribués dans chaque section.
VI. – Alinéa 21
1° Première phrase
Remplacer les mots :
treize sièges, répartis à raison d’un siège pour chaque section
par les mots :
sièges égal à 25 % du nombre total de sièges à pourvoir
2° Après la première phrase
Insérer une phrase ainsi rédigée :
Ces sièges sont répartis entre chaque section dans les conditions prévues au deuxième alinéa du présent article.
VII. – Après l’alinéa 23
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« L’arrêté du représentant de l’État à Mayotte prévu à l’article L. 558-9-3 répartit les sièges attribués au titre de la prime majoritaire entre chaque section en fonction du dernier chiffre authentifié de leur population, dans les conditions prévues au deuxième alinéa du présent article.
La parole est à Mme Corinne Narassiguin.
Mme Corinne Narassiguin. Saïd Omar Oili ayant défendu la position des élus du conseil départemental de Mayotte, le groupe SER a choisi de déposer cet amendement de repli pour revenir à la rédaction initiale du projet de loi, en retenant la solution d’une circonscription unique divisée en cinq sections électorales.
En effet, il ne nous paraît pas justifié de mettre en place un découpage en treize sections, qui morcellerait de manière excessive le territoire et nuirait à la bonne gouvernance de la collectivité. Ce dernier point a déjà été souligné par Saïd Omar Oili.
En revenant à la rédaction initiale, nous serions cohérents avec ce qui se fait déjà en Guyane et en Martinique, où il existe respectivement huit et quatre sections. La division en cinq sections plutôt que treize nous semble plus équilibrée pour Mayotte.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur ces deux amendements.
L’amendement n° 11 tend à instaurer un scrutin sans section électorale, tandis que l’amendement n° 12 vise à rétablir, au sein de la circonscription unique, les cinq sections.
La commission des lois préfère la division de la circonscription unique en treize sections. Ce modèle, qui s’inspire des travaux de notre ancien collègue Thani Mohamed Soilihi, semble plus satisfaisant pour plusieurs raisons.
D’abord, il permettra aux conseillers de Mayotte de disposer d’une véritable attache territoriale et d’assurer une représentation plus fine du territoire de l’archipel dans sa diversité.
Ensuite, il garantira aux cantons actuels d’avoir au moins autant d’élus qu’aujourd’hui, car le nombre de sièges attribués ne pourra pas être inférieur à deux.
Surtout, il permettra de dégager une majorité claire pour conduire les politiques à l’échelle du département.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État. Après de nombreuses discussions avec les élus, le Gouvernement a imaginé un scrutin basé sur une circonscription unique, avec cinq sections. Il a pris connaissance avec intérêt des conclusions de la commission. Je sais qu’il y a eu des débats techniques et juridiques sur les sections, un scrutin proportionnel sur des sections avec peu d’élus serait en effet un peu dénaturé.
Le Gouvernement est très respectueux des travaux du Sénat et des rapporteurs. C’est pour cette raison qu’il émet un avis défavorable sur l’amendement n° 11 et s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée sur l’amendement n° 12.
M. le président. Je mets aux voix l’article 31.
(L’article 31 est adopté.)
Article 32
Le code électoral est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa de l’article L. 46-1, après le mot : « Martinique », sont insérés les mots : « , conseiller à l’assemblée de Mayotte » ;
2° À la fin de l’avant-dernier alinéa de l’article L. 52-11, les mots : « aux assemblées de Guyane et de Martinique » sont remplacés par les mots : « à l’assemblée de Guyane, à l’assemblée de Martinique et à l’assemblée de Mayotte » ;
3° Au second alinéa du V de l’article L. 52-12, après le mot : « Martinique », sont insérés les mots : « , à Mayotte » ;
4° Au 8° de l’article L. 231, après le mot : « Martinique, », sont insérés les mots : « du Département-Région de Mayotte, » ;
5° Au 2° bis de l’article L. 280, les mots : « et des conseillers à l’assemblée de Martinique » sont remplacés par les mots : « , à l’assemblée de Martinique et à l’assemblée de Mayotte » ;
6° À l’article L. 281, après le mot : « Martinique », sont insérés les mots : « , les conseillers à l’assemblée de Mayotte » ;
7° Le second alinéa de l’article L. 282 est ainsi modifié :
a) Les mots : « ou un conseiller à l’assemblée de Martinique » sont remplacés par les mots : « , un conseiller à l’assemblée de Martinique ou un conseiller à l’assemblée de Mayotte » ;
b) Les mots : « ou celui de l’assemblée de Martinique » sont remplacés par les mots : « , celui de l’assemblée de Martinique ou celui de l’assemblée de Mayotte » ;
8° À l’intitulé du chapitre Ier du titre Ier du livre VI, les mots : « , des conseillers généraux » sont supprimés ;
9° Au 1° de l’article L. 451, le mot : « Département » est remplacé par le mot : « Département-Région » ;
10° À l’article L. 453, les mots : « du coût de la vie de l’Institut national de la statistique et des études économiques » sont remplacés par les mots : « des prix à la consommation des ménages, hors tabac, » ;
11° L’article L. 454 est abrogé ;
12° Le chapitre III du titre Ier du livre VI est abrogé ;
13° Le 2° de l’article L. 475 est ainsi rédigé :
« 2° Des conseillers à l’assemblée de Mayotte » – (Adopté.)
Article 33
Le présent chapitre entre en vigueur à compter du prochain renouvellement général des conseils départementaux, à l’exception des I, II et des 2° et 4° du III de l’article 32, qui entrent en vigueur dans les conditions prévues au second alinéa du III de l’article 30.
M. le président. L’amendement n° 166, présenté par Mme Canayer et M. Bitz, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Remplacer les mots :
I, II et des 2° et 4° du III
par les mots :
1° à 7°, 9° et 11°
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 33, modifié.
(L’article 33 est adopté.)
TITRE VI
DISPOSITIONS TRANSITOIRES et FINALES
Article 34
I A (nouveau). – Le Département-Région de Mayotte succède au Département de Mayotte dans tous ses droits et obligations, y compris en matière budgétaire et comptable.
I B (nouveau). – Pour l’application à Mayotte des dispositions législatives autres que celles modifiées par la présente loi :
1° La référence au Département de Mayotte est remplacée par la référence au Département-Région de Mayotte ;
2° La référence au conseil général ou au conseil départemental de Mayotte est remplacée par la référence à l’assemblée de Mayotte ;
3° La référence aux conseillers généraux ou aux conseillers départementaux de Mayotte est remplacée par la référence aux conseillers à l’assemblée de Mayotte ;
4° La référence au président du conseil général ou au président du conseil départemental de Mayotte est remplacée par la référence au président de l’assemblée de Mayotte.
I. – Le code des juridictions financières est ainsi modifié :
1° Au 12° de l’article L. 131-2, les deux occurrences des mots : « du conseil départemental » sont remplacées par les mots : « de l’assemblée » ;
2° Le II de l’article L. 212-9 est ainsi modifié :
a) Au 1°, le mot : « Département » est remplacé par le mot : « Département-Région » ;
b) Au 2°, les mots : « au conseil départemental » sont remplacés par les mots : « à l’assemblée » ;
c) Au 3°, les mots : « du conseil départemental » sont remplacés par les mots : « de l’assemblée ».
II. – Au dernier alinéa du XIII de l’article 21 de la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale, la référence : « L.O. 7311-7 » est remplacée par la référence : « L.O. 7411-7 ».
III. – Le II de l’article 205 de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte est ainsi modifiée :
1° Au premier alinéa, les mots : « livre III » sont remplacés par les mots : « livre IV » et les mots : « dans sa rédaction résultant de la loi organique n° 2011-883 du 27 juillet 2011 relative aux collectivités régies par l’article 73 de la Constitution, » sont supprimés ;
2° À la dernière phrase du dernier alinéa, la référence : « L.O. 7311-7 » est remplacée par la référence : « L.O. 7411-7 » et, à la fin, les mots : « , dans sa rédaction résultant de la loi organique n° 2011-883 du 27 juillet 2011 précitée » sont supprimés.
IV. – Au premier alinéa du I de l’article 6-3 de la loi n° 77-729 du 7 juillet 1977 relative à l’élection des représentants au Parlement européen, après le mot : « Martinique, », sont insérés les mots : « conseiller à l’assemblée de Mayotte, ».
V. – Le I de l’article 11 de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique est ainsi modifié :
1° Au 2°, après les mots : « exécutif de Martinique, », sont insérés les mots : « de président de l’assemblée de Mayotte, » ;
2° Au 3°, après les mots : « exécutifs de Martinique, », sont insérés les mots : « les conseillers à l’assemblée de Mayotte, ».
VI. – Le présent titre entre en vigueur à une date fixée par décret, et au plus tard le 1er janvier 2026.
Les I, IV et V du présent article s’appliquent à compter du prochain renouvellement général des conseils départementaux suivant l’entrée en vigueur de la présente loi – (Adopté.)
Seconde délibération
M. le président. La parole est à M. le ministre d’État.
M. Manuel Valls, ministre d’État. Monsieur le président, en application de l’article 43, alinéa 4, du règlement du Sénat, le Gouvernement demande qu’il soit procédé à une seconde délibération de l’article 1er et de son rapport annexé.
M. le président. En application de l’article 43, alinéa 4, du règlement, le Gouvernement demande qu’il soit procédé à une seconde délibération de l’article 1er et de son rapport annexé.
Quel est l’avis de la commission sur cette demande de seconde délibération ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Avis favorable.
M. le président. Je consulte le Sénat sur la demande de seconde délibération présentée par le Gouvernement et acceptée par la commission.
Il n’y a pas d’opposition ? …
La seconde délibération est ordonnée.
Conformément à l’article 43, alinéa 5, du règlement, « lorsqu’il y a lieu à seconde délibération, les textes adoptés lors de la première délibération sont renvoyés à la commission, qui présente un nouveau rapport ».
La commission est-elle prête à présenter son rapport ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Oui, monsieur le président.
M. le président. Nous allons procéder à la seconde délibération de l’article 1er et de son rapport annexé.
Je rappelle au Sénat les termes de l’article 43, alinéa 6, du règlement : « Dans sa seconde délibération, le Sénat statue seulement sur les nouvelles propositions du Gouvernement ou de la commission, présentées sous forme d’amendements, et sur les sous-amendements s’appliquant à ces amendements. »
article 1er et rapport annexé
M. le président. Le Sénat a précédemment adopté l’article 1er dans la rédaction suivante :
Article 1er
Le rapport annexé à la présente loi est approuvé.
RAPPORT ANNEXÉ
INTRODUCTION
Le 14 décembre 2024, le cyclone Chido frappait l’archipel de Mayotte en plein cœur, causant de nombreux dégâts humains, matériels et environnementaux. Ce phénomène d’une ampleur inédite constitue la catastrophe naturelle la plus importante dans l’histoire récente de notre pays.
Le 12 janvier 2025, la tempête tropicale intense Dikeledi touchait à son tour Mayotte. Le coup porté par deux fois par ces épisodes météorologiques a profondément affecté l’existence quotidienne et l’activité des Mahorais qui vivaient déjà dans des conditions très difficiles, affaibli une économie déjà fragile, et durablement modifié les paysages et le cadre de vie des habitants.
Le plan « Mayotte debout », présenté par le Premier ministre le 30 décembre 2024, se compose de plusieurs mesures visant à répondre à l’urgence mais ayant également vocation à être mises en œuvre dans les phases de reconstruction et refondation.
L’État a répondu présent pour gérer la crise et répondre aux urgences immédiates. La loi n° 2025-176 du 24 février 2025 d’urgence pour Mayotte a ensuite été promulguée pour constituer l’outil législatif principal au service de la reconstruction de Mayotte. Elle vise à faciliter le rétablissement des conditions de vie des Mahorais à travers l’adaptation des règles de construction, d’urbanisme ou de commande publique. Elle porte également différentes mesures de soutien aux habitants et aux entreprises sur le plan économique et social.
