M. le président. La parole est à M. Cyril Pellevat, pour la réplique.

M. Cyril Pellevat. Dans les territoires, et notamment les départements, comptant de nombreuses entreprises qui ont été transmises et sont le fruit d’un travail, les dernières déclarations ainsi que certains amendements déposés font peur. Nous sommes d’ailleurs régulièrement sollicités à ce sujet sur le terrain.

Je vous remercie par conséquent, monsieur le ministre, pour les éléments de réponse que vous venez d’apporter, lesquels sont de nature à rassurer les entrepreneurs qui seraient justement en train de transmettre leur entreprise ou l’envisageraient. Ceux-ci ont en effet besoin que le système fiscal soit clair et lisible, car l’incertitude crée des tensions, notamment dans nos territoires. Nous serons très attentifs à cette question lors du débat budgétaire.

avenir et financement de la politique agricole commune

M. le président. La parole est à M. Olivier Bitz, auteur de la question n° 698, adressée à Mme la ministre de l’agriculture, de l’agro-alimentaire et de la souveraineté alimentaire.

M. Olivier Bitz. Madame la ministre, politique fondatrice de la construction européenne, la politique agricole commune (PAC) représente encore aujourd’hui un axe majeur de l’action de l’Union européenne (UE).

Or, le 16 juillet dernier, la présidente de la Commission européenne a présenté les premières orientations du futur cadre financier pluriannuel de l’Union européenne pour la période 2028-2034. L’architecture budgétaire s’en trouverait profondément modifiée, avec des conséquences importantes pour la PAC.

Actuellement, celle-ci bénéficie de 386 milliards d’euros. La Commission européenne prévoit désormais une enveloppe de 300 milliards d’euros sur la période 2028-2034, ce qui correspondrait à une baisse de 20 % des crédits. En outre, la PAC se trouverait très largement intégrée dans un grand fonds, plus global, comprenant d’autres programmes. Selon les projections réalisées, plus de la moitié des agriculteurs français seraient affectés par une réduction des aides.

Ces premières orientations constituent un risque important pour la production et la souveraineté de l’agriculture européenne, dont la France est l’une des principales locomotives. Depuis ces annonces, les syndicats agricoles se mobilisent pour exprimer leurs plus vives préoccupations, tout particulièrement les filières bovine et laitière.

Madame la ministre, les négociations européennes ont démarré. Le 27 octobre dernier, lors du Conseil agriculture et pêche (Agripêche), vous avez déclaré qu’en l’état le budget dévolu à la PAC était « insuffisant » et qu’il « compromet[tait] le succès d’une politique faisant la fierté de l’Union européenne ». Nous ne pouvons que vous suivre !

Le lendemain, le Premier ministre s’est entretenu avec M. Christophe Hansen, commissaire européen à l’agriculture et à l’alimentation. À l’issue de cet échange, le chef du Gouvernement a affirmé que « les enveloppes de la PAC devaient être intégralement maintenues ». Nous en sommes également d’accord.

Madame la ministre, pouvez-vous nous assurer que le Gouvernement est pleinement mobilisé pour que la PAC demeure une politique commune d’avenir, reposant sur des garanties financières durables, en vue de soutenir le développement de l’agriculture française ? Bref, comment entendez-vous rassurer nos agriculteurs ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Annie Genevard, ministre de lagriculture, de lagro-alimentaire et de la souveraineté alimentaire. Monsieur le sénateur Olivier Bitz, je tiens à dire en préambule qu’il est indispensable que l’Union européenne continue de se doter d’une PAC robuste permettant de garantir notre souveraineté alimentaire, les revenus des agriculteurs, et de faciliter le renouvellement des générations. À cet égard, la vive inquiétude exprimée par les milieux agricoles, que je partage, doit être entendue.

Ainsi, le montant alloué de manière certaine au périmètre garanti de la PAC dans le budget européen, et la proposition d’enveloppe nationale octroyée à la France qui en découle, suscitent une profonde incompréhension.

