Sommaire
Présidence de Mme Sylvie Robert
Lutte contre les fraudes sociales et fiscales
Suite de la discussion en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission
Article 9 (précédemment examiné)
Candidatures à des commissions
PRÉSIDENCE DE M. Didier Mandelli
Lutte contre les fraudes sociales et fiscales
Suite de la discussion en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission
Article 15 (précédemment examiné)
Articles 18, 19 et 20 (précédemment examinés)
Articles 20 bis, 20 ter et 20 quater (nouveaux) (précédemment examinés)
Article additionnel avant l'article 23 (précédemment examiné)
Article 23 (précédemment examiné)
Articles additionnels après l'article 23 (précédemment examinés)
nomination de membres de commissions
Présidence de Mme Sylvie Robert
vice-présidente
1
Lutte contre les fraudes sociales et fiscales
Suite de la discussion en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission
Mme la présidente. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi relatif à la lutte contre les fraudes sociales et fiscales (projet de loi n° 24, texte de la commission n° 112, rapport n° 111, avis nos 104 et 106).
Dans la discussion des articles, nous sommes parvenus à l'article 8.
TITRE Ier (suite)
AMÉLIORER LA DÉTECTION DE LA FRAUDE FISCALE ET SOCIALE
Chapitre Ier (suite)
Mettre en commun et exploiter les informations nécessaires à la lutte contre la fraude
Article 8
I. – Le livre Ier de la troisième partie du code des transports est ainsi modifié :
1° L'article L. 3122-3 est ainsi modifié :
a) La seconde phrase du premier alinéa est complétée par les mots : « , sous réserve des dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 3124-7-1 » ;
b) Après le même premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Cette inscription au registre ne peut être mise à disposition d'un tiers, à titre gratuit ou onéreux. » ;
2° Au I de l'article L. 3124-7, les mots : « de contrevenir » sont remplacés par les mots : « d'exercer l'activité prévue à l'article L. 3122-1 sans être inscrit au registre mentionné » ;
3° La section 2 du chapitre IV du titre II est complétée par un article L. 3124-7-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 3124-7-1. – Lorsqu'un exploitant mentionné à l'article L. 3122-1 met à la disposition d'un tiers, à titre gratuit ou onéreux, l'inscription au registre mentionnée à l'article L. 3122-3 qu'il a obtenue pour son propre compte, l'autorité administrative compétente procède à la radiation de son inscription à ce registre.
« L'autorité administrative peut interdire à cet exploitant de s'inscrire à nouveau à ce registre, pendant une durée maximale de trois ans. Elle peut également interdire, pendant la même durée maximale, à toute personne agissant en qualité de dirigeant de droit ou de fait de cet exploitant d'intervenir en tant que dirigeant d'un exploitant inscrit au registre des exploitants.
« Les conditions d'application de ces dispositions sont définies par décret en Conseil d'État. » ;
4° Le II de l'article L. 3141-2 est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Dans le cas où le conducteur opère dans les conditions définies à l'article L. 7341-1 du code du travail, le professionnel mentionné à l'article L. 3141-1 du présent code s'assure que l'attestation d'inscription au registre mentionnée à l'article L. 3122-3 n'est pas mise à la disposition du conducteur par un tiers, à titre gratuit ou onéreux.
« Pour les autres cas, le professionnel mentionné à l'article L. 3141-1 s'assure que l'attestation d'inscription au registre mentionné à l'article L. 3122-3 est mise à la disposition du conducteur par l'exploitant qui l'emploie. » ;
5° Le chapitre Ier du titre IV est complété par un article L. 3141-2-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 3141-2-1. – Le professionnel mentionné à l'article L. 3141-1 s'assure que les exploitants mentionnés à l'article L. 3122-1 qu'il met en relation avec des passagers sont en mesure de démontrer :
« 1° Qu'ils ne pratiquent pas de travail dissimulé, au sens des articles L. 8221-3 et L. 8221-5 du code du travail ;
« 2° Qu'ils n'emploient pas de salarié non autorisé à exercer une activité professionnelle sur le territoire français.
« Les conditions d'application du présent article sont définies par décret en Conseil d'État. » ;
6° L'article L. 3143-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les manquements à l'article L. 3141-2-1 sont en outre recherchés et constatés par les agents de contrôle mentionnés à l'article L. 8271-1-2 du code du travail. » ;
7° Le chapitre III du titre IV est complété par un article L. 3143-5 ainsi rédigé :
« Art. L. 3143-5. – I. – La méconnaissance par le professionnel mentionné à l'article L. 3141-1 des dispositions de l'article L. 3141-2-1 est passible d'une sanction administrative dans les conditions prévues au présent article.
« Le montant maximal de l'amende est de 150 euros par mise en relation par un professionnel mentionné à l'article L. 3141-1 avec un ou des passagers, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 3141-2-1.
« Le montant total de l'amende infligée à un même professionnel ne peut excéder 3 000 000 euros par an.
« Cette amende administrative est prononcée par l'autorité administrative compétente, après constatation des faits par l'un des officiers, agents ou fonctionnaires mentionnés à l'article L. 3143-1.
« Pour fixer le montant total de l'amende, l'autorité administrative prend en compte les circonstances et la gravité du manquement, son éventuelle réitération, le comportement de son auteur, notamment sa bonne foi, ainsi que ses ressources et ses charges.
« Le délai de prescription de l'action de l'administration pour la sanction du manquement par une amende administrative est de deux années révolues à compter du jour où le manquement a été commis.
« Le professionnel mentionné à l'article L. 3141-1 peut contester la décision de l'administration devant le tribunal administratif, à l'exclusion de tout recours hiérarchique.
« L'amende est recouvrée comme les créances de l'État étrangères à l'impôt et au domaine. L'opposition à l'exécution ou l'opposition aux poursuites n'a pas pour effet de suspendre l'action en recouvrement de la créance.
« II. – Les conditions d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'État. »
II. – Les dispositions du 4° et du 5° du I sont applicables à compter d'une date fixée par décret en Conseil d'État et au plus tard le premier jour du dix-huitième mois suivant la publication de la présente loi. Ce même décret précise le délai applicable pour l'accomplissement des vérifications relatives aux exploitants que le professionnel mentionné à l'article L. 3141-1 du code des transports a déjà mis en relation avec des passagers avant cette date.
III (nouveau). – Le chapitre V du titre II du livre III du code de la route est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa de l'article L. 325-1-1, après la première occurrence du mot : « code », sont insérés les mots : « , le titre II du livre Ier de la troisième partie du code des transports » ;
2° Après le 8° du I de l'article L. 325-1-2, il est inséré un 9° ainsi rédigé :
« 9° Lorsque le véhicule a été utilisé :
« a) Pour exercer l'activité d'exploitant taxi sans être titulaire de l'autorisation de stationnement mentionnée à l'article L. 3121-1 du code des transports ;
« b) Ou pour exercer l'activité d'exploitant mentionnée à l'article L. 3122-1 du même code en contrevenant à l'article L. 3122-3 dudit code ;
« c) Ou pour contrevenir aux I, II et 2° et 3° du III de l'article L. 3120-2 du même code ;
« d) Ou pour réaliser des prestations de transport relevant du titre II du livre Ier de la troisième partie du même code, lorsque le conducteur ne dispose pas de la carte professionnelle mentionnée à l'article L. 3120-2-2 du même code correspondant à l'activité pratiquée. »
IV (nouveau). – Le titre II du livre Ier de la troisième partie du code des transports est ainsi modifié :
1° L'article L. 3124-4 est ainsi modifié :
a) Le I est ainsi modifié :
– les mots : « d'un an » sont remplacés par les mots : « de trois ans » ;
– le montant : « 15 000 € » est remplacé par le montant : « 45 000 € » ;
b) Après le 3° du II, il est inséré un 4° ainsi rédigé :
« 4° L'interdiction de paraître prévue au 12° de l'article 131-6 du code pénal. » ;
2° L'article L. 3124-7 est ainsi modifié :
a) Le I est ainsi modifié :
– les mots : « d'un an » sont remplacés par les mots : « de trois ans » ;
– le montant : « 15 000 € » est remplacé par le montant : « 45 000 € » ;
b) Le II est complété par un 4° ainsi rédigé :
« 4° L'interdiction de paraître prévue au 12° de l'article 131-6 du code pénal. » ;
3° L'article L. 3124-12 est ainsi modifié :
a) Le I est ainsi modifié :
– les mots : « d'un an » sont remplacés par les mots : « de trois ans » ;
– le montant : « 15 000 € » est remplacé par le montant : « 45 000 € » ;
– à la fin, les mots : « et au 1° du II de l'article L. 3120-2 » sont remplacés par les mots : « , au 1° du II ou au 2° ou 3° du III de l'article L. 3120-2 ou de réaliser ou faire réaliser des prestations de transport relevant du présent titre, lorsque le conducteur ne dispose pas de la carte professionnelle mentionnée à l'article L. 3120-2-2 correspondant à l'activité pratiquée » ;
b) Le II est ainsi modifié :
– au premier alinéa, les mots : « de l'infraction prévue » sont remplacés par les mots : « des infractions prévues » ;
– il est ajouté un 4° ainsi rédigé :
« 4° L'interdiction de paraître prévue au 12° de l'article 131-6 du code pénal. » ;
4° L'article L. 3124-13 est ainsi rétabli :
« Art. L. 3124-13. – Lorsque l'établissement de la preuve d'un des délits définis au présent chapitre en dépend, les agents habilités à constater des infractions au titre du présent code peuvent ne décliner leur qualité qu'au moment où ils informent la personne contrôlée de la constatation de l'infraction. »
Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Jacquin, sur l'article.
M. Olivier Jacquin. Je suis heureux de retrouver le ministre du travail dans ce nouveau contexte.
La plateformisation de l'emploi est l'un des plus grands défis auxquels notre modèle social doit faire face. Si certains y voient une grande opportunité en termes d'activité et de développement des services à la personne, d'autres – parfois les mêmes – y voient surtout un immense saut dans le vide pour les droits sociaux des travailleurs et, plus globalement, pour le financement de notre modèle social.
La plateformisation à bas coût ne peut se développer qu'en recrutant des autoentrepreneurs, ce qui altère automatiquement les cotisations patronales et salariales.
Face à ce défi, mon groupe et moi avons défendu avec constance la requalification et la valorisation de modèles de substitution, comme la coopérative d'activité et d'emploi (CAE).
C'est la raison pour laquelle nous avions anticipé la transposition de la directive Schmit et déposé un amendement visant à défendre la présomption de salariat pour les travailleurs des plateformes. Celui-ci a été déclaré irrecevable.
De même, dès lors que ce sont principalement les voitures de transport avec chauffeur (VTC) et les livreurs à vélo qui sont concernés par les phénomènes d'ubérisation, il semble incompréhensible que ce projet de loi ne s'attaque pas à la fraude dans le secteur des livreurs de marchandises à vélo. J'avais également déposé un amendement pour remédier à cet état de fait, qui a, lui aussi, été jugé irrecevable.
L'article 8 vise, notamment, la fraude pour les personnes qui mettent à disposition d'un tiers l'inscription au registre des exploitants VTC qu'elles ont obtenue pour leur propre compte. Cette fraude est encore plus développée chez les livreurs à vélo que chez les VTC via l'exploitation ignoble des sans-papiers, comme cela est parfaitement relaté dans le film L'Histoire de Souleymane.
Je signale qu'aujourd'hui va démarrer l'important procès Frichti, dans lequel je suis partie civile. Je me rendrai tout à l'heure au tribunal, puisque j'avais fait un signalement au procureur de la République, m'appuyant sur l'alinéa 2 de l'article 40 du code de procédure pénale.
Par ailleurs, monsieur le ministre du travail, nous avons appris hier que les syndicats de travailleurs représentant les livreurs à vélo avaient quitté la table de négociation de l'Autorité des relations sociales des plateformes d'emploi (Arpe), ce qui est un véritable échec.
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques.
L'amendement n° 64 est présenté par M. Jacquin, Mme Lubin, M. Fichet, Mme Canalès, MM. Lurel et Kanner, Mmes Bonnefoy et Bélim, MM. Devinaz, Fagnen, Gillé, Ouizille, Uzenat, M. Weber et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L'amendement n° 73 est présenté par M. Fernique, Mme Poncet Monge, MM. Dantec, Benarroche et G. Blanc, Mme de Marco, MM. Dossus et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel.
L'amendement n° 224 est présenté par M. Savoldelli, Mmes Silvani, Apourceau-Poly et Brulin, M. Barros et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Olivier Jacquin, pour présenter l'amendement n° 64.
M. Olivier Jacquin. Nous sommes évidemment contre la fraude qui gangrène le secteur des VTC et produit des distorsions de concurrence. Nul ne peut être à la fois pour l'État de droit et approuver la fraude. Nous sommes donc véritablement opposés à toute sorte de fraude, je tiens vivement à le rappeler.
Cet article 8 est pourtant un cheval de Troie qui, in fine, renforcera et protégera les plateformes.
La fraude des VTC est avérée, particulièrement depuis 2019, date à laquelle les plateformes ont eu l'obligation de déclarer les revenus, ce qui a fait naître les gestionnaires de flotte. Ces sociétés-écrans entre la plateforme et le chauffeur, bien souvent temporaires, ont été créées pour éviter de payer les cotisations sociales.
L'article 8, certes, vise à mettre une « rustine » sur la fraude constatée des gestionnaires de flotte, mais il fera perdurer un système qui déresponsabilise les plateformes, à savoir les écrans que constituent les gestionnaires de flotte. C'est pour cela que nous refusons cet article 8, d'autant que, dans quelques mois, monsieur le ministre, il nous faudra transposer la directive Schmit sur les travailleurs de plateforme, qui vise à introduire une présomption légale de salariat pour les travailleurs de plateforme. La transposition de cette directive permettra de mettre un terme à la fraude dénoncée au travers de cet article 8.
L'étude d'impact du projet de loi va même jusqu'à affirmer que c'est non pas la plateforme, mais le client final qui est le donneur d'ordre. Cela crée un devoir de vigilance au rabais, en deçà des exigences qui s'appliquent à tout donneur d'ordre.
Cet article 8 contredit la directive européenne. Il va totalement à rebours de ce que nous devons transposer prochainement. Si nous l'adoptions, les plateformes auraient réussi à inscrire dans le droit qu'elles ne sont pas les donneurs d'ordre. Nous nous y opposons fortement en ce jour où le devoir de vigilance va être rediscuté au niveau du Parlement européen.
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Fernique, pour présenter l'amendement n° 73.
M. Jacques Fernique. Notre rapporteur, Alain Duffourg, nous l'a dit hier en ouverture du débat : cet article 8 s'en prend aux fraudes dans le secteur des VTC « de manière assez minime ».
Pourtant, nous avons affaire à des fraudes qui n'ont rien de minime ; elles sont même, en l'occurrence, systémiques !
Au total, en contournant les obligations fiscales ou sociales, la réglementation du travail ou celle sur les assurances, la fraude se compte en centaines de millions d'euros. On évalue que près de 60 % du flux financier généré par les VTC échappe à la TVA et aux cotisations sociales. Les prix de plus en plus agressifs des plateformes en ligne ont contribué à l'essor de ces fameuses sociétés-écrans. Il s'agit d'un effet d'aubaine pour les plateformes, qui effectuent très peu de signalements en préfecture pour ne pas nuire à leur réputation.
Tel est le « carburant » du modèle économique des plateformes. Les textes qui tendaient à encadrer le régime applicable aux VTC n'y ont pas changé grand-chose.
Cet article 8 aurait donc un impact du même ordre, c'est-à-dire assez minime. Il instaurerait un droit particulier pour les seuls VTC, mais maintiendrait pour l'essentiel le régime fictif selon lequel les conducteurs seraient indépendants par rapport aux plateformes, alors que – comme cela vient d'être rappelé – la transcription attendue de la directive européenne devrait changer considérablement la donne en posant un principe de présomption de relation de travail pouvant entraîner la requalification de chauffeurs en salariés.
Comment, dans cette perspective d'adaptation au droit de l'Union européenne, le régime issu de cet article 8 pourrait-il être cohérent ?
Nous savons à quel point le gouvernement français était réticent à l'adoption de cette directive, que nous devons transposer au plus tard en décembre 2026. Il nous propose aujourd'hui, un peu dans le même esprit, de voter cet article 8 aux conséquences « assez minimes ».
Voilà pourquoi il serait, à notre sens, plus clair de supprimer cet article si peu impactant.
Mme la présidente. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour présenter l'amendement n° 224.
M. Pascal Savoldelli. Cet amendement, identique aux précédents, vise à supprimer l'article 8 du projet de loi relatif à la lutte contre les fraudes sociales et fiscales. Pourquoi ?
Cet article tend à introduire dans le code des transports la notion de « droit de vigilance renforcée », en totale contradiction avec la directive européenne adoptée en avril 2024 pour garantir de véritables droits sociaux aux travailleurs des plateformes. À lui seul, cet argument suffirait, mais il y en a d'autres.
Avec cet article, le Gouvernement ouvrira une brèche dans laquelle les plateformes n'hésiteront pas à s'engouffrer.
Monsieur le ministre, en quoi cet article sert-il réellement les intérêts des chauffeurs ? En quoi favorise-t-il également les recettes de l'État ? Et, surtout, en quoi ne constitue-t-il pas une forme de concurrence déloyale dissimulée ?
En reconnaissant aux plateformes un droit de vigilance, on leur confère un pouvoir d'autorité économique et organisationnelle sur les travailleurs, sans leur imposer la moindre responsabilité sociale. Aucun modèle économique traditionnel ne se trouve placé dans une telle situation.
Les plateformes, elles, bénéficient de plus de droits que toutes les formes d'entreprises ou d'artisanat. Elles vont faire comme aux États-Unis : elles se soustrairont à leurs obligations en s'abritant derrière des sociétés dites de rattachement ou des coopératives d'activité et d'emploi qui, vous le savez tous ici, sont à l'origine de fraudes massives.
Ces structures deviennent des écrans, en somme des intermédiaires fictifs qui servent à masquer la relation de subordination réelle entre le chauffeur et la plateforme. C'est tout le contraire de la directive européenne, qui tend à consacrer une présomption de salariat pour mieux protéger les travailleurs.
Il y a donc un choix à faire : écoute-t-on ces hommes et ces femmes qui travaillent dans des conditions extrêmement difficiles, sans protection ou avec très peu de protection sociale, ou bien écoute-t-on les plateformes ?
Nous demandons la suppression de cet article afin que notre droit – le droit français, le droit du travail – soit fidèle à l'esprit européen, qui est celui de la justice sociale et de la protection du travail humain.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission de l'aménagement du territoire ?
M. Alain Duffourg, rapporteur pour avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable. Je voudrais répondre à mes collègues au sujet de l'article 8 et de la demande de suppression qui a été formulée.
Si je partage pleinement votre position sur l'exercice des VTC – je suis moi aussi tout à fait opposé à cette manière de procéder en matière de transport –, cet article 8 constitue néanmoins un progrès dans le cadre de la lutte contre la fraude sociale et fiscale, fût-il modeste. Comme je l'ai indiqué en commission – et je ne me dédis pas aujourd'hui : l'avancée reste minime, mais elle s'inscrit dans le cadre de la lutte contre la fraude sociale et fiscale.
Vous avez évoqué la directive européenne. Cette directive permettra de présumer l'existence d'une relation de travail contractuelle au bénéfice des salariés ; en aucun cas, elle ne contredit les dispositions de l'article 8.
À mon sens, il eût fallu, en 2009, ne pas adopter le texte autorisant les VTC. Nous n'en serions pas là aujourd'hui. Pour des raisons avant tout techniques et juridiques – et sur le fond, je vous rejoins –, j'émets donc un avis défavorable sur ces trois amendements.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre du travail et des solidarités. Vous me permettrez, tout d'abord, d'avoir une pensée particulière à l'occasion du dixième anniversaire des terribles attentats qui ont frappé notre pays. J'exprime ma profonde compassion pour les victimes, dont la vie s'est brutalement arrêtée dans des conditions tragiques, ainsi que pour leurs familles, toujours éprouvées par la douleur – ce que chacun peut comprendre. Je souhaite également rendre hommage à nos policiers, qui ont fait preuve d'un courage extraordinaire pour mettre fin à cet acte terroriste, ainsi qu'aux services d'urgence, aux médecins, aux secours et aux pompiers, qui ont prodigué les soins nécessaires et apporté les gestes de premier secours aux rescapés.
Venons-en maintenant à l'examen de cet article. Vous proposez de supprimer l'article 8, au motif qu'il créerait un régime dérogatoire au rabais pour les plateformes et détournerait le droit commun applicable aux donneurs d'ordres. Le Gouvernement ne partage pas cette analyse, et je souhaite en exposer les raisons avant de répondre, dans un second temps, aux questions qui ont été soulevées.
Nous considérons que ce dispositif n'exonère pas les plateformes de leurs responsabilités. Au contraire, il les responsabilise davantage en prévoyant qu'elles procèdent à des vérifications nouvelles, permettant de lutter contre les fraudes sociales et fiscales engendrées par l'intervention des gestionnaires de flotte. Vous l'avez indiqué, certaines d'entre elles se livrent à des pratiques frauduleuses ; nous les surveillons attentivement et faisons preuve, comme vous, d'une vigilance constante pour les réprimer.
