M. le président. La parole est à M. Laurent Burgoa, pour la réplique.
M. Laurent Burgoa. Monsieur le ministre, j’ai bien entendu votre réponse, mais, alors que nous nous trouvons dans cet hémicycle, sachez que, dans les champs, les fruits pourrissent et les producteurs s’épuisent… Ce que nos agriculteurs demandent, comme beaucoup de nos concitoyens, ce n’est pas une faveur, mais du bon sens !
situation du réseau de l’enseignement français en espagne
M. le président. La parole est à Mme Évelyne Renaud-Garabedian, auteur de la question n° 775, adressée à Mme la ministre déléguée auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères, chargée de la francophonie, des partenariats internationaux et des Français de l’étranger.
Mme Évelyne Renaud-Garabedian. Quelle ne fut pas la stupeur des enseignants, des familles et des élus des Français de l’étranger d’apprendre que la Mission laïque française (MLF) cherchait un repreneur privé pour tout son réseau en Espagne ! Je dis bien « stupeur », car la nouvelle ne nous est pas parvenue directement de la MLF : ce n’est que grâce à l’insistance d’une association de parents d’élèves auprès de la direction que la manœuvre a été rendue publique.
Et pourtant, la décision de la MLF de se désengager de ses neuf établissements en Espagne, prise sans aucune concertation, est lourde de conséquences. Le projet de cession, déjà très avancé, intervient après des années de hausse régulière des frais d’écolage, le déconventionnement de deux lycées et la vente de l’établissement de Séville au groupe Odyssey.
La MLF est sur le point de céder des établissements et un patrimoine foncier dont la valeur résulte en partie de la contribution significative des familles et d’un important soutien public, tant pour la rémunération d’enseignants détachés que pour l’octroi de bourses scolaires.
Les familles, les enseignants et les élus s’interrogent. Pourquoi un tel retrait ? Dans quels délais ? Comment expliquer une telle opacité, alors même qu’un accord-cadre a été conclu entre l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger (AEFE) et la MLF ? Tous demandent une chose simple : la transparence et leur participation aux décisions.
Que compte faire le Gouvernement pour que la cession ne conduise ni à une captation de valeur par des opérateurs privés, ni à une baisse du niveau de l’enseignement, ni à une augmentation des frais de scolarité, ni au licenciement du personnel ?
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Benjamin Haddad, ministre délégué auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères, chargé de l’Europe. Aux côtés de notre réseau diplomatique en Espagne, nous suivons avec la plus grande attention la situation des établissements relevant de la Mission laïque française (MLF).
Je le rappelle, la MLF est une association de droit privé, indépendante de l’État. Ses décisions relèvent de son conseil d’administration, dans lequel le ministère siège à titre consultatif, sans droit de vote.
Les établissements concernés ne perçoivent pas de subventions publiques, hormis – vous l’avez mentionné – les bourses attribuées aux élèves français éligibles, comme dans tout établissement homologué.
Le 16 octobre 2025, la MLF a annoncé son désengagement de ses neuf établissements en Espagne, invoquant d’importantes difficultés financières, en l’occurrence une perte cumulée de 18,2 millions d’euros en dix ans et un déficit annuel estimé à 2,5 millions d’euros.
Le réseau a perdu environ 630 élèves en deux ans, ce qui, malgré une hausse de 19 % des frais de scolarité, a fragilisé durablement sa trésorerie. Cette situation a conduit la MLF à rechercher un repreneur unique avant la fin de l’année scolaire 2025-2026.
Je vous l’assure, madame la sénatrice, le ministère a regretté de ne pas avoir été informé plus en amont. Nous avons rappelé à la MLF la nécessité d’une concertation avec les familles, les enseignants et les représentants des Français de l’étranger, dans la transparence que vous appelez de vos vœux.
La MLF s’est engagée à garantir la continuité pédagogique, à reprendre les personnels et à maintenir l’homologation des établissements pour préserver la reconnaissance de la scolarité française.
Un calendrier a été élaboré : un point d’étape sur les offres reçues se tiendra le 4 décembre ; l’offre ferme sera choisie le 19 février ; enfin, le vote définitif ainsi que la signature des actes de cession interviendront en avril, pour un transfert effectif en septembre 2026.
Vous pouvez compter sur la mobilisation de nos postes et de nos consulats pour accompagner les familles et veiller à la continuité du service éducatif français à l’étranger.