La France fera preuve d’une vigilance absolue pour obtenir toutes les garanties nécessaires à la préservation des aides liées à la PAC.

Nous n’avons jamais eu autant de besoins pour relever les immenses défis agricoles du XXIe siècle. Il nous faut donc obtenir une clarification rapide de la part de la Commission sur les évolutions budgétaires proposées pour la PAC, à l’échelle de l’Union comme des États membres.

En outre, la demande initiale de la France et de nombreux États membres était que la PAC demeure une politique commune à part entière, et qu’elle continue à bénéficier de dispositions et d’un budget dédiés, séparés d’un éventuel fonds unique – je l’ai encore dit, la semaine dernière, très clairement à Luxembourg lors du Conseil Agripêche.

La Commission a proposé une nouvelle architecture qui nuit à la lisibilité des dispositions et de l’action publique pour les agriculteurs. Il est donc d’autant plus indispensable que la Commission apporte toutes les garanties nécessaires pour faire en sorte que la PAC soutienne le revenu des agriculteurs et permette de répondre aux nombreux défis auxquels ils font face, alors même que nous avons plus que jamais besoin d’eux pour assurer notre souveraineté alimentaire.

Dans ce contexte, je note toutefois certains motifs de satisfaction, tels que le maintien des soutiens au revenu, des aides couplées et de l’indemnité compensatoire des handicaps naturels (ICHN).

Enfin, le besoin de simplification de la PAC ne saurait constituer un prétexte pour gommer son caractère commun.

Soyez persuadé, monsieur le sénateur, que le Gouvernement, le Premier ministre et moi-même serons particulièrement attentifs à cette question et déterminés à nous faire entendre.

renouvellement du certificat médical pour la pratique de la danse

M. le président. La parole est à Mme Pascale Gruny, auteur de la question n° 739, adressée à Mme la ministre de la culture.

Mme Pascale Gruny. Ma question s’adressait à Mme la ministre de la culture.

Si la loi du 2 mars 2022 visant à démocratiser le sport en France a assoupli le contrôle médical préalable à la pratique sportive, ce n’est pas le cas pour la danse, qui reste régie par la loi du 10 juillet 1989 relative à l’enseignement de la danse.

Ainsi, le code de l’éducation dispose que l’école de danse doit s’assurer, chaque année, que les élèves sont munis d’un certificat médical, lequel doit impérativement être renouvelé tous les ans. Pour la pratique d’un sport, en revanche, ce certificat doit être renouvelé tous les trois ans.

Si la danse n’est pas considérée, comme le rappelle le code de l’éducation, comme une pratique sportive standard, cette différence de traitement est incompréhensible. Et obtenir un certificat médical de danse est de plus en plus difficile au regard du manque croissant de médecins généralistes dans nombre de territoires.

En réponse à une question écrite posée en 2024, Mme la ministre de la culture avait indiqué que l’obligation d’obtenir un certificat médical pour la danse méritait d’être réinterrogée et que le ministère travaillait à une évolution réglementaire susceptible d’intervenir prochainement. Où en sont ces réflexions ? Envisage-t-on effectivement d’assouplir la loi de 1989 pour rapprocher les dispositions qui y figurent des mesures de simplification introduites dans le code du sport en 2022 ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Annie Genevard, ministre de lagriculture, de lagro-alimentaire et de la souveraineté alimentaire. Madame la sénatrice Pascale Gruny, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de ma collègue ministre de la culture, qui m’a demandé de vous transmettre la réponse suivante.

L’article R.362-2 du code de l’éducation découle de l’article L.462-1 du même code, qui prévoit un contrôle médical pour les élèves pratiquant la danse.

Toutefois, l’obligation de fournir un certificat médical, instaurée en 1992, apparaît aujourd’hui datée. À la lumière des réformes intervenues dans le domaine sportif, notamment la loi du 2 mars 2022 visant à démocratiser le sport en France, le ministère de la culture a engagé une réflexion pour adapter la réglementation applicable à la danse.