L'article 8 ne représente pas un recul par rapport au droit commun, car les plateformes de mise en relation ne sont pas assujetties à l'obligation de vigilance des donneurs d'ordre prévue aujourd'hui par le code du travail. L'article 8 tend à ajouter des moyens opérationnels adaptés au schéma de fraude constaté dans le secteur et contribue à protéger les travailleurs en supprimant des intermédiaires occultes. La transposition de la directive européenne relative aux travailleurs des plateformes d'emploi, qui couvre un champ bien plus vaste que ce secteur, relèvera d'un autre véhicule législatif.
Les dispositions de l'article 8 ne remettent en aucun cas en cause la possibilité pour les chauffeurs VTC de faire reconnaître leur statut de salarié par le juge, si celui-ci l'estime justifié.
Permettez-moi d'apporter quelques réponses complémentaires. L'objectif est bien de lutter contre les gestionnaires de flotte et de protéger les travailleurs indépendants. Cet article est donc complémentaire à la directive, il ne lui est pas contraire.
Le bénéfice de ces dispositions ira aux chauffeurs, car les accords signés s'appliqueront désormais aux chauffeurs rattachés qui, aujourd'hui, en étaient exclus.
Enfin, la directive prévoit bien la notion d'intermédiaire ; cet article renforcera donc l'encadrement des gestionnaires de flotte.
Pour l'ensemble de ces raisons, je suis au regret d'émettre un avis défavorable sur ces amendements identiques.
Mme la présidente. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.
M. Pascal Savoldelli. Un mot, monsieur le ministre, sur le vocabulaire : il s'agit non pas de plateformes de mise en relation, mais bien de plateformes numériques de travail. Pour le ministre du travail, le mot « travail » a un sens. Ce dont nous parlons ici n'a rien à voir avec Leboncoin ou d'autres sites de mise en relation de ce type. Une plateforme numérique de travail, ce n'est pas la même chose ; il convenait de le rappeler.
Ce que vous faites avec cet article relève d'un cavalier législatif. Je le dis clairement, à vous comme à mes collègues : c'est la pression et le lobbying des plateformes qui s'invitent dans nos débats parlementaires. Ce sont toutes les pistes de contournement qui se dessinent ici. Je ne mets pas en cause la sincérité de votre propos, monsieur le ministre, mais le problème demeure.
Tout le monde le sait ici : des sociétés-écrans sont mises en place par les plateformes numériques de travail – qui, je le répète, ne sont pas de simples plateformes de relation entre particuliers – et des sociétés fictives voient le jour. Cette brèche s'ouvre avec l'article 8.
S'ajoute à cela l'ambiguïté liée à l'Arpe – je demande d'ailleurs que le Parlement exerce un contrôle sur le travail de cette structure –, qui œuvre à l'aveugle et sans agir forcément dans l'intérêt du statut des travailleurs. Elle refuse de reconnaître le salariat et préserve l'impunité des plateformes.
Vous avez répondu à notre argumentation, monsieur le ministre : « S'ils veulent avoir le statut de salarié, qu'ils aillent devant le tribunal. » Or, le rôle du législateur consiste précisément à éviter que l'on doive aller devant la justice pour faire valoir ses droits. Cet article 8 ne tient donc pas.
Je vous alerte sur les dégâts à venir : portage salarial, sociétés de rattachement, coopératives d'activité et d'emploi… Autant de mécanismes déjà utilisés par les plateformes pour se soustraire à deux de leurs responsabilités – cela devrait nous interroger collectivement : elles parviennent à contourner leurs obligations sociales et fiscales, alors que tous les autres modèles économiques – du petit au grand patron, de l'artisan au commerçant – ne peuvent, eux, échapper à ces responsabilités. C'est pourquoi il faut se rassembler contre cet article.
Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote.
M. Olivier Jacquin. Je me réjouis de ne pas être seul à défendre la suppression de cet article véritablement nocif. Je n'hésite pas à affirmer qu'il constitue un véritable cheval de Troie et que l'enfer est pavé de bonnes intentions !
Que se passe-t-il depuis 2018 dans le domaine de la plateformisation ? Depuis la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel et la loi d'orientation des mobilités, la stratégie des plateformes et du Gouvernement est d'empêcher la requalification en salariés de ceux que la Cour de cassation, en 2018, a appelés des « indépendants fictifs ». Nous produisons régulièrement de nouveaux textes pour singulariser les travailleurs de plateforme, notamment les VTC et les livreurs, afin de bloquer ces requalifications. Aujourd'hui s'ouvre une nouvelle étape.
Le Gouvernement s'est opposé à la directive Schmit, qui introduit une présomption légale de salariat pour les travailleurs de plateforme et vise également à créer des règles relatives à la gestion algorithmique. Il y a eu ensuite la mission Frouin, en 2020, qui a abouti aux ordonnances Mettling, et la création de cet objet particulier – l'Arpe – dont le fonctionnement mériterait, comme l'a souligné Pascal Savoldelli, un travail d'audition parlementaire et de contrôle.
Nous allons inscrire dans le droit que les plateformes ne sont pas des donneurs d'ordre. Monsieur le ministre, c'est grave. L'arrêt Taxi Elite de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) qualifie bien Uber d'opérateur de transport. Ce n'est pas un intermédiaire. Or, aujourd'hui, nous allons affirmer l'inverse.
Le prochain coup d'Uber sera sans doute d'utiliser le dispositif des coopératives d'activité et d'emploi, avec le statut d'entrepreneur salarié associé, pour créer des salariés au rabais et gagner encore des parts de marché. Voilà pourquoi la suppression de l'article 8 s'impose.
Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Cet article 8 n'existe, à mon sens, que parce que vous refusez de transposer la directive européenne. Vous irez jusqu'au terme du délai, car Uber et les autres plateformes constituent, en réalité, le grand chantier du président Macron. Vous persistez donc à défendre ce modèle et à reporter la transposition de la directive, alors que vous auriez pu la réaliser depuis des mois.
Il est d'ailleurs incroyable d'entendre que, pour défendre ses droits, un travailleur doive aller devant le juge. Justement, la directive européenne prévoit, en cas de présomption de salariat, le renversement de la charge de la preuve : ce n'est pas au travailleur présumé salarié de démontrer ses droits, mais à la plateforme de prouver qu'il ne s'agit pas d'un salarié.
Or vous ne voulez pas de ce renversement de la preuve, pourtant inscrit dans la directive. Il faudra bien, monsieur le ministre du travail, appliquer les textes européens !
Mme la présidente. La parole est à Mme Marion Canalès, pour explication de vote.
Mme Marion Canalès. Aujourd'hui, 13 novembre, le Parlement européen se prononce sur la directive sur le devoir de vigilance des entreprises en matière de durabilité (CS3D), portée à l'origine par la France. Nous avons ensuite régressé, par la voix même de la France, notamment à travers la directive Omnibus. Un vote majeur a lieu aujourd'hui.
Dans le même temps, on nous parle ici d'un devoir de vigilance au rabais. Dans l'étude d'impact, on lit que la première option envisagée pour cet article consistait en une charte d'engagement volontaire contre la pratique du rattachement par les plateformes, soumise au bon vouloir des acteurs. Vous avez renoncé à cette charte pour proposer ce dispositif, car vous avez compris qu'il fallait être plus offensif, mais c'est encore insuffisant.
Cet article 8 n'est pas à la hauteur des enjeux. Il doit être retravaillé pour respecter les objectifs initiaux. C'est pourquoi je soutiens, bien entendu, les amendements de suppression.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Je souhaite apporter quelques éléments de réponse.
Nous entendons bien transposer la directive européenne. La concertation avec les partenaires sociaux a déjà commencé. Vous connaissez mon attachement au dialogue social : nous faisons les choses comme il faut. Ces discussions ont été interrompues par les changements de gouvernement – qui sont d'ailleurs en partie la raison de ma présence parmi vous aujourd'hui –, mais elles vont reprendre et nous irons au bout de la transposition, je le dis très clairement.
Cette directive apportera de réelles avancées, cela a été indiqué. Elle créera une facilité procédurale pour que les travailleurs indépendants puissent plus facilement avoir accès au juge et ainsi obtenir la requalification de leur contrat, s'ils le souhaitent. Il y a donc un renforcement des droits des travailleurs.
Je voudrais redire également que le code du travail a consacré la notion de plateforme à responsabilité sociale, avec des obligations spécifiques.
Je vous rassure donc : nous n'ouvrons pas des brèches. Au contraire, nous les colmatons et nous essayons de poser des digues.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 64, 73 et 224.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 55 rectifié sexies est présenté par M. Pellevat, Mme Bourcier, MM. Brault, Capus, Chasseing et Chatillon, Mme L. Darcos, MM. Grand, Hingray et Houpert, Mmes Jacquemet, Joseph et Lermytte, MM. H. Leroy, Levi et Menonville, Mme Muller-Bronn et MM. Naturel, Panunzi, Rochette et Sido.
L'amendement n° 190 rectifié est présenté par Mme Havet, MM. Lévrier, Lemoyne, Buis et Rambaud et Mmes Cazebonne et Schillinger.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. – Après l'alinéa 1
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
... ° Après le premier alinéa de l'article L. 3122-1, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Peuvent être considérés comme des exploitants au sens du premier alinéa des personnes morales, des personnes physiques ou des entrepreneurs salariés associés d'une coopérative d'activité et d'emploi mentionnés à l'article L. 7331-1 du code du travail. »
II. – Après l'alinéa 3
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
...) Le premier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « L'inscription sur ce registre peut être effectuée par les coopératives d'activité et d'emploi agissant comme mandataires des exploitants qui exercent leur activité en qualité d'entrepreneurs salariés associés, au sens de l'article L. 7331-1 du code du travail. Sont considérées comme mandataires les coopératives d'activité et d'emploi respectant des conditions fixées par voie réglementaire. »
III. – Après l'alinéa 5
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
... ° Le troisième alinéa de l'article L. 3122-4 est complété par les mots : « , à l'exception des entrepreneurs salariés associés d'une coopérative d'activité et d'emploi à qui l'obligation de justifier d'une garantie financière s'applique seule. »
La parole est à Mme Corinne Bourcier, pour présenter l'amendement n° 55 rectifié sexies.
Mme Corinne Bourcier. Permettez-moi d'avoir une pensée, en ce 13 novembre, pour les victimes des attentats de 2015 et leurs familles.
Le présent amendement tend à reconnaître pleinement le statut des entrepreneurs salariés associés des coopératives d'activité et d'emploi dans le cadre de la réglementation applicable aux exploitants de voitures de transport avec chauffeur, prévue par le code des transports.
Il vise deux objectifs clairs : préciser la définition de l'exploitant afin de reconnaître le statut d'entrepreneur salarié associé de CAE et reconnaître la CAE comme mandataire pouvant enregistrer ses chauffeurs directement au registre VTC, lorsqu'elle remplit certaines conditions attestant de son sérieux.
Aujourd'hui, la loi ne reconnaît et ne protège pas assez le modèle de la CAE dans le secteur du VTC. Il existe ainsi des risques de détournement de ce modèle par les mêmes intervenants fraudeurs évoqués plus haut, comme les gestionnaires de flotte ; il est donc important de l'encadrer.
Cet amendement permettrait de faciliter le développement du modèle de la CAE dans le secteur, et ainsi de lutter efficacement contre la fraude.
Mme la présidente. La parole est à Mme Nadège Havet, pour présenter l'amendement n° 190 rectifié.
Mme Nadège Havet. J'ai également, en cette journée du 13 novembre, une pensée émue pour les victimes des attentats de 2015 et pour leurs familles.
Madame la présidente, cette défense d'amendement vaut également pour l'amendement n° 191 rectifié.
Dans le secteur du VTC, la fraude priverait l'État de près de 200 millions d'euros par an. Elle fragilise de 30 000 à 40 000 travailleurs.
Alors que ce contournement est très significatif et prouvé, l'article 8 du projet de loi vise à apporter une réponse importante.
Il est proposé, par les amendements nos 190 rectifié et 191 rectifié, de le renforcer par une obligation de vigilance accrue faite aux plateformes, par une accentuation de l'encadrement des gestionnaires de flotte et par une reconnaissance des modèles alternatifs, de type coopérative d'activité et d'emploi.
L'objectif est de sécuriser et de promouvoir un modèle innovant dans le secteur du transport public particulier de personnes. Il s'agit de créer un cadre de régulation en proposant aux chauffeurs un contrat d'entrepreneur salarié associé, une protection sociale complète, une autonomie professionnelle et un accompagnement administratif.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission de l'aménagement du territoire ?
M. Alain Duffourg, rapporteur pour avis. Je ne suis pas favorable à ces deux amendements relatifs aux CAE. La coopérative était à l'époque un ensemble de personnes qui s'unissaient dans l'intérêt commun.
Or, lors des auditions, nous avons entendu la société Stairling, qui a évoqué l'existence de ces structures. En réalité, ces coopératives constituent un intermédiaire supplémentaire, susceptible de devenir le relais de nouvelles fraudes sociales et fiscales. Elles prélèvent des commissions sur les chauffeurs et entretiennent, en définitive, une relation triangulaire avec la plateforme et les conducteurs.
M. Pascal Savoldelli. C'est ce qu'on a dit !
M. Alain Duffourg, rapporteur pour avis. Par conséquent, je ne suis pas favorable à ces propositions et j'émets un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. La dérogation que vous proposez ne semble pas nécessaire.
Le statut de la coopérative d'activité et d'emploi est compatible avec le droit actuel des transports, ce qui lui permet d'être inscrite au registre des VTC et, à ce titre, de déclarer les conducteurs qu'elle emploie. Actuellement, il existe des CAE inscrites à ce registre et rien dans l'article 8 ne remet en cause cette situation.
Cet article 8 vise à créer de nouvelles obligations pour les plateformes et confirme l'interdiction de mise à disposition des inscriptions aux registres des exploitants auprès d'un tiers dans tous les cas.
Dès lors, inscrire dans la loi une exception spécifique pour les CAE et leurs chauffeurs salariés associés pourrait ouvrir une brèche de contournement pour les gestionnaires de flotte, dont certains sont, malheureusement, coutumiers de pratiques irrégulières, et réduirait considérablement les possibilités de contrôle.
Pour le code des transports, les mêmes règles doivent s'appliquer à tous, quelle que soit la forme juridique, dès lors que l'opérateur assume réellement ses responsabilités d'exploitant, sans mandat interposé ni mise à disposition d'inscription au registre. Une dérogation spécifique fragiliserait considérablement l'efficacité du dispositif contre les sociétés-écrans.
Dans un objectif d'efficacité et de lutte contre la fraude, notamment contre le travail dissimulé, le Gouvernement sollicite le retrait de ces amendements. À défaut, il émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote.
M. Olivier Jacquin. Mon groupe a défendu très tôt l'idée de la coopérative. Ainsi, en 2019, Monique Lubin et plusieurs de mes collègues ont déposé une proposition de loi visant à favoriser la coopérative comme alternative à la plateformisation du travail. J'en profite pour saluer une coopérative, Maze, qui me semble vertueuse et intéressante.
Ici, nous parlons de favoriser la coopérative d'activité et d'emploi.
Je tiens à saluer le rapporteur Alain Duffourg, qui a ouvert toutes ses auditions aux membres de la commission. L'une d'entre elles, très intéressante, a réuni l'ensemble des syndicats de taxis, lesquels ont unanimement soulevé les risques de dérive du modèle de la CAE, qui produirait des salariés au rabais. En gros, la technique consiste, lors de la redistribution en salaires des revenus touchés par la CAE, à gonfler exagérément les indemnités kilométriques et les frais de repas pour diminuer la part taxable des salaires…
La CAE, pour Uber, c'est le coup d'après ! M. le ministre a d'ailleurs bien précisé que la CAE était actuellement compatible avec le code des transports.
Mme la présidente. La parole est à Mme Nadège Havet, pour explication de vote.
Mme Nadège Havet. Compte tenu des explications apportées, je retire l'amendement n° 190 rectifié.
Je ferai de même avec l'amendement n° 191 rectifié.
Mme la présidente. L'amendement n° 190 rectifié est retiré.
La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.
M. Pascal Savoldelli. Il est intéressant que nous ayons cette discussion après avoir débattu de la suppression de l'article.
Les votes ne seront pas forcément les mêmes, mais je rappelle que l'argument que nous avons utilisé, sur les travées de cet hémicycle, pour défendre cette suppression était que les coopératives d'activité et d'emploi étaient exclues du dispositif.
Or nous avons là un amendement qui nous propose d'y intégrer ces mêmes coopératives… C'est bien la démonstration que la suppression de l'article était la meilleure des solutions, parce que nous ne sommes pas prêts et parce que cet article n'est pas bon !
Vous avez raison, monsieur le ministre : nous ouvrons régulièrement des brèches. Nous pourrions déposer une multitude d'amendements pour protéger notre droit du travail, notamment pour viser les sociétés-écrans qui se rattacheront au dispositif.
Je voterai cet amendement. Mais, au-delà des coopératives d'activité et d'emploi, il faut ensuite parler du reste, de toutes les sociétés fictives qui sont en train de se créer sans aucune responsabilité sociale ni fiscale, réalité que nous avons voulu démontrer en demandant la suppression de l'article 8.
Il y a donc là une petite contradiction que vous devrez gérer… Mais nous y sommes habitués.
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Fernique, pour explication de vote.
M. Jacques Fernique. Vous parliez tout à l'heure, monsieur le ministre, de la nécessité de colmater les brèches. Je crois que, là, tout le monde ou presque a compris qu'on allait les élargir !
Notre collègue Nadège Havet retire ses amendements, mais notre collègue Cyril Pellevat n'est pas là pour le faire.
Je veux vraiment insister sur la façon dont ce statut des coopératives serait utilisé et détourné : il faut s'attendre à des fiches de paie à temps partiel, avec des indemnités kilométriques dérisoires, à de faux paniers-repas…
C'est, en somme, une façon de pérenniser la fraude.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 55 rectifié sexies.
J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant de la commission.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
Voici, compte tenu de l'ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 25 :
| Nombre de votants | 344 |
| Nombre de suffrages exprimés | 342 |
| Pour l'adoption | 103 |
| Contre | 239 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 54 rectifié quinquies est présenté par M. Pellevat, Mme Bourcier, MM. Brault, Capus, Chasseing et Chatillon, Mme L. Darcos, MM. Grand, Hingray et Houpert, Mmes Jacquemet, Joseph et Lermytte, MM. H. Leroy, Levi et Menonville, Mme Muller-Bronn et MM. Naturel, Panunzi, Rochette et Sido.
L'amendement n° 191 rectifié est présenté par Mme Havet, MM. Lévrier, Buis et Rambaud et Mmes Cazebonne et Schillinger.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. – Alinéa 5
Compléter cet alinéa par les mots :
, à l'exception des inscriptions effectuées par les coopératives d'activité et d'emploi agissant comme mandataires des exploitants qui exercent leur activité en qualité d'entrepreneurs salariés associés, au sens de l'article L. 7331-1 du code du travail
II. – Alinéa 12
Compléter cet alinéa par les mots :
, à l'exception des attestations d'inscription délivrées aux coopératives d'activité et d'emploi agissant comme mandataires des exploitants qui exercent leur activité en qualité d'entrepreneurs salariés associés, au sens de l'article L. 7331-1 du code du travail
III. – Alinéa 13
Compléter cet alinéa par les mots :
, à l'exception des attestations d'inscription délivrées aux coopératives d'activité et d'emploi agissant comme mandataires des exploitants qui exercent leur activité en qualité d'entrepreneurs salariés associés, au sens de l'article L. 7331-1 du code du travail
IV. – Après l'alinéa 18
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Le présent article n'est pas applicable aux coopératives d'activité et d'emploi agissant comme mandataires des exploitants qui exercent leur activité en qualité d'entrepreneurs salariés associés, au sens de l'article L. 7331-1 du code du travail. » ;
L'amendement n° 191 rectifié a été retiré.
La parole est à Mme Corinne Bourcier, pour présenter l'amendement n° 54 rectifié quinquies.
Mme Corinne Bourcier. Cet autre amendement de mon collègue Cyril Pellevat vise à sécuriser et à protéger la CAE, nouveau modèle émergent dans le secteur du transport public particulier de personnes (T3P), mais menacé par la rédaction initiale de l'article 8.
La CAE constitue une solution économique et sociale pour les chauffeurs, mais aussi un levier de lutte contre la fraude sociale et fiscale pour l'État, alors que plus de 60 % des chauffeurs évoluent aujourd'hui dans l'illégalité – fraude fiscale, sous-déclaration ou absence de déclaration à l'Urssaf. En effet, ce modèle permet aux chauffeurs d'avoir un contrat d'entrepreneur salarié associé (Cesa), une protection sociale, de l'autonomie et un accompagnement administratif.
Cependant, dans sa rédaction actuelle, l'article 8 représente une menace existentielle pour le modèle de la CAE, puisque celle-ci peut aujourd'hui être enregistrée en tant qu'exploitante dans le registre et sous-traiter son numéro à ses chauffeurs.
L'article 8, en tendant à lutter notamment contre les pratiques frauduleuses des gestionnaires de flotte, va indirectement interdire cette possibilité.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission de l'aménagement du territoire ?
M. Alain Duffourg, rapporteur pour avis. Comme je l'ai expliqué tout à l'heure, je ne suis pas favorable à la mise en place de ces coopératives, car le contrat triangulaire entre la coopérative, le chauffeur et la plateforme ne fera qu'alimenter les fraudes sociales et fiscales.
De surcroît, le fait que les salariés aient un contrat de travail et un contrat d'entreprise me paraît assez paradoxal.
J'émets donc un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Pour les raisons évoquées par M. le rapporteur, j'émets le même avis défavorable.
Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote.
M. Olivier Jacquin. La coopérative d'activité et d'emploi est intéressante dans son principe. Je pense à ce statut tout à fait particulier d'entrepreneur salarié associé.