M. le président. La parole est à Mme Évelyne Renaud-Garabedian, pour la réplique.
Mme Évelyne Renaud-Garabedian. Monsieur le ministre, vous venez d’indiquer que l’aide de l’État ne concernait que les bourses scolaires, mais celui-ci prend également en charge la rémunération du personnel enseignant mis à la disposition des établissements de la MLF.
péréquation des ressources des communes, dotation de solidarité rurale
M. le président. La parole est à M. Patrick Chaize, auteur de la question n° 646, transmise à Mme la ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation.
M. Patrick Chaize. Le code général des collectivités territoriales encadre l’attribution de la dotation de solidarité rurale (DSR) aux communes de moins de 10 000 habitants.
Dite « dotation de péréquation », la DSR est accordée pour tenir compte, d’une part, des charges que ces communes supportent pour contribuer au maintien de la vie sociale en milieu rural et, d’autre part, de l’insuffisance de leurs ressources fiscales. La DSR est divisée en trois fractions : la fraction bourg-centre, la fraction péréquation et la fraction cible.
Cela étant, les élus déplorent parfois le manque de transparence des critères de répartition de cette dotation au vu des écarts parfois importants constatés au niveau des montants attribués entre des communes dont les caractéristiques sont pourtant similaires.
Tel est le cas pour la commune de Polliat, dans le département de l’Ain. D’une comparaison effectuée avec les dotations perçues par treize communes comptant entre 2 500 et 3 000 habitants, il ressort que le montant de la DSR de cette commune de 2 700 habitants est inférieur de moitié à la moyenne, les écarts allant de 1à 3.
Si la raison pour laquelle il en va ainsi tient à ce que cette commune n’est pas reconnue comme un bourg-centre, c’est parfaitement contestable. En effet, Polliat est la deuxième commune du canton la plus peuplée, et le nombre de ses habitants a crû de 10 % en dix ans. Elle doit être considérée comme un pôle structurant, puisqu’elle dispose de nombreux équipements et services qui la légitiment dans ce rôle.
Dès lors que les critères d’attribution de la DSR ne reflètent plus la réalité, il serait opportun de réévaluer la situation de la commune en tenant compte de son rôle territorial croissant.
Aussi, le Gouvernement envisage-t-il de prendre des mesures pour réformer le mécanisme de la DSR, et ce afin d’assurer un financement plus équitable, en adéquation avec les réalités et les besoins de nos communes ?
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Michel Fournier, ministre délégué auprès de la ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation, chargé de la ruralité. Monsieur le sénateur, vous interrogez le Gouvernement sur les conditions d’octroi de la dotation de solidarité rurale et sur les écarts parfois importants que l’on constate entre des communes comparables.
Vous avez notamment évoqué la commune de Polliat, dans l’Ain. Je peux vous dire que je comprends parfaitement le sentiment d’injustice dont vous faites part, qui est d’ailleurs partagé par de nombreux maires ruraux, surtout lorsqu’ils constatent des différences qu’ils jugent difficiles à expliquer.
La DSR repose sur un ensemble de critères prévus par la loi, qui évoluent chaque année : la population ; le potentiel financier ; les dépenses d’équipement ; le revenu moyen par habitant ; ou encore les charges de centralité. Ces indicateurs visent à garantir une répartition équitable de la dotation, conformément au principe constitutionnel de péréquation.
Pour ce qui concerne Polliat, la commune n’est pas éligible à deux des trois fractions de la DSR. D’une part, la fraction cible est réservée aux 10 000 communes rurales les plus fragiles ; d’autre part, la fraction bourg-centre est attribuée aux communes chefs-lieux, sièges de bureaux centralisateurs ou représentant au moins 15 % de la population de leur canton. Or Polliat n’atteint pas ce seuil, et n’est pas non plus chef-lieu de canton. Cela explique peut-être la différence constatée entre les sommes allouées, sans qu’il y ait pour autant d’erreur dans les calculs.
En revanche, je partage pleinement votre constat : il faut sans doute faire évoluer la fraction bourg-centre. En effet, ses critères, fondés sur la réforme de la carte des cantons de 2014, ne correspondent plus toujours aux réalités locales, notamment à la situation des anciens chefs-lieux de canton qui faisaient fonction de relais ruraux.
Il faut aussi, me semble-t-il, réfléchir à d’autres critères, notamment celui de la surface, auquel je tiens personnellement. La réflexion s’est engagée dans le cadre des travaux sur la réforme des dotations. Elle devra être menée en lien étroit avec les élus et les associations d’élus, car toute modification entraîne des effets redistributifs importants.