La loi de programmation pour la refondation de Mayotte porte quant à elle l’ambition de donner les moyens aux Mahorais d’exercer leurs droits, vivre en paix et en sécurité à Mayotte, 101e département français situé dans l’océan Indien.
L’État souhaite porter une ambition à la hauteur de l’attachement des Mahorais à la France – réaffirmé avec constance au gré des consultations successives depuis 1974 – qui sera un levier puissant dans la période de reconstruction et de refondation. Il accordera une importance particulière à l’association des élus mahorais et des forces vives du territoire (conseil économique, social et environnemental, conseil cadial, associations) à ce chantier d’une ampleur inédite, notamment dans le cadre de l’établissement public dédié à la reconstruction.
Le positionnement stratégique de Mayotte dans le canal du Mozambique appelle un renforcement de l’intégration régionale dans une logique de rayonnement dans l’océan Indien.
Les atouts exceptionnels de Mayotte doivent être confortés. À titre d’exemple, l’extraordinaire patrimoine naturel mahorais – symbolisé par sa biodiversité marine (coraux, tortues), son lagon à double barrière et sa zone économique exclusive formant le premier parc marin français, ainsi que ses forêts primaires et secondaires, riches d’une biodiversité indigène et endémique à forte valeur écologique – doit faire l’objet d’une approche équilibrée entre protection et développement durable.
Une stratégie de gestion durable des déchets sera mise en œuvre pour réduire la part de l’enfouissement en dotant Mayotte des équipements nécessaires au recyclage et la valorisation.
À travers ce texte, l’État entend créer les conditions de l’épanouissement à Mayotte de la jeunesse mahoraise – source de vitalité et artisane du Mayotte de demain – et apporter des réponses concrètes aux espoirs placés dans la République et ses promesses de sécurité, stabilité, égalité et prospérité. Mayotte, territoire où près d’un habitant sur deux est âgé de moins de 18 ans, attend des signaux clairs pour entretenir la confiance en l’avenir. Des perspectives d’émancipation en matière d’acquisition de savoirs, d’opportunités d’emploi, d’accès à la culture et à la pratique sportive seront définies.
Particulièrement exposée aux aléas naturels, Mayotte doit être considérée comme un territoire vulnérable qu’il convient de protéger. La prévention des risques naturels et le développement d’une véritable culture de la gestion de crise et du risque doivent constituer des priorités de l’État, en lien avec les collectivités.
Chido et Dikeledi, mais aussi la crise de l’eau de 2023, ont mis en lumière l’ampleur des défis qu’il convient de relever afin de donner aux Mahorais la capacité de développer leur territoire. Si la départementalisation a permis d’engager Mayotte dans un processus de développement, une loi de programmation ambitieuse doit venir se substituer aux multiples plans stratégiques dont le pilotage et la mise en œuvre concrète ne peuvent être considérés comme satisfaisants. À ce titre, le renforcement des institutions locales, à travers l’affirmation de la collectivité unique et de ses compétences et la mise en cohérence des ressources des collectivités territoriales avec la réalité démographique du territoire sont des impératifs pour réussir la refondation.
À travers le présent rapport, l’État reconnaît sans ambiguïté que les paramètres socio-économiques hors-normes du territoire et le rythme actuel de la convergence économique et sociale ne permettent pas le développement et l’attractivité de Mayotte.
La pression démographique – exercée principalement par l’immigration clandestine – constitue un facteur majeur de déstabilisation du territoire qui met directement en péril la paix civile et la cohésion sociale à Mayotte, affaiblit les services publics et dégrade la qualité de vie des Mahorais.
Ainsi, la loi réaffirme le principe selon lequel la refondation de Mayotte impose de prendre des mesures fortes visant à lutter plus efficacement contre l’immigration clandestine et l’habitat illégal.
L’État s’engage aussi à garantir l’accès aux Mahorais aux biens et ressources essentiels :
– l’accès à l’eau potable et à l’assainissement constitue une priorité ;
– une trajectoire de souveraineté alimentaire reposant sur le développement de l’agriculture, de la pêche et de l’aquaculture sera soutenue ;
– l’offre de soins sera mise en adéquation avec les besoins des Mahorais ;
– l’offre de logement fera l’objet d’une augmentation massive au titre de la reconstruction.
La loi consacre une trajectoire de convergence économique et sociale marquée par l’alignement du SMIC net sur le niveau national au plus tard en 2031, avec l’objectif d’atteindre l’égalité réelle.
La refondation de Mayotte nécessite de créer les conditions de l’attractivité. Pour y parvenir, des mesures ciblées en soutien aux entreprises telles que la mise en place d’une zone franche globale seront mises en œuvre.
Plus globalement, ce rapport présente un programme d’investissements prioritaires dans les infrastructures essentielles afin de soutenir la triple ambition de la refondation : protéger les Mahorais, garantir l’accès aux biens et ressources essentiels et développer les leviers de la prospérité de Mayotte.
1. La refondation de Mayotte impose de prendre des mesures fortes visant à lutter plus efficacement contre l’immigration clandestine et l’habitat illégal
1.1. Un renforcement nécessaire du dispositif opérationnel de lutte contre l’immigration clandestine, qui constitue une source de déstabilisation majeure de la société mahoraise
L’immigration clandestine constitue une menace pour le pacte social à Mayotte. L’objectif prioritaire est double : lutter plus efficacement contre les départs clandestins vers Mayotte et augmenter significativement les retours depuis Mayotte de personnes en situation irrégulière.
L’opération Mayotte Place Nette a permis l’éloignement de 4 200 étrangers en situation irrégulière qui viennent s’ajouter aux 50 000 reconduites menées sur la période 2022-2023.
La lutte contre ce phénomène migratoire reposera sur le rétablissement et le renforcement des capacités de surveillance, de détection et d’interception, à terre comme en mer.
L’étude technico-opérationnelle relative à la lutte contre l’immigration clandestine à Mayotte réalisée par la direction des entreprises et partenariats de sécurité et des armes (DEPSA) du ministère de l’Intérieur servira de base à cet effort de renforcement capacitaire.
En matière de détection :
– le renouvellement de l’ensemble des radars et l’acquisition de moyens optroniques, balises et drones seront poursuivis ;
– la mise en œuvre de bases avancées pour l’interception en mer sera également étudiée ;
– le remplacement des moyens nautiques de la gendarmerie maritime figure parmi les priorités.
En matière d’interception :
– une trajectoire d’augmentation du nombre d’intercepteurs opérationnels H24 sera mise en œuvre. Cela impliquera le renouvellement et l’augmentation de la flotte actuelle ;
– un chantier naval dédié à la maintenance en condition opérationnelle sera mis en place ;
– le projet de ponton opérationnel sur l’îlot Mtsamboro visant à réduire les temps de ralliement des zones d’interception sera concrétisé ;
– la création d’une zone d’attente à horizon 2027 en vue de non admettre sur le territoire les étrangers interceptés en mer ou à l’issue de débarquements sauvage et d’un nouveau local de rétention administrative de 48 places en 2026 pour les interpellations à terre.
De manière générale, la mobilisation de l’ensemble des forces de défense et de sécurité ainsi que des services du ministère de la Justice et du ministère de l’Europe et des affaires étrangères devra s’accroître afin de faire face aux conséquences d’une pression migratoire croissante en provenance des Comores et de Madagascar et, depuis près de deux ans, des pays de l’Afrique des Grands Lacs.
Le durcissement de la lutte contre l’immigration clandestine reposera donc sur le renforcement des moyens et des effectifs. Par ailleurs, les nombreuses mesures législatives prévues dans ce domaine dans la présente loi participeront de cet objectif prioritaire pour Mayotte.
Sur le sujet spécifique du droit du sol, le Gouvernement soutient la restriction des conditions d’accès à la nationalité française.
Les efforts engagés dans la lutte contre l’économie informelle, alimentée par l’emploi non déclaré d’étrangers en situation irrégulière et source de concurrence déloyale pour les professionnels mahorais seront poursuivis. L’économie informelle contribue à la fuite des capitaux, justifiant ainsi le renforcement du contrôle des changes.
Dans le cadre de l’opération Mayotte Place Nette, 30 hectares de cultures illégales ont été détruits, 136 745€ de saisies douanières réalisés, 4 tonnes de pêches illégales et 300 000€ d’avoirs criminels saisis.
Enfin, la lutte contre l’immigration clandestine passera également par le maintien d’un rapport exigeant avec les États voisins et notamment, avec les Comores. Tout en ménageant des espaces de dialogue, la France devra être particulièrement exigeante sur la lutte contre les départs clandestins, sur les retours de ressortissants en situation irrégulière et, plus généralement, pour réaffirmer sans cesse l’appartenance de Mayotte à la République française.
Le ministère de l’Europe et des Affaires étrangères prend toute sa part de cet effort et restera fortement mobilisé en soutien à l’atteinte de cet objectif :
– dans le cadre d’un dialogue bilatéral exigeant avec les pays d’origine, notamment avec les Comores, sur le volet migratoire qui permet de faire valoir la priorité que constitue pour la France la lutte contre l’immigration clandestine à Mayotte. La coopération en matière de retour a vocation à être renforcée dans le cadre du dialogue migratoire global que la France conduit avec les Comores, conformément au Plan d’action conjoint de La Valette (PACV), incluant notamment un soutien accru aux garde-côtes comoriens et une lutte renforcée contre les causes profondes des migrations ;
– dans le cadre de la négociation en cours d’accords bilatéraux avec les pays la région des Grands Lacs, d’où proviennent un nombre croissant de ressortissants arrivant à Mayotte avec l’aide de réseaux criminels. Ces accords permettront de définir les procédures opérationnelles permettant l’identification et la documentation des ressortissants en situation irrégulière, en vue de leur retour. Bien que l’obligation pour un État d’admettre le retour de ses nationaux découle de la coutume internationale, un cadre juridique précis facilite les procédures (délais, documents reconnus, points de contact, etc.) ;
– dans le cadre de la lutte renforcée contre les causes profondes des migrations à travers le « Plan de Développement France-Comores » (PDFC) qui incorpore des actions de coopération sur des secteurs clés de la prévention des départs tels que la santé, l’éducation, la formation professionnelle et l’agriculture. Une revue de ces actions de coopération est engagée pour viser davantage d’efficacité dans la lutte contre les causes profondes des migrations ;
– dans le cadre d’un appui à la modernisation de l’état civil aux Comores (AMECC), qui a permis des avancées significatives dans la réforme du cadre juridique de l’état civil. La seconde phase de ce projet (démarrée en 2024) vise à opérationnaliser ces réformes par l’informatisation et le recensement à vocation d’état civil.
1.2. La nécessité de mieux contrôler l’accès au territoire mahorais
Mayotte a intégré le champ d’application du CESEDA le 26 mai 2014, date de l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2014-464 du 7 mai 2014 portant sur l’extension et l’adaptation du CESEDA à Mayotte. Un arrêté en date du 4 février 2015 relatif aux documents et visas exigés pour l’entrée sur le territoire de Mayotte précise le régime de circulation et les conditions d’entrée des étrangers tiers. L’ordonnance a eu pour objectif de transposer les directives européennes relatives à la migration légale et au retour suite à l’accès de Mayotte au statut de région ultrapériphérique et de rapprocher le droit applicable avec le droit commun sauf adaptations nécessaires.
Les dispositions législatives adoptées depuis lors se sont appliquées à Mayotte, sous réserve de certaines adaptations, en particulier celles motivées, selon la décision du Conseil constitutionnel n° 2018-770 DC du 6 septembre 2018, par les « caractéristiques et contraintes particulières », qui permettent au législateur, « afin de lutter contre l’immigration irrégulière à Mayotte, d’y adapter, dans une certaine mesure, non seulement les règles relatives à l’entrée et au séjour des étrangers, mais aussi celles régissant l’acquisition de la nationalité française à raison de la naissance et de la résidence en France ».