Une évolution réglementaire est ainsi envisagée à court terme afin d’harmoniser les pratiques avec celles du sport, tout en tenant compte des spécificités de la danse. Dans l’attente de cette révision, et pour simplifier les démarches des familles comme des établissements, le ministère recommande, en cas d’impossibilité d’obtenir un certificat médical, d’utiliser le questionnaire de santé prévu par le code du sport.

Conscient toutefois que ce document pourrait ne pas couvrir certaines particularités propres à la danse, notamment les contraintes physiques spécifiques, comme la pratique des pointes, le ministère a sollicité l’expertise du Conseil national de l’ordre des médecins. L’objectif est d’élaborer un questionnaire adapté, garantissant la sécurité des élèves, tout en évitant des démarches médicales parfois complexes.

Le ministère de la culture attend actuellement la réponse du Conseil national de l’ordre, avant de finaliser l’évolution du dispositif. Cette démarche vise à concilier la simplification administrative, à laquelle nous sommes tous attachés, la prévention médicale adaptée, qui est absolument nécessaire, et la promotion de la pratique de la danse dans des conditions de sécurité optimales.

M. le président. La parole est à Mme Pascale Gruny, pour la réplique.

Mme Pascale Gruny. Je vous remercie de cette réponse, madame la ministre. Le problème, c’est que nous attendons depuis longtemps ; une solution devient donc urgente.

Lorsque l’on interroge l’ordre des médecins, au travers par exemple de l’un de ses conseils départementaux – je l’ai fait dans mon département –, celui-ci répond qu’aucun certificat n’est à fournir… Les textes en vigueur ne sont donc pas en phase avec le message de cet ordre professionnel. En conséquence, une lourde responsabilité pèse sur les écoles de danse en cas d’accident et en l’absence de ce certificat.

Enfin, la difficulté est liée non seulement au nombre insuffisant de médecins, mais aussi au manque de temps médical. Tout ce que l’on pourra faire pour simplifier les formalités sera donc important.

panthéonisation de camille claudel

M. le président. La parole est à M. Lucien Stanzione, auteur de la question n° 599, adressée à Mme la ministre de la culture.

M. Lucien Stanzione. C’est toujours avec un grand plaisir que je vous interroge sur les questions agricoles, madame la ministre de l’agriculture, mais, en l’occurrence, ma question porte aujourd’hui sur la culture… (Sourires.)

Camille Claudel, c’est l’histoire d’un génie que l’on a voulu faire taire, d’une sculptrice libre, puissante, qui a révolutionné son art à une époque où les femmes n’avaient pas le droit d’être des femmes créatrices à part entière. Formée très jeune, collaboratrice de Rodin, mais surtout artiste à part entière, elle a donné à la sculpture une émotion et une liberté nouvelles. Ses œuvres, comme La Valse ou LÂge mûr, sont devenues des symboles : elles parlent d’amour, de douleur, de passage, mais aussi de résistance et d’émancipation.

Et pourtant, la société de son temps ne lui a pas pardonné son indépendance. Internée contre son gré en 1913, elle passa plus de trente années enfermée à l’asile des aliénés de Montdevergues-les-Roses, à Montfavet, près d’Avignon dans le Vaucluse, avant d’y mourir, seule, en 1943.

Son destin raconte une double injustice : celle faite à une femme artiste, et celle faite à des milliers de malades mentaux abandonnés sous le régime de Vichy.

Rendre hommage à Camille Claudel aujourd’hui, c’est reconnaître ce que la République a parfois refusé de voir : le génie des femmes, la dignité des fragilisés et la mémoire des oubliés.

Lui ouvrir les portes du Panthéon serait un acte fort, culturel et moral à la fois, un geste de réparation, de reconnaissance et de fidélité à nos valeurs républicaines. Une démarche a été engagée directement auprès du Président de la République en ce sens.