Monsieur le sénateur, je tiens à vous assurer que le Gouvernement reste pleinement mobilisé pour rendre ces dotations plus lisibles, plus justes et plus cohérentes avec les réalités vécues par nos communes rurales – j’en parle en connaissance de cause.
M. le président. Il faut conclure, monsieur le ministre.
M. Michel Fournier, ministre délégué. C’est l’esprit même de la solidarité que nous voulons renforcer.
M. le président. La parole est à M. Patrick Chaize, pour la réplique.
M. Patrick Chaize. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse somme toute assez positive. Nous nous tenons évidemment à votre disposition pour travailler sur ce sujet, qui revêt une grande importance en termes d’égalité pour les territoires.
Des progrès restent par ailleurs à faire en matière de transparence : chaque commune devrait connaître les différents critères d’attribution, pour rendre les dotations les plus compréhensibles possible.
paiement par le pétitionnaire de l’instruction des permis de construire
M. le président. La parole est à M. Laurent Burgoa, auteur de la question n° 672, adressée à Mme la ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation.
M. Laurent Burgoa. Monsieur le ministre, j’appelle votre attention sur les difficultés financières que rencontrent les communes face au coût de l’instruction des permis de construire et des autres documents d’urbanisme.
En effet, depuis le désengagement des services de l’État, la facture est adressée aux communes. Cela représente une charge significative pour les plus petites d’entre elles, notamment celles qui sont situées à proximité des grandes agglomérations et qui sont, à ce titre, exposées à une forte pression foncière.
La décentralisation de cette compétence, bien qu’elle se justifie en raison du service de proximité qu’il s’agit de rendre, fait peser sur les communes une pression financière disproportionnée. Pour certaines, le coût de ces démarches peut très facilement atteindre 10 000 euros par an, soit 500 euros par dossier. En outre, certains dossiers sont mal préparés, ce qui entraîne le réexamen de la demande d’un seul et même pétitionnaire.
Auparavant, la direction départementale de l’équipement (DDE) réalisait gratuitement l’instruction des permis de construire pour les communes. Dans cette optique, il ne semblerait pas illégitime que la personne qui sollicite un permis de construire prenne en charge le coût de l’instruction de sa demande. Qu’envisage le Gouvernement pour soutenir financièrement les communes face à ces surcoûts ?
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Michel Fournier, ministre délégué auprès de la ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation, chargé de la ruralité. Monsieur le sénateur, vous soulignez avec raison les difficultés que rencontrent de nombreuses petites communes pour assumer le coût de l’instruction des autorisations d’urbanisme. Ce sujet très concret touche au quotidien des maires ruraux et de leurs équipes.
Depuis que l’État n’exerce plus cette compétence, beaucoup d’élus considèrent que cette charge nouvelle est disproportionnée par rapport aux moyens humains et financiers dont dispose leur commune. Je connais bien cette réalité : instruire un permis de construire n’est pas seulement un acte administratif ; c’est aussi un enjeu en termes d’aménagement, de sécurité et de responsabilité.
La loi a posé un cadre clair : l’instruction et la délivrance des autorisations d’urbanisme sont des compétences décentralisées, exercées par les communes ou, plus souvent encore, par les intercommunalités.
Toutefois, l’État reste présent : pour les communes de moins de 10 000 habitants qui ne relèvent pas d’un grand EPCI, ses services peuvent encore assurer gratuitement l’étude technique des dossiers. On a encore recours à cette faculté dans de nombreux départements, même si, effectivement, ce n’est pas le cas partout.
Par ailleurs, la mutualisation entre communes, au sein d’un service commun d’instruction, est encouragée et permet d’obtenir de très bons résultats dans certains territoires. Depuis la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (Élan), il est aussi possible de confier cette mission à des prestataires privés, même si le législateur a clairement exclu la possibilité d’en reporter le coût sur le pétitionnaire, comme vous venez de le suggérer.
C’est une question de principe : un permis de construire reste un acte public et son instruction relève de la puissance publique.
Pour autant, le Gouvernement n’ignore pas la tension financière à laquelle sont soumises les communes. C’est pourquoi la dotation générale de décentralisation, d’un montant de 26 millions d’euros en 2025, vise à soutenir les communes et les EPCI dans la mise en œuvre de leurs documents d’urbanisme.