Au regard de la situation spécifique de Mayotte il apparaît nécessaire de mieux contrôler l’accès au territoire mahorais au regard de la pression migratoire particulière qu’il subit.
Ce meilleur contrôle passe par un durcissement des conditions d’accès au séjour pour l’immigration familiale en les adaptant à la situation particulière de Mayotte, une amélioration des dispositifs de lutte contre les reconnaissances frauduleuses de paternité et de maternité et de répondre à l’urgence de la situation migratoire par des mesures exceptionnelles en matière de lutte contre l’immigration irrégulière et de facilitation des éloignements.
1.3. Les outils de la fermeté face à l’habitat illégal, qui constitue une entrave à la réalisation des projets du territoire visant à améliorer le quotidien des Mahorais
Au titre de la reconstruction, une feuille de route « du bidonville au logement » sera finalisée afin d’accélérer la résorption de l’habitat illégal et insalubre, en lien avec les collectivités territoriales et les acteurs du logement.
Une opération d’intérêt nationale (OIN) devant mobiliser l’ensemble des outils existants et s’appuyer sur un régime et des moyens d’exception pour mieux résorber les zones d’habitat informel considérées comme prioritaires, dynamiser les projets d’aménagement, développer l’ingénierie de projet et tenir le calendrier des procédures sera mise en œuvre, en lien avec les collectivités territoriales.
Les trois collectivités concernées, qui comptent 57 % de l’habitat précaire de Mayotte (Mamoudzou, Dembéni et Koungou) doivent délibérer prochainement pour confirmer leur adhésion à ce projet de OIN.
Depuis 2019, des opérations d’évacuation et de démolitions sont réalisées dans le cadre de la loi n° 2018– 1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique. L’opération Wuambushu en 2023, puis « Place nette » en 2024 ont permis de passer le cap du millier d’hébergements résorbés.
Les opérations de résorption de l’habitat indigne vont également se poursuivre avec la destruction programmée de près de 1 300 constructions.
Le renforcement de la réponse de l’État repose sur une action ciblée visant les constructions sans droit ni titre dans un secteur d’habitat informel, en particulier à travers le renforcement des outils par le biais de la loi Habitat dégradé en 2024.
La loi de programmation de la refondation de Mayotte porte des dispositifs ambitieux visant à renforcer la lutte contre l’habitat illégal. Toutefois, elle passera aussi, et même avant tout, par un renforcement des effectifs de sécurité présents sur l’île mais aussi par la lutte contre l’immigration clandestine.
2. La refondation repose sur une triple ambition : protéger les Mahorais, garantir l’accès aux biens et ressources essentiels et développer les leviers de la prospérité de Mayotte
2.1. Protéger les Mahorais
2.1.1. Protéger les Mahorais face aux aléas naturels
Les aléas « vent cyclonique » et « sismique » touchent l’ensemble de Mayotte. 92 % du territoire est aussi concerné par d’autres aléas « risques naturels » que sont le glissement de terrain, les inondations, la submersion marine et le recul du trait de côte.
Les épisodes sismo-telluriques liés à l’éruption du volcan Fani Maoré à 50 kilomètres à l’Est de Mayotte ont produit un enfoncement de 13 centimètres en Grande Terre et jusqu’à 19 centimètres en Petite Terre. Cela renforce l’exposition de certains quartiers au risque d’inondation et une accélération de l’érosion du trait de côte.
La réalisation des campagnes scientifiques et la mise en service des outils de surveillance et de prévision sera soutenue par l’État, de même que la réparation et l’amélioration du système de surveillance sismologique. Le déploiement en Petite Terre du radar Météo France destiné à la prévision, l’anticipation et la mesure des phénomènes météorologiques et sismiques constitue une priorité.
Les actions de connaissance des sous-sols et des phénomènes géologiques (recherche d’emplacements de forage, connaissance du continuum terre-mer) seront également accompagnées.
La préservation de la population et le développement du territoire imposent d’utiliser tous les outils de la prévention des risques :
– connaissance des aléas ;
– planification spatiale ;
– choix d’aménagement et d’urbanisme ;
– normes de construction et équipements spécifiques ;
– préparation des acteurs du territoire, dont les acteurs de la sécurité civile, les entreprises et la population dans son ensemble.
La politique de prévention des risques doit reposer en premier lieu sur la mise en œuvre des plans de prévention des risques (PPR). Le déploiement de 17 PPR Naturels communaux traitant des mouvements de terrain, des inondations et des séismes, et un PPR Littoral traitant de la submersion marine et du recul du trait de côte à l’échelle du territoire sera effectué d’ici 2027.
L’émergence d’une culture et d’une mémoire du risque représente un enjeu fort. L’État mettra en place de manière prioritaire un plan d’actions de sensibilisation aux risques naturels. Le concours de l’observatoire national des risques naturels sera recherché. Une démarche globale d’étude et de recherche sur la résilience des habitats et des systèmes homme-environnement sera proposée, dans l’objectif de faire de Mayotte un laboratoire de l’adaptation au changement climatique.
En matière de prévention des inondations, l’État veillera à la bonne mise en œuvre du plan de gestion des risques d’inondations (PGRI) couvrant la période 2022-2027.
Au plus tard le 1er mars 2026, le Gouvernement transmet au comité de suivi de la loi de programmation pour la refondation de Mayotte un état des lieux des plans Orsec établis sur les risques à Mayotte ainsi que des préconisations d’évolution.
2.1.2. Protéger les Mahorais face à l’insécurité
La refondation nécessite de prendre les mesures nécessaires au maintien durable de l’ordre public, en lien avec la lutte contre l’immigration irrégulière.
Pour l’année 2024, les forces de sécurité intérieure font état de :
– 227 procédures « violences intrafamiliales » ;
– 1 940 faits d’atteinte volontaire à l’intégrité physique dont 5 homicides et 35 tentatives d’homicide ;
– 2 255 faits d’atteinte aux biens ;
– 2 354 faits d’atteinte à la tranquillité publique ;
– 169 faits de violence dans les transports scolaires.
À travers le renforcement des infrastructures et des effectifs, l’État s’engage à garantir aux Mahorais la sécurité et la tranquillité publiques.
Le doublement des effectifs de police et de gendarmerie depuis 2017 a permis et permet toujours de conduire des opérations (Shikandra, Wuambushu, Mayotte Place Nette) qui ont obtenu des résultats significatifs en matière d’arrestations et d’éloignement.
Les opérations Wuambushu et Mayotte Place Nette ont notamment permis l’arrestation de 160 cibles prioritaires.
La stratégie de l’État en matière de lutte contre l’insécurité reposera sur une action en profondeur et de long terme que des opérations dédiées pourront venir accélérer.
Pour renforcer les effectifs, l’État organisera la formation de 300 gendarmes et policiers auxiliaires mahorais pour assister les unités locales et se préparer à exercer les missions de sécurité.
La création d’une antenne de l’Office de lutte contre le trafic illicite de migrants (OLTIM) en 2023 renforce la lutte contre les filières de passeurs, et en priorité les filières africaines. En 2023, six filières ont été démantelées et de lourdes condamnations, allant jusqu’à sept ans d’emprisonnement, ont été prononcées.
L’État engagera un renforcement spécifique des moyens de la gendarmerie avec :
– la création des brigades de Dzoumogné (10 gendarmes) et Bandrélé (10 gendarmes) et du peloton de surveillance et d’intervention de la gendarmerie (PSIG) de Dembéni (20 gendarmes) ;
– le renfort du centre opérationnel de renseignement de la gendarmerie (5 gendarmes) ;
– des renforts de police judiciaire (10 effectifs).
La mise en adéquation du fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD) avec les besoins exprimés par les autorités locales sera réalisée d’ici au 31 décembre 2026.
Le maintien de l’effort opérationnel et le renforcement des effectifs et des moyens des forces de sécurité s’accompagnera d’investissements pour soutenir le système judiciaire et carcéral :
– la construction d’une cité judiciaire sera engagée avec un objectif de début des travaux en 2025 ;
– un centre éducatif fermé sera construit. L’objectif de lancement des travaux sera également fixé à 2025 ;
un deuxième centre pénitentiaire d’une capacité de 400 places et incluant un centre de semi-liberté de 20 places sera construit. Le début des travaux est prévu en 2027.
La montée en puissance des effectifs de police et de gendarmerie à Mayotte s’accompagnera d’une action de formation. En particulier, tous les magistrats affectés à Mayotte seront formés à la lutte contre les violences intrafamiliales, en particulier sexuelles.
Le nombre d’intervenants sociaux en commissariat et en gendarmerie va croître à mesure que seront déployés des effectifs supplémentaires de police et de gendarmerie.
En lien avec le secteur associatif, le dispositif « Nouveau départ » sera déployé à Mayotte au plus tard le 1er janvier 2026 en vue d’organiser une prise en charge rapide, globale et adaptée des victimes.
Enfin, la loi porte en elle-même des mesures visant à renforcer les capacités d’action des forces de sécurité intérieure. Les dispositions sont notamment relatives aux visites domiciliaires aux fins de recherche d’armes, à la remise des armes ou à la possibilité offerte aux officiers et agents de police judiciaire de traverser un local tiers – y compris un domicile – pour pénétrer dans les lieux à usage professionnel.
2.1.3. Mayotte, une priorité de la stratégie de défense française dans l’océan Indien
Dans un contexte de concurrence régionale et internationale et de militarisation accélérée qui modifient les équilibres actuels et augmentent le niveau de menace dans la zone, la protection de Mayotte et des territoires sous souveraineté française dans le canal du Mozambique constituent une priorité de la stratégie de défense française dans l’océan Indien.
Ainsi, le positionnement des forces armées dans la zone sud de l’océan Indien (FAZSOI) en tant que force de souveraineté et force de présence continuera à être affirmé à travers la conduite de missions de souveraineté dans les zones maritimes afférentes à Mayotte et d’actions de coopération régionale avec les forces armées de la zone sud océan Indien.
Les FAZSOI poursuivront leur action de lutte contre la piraterie, la pêche illicite et les trafics de toute nature, en particulier le narcotrafic.
L’État sera particulièrement vigilant face à toute tentative d’ingérence étrangère ou de développement du fondamentalisme religieux visant à déstabiliser le territoire et mettre en péril la paix civile à Mayotte.
Le fondamentalisme religieux ne doit pas venir fragiliser le modèle de l’islam mahorais reposant sur l’autorité des cadis et l’entraide, et qui représente l’un des ciments du vivre-ensemble de l’archipel, dans le respect de la loi du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République.
La présence stratégique d’unités des FAZSOI sur l’île sera confortée et renforcée. Le 5e régiment étranger bénéficiera d’une augmentation de ses effectifs de 30 % à l’horizon 2030, avec la mise en place des capacités supplémentaires prévues dans la loi de programmation militaire, parmi lesquelles figurent des moyens du génie.
Le format de la base navale de Mayotte sera adapté afin de participer à la surveillance permanente des approches maritimes du territoire mahorais (via le poste de commandement de l’action de l’État en mer) et d’assurer le soutien des bâtiments de la Marine nationale basés ou faisant escale à Mayotte. L’augmentation du nombre des navires intercepteurs des forces de sécurité intérieure fera l’objet d’une étude particulière afin de permettre l’identification d’un lieu propice aux opérations de maintenance dédiées à ces vecteurs.
2.2. Garantir l’accès aux Mahorais aux biens et ressources essentiels
Le 3 février 2025, le ministère des Armées a décidé la création d’un bataillon temporaire de reconstruction de l’île, afin d’engager les premiers chantiers, en préalable de la reconstruction pérenne de Mayotte. Entre 350 et 400 soldats sont ainsi mobilisés, au service des Mahorais.
2.2.1. Garantir l’accès à l’eau potable et à l’assainissement aux Mahorais : des investissements programmés
L’accès à l’eau potable constitue une priorité pour éviter la précarisation chronique des Mahorais déjà soumis à de fortes carences. Les épisodes récurrents de stress hydrique affectent directement la qualité de vie des habitants et freinent le développement économique.