Madame la ministre, le Gouvernement entend-il soutenir cette entreprise visant à faire entrer Camille Claudel au Panthéon, pour qu’elle rejoigne enfin celles et ceux qui ont fait la grandeur et la conscience de notre Nation ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Annie Genevard, ministre de lagriculture, de lagro-alimentaire et de la souveraineté alimentaire. Monsieur le sénateur Stanzione, j’ai encore en mémoire la magnifique biographie de Camille Claudel par Anne Delbée et l’émotion que j’avais ressentie en lisant le destin tragique de cette femme qui a créé dans l’ombre de Rodin, lequel s’est largement inspiré de son œuvre, puis qui a été abandonnée à la solitude et au dénuement. Je comprends donc ce qui motive votre démarche.

Je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de Mme la ministre de la culture, qui m’a demandé de vous apporter la réponse suivante.

Vous appelez à juste titre l’attention du Gouvernement sur la personnalité remarquable de Camille Claudel, l’une des plus grandes artistes françaises, au rayonnement national et international considérable – l’histoire lui rend justice ! –, qui symbolise par ailleurs le combat des femmes et les difficultés qu’il y avait pour celles-ci, à cette époque, à voir l’importance de leurs œuvres reconnue par leurs pairs et le grand public.

En effet, la motivation du transfert de cendres au Panthéon ne se résume pas, en général, à la valeur d’une œuvre artistique ou scientifique, fût-elle considérable, mais elle met en exergue un engagement ou un symbole lié aux valeurs de la Nation ou de la République.

Victor Hugo, Émile Zola, André Malraux et Alexandre Dumas sont certes de grands écrivains, Marie Curie est certes une grande scientifique, mais ce sont aussi, ou surtout, leurs combats civiques ou humanistes qui leur ont valu les honneurs de la nécropole nationale. Ce sont ces combats qui ont d’ailleurs présidé aux récentes panthéonisations de Missak et Mélinée Manouchian et de Robert Badinter.

Comme vous le relevez, l’entrée au Panthéon des restes de personnes illustres relève, sous la Ve République, d’un décret du Président de la République. La prochaine cérémonie devrait être dédiée à Marc Bloch, grand historien et martyr de la Résistance.

Il appartiendra au Président de réserver la suite qu’il jugera pertinente à la proposition de transfert des cendres de Camille Claudel, d’autres personnalités pouvant également prétendre à cet hommage national.

absence de transparence sur l’avenir des financements alloués au programme « notre école, faisons-la ensemble »

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Vayssouze-Faure, auteur de la question n° 679, adressée à M. le ministre de l’éducation nationale.

M. Jean-Marc Vayssouze-Faure. Monsieur le ministre, en 2022, le Président de la République lançait le Conseil national de la refondation (CNR). Dans ce cadre, le programme « Notre école, faisons-la ensemble » faisait l’objet d’une large campagne de communication de la part de l’État, invitant les établissements scolaires à se saisir du dispositif pour bénéficier de financements et, ainsi, mettre en œuvre leurs projets.

Le Gouvernement et le ministère de l’éducation nationale ont vanté, de manière très appuyée, les mérites de ce dispositif auprès des élus locaux et des enseignants, en s’engageant à ce que des financements soient effectivement attribués. Or, si certains projets se sont concrétisés, de nombreux établissements ayant fait acte de candidature n’ont jamais été informés des suites données à leur dossier. D’autres ont été destinataires d’une réponse favorable, mais n’ont toujours pas obtenu les financements censés contribuer à la concrétisation des projets labellisés.

Dans le Lot, les personnels de plusieurs écoles et collèges ont pris la peine de se mobiliser, et de déployer leur énergie pour bâtir des projets sérieux et adaptés au contexte local. Plus d’un an et demi après le dépôt de leur candidature, certains établissements n’ont toujours pas reçu de réponse de l’État.

Les personnels éducatifs m’ont fait part d’un sentiment légitime de déception au regard du travail qu’ils ont fourni et des attentes suscitées par le ministère de l’éducation nationale autour de ce programme. De nombreux autres exemples m’ont été rapportés à l’échelle de plusieurs académies, ce qui fait craindre une mise à l’arrêt brutale de ces financements à l’échelle nationale.