Monsieur le ministre du travail, je vous demande la plus grande vigilance sur le développement des CAE, que l'adoption de l'article 8 va certainement faire foisonner.
Je n'ai pas eu le temps de le dire tout à l'heure lors de ma prise de parole sur l'article 8, mais je pense que, face à l'extrême mobilité du secteur des plateformes, la solution est vraiment de renforcer leur contrôle, comme il convient de le faire pour toute la fraude, et de mettre de vrais moyens à la disposition des inspections du travail et de l'Urssaf.
Je regrette, monsieur le ministre du travail, que vous n'ayez pas eu le temps de dire ne serait-ce que quelques mots sur la question des livreurs à vélo, qui ne sont pas concernés par ce texte, alors que la fraude est encore plus développée dans ce secteur particulier.
Le procès Frichti pour travail dissimulé et travail irrégulier s'est ouvert hier. Peut-être avez-vous vu ce film incroyable qu'est L'Histoire de Souleymane. Nous sommes là dans l'esclavage par l'algorithme le plus sordide.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 54 rectifié quinquies.
J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant de la commission.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
Voici, compte tenu de l'ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 26 :
| Nombre de votants | 343 |
| Nombre de suffrages exprimés | 343 |
| Pour l'adoption | 103 |
| Contre | 240 |
Le Sénat n'a pas adopté.
L'amendement n° 133, présenté par Mme N. Goulet, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 13
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
...° Le III de l'article L. 3141-2 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le professionnel vérifie par tout moyen les conditions d'acquisition du véhicule utilisé lors de l'entrée en relation et lors d'un changement de véhicule. »
La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Mme Nathalie Goulet. Je dois dire que les dispositions du nouvel article L. 3141-2-1 du code des transports me laissent un peu perplexe, puisque le professionnel doit démontrer qu'il ne pratique pas de travail dissimulé et qu'il n'emploie pas de salarié non autorisé. Il me semble compliqué de fournir des preuves négatives ! Je ne vois pas très bien comment cela va se passer. Personne ne reconnaîtra franchement qu'il s'adonne à de telles pratiques.
L'amendement n° 133 est un amendement de précision, qui tend à compléter le texte de l'article par la mention : « Le professionnel vérifie par tout moyen les conditions d'acquisition du véhicule utilisé lors de l'entrée en relation. » En effet, il est apparu qu'un certain nombre de personnes avaient acquis des véhicules de grosse cylindrée en totale disproportion avec leurs facultés contributives.
Si vous me le permettez, madame la présidente, je défendrai en même temps l'amendement n° 134.
Mme la présidente. J'appelle donc en discussion l'amendement n° 134, présenté par Mme N. Goulet, et ainsi libellé :
Alinéa 15
Après les mots :
s'assure
insérer le mot :
périodiquement
Veuillez poursuivre, ma chère collègue.
Mme Nathalie Goulet. Puisque le texte prévoit des vérifications, je propose d'ajouter qu'elles ont lieu « périodiquement ».
En effet, il ne suffit pas de vérifier une seule fois, lors de l'entrée en relation, puis plus du tout. Il peut y avoir des changements de situation.
Que les organismes chargés de lutter contre la fraude exercent un contrôle de façon périodique est d'ailleurs ce que prévoit le code de la sécurité sociale, notamment à l'article L. 114-10-2.
Je vous propose d'adopter la même rédaction au sein de l'article 8 du projet de loi.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission de l'aménagement du territoire ?
M. Alain Duffourg, rapporteur pour avis. Je connais l'engagement de Nathalie Goulet dans la lutte contre la fraude fiscale et sociale.
Cependant, l'amendement n° 133, qui tend à ce que l'une des parties contrôle l'origine du véhicule d'un chauffeur, ne me paraît pas opportun, car ce n'est pas le rôle d'une société. Il s'agit de relations de droit privé !
Je crois qu'il appartient à l'administration, aux services de police, de justice et des Urssaf de vérifier le rôle de ces chauffeurs et l'usage qu'ils peuvent faire des véhicules dont ils disposent.
Par conséquent, j'émets un avis défavorable sur cet amendement.
En revanche, je suis favorable à l'amendement n° 134.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre de la santé, des familles, de l'autonomie et des personnes handicapées. L'amendement n° 133 a pour objet de demander aux plateformes de vérifier la provenance des fonds.
Je suis défavorable à cet amendement, qui n'est pas qu'un amendement de précision : ce n'est pas le rôle des plateformes de mise en relation que de vérifier la provenance des fonds ou les conditions d'acquisition des biens.
Pour ce qui concerne l'amendement n° 134, la rédaction actuelle du projet de loi prévoit de renvoyer à un décret en Conseil d'État le soin de s'assurer que les exploitants sollicités par les plateformes ne pratiquent pas de travail dissimulé.
Vous voulez, madame la sénatrice, conditionner la fréquence et les modalités de vérification à opérer pour les plateformes ; or ces dernières sont déjà incluses dans le champ du décret. Il ne nous semble donc pas nécessaire d'ajouter au texte le principe de périodicité.
En conséquence, le Gouvernement sollicite le retrait de l'amendement. À défaut, il émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote.
M. Olivier Jacquin. Nous voterons en faveur de ces deux amendements, qui permettent de renforcer les contrôles contre la fraude.
Je profite de l'occasion pour saluer ma collègue Nathalie Goulet, dont le regard, en ce domaine, est extrêmement acéré, vif et pertinent. Je l'invite à aller plus loin dans la surveillance de la « plateformisation », qui est vraiment très avancée en matière de fraude.
Je regrette d'ailleurs que l'amendement très judicieux qu'elle a présenté hier soir, relatif à la transmission par les plateformes des données en matière de TVA sur les services à la personne, n'ait pas été adopté, car l'« ubérisation » est en train de gagner des domaines insoupçonnés, y compris celui de la santé – je pense à Mediflash, petite plateforme qui propose des infirmières ayant le statut d'auto-entrepreneur.
La plateformisation va très loin, des coiffeurs aux guides touristiques. Il est vraiment nécessaire d'effectuer des contrôles.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Luc Fichet, pour explication de vote.
M. Jean-Luc Fichet. Ces amendements sont importants, car ils démontrent bien que ces plateformes n'ont pas de forme. Elles n'existent pas. Elles n'ont pas de responsabilités, ne répondent de rien, ne sont pas des employeurs. Pourtant s'agite autour d'elles tout un monde du travail, souvent en grande précarité et ne pouvant se défendre à aucun moment.
Ces amendements présentent au moins l'avantage de responsabiliser un tant soit peu ces plateformes. Qu'elles se cachent derrière des algorithmes finit par devenir assez incompréhensible, pour ne pas dire insupportable… Aujourd'hui, même les prud'hommes ne peuvent interroger les algorithmes sur la manière dont ils fonctionnent pour organiser le travail des salariés des plateformes de type Uber.
Par conséquent, nous soutiendrons bien évidemment ces amendements.
Mme la présidente. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.
M. Pascal Savoldelli. Il convient d'avancer dans le vocabulaire.
Décidons-nous d'acter que les plateformes dont nous parlons sont des plateformes de mise en relation ? Pour ma part, je m'insurge contre l'emploi de ce terme : ce sont des plateformes numériques de travail.
L'amendement de Mme Goulet ne se situe pas sur le terrain des plateformes de mise en relation, qui peuvent, d'ailleurs, être collaboratives, associatives ou autres. Il existe d'autres types de plateformisation. Ici, nous parlons vraiment de plateformes numériques du travail.
Si nous pouvons avoir des désaccords dans l'analyse, soyons au moins respectueux des termes. C'est bien parce qu'il ne s'agit pas de plateformes de mise en relation que l'outil de travail, indispensable, qu'est le véhicule doit être vérifié.
Nous voterons ces amendements.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 133.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 134.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. L'amendement n° 41 rectifié ter, présenté par Mme Antoine, M. Pillefer, Mme Billon, MM. Brault, Canévet, Chasseing et Courtial, Mme L. Darcos, MM. Delahaye, Dhersin, Haye, Hingray et Houpert, Mmes Jacquemet et Josende, MM. Kern et Khalifé, Mme Lermytte, MM. Menonville et Mizzon, Mmes Patru et Perrot, M. Rochette et Mmes Romagny, Saint-Pé et Sollogoub, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 18
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Art. L. 3141-2-.... – Le professionnel mentionné à l'article L. 3141-1 s'assure de l'absence d'incohérence manifeste entre le chiffre d'affaires généré par chaque conducteur, qu'il met en relation avec des passagers, le salaire qu'il reçoit de la part de l'exploitant mentionné à l'article L. 3141-1 et les heures déclarées. » ;
La parole est à Mme Jocelyne Antoine.
Mme Jocelyne Antoine. Le présent amendement vise à renforcer la lutte contre la fraude sociale, particulièrement en ce qui concerne les risques avérés de sous-déclaration des revenus des chauffeurs salariés, notamment par le biais de versements complémentaires non déclarés – espèces, cagnottes en ligne, comptes à l'étranger.
Les plateformes disposent d'une vision globale de l'activité des chauffeurs. Elles connaissent leur chiffre d'affaires. Elles connaissent également, pour tenir ces données des exploitants, le nombre d'heures déclarées et le salaire versé. Elles peuvent donc détecter les incohérences manifestes.
C'est la raison pour laquelle nous leur demandons, par cet amendement, d'opérer ce contrôle.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission de l'aménagement du territoire ?
M. Alain Duffourg, rapporteur pour avis. Il n'appartient pas à une entreprise de vérifier le chiffre d'affaires, les véhicules, etc. – je le redis, même si le Sénat n'a pas voté tout à l'heure en ce sens.
C'est à l'administration, aux services de police ou à l'Urssaf qu'il revient de procéder à ces vérifications.
Dès lors, j'émets un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Le Gouvernement souscrit bien évidemment à l'objectif de lutte contre la fraude sociale.
Je rappelle que, depuis l'adoption de la loi n° 2016-1920 du 20 décembre 2016, dite loi Grandguillaume, les centrales de réservation sont déjà soumises à des obligations de vérification.
L'article 8 du présent texte renforce encore ces obligations, notamment par la vérification de la non-mise à disposition de l'inscription au registre et la vérification de l'attestation de vigilance produite par l'Urssaf. Un décret en Conseil d'État précisera les modalités d'application de ces dispositions, notamment les vérifications à opérer par les plateformes en fonction des informations qui seront effectivement disponibles.
En conséquence, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote.
M. Olivier Jacquin. Nous voterons cet amendement de Mme Antoine, mais je tiens à formuler deux remarques.
La première est une remarque de forme : le dispositif de l'amendement fait référence au « salaire » reçu par les travailleurs. J'apprécie le lapsus !
Mme Jocelyne Antoine. Ce n'en était pas un !
M. Olivier Jacquin. Parfait : vous anticipez la requalification en salarié prévue par la directive Schmit. Autrement, s'agissant d'indépendants fictifs, il aurait fallu parler de revenus…
Sur le fond, je travaille régulièrement avec les syndicats de VTC, et un syndicaliste m'a montré des petites annonces de recrutement de chauffeurs publiées sur Leboncoin qui précisaient : « pas de charges » et « maintien des aides ». Voilà la dérive…
Votre proposition, chère collègue, est conforme aux dispositions de 2019, qui prévoient déjà que les plateformes doivent déclarer les revenus perçus par les travailleurs.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Luc Fichet, pour explication de vote.
M. Jean-Luc Fichet. Madame la ministre, nous avons évoqué la responsabilité, sur les chantiers, des maîtres d'ouvrage donneurs d'ordre à l'égard des entreprises sous-traitantes de premier, deuxième ou même de troisième rang : elles doivent s'assurer que la législation du travail est bien respectée pour les salariés à l'œuvre.
Le cas dont nous débattons est proche : la plateforme met en action des travailleurs, pour lesquels elle devrait assurer un minimum de soutien, de vérifications et de respect de la législation du travail.
Il ne faut pas oublier que les plateformes ont aussi, de manière déguisée, un pouvoir de sanction, très discret : un livreur qui ne fait pas son travail ou qui met trop de temps à le faire se voit proposer de moins en moins de missions, car on considère que ce n'est pas un bon livreur.
Il faut donc bien étudier la responsabilité des plateformes, au même titre que celle des maîtres d'ouvrage.
Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Nous avons voté, ce matin, un certain nombre d'amendements de contrôle de la mise en relation et de responsabilisation des plateformes.
Nous sommes un certain nombre ici à vouloir essayer de sortir du far west. Les amendements ne sont peut-être pas aussi précis qu'il le faudrait, mais ils tendent à lutter contre le manque de contrôle, l'énorme problème du blanchiment ainsi que les difficultés en matière de relations du travail et l'esclavagisation d'un certain nombre de personnes.
Comme je l'ai dit lors de la discussion générale, nous constatons une multiplication de sociétés éphémères – dans le secteur, on les qualifie même de « jetables ». Il en résulte de la fraude à la TVA et à l'Urssaf et l'esclavagisation d'un certain nombre de personnes qui travaillent pour ces plateformes, dont nous observons, de surcroît, l'immunité complète. Nous ne sommes pas d'accord avec cette situation.
Nous voterons donc l'amendement de Mme Antoine.
Mme la présidente. L'amendement n° 74, présenté par M. Fernique, Mme Poncet Monge, MM. Dantec, Benarroche et G. Blanc, Mme de Marco, MM. Dossus et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 22
Remplacer les mots :
d'une sanction administrative
par les mots :
d'une ou plusieurs sanctions administratives
II. - Après l'alinéa 24
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Une interdiction, pour une durée maximale de douze mois, de contracter avec un exploitant mentionné à l'article L. 3122-1 peut être prononcée en méconnaissance des dispositions de l'article L. 3141-2-1.
III. - Alinéa 25
Remplacer les mots :
Cette amende administrative est prononcée
par les mots :
Ces sanctions administratives sont prononcées
IV. - Alinéa 26
Remplacer les mots :
le montant total de l'amende
par les mots :
les sanctions administratives
V. - Alinéa 27
Remplacer les mots :
par une amende administrative
par le mot :
aux dispositions de l'article L. 3141-2-1
La parole est à M. Jacques Fernique.
M. Jacques Fernique. Nous avons compris que nous devrions faire avec cet article 8, même s'il est « minime ». Nous allons donc essayer de le muscler un peu.
L'adoption de cet amendement permettrait de le faire sérieusement, me semble-t-il. Je vous demande, mes chers collègues, de réaliser cette avancée, qui est à notre portée ce matin.
L'adoption de cet amendement donnerait à l'administration, si elle le juge nécessaire, la faculté de prononcer, à l'encontre de la plateforme qui aurait clairement alimenté le travail dissimulé, et en complément de l'amende prévue par l'article 8, une interdiction temporaire de contracter avec un nouvel exploitant pouvant aller jusqu'à douze mois.
Il s'agirait d'un moyen adapté et proportionné, complétant si nécessaire l'amende, pour que la fraude ne puisse devenir un levier de développement fondé sur une concurrence déloyale à l'égard des professionnels respectueux de la réglementation.
En commission, il m'a été opposé que ce serait une restriction excessive à la liberté d'entreprendre et à la liberté contractuelle, ce qui serait en effet un problème. Je ne le pense pas, puisque les chauffeurs resteraient libres de contracter avec les autres plateformes qui ne seraient pas dans l'illégalité.
En revanche, la plateforme profitant manifestement de fraudes systémiques se verrait opposer une sanction suffisamment forte pour qu'elle cesse de franchir la ligne jaune.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission de l'aménagement du territoire ?
M. Alain Duffourg, rapporteur pour avis. Je souscris totalement à l'objet de cet amendement, qui est de sanctionner plus sévèrement les plateformes ne respectant pas le devoir de vigilance en matière de travail dissimulé instauré par la loi.
Je rappelle, d'ailleurs, que la commission a considérablement relevé le plafond annuel de l'amende prévue par le texte, pour le porter de 150 000 à 3 millions d'euros.
Cet amendement vise à aller plus loin, en interdisant à la plateforme méconnaissant ses obligations de passer de nouveaux contrats pendant une durée pouvant aller jusqu'à un an.
Cette proposition comporte certaines fragilités : le délai envisagé est long et, sur le plan opérationnel, le dispositif reviendrait surtout à sanctionner les chauffeurs VTC, même lorsqu'ils sont de bonne foi, alors que la plateforme pourrait continuer à être en service.
Monsieur le ministre, il serait intéressant de pouvoir compléter l'article 8 en créant une possibilité de suspendre temporairement une plateforme dès lors qu'elle ne respecterait pas son obligation de vigilance. Les délais d'examen au Sénat ne nous ont pas permis de formuler une proposition précise en ce sens, mais seriez-vous d'accord pour y travailler dans la suite de la navette ?
Pour l'heure, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement. (M. Jacques Fernique s'exclame.)
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Je le redis, ce projet de loi est destiné à durcir la lutte contre la fraude. Qu'il n'y ait pas de malentendu sur ce point !
Nous pouvons débattre des modalités, mais l'intention est bien d'être plus efficace dans la prévention, la sanction et le recouvrement. Il peut être utile de rappeler ces objectifs pour que les choses soient parfaitement claires.
Le dispositif de l'article 8 prévoit une obligation de vigilance renforcée, assortie de sanctions administratives et financières que nous estimons graduées, proportionnées et calibrées pour favoriser le respect des obligations de vérification et dissuader les manquements réitérés.
D'ailleurs, comme M. le rapporteur l'a rappelé, vous avez souhaité durcir les sanctions : elles sont désormais de 3 millions d'euros, ce qui commence, me semble-t-il, à être dissuasif.
Je suis d'accord avec lui pour dire que la sanction complémentaire proposée présente quelques éléments de fragilité. Peut se poser une question de proportionnalité, donc de sécurité juridique, qu'il ne faut jamais sous-estimer. De fait, la notion de « nouveau partenariat » ne figure pas dans la rédaction de l'amendement, ce qui peut constituer une petite faiblesse dans la construction du dispositif.
Cette mesure pourrait également avoir quelques effets collatéraux sur l'économie du secteur, puisqu'elle conduirait à perturber et à bloquer de nouveaux exploitants réguliers dans des zones où il n'y a pas énormément de plateformes, donc pas de choix possible. Nous empêcherions donc ces exploitants réguliers de se lancer dans leur activité.
Enfin, comme cela a été évoqué par M. le rapporteur, il y aurait tout simplement une difficulté opérationnelle à exercer le contrôle effectif d'une interdiction de contracter, car ce n'est pas chose aisée à mettre en place.
Pour l'ensemble de ces raisons, et en espérant ne vous donner nullement l'impression que nous serions un tant soit peu laxistes, j'émets un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote.
M. Olivier Jacquin. Monsieur le rapporteur, on peut le déplorer ou non, mais les VTC sont désormais une réalité dans le monde des transports et ils représentent une force assez considérable. On compte quasiment autant de chauffeurs de VTC que de taxis.
Je ne dis pas qu'il faut favoriser les distorsions de concurrence. Nous devons être vigilants pour renforcer les distinctions fondamentales entre les taxis et les VTC. C'est un équilibre complexe.
Nous voterons en faveur de cet amendement, car il vise à renforcer le devoir de vigilance. Je remercie d'ailleurs Jacques Fernique de l'avoir proposé.
Le devoir de vigilance est une création française. Il a été inscrit dans la loi en 2017 sur l'initiative d'un député de mon département, Dominique Potier. La France était alors totalement novatrice en la matière. Après un combat difficile pour imposer ce principe en France, la tâche n'est pas moins aisée pour l'affirmer à l'échelle de l'Union européenne. Aujourd'hui même, le Parlement européen risque de détricoter ce dispositif pourtant si original de lutte contre la fraude, qui va dans le sens d'un plus grand respect des multinationales envers les droits de l'homme et de l'enfant et la planète.
J'espère que la France choisira aujourd'hui le chemin de la responsabilité plutôt que celui de l'impunité.
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Fernique, pour explication de vote.
M. Jacques Fernique. J'entends les arguments liés au risque de difficultés opérationnelles invoqués par M. le ministre.
J'entends également l'avis formellement défavorable de notre rapporteur, mais je l'interprète plutôt comme une sollicitation du Gouvernement visant à aller dans le sens des préconisations de cet amendement, dont il partage entièrement l'objectif.
Certes, la messe n'est pas dite, et nous ne connaissons pas encore la fin de l'histoire. Cependant, dans le contexte politique actuel, il serait utile de voter cet amendement pour signifier clairement que nous souhaiterions muscler davantage l'article 8 !
Mme la présidente. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.
M. Pascal Savoldelli. Nous soutenons cet amendement, car il s'agit bien de réaffirmer le devoir de vigilance. On ne peut pas dire qu'il soit contraire à l'intention de l'article 8 !
Monsieur le ministre, nous en revenons finalement au débat précédent. Selon vous, les salariés n'ont qu'à aller devant le tribunal pour faire reconnaître leurs droits.
Permettez-moi de vous rafraîchir la mémoire pour vous expliquer pourquoi nous soutenons cet amendement : les sanctions financières ne sont pas les seules qui peuvent être prononcées.
Ainsi, en mars 2022, le tribunal judiciaire de Paris a condamné Deliveroo France à 375 000 euros d'amende pour travail dissimulé – c'est la sanction financière –, mais a également prononcé une interdiction de diriger une société, pour deux ans, à l'encontre des deux patrons de l'entreprise !
La double lame de la justice est donc passée, à juste titre ! Le tribunal judiciaire de Paris a eu raison d'appliquer à la fois une sanction financière et une interdiction d'exercer la responsabilité de dirigeant d'une entreprise à des personnes qui pratiquaient une concurrence déloyale.