Monsieur le sénateur, je vous le dis simplement : le Gouvernement est pleinement conscient de la charge que l’instruction des documents d’urbanisme représente. Il n’est pas question de laisser les maires seuls face à ces difficultés.
M. le président. La parole est à M. Laurent Burgoa, pour la réplique.
M. Laurent Burgoa. Monsieur le ministre, je sais pertinemment que vous connaissez bien le sujet, puisque vous étiez, dans de précédentes fonctions, président de l’Association des maires ruraux de France.
En réalité, je souhaitais avant tout savoir qui, selon vous, de l’usager ou du contribuable, devait payer. À un moment donné, il faudra, me semble-t-il, mettre davantage à contribution l’usager que le contribuable. Pourquoi l’instruction des dossiers est-elle du ressort des municipalités ?
Vous devriez plutôt exiger que le coût du permis de construire soit assumé par celui ou celle qui en fait la demande. Dans la ruralité, une telle mesure serait très appréciée. C’est d’ailleurs pourquoi je vous fais toute confiance pour inviter vos services à y réfléchir.
constat d’insalubrité d’un logement et pouvoir de police du maire
M. le président. La parole est à Mme Laurence Garnier, auteure de la question n° 681, adressée à Mme la ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation.
Mme Laurence Garnier. Monsieur le ministre, j’ai récemment été alertée par le maire de La Chapelle-Glain, petite commune rurale du pays de Châteaubriant, en Loire-Atlantique, qui se trouvait en difficulté, parce qu’on le sollicitait pour réaliser un constat d’insalubrité d’un logement de sa commune.
Le code de la santé publique précise effectivement que, dans le cadre de ses pouvoirs de police, le maire a la responsabilité de contrôler les règles d’hygiène et de sécurité des logements sur son territoire. Concrètement, cela veut dire qu’il doit visiter le logement, entamer si besoin une médiation avec le propriétaire ou le locataire, rédiger un courrier ou prendre un arrêté enjoignant de réaliser des travaux, effectuer ensuite la visite de contrôle et, le cas échéant, signer un procès-verbal d’infraction au règlement sanitaire départemental.
Quand la commune est suffisamment grande pour disposer d’un service communal d’hygiène et de santé, les choses se passent bien, puisque le service compétent instruit le constat d’insalubrité en lien avec les services de la préfecture et ceux de l’agence régionale de santé (ARS).
Lorsque la commune est en revanche plus petite, la situation est à la fois plus floue et plus complexe. Souvent, les maires des communes rurales – vous les connaissez bien, monsieur le ministre – sont en difficulté, car ils ne disposent pas des services compétents pour réaliser les constats d’insalubrité dans leurs communes.
Monsieur le ministre, pouvez-vous nous dire si, dans les petites communes rurales, il revient bien aux délégations départementales de l’ARS compétentes et non aux maires des communes concernées de réaliser ces constats d’insalubrité ?
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Michel Fournier, ministre délégué auprès de la ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation, chargé de la ruralité. Madame la sénatrice, vous attirez l’attention du Gouvernement sur un sujet essentiel, celui du pouvoir de police du maire face à l’insalubrité des logements. Cette question touche directement à la santé publique, à la sécurité, ainsi qu’à la dignité des habitants.
En la matière, la répartition des compétences peut sembler complexe. Je la rappelle donc simplement : le pouvoir de police spéciale en matière d’insalubrité relève du préfet, sur le fondement du code de la construction et de l’habitation. Cependant, nous le savons, le maire est toujours en première ligne : c’est lui qui alerte, constate et transmet les signalements.
Comme vous l’avez souligné, lorsqu’une commune dispose d’un service communal d’hygiène et de santé, c’est ce service qui établit le rapport d’évaluation. Lorsqu’elle n’en dispose pas, c’est bien l’agence régionale de santé qui intervient pour réaliser ce rapport et enclencher la procédure.
Ainsi, les maires ne sont jamais seuls : l’État, par l’intermédiaire de ses services déconcentrés, les accompagne systématiquement. C’est une garantie essentielle.
Je le sais, ces situations sont souvent lourdes à gérer pour un élu local. Il faut faire face à des situations humaines souvent très délicates, parfois même à la détresse de familles, tout en appliquant la loi. Le Gouvernement en est pleinement conscient et veut simplifier et clarifier les circuits d’intervention.