Les collectivités territoriales de Mayotte ont délégué leurs compétences de distribution d’eau et de gestion de l’assainissement collectif au syndicat mixte « Les Eaux de Mayotte » (LEMA), maître d’ouvrage des principaux travaux relatifs à l’alimentation en eau potable et à l’assainissement des eaux usées.
Le syndicat LEMA fait l’objet d’un accompagnement de l’État dans le cadre d’un contrat d’accompagnement renforcé (2024-2027). Un contrat de progrès 2022-2026 définit les objectifs et performances du syndicat autour de la gouvernance, de la gestion du patrimoine, de la qualité du service rendu aux usagers en matière d’eau potable et d’assainissement.
Le sous-investissement dans la production et le réseau de distribution durant plusieurs décennies, l’impact de la pression démographique sur l’équilibre offre-demande, ainsi que des épisodes de sécheresse récurrents expliquent cette situation.
Pour remédier à celle-ci, le « Plan Eau Mayotte » portant sur des actions à mener entre 2024-2027 est en cours de mise en œuvre, pour un montant cumulé de 730 millions d’euros d’investissement. Ce plan a été précédé d’une réorganisation du syndicat LEMA.
Le Plan Eau Mayotte doit permettre d’éviter les crises récurrentes liées au manque de disponibilité d’eau potable et d’améliorer le réseau d’assainissement, notamment en prévoyant études et travaux destinés :
– à équiper Mayotte d’une deuxième usine de dessalement à Ironi Be opérationnelle en 2026, d’une troisième retenue collinaire opérationnelle, de réservoirs tampons ;
– à promouvoir la réalisation de nouveaux forages et de captages supplémentaires en rivières ;
– à développer un programme de recherche de fuites et de réparations ;
– à améliorer l’assainissement collectif : financement de nouvelles stations d’épuration, extension des réseaux et remise à niveau des anciennes installations.
L’État s’engage à la réalisation des deux infrastructures prioritaires que représentent la deuxième usine de dessalement d’Ironi Bé et la troisième retenue collinaire d’Ouroveni.
Dans le cadre de l’accompagnement du syndicat LEMA, l’État poursuit un objectif de fin des « tours d’eau » au profit d’une eau courante disponible en continu sur tout le territoire d’ici la fin de l’année 2026.
L’enjeu de ces prochaines années est ainsi le maintien de l’effort d’investissement et d’entretien des installations. Cela concernera en particulier la sécurisation de l’usine de dessalement de Petite Terre, exposée à l’érosion du trait de côte et pour laquelle des travaux d’extension seront réalisés.
Dans l’attente de la mise en service effective des futures infrastructures stratégiques (deuxième usine de dessalement, troisième retenue collinaire), l’État s’engage – en lien avec les collectivités – à étudier toute solution nouvelle susceptible de soutenir la résilience du territoire à court terme.
En matière d’assainissement, les différents projets contenus dans le contrat de progrès 2022-2026 seront réalisés. Il s’agit principalement de travaux sur les réseaux et les stations de traitement des eaux usées.
En complément des 60 millions d’euros d’investissements prévus en 2025, l’État s’engage à augmenter les moyens alloués au Plan Eau Mayotte en fonction des besoins.
2.2.2. Garantir aux Mahorais l’accès régulier à l’électricité
Face aux aléas naturels, l’État mettra en œuvre les mesures nécessaires afin de garantir la résilience des installations de production et distribution d’électricité. L’équipement systématique en groupes électrogènes des services d’intérêt général doit notamment contribuer à la résilience.
Pour l’électricité comme pour l’ensemble des fluides, l’opportunité d’enfouissement des réseaux fera l’objet d’une analyse systématique en cas de travaux.
Pour répondre aux attentes de la population mahoraise en termes de qualité du service public de la production, de la distribution et de la commercialisation de l’électricité, une nouvelle programmation pluriannuelle de l’énergie sera très prochainement adoptée. L’engagement de l’État au sein d’Électricité de Mayotte, de façon directe ou indirecte, sera examiné dans ce cadre.
2.2.3. Établir une trajectoire de souveraineté alimentaire pour le territoire passant par le développement de l’agriculture, de la pêche et de l’aquaculture
Mayotte dispose d’un plan de souveraineté alimentaire depuis le 7 juillet 2023. Ce plan fixe une trajectoire à horizon 2030, avec par exemple un objectif de taux de couverture des besoins de 90 à 100 % pour les fruits et légumes frais, 10 % de production locale pour la volaille de chair et 100 % pour les œufs.
Un plan régional de l’agriculture durable 2023-2029 a également été approuvé le 11 septembre 2024. Il définit 78 actions concourant à l’objet de faire du secteur primaire un moteur majeur du développement endogène et durable.
Malgré les dégâts causés par le passage de Chido et Dikeledi, l’État réaffirme l’objectif de mise en œuvre des plans stratégiques d’ici 2030. Les principaux axes sont :
– l’amélioration de l’accès au foncier et la réhabilitation des pistes rurales dans les zones à potentiel agricole ;
– le soutien à la professionnalisation de l’agriculture et l’amélioration des conditions d’exploitation ;
– le reboisement du territoire ;
– le soutien à la structuration des filières, la montée en gamme des produits de l’agriculture et la valorisation des modèles agricoles mahorais ;
– l’accompagnement des acteurs agricoles dans leurs démarches financières.
L’État accompagnera étroitement les professionnels du secteur dans l’accomplissement des démarches relatives au fonds de secours pour les outre-mer (FSOM) dont l’objet est d’indemniser les pertes de récolte et de fonds des exploitations, ainsi que du régime d’aide exceptionnelle en faveur des exploitations agricoles de Mayotte suite aux pertes agricoles considérables causées par le passage de Chido.
Une attention toute particulière sera portée au redressement et au développement :
– des filières fruitières et maraîchères pour réduire au maximum le délai de retour en production ;
– du secteur agroalimentaire qui a vocation à être l’un des piliers de la souveraineté alimentaire, en particulier à travers la production laitière, de volailles et d’œufs ;
– des filières d’excellence telles que la production de vanille ou d’ylang-ylang.
Une attention particulière sera également portée à la nécessité de sécuriser l’usage agricole de l’eau dans les exploitations, à travers l’investissement dans des équipements de prélèvement d’eau agricole et de récupération des eaux de pluie.
Alors que la filière agricole a été particulièrement affectée par le passage du cyclone Chido, l’État se positionne en soutien des agriculteurs pour la relance des exploitations et des cultures afin d’accélérer la production de fruits et légumes sur le territoire.
La structuration de la filière pêche est nécessaire pour que le territoire bénéficie des retombées économiques issues de la présence de la ressource halieutique de la zone économique exclusive. Cette structuration implique la création d’un comité régional des pêches maritimes et des élevages marins à horizon 2027. L’État soutiendra sa mise en place, ainsi que celle d’une structure préfiguratrice de ce comité.
L’État accompagnera les investissements nécessaires à la formation des pêcheurs professionnels, à la structuration des points de débarquement des produits de la pêche, en particulier à travers la mise en place de pontons, la mise en service des halles de pêche et le financement de poissonneries.
L’État apportera un appui – en particulier à travers la mobilisation du fonds européen pour les affaires maritimes, la pêche et l’aquaculture – aux éventuels projets portés par les collectivités ou les professionnels pour relancer le secteur de l’aquaculture.
Pour soutenir la professionnalisation des filières, l’État veillera à la cohérence de l’offre de formation initiale et continue disponible sur le territoire, qu’il s’agisse des métiers de la mer ou de l’agriculture.
Les recettes liées aux redevances des armateurs seychellois constituent des fonds prioritaires pour le développement de la filière pêche mahoraise.
2.2.4. Garantir l’accès à une éducation de qualité dans le département le plus jeune de France
L’engagement structurant de l’État consiste à mettre totalement fin à la rotation scolaire et au dispositif de classes itinérantes en vue de la rentrée 2031. Les parents de l’enfant qui naîtra demain sauront que, lorsqu’il entrera au cours préparatoire, il bénéficiera de vingt-quatre heures d’école par semaine.
Le dynamisme de la population scolaire est avéré, avec + 34 % d’élèves entre 2013 et 2023. Il manquait globalement 1 200 classes avant le cyclone Chido pour répondre aux besoins.
Il y sera remédié avec un investissement d’ampleur. L’État devait déjà contribuer dans le cadre du contrat de convergence et de transformation à la construction des classes de primaire et à l’augmentation des capacités dans le secondaire à hauteur de 680 millions d’euros, ainsi qu’à l’extension de l’université de Mayotte à hauteur de 12 millions d’euros. Dans ce cadre, l’école pour tous sera affirmée comme une priorité, notamment à travers le déploiement des pôles d’appui à la scolarité et de dispositifs de scolarisation dédiés aux élèves en situation de handicap.
En complément, face à l’ampleur des dommages liés au cyclone, l’État participera à la reconstruction des bâtiments publics, sur la base d’une enveloppe de 100 millions d’euros votée en loi de finances pour 2025 et assumera un rôle de conduite d’opérations dans cette période de crise.
L’université de Mayotte conduira une politique d’ouverture régionale, en vue d’offrir des mobilités à ses étudiants à l’échelle de l’océan Indien. Cet Erasmus de l’océan Indien contribuera à sa montée en puissance en vue de devenir une université de plein exercice.
Dans le cadre de la refondation, l’offre de formation de l’université de Mayotte sera renforcée afin d’orienter un nombre plus important d’étudiants vers l’enseignement. Se prémunir contre l’instabilité des équipes suppose de former au maximum des enseignants issus du territoire. En complément, au cours de l’année 2025, il sera établi un plan d’attractivité et de fidélisation des enseignants. Ses modalités font l’objet d’un dialogue social. Il reposera à la fois sur des incitations indemnitaires renforcées et sur une valorisation des années d’exercice à Mayotte dans le déroulement de la carrière des enseignants.
Le ministère chargé de l’emploi sera tout particulièrement impliqué sur le soutien à l’apprentissage.
2.2.5. Mettre en adéquation l’offre de soins avec les besoins des Mahorais
Mayotte est caractérisée par une dynamique démographique, le niveau de vie médian le plus faible de France et trois quarts de la population vivant sous le seuil de pauvreté, une alimentation peu variée et une prévalence importante de l’obésité.
Concernant les maladies non transmissibles, un sur-risque est constaté à Mayotte par rapport à l’hexagone concernant l’hypertension artérielle (HTA), la santé bucco-dentaire défaillante, le diabète de type 2, l’infarctus du myocarde et maladies coronariennes, les insuffisances respiratoires chroniques, les accidents vasculaires cérébraux (AVC) et la cirrhose hépatique.
L’État s’engage à la fois à développer l’offre de soins et à renforcer sa politique de santé publique ou de prévention.
Le système de soins mahorais est principalement organisé autour du Centre hospitalier de Mayotte (CHM) qui concentre la totalité des capacités hospitalières et qui réalise également l’essentiel des consultations et des soins de premier recours.
L’État effectuera des travaux d’ampleur pour moderniser le site du CHM de Mamoudzou. Il développera l’offre de soins sur l’ensemble du territoire mahorais, avec la montée en puissance des centres médicaux de référence et la réouverture de tous les dispensaires. Un calendrier d’investissement pour les travaux de modernisation du CHM de Mamoudzou et la réouverture de l’ensemble des dispensaires de l’île seront assurés avant le 31 décembre 2025.
Les centres médicaux de référence, au nombre de quatre, maillent le territoire de Mayotte et organisent les prises en charges médicales de premier recours. Leur plateau technique va être étoffé selon une logique de complémentarité entre sites. Un calendrier pour la réorganisation territoriale des centres médicaux de référence sera élaboré avant le 31 décembre 2025.
L’État porte l’engagement d’un renforcement de l’offre de soins à Mayotte à travers la construction d’un second site hospitalier. Un plan d’investissement et un calendrier des travaux pour la construction du second site hospitalier seront élaborés avant le 31 décembre 2025.