Cet amendement va donc dans le droit fil d'une décision de justice. Il serait préférable de l'inscrire dans le droit, plutôt que d'inciter les victimes d'une injustice ou d'une inégalité à entamer une procédure judiciaire.
« La preuve du pudding, c'est qu'on le mange » : il faut donc voter cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. M. le rapporteur m'a tendu une perche, comme l'a d'ailleurs rappelé M. le sénateur Jacquin : soyez donc assurés que je suis favorable à un travail complémentaire en vue de durcir l'article 8. Prenons le temps nécessaire pour ajuster le dispositif de manière efficace.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 74.
J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant de la commission.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
Voici, compte tenu de l'ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 27 :
| Nombre de votants | 343 |
| Nombre de suffrages exprimés | 343 |
| Pour l'adoption | 116 |
| Contre | 227 |
Le Sénat n'a pas adopté.
L'amendement n° 63 rectifié ter, présenté par M. Pillefer, Mmes Antoine, N. Goulet, Sollogoub et Jacquemet, M. Courtial, Mmes Guidez et Billon, MM. Menonville, Cambier et Kern, Mmes Saint-Pé et Patru, MM. Levi et Canévet et Mme Romagny, est ainsi libellé :
Alinéa 31
Remplacer les mots :
dix-huitième
Par le mot :
troisième
La parole est à Mme Jocelyne Antoine.
Mme Jocelyne Antoine. Cet amendement du sénateur Bernard Pillefer vise à accélérer la mise en œuvre des dispositions prévues à l'article 8, en prévoyant un délai de trois mois au lieu de dix-huit mois.
Par la réduction de ce délai, l'amendement contribue à rendre la loi plus efficace et immédiatement applicable.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission du développement durable ?
M. Alain Duffourg, rapporteur pour avis. Cet amendement tend à fixer le délai d'application des mesures à trois mois, contre dix-huit mois dans la version actuelle du texte.
En raison des difficultés liées aux outils informatiques et du nombre important de chauffeurs avec lesquels il sera nécessaire d'entrer en relation, le délai maximal de dix-huit mois me paraît opportun.
Avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Nous rêverions d'aller plus vite ! Votre intention est louable, mais si l'on se range à l'analyse technique, juridique et opérationnelle, il semble qu'un délai de dix-huit mois est nécessaire.
Par ailleurs, il s'agit d'un délai maximal : si certaines dispositions sont prêtes plus tôt, elles seront mises en œuvre dès que possible.
La sagesse et le pragmatisme nous imposent ce délai, qui, je le répète, est un maximum. Si nous pouvons aller plus vite, nous le ferons. Je suis d'ailleurs convaincu qu'un certain nombre de mesures seront applicables avant ce délai.
Je suis donc contraint d'émettre un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Jacquin pour explication de vote.
M. Olivier Jacquin. J'ai assisté, avec le rapporteur, à l'audition des représentants des plateformes. Ceux-ci ont évoqué un délai de six mois pour mettre en place les nouveaux statuts, sur la base d'une expérimentation réalisée par Uber sur le secteur de Marseille.
Dix-huit mois, c'est peut-être beaucoup ; mais trois mois, cela me semble assez faible.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 63 rectifié ter.
J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant de la commission. (Mme Silvana Silvani lève les bras au ciel.)
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
Voici, compte tenu de l'ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 28 :
| Nombre de votants | 343 |
| Nombre de suffrages exprimés | 309 |
| Pour l'adoption | 3 |
| Contre | 306 |
Le Sénat n'a pas adopté.
L'amendement n° 156 a été retiré.
L'amendement n° 42 rectifié ter, présenté par Mme Antoine, M. Pillefer, Mme Billon, MM. Brault, Canévet et Courtial, Mme L. Darcos, MM. Delahaye et Dhersin, Mme Guidez, MM. Haye, Hingray et Houpert, Mmes Jacquemet et Josende, MM. Kern et Khalifé, Mme Lermytte, MM. Menonville et Mizzon, Mmes Patru et Perrot, M. Rochette et Mmes Romagny, Saint-Pé et Sollogoub, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Le II de l'article 1649 ter A du code général des impôts est complété par trois alinéas ainsi rédigés :
« ...° Lorsque les opérations consistent en la mise en relation par des professionnels mentionnée à l'article L. 3141-1 du code des transports :
« ...) Le nom, le prénom et le numéro de carte professionnelle de chaque conducteur ;
« ...) Le montant total de la contrepartie perçue au titre de chaque conducteur. »
La parole est à Mme Jocelyne Antoine.
Mme Jocelyne Antoine. Cet amendement vise à combler une faille dans le dispositif de lutte contre la fraude sociale et fiscale du secteur des VTC. À ce jour, les services du ministère de l'économie et des finances ne disposent, en effet, que du chiffre d'affaires global versé aux exploitants sans détail par chauffeur, ce qui limite la capacité de contrôle sur les revenus réellement perçus par chaque conducteur.
En imposant la transmission, par les plateformes, du chiffre d'affaires généré individuellement par chaque conducteur, l'adoption de cet amendement permettrait à l'administration de croiser les données et de détecter plus efficacement les situations de sous-déclaration ou de travail dissimulé.
Cette mesure renforce la transparence et la traçabilité des flux financiers, tout en facilitant le ciblage des contrôles et la sécurisation des recettes fiscales et sociales.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission du développement durable ?
M. Alain Duffourg, rapporteur pour avis. La commission sollicite l'avis du Gouvernement.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. L'avis du Gouvernement est motivé par deux arguments d'ordre technique, liés au droit européen.
Premièrement, l'article 1649 ter A du code général des impôts vise avant tout à transposer la directive (UE) 2021/514 du Conseil du 22 mars 2021 modifiant la directive 2011/16/UE relative à la coopération administrative dans le domaine fiscal (DAC7).
La France et d'autres États membres ont alerté la Commission européenne sur le traitement des intermédiaires. Ces entités valoriseraient des vendeurs ou des prestataires de services sur les plateformes, sans pour autant être les bénéficiaires réels de ces transactions.
Des discussions conduites actuellement permettraient, à terme, de disposer d'un cadre coordonné au niveau de l'Union européenne et d'éviter dès à présent que la France ne surtranspose la directive DAC7, altérant la compétitivité des opérateurs domiciliés en France face à leurs concurrents européens dans un secteur particulièrement volatil.
C'est mon premier argument : préservons la compétitivité des opérateurs et évitons toute surtransposition.
Deuxièmement, toujours dans le cadre de la directive DAC7, l'administration fiscale collecte les informations sur la base d'un schéma décidé au niveau européen. Le recueil d'informations supplémentaires, en particulier le numéro de carte professionnelle, nécessiterait une modulation dudit schéma. Or cela semble particulièrement ambitieux au regard de la proximité de la prochaine campagne de collecte, qui débute le 1er janvier 2026 : cela susciterait d'importantes difficultés de mise en œuvre.
Pour ces deux raisons, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; à défaut, l'avis sera défavorable.
Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote.
M. Olivier Jacquin. Nous sommes favorables à l'amendement de Mme Antoine. Il va dans le bon sens, puisqu'il tend à renforcer la responsabilité des plateformes. Il contredit ainsi fondamentalement l'article 8, qui vise à les exonérer de leurs responsabilités, considérant qu'elles ne sont pas les donneurs d'ordre. L'étude d'impact le précise bien, ce qui me paraît fortement pénalisant.
L'effet de cet amendement serait donc positif. Aussi, nous le voterons.
Mme la présidente. La parole est à Mme Jocelyne Antoine, pour explication de vote.
Mme Jocelyne Antoine. Monsieur le ministre, je maintiens mon amendement. J'entends bien vos arguments, mais il me semble que nous avons encore du travail à accomplir.
Par ailleurs, bien que les règles européennes que vous évoquez soient légitimes, je suis quelque peu chagrinée que notre administration fiscale ne puisse procéder à un contrôle aussi fin que ce que je suggère dans mon amendement.
Cet amendement traduit en réalité un vœu : que voulons-nous pour notre pays ? Comment envisageons-nous de coincer les fraudeurs et de contrebalancer le poids de ces plateformes tentaculaires ?
Nous ne sommes pas à leur taille : les plateformes font fi du droit européen et s'engouffrent dans chacune de ses failles.
Même s'il est difficilement applicable, cet amendement est un vœu de progression pour l'avenir.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 42 rectifié ter.
(L'amendement est adopté.) – (M. Jacques Fernique fait un signe de victoire.)
Mme la présidente. Mes chers collègues, il est très positif que nous ayons ce débat. Ayez cependant conscience que nous avons examiné très peu d'amendements ce matin.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote sur l'article. (Marques d'impatiences sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Raymonde Poncet Monge. Peut-être faudrait-il limiter le nombre de scrutins publics, qui prennent du temps…
Le ministre du travail l'a rappelé : ce projet de loi a pour objet de lutter contre la fraude. Mais cet article permet au Gouvernement de temporiser quant à la transposition de la directive européenne, qui est pourtant le meilleur moyen de parvenir à cette fin !
Monsieur le ministre, vous avez annoncé avoir ouvert la concertation. Nous comptons sur vous pour accélérer cette transposition.
Le moins que l'on puisse dire, c'est que, in fine, cet article n'est pas à la hauteur pour réguler le secteur le plus « fraudogène ».
Si l'on en croit le journal Alternatives économiques, les micro-entreprises éludent entre 20 % et 24 % des cotisations. Pour cette même catégorie d'entreprises, dans le secteur de la livraison, ce pourcentage se situe entre 50 % et 70 % !
Cela représente des milliards d'euros. Et ce phénomène est très dynamique : il croît de plus en plus. La transposition est donc vraiment urgente, autrement ce projet de loi ne répondra pas à ses objectifs.
Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote sur l'article.
M. Olivier Jacquin. Cet hémicycle est fait pour débattre.
Nous sommes quelques-uns à avoir introduit ce sujet, en évoquant la directive sur le travail des plateformes de l'ancien commissaire européen Nicolas Schmit, que l'article 8 contredit. Chacun a pu exprimer sa position.
Je le répète : l'examen de ce texte se déroule au moment même où le Parlement européen débat sur le devoir de vigilance et risque de l'altérer fortement pour laisser les fraudeurs agir dans une plus grande impunité.
Enfin, monsieur le ministre, je regrette que vous n'ayez pas eu un mot pour les livreurs à vélo. Cette activité est encore plus concernée par la fraude que le secteur des VTC. Or, hier, le syndicat représentant les livreurs à vélo a quitté la table de l'Arpe.
Pour ma part, je me rendrai cet après-midi au tribunal en tant que partie civile dans le dossier Frichti. En effet, à la suite de la parution d'un article sur les pratiques de cette société dans Libération, j'avais fait un signalement auprès du Procureur de la République de Paris en vertu de l'article 40 du code de procédure pénale, afin d'organiser des poursuites envers cette entreprise qui a été liquidée pour travail irrégulier et dissimulé. Nous continuerons la lutte : elle est indispensable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 8, modifié.
(L'article 8 est adopté.)
Après l'article 8
Mme la présidente. L'amendement n° 193 rectifié, présenté par Mmes N. Goulet et Antoine, est ainsi libellé :
Après l'article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 561-2 du code monétaire et financier est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« ...° Les professionnels mentionnés à l'article L. 3141-1 du code des transports. »
La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Mme Nathalie Goulet. Depuis ce matin, nous tournons autour du pot pour régler le problème de la responsabilisation des plateformes par diverses contraintes et obligations. Je vous propose une solution absolument radicale – et parfaite (Sourires.) –, qui consiste à compléter l'article L. 561-2 du code monétaire et financier, de façon à assujettir les professionnels mentionnés à l'article L. 3141-1 du code des transports aux obligations de Tracfin.
Ainsi, nous serons tranquilles : ces professionnels seront soumis à cette obligation, voilà tout. Nous aurons réglé d'un seul coup tous les problèmes de conformité et de lutte contre le blanchiment, sans que ces acteurs économiques aient à prouver qu'ils ne recourent pas à du personnel non déclaré et qu'ils effectuent bien leurs déclarations auprès de l'Urssaf.
Cessons de tourner autour du pot ! Il suffit d'assujettir ces professionnels aux obligations de Tracfin et ils régleront tout problème directement avec le parquet national financier.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission du développement durable ?
M. Alain Duffourg, rapporteur pour avis. Notre collègue Nathalie Goulet conclut en beauté les débats sur le secteur des nouveaux transporteurs, en proposant que soient transmis à Tracfin l'ensemble des errements et des fraudes liés à cette activité.
La commission sollicite l'avis du Gouvernement.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Madame Goulet, vous proposez une mesure forte !
M. Martin Lévrier. Eh oui !
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Vous avez raison : soyons ambitieux.
L'intention du Gouvernement est sincère. Il faut lutter contre la fraude sociale. Ce sont 13 milliards d'euros qui nous échappent, selon les estimations – on ne peut guère être plus précis s'agissant de la fraude.
Il existe divers types de fraudes. Le travail dissimulé en fait partie et représente sans doute le poste le plus important.
J'ai des hésitations quant à votre amendement. Aussi, je m'en remets à la sagesse du Sénat (Applaudissements sur les travées du groupe UC.), le rapporteur m'ayant invité à prendre un temps de recul et de réflexion.
Mme la présidente. Quel est donc l'avis de la commission du développement durable ?
M. Alain Duffourg, rapporteur pour avis. La commission s'en remet également à la sagesse du Sénat.
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 8.
Article 9 (précédemment examiné)
Mme la présidente. Je rappelle que l'article 9 a été précédemment examiné.
Chapitre II
Renforcer les moyens d'enquête et de contrôle
Article 10
I. – Au 5° de l'article L. 114-19 du code de la sécurité sociale, après le mot : « articles », sont insérées les références : « L. 211-1, L. 212-1, ».
II (nouveau). – L'article L. 134 du livre des procédures fiscales est ainsi modifié :
1° Au début, est ajoutée la mention : « I. – » ;
2° Il est ajouté un II ainsi rédigé :
« II. – Sur leur demande précisant les entreprises concernées, reçoivent communication de renseignements liés au chiffre d'affaires des entreprises ayant placé leurs salariés en activité partielle :
« 1° Les agents des services déconcentrés du ministère chargé de l'emploi, pour l'exercice de leur mission de lutte contre la fraude et de contrôle du dispositif d'activité partielle mentionné à l'article L. 5122-1 du code du travail ;
« 2° Les agents des services centraux du ministère chargé de l'emploi, pour l'exercice de leur mission d'appui et de pilotage des services mentionnés au 1° du présent II. »
Mme la présidente. L'amendement n° 104, présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 1
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
.... – Au 5° de l'article L. 114-19 du code de la sécurité sociale, après le mot : « autorité » sont insérés les mots : « dûment habilités, par délégation et sous leur responsabilité ».
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. L'extension du droit de communication aux agents dûment habilités, placés sous l'autorité des directrices et directeurs comptables des organismes locaux de sécurité sociale, doit s'accompagner de garanties suffisantes afin d'assurer la proportionnalité du dispositif, la protection des données personnelles et la préservation de la responsabilité hiérarchique.
Le présent amendement vise ainsi à réserver l'exercice de ce droit aux seuls agents ayant reçu une délégation expresse, tout en maintenant la responsabilité des directrices et directeurs sur les actes accomplis dans ce cadre.
En premier lieu, la communication d'informations détenues par des tiers constitue une prérogative sensible, impliquant un accès à des données parfois confidentielles ou à caractère personnel. Il est donc essentiel de s'assurer que seules des personnes dûment habilitées, identifiées et formées puissent exercer ce droit. Limiter l'extension du dispositif aux agents bénéficiaires d'une délégation permet de garantir la traçabilité des démarches entreprises et d'éviter tout usage abusif ou disproportionné de cette faculté d'investigation.
En second lieu, la délégation explicite constitue un instrument de bonne administration et de responsabilité. Cette approche renforce la chaîne hiérarchique et clarifie les obligations de chacun, dans un domaine où les enjeux juridiques et éthiques sont majeurs.
Enfin, cette condition assure au contraire que les actions engagées le soient dans un cadre maîtrisé et garantissant la confiance entre les organismes de sécurité sociale, les tiers concernés et les citoyens, dans une optique d'équilibre entre les exigences de la lutte contre la fraude et la protection des droits fondamentaux.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Olivier Henno, rapporteur de la commission des affaires sociales. Cet amendement vise à limiter le bénéfice du droit de communication permettant d'obtenir des informations de la part de tiers aux seuls agents des caisses primaires d'assurance maladie (CPAM), des Urssaf et des caisses de la Mutualité sociale agricole (MSA) ayant reçu une habilitation et une délégation expresse.
L'article 10 vise à desserrer les conditions s'appliquant pour le droit de communication, mais il précise bien, pour sécuriser le dispositif, que les agents agissent sous la responsabilité du directeur ou du directeur comptable et financier.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement, qui nous paraît trop restrictif.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Ce droit de communication est une prérogative de puissance publique. Il est important, puisqu'il permet d'obtenir des renseignements nécessaires au contrôle, à la lutte contre la fraude et au recouvrement.
L'article 10 du projet de loi tend à étendre cette prérogative à certains agents de l'assurance maladie pour assurer le contrôle de la complémentaire santé solidaire (C2S). Il nous semble que ce droit doit être accordé pour renforcer la lutte contre la fraude.
Par ailleurs, vous soulignez que l'exercice de ce pouvoir est susceptible de porter atteinte à la vie privée, puisqu'il peut entraîner la communication d'informations normalement confidentielles. Vous proposez, pour encadrer le pouvoir des agents placés sous l'autorité des directeurs comptables, de prévoir des modalités particulières de désignation et d'habilitation.
Le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 104.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. L'amendement n° 105, présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 1
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Après le septième alinéa de l'article L. 114-19 du code de la sécurité sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les organismes mentionnés au présent article sont tenus d'informer les assurés, dès le dépôt de leur demande de prestation, de l'existence et des modalités d'exercice du droit de communication prévu au présent article. »
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Cet amendement émane d'une recommandation de la Défenseure des droits. Ce n'est d'ailleurs pas le seul, sur ce texte, et il serait utile que les avis rendus par cette autorité soient davantage consultés et, surtout, pris en compte dans cet hémicycle.
Il s'agit en effet d'un arbitrage entre la lutte contre la fraude, qui est tout à fait légitime et que nous soutenons, et le droit à la vie privée et à la protection des données sensibles.
Sur une recommandation de la Défenseure des droits, le présent amendement vise à instaurer, à la charge des organismes bénéficiaires du droit de communication, qui a été élargi, une obligation d'information des assurés dès le dépôt de leur demande de prestation. Cette information permettra à chaque usager de connaître, en amont de l'instruction de sa demande, l'existence de ce droit, les catégories de tiers susceptibles d'être sollicités, ainsi que la nature des données pouvant être communiquées.
Cette mesure vise à renforcer la transparence et donc la confiance dans les relations entre les assurés et les organismes de sécurité sociale.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Olivier Henno, rapporteur. Cet amendement vise à rendre systématique l'information des assurés, au stade du dépôt de leur demande de prestation, de l'existence du droit de communication auprès de tiers.
Cette obligation nous paraît disproportionnée pour les caisses de sécurité sociale. De plus, elle présente un risque d'invalidation des procédures de lutte contre les fraudes dans le cas où la mention aurait été oubliée.
En outre, le code de la sécurité sociale prévoit déjà que l'organisme ayant usé de droits de communication est tenu d'informer la personne à l'encontre de laquelle est prise une décision défavorable de la teneur et de l'origine des informations et documents obtenus.
La commission émet un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Les formulaires de demande de prestations informent déjà les demandeurs des possibilités de contrôle ouvertes aux caisses. Ils mentionnent également les sanctions encourues en cas de fausse déclaration.
Enfin, la loi prévoit l'obligation – M. le rapporteur l'a rappelé – pour l'organisme ayant usé du droit de communication d'en informer la personne physique ou morale concernée, lorsqu'une décision administrative est prise sur le fondement des informations collectées. Il a également l'obligation de transmettre une copie des documents concernés à la personne qui en fait la demande.
Inscrire une obligation supplémentaire d'information dans la loi ne me paraît donc pas nécessaire.
Pour ces raisons, je ne suis pas favorable à votre amendement.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 105.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 10.
(L'article 10 est adopté.)
Article 10 bis (nouveau)
I. – Le paragraphe 3 de la sous-section 2 de la section 2 du chapitre III du titre V du livre II de la troisième partie du code du travail est complété par un article L. 3253-17-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 3253-17-1. – Les institutions de garantie mentionnées à l'article L. 3253-14 sont tenues, lorsqu'elles ont connaissance d'informations ou de faits pouvant être de nature à constituer une fraude, de mener les contrôles nécessaires.
« Des agents chargés de la lutte contre les fraudes sont désignés par le directeur de l'association mentionnée au premier alinéa du même article L. 3253-14.
« À cet effet, ces agents bénéficient d'un droit de communication qui permet d'obtenir, sans que s'y oppose le secret professionnel, tout document ou information nécessaire à l'appréciation des droits des salariés.
« Le droit mentionné au troisième alinéa du présent code s'exerce quel que soit le support utilisé pour la conservation des documents et peut s'accompagner de la prise immédiate d'extraits et de copies.
« Les documents et informations sont communiqués à titre gratuit dans les trente jours qui suivent la réception de la demande.