Alors que 500 millions d’euros étaient annoncés sur cinq ans, 95 millions d’euros avaient été alloués en février 2024 : il s’agit du dernier chiffre actualisé dont nous disposons. Où en est-on à ce jour ?

Monsieur le ministre, les aides annoncées par l’État seront-elles, oui ou non, versées aux écoles lauréates ? S’agissant des candidatures restées lettre morte, vous engagez-vous à apporter une réponse transparente à l’intégralité des établissements ayant sollicité un accompagnement ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Edouard Geffray, ministre de léducation nationale. Monsieur le sénateur Jean-Marc Vayssouze-Faure, le programme « Notre école, faisons-la ensemble » a été lancé en 2022 afin de « faire école » différemment, de manière très partenariale, en réunissant les parents d’élèves, les enseignants, la communauté éducative et, au premier chef, les collectivités territoriales.

Cette démarche a suscité une dynamique très importante : au total, 8 600 projets ont d’ores et déjà été validés, et 2,9 millions d’élèves en sont bénéficiaires, soit quasiment un élève sur quatre.

Parmi ces projets, on peut en citer trois : une méthode d’enseignement des mathématiques au collège Léon-Huet de La Roche-Posay, qui s’est traduite par une amélioration des résultats au brevet ; un passeport maritime pour former les élèves au monde maritime afin d’ouvrir des perspectives d’emploi et de lutter contre le décrochage scolaire au collège Archipel des Saintes de Terre-de-Haut, en Guadeloupe ; une classe opéra encourageant le travail sur l’oral et donnant lieu à un projet linguistique dans un collège d’Aix-en-Provence.

Par la mobilisation d’une enveloppe nationale dédiée au fonds d’innovation pédagogique (FIP), ce sont aussi près de 123 millions d’euros qui ont été engagés entre 2022 et 2024.

Pour autant, dans la période actuelle, la contrainte budgétaire est forte. Par ailleurs, une fois la phase d’initiation achevée, la démarche a vocation à s’intégrer dans le fonctionnement normal des écoles et à « faire école ».

C’est la raison pour laquelle, depuis l’été 2025, une nouvelle enveloppe budgétaire de 13,4 millions d’euros a été déléguée aux académies pour soutenir prioritairement les projets déjà engagés devant se poursuivre dans le temps long. Au total, plus de 136 millions d’euros ont été consacrés à cette politique depuis 2022.

J’ai bien entendu votre alerte, monsieur le sénateur. Nous devons en effet donner une réponse – j’y veillerai personnellement – à tous les établissements qui ont candidaté. Par ailleurs, nous allons poursuivre la démarche engagée, même si le contexte budgétaire est plus contraint.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Vayssouze-Faure, pour la réplique.

M. Jean-Marc Vayssouze-Faure. Je vous remercie, monsieur le ministre, de cette réponse. Cette transparence et cet effort, nous les devons à nos écoles de proximité, à nos collèges et à nos lycées.

participation des communes au financement de la scolarisation des élèves

M. le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, auteure de la question n° 767, adressée à M. le ministre de l’éducation nationale.

Mme Annie Le Houerou. Monsieur le ministre, l’article L.442-5-1 du code de l’éducation, issu de la loi du 28 octobre 2009 tendant à garantir la parité de financement entre les écoles élémentaires publiques et privées sous contrat d’association lorsqu’elles accueillent des élèves scolarisés hors de leur commune de résidence, dite loi « Carle », prévoit que les communes du lieu de résidence des élèves ont l’obligation de participer aux dépenses de fonctionnement des classes sous contrat d’association pour les élèves scolarisés dans une autre commune, lorsqu’elles ne disposent pas des capacités d’accueil dans leurs propres écoles publiques.