La restructuration de l’offre de soins mahoraise et la consolidation du maillage territorial doivent s’accompagner d’une démarche renforcée visant à attirer et fidéliser les professionnels de santé à Mayotte. Dans la continuité des efforts déjà engagés ces dernières années, le Gouvernement présentera au printemps 2025 un plan attractivité – fidélisation visant à mieux valoriser l’engagement des professionnels de santé à Mayotte, consolider l’offre de formation (avec notamment la création d’un deuxième institut de formation en soins infirmiers au plus tard en 2026 et la création d’un institut régional du travail social) et structurer des partenariats avec l’hexagone.
L’État s’engage par ailleurs à créer les conditions du développement de la médecine de ville. Suite au cyclone, l’agence régionale de santé a accompagné les professionnels dans leur reprise d’activité, en proposant notamment une aide de 5 000 € pour permettre d’opérer les premiers travaux nécessaires de restructuration du bâti et de réouverture de l’offre de soins libérale.
Enfin, le Gouvernement veille à accompagner une politique de santé publique pour le territoire. À titre d’exemple, des actions d’informations et d’accès aux services de santé en matière de sexualité et de procréation, notamment à la contraception, à l’interruption volontaire de grossesse et aux dépistages et traitements contre les infections sexuellement transmissibles (IST) seront menées en faveur de la santé sexuelle des Mahoraises et des Mahorais. Un plan d’investissement et un calendrier pour la mise en place des actions d’informations et d’accès aux services de santé en matière de sexualité et de procréation à Mayotte seront élaborés avant le 31 décembre 2025.
Dans le champ du handicap, 31,3 millions d’euros seront déployés au titre du développement de nouvelles solutions. Concernant les personnes âgées, 9,1 millions d’euros seront dédiés au développement d’une offre médico-sociale.
La maison départementale des personnes handicapées (MDPH) continuera d’être accompagnée pour faciliter les parcours des personnes.
2.2.6. Atteindre l’égalité réelle en 2031 à travers une convergence économique et sociale
La convergence économique sera créatrice de richesses pour le plus grand nombre et facilitera la convergence sociale.
La convergence sociale consiste à aligner progressivement le système de protection sociale de Mayotte (santé, famille, retraites, emploi), autant en matière de prestations sociales et de droits que d’obligations et de sources de financement.
Le processus de convergence engagé avec la départementalisation devait se faire « en une génération », soit d’ici 2036. L’État s’engage à accélérer la convergence sociale en vue d’une effectivité dès 2031, avec une trajectoire soutenable, tant pour l’économie que pour la société mahoraise, post Chido. En vue de faciliter la transition la hausse des cotisations sociales pourra, sans s’éloigner trop fortement de celle des prestations pour assurer une soutenabilité d’ensemble, être plus progressive, pour s’achever au plus tard en 2036.
Ce processus de rapprochement démarrera le plus rapidement possible avec une évolution progressive du niveau des prestations et de celui des cotisations et de la fiscalité qui les financent. Ainsi, dès le 1er janvier 2026, sera enclenché un processus de convergence selon un calendrier précis et des modalités offrant de la visibilité aux acteurs économiques.
En complément, en 2026, la complémentaire santé solidaire gratuite sera attribuée automatiquement aux bénéficiaires de l’allocation aux adultes handicapés et de l’allocation spéciale pour les personnes âgées et la protection universelle maladie sera déployée à Mayotte, pour améliorer l’accès aux soins.
L’État affirme un principe de priorité du travail, et de la reconnaissance notamment pécuniaire de celui-ci. C’est pourquoi la convergence du SMIC net sera effective au plus tard en 2031 et selon un calendrier qui sera défini en lien avec les acteurs économiques et sociaux. La mise en place de la zone franche globale rendra, par ailleurs, ce renchérissement du coût du travail soutenable pour les entreprises. Dès alignement du SMIC net à Mayotte sur le SMIC net national, la prime d’activité sera, en cohérence, également fixée à 100 % de sa valeur nationale.
Un appui à la structuration des filières sera également mis en place, avec l’appui des financements France 2030. Il devrait en résulter une amélioration du financement des entreprises par le secteur bancaire et BPI France sera particulièrement mobilisée sur ce sujet. L’innovation et l’accès au numérique doivent également constituer des priorités de la future stratégie dédiée à Mayotte.
En cohérence avec la priorité en faveur du travail, la convergence du niveau des allocations individuelles de solidarité interviendra après celle du SMIC net. Cela vaut en particulier pour le revenu de solidarité active (RSA) et l’allocation aux adultes handicapés (AAH) à horizon 2031. De même, le niveau des naissances à Mayotte n’appelle pas d’alignement rapide des prestations familiales, y compris la prestation d’accueil du jeune enfant.
Dans le champ du handicap, 22 millions d’euros seront déployés pour de nouvelles solutions pour les personnes en situation de handicap lourd et 7 millions pour des formes d’hébergement adaptées.
Concernant l’organisation de la sécurité sociale, la caisse de mutualité sociale agricole d’Armorique est aujourd’hui gestionnaire de la protection sociale des agriculteurs mahorais, sauf pour les prestations familiales et l’accueil de proximité, assurés par la caisse de sécurité sociale de Mayotte. Dans des délais permettant d’assurer la continuité et la qualité du service rendu, la caisse de sécurité sociale de Mayotte renforcera progressivement son implication dans la gestion des exploitants agricoles en vue de l’assurer si les conditions opérationnelles sont réunies.
2.2.7. Augmenter massivement l’offre de logement dans le cadre de la reconstruction
En complément des actions engagées en faveur de la résorption de l’habitat illégal, l’État doit porter une politique ambitieuse en matière de construction de logements neufs, en lien avec les opérateurs et les collectivités territoriales.
L’objectif de reconstruction de 24 000 logements au cours des dix prochaines années avec une livraison de 1 500 logements dès 2027 sera ajusté à la lumière des conclusions de la mission inter-inspections en charge de l’évaluation des dégâts causés par le cyclone Chido. En matière de logement social, la déclinaison territoriale du futur Plan logement dédié aux outre-mer (PLOM) définira, dès 2025, un objectif de constructions annuelles de logements sociaux et comprenant un objectif spécifique de logements locatifs très sociaux, partagé avec l’ensemble des acteurs. L’accessibilité sera pensée en amont de chaque projet.
Les constructions nécessaires au titre de l’offre sanitaire et médico-sociale seront notamment considérées comme prioritaires.
La réalisation des projets de renouvellement urbain portés par l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) à Mayotte constitue un objectif prioritaire de l’État, qui continuera à accompagner les collectivités dans ces opérations. Les conventions de renouvellement urbain de Koungou, Mamoudzou et Petite Terre, qui représentent 119 millions d’euros d’investissement dont 71 millions d’euros d’aides de l’ANRU, sont aujourd’hui engagées entre 70 % et 100 %, et l’ensemble des investissements seront engagés d’ici juin 2026.
La création d’un nouvel établissement public dans le prolongement de la loi d’urgence pour Mayotte, une politique volontariste de titrisation associant le conseil départemental, une meilleure identification des zones à bâtir à travers le schéma d’aménagement régional doivent permettre de mieux mobiliser le foncier au profit de la construction de logements.
La régularisation du cadastre fera l’objet d’un plan d’action spécifique construit entre l’État et les collectivités territoriales.
L’État veillera à associer la commission d’urgence foncière – acteur essentiel de cette phase de régularisation foncière – à la réalisation de ces travaux et à renforcer ces moyens d’action.
L’établissement public de la reconstruction viendra renforcer significativement l’ingénierie à Mayotte, nécessaire à réaliser efficacement et rapidement les infrastructures ou opérations d’aménagement d’ampleur attendues par la population.
Aménageurs, bailleurs et constructeurs pourront bénéficier des simplifications du droit de l’urbanisme prévues par les récents textes pour accompagner l’effort de reconstruction. La création prochaine de l’opération d’intérêt national (OIN) à Mamoudzou, Dembéni et Koungou permettra aussi de mobiliser des outils spécifiques.
L’État sera vigilant vis-à-vis des coûts de construction et de l’accès aux matériaux. Les règles de construction et celles qui régissent l’approvisionnement en matériaux feront ainsi l’objet d’un travail d’adaptation, comme l’a prévu la loi d’urgence pour Mayotte, sans négliger les impératifs de qualité et de sécurité pour les Mahorais, notamment en matière d’adaptation aux aléas naturels.
Un plan de formation des artisans et TPE/PME sera décliné rapidement, tandis que les Mahorais bénéficieront de conseils s’agissant de l’auto-construction. L’information de la population sur les dispositifs d’aide et d’accompagnement en matière d’habitat sera notamment améliorée grâce à l’Agence d’information sur le logement de Mayotte (ADIL 976), agréée le 7 février dernier.
2.2.8. Veiller à la préservation de l’environnement à travers la gestion durable des déchets et la transition énergétique et la restauration de la forêt
98 % des déchets ménagers et assimilés à Mayotte sont traités par enfouissement. Le territoire dispose d’une importante marge de progression en termes de développement des filières d’économie circulaire.
La sortie du tout-enfouissement constitue une priorité en matière de traitement des déchets.
L’enjeu pour Mayotte est de s’engager dans une trajectoire ambitieuse en matière de rattrapage structurel qui reposera sur le développement des :
– infrastructures nécessaires au rattrapage ;
– filières de valorisation et de recyclage ;
– démarches innovantes de prévention des déchets (réemploi, réparation).
À court terme, l’État engagera une réflexion prioritaire sur l’hypothèse de l’installation d’une unité de valorisation énergétique.
Dans cet effort de rattrapage, l’État soutiendra les investissements relatifs aux déchèteries fixes ou mobiles, au fonctionnement optimal de l’actuelle installation de stockage des déchets non dangereux (ISDND) de Dzoumogné ou aux centres de tri multi-filières.
L’État veillera à la mobilisation de l’ensemble des acteurs de la gestion durable des déchets : éco-organismes, collectivités, syndicat dédié, entreprises, population, associations. L’accompagnement de l’agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME) sera recherché.
La refondation de Mayotte doit conduire à sortir le territoire de la dépendance aux énergies fossiles, importées à hauteur de 98 %.
La politique énergétique guidée par les programmations pluriannuelles de l’énergie (PPE) sera mise à jour afin de doter le territoire d’objectifs au moins jusqu’à l’horizon 2028.
La stratégie qui sera définie veillera notamment à porter des projets en matière de conversion à la biomasse liquide des installations actuelles et fixer des objectifs en matière d’augmentation de puissance installée en photovoltaïque.
Une stratégie de reboisement sera mise en œuvre pour restaurer la forêt mahoraise, qui représente 16 % du territoire. Son élaboration et sa mise en œuvre reposeront sur une coopération entre les services de l’État, l’Office national des forêts et le conseil départemental, avec l’appui du Conservatoire botanique national de Mascarin.
Cette stratégie accordera une importance toute particulière à la lutte contre les mises en culture illégales durant la saison des pluies et la lutte contre les incendies dès le retour de la saison sèche.
3. Développer les leviers de la prospérité de Mayotte
3.1. Le préalable d’un recensement exhaustif pour bâtir l’avenir de Mayotte
L’État s’engage à réaliser un recensement démographique exhaustif de la population résidant à Mayotte. À l’issue de ce recensement, l’État procède à une actualisation de ses dotations attribuées aux collectivités territoriales de Mayotte, afin de refléter les données démographiques actualisées.
Celui-ci devra intervenir dans un délai de 6 mois après la promulgation de la loi de programmation pour Mayotte.
3.2. Grandir et se construire à Mayotte : créer les conditions d’un épanouissement de la jeunesse sur le territoire
Dans le cadre de la refondation, l’État s’engage à réaliser les investissements nécessaires visant à donner à la jeunesse mahoraise des perspectives d’épanouissement à Mayotte.