« Sans préjudice des autres dispositions législatives applicables en matière d'échanges d'informations, le droit de communication défini au présent article est exercé dans les conditions prévues et auprès des personnes mentionnées à la section 1 du chapitre II du titre II du livre des procédures fiscales, à l'exception des personnes mentionnées aux articles L. 82 C, L. 83 A à L. 83 E, L. 84 à L. 84 E, L. 89 à L. 91, L. 95, L. 96, L. 96 B, L. 96 CA, L. 96 F à L. 96 H et L. 96 J du même livre. »
II. – Après la seconde occurrence du mot : « agents », la fin du 6° de l'article L. 114-16-3 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigée : « mentionnés au deuxième alinéa de l'article L. 3253-17-1 dudit code ; ».
Mme la présidente. L'amendement n° 302, présenté par Mme Puissat et M. Henno, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 4
Compléter cet alinéa par les mots :
en vue de bénéficier de l'assurance mentionnée à l'article L. 3253-6
II. – Alinéa 5
Remplacer le mot :
code
par le mot :
article
III. - Après l'alinéa 6
Insérer trois alinéas ainsi rédigés :
« La communication des documents et informations est effectuée par voie numérique.
« Le silence gardé ou le refus de déférer à une demande relevant du troisième alinéa du présent article est puni d'une amende de 1 500 € par bénéficiaire de l'assurance mentionnée à l'article L. 3253-6, sans que le total de l'amende puisse être supérieur à 10 000 €.
« Ces montants sont doublés en cas de récidive de refus ou de silence gardé du tiers dans le délai de cinq ans à compter de l'expiration du délai de trente jours octroyé au tiers pour faire droit à la première demande des agents des institutions de garantie mentionnées à l'article L. 3253-14. »
IV. - Après l'alinéa 7
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque l'usage du droit mentionné au troisième alinéa du présent article conduit à refuser le bénéfice de l'assurance mentionnée à l'article L. 3253-6, les institutions de garantie mentionnées à l'article L. 3253-14 sont tenues d'informer la personne concernée de la teneur et de l'origine des informations et documents obtenus auprès de tiers sur lesquels est fondée cette décision. Elles communiquent une copie des documents mentionnés au présent alinéa à la personne qui en fait la demande. »
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur de la commission des affaires sociales. Le présent amendement vise à apporter quelques compléments au renforcement, introduit par la commission, des prérogatives de l'Association pour la gestion du régime de garantie des créances des salariés (AGS) en matière de lutte contre la fraude.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Je suis favorable à cet amendement qui tend à clarifier et à renforcer les prérogatives de l'AGS.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 302.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 10 bis, modifié.
(L'article 10 bis est adopté.)
Article 10 ter (nouveau)
Le code des juridictions financières est ainsi modifié :
1° Le chapitre Ier du titre III est complété par une section 5 ainsi rédigée :
« Section 5
« Respect du droit de communication
« Art. L. 131-22. – La Cour des comptes assure le respect du droit de communication que la loi confie aux autorités mentionnées aux 6° et 7° de l'article L. 142-1-1 ainsi qu'à l'article L. 411-1.
« Lorsqu'il n'est pas satisfait à l'exercice de leur droit de communication, ces autorités peuvent déférer les faits au procureur général qui, après avoir invité la personne concernée à présenter ses observations, peut renvoyer l'affaire devant la chambre du contentieux, qui statue dans les conditions prévues à la section 3 du chapitre II du titre IV du présent livre.
« Préalablement à la décision de renvoi, le procureur général a la faculté d'enjoindre à la personne concernée de procéder, dans un délai qui ne peut être inférieur à trois jours, à la transmission des documents, données et traitements demandés.
« Le montant de l'amende susceptible d'être prononcée par la chambre du contentieux est proportionné à la gravité des manquements constatés. Il ne peut excéder un plafond de 15 000 euros ou, en cas d'injonction, 1 000 euros par jour de retard dans l'exécution de celle-ci. » ;
2° Le chapitre II du titre IV est complété par une section 3 ainsi rédigée :
« Section 3
« Respect du droit de communication
« Art. L. 142-3. – Pour l'infraction prévue à l'article L. 131-22, l'affaire est directement jugée par la chambre du contentieux, sans instruction préalable.
« À cette audience, qui se tient dans un délai de huit jours suivant la décision de renvoi du procureur général, la chambre du contentieux est composée du seul président, siégeant à juge unique, ou du président de section qu'il désigne à cette fin.
« Art. L. 142-4. – Les règles de procédure prévues aux articles L. 142-1-6 à L. 142-1-8, au premier alinéa de l'article L. 142-1-9, au dernier alinéa de l'article L. 142-1-10 et aux articles L. 142-1-11 et L. 142-1-12 sont applicables au jugement des affaires renvoyées devant la chambre du contentieux sur le fondement de l'article L. 131-22. » ;
3° Au début de l'article L. 311-6, sont ajoutés les mots : « Sauf dans le cas des arrêts rendus en application de l'article L. 131-22, ».
Mme la présidente. L'amendement n° 289, présenté par Mme Puissat et M. Henno, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 5
Après le mot :
loi
rédiger ainsi la fin de cet alinéa :
lui confie ainsi qu'aux autorités mentionnées au 7° de l'article L. 142-1-1 et L. 411-1.
II. – Alinéa 6
Remplacer les mots :
ces autorités
par le mot :
elles
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Favorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 289.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. L'amendement n° 290, présenté par Mme Puissat et M. Henno, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 8
Insérer quatre alinéas ainsi rédigés :
... ° Le chapitre II du titre IV est ainsi modifié :
a) L'article L. 142-1-2 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Il peut demander à tout organisme soumis au contrôle de la Cour des comptes ou au contrôle d'une chambre régionale ou territoriale des comptes, tous documents ou informations utiles à l'appréciation des faits portés à sa connaissance. » ;
b) Au dernier alinéa de l'article L. 142-1-3, après le mot : « public, », sont insérés les mots : « la demande prévue au second alinéa de l'article L. 142-1-2, » ;
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Cet amendement vise à renforcer l'effectivité des pouvoirs de communication dont bénéficie le parquet général de la Cour des comptes dans le cadre du contentieux.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. La Cour des comptes a déjà un pouvoir assez étendu… Sur cet amendement, le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 290.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 10 ter, modifié.
(L'article 10 ter est adopté.)
Après l'article 10 ter
Mme la présidente. L'amendement n° 240, présenté par Mmes Silvani, Apourceau-Poly et Brulin, MM. Barros, Savoldelli et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky, est ainsi libellé :
Après l'article 10 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 313-14-3 du code de l'action sociale et des familles, il est inséré un article L. 313-14-3... ainsi rédigé :
« Art. L. 313-14-3... – Lorsque plusieurs établissements mentionnés à l'article L. 312-1 sont constitués de fait en groupe ou en holding privé à caractère lucratif, a fortiori lorsqu'une même personne physique ou une même personne morale en est directement ou indirectement gestionnaire au sens de l'article L. 313-14-3, ceux-ci doivent transmettre chaque année au ministère de tutelle les comptes consolidés sur l'ensemble du périmètre des établissements et entités, français ou étrangers, constituant le groupe ou la holding et concourant directement ou indirectement à la gestion des établissements, ou ayant un impact sur les dépenses liées aux activités mentionnées à l'article L. 313-14.
« Les comptes distincts des établissements et des entités concourants directement ou indirectement à la gestion des établissements doivent être transmis avec les comptes consolidés.
« Les comptes consolidés doivent faire apparaître les flux financiers entre chacune des entités ainsi que leurs montants.
« L'autorité de contrôle peut, en complément, demander la transmission des comptes des organismes gestionnaires.
« Toutes autres pièces comptables nécessaires au contrôle sont mises à la disposition de l'autorité de contrôle et, en tant que de besoin, communiquées par celle-ci aux services chargés de l'analyse économique et financière.
« En cas de non-respect de l'obligation de transmission, les sanctions prévues aux II et III de l'article L. 313-14 sont applicables.
« Sur la base de ces données comptables, les ministères de tutelle contrôlent l'absence de surcompensation financière sur le champ des activités mentionnées à l'article L. 311-1. Ils procèdent, le cas échéant, à la récupération des sommes indûment déléguées par les autorités de tarification.
« Il n'y a de surcompensation que dans le cas où l'établissement de santé dépasse le taux de bénéfice raisonnable de 2 % du chiffre d'affaires réalisés sur le champ des activités mentionnées à l'article L. 311-1, déduction faite des investissements liés à ces activités et de la participation aux résultats tel que définie à l'article L. 3322-1 du code du travail.
« Les règles d'application et de calcul de la surcompensation s'appliquent au plan national en conformité avec les règles européennes.
« Les flux financiers vers des entités appartenant au même groupe ou à la même holding que l'établissement, ou vers des entités appartenant à une personne physique ou morale directement ou indirectement gestionnaire de l'établissement au sens de l'article L. 313-14-3 du présent code, sont pris en compte dans l'appréciation de la surcompensation financière. À ce titre, l'autorité de contrôle est compétente pour apprécier la conformité des dépenses mobilières et immobilières au regard des conditions contractuelles et tarifaires normalement pratiquées sur le marché et en modifier les montants dans son appréciation de la surcompensation lorsque celles-ci sont manifestement surévaluées.
« Un décret en Conseil d'État fixe les règles de calcul et d'application de la surcompensation et détermine les modalités de transmission des comptes et de répartition des charges et des produits entre les activités mentionnées à l'article L. 311-1 et les autres activités, les modalités de contrôle et de publicité, ainsi que le mécanisme de récupération. »
La parole est à Mme Silvana Silvani.
Mme Silvana Silvani. Depuis la crise du covid-19, des milliards d'euros d'argent public ont été versés au secteur privé de la santé, au nom de la solidarité nationale et de l'urgence sanitaire. Aujourd'hui, il est temps d'exiger des comptes.
Cet amendement vise à imposer aux groupes privés de santé de transmettre leurs comptes consolidés, afin que l'on sache où va réellement l'argent de la sécurité sociale. Car derrière les façades médicales, certains groupes financiers engrangent des profits considérables grâce à des remboursements publics, tout en fermant des lits, en licenciant du personnel ou en rémunérant grassement leurs actionnaires. C'est ce que l'on appelle la surcompensation des profits réalisés sur le dos de la collectivité. En 2024, plusieurs cliniques privées ont ainsi affiché des marges supérieures à 10 % pendant que les hôpitaux publics peinaient à boucler leur budget et que les soignants étaient à bout.
Cet amendement ne tend à punir personne : il rétablit simplement la transparence et la justice. S'il était adopté, il serait possible de vérifier que chaque euro public sert bien à soigner, et non à spéculer. Il s'agit d'imposer aux groupes privés lucratifs de transmettre leurs comptes consolidés au ministère de tutelle, de limiter leurs profits à 2 % du chiffre d'affaires et de réinvestir les surplus dans le système de santé.
Dans un contexte où sont annoncées, au travers du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2026, des coupes dans les budgets hospitaliers, il est intolérable que l'argent de la sécurité sociale puisse nourrir des logiques purement financières sans aucune contrepartie sociale ou médicale. L'État doit cesser d'être le guichet automatique du capital privé de la santé et redevenir le garant de l'intérêt général.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Olivier Henno, rapporteur. Je comprends le sens de cet amendement, mais de nombreux dispositifs ont d'ores et déjà été votés par le législateur en vue de renforcer le contrôle des établissements de santé sociaux et médico-sociaux – je pense à ceux qui sont prévus en matière de financiarisation, et à l'article 10 ter du présent texte, lequel dispose que la Cour des comptes assure le respect du droit de communication confié par la loi aux corps d'inspection.
L'avis est donc défavorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Nous aurons prochainement un débat sur le financement des établissements de santé.
La loi du 8 avril 2024 portant mesures pour bâtir la société du bien vieillir et de l'autonomie a renforcé la transparence et la moralisation de la gestion des établissements médico-sociaux lucratifs, en rendant obligatoire la mise en place d'une comptabilité analytique permettant d'attester de l'utilisation des fonds publics – le décret y afférent sera bientôt publié –, et en augmentant le nombre de contrôles ainsi que le montant des sanctions financières. Ces contrôles sont réalisés et ces sanctions ordonnées par les agences régionales de santé (ARS) et les départements, qui sont les mieux placés pour récupérer les éventuels excédents alloués.
L'avis est donc défavorable.
Mme la présidente. L'amendement n° 303, présenté par M. Henno et Mme Puissat, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Après l'article 10 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le 7° ter de l'article L. 330-2 du code de la route, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« ...° Aux agents habilités de l'organisme mentionné à l'article L. 213-1 du code de la sécurité sociale pour accomplir les actions de contrôle et de lutte contre la fraude mentionnées à l'article L. 114-9 du même code ; »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Olivier Henno, rapporteur. Cet amendement vise à rendre possible l'accès direct au système d'immatriculation des véhicules (SIV) au bénéfice des agents de l'Urssaf.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. N'ayant pas étudié la faisabilité de cette mesure avec le ministère de l'intérieur, je m'en remets à la sagesse du Sénat sur cet amendement.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 303.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 10 ter.
Article 11
Le code du travail est ainsi modifié :
1° Après l'article L. 6362-8, il est inséré un article L. 6362-8-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 6362-8-1. – Pour le contrôle des organismes de formation réalisant des actions de formations en tout ou partie à distance ou dont l'inscription peut se faire en ligne, les agents mentionnés à l'article L. 6333-7-2 ainsi que les agents de la Caisse des dépôts et consignations peuvent faire usage d'une identité d'emprunt. » ;
2° L'article L. 6362-13 est complété par les mots : « , notamment les conditions dans lesquelles les agents mentionnés à l'article L. 6362-8-1 procèdent aux constatations ».
Mme la présidente. L'amendement n° 291, présenté par Mme Puissat et M. Henno, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
I. – Après l'alinéa 1
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…° Après l'article L. 6333-7-2, il est inséré un article L. 6333-7-… ainsi rédigé :
« Art. L. 6333-7-…. — Dans le cadre des contrôles opérés par la Caisse des dépôts et consignations pour la gestion du compte personnel de formation, du service dématérialisé, du respect de ses conditions générales d'utilisation et du traitement automatisé mentionné à l'article L. 6323-8, il peut être fait usage d'une identité d'emprunt. » ;
II. – Alinéa 3
Remplacer les mots :
L. 6333-7-2 ainsi que les agents de la Caisse des dépôts et consignations
par la référence :
L. 6361-5
III. – Alinéa 4
Après le mot :
procèdent
rédiger ainsi la fin de cet alinéa :
au contrôle mentionné à l'article L. 6362-5 ».
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Cet amendement vise à mieux préciser le périmètre des agents pouvant recourir à une identité d'emprunt dans le cadre d'enquêtes relatives aux organismes de formation professionnelle.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Favorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 291.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 11, modifié.
(L'article 11 est adopté.)
Après l'article 11
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 210 rectifié ter est présenté par Mme Lermytte, MM. Malhuret et Chasseing, Mme Bourcier, M. Wattebled, Mme L. Darcos, MM. Pellevat, Chevalier, Grand, Rochette, Capus, Médevielle, V. Louault, Laménie et Brault, Mmes Antoine, Jacquemet et Aeschlimann, M. Daubresse, Mmes Muller-Bronn et Sollogoub, M. Menonville, Mmes Saint-Pé et Romagny, M. J.B. Blanc, Mme Bellamy, MM. Chatillon, Fialaire, Khalifé et Houpert et Mme Gacquerre.
L'amendement n° 271 rectifié est présenté par MM. Iacovelli et Patriat, Mme Havet et MM. Buis et Théophile.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 11
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 6361-2 du code du travail est ainsi modifié :
1° Au b, les mots : « à l'article L. 6331-48 » sont remplacés par les mots : « aux articles L. 6331-48 et L. 6331-57 » ;
2° Le d est complété par les mots : « et l'instance paritaire nationale mentionnée à l'article L. 6323-17-5-1 ».
La parole est à Mme Marie-Claude Lermytte, pour présenter l'amendement n° 210 rectifié ter.
Mme Marie-Claude Lermytte. Cet amendement vise à modifier l'article listant les structures susceptibles d'être contrôlées administrativement et financièrement par l'État, en y ajoutant : l'organisme spécifique qui, au sein de l'opérateur de compétences (Opco), peut gérer la contribution spécifique des particuliers employeurs et l'instance paritaire nationale mentionnée à l'article L. 6323-17-5-1 du code du travail, qui a été créée par la loi du 24 octobre 2025 portant transposition des accords nationaux interprofessionnels en faveur de l'emploi des salariés expérimentés et relatif à l'évolution du dialogue social.
En effet, ces deux organismes sont amenés à gérer des fonds mutualisés de la formation professionnelle. Dans ce cadre, ils doivent pouvoir faire l'objet de contrôles, à l'instar d'autres organismes tels que les Opco ou les commissions paritaires interprofessionnelles régionales.
Mme la présidente. La parole est à M. Xavier Iacovelli, pour présenter l'amendement n° 271 rectifié.
M. Xavier Iacovelli. Il est défendu.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Ces deux amendements identiques visent à renforcer les contrôles de l'État sur deux organismes paritaires : l'Association paritaire nationale d'information et d'innovation (Apni) et Certif Pro.
Au Sénat, lorsqu'il s'agit de contrôler les organismes paritaires, nous y regardons à deux fois parce que nous faisons confiance aux partenaires sociaux. De surcroît, ma collègue Anne-Marie Nédélec et moi-même avons beaucoup bataillé en faveur des accords nationaux interprofessionnels (ANI) sur l'emploi des seniors, afin que Certif Pro bénéficie de l'autonomie que réclamaient les partenaires sociaux.
Quelque peu circonspecte sur cet amendement, la commission souhaite connaître l'avis du Gouvernement.
Mme la présidente. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Aucune disposition du code du travail ne permet actuellement de fonder le contrôle de l'État sur l'organisme gérant la contribution spécifique et Certif Pro. Cet amendement complétant utilement l'article L. 6361-2 du code du travail, j'émets un avis favorable.
Mme la présidente. Quel est maintenant l'avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Favorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 210 rectifié ter et 271 rectifié.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 11.
Article 12
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° La première phrase du premier alinéa de l'article L. 114-10 est ainsi modifiée :
a) La troisième occurrence du mot : « et » est remplacée par le signe : « , » ;
b) Sont ajoutés les mots : « et l'octroi des subventions ou financements en application de la législation sur les accidents du travail et les maladies professionnelles. » ;
2° L'article L. 114-17-1 est ainsi modifié :
a) Le I est complété par un 5° ainsi rédigé :
« 5° Les travailleurs indépendants. » ;
b) Le II est ainsi modifié :
– au 1°, après le mot : « maritime », sont insérés les mots : « , du code du travail » ;
– à la fin du 5°, les mots : « et L. 351-1 » sont remplacés par les mots : « , L. 221-1-5, L. 242-7, L. 351-1, L. 422-5 ainsi qu'aux articles L. 4163-16 et L. 4163-18 du code du travail » ;
– au 6°, après la référence : « L. 162-1-15 », sont insérés les mots : « du présent code » ;
– le 8° est ainsi rétabli :
« 8° Les agissements visant à obtenir ou à tenter de faire obtenir, par toute fausse déclaration, manœuvre ou inobservation des règles prévues au présent code, l'un des avantages mentionnés à l'article L. 221-1-5, L. 242-7 ou L. 422-5 ainsi qu'à l'article L. 4163-1 du code du travail. » ;
– le 9° est complété par les mots : « ou toute manœuvre ayant pour objet ou pour effet de priver les victimes ou leurs ayants-droits de leurs droits au titre du livre IV du présent code » ;
– après le même 9°, il est inséré un 9° bis ainsi rédigé :
« 9° bis Les agissements mentionnés au II de l'article L. 4163-16 du code du travail ainsi que ceux visant à obtenir ou à tenter de faire obtenir par toute fausse déclaration, manœuvre ou inobservation des règles prévues au présent code ou au code du travail le bénéfice d'avantages injustifiés au titre du compte professionnel de prévention mentionné à l'article L. 4163-1 du code du travail ou de priver ou de réduire les droits des salariés au bénéfice de ce compte ; »
c) Au premier alinéa du V, les mots : « au 3° ou au 4° » sont remplacés par les mots : « aux 2° à 5° » ;
3° L'article L. 114-19 est ainsi modifié :
a) Le 1° est complété par les mots : « et l'octroi de l'un des avantages prévus aux articles L. 221-1-5, L. 242-7 ou L. 422-5 ainsi qu'aux articles L. 4163-16 et L. 4163-18 du code du travail » ;
b) Au 5°, après la référence : « L. 213-1 », sont insérées les références : « , L. 215-1, L. 215-3 » ;
4° et 5° (Supprimés)
6° L'article L. 422-3 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « Les employeurs, qu'il s'agisse de personnes privées ou publiques, et les travailleurs indépendants sont tenus de présenter à ces agents tout document nécessaire à l'exercice de leur mission, et de permettre à ces agents l'accès aux locaux de l'entreprise. » ;
b) Après le deuxième alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Les ingénieurs conseils et les contrôleurs de sécurité mentionnés à l'article L. 243-11 procèdent à toute vérification portant sur l'exactitude des déclarations, des attestations et des justificatifs de toute nature fournis pour le calcul du taux de la cotisation due au titre des accidents du travail ou en vue de bénéficier ou de faire bénéficier de subventions, de ristournes, de financements, de droits ou de prestations servis au titre de la branche Accidents du travail et maladies professionnelles.