Madame la sénatrice, vous pouvez compter sur la mobilisation conjointe des préfets et des ARS pour continuer de soutenir les maires dans cette mission difficile, mais essentielle.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Garnier, pour la réplique.
Mme Laurence Garnier. Monsieur le ministre, je vous remercie de cette clarification bienvenue.
Effectivement, ainsi que vous l’avez indiqué, les maires sont en première ligne, car ils sont les premiers informés. Je transmettrai votre réponse au maire de la commune concernée, ainsi qu’à d’autres maires qui pourraient se trouver dans des situations similaires, pour leur faire savoir qu’ils peuvent solliciter les services de l’ARS.
loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains et perception des droits de mutation
M. le président. La parole est à M. Max Brisson, auteur de la question n° 717, adressée à Mme la ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation.
M. Max Brisson. L’article 55 de la loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU) prévoit l’obligation pour les communes de plus de 3 500 habitants qui appartiennent à des EPCI de plus de 50 000 habitants comprenant au minimum une commune de plus de 15 000 habitants de disposer au sein de leur parc de résidences principales d’au moins 25 % de logements sociaux, ou d’au moins 10 % de logements sociaux dans les territoires moins tendus.
Ainsi, toute commune répondant à ces critères se trouve soumise aux obligations de la loi dès lors qu’elle compte plus de 3 500 habitants. Cela signifie qu’une commune qui dépasserait tout juste ce seuil doit procéder à la mise en conformité de ses politiques en matière de logements sociaux et d’aménagement.
Parallèlement, l’article 1584 du code général des impôts dispose que seules les communes de plus de 5 000 habitants sont habilitées à percevoir directement les droits de mutation à titre onéreux (DMTO).
Il en découle dès lors une distorsion, puisque les communes comptant entre 3 500 et 4 999 habitants sont tenues d’assumer les charges et de respecter les contraintes définies par la loi SRU, sans bénéficier en retour du levier financier que constitue la perception directe des DMTO. Une telle manne leur serait pourtant très utile pour financer la mise en œuvre de ces obligations, souvent très coûteuses.
Face à cette distorsion, ma question est double. Comment le Gouvernement explique-t-il la différence de traitement réservé aux communes comptant entre 3 500 et 4 999 habitants ? Envisage-t-il d’y remédier en offrant aux communes de plus de 3 500 habitants la possibilité de percevoir directement les DMTO ?
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Michel Fournier, ministre délégué auprès de la ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation, chargé de la ruralité. Monsieur le sénateur, votre question porte, à juste titre, sur la situation des communes comprenant entre 3 500 et 5 000 habitants, qui sont soumises aux obligations de la loi SRU sans pour autant percevoir directement les droits de mutation à titre onéreux, une situation qui peut effectivement paraître incohérente.
Le régime actuel distingue deux cas.
Les communes de plus de 5 000 habitants et celles qui sont classées stations de tourisme perçoivent directement des DMTO. Les communes de moins de 5 000 habitants, elles, bénéficient d’une attribution via le fonds départemental de péréquation, qui est alimenté par le produit de cette taxe. Ce fonds, dont les modalités de répartition sont définies par le conseil départemental selon des critères précis – population, effort fiscal, dépenses d’équipement –, permet à toutes les communes, même les plus petites, de bénéficier d’un levier financier.
En pratique, les communes de 3 500 à 5 000 habitants ne sont donc pas privées de tout soutien. Elles perçoivent en effet une part de ce fonds, calculée pour refléter leurs charges réelles.
Je comprends néanmoins qu’une telle distinction puisse sembler injuste – il y a inévitablement des effets de seuil –, dès lors que ces communes supportent des obligations nouvelles, notamment au titre de la loi SRU.
C’est pourquoi le Gouvernement est attentif à l’équité du dispositif, et est ouvert à son évolution dans le cadre des discussions que nous aurons sur les dotations locales. Une réflexion sera menée sur ce point.
Notre objectif est simple : garantir à chaque commune les moyens d’assumer ses responsabilités sans compromettre son équilibre financier.
M. le président. La parole est à M. Max Brisson, pour la réplique.
M. Max Brisson. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse et de l’esprit d’ouverture dont vous venez de faire preuve, puisque vous avez parlé d’une question juste et d’une situation incohérente et que vous appelez à réfléchir collectivement à ce sujet.