L’État poursuivra le développement des services et infrastructures nécessaires à une société épanouie et apaisée. Les équipements et infrastructures du sport et de la culture seront soutenus (mise à niveau et aux normes des équipements existants) et développés (financement de nouveaux équipements en cas de carences sur le territoire concerné).
La refondation de Mayotte accordera une part importante à l’accompagnement des actions culturelles.
Le Pôle culturel de Chirongui – unique équipement culturel professionnel de l’île – dédié aux arts contemporains pourra servir de source d’inspiration pour renforcer le maillage des institutions culturelles du territoire.
Une attention particulière sera portée à la sécurisation et la mise en valeur des monuments historiques. L’accès à la culture et la connaissance du patrimoine historique de Mayotte contribueront à l’éveil des jeunes Mahorais.
Au-delà de l’action en faveur de l’école précédemment évoquée, l’État s’engage en matière d’offre périscolaire. Il sera déployé dès 2025 un fonds de soutien au développement des activités périscolaires. Il se traduira par un financement au titre des activités périscolaires de chaque élève. En parallèle, le Fonds pour le développement de la vie associative verra sa dotation doubler en 2025 pour soutenir les associations de bénévoles.
L’insertion de la jeunesse mahoraise sera par ailleurs soutenue par l’extension du service militaire adapté (SMA), avec la création d’une antenne à Chirongui pour un montant de 14 millions d’euros. La reconstruction du site de Combani – particulièrement affecté par le passage de Chido – fera l’objet d’une mobilisation financière de l’État à hauteur de 10 millions d’euros.
Le régiment du service militaire adapté de Mayotte accompagne près de 700 bénéficiaires par an, volontaires stagiaires et volontaires techniciens. Il atteint un taux d’insertion de 85 %.
Son offre repose sur 22 filières de formation professionnelle et de remobilisation vers l’emploi (BTP, services, sécurité, logistique, restauration). Les formations s’adaptent au besoin du territoire chaque année.
L’État s’engage à accueillir 1 000 volontaires par an à partir de 2031 en visant un taux de féminisation largement accru. En complément, les équipes d’encadrement seront densifiées pour offrir une formation d’une qualité encore renforcée et permettre l’accueil de parents célibataires.
L’État s’engage par ailleurs à faciliter l’engagement des jeunes. Afin de dynamiser leur engagement, le cadre du service civique sera temporairement adapté pour permettre aux jeunes de s’engager et d’agir au bénéfice de la population de Mayotte.
3.3. Travailler et vivre à Mayotte : attirer et fidéliser les talents en créant les conditions de l’attractivité
L’attractivité de Mayotte est un enjeu majeur car Mayotte a besoin de tous les talents pour franchir les nouvelles étapes décrites dans le présent rapport.
Ce besoin d’attractivité est multiple : pour le secteur privé, pour le secteur public et pour le maintien ou le retour des forces vives de Mayotte.
On peut d’ores et déjà noter deux facteurs communs à cette démarche d’attractivité : la poursuite de l’amélioration de la situation sécuritaire, et l’augmentation de l’offre de logements, toutes deux prévues dans la stratégie de refondation.
L’offre de logements pour les fonctionnaires, notamment ceux qui viennent en renfort dans cette phase d’accompagnement de Mayotte, sera dynamisée par le recours à des prototypes, expérimentés dès 2025. D’autres solutions de logement seront encouragées, incluant le logement des étudiants.
Parmi les missions de l’établissement public figureront une mobilisation et une optimisation du foncier public pour mettre à disposition davantage de logements.
De plus, il sera procédé à une révision complète des quartiers prioritaires de la ville qui s’attachera à la mise en cohérence avec les zones prioritaires scolaires.
Au sein des services de l’État, sera mise en place une cellule « Attractivité, mobilité, proximité » chargée d’accompagner les agents publics dans la recherche de leur logement en vue de leur arrivée à Mayotte.
Il sera déployé de nouvelles incitations pour les agents de la fonction publique, en particulier la possibilité de choix d’affectation après une durée de poste à Mayotte de 3 ans au minimum. En parallèle, des missions plus courtes seront largement autorisées, dans une logique de « réalisation personnelle » au service de nos compatriotes mahorais.
Dans les secteurs les plus en tension, il sera déployé des plans d’attractivité et de fidélisation. Cela vaut en particulier pour les professionnels de santé et les professionnels du médico-social.
3.4. Créer de la valeur à Mayotte : créer les conditions du développement économique
Créer les conditions du développement économique à Mayotte implique de prendre les mesures concourant :
– au désenclavement de Mayotte : le développement des infrastructures portuaires et aéroportuaires constitue une priorité en termes d’investissement.
– à la fluidification des échanges sur le territoire :
○ la mise en place d’un réseau de transport multimodal reposant sur la modernisation des infrastructures ainsi que le développement des transports interurbains et des navettes maritimes devra être réalisée.
○ le réseau 5G sera déployé sur l’ensemble du territoire dès 2025.
○ d’ici 2027, le réseau de fibre optique sera déployé sur l’ensemble du territoire, avec un appui financier public de 50 millions d’euros dans le cadre du plan France Très Haut Débit.
– À la relance de l’activité des entreprises locales :
○ Une zone franche globale sera mise en place à compter du 1er janvier 2026 pour relancer un tissu économique durement touché par Chido et Dikeledi et accélérer la transition de l’économie informelle vers l’économie déclarée. Une attention particulière sera portée aux microentreprises qui constituent la majeure partie des entreprises mahoraises et se caractérisent par une certaine vulnérabilité en termes de trésorerie et capitalisation.
○ Les filières économiques locales particulièrement affectées par Chido seront accompagnées pour se relever et poursuivre les objectifs des stratégies de développement élaborées avant le passage du cyclone. Cela sera notamment le cas de la filière touristique. Le rétablissement et le développement de l’offre hôtelière, la formation des acteurs du tourisme, ainsi que la relance des activités touristiques emblématiques du territoire telles que la plongée sous-marine ou les excursions nautiques, contribueront à la diversification de l’activité économique, au renforcement de l’attractivité du territoire et, ce faisant, participeront à l’amélioration de la qualité de vie des Mahorais.
– À développer la coopération régionale et renforcer l’intégration de Mayotte dans son environnement régional :
○ Conformément aux décisions prises par le comité interministériel des outre-mer (CIOM) le 18 juillet 2023, et comme rappelé par le président de la République à l’occasion de la Conférence des Ambassadeurs le 6 janvier 2025, les territoires ultramarins doivent être mieux associés à la politique étrangère de la France. Dans l’objectif de mieux intégrer les enjeux de coopération régionale et d’attractivité des territoires d’Outre-mer et d’améliorer l’accompagnement des collectivités territoriales ultramarines à l’international, le ministre chargé de l’Europe et des Affaires étrangères, en lien avec le ministre chargé des outre-mer, renforceront les mécanismes permettant d’associer les collectivités d’outre-mer à la politique étrangère de la France, sur la base d’une stratégie concertée qui sera adoptée lors de la Conférence de coopération régionale pour l’océan Indien.
○ Par la convention signée entre l’État et le Conseil départemental de Mayotte le 11 mars 2024, un Comité pour l’insertion régionale de Mayotte (CIRM), a été établi comme cadre privilégié de dialogue entre l’État et le Département. Le CIRM est chargé de proposer des orientations pluriannuelles en matière de coopération ; définir une feuille de route annuelle qui décline ces orientations pour l’année à venir ; identifier la formation nécessaire à certains agents territoriaux aux enjeux internationaux et au protocole diplomatique, sur financement du département de Mayotte, afin de contribuer à la montée en compétence de l’encadrement de Mayotte ; assurer le suivi des initiatives de coopération engagées dans le cadre de la convention.
○ Le développement de liens de coopération avec les pays de la zone est à poursuivre :
■ Dans le sud-ouest de l’océan Indien (zone Commission de l’océan Indien – COI), l’État poursuivra, en cohérence avec la convention de coopération signée avec le conseil départemental de Mayotte en mars 2024, son soutien au déploiement de la stratégie de coopération régionale du Conseil départemental, à la mise en œuvre du programme INTERREG « Canal du Mozambique » piloté par le conseil départemental de Mayotte, à l’insertion de Mayotte dans la stratégie Indopacifique, au déploiement de représentants du Conseil départemental dans les postes diplomatiques de la région ;
■ Dans la région élargie, l’État encouragera les relations entre Mayotte et la Tanzanie, le Kenya, l’Afrique du Sud et le Mozambique, ainsi que le dialogue avec la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) afin de soutenir la reconstruction et le développement de Mayotte ;
○ L’État poursuivra ses efforts afin de développer la coopération régionale, autour de Mayotte, sur les secteurs stratégiques suivants :
■ Environnement : actions de lutte contre l’érosion de la biodiversité, notamment dans le parc naturel marin à travers des programmes tels que « VARUNA » et permettant des échanges d’expériences entre gestionnaires des aires marines protégées du sud-ouest de l’océan Indien ;
■ Agriculture : construction d’une technopole pour promouvoir l’innovation et la recherche, notamment dans le domaine de l’agro-transformation, qui revêt une importance cruciale pour les territoires insulaires ; la promotion de la production régionale et du développement de filières d’approvisionnement régional dans un cadre normatif contrôlé ;
■ Économique : conclusion de conventions de partenariat avec des Chambres de Commerce et d’Industrie des pays voisins (Kenya notamment) ;
■ Numérique : développement de la coopération régionale en matière de connectivité numérique. Le data center en service à Mayotte depuis 2022 (ITH Center) est un modèle en partenariat avec celui de La Réunion et offre son savoir-faire en Afrique de l’Est (Kenya) ;
■ Formation professionnelle : poursuite des actions visant à renforcer la formation et l’employabilité des jeunes Mahorais, en particulier dans le secteur de l’hôtellerie-restauration aux Seychelles et à Maurice.
○ De nouvelles coopérations permettant de surmonter les obstacles actuellement rencontrés en matière de connectivité notamment (aérienne, maritime), pourront être initiées. Un enjeu majeur de coopération régionale est en effet l’amélioration des connexions maritimes (profiter de la position géographique de Mayotte pour développer le port et faire baisser les coûts de transports et d’approvisionnement) et aériennes dans la zone.
– Dans ce contexte, la Commission de l’océan Indien constitue un cadre de coopération à exploiter :
○ Lors de sa présidence en 2021-2022, la France a décliné un programme ambitieux autour de l’économie bleue, thématique cruciale pour les États insulaires, afin de penser des stratégies adaptées et durables face aux défis environnementaux. Elle a joué à cette occasion un rôle pilote aux côtés de ses partenaires, en menant des projets concrets (journées de nettoyage de plages, formations de pêcheurs, etc.) dans les pays de la COI, ainsi que dans les pays côtiers d’Afrique australe et orientale (Afrique du Sud, Kenya, Mozambique, Tanzanie). Mayotte est déjà intégrée au programme de la COI en matière de sécurité et sûreté maritimes, le plaidoyer pour son intégration aux autres programmes de la COI sera renforcé, notamment en matière de sécurité sanitaire, d’adaptation au changement climatique et de coopération agricole.
– Une réflexion sur les dispositions spécifiques supplémentaires pour les régions ultrapériphériques (RUP) pourrait être menée au niveau européen :
○ Pour mémoire, la législation européenne est applicable dans les RUP mais, afin de tenir compte de leurs spécificités, des adaptations aux politiques européennes ont été introduites (CJUE, Mayotte, 2015).
○ Ces mesures concernent notamment les politiques douanières et commerciales, la politique fiscale, les zones franches, les politiques dans les domaines de l’agriculture et de la pêche et les conditions d’approvisionnement en matières premières et en biens de consommation de première nécessité.
○ La France fait de l’intégration des spécificités des territoires ultramarins aux négociations dans le cadre du prochain cadre financier pluriannuel une priorité. La France demande également l’intégration de ces spécificités préalablement à la production de tout nouvel acte réglementaire ou directive.