« Les constatations établies à cette occasion par les ingénieurs-conseils et les contrôleurs de sécurité mentionnés à l'article L. 243-11 font foi jusqu'à preuve du contraire, y compris lorsqu'ils constatent des abus, des fautes ou des fraudes en méconnaissance des obligations prévues au présent code. Leurs constatations sont communicables à un autre organisme de protection sociale afin que le directeur de cet organisme en tire, le cas échéant, les conséquences, selon les procédures qui lui sont applicables concernant l'attribution des prestations et des aides financières, la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles et le recouvrement des cotisations et des contributions dont il a la charge. »
II. – Le I de l'article L. 4163-16 du code du travail est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « Les employeurs, qu'il s'agisse de personnes privées ou publiques, et les travailleurs indépendants sont tenus de présenter aux agents de ces organismes et caisses tout document nécessaire à l'exercice de leur mission, et de permettre à ces agents l'accès aux locaux de l'entreprise. » ;
2° Sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés :
« Les agents procèdent à toute vérification portant sur l'exactitude des déclarations, des attestations et des justificatifs de toute nature fournis.
« Les constatations établies à cette occasion font foi jusqu'à preuve du contraire, y compris lorsqu'ils constatent des abus, des fautes ou des fraudes en méconnaissance des obligations prévues au présent chapitre ou au code de la sécurité sociale. Leurs constatations sont communicables à un autre organisme de protection sociale afin que le directeur de cet organisme en tire, le cas échéant, les conséquences, selon les procédures qui lui sont applicables. »
Mme la présidente. L'amendement n° 292, présenté par Mme Puissat et M. Henno, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 13
Après les mots :
ainsi qu'
insérer les mots :
au titre du compte professionnel de prévention mentionné
II. – Après l'alinéa 21
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° À la deuxième phrase du sixième alinéa du IV de l'article L. 165-1-4, les mots : « IV de l'article L. 114-17-1 », sont remplacés par les mots : « I de l'article L.114-17-2 » ;
III. – Alinéa 25
Après la première occurrence du mot :
travail
insérer les mots :
et des maladies professionnelles
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Favorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 292.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. L'amendement n° 202 rectifié, présenté par M. Canévet, Mmes Patru et Sollogoub, MM. Kern et Laugier, Mmes Gacquerre et Billon, MM. Courtial et Duffourg, Mme Josende et M. Pillefer, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 26, seconde phrase
Après le mot :
applicables
insérer les mots :
et dans le respect du principe du contradictoire
II. – Alinéa 31, seconde phrase
Compléter cette phrase par les mots :
et dans le respect du principe du contradictoire
La parole est à Mme Nadia Sollogoub.
Mme Nadia Sollogoub. Cet amendement est défendu.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Cet amendement, qui est bienvenu, vise à assurer le respect du principe du contradictoire dans les suites données aux constatations établies par les agents des caisses d'assurance retraite et de la santé au travail (Carsat).
Avis favorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Je tiens à rassurer les auteurs de l'amendement : lorsque le projet de loi mentionne les procédures applicables par ces organismes, il va de soi qu'il inclut l'application du principe du contradictoire tel qu'il figure dans les textes en vigueur.
Ce principe fondamental, auquel le Gouvernement est très attaché, est d'ores et déjà respecté dans les différentes procédures applicables par les organismes de sécurité sociale. Cet amendement étant satisfait, j'en demande donc le retrait ; à défaut, l'avis sera défavorable.
Mme la présidente. Madame Sollogoub, l'amendement n° 202 rectifié est-il maintenu ?
Mme Nadia Sollogoub. Oui, madame la présidente.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 12, modifié.
(L'article 12 est adopté.)
Après l'article 12
Mme la présidente. Je suis saisie de cinq amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 308, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l'article 12
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 114-17-1 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa du I, après la référence : « L. 215-3 », sont insérés les mots : « , de l'organisme mentionné à l'article L. 382-17, de l'un des organismes gestionnaires des régimes spéciaux mentionnés à l'article L. 711-1 et des clercs et employés de notaires » ;
2° Le II est ainsi modifié :
a) Au 1°, après le mot : « familles, », sont insérés les mots : « ou de toute autre disposition législative ou réglementaire applicable » et, après le mot : « maladie », sont insérés les mots : « , l'organisme mentionné à l'article L. 382-17 ou l'un des organismes gestionnaires des régimes spéciaux mentionnés à l'article L. 711-1 et des clercs et employés de notaires » ;
b) Le 5° est ainsi modifié :
– les mots : « , de la caisse mentionnée à l'article L. 215-1 ou L. 215-3 ou de l'organisme local chargé de verser les prestations au titre des assurances obligatoires contre les accidents de travail et les maladies professionnelles des professions agricoles » sont remplacés par les mots : « ou d'un autre organisme mentionné au I du présent article » ;
– sont ajoutés les mots : « ou aux dispositions législatives ou réglementaires ayant le même objet » ;
c) Le 7° est complété par les mots : « ou aux dispositions législatives ou réglementaires ayant le même objet » ;
3° Le V est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, les mots : « locaux d'assurance maladie, plusieurs caisses mentionnées aux articles L. 215-1 ou L. 215-3 ou l'organisme local chargé de verser les prestations au titre des assurances obligatoires contre les accidents de travail et les maladies professionnelles des professions agricoles » sont remplacés par les mots : « mentionnés au premier alinéa du I » et, après le mot : « du », il est inséré le mot : « même » ;
b) Au deuxième alinéa, les mots : « local d'assurance maladie, une autre caisse mentionnée aux articles L. 215-1 ou L. 215-3 ou à l'organisme local chargé de verser les prestations au titre des assurances obligatoires contre les accidents de travail et les maladies professionnelles des professions agricoles » sont remplacés par les mots : « mentionné au premier alinéa du I du présent article ».
La parole est à Mme la ministre.
Mme Stéphanie Rist, ministre. Le Gouvernement partage pleinement les objectifs des auteurs des quatre amendements identiques qui vont suivre celui-ci – les amendements nos 62 rectifié, 79, 86 rectifié ter et 160 rectifié bis –, lesquels visent à relayer ce souhait des représentants des régimes spéciaux d'assurance maladie, dont celui de la RATP : pouvoir prononcer les pénalités financières prévues aux articles L. 114-17-1 et L. 114-17-2 du code de la sécurité sociale.
Toutefois, dans leur rédaction actuelle, ces amendements sont inapplicables. En effet, s'ils étaient adoptés, ils ne permettraient pas le prononcé de pénalités financières pour la mise en œuvre des dispositions, non codifiées, qui leur sont propres.
Le présent amendement du Gouvernement a été travaillé avec les caisses concernées, notamment la caisse de coordination aux assurances sociales (CCAS) de la RATP. Il inclut en outre la caisse d'assurance vieillesse, invalidité et maladie des cultes (Cavimac).
C'est pourquoi je propose à leurs auteurs de bien vouloir retirer ces amendements identiques au profit du présent amendement n° 308 du Gouvernement.
Mme la présidente. Les quatre amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 62 rectifié est présenté par MM. Chasseing et Grand, Mmes Lermytte et L. Darcos, MM. V. Louault, A. Marc, Chevalier, Brault et Capus, Mme Bourcier, MM. Rochette, Malhuret, Wattebled et Khalifé, Mme Belrhiti, MM. Menonville, H. Leroy, Levi et Chatillon, Mme Josende, M. Houpert et Mme Jacquemet.
L'amendement n° 79 est présenté par M. Milon.
L'amendement n° 86 rectifié ter est présenté par Mme Gruny, M. J.P. Vogel, Mmes Muller-Bronn, M. Mercier et Malet, MM. Hugonet, Sol et Panunzi, Mme Micouleau, MM. Daubresse et de Nicolaÿ, Mmes Petrus, Dumont et Gosselin, M. Sido, Mme Ventalon, MM. Burgoa et Rapin, Mmes P. Martin, Lassarade et Imbert et M. Belin.
L'amendement n° 160 rectifié bis est présenté par Mmes N. Goulet, Romagny et Guillotin et M. Gold.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 12
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au premier alinéa de l'article L. 114-17-1 du code de la sécurité sociale, après la référence : « L. 215-3 », sont insérés les mots : « , d'un organisme relevant du titre I du livre VII s'agissant des prestations d'assurance maladie ou d'accident du travail et de maladies professionnelles ».
La parole est à Mme Marie-Claude Lermytte, pour présenter l'amendement n° 62 rectifié.
Mme Marie-Claude Lermytte. Je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 62 rectifié est retiré.
La parole est à M. Alain Milon, pour présenter l'amendement n° 79.
M. Alain Milon. Je le retire également.
Mme la présidente. L'amendement n° 79 est retiré.
La parole est à Mme Pascale Gruny, pour présenter l'amendement n° 86 rectifié ter.
Mme Pascale Gruny. Je le retire.
Mme la présidente. L'amendement n° 86 rectifié ter est retiré.
La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour présenter l'amendement n° 160 rectifié bis.
Mme Nathalie Goulet. Est-il possible, madame la présidente, que je le rectifie de façon à le rendre identique à celui du Gouvernement ?
Mme la présidente. Tout à fait, ma chère collègue.
Je suis donc saisie d'un amendement n° 160 rectifié ter, identique à l'amendement n° 308 du Gouvernement.
Quel est l'avis de la commission sur ces deux amendements identiques ?
M. Olivier Henno, rapporteur. La commission avait prévu d'émettre un avis favorable sur l'ensemble de ces amendements faisant l'objet d'une discussion commune, avant que le Gouvernement ne dépose l'amendement n° 308, qu'elle n'a pas eu le temps d'examiner. Mme Goulet m'a devancé puisque j'allais proposer aux auteurs des amendements identiques de les rectifier afin de les rendre conformes à l'amendement du Gouvernement, dont la rédaction nous paraît plus précise.
Trois amendements ayant été retirés, j'émets un avis favorable, à titre personnel, sur les amendements identiques nos 308 et 160 rectifié ter.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 308 et 160 rectifié ter.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 12.
L'amendement n° 198, présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
Après l'article 12
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 133-5-4 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 133-5-4-... ainsi rédigé :
« Art. L. 133-5-4-.... – Nonobstant l'article L. 133-5-3 et le code des relations entre le public et l'administration, un employeur est tenu d'accomplir sans délai auprès des administrations et organismes chargés des missions mentionnées au second alinéa du I de l'article L. 133-5-3 du présent code qui en font la demande les formalités déclaratives mentionnées au II du même article L. 133-5-3, lorsqu'il existe des présomptions graves et concordantes qu'il a contrevenu, contrevient ou va contrevenir à ses obligations à l'égard de ces administrations ou organismes ou à l'égard de ses salariés.
« L'existence de présomptions graves et concordantes est notamment considérée comme établie lorsque l'employeur dirige ou dirigeait une personne morale réunissant au moins trois des conditions suivantes :
« 1° Elle a été créée depuis moins de douze mois ;
« 2° Elle a mis fin à son activité moins de six mois après sa création ;
« 3° Elle utilise ou utilisait les services d'une entreprise de domiciliation au sens de l'article L. 123-11-2 du code de commerce ;
« 4° Son siège est ou était situé hors d'un État membre de l'Union européenne ou partie à l'accord sur l'Espace économique européen ;
« 5° Elle comptait plus de dix associés ou salariés dès le premier mois suivant sa création ou plus de vingt dès le deuxième mois.
« En cas de retard injustifié dans l'accomplissement d'une formalité déclarative relevant du premier alinéa du présent article, d'omission de données devant y figurer, d'inexactitude des données déclarées ou d'absence de correction dans le cas prévu au deuxième alinéa de l'article L. 133-5-3-1 du présent code, il est appliqué une pénalité dans la limite de 15 % du plafond mensuel de sécurité sociale en vigueur, arrondi à l'euro supérieur, au titre de chaque salarié ou assimilé pour lequel est constaté le défaut de déclaration, l'omission ou l'inexactitude. »
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Cet amendement vise à sanctionner les employeurs coupables de fraude aux cotisations sociales par le recours à la création d'entreprises éphémères.
L'essentiel de la fraude sociale trouve son origine dans les pertes liées aux cotisations. Selon le Haut Conseil du financement de la protection sociale (HCFiPS), le réseau de l'Urssaf est la première victime de la fraude sociale, pour un montant de 6,91 milliards d'euros – retenons le chiffre de 7 milliards d'euros. Pour le Haut Conseil, cette estimation est un minorant, car elle ne prend pas en compte les redressements comptables d'assiette de 4,6 milliards d'euros, dont une partie « est nécessairement intentionnelle » – cette fraude atteindrait donc plutôt 12 milliards d'euros.
Le niveau de recouvrement est très en deçà des évaluations ou des détections, s'agissant notamment des cotisations : seulement 10 % des sommes redressées au titre de la lutte contre le travail dissimulé – des sommes qui ne sont pas frauduleuses – sont recouvrées. Le Haut Conseil préconise donc de prévenir la fraude au travail dissimulé.
Pour ce faire, il faut intensifier les contrôles, un objectif auquel répond partiellement le plan de recrutement prévu dans le contrat d'objectifs et de gestion (COG) 2023-2027, qui est consacré pour partie à la lutte contre le travail dissimulé et contre des formes plus récentes de fraude commise, notamment, par le recours à des entreprises éphémères.
À cette fin, nous proposons de reprendre un dispositif déjà adopté par le Sénat lors de l'examen de précédents PLFSS, qui vise à sanctionner les employeurs ne remplissant pas leurs obligations déclaratives dès lors qu'il existe des présomptions graves et concordantes de ce manquement, afin de limiter l'évitement de cotisations par la création et la disparition rapide de personnes morales.
Le présent amendement tend donc à prévoir une sanction dissuasive à hauteur de 15 % du plafond mensuel de sécurité sociale par salarié.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Il est vrai que le sujet des entreprises éphémères représente un enjeu qui n'est pas délaissé dans ce projet de loi ; celui-ci renforce en effet un certain nombre de dispositifs permettant de lutter contre cette pratique.
Néanmoins, la mesure proposée serait de nature à contraindre les entreprises à établir des déclarations supplémentaires. Il est toujours difficile d'établir une limite entre la suradministration et le contrôle…
Des pas importants ayant été faits à cet égard dans le présent texte, j'émets un avis défavorable, même si ce sujet n'est pas épuisé.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Nous visons évidemment le même l'objectif, cela ne fait pas débat. Pour autant, j'émettrai quelques réserves.
Tout d'abord, aucun des indices prévus ne constitue un critère fiable pour présumer de la fraude.
Ensuite, la notion de présomption de fraude nous paraît fragile, puisque, selon la jurisprudence, la fraude ne se présume pas et ne peut être démontrée qu'au regard des faits constatés aux cas d'espèce. Sur quel fondement pourrait être condamnée une entreprise récente, dont le siège est situé hors de l'Union européenne, comptant dix salariés au moment de sa création ? Ces critères ne semblent pas suffisants.
Par ailleurs, prévoir que l'employeur doit établir dans certains cas ces déclarations sociales selon un autre vecteur que la déclaration sociale nominative (DSN) paraît contraire à l'objectif d'unification et de simplification des déclarations sociales.
Pour toutes ces raisons, l'avis est défavorable.
Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. J'entends la démonstration qui vient d'être faite : il ne saurait y avoir de présomption de fraude et il faudrait juger seulement des cas d'espèce…
Je retiens des propos qui viennent d'être tenus que la présomption de fraude ne peut jamais constituer un motif de poursuite. Je vous inviterai à appliquer ce principe lors de l'examen des articles relatifs à la fraude imputable aux assurés sociaux, laquelle est de l'ordre d'un tiers des fraudes évaluées ! Il me semble en effet que, dans ce domaine, la présomption de fraude est souvent retenue.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Luc Fichet, pour explication de vote.
M. Jean-Luc Fichet. Il ne s'agit pas ici de suradministration : la seule chose que l'on demande aux entreprises, c'est de remplir les documents d'embauche et d'être en conformité avec la loi afin d'éviter toute fraude à l'emploi. Les enjeux sont importants !
Les auteurs de plusieurs amendements ont invoqué la nécessité de disposer d'un contrôle efficient. Or, en l'occurrence, les contrôleurs ne sont pas suffisamment nombreux. C'est là où le bât blesse ! L'objectif est tout de même, de récupérer les milliards d'euros de la fraude.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 198.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. L'amendement n° 109, présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
Après l'article 12
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le 5° de l'article L. 221-1 du code de la sécurité sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« ...° D'exercer un contrôle et un pouvoir de sanction concernant la déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles ; ».
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Je vais faire écho à l'intervention de mon collègue Fichet.
Aux termes de l'alinéa 13 de l'article 12 du présent projet de loi, est pénalisée toute manœuvre ayant pour objet ou pour effet de priver les victimes ou leurs ayants droit de leurs droits relatifs, au titre du livre IV du code de la sécurité sociale, aux accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP). Nous soutenons cette mesure.
Pour s'assurer que les victimes et leurs ayants droit ne soient pas lésés et lutter contre la sous-déclaration des AT-MP, il nous faut respecter les recommandations du rapport de 2024 adressé au Parlement et au Gouvernement par la commission instituée par l'article L. 176-2 du code de la sécurité sociale et intitulé Estimation du coût réel, pour la branche maladie, de la sous-déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles.
Cet amendement vise à transposer l'une des recommandations du rapport précité : renforcer l'arsenal de contrôle et de sanction à la main des CPAM, en permettant à la Caisse nationale de l'assurance maladie (Cnam) d'exercer un pouvoir de sanction concernant la déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Cet amendement tend à prévoir une mission supplémentaire de la Cnam, destinée à sanctionner les cas de non-déclaration d'AT-MP.
Cet amendement semble déjà satisfait dans la mesure où la non-déclaration d'AT-MP fait l'objet de sanctions financières, voire pénales, de la part des Carsat, sous l'impulsion de la commission AT-MP de la Cnam.
Avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 109.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements et d'un sous-amendement faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 250 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l'article 12
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L'article L. 243-10 du code de la sécurité sociale est rétabli dans la rédaction suivante :
« Art. L. 243-10. – I. – Dans le cas où un contrôle est effectué en application de l'article L. 243-7 pour rechercher des infractions aux interdictions mentionnées à l'article L. 8221-1 du code du travail, tout agent chargé du contrôle peut être autorisé par le directeur de l'organisme dont il relève à ne pas être identifié par la personne contrôlée, dans l'ensemble des opérations de contrôle et la procédure subséquente, par ses nom et prénom.
« L'autorisation est délivrée nominativement par le directeur de l'organisme dont relève l'agent concerné. Le contenu de cette autorisation et les modalités d'identification de l'agent chargé du contrôle sont définis par décret en Conseil d'État.
« II. – Les juridictions administratives et judiciaires ont accès aux nom et prénom de l'agent identifié par un numéro d'immatriculation administrative dans un acte de procédure.
« Saisie par une partie à la procédure d'une requête écrite et motivée tendant à la communication des nom et prénom d'une personne bénéficiaire d'une autorisation délivrée en application du I, la juridiction décide des suites à donner à cette requête en tenant compte, d'une part, de la menace que la révélation de l'identité de cette personne ferait peser sur sa vie ou son intégrité physique ou celles de ses proches et, d'autre part, de la nécessité de communiquer cette identité pour l'exercice des droits de la défense de l'auteur de la demande. Le procureur de la République se prononce dans les mêmes conditions lorsqu'il est fait application de l'article 77-2 du code de procédure pénale.
« En cas de demande d'annulation d'un acte de procédure fondée sur la violation des formes prescrites par la loi à peine de nullité ou sur l'inobservation des formalités substantielles dont l'appréciation nécessite la révélation des nom et prénom du bénéficiaire d'une autorisation délivrée en application d'un de ces deux articles, la juridiction saisie statue sans verser ces éléments au débat contradictoire ni indiquer les nom et prénom du bénéficiaire de cette autorisation dans sa décision.
« III. – La révélation des nom et prénom du bénéficiaire d'une autorisation délivrée en application du I ou de tout élément permettant son identification personnelle ou sa localisation est punie des peines prévues au IV de l'article 15-4 du code de procédure pénale. »
II. – L'article L. 724-7-1 du code rural et de la pêche maritime est ainsi rédigé :
« Art. L. 724-7-1. – Les articles L. 243-10 et L. 243-13 du code de la sécurité sociale sont applicables au régime agricole. ».
III. – Le chapitre III du titre Ier du livre Ier de la huitième partie du code du travail est complété par une section ainsi rédigée :
« Section...
« Modalités d'intervention sous numéro d'identification
« Art. L. 8113-12. – I. – Pour la recherche et la constatation des infractions visées aux articles L. 8211-1 du présent code et 225-4-1, 225-13 à 225-15-1 du code pénal, les agents de contrôle de l'inspection du travail mentionnés à l'article L. 8112-1 peuvent être autorisés à ne pas être identifiés par leurs nom et prénom, par la personne contrôlée, dans l'ensemble des opérations de contrôle et les procédures subséquentes.
« L'autorité administrative compétente pour délivrer l'autorisation nominative, son contenu, les conditions de sa délivrance et les modalités d'identification de l'agent chargé du contrôle sont définis par décret en Conseil d'État.
« II. – Les juridictions administratives et judiciaires ont accès aux nom et prénom de l'agent identifié par un numéro d'immatriculation administrative dans un acte de procédure.
« Saisie par une partie à la procédure d'une requête écrite et motivée tendant à la communication des nom et prénom d'une personne bénéficiaire d'une autorisation délivrée en application du I, la juridiction décide des suites à donner à cette requête en tenant compte, d'une part, de la menace que la révélation de l'identité de cette personne ferait peser sur sa vie ou son intégrité physique ou celles de ses proches et, d'autre part, de la nécessité de communiquer cette identité pour l'exercice des droits de la défense de l'auteur de la demande. Le procureur de la République se prononce dans les mêmes conditions lorsqu'il est fait application de l'article 77-2 du code de procédure pénale.