Je peux vous dire que beaucoup de maires de communes de la côte basque, dont la population excède tout juste les 3 500 habitants, et qui sont de ce fait soumises aux dispositions de la loi SRU, seront très heureux de vous accueillir et de travailler avec vous à une évolution de la législation. Ces communes ne sont pas obligatoirement les plus favorisées dans le cadre de la répartition des crédits du fonds départemental de péréquation que vous avez mentionné.
Il y a là un vrai sujet. Vous avez appelé à l’ouverture et au travail : je suis à votre disposition !
nouvelles modalités de recensement de la voirie communale pour le calcul de la dotation de solidarité rurale
M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Arnaud, auteur de la question n° 729, adressée à Mme la ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation.
M. Jean-Michel Arnaud. Ma question porte sur les nouvelles modalités de recensement de la voirie communale pour le calcul de la dotation de solidarité rurale (DSR).
Jusqu’alors, la longueur de la voirie prise en compte pour le calcul de la DSR correspondait à celle des voies classées dans le domaine public communal. Cette donnée était donc transmise directement par la collectivité à la préfecture.
L’article 178 de la loi de finances pour 2025 a modifié le mode de calcul : le recensement est désormais fondé sur la typologie de la voirie et non plus sur sa domanialité. L’Institut national de l’information géographique et forestière (IGN) se voit ainsi confier la mission de produire les données de référence relatives aux longueurs de voirie. Il s’agit donc non plus de déclarations communales aux préfectures, mais d’un recensement géographique qui repose sur des données topographiques.
Dès lors, la direction générale des collectivités locales, s’appuyant sur ces données topographiques, exclut de fait les chemins et les routes non revêtues, ainsi que le directeur de l’IGN me l’a récemment confirmé. Alors que les territoires ruraux de montagne disposent naturellement d’un plus grand réseau de chemins et de routes non revêtues que les territoires urbains, la minoration du linéaire de voirie communale a pour conséquence de diminuer la part de dotation globale de fonctionnement (DGF) qui leur est attribuée.
Dans les Hautes-Alpes, la longueur de voirie passe ainsi de 2 838 kilomètres à 2 520 kilomètres, soit une baisse de 11 % par rapport à 2024. Cette évolution a un impact significatif sur le calcul de la DSR – je pense à cet instant à la maire de la commune de Molines-en-Queyras, Valérie Garcin-Eyméoud, qui m’a alerté sur cette problématique.
Monsieur le ministre, que comptez-vous faire pour que ces nouvelles modalités de calcul ne se traduisent pas par la baisse de la part de dotation de solidarité rurale versée aux communes rurales, notamment aux communes de montagne ?
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Michel Fournier, ministre délégué auprès de la ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation, chargé de la ruralité. Monsieur le sénateur, vous interrogez le Gouvernement sur la réforme des modalités de recensement de la voirie communale pour le calcul de la dotation de solidarité rurale (DSR). C’est un sujet très concret, qui touche directement au financement des communes rurales.
Depuis la loi de finances pour 2025, les données de voirie utilisées pour la répartition de la DSR proviennent non plus des délibérations communales, mais des bases de données de l’Institut national de l’information géographique et forestière (IGN).
Cette évolution, validée par le Comité des finances locales, répond à un triple objectif : alléger le travail administratif des mairies et des préfectures, fiabiliser les données utilisées pour le calcul, garantir une égalité de traitement entre les communes.
Il en résulte, en effet, que les chemins non revêtus ne sont pas intégrés dans le nouveau mode de calcul. Ils ne l’étaient d’ailleurs pas davantage avec l’ancienne méthode ! (M. Jean-Michel Arnaud fait une moue dubitative.)
Quant à la longueur de voirie, elle n’intervient qu’à hauteur de 30 % dans le calcul des fractions « péréquation » et « cible » de la DSR. Son impact reste donc limité.
Je comprends néanmoins votre inquiétude, ainsi que celle des maires, ceux des territoires de montagne, mais, plus largement, ceux des communes caractérisées par un habitat dispersé. La voirie communale y est en effet souvent très étendue.
Les chiffres montrent toutefois que, dans votre département des Hautes-Alpes, monsieur le sénateur, la longueur de voirie recensée par l’IGN n’a baissé que de 1,9 %, tandis que, entre 2024 et 2025, 81 % des communes ont vu leur DSR augmenter en moyenne de plus de 10 %.
Monsieur le sénateur, le Gouvernement restera attentif aux effets de cette réforme sur ces territoires particuliers et saura, si nécessaire, ajuster les dispositifs en concertation avec les élus.