I. – Infrastructures portuaires : envisager le passage sous compétence de l’État en vue de la modernisation et de l’extension du port de Longoni
Le port de Longoni doit être considéré comme une infrastructure stratégique pour le développement économique de Mayotte et vecteur d’intégration régionale.
En vue de l’amélioration de la capacité de débarquement, de manutention et de stockage des marchandises, l’État s’engage à soutenir les investissements en matière de modernisation et extension des infrastructures portuaires.
Situé sur une route maritime majeure par laquelle transite 30 % du commerce mondial de pétrole, au cœur d’une zone renfermant d’importants stocks d’hydrocarbures et ressources halieutiques, le port de Longoni doit conforter et affirmer son positionnement stratégique dans le canal du Mozambique.
La transformation du port de Longoni en port sous compétence de l’État à l’issue de la concession de service public en 2028 fera l’objet d’une expertise et d’une concertation avec le conseil départemental de Mayotte, préalables à toute évolution statutaire. Un audit financier du port de Longoni sera réalisé avant la fin de l’année 2025.
II. – Infrastructures aéroportuaires : garantir la desserte internationale de Mayotte
La desserte aérienne internationale de Mayotte sera garantie, que ce soit par l’aménagement de l’aéroport actuel ou par la construction d’un nouvel aéroport sur Grande Terre. Si cette deuxième option était finalement retenue, il devrait s’inscrire dans le cadre d’un hub logistique avec le port de Longoni.
L’État prend l’engagement, afin de garantir le désenclavement de Mayotte et favoriser le développement économique de conduire les procédures, de mettre en place les financements et de conduire les investissements nécessaires au maintien opérationnel à Mayotte d’un aéroport adapté aux avions long-courriers et de grande capacité et permettant par tout temps, les vols directs vers l’hexagone.
La décision actant après concertation les principes relatifs au nouvel aéroport de Mayotte doit être prise avant avril 2026, la déclaration d’utilité publique avant la fin de l’année 2028.
Le renforcement des infrastructures visant à garantir l’accès aux biens et ressources essentiels contribue également à créer les conditions du développement économique et de la prospérité.
4. Programmes d’investissements prioritaires dans les infrastructures et politiques publiques essentielles à Mayotte
Les investissements présentés ci-dessous sont issus du contrat de convergence et de transformation en vigueur et de différents plans d’actions ministériels ou interministériels :
Thème |
Crédits en soutien aux collectivités territoriales au titre de la reconstruction |
Phase |
2025-2027 |
Autorisations d’engagement (en M€) |
300 |
Thème |
Eau et assainissement |
|
Phases |
2025-2027 |
2028-2031 |
Actions |
Ajustement des investissements du volet 1 et mise en œuvre des volets 2 et 3 du Plan Eau Mayotte |
Contrat de progrès eau et assainissement |
Autorisations d’engagement (en M€) |
350 |
380 |
TOTAL (en M€) |
730 |
Thème |
Santé |
|||
Phases |
2025-2027 |
2028-2030 |
||
Actions |
Travaux au Centre Hospitalier de Mayotte |
122 |
Poursuite des travaux d’extension du centre hospitalier de Mamoudzou |
122 |
Planification d’un deuxième site hospitalier à Combani |
10 |
Construction d’un deuxième site hospitalier à Combani |
153 |
|
Autorisations d’engagement (en M€) |
132 |
275 |
||
TOTAL (en M€) |
407 |
Thème |
Lutte contre l’immigration clandestine |
Phase |
2025-2027 |
Action |
Renforcement des capacités de détection, de reconnaissance et d’interception par voies maritime et aérienne |
Autorisations d’engagement (en M€) |
52 |
Thème |
Système judiciaire et carcéral |
|||
Phases |
2025-2027 |
2028-2031 |
||
Actions |
Études relatives à la construction d’un deuxième établissement pénitentiaire |
2 |
Réalisation d’un deuxième établissement pénitentiaire |
290 |
Réalisation d’une cité judiciaire |
124 |
|||
Réalisation d’un centre éducatif fermé |
14 |
|||
Autorisations d’engagement (en M€) |
2 |
428 |
||
TOTAL (en M€) |
430 |
Thème |
Construction d’établissements scolaires |
Phase |
2025-2029 |
Action |
Poursuite de la construction de nouvelles salles de classes, de la rénovation des écoles dégradées et du développement de la restauration collective |
Autorisations d’engagement (en M€) |
400 |
Thème |
Université de Mayotte |
Phase |
2025-2029 |
Action |
Reconstruction et extension de l’université |
Autorisations d’engagement (en M€) |
17,7 |
Thème |
Culture et sport |
Phase |
2025-2029 |
Actions |
Accompagnement de la réhabilitation d’équipements |
Protection du patrimoine et développement des infrastructures culturelles |
|
Développement des infrastructures sportives |
|
Autorisations d’engagement (en M€) |
17 |
Thème |
Logement |
Phase |
2025-2029 |
Action |
Soutien à la construction de logements et d’aménagements, y compris opérations de résorption de l’habitat insalubre |
Autorisations d’engagement (en M€) |
200 |
Thème |
Aéroport |
Phase |
À compter de la déclaration d’utilité publique (2026) |
Action |
Réalisation d’une piste longue en Grande Terre afin de garantir la desserte internationale de Mayotte |
Autorisations d’engagement (en M€) |
1 200 |
Thème |
Transports terrestres et maritimes |
Phase |
2025-2029 |
Actions |
Fluidification de la circulation |
Développement des mobilités alternatives |
|
Remise à niveau du réseau routier national |
|
Autorisations d’engagement (en M€) |
104 |
Thème |
Environnement |
Phase |
2025-2029 |
Action |
Évaluation et suivi de l’impact de Chido sur la biodiversité |
Autorisations d’engagement (en M€) |
17,4 |
Thème |
Agriculture et pêche |
Phase |
2025-2029 |
Actions |
Déclinaison du Plan stratégique national 2023-2027 |
Réalisation d’équipements au profit de la pêche professionnelle |
|
Autorisations d’engagement (en M€) |
12 |
Thème |
Déchets |
Phase |
2025-2029 |
Action |
Accompagnement du rattrapage structurel et développement de l’économie circulaire |
Autorisations d’engagement (en M€) |
6,9 |
Thème |
Déploiement de la fibre |
Phase |
2025-2029 |
Action |
Déploiement du réseau de fibre optique sur l’ensemble du territoire |
Autorisations d’engagement (en M€) |
50 |
Ce premier chiffrage traduit l’engagement financier de l’État en faveur des infrastructures prioritaires de Mayotte.
Les évaluations des dommages et des besoins à la suite des dégâts causés par le cyclone Chido seront confirmées et affinées, en lien avec les ministères compétents, par la mission inter-inspections en charge de l’évaluation des dégâts et des besoins et la mission de reconstruction et de refondation de Mayotte. C’est sur cette base que la programmation des investissements pourra être précisée.
Une programmation annuelle des investissements sera présentée au Parlement avant le 31 décembre 2025.
5. La reconstruction et la refondation de Mayotte appellent un renforcement des services de l’État et des collectivités territoriales
5.1. La mission chargée de la reconstruction de Mayotte garantira la continuité de l’action de l’État, en lien étroit avec un État territorial renforcé dans ses moyens et ses effectifs.
La mission chargée de la reconstruction et de la refondation de Mayotte animera le travail interministériel et donnera l’impulsion attendue à tous les services centraux, en travaillant en miroir avec les équipes qui seront déployées à Mayotte, au sein de la préfecture et du futur établissement public.
Elle aura également en charge la rédaction et la mise en œuvre d’une stratégie quinquennale 2026-2031 intégrant les quatre dimensions de l’approche globale : sécurité, développement, coopération, institutions.
Positionnée auprès de la direction générale des outre-mer et animée par le cabinet du ministre d’État, ministre des outre-mer, cette mission interministérielle – dirigée par le préfigurateur chargé de coordonner la reconstruction – couvrira les principaux champs de politique publique concernés par la reconstruction : établissements scolaires, santé, économie, sécurité et migration, agriculture, logement et urbanisme.
Une équipe projet dédiée à la reconstruction et à la refondation de Mayotte doit être mise en place auprès du préfet de Mayotte. Cette équipe devra être dimensionnée et pourvue en compétences pour couvrir spécifiquement chacun des champs de l’action publique concernés par la reconstruction.
5.2. Le renforcement des collectivités territoriales repose sur la mise en adéquation du statut et des moyens avec l’ampleur inédite du défi à relever
Le Gouvernement entend refonder Mayotte avec les collectivités territoriales. L’État s’engage à faciliter l’exercice de leurs compétences par les institutions démocratiques locales.
D’abord, l’État s’engage à mettre à disposition des collectivités les compétences en ingénierie de l’établissement public de refondation institué par la loi du 24 février 2025 d’urgence pour Mayotte. De même, pour le temps de la refondation et via l’établissement public, seront mobilisés en faveur de Mayotte les établissements publics nationaux les plus à même d’accompagner les collectivités, et notamment le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (CEREMA) et l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT).
L’État entend ensuite accroître les marges de manœuvre des collectivités territoriales. Le recensement de la population permettra d’adapter les moyens des communes à la réalité de leur population.
L’action de lutte contre l’habitat illégal signifiera la fin de dépenses liées à la présence de populations bénéficiant de services sans acquitter de contributions locales.
En complément, la fiabilisation du cadastre et les procédures d’acquisition par prescription vont développer les bases fiscales, et donc les recettes des collectivités territoriales, à particulier à travers la taxe foncière sur les propriétés bâties.
C’est le développement économique de Mayotte qui doit générer une dynamique de hausse des recettes fiscales des collectivités territoriales. C’est pourquoi la convergence économique est conçue comme la clé de l’ambition territoriale, sociale et institutionnelle pour Mayotte.
6. (nouveau) Une évaluation associant l’ensemble des acteurs
La loi de programmation pour la refondation de Mayotte et les investissements prévus dans le présent rapport feront l’objet d’une évaluation régulière, associant l’ensemble des acteurs.
Un comité de suivi de la loi de programmation pour la refondation de Mayotte sera institué auprès du Premier ministre afin de veiller au suivi de la mise en œuvre et à l’évaluation des mesures prévues par la loi et son rapport annexé et d’en rendre compte au Parlement. Présidé par une personnalité désignée par le Premier ministre, ce comité sera notamment composé de deux députés et de deux sénateurs, de représentants des élus locaux et de représentants de l’État.
Un rapport intermédiaire évaluant l’impact de la reconstruction et de la refondation de Mayotte et la réalisation des investissements sera remis au Parlement avant le 1er juillet 2028. Il pourra donner lieu à un débat au Parlement.
L’amendement n° A-1, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rapport annexé
I. – Alinéa 280
Rédiger ainsi cet alinéa :
La desserte aérienne internationale de Mayotte sera garantie par la construction d’un nouvel aéroport dont l’implantation est envisagée sur Grande Terre. Il devra s’inscrire dans le cadre d’une plateforme logistique avec le port de Longoni.
II. – Alinéa 282
Rédiger ainsi cet alinéa :
La décision actant après concertation les principes relatifs au nouvel aéroport de Mayotte doit être prise en 2025, la déclaration d’utilité publique en 2026.
La parole est à M. le ministre d’État.
M. Manuel Valls, ministre d’État. Chacun l’a compris, la seconde délibération porte sur la réalisation de la piste longue à Mayotte. Comme j’ai eu l’occasion de le dire cet après-midi, elle est très attendue et nécessaire pour assurer la continuité territoriale, compte tenu des risques auxquels est soumis l’aéroport actuel.
C’est la raison pour laquelle, en cohérence, le Gouvernement repropose cet amendement au vote.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Bitz, rapporteur. Le rejet de l’amendement cet après-midi résulte d’une forme d’inattention collective.
L’avis de la commission était favorable lors du premier vote ; il le reste.