« En cas de demande d'annulation d'un acte de procédure fondée sur la violation des formes prescrites par la loi à peine de nullité ou sur l'inobservation des formalités substantielles dont l'appréciation nécessite la révélation des nom et prénom du bénéficiaire d'une autorisation délivrée en application du I, la juridiction saisie statue sans verser ces éléments au débat contradictoire ni indiquer les nom et prénom du bénéficiaire de cette autorisation dans sa décision.
« III. – La révélation des nom et prénom du bénéficiaire d'une autorisation délivrée en application du I ou de tout élément permettant son identification personnelle ou sa localisation est punie des peines prévues au IV de l'article 15-4 du code de procédure pénale. »
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Cet amendement vise à renforcer la protection des agents de contrôle de l'inspection du travail et des organismes de recouvrement des cotisations et contributions sociales dans leur mission de lutte contre le travail illégal.
Dans cette optique, nous proposons de permettre de manière dérogatoire et strictement encadrée l'utilisation de numéros d'immatriculation administrative en lieu et place des noms et prénoms des agents de contrôle. Une telle protection est déjà accordée à certains agents de l'administration fiscale et des douanes.
Cette proposition doit permettre de renforcer la sécurité des agents qui contrôlent le travail illégal et qui sont parfois confrontés à des groupes délinquants, voire criminels. Il s'agit d'un enjeu de sécurité pour les corps de contrôle, dont il est inadmissible que la vie privée ou familiale puisse être perturbée en raison de leur activité professionnelle et de leur engagement pour le service public. C'est à ce titre, également, une garantie de leur capacité à exercer efficacement leur mission.
Mme la présidente. Le sous-amendement n° 304, présenté par M. Henno et Mme Puissat, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Amendement n° 250, après l'alinéa 9
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« IV. – Par dérogation au I, les agents des organismes mentionnés aux articles L. 213-1 et L. 225-2 peuvent, dans les mêmes conditions prévues aux I à III du présent article, être autorisés à ne pas être identifiés par leurs nom et prénom dans le cadre de l'ensemble des contrôles effectués en application de l'article L. 243-7. »
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Cet amendement vise à élargir, pour les seuls agents de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss) et des Urssaf, le recours à l'anonymat pour l'ensemble de leurs enquêtes.
Mme la présidente. L'amendement n° 270 rectifié, présenté par MM. Iacovelli, Théophile et Buis, Mme Havet et M. Patriat, est ainsi libellé :
Après l'article 12
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L'article L. 243-10 du code de la sécurité sociale est rétabli dans la rédaction suivante :
« Art. L. 243-10. – I. – Dans le cas où un contrôle est effectué en application de l'article L. 243-7 pour rechercher des infractions aux interdictions mentionnées à l'article L. 8221-1 du code du travail, tout agent chargé du contrôle peut être autorisé par le directeur de l'organisme dont il relève à ne pas être identifié par la personne contrôlée, dans l'ensemble des opérations de contrôle et la procédure subséquente, par ses nom et prénom.
« L'autorisation est délivrée nominativement par le directeur de l'organisme dont relève l'agent concerné. Le contenu de cette autorisation et les modalités d'identification de l'agent chargé du contrôle sont définis par décret en Conseil d'État.
« II. – Les juridictions administratives et judiciaires ont accès aux nom et prénom de l'agent identifié par un numéro d'immatriculation administrative dans un acte de procédure.
« Saisie par une partie à la procédure d'une requête écrite et motivée tendant à la communication des nom et prénom d'une personne bénéficiaire d'une autorisation délivrée en application du I, la juridiction décide des suites à donner à cette requête en tenant compte, d'une part, de la menace que la révélation de l'identité de cette personne ferait peser sur sa vie ou son intégrité physique ou celles de ses proches et, d'autre part, de la nécessité de communiquer cette identité pour l'exercice des droits de la défense de l'auteur de la demande. Le procureur de la République se prononce dans les mêmes conditions lorsqu'il est fait application de l'article 77-2 du code de procédure pénale.
« En cas de demande d'annulation d'un acte de procédure fondée sur la violation des formes prescrites par la loi à peine de nullité ou sur l'inobservation des formalités substantielles dont l'appréciation nécessite la révélation des nom et prénom du bénéficiaire d'une autorisation délivrée en application d'un de ces deux articles, la juridiction saisie statue sans verser ces éléments au débat contradictoire ni indiquer les nom et prénom du bénéficiaire de cette autorisation dans sa décision.
« III. – La révélation des nom et prénom du bénéficiaire d'une autorisation délivrée en application du I ou de tout élément permettant son identification personnelle ou sa localisation est punie des peines prévues au IV de l'article 15-4 du code de procédure pénale. »
II. – L'article L. 724-7-1 du code rural et de la pêche maritime est ainsi rédigé :
« Art. L. 724-7-1. – Les articles L. 243-10 et L. 243-13 du code de la sécurité sociale sont applicables au régime agricole. ».
III. – Le chapitre III du titre Ier du livre Ier de la huitième partie du code du travail est complété par une section ainsi rédigée :
« Section...
« Modalités d'intervention sous numéro d'identification
« Art. L. 8113-12. – I. – Pour la recherche et la constatation des infractions visées aux articles L. 8211-1 du présent code et 224-4-1, 225-13 à 225-15-1 du code pénal, les agents de contrôle de l'inspection du travail mentionnés à l'article L. 8112-1 peuvent être autorisés à ne pas être identifiés par leurs nom et prénom, par la personne contrôlée, dans l'ensemble des opérations de contrôle et les procédures subséquentes.
« L'autorité administrative compétente pour délivrer l'autorisation nominative, son contenu, les conditions de sa délivrance et les modalités d'identification de l'agent chargé du contrôle sont définis par décret en Conseil d'État.
« II. – Les juridictions administratives et judiciaires ont accès aux nom et prénom de l'agent identifié par un numéro d'immatriculation administrative dans un acte de procédure.
« Saisie par une partie à la procédure d'une requête écrite et motivée tendant à la communication des nom et prénom d'une personne bénéficiaire d'une autorisation délivrée en application du I, la juridiction décide des suites à donner à cette requête en tenant compte, d'une part, de la menace que la révélation de l'identité de cette personne ferait peser sur sa vie ou son intégrité physique ou celles de ses proches et, d'autre part, de la nécessité de communiquer cette identité pour l'exercice des droits de la défense de l'auteur de la demande. Le procureur de la République se prononce dans les mêmes conditions lorsqu'il est fait application de l'article 77-2 du code de procédure pénale.
« En cas de demande d'annulation d'un acte de procédure fondée sur la violation des formes prescrites par la loi à peine de nullité ou sur l'inobservation des formalités substantielles dont l'appréciation nécessite la révélation des nom et prénom du bénéficiaire d'une autorisation délivrée en application du I, la juridiction saisie statue sans verser ces éléments au débat contradictoire ni indiquer les nom et prénom du bénéficiaire de cette autorisation dans sa décision.
« III. – La révélation des nom et prénom du bénéficiaire d'une autorisation délivrée en application du I ou de tout élément permettant son identification personnelle ou sa localisation est punie des peines prévues au IV de l'article 15-4 du code de procédure pénale. »
La parole est à M. Xavier Iacovelli.
M. Xavier Iacovelli. Cet amendement est défendu.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement sur le sous-amendement n° 304 ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Favorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 304.
(Le sous-amendement est adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 250 rectifié, modifié.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. En conséquence, l'amendement n° 270 rectifié n'a plus d'objet, et un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 12.
L'amendement n° 107, présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
Après l'article 12
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après la seconde occurrence du mot : « dues », la fin de la première phrase du deuxième alinéa de l'article L. 243-15 du code de la sécurité sociale est supprimée.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Le droit actuel permet à des employeurs coupables de fraude aux cotisations sociales de bénéficier, sans paiement du redressement des cotisations dues, d'une attestation de paiement des cotisations par le simple fait de contester la notification via un recours contentieux.
Nous proposons que le refus de délivrance des attestations soit automatique dès lors qu'il existe une dette afférente à une verbalisation du cotisant au titre de toute fraude, quand bien même un recours serait introduit. Cette attestation ne pourrait être remise qu'après le paiement des cotisations fraudées. Il s'agit de lutter contre le non-paiement des cotisations non seulement au titre du travail dissimulé, mais aussi à la suite des contrôles d'assiette. L'enjeu est à hauteur de 12 milliards d'euros !
Rappelons aussi que, selon le HCFiPS, quelle que soit la convention retenue, l'essentiel de la fraude sociale trouve son origine dans les pertes associées aux cotisations. La fraude aux cotisations représente 56 % de la fraude sociale, soit autant de pertes de recettes pour la sécurité sociale.
Cette attestation de paiement est nécessaire pour répondre à des appels d'offres, pour obtenir des subventions, etc. Il suffit à une personne coupable de fraude et verbalisée à ce titre de faire un recours pour pouvoir répondre malgré tout, durant un certain délai, à un appel d'offres, par exemple. C'est tout de même incroyable ! Il est donc nécessaire de prévoir que l'attestation de paiement des cotisations n'est délivrée qu'après acquittement des cotisations fraudées.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Cet amendement aurait pour conséquence d'interdire aux employeurs de contracter avec d'autres acteurs économiques dans le cas où ils auraient contesté le montant de leurs cotisations par voie de recours contentieux. Cela reviendrait à réduire le droit au recours de ces derniers, un droit auquel nous sommes particulièrement attachés.
Avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Madame la sénatrice, nous partageons votre volonté de lutter contre la fraude sociale ; c'est d'ailleurs tout le sens de ce projet de loi. Pour autant, nous avons aussi le souci de ne pas restreindre les droits de l'ensemble des cotisants à cause du comportement abusif d'une minorité.
La contestation d'un montant de cotisations dues dans le cadre d'un recours contentieux ne signale pas nécessairement une manœuvre dilatoire ou une intention frauduleuse.
Ne pas remettre d'attestation de vigilance à un cotisant qui conteste de bonne foi un contrôle comptable d'assiette, par exemple, serait de nature à lui nuire et à diminuer sa capacité à exercer son droit de recours. Il convient selon nous, en conséquence, de limiter l'absence de délivrance de cette attestation pendant la durée de la procédure de recours contentieux aux seuls cas de fraude les plus graves que sont les infractions constitutives de travail dissimulé. C'est ce que prévoit le droit en vigueur, qui constitue selon nous le bon équilibre.
Avis défavorable.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Luc Fichet, pour explication de vote.
M. Jean-Luc Fichet. Il s'agit tout de même de situations quelque peu particulières, et aussi d'une question de loyauté vis-à-vis du maître d'ouvrage : une attestation pourrait ainsi être délivrée à une entreprise se trouvant dans une situation difficile, voire de fragilité.
Cet amendement a l'avantage de clarifier les relations entre le maître d'ouvrage et les entreprises signataires des marchés.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 107.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. L'amendement n° 153 rectifié quater, présenté par MM. Rochette et Malhuret, Mme Bourcier, MM. Brault, Capus et Chasseing, Mme L. Darcos, MM. Grand et Laménie, Mme Lermytte, MM. V. Louault, A. Marc, Médevielle et Wattebled, Mmes Aeschlimann et Bellamy, M. J.B. Blanc, Mme de Cidrac, MM. Chatillon, Courtial et Delia, Mmes Gosselin, N. Goulet et Herzog, M. Houpert, Mme Josende, MM. Khalifé, Meignen et Menonville, Mme Perrot, M. Ravier et Mme Romagny, est ainsi libellé :
Après l'article 12
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le 2° de l'article L. 323-6 du code de la sécurité sociale est complété par les mots : « au minimum une fois tous les trois mois s'il y a lieu ».
La parole est à M. Pierre Jean Rochette.
M. Pierre Jean Rochette. Madame la présidente, si vous le permettez, je présenterai en même temps les amendements nos 153 rectifié quater et 152 rectifié quater.
Mme la présidente. J'appelle donc en discussion l'amendement n° 152 rectifié quater, présenté par MM. Rochette et Malhuret, Mme Bourcier, MM. Brault, Capus et Chasseing, Mme L. Darcos, MM. Grand et Laménie, Mme Lermytte, MM. V. Louault, A. Marc, Médevielle et Wattebled, Mme Aeschlimann, M. J.B. Blanc, Mme de Cidrac, MM. Chatillon, Courtial et Delia, Mmes Gosselin, N. Goulet et Herzog, M. Houpert, Mme Josende, MM. Khalifé, Meignen et Menonville, Mme Perrot et M. Ravier, et ainsi libellé :
Après l'article 12
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le 2° de l'article L. 324-1 du code de la sécurité sociale est complété par les mots : « au minimum une fois tous les six mois s'il y a lieu ».
Veuillez poursuivre, mon cher collègue.
M. Pierre Jean Rochette. Il s'agit d'instaurer un contrôle régulier des personnes qui sont placées en mi-temps thérapeutique ou arrêtées en raison d'une affection de longue durée (ALD) : tous les trois mois dans le premier cas ; tous les six mois dans le second.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Nous sommes défavorables aux deux amendements, l'amendement n° 152 rectifié quater étant un amendement de repli par rapport à l'autre.
Nous partageons l'objectif de mettre en œuvre un contrôle plus efficace des arrêts de travail pour ALD et des mi-temps thérapeutiques : les contrôles auraient lieu tous les six mois dans le premier cas, tous les trois mois dans le second.
Cela étant, nous préférons le ciblage qui, du reste, est un principe validé par les caisses qui effectuent les contrôles.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Jean Rochette, pour explication de vote.
M. Pierre Jean Rochette. J'entends l'argument qui est avancé, mais je regrette la position de la commission et du Gouvernement. Mener des contrôles réguliers permettrait d'instaurer une forme de contrôle social, sans avoir à prévoir un ciblage, et de mettre en garde contre certains abus.
Il faut comprendre que les abus ne sont pas toujours le fait des employeurs – je le dis, car le sujet suscite parfois des prises de position très partisanes. Nos entreprises, dans leur organisation et leur vie quotidienne, peuvent être gênées par les nombreux arrêts maladie abusifs, ainsi que par des mi-temps thérapeutiques qui perdurent et qui ne sont pas toujours justifiés.
Au travers de mes amendements, je cherche à poser le débat et à inciter à un retour au travail.
À la différence de beaucoup de mes collègues ici, j'émets tous les mois près de 200 fiches de paie. Parmi les 200 salariés que je gère, j'estime que certains sont maintenus dans des situations qui, selon moi, ne leur sont pas favorables. Je pense au mi-temps thérapeutique pour ceux qui souffrent de dépression, alors qu'il serait préférable, pour certains d'entre eux, qu'ils reviennent travailler.
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Stéphanie Rist, ministre. Monsieur le sénateur, dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), qui sera prochainement examiné par votre assemblée, figure un article relatif à la limitation de la durée de la prescription, qui va dans le sens de l'objectif que vous visez.
M. Pierre Jean Rochette. Ça, c'est bien !
Mme Stéphanie Rist, ministre. En l'espèce, vous rendez le dispositif systématique, c'est-à-dire applicable à tous, ce qui le rend impraticable.
M. Pierre Jean Rochette. Pas impraticable !
Mme Stéphanie Rist, ministre. Nous aurons ce débat lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale.
M. Pierre Jean Rochette. Pour gagner du temps, je retire mes deux amendements, madame la présidente !
Mme la présidente. Les amendements nos 153 rectifié quater et 152 rectifié quater sont retirés.
L'amendement n° 249, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l'article 12
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 6353-10 du code du travail est ainsi modifié :
1° Au second alinéa, les mots : « et dans des conditions définies par décret en Conseil d'État » sont supprimés ;
2° Sont ajoutés trois alinéas ainsi rédigés :
« Dans le cadre de leurs missions respectives et utiles à leur exercice, les personnes morales mentionnées à l'article L. 6362-1-1 partagent leurs données relatives au recueil et au traitement de la fraude dans la gestion et les contrôles des actions de formation.
« Les partages de données mentionnés aux deuxième et troisième alinéas du présent article sont mis en œuvre au sein du système d'information du compte personnel de formation mentionné au II de l'article L. 6323-8.
« Les conditions de mise en œuvre du présent article sont définies par décret en Conseil d'État. »
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. La loi du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels a instauré le principe du partage d'informations entre les financeurs de la formation professionnelle, principe qui vise à améliorer la connaissance des parcours des bénéficiaires, les compétences acquises, et à mieux adapter les formations à leurs besoins.
La plateforme Agora, qui recense les formations du compte personnel de formation (CPF), est l'outil central de ce partage d'informations. Ce dispositif permet de centraliser les données relatives aux parcours de formation et de faciliter leur exploitation par les différents acteurs de la formation professionnelle.
L'amendement tend à ajouter une finalité supplémentaire à Agora, conformément à une recommandation d'un rapport de l'inspection générale des affaires sociales (Igas) de 2023 relatif à la qualité de la formation. Il s'agirait d'intégrer un mécanisme de partage d'alertes entre autorités de contrôle, qui permettrait de signaler des fraudes détectées lors des contrôles ou par récurrence des signalements. Ce dispositif renforcerait la coordination entre les acteurs et la lutte contre les fraudes.
Le partage d'informations ne se limite pas aux formations financées par le CPF : elle s'étend à toutes celles qui sont financées par des fonds publics. Il permettrait d'identifier plus efficacement les organismes frauduleux, qui agiraient au détriment de financeurs tels que les collectivités territoriales, France Travail ou la Caisse des dépôts et consignations.
L'objectif est de sécuriser les financements publics et de renforcer la transparence du système.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Il nous semble intéressant que la plateforme Agora puisse aussi être dévolue à la lutte contre la fraude. Avis favorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 249.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 12.
L'amendement n° 108, présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
Après l'article 12
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai d'un an à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport évaluant les procédures déclaratives des accidents du travail et maladies professionnelles définis au Livre IV du code de la sécurité sociale.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Nous soutenons la mesure prévue à l'alinéa 14 de l'article 12, qui dispose qu'est pénalisée « toute manœuvre ayant pour objet ou pour effet de priver les victimes ou leurs ayants droit de leurs droits au titre du livre IV » du code de la sécurité sociale relatif aux accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP).
Pour nous assurer que les victimes et leurs ayants droit ne soient pas privés de leurs droits et lutter contre la sous-déclaration des AT-MP – ce qui s'apparente, selon nous, à une forme de fraude –, il convient de suivre les recommandations de la commission instituée par l'article L. 176-2 du code de la sécurité sociale, laquelle produit tous les trois ans environ un rapport intitulé Estimation du coût réel, pour la branche maladie, de la sous-déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles.
Cet amendement d'appel – puisqu'il s'agit d'une demande de rapport – vise à transposer l'une des dix recommandations figurant dans le dernier rapport de cette commission, à savoir le lancement de travaux sur les procédures déclaratives des accidents du travail et maladies professionnelles, en facilitant notamment la rédaction des certificats médicaux, et ce afin de réduire le nombre de dossiers incomplets.
La commission instituée par l'article L. 176-2 du code de la sécurité sociale se réunit tous les trois ans. Nous souhaiterions, conformément à une autre de ses recommandations, qu'elle se réunisse plutôt chaque année, ce qui permettrait de mieux faire respecter des préconisations qui sont rarement suivies d'effets… Nous constatons effectivement, en matière de lutte contre la sous-déclaration des AT-MP, un manque de volonté manifeste.
Si nous voulons vraiment lutter contre cette forme de fraude, il importe, je le redis, de suivre les recommandations de cette commission.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Il s'agit d'une demande de rapport sur l'évaluation des procédures déclaratives des AT-MP.
J'ai bien en tête les discussions que nous avons eues hier sur les demandes de rapports, mais je m'en tiendrai cet après-midi à la position constante du Sénat en la matière : avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Madame la sénatrice, nous partageons bien sûr votre préoccupation en ce qui concerne les déclarations des AT-MP. Notre avons la ferme volonté de faire avancer les choses.
Plusieurs dispositifs visent d'ores et déjà cet objectif, et des travaux sont engagés afin de simplifier les démarches. L'article 12 du présent projet de loi comporte des dispositions qui illustrent concrètement cette volonté du Gouvernement de lutter de manière déterminée contre le phénomène de sous-déclaration.
La branche AT-MP s'est par ailleurs engagée, dans la convention d'objectifs et de gestion 2023-2028, à simplifier les processus déclaratifs et à développer des actions d'accompagnement des assurés, en particulier les plus fragiles. Les services de l'assurance maladie effectuent ainsi un suivi régulier des procédures déclaratives présentées à la commission des accidents du travail et des maladies professionnelles.
Enfin, comme vous l'avez souligné à juste titre, la commission chargée de l'évaluation de la sous-déclaration des AT-MP a recommandé de lancer des travaux sur les procédures déclaratives, en lien avec la rédaction des certificats médicaux, afin de réduire le nombre de dossiers manquants. Lesdits travaux sont bien en cours.
Pour toutes ces raisons, la remise d'un rapport du Gouvernement au Parlement ne me paraît pas justifiée : avis défavorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 108.
(L'amendement n'est pas adopté.)