Dans le cadre d’un regroupement pédagogique intercommunal (RPI) réalisé sur l’initiative d’un établissement public de coopération intercommunale, et lorsque l’ensemble des niveaux d’enseignement du premier degré est proposé et accessible à tous les enfants domiciliés dans les communes membres, ces communes ne sont pas tenues de contribuer financièrement à la scolarisation d’élèves dans une école privée extérieure, dès lors que l’offre publique complète existe et est accessible. Dans ce cas, l’offre d’accueil de l’enseignement public est appréciée non pas commune par commune, mais à l’échelle du regroupement pédagogique.

Lorsque ce regroupement pédagogique intercommunal s’organise dans le cadre d’une convention associative entre des communes, l’offre d’accueil de l’enseignement public est appréciée commune par commune, et non à l’échelle des communes membres du RPI. L’obligation financière s’impose pour les classes qui ne sont pas assurées dans la commune de résidence de l’élève.

Ainsi, deux communes placées dans une situation identique sur le plan de l’offre scolaire se voient appliquer des règles financières différentes selon le seul critère du statut de l’organisation de leur RPI.

Pouvez-vous m’indiquer les raisons qui justifient cette différence de traitement entre des communes qui assurent toutes une offre complète et accessible de scolarisation ? En effet, l’offre d’enseignement public est identique pour les familles dans les deux situations.

Une évolution de la réglementation peut-elle être envisagée afin d’assurer une égalité de traitement entre des communes qui contribuent au financement de l’éducation de leurs enfants dans le périmètre de plusieurs communes associées, et afin de garantir le service tant en investissement qu’en fonctionnement ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Edouard Geffray, ministre de léducation nationale. Madame la sénatrice Annie Le Houerou, je vous remercie d’avoir attiré mon attention sur le cas particulier des RPI constitués sans transfert de compétence à un établissement public de coopération intercommunale (EPCI).

Le droit en vigueur repose sur un principe clair : la commune de résidence est responsable de l’organisation scolaire, sauf lorsqu’elle a explicitement transféré cette compétence à une intercommunalité.

Dans le cadre d’un regroupement pédagogique intercommunal « conventionnel », chaque commune demeure donc compétente et l’appréciation de la capacité d’accueil de l’école publique se fait à l’échelon communal. À l’inverse, lorsqu’un EPCI assume la compétence scolaire, la capacité d’accueil est appréciée au niveau du territoire intercommunal, avec les conséquences que vous avez mentionnées sur la prise en charge du forfait pour les élèves scolarisés dans un établissement privé sous contrat.

Très concrètement, la distinction résulte aujourd’hui du degré d’intégration scolaire que les communes choisissent d’établir au sein des intercommunalités. Pour autant, j’entends très bien qu’au quotidien cette distinction soit difficilement lisible pour les collectivités, ce qui peut susciter des interrogations, voire des confusions.

À mon sens, nous devons garder deux enjeux à l’esprit.

Le premier, c’est celui de la transparence et de la communication la plus claire possible vis-à-vis des collectivités : il faut que les communes, lorsqu’elles envisagent de transférer leur compétence scolaire à un EPCI, puissent d’abord être dûment informées par les services de l’État des conséquences que vous venez de mentionner, madame la sénatrice.

Le second enjeu, c’est l’éventuelle modification de la réglementation. Ayant été sensibilisé sur ce point, je vais demander aux services du ministère de dresser un panorama complet de la situation. À ce jour, nous ne disposons pas des éléments permettant d’étudier le cas particulier que vous avez soulevé. Sur ce fondement, j’examinerai évidemment avec la plus grande bienveillance une éventuelle modification des règles applicables en la matière.

blocages administratifs et pénurie de main-d’œuvre agricole

M. le président. La parole est à M. Laurent Burgoa, en remplacement de Mme Christine Bonfanti-Dossat, auteur de la question n° 709, adressée à M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères.

M. Laurent Burgoa. Monsieur le ministre, je supplée ma collègue Christine Bonfanti-Dossat, sénateur de Lot-et-Garonne, qui souhaitait attirer l’attention du Gouvernement sur les blocages administratifs et la pénurie de main-d’œuvre agricole.