M. le président. La parole est à M. Saïd Omar Oili, pour explication de vote.
M. Saïd Omar Oili. Monsieur le président, c’est un scandale : le Sénat a voté de manière éclairée sur l’article 1er.
Nombre de nos amendements ont été rejetés ; pour autant, nous n’avons pas demandé à revoter. C’est la procédure. Dont acte !
La population de Mayotte, que Mme Ramia et moi-même avons défendue, en sera témoin. Nous ne manquerons pas de faire savoir ce qui s’est passé ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE-K.)
M. le président. La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo, pour explication de vote.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. Je partage les propos de mon collègue Omar Oili.
Le Sénat est la chambre des territoires. Nous avons entendu la position commune des deux sénateurs de Mayotte, qui ont plaidé pour que l’amendement soit rejeté, en votant contre.
La procédure de seconde délibération ne respecte ni la voix du Sénat ni celle des territoires. Nous la dénonçons solennellement ce soir, comme nous l’avons déjà fait au mois de janvier dernier lors du vote du projet de loi de finances pour 2025. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE-K, SER et GEST.)
M. le président. La parole est à Mme Salama Ramia, pour explication de vote.
Mme Salama Ramia. La demande des élus mahorais n’a pas été respectée. C’est tout ce que j’ai à dire. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.)
M. le président. La parole est à Mme Frédérique Puissat, pour explication de vote.
Mme Frédérique Puissat. Mes chers collègues, il faut savoir raison garder.
Ce projet de loi contenait trente-quatre articles à l’origine, il en compte désormais quarante-deux. Nous revotons seulement sur l’article 1er, car il y a eu une erreur manifeste d’appréciation. (Protestations sur les travées des groupes CRCE-K, SER et GEST.)
Nous avons tous travaillé avec sérieux jusqu’à minuit passé dans l’intérêt du peuple mahorais, que, certes, Mme Ramia et M. Omar Oili représentent, mais que nous représentons également tous dans cet hémicycle.
M. Guy Benarroche. Les élus Mahorais connaissent l’intérêt de Mayotte !
M. le président. La parole est à M. le ministre d’État.
M. Manuel Valls, ministre d’État. Le Gouvernement peut demander une seconde délibération, c’est le Sénat qui décide.
Ne créons pas les conditions d’un scandale avec des mots exagérés.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. On n’est pas à l’Assemblée nationale !
M. Manuel Valls, ministre d’État. En effet ! Je suis au Sénat, que je connais bien et que je respecte – je l’ai démontré. Ce n’est pas le premier texte, dans ma longue vie politique, que je présente devant la Haute Assemblée. Je suis à l’écoute des uns et des autres.
Nous demandons cette seconde délibération, à la suite d’un moment d’inattention qu’a rappelé le rapporteur, car ce projet d’aéroport a un intérêt majeur. (Protestations sur les travées du groupe GEST.)
Ce projet implique un engagement très fort de l’État, car il aura des conséquences non seulement pour le développement de Mayotte, mais aussi pour l’ensemble de la région. Nous savons qu’il y a un débat sur l’île, mais des compensations sont prévues pour Petite Terre. Je suis moi-même allé sur place, j’ai réitéré cet engagement. Le Président de la République soutient cette infrastructure.
L’État souhaite assumer ses responsabilités en construisant cet aéroport, fondamental pour l’avenir de Mayotte. C’est pour cette raison que je demande cette seconde délibération. Chacun sera ensuite libre de son vote, dans cette assemblée qui a toujours manifesté une très grande liberté.
M. Guy Benarroche. On peut revoter ?
M. le président. Je mets aux voix l’ensemble de l’article 1er et du rapport annexé, modifié.
(L’article 1er et le rapport annexé sont adoptés.)
Mme Silvana Silvani. Mascarade !
M. le président. Nous avons terminé l’examen des articles de ce texte.
Je vous rappelle que les explications de vote et le vote par scrutin public sur l’ensemble du projet de loi se dérouleront le mardi 27 mai à dix-huit heures trente.
Nous passons à la discussion du texte de la commission sur le projet de loi organique relatif au Département-Région de Mayotte.
projet de loi organique relatif au département-région de mayotte
Article 1er
Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
1° Au sixième alinéa de l’article L.O. 1112-10, après le mot : « Martinique », sont insérés les mots : « , le Département-Région de Mayotte » ;
2° L’article L.O. 1114-1 est ainsi modifié :
a) Au 2°, le mot : « Département » est remplacé par le mot : « Département-Région » ;
b) Le 3° est complété par les mots : « autres que le Département-Région de Mayotte » ;
3° À l’article L.O. 3445-1, les mots : « , de Mayotte » sont supprimés ;
4° À l’article L.O. 3445-9, les mots : « les conseils départementaux de la Guadeloupe et de Mayotte peuvent être habilités » sont remplacés par les mots : « le conseil départemental de la Guadeloupe peut être habilité » et le mot : « leur » est remplacé par le mot : « son » ;
5° À l’article L.O. 4435-1, les mots : « , de Mayotte » sont supprimés ;
6° À l’article L.O. 4435-9, les mots : « les conseils régionaux de la Guadeloupe et de Mayotte peuvent être habilités » sont remplacés par les mots : « le conseil régional de la Guadeloupe peut être habilité » et le mot : « leur » est remplacé par le mot : « son » ;
7° Les articles L.O. 1711-2, L.O. 3511-1, L.O. 3511-3 et L.O. 4437-2 sont abrogés ;
8° Le livre III de la septième partie devient le livre IV et est ainsi modifié :
a) À l’intitulé du titre Ier, les mots : « et de Martinique » sont remplacés par les mots : « , de Martinique et de Mayotte » ;
b) Aux intitulés des chapitre Ier et II du titre Ier, les mots : « par les collectivités territoriales de Guyane et de Martinique » sont supprimés ;
c) Les articles L.O. 7311-1, L.O. 7311-2, L.O. 7311-3, L.O. 7311-4, L.O. 7311-5, L.O. 7311-6, L.O. 7311-7, L.O. 7311-8 et L.O. 7311-9 deviennent respectivement les articles L.O. 7411-1, L.O. 7411-2, L.O. 7411-3, L.O. 7411-4, L.O. 7411-5, L.O. 7411-6, L.O. 7411-7, L.O. 7411-8 et L.O. 7411-9 ;
d) À l’article L.O. 7311-1, devenant l’article L.O. 7411-1, les mots : « et de Martinique » sont remplacés par les mots : « , de Martinique et de Mayotte » ;
e) À la première phrase de l’article L.O. 7311-3, devenant l’article L.O. 7411-3, la référence : « L.O. 7311-2 » est remplacée par la référence : « L.O. 7411-2 » ;
f) L’article L.O. 7311-4, devenant l’article L.O. 7411-4, est ainsi modifié :
– au premier alinéa, la référence : « L.O. 7311-2 » est remplacée par la référence : « L.O. 7411-2 » ;
– à la première phrase du dernier alinéa, la référence : « L.O. 7311-5 » est remplacée par la référence : « L.O. 7411-5 » ;
g) À la première phrase du second alinéa de l’article L.O. 7311-5, devenant l’article L.O. 7411-5, la référence : « L.O. 7311-4 » est remplacée par la référence : « L.O. 7411-4 » ;
h) L’article L.O. 7311-7, devenant l’article L.O. 7411-7, est ainsi modifié :
– au premier alinéa, la référence : « L.O. 7311-6 » est remplacée par la référence : « L.O. 7411-6 » ;
– aux deuxième et troisième phrases du second alinéa, la référence : « L.O. 7311-5 » est remplacée par la référence : « L.O. 7411-5 » ;
i) À la fin de la seconde phrase du dernier alinéa de l’article L.O. 7311-8, devenant l’article L.O. 7411-8, la référence : « L.O. 7311-5 » est remplacée par la référence : « L.O. 7411-5 » ;
j) Au premier alinéa de l’article L.O. 7311-9, devenant l’article L.O. 7411-9, la référence : « L.O. 7311-6 » est remplacée par la référence : « L.O. 7411-6 » ;
k) Les articles L.O. 7312-1, L.O. 7312-2 et L.O. 7312-3 deviennent respectivement les articles L.O. 7412-1, L.O. 7412-2 et L.O. 7412-3 ;
l) À l’article L.O. 7312-1, devenant l’article L.O. 7412-1, les mots : « et de Martinique » sont remplacés par les mots : « , de Martinique et de Mayotte » ;
m) L’article L.O. 7312-2, devenant l’article L.O. 7412-2, est ainsi modifié :
– à la fin du deuxième alinéa, la référence : « L.O. 7312-1 » est remplacée par la référence : « L.O. 7412-1 » ;
– à la fin du dernier alinéa, la référence : « L.O. 7311-2 » est remplacée par la référence : « L.O. 7411-2 » ;
n) À l’article L.O. 7312-3, devenant l’article L.O. 7412-3, les mots : « L.O. 7311-3 à L.O. 7311-9 » sont remplacées par les mots : « L.O. 7411-3 à L.O. 7411-9 » ;
o) L’article L.O. 7313-1 devient l’article L.O. 7413-1 – (Adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 1er.
(L’article 1er est adopté.)
Article 2
Le code électoral est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa de l’article L.O. 141, après le mot : « Martinique, », sont insérés les mots : « conseiller à l’assemblée de Mayotte, » ;
2° Au 7° de l’article L.O. 141-1, les mots : « ou de l’assemblée de Martinique » sont remplacés par les mots : « , de Martinique ou de Mayotte » ;
3° À la fin de l’article L.O. 558-12, les mots : « ou de conseiller à l’assemblée de Martinique » sont remplacés par les mots : « , de Martinique ou de Mayotte » – (Adopté.)
Article 3
L’article 9 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature est ainsi modifié :
1° Au troisième alinéa, la deuxième occurrence du mot : « ou » est remplacée par le signe : « , » et, après le mot : « Martinique », sont insérés les mots : « ou de conseiller à l’Assemblée de Mayotte » ;
2° (nouveau) Au dernier alinéa, les mots : « dispositions des trois alinéas qui précèdent » sont remplacés par les mots : « deuxième à avant-dernier alinéas » – (Adopté.)
Article 4
À la première phrase du deuxième alinéa du I de l’article 3 de la loi n° 62-1292 du 6 novembre 1962 relative à l’élection du Président de la République au suffrage universel, après le mot : « Martinique, », sont insérés les mots : « de l’Assemblée de Mayotte, » – (Adopté.)
Article 5
La présente loi organique entre en vigueur à la date de dépôt du projet de loi de ratification de l’ordonnance prévue à l’article 30 de la loi n° … du … de programmation pour la refondation de Mayotte et au plus tard le 1er janvier 2027.
Les articles 2, 3 et 4 de la présente loi organique s’appliquent à compter du prochain renouvellement général des conseils départementaux suivant son entrée en vigueur.
M. le président. L’amendement n° 1, présenté par Mme Canayer et M. Bitz, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
La présente loi organique entre en vigueur à une date fixée par décret, et au plus tard le 1er janvier 2026.
Les articles 2, 3 et 4 de la présente loi organique s’appliquent à compter du prochain renouvellement général des conseils départementaux suivant son entrée en vigueur.
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Amendement de coordination.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. En conséquence, l’article 5 est ainsi rédigé.
Nous avons terminé l’examen des articles de ce texte.
Je vous rappelle que les explications de vote et le vote par scrutin public de droit sur l’ensemble du projet de loi organique se dérouleront le mardi 27 mai à dix-huit heures trente.
8
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, mercredi 21 mai 2025 :
À quinze heures :
Questions d’actualité au Gouvernement.
À seize heures trente et le soir :
Projet de loi autorisant la ratification du Traité de coopération en matière de défense entre la République française et la République de Djibouti (procédure accélérée ; texte de la commission n° 620, 2024-2025) ;
Conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi renforçant la lutte contre les fraudes aux aides publiques (texte de la commission n° 570, 2024-2025) ;
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée le mercredi 21 mai 2025, à zéro heure vingt.)
Pour le Directeur des comptes rendus du Sénat,
le Chef de publication
FRANÇOIS WICKER