Dans le département du Lot-et-Garonne comme dans tant d’autres territoires agricoles, nos producteurs vivent aujourd’hui une situation ubuesque et profondément injuste. Chaque année, la récolte devient un véritable casse-tête administratif.

En effet, les exploitants attendent des mois pour obtenir les visas de leurs travailleurs saisonniers étrangers, alors qu’il s’agit d’hommes et de femmes qu’ils connaissent, qui reviennent chaque année et dont les autorisations de travail sont parfaitement en règle.

Malgré des dossiers complets, les réponses tardent. Les refus s’accumulent, les délais s’étirent et les services consulaires, comme l’Office français de l’immigration et de l’intégration (Ofii), laissent les exploitants dans une incertitude totale.

En conséquence, des fruits restent sur les arbres, faute de bras pour les cueillir. En 2024 déjà, de nombreux arboriculteurs du département de Lot-et-Garonne ont perdu une partie de leur récolte. En 2025, le scénario se répète, avec les mêmes drames économique et humain.

Cette situation n’est plus une exception ; c’est un dysfonctionnement structurel, mais aussi, disons-le clairement, le résultat d’une profonde absurdité administrative. Comment expliquer qu’alors que nos frontières peuvent être traversées sans contrôle nos agriculteurs, eux, peinent à obtenir quelques dizaines de visas pour des travailleurs réguliers, identifiés et indispensables à la survie de leur exploitation ?

Ce « deux poids, deux mesures » alimente un sentiment d’injustice, de colère et de découragement. Nos producteurs se sentent abandonnés. Ils voient leur travail, leur engagement et parfois même leur patrimoine sacrifiés sur l’autel d’une bureaucratie incompréhensible.

Aussi, monsieur le ministre, je vous le demande : quelles instructions précises comptez-vous donner aux services consulaires et à l’Ofii pour que de tels blocages cessent enfin ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Benjamin Haddad, ministre délégué auprès du ministre de lEurope et des affaires étrangères, chargé de lEurope. Vous avez raison, monsieur le sénateur, nous ne pouvons pas sacrifier notre agriculture à cause de procédures administratives excessives.

La réforme des services de la main-d’œuvre étrangère, entrée en vigueur en avril 2021, a permis de dématérialiser et de simplifier la procédure. L’employeur saisit désormais une plateforme nationale pour obtenir une autorisation de travail, transmise ensuite à l’Office français de l’immigration et de l’intégration au Maroc, dépendant du ministère de l’intérieur, qui organise les rendez-vous auprès de notre prestataire TLScontact. Le consulat général de France à Casablanca intervient en fin de chaîne pour instruire les demandes de visa.

Les chiffres disponibles mettent en évidence un effet de vases communicants : le nombre de visas accordés diminue, tandis que les titres de séjour pluriannuels délivrés en préfecture augmentent. En 2024, plus de 10 000 titres de séjour portant la mention « travailleur saisonnier » ont été établis, ce qui est le signe d’une fidélisation croissante des salariés par leurs employeurs.

Les refus résultent d’un examen rigoureux mené en coopération avec l’Ofii. Ils concernent principalement des situations où sont constatés un état de santé incompatible avec les travaux agricoles, une méconnaissance manifeste de l’employeur, un recours à des intermédiaires rémunérés, la présentation de documents douteux, ou encore des taux de retour insuffisants pour certaines entreprises – lorsque ces derniers sont inférieurs à 80 %, l’entreprise ne peut plus se voir accorder de nouveaux visas.

Monsieur le sénateur, ces garde-fous indispensables pour garantir la crédibilité du dispositif ne doivent pas, en effet, fragiliser nos filières agricoles. C’est pourquoi un travail interministériel est en cours, en lien avec les organisations professionnelles, pour améliorer la lisibilité et la prévisibilité de la procédure. Il faut concilier les besoins des exploitants agricoles avec la nécessaire maîtrise des flux migratoires.

Vous pouvez compter sur notre mobilisation pour que l’agriculture française puisse continuer de compter sur une main-d’œuvre saisonnière encadrée, régulière et respectueuse de nos règles.