TITRE II
ADAPTER LES LEVIERS DE LUTTE AUX NOUVELLES FORMES DE FRAUDES ET RENFORCER LES SANCTIONS
Chapitre Ier
Tarir les sources de revenus occultes ou illicites et mieux sanctionner leurs bénéficiaires
Article 13
Le code du travail est ainsi modifié :
1°Après l'article L. 5421-4, il est inséré un article L. 5421-5 ainsi rédigé :
« Art. L. 5421-5. – Lorsqu'elles sont soumises à une condition de résidence en France, les allocations mentionnées à l'article L. 5421-2 sont exclusivement versées sur des comptes domiciliés en France ou dans l'espace unique de paiement en euros de l'Union européenne et identifiés par un numéro national ou international de compte bancaire. » ;
2° L'article L. 6113-8 est ainsi rédigé :
« Art. L. 6113-8. – Les ministères et organismes certificateurs communiquent au système d'information du compte personnel de formation mentionné au II de l'article L. 6323-8 les informations, dont le numéro d'inscription au répertoire national d'identification des personnes physiques, relatives :
« 1° Aux personnes inscrites à une session d'examen en vue de l'obtention d'une certification professionnelle enregistrée dans le répertoire national des certifications professionnelles mentionné à l'article L. 6113-5, d'une attestation de validation d'un ou de plusieurs blocs de compétences constitutifs d'une certification professionnelle ou d'un certificat de spécialisation d'une certification professionnelle ;
« 2° Aux personnes inscrites à une session d'examen en vue de l'obtention d'une certification ou d'une habilitation enregistrée dans le répertoire spécifique mentionné à l'article L. 6113-6 ;
« 3° Aux personnes présentes aux sessions d'examen mentionnées aux 1° et 2° du présent article ;
« 4° (nouveau) Aux personnes titulaires des certifications, des attestations et des habilitations mentionnées aux mêmes 1° et 2°.
« Un décret en Conseil d'État définit les modalités de mise en œuvre du présent article, ainsi que les conditions dans lesquelles France compétences vérifie les conditions d'honorabilité professionnelle des organismes certificateurs et s'assure qu'ils ne poursuivent pas d'autres buts que ceux liés à la certification professionnelle. » ;
3° Le I de l'article L. 6323-6 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Toutefois, lorsque, sans motif légitime apprécié selon des modalités déterminées par décret, le titulaire du compte personnel de formation ne se présente pas aux évaluations et épreuves d'examen prévues par le ministère ou l'organisme certificateur, le titulaire ne peut mobiliser les droits inscrits sur son compte pour s'acquitter du règlement de l'organisme de formation. La Caisse des dépôts et consignations demande au titulaire le remboursement des sommes déjà mobilisées, le cas échéant selon les modalités prévues aux articles L. 6323-45 et L. 6323-45-1. »
Mme la présidente. L'amendement n° 121, présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. L'article 13 rend obligatoire le versement des indemnités des travailleurs privés d'emploi sur des comptes bancaires domiciliés en France ou dans l'espace unique de paiement en euros (Sepa) de l'Union européenne et identifiés par un numéro national ou international de compte bancaire.
Selon la Défenseure des droits, cette disposition « constitue une dérogation au principe de prohibition des discriminations sur le fondement de la domiciliation bancaire en matière de protection sociale, de santé et d'avantages sociaux ».
Si la lutte contre la fraude sociale constitue un objectif plus que légitime, le refus de versement d'une prestation sociale sur un compte bancaire, en raison de sa domiciliation hors zone Sepa, n'apparaît ni nécessaire ni approprié pour atteindre cet objectif.
D'une part, en admettant, comme le suggère l'étude d'impact, que la domiciliation bancaire à l'étranger puisse être regardée comme l'indice d'une résidence hors de France, l'organisme servant la prestation a toujours la possibilité de contrôler le respect de la condition de résidence en France par d'autres moyens.
D'autre part, l'idée d'un risque accru de fraude, qui est, là encore, suggérée, en cas de versement des prestations sur un compte bancaire étranger ne paraît pas justifiée. Les garanties de sécurité dont est assorti le numéro Iban (International Bank Account Number) affecté à chaque compte en banque, et qui est requis pour effectuer un paiement transfrontalier, sont identiques, que la banque soit domiciliée en dehors ou dans la zone Sepa.
Afin d'éviter que le projet de loi ne constitue, je le redis, « une dérogation au principe de prohibition des discriminations sur le fondement de la domiciliation bancaire en matière de protection sociale, de santé et d'avantages sociaux », la Défenseure des droits recommande de supprimer cette disposition. Tel est l'objet du présent amendement.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Nous sommes favorables à l'article 13, dont le dispositif vient d'être brièvement rappelé par notre collègue, et qui, je le rappelle, vise deux objectifs : d'une part, prévoir le versement des allocations chômage sur des comptes domiciliés en France ou dans l'Union européenne – nous répondons là à une demande de France Travail – ; d'autre part, responsabiliser davantage les titulaires de CPF.
Aussi, nous sommes défavorables à cet amendement de suppression.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Selon le Gouvernement, l'obligation, introduite à l'article 13, d'avoir un compte bancaire domicilié en France ou dans l'espace unique de l'Union européenne ne présente pas de caractère discriminatoire.
En effet, la mesure repose bien sur une différence objective de situation en lien avec l'objet du texte, qui est la lutte contre la fraude. La possession d'un compte bancaire domicilié à l'étranger constitue un indice de résidence ou d'exercice d'activités à l'étranger potentiellement non déclarées à France Travail. Cette situation peut aussi compromettre la capacité de l'opérateur à recouvrer, le cas échéant, des indus.
En tout état de cause, cette différence de traitement n'apparaît pas disproportionnée. Avec cette disposition, nous nous bornons à imposer aux intéressés l'ouverture d'un compte domicilié au sein de l'espace unique de paiement en euros pour le seul versement de l'allocation ; elle ne leur interdit en rien de détenir un second compte bancaire domicilié en dehors de cet espace.
Je rappelle que cette mesure ne fait que transposer aux allocations versées par France Travail des dispositions déjà en vigueur dans le champ de la sécurité sociale.
Pour toutes ces raisons, je suis défavorable à cet amendement.
Mme la présidente. L'amendement n° 241 rectifié, présenté par Mmes Silvani, Apourceau-Poly et Brulin, MM. Barros, Savoldelli et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky, est ainsi libellé :
Alinéas 2 et 3
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Silvana Silvani.
Mme Silvana Silvani. L'article 13 est une véritable mesure de stigmatisation. Sous couvert de lutte contre la fraude, il conditionne le versement de l'indemnité chômage à la domiciliation du compte bancaire en France ou dans l'espace européen. En apparence technique, cette disposition est en réalité profondément discriminatoire et, surtout, inutile.
Inutile, car aucune étude ne démontre que la domiciliation bancaire hors de France est un vecteur significatif de fraude. Ainsi, nous aurions, d'un côté, une forme d'assignation à résidence pour les chômeurs et, de l'autre, une liberté de délocalisation du patrimoine et des actifs pour les plus riches. (Mme Pascale Gruny proteste.)
La Cour des comptes n'en fait même pas mention parmi les mécanismes de fraude sociale. Mais il est vrai qu'ici même, hier soir, certains ont réussi à trouver des fraudes qui n'existaient pas… Selon l'Unédic, plus de 99,7 % des allocataires perçoivent déjà leurs indemnités sur un compte en France ou dans l'Union européenne. On crée donc un dispositif pour régler un problème qui n'existe pas !
Discriminatoire, ensuite, car cette mesure pénalise d'abord les travailleurs transfrontaliers, les saisonniers, les intérimaires et les précaires installés dans les zones frontalières. Ce sont des situations que nous connaissons bien en Meurthe-et-Moselle.
Enfin, cette mesure crée une charge administrative inutile pour France Travail et les banques, qui devront vérifier les domiciliations bancaires sans effet tangible sur la fraude.
En vérité, cet article ne vise pas la justice : il se veut un symbole, au détriment des droits. Il transforme la lutte contre la fraude en un outil de suspicion à l'égard des chômeurs, comme si le chômage était un délit et non une épreuve sociale. Le bénéfice de l'assurance chômage est un droit, et non une faveur conditionnée à la géolocalisation bancaire.
C'est pourquoi nous demandons la suppression des alinéas 2 et 3 de l'article.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Cet amendement constitue, en quelque sorte, un amendement de repli par rapport au précédent, même si ces deux amendements n'ont pas les mêmes auteurs.
Permettez-moi de revenir un instant sur ce que vous évoquez, ma chère collègue : il ne faut pas oublier que, à l'heure actuelle, tous les demandeurs d'emploi qui perçoivent une allocation chômage, que ce soit l'allocation d'aide au retour à l'emploi (ARE), l'allocation de solidarité spécifique (ASS) ou l'allocation pour les travailleurs indépendants (ATI), doivent être domiciliés en France.
Mme Silvana Silvani. Ce n'est pas la même chose !
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Cette mesure a été mise en place non pas par le Gouvernement ou le Parlement, via une loi ou un amendement, mais par les partenaires sociaux, par l'Unédic.
Mme Silvana Silvani. C'est un abus de langage !
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Le dispositif que vous contestez aujourd'hui est l'un de ceux qui permettront de vérifier si les demandeurs d'emploi résident ou non en France. Il y en a d'autres : je pense notamment à la disposition que nous avons introduite à l'article 28.
La commission est défavorable à cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Bien sûr qu'il faut être domicilié en France, mais ce n'est pas le sujet !
Monsieur le ministre, vous dites que posséder un tel compte serait un indice de fraude. Sur quelles études, sur quels constats vous appuyez-vous ? De quelles évaluations dispose-t-on ? Je l'ai dit, France Travail peut, par d'autres moyens, vérifier la domiciliation bancaire. Être domicilié en France est une réalité physique ; avoir un compte bancaire à l'étranger en est une autre.
Vous dites qu'il s'agit d'un indice, mais, pour être probant, celui-ci doit être fondé sur des travaux. France Travail pourrait vous avoir indiqué par exemple que 90 % des contrôles effectués – lesquels, j'y insiste, peuvent être menés par d'autres moyens que celui que vous proposez – démontrent un lien entre domiciliation à l'étranger et fraude. Dans ce cas, on pourrait parler d'indice probant, fondé de façon pragmatique sur des faits réels.
Nous ne mettons pas en cause le fait que le versement de ces prestations doit reposer sur une domiciliation. En revanche, parler d'indice relève du pur fantasme. Un compte à l'étranger constitue, en quelque sorte, un signal qui sert à alimenter votre discours sur la fraude sociale.
Savez-vous que la fraude à France Travail représente 0,101 milliard d'euros ? C'est peanuts, cela ne représente pratiquement rien en matière de fraude sociale ! Et on dit que cette fraude serait majoritairement le fait de personnes qui ne sont pas domiciliées en France. On se moque du monde, c'est plus qu'epsilon, c'est epsilon d'epsilon !
Vous voulez envoyer un message, un signal idéologique. Faites-le, mais ne dites pas que cette mesure participe à la lutte contre la fraude, ou alors donnez-nous les chiffres résultant des évaluations qui auraient été réalisées !
Mme la présidente. La parole est à Mme Silvana Silvani, pour explication de vote.
Mme Silvana Silvani. Mon intervention ira dans le même sens que celle de ma collègue.
Je voudrais corriger un abus de langage, madame la rapporteure. Nous parlions non pas de la domiciliation, mais du compte bancaire : ce sont deux choses différentes. On peut avoir un compte bancaire ailleurs que là où l'on est domicilié ; il y a beaucoup d'exemples de tels cas de figure. Il ne s'agit pas de mettre en doute le fait que les allocataires doivent être domiciliés en France.
Par ailleurs, vous évoquez des preuves, des faits avérés. Or, dès l'entame de nos travaux, hier, tout le monde a convenu que nous disposions de très peu de données tangibles en matière d'évaluation des fraudes – d'ailleurs, je note que tous les amendements visant à demander des rapports pour obtenir ces informations ont été rejetés. Nous débattions alors de la question des fraudes fiscales, mais il en va de même en matière de fraude sociale.
Mme la présidente. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.
M. Pascal Savoldelli. Je partage l'analyse de mes deux collègues. Il peut arriver que l'on se prenne les pieds dans le tapis, mais il ne faut pas confondre domiciliation bancaire et domiciliation résidentielle.
Mme Silvana Silvani. Tout à fait !
M. Pascal Savoldelli. En matière de blanchiment, Nathalie Goulet ne me démentira pas : vous pouvez avoir un compte domicilié en France dans une banque qui a 143 filiales à l'étranger, y compris dans des paradis fiscaux – l'argent est mobile, il n'a pas de frontières !
Monsieur le ministre, vous considérez la domiciliation bancaire comme un élément de suspicion, et ce sans étude d'impact. Je vous le dis, cela ne résoudra pas le problème, parce qu'il n'y en a pas !
Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Mes chers collègues, je vais tenter de ramener les choses à leur juste proportion.
J'ai rédigé avec Carole Grandjean, à l'époque députée, un rapport sur la fraude aux prestations sociales et sur le non-recours aux droits – deux sujets liés – pour Édouard Philippe.
À l'issue de nos travaux, et à la demande d'un certain nombre d'organismes que nous avions entendus, nous avons estimé souhaitable que l'ensemble des prestations sociales soient versées sur des comptes en France ou dans l'espace européen. En effet, dans le cadre de ce travail confié par le Premier ministre de l'époque, nous avions constaté énormément de flux financiers vers des pays qui n'étaient pas le lieu de résidence des chômeurs, des malades ou des allocataires.
Comme la condition de résidence, ainsi que j'ai essayé de vous l'exposer lors de la discussion générale, n'est pas toujours bien contrôlée, les services nous ont demandé de bien vouloir faire voter ce dispositif, qui fut finalement adopté après plusieurs années – environ cinq ans –, sur la demande de Gabriel Attal.
Il se trouve que les allocations chômage ont simplement été oubliées dans le dispositif en question. Le présent projet de loi vise donc à rattraper cet oubli de sorte que l'ensemble des prestations soient soumises aux mêmes critères de contrôle. Il s'agit non pas d'une mesure complémentaire, mais d'une mesure qui aurait dû être prise au moment où nous avons décidé de vérifier la domiciliation des comptes bancaires des bénéficiaires de l'ensemble des prestations liées à la résidence en France.
Il n'y a donc pas de stigmatisation ; il s'agit d'un rattrapage, d'un rééquilibrage, pour que l'ensemble de ces prestations relèvent d'un même dispositif.
Je vous rappelle qu'à l'époque des attentats – dont c'est d'ailleurs aujourd'hui le triste dixième anniversaire –, lorsque certains djihadistes partaient en Syrie et en Irak, François Rebsamen avait dû mettre le holà au versement de prestations vers des pays bien plus lointains.
Mme la présidente. La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Notre collègue Nathalie Goulet a raison : nous complétons un dispositif qui existe déjà.
Par ailleurs, nous savons qu'il est techniquement bien plus simple de procéder à un recouvrement forcé auprès d'un organisme bancaire domicilié en France qu'auprès d'une banque à l'étranger.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, soyons clairs : il n'y a là aucune discrimination. Nous sommes tous des républicains. Au ministère du travail, notre seul objectif est d'encourager les Françaises et les Français à retrouver du travail en France, au service des entreprises françaises. Voilà ce qui est au fondement de notre action.
Il n'est donc pas anormal de réfléchir au meilleur moyen de mettre un terme aux fraudes potentielles. Il faut appeler un chat un chat, et ce d'autant que ces fraudes sont quantifiées – je ne connais pas le détail des sommes en jeu, mais nous pourrons vous le fournir. France Travail, qui est un praticien en la matière, évalue ces fraudes à 56 millions d'euros. Peut-on se désintéresser d'un tel montant ? Non ! Nous devons être attentifs dès le premier euro. Les petits ruisseaux font les grandes rivières : cela vaut la peine que nous nous intéressions à ces 56 millions d'euros.
Mme Anne-Sophie Romagny. Oui !
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Madame la sénatrice Goulet, j'ai écouté avec intérêt votre intervention, car vous avez beaucoup travaillé sur ces sujets. Sachez que je suis prêt à étudier avec vous, ainsi qu'avec tous les sénateurs et sénatrices qui voudraient nous accompagner dans cette démarche, l'ensemble des moyens de renforcer nos organisations et nos processus, pour être plus efficaces dans la lutte contre la fraude.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 241 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. L'amendement n° 311, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Après la référence :
L. 63233-8
insérer les mots :
les informations relatives aux titulaires du passeport de prévention mentionné à l'article L. 4141-5 ainsi que
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Il s'agit d'un amendement de coordination avec l'amendement n° 247 rectifié, lequel a été adopté à l'article 16 du présent projet de loi.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Avis favorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 311.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. L'amendement n° 76 rectifié bis, présenté par Mme Romagny, MM. Cambier et Grand, Mme Muller-Bronn, M. J.B. Blanc, Mme Billon, MM. Mizzon, Lévrier, Menonville, Khalifé, Folliot, Kern et Pillefer, Mme Antoine, M. Fargeot, Mmes Perrot et Aeschlimann, M. Levi, Mmes Saint-Pé et Demas, MM. Chatillon et Houpert, Mmes Patru, P. Martin, Gacquerre et Jacquemet, M. Canévet, Mme Josende, M. Hingray, Mme Devésa et MM. Courtial, Parigi, Chasseing et Meignen, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 9
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
« Les informations mentionnées aux 1° à 4° du présent article sont mises à disposition, par la Caisse des dépôts et consignations, des organismes de formation ayant conclu un contrat d'action de formation avec le stagiaire concerné, aux seules fins de prévention et de détection des fraudes aux inscriptions et à la présentation aux épreuves de certification.
« Cette mise à disposition s'effectue dans le respect du principe de minimisation des données et des garanties de sécurité prévues par décret en Conseil d'État.
La parole est à Mme Anne-Sophie Romagny.
Mme Anne-Sophie Romagny. Cet amendement vise à renforcer la prévention et la détection des fraudes liées aux certifications financées par le CPF.
Actuellement, les organismes de formation ne reçoivent pas certaines informations essentielles sur les inscriptions et les certifications. Avec cet amendement, nous prévoyons donc que la Caisse des dépôts et consignations puisse leur transmettre ces données uniquement à des fins de contrôle et de lutte contre la fraude.
Je précise que le dispositif que nous proposons tend non pas à créer un nouvel usage des données, mais à améliorer la traçabilité et la sécurisation du CPF.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Dans sa version actuelle, le projet de loi prévoit que les informations relatives à l'inscription, à la présence et à l'obtention des certificats sont transmises par les certificateurs au système d'information du CPF sans que les organismes de formation en soient informés.
Cet amendement vise à corriger cette situation de fait : avis favorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Je comprends l'intention des auteurs de l'amendement.
Pour l'heure, seule la Caisse des dépôts et consignations est en mesure de contrôler et de sanctionner l'obligation de présentation à l'examen introduite par l'article 13 du projet de loi. Je rappelle que les organismes de formation peuvent par ailleurs collecter directement cette information auprès de leurs stagiaires ou de leurs anciens stagiaires.
Cela étant, compte tenu de la position de la commission, le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 110, présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, et ainsi libellé :
Alinéas 11 et 12
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Par cet amendement, nous nous opposons aux dispositions prévoyant que, lorsque le titulaire d'un compte personnel de formation ne se présente pas, sans motif légitime – ce critère reste à préciser par décret –, aux évaluations et épreuves d'examen prévues par le ministère ou l'organisme certificateur, l'action de formation n'est plus prise en charge financièrement et doit donc être remboursée.
Cette disposition risque de restreindre le droit à la formation, car elle peut dissuader des personnes qui craignent de passer un examen, notamment si elles ont vécu des situations d'échec scolaire, d'engager un parcours de formation. Il est souvent question de cas de figure comme celui-ci : je pourrai moi-même citer de nombreux exemples.
De plus, elle pénalisera financièrement les personnes qui ont suivi la formation, qui ont satisfait à leurs obligations de présence, et qui ont pour cela eu recours aux droits à la formation ouverts par leur travail. Je le rappelle, ces droits se traduisaient auparavant par des heures de formation, puis ils ont été monétisés, ce qui, à mon avis, est incontesté. Il reste que c'est l'activité, le travail, qui crée le droit à la formation.
Tous les titulaires de CPF ne sont pas égaux dans leur rapport aux examens et aux évaluations. Selon l'Observatoire sur la réussite en enseignement supérieur, qui cite les travaux de l'université de Sherbrooke, l'anxiété de performance, souvent associée aux situations d'évaluation, peut impliquer des comportements d'évitement et de compulsion. Cela a de nombreuses conséquences, y compris l'évitement de la situation d'évaluation par peur de l'échec.
Par ailleurs, le rapport à l'évaluation reste socialement marqué. La mesure prévue aux alinéas 11 et 12 du présent article, qui relève d'une violence symbolique – car elle est liée au rapport à l'école et à l'enseignement –, découragera la reprise de parcours de formation chez des publics déjà éloignés de celle-ci, renforçant ainsi les inégalités sociales et économiques. Ces dernières expliquent, pour partie, que la formation professionnelle soit inégalement répartie entre les catégories socioprofessionnelles et qu'elle bénéficie surtout aux plus qualifiés.
Le salarié qui a suivi une formation et qui ne se présente pas à l'examen ne peut donc être appelé à rembourser la formation et l'ensemble des frais afférents.
Mme la présidente. L'amendement n° 111, présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
Alinéa 12
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Lorsque, sans motif légitime, le titulaire du compte ne se présente pas aux évaluations et épreuves d'examen prévues par le ministère ou l'organisme certificateur, une pénalité, fixée par décret, est décomptabilisée du compte personnel de formation. »
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Il s'agit d'un amendement de repli, par lequel nous envisageons une autre solution : décompter du CPF à venir une pénalité qui serait fixée par décret, afin de ne pas pénaliser financièrement les titulaires de CPF.
Comme je l'ai indiqué précédemment, toute autre disposition, telle que le recouvrement financier direct, affaiblira le recours au droit à la formation, car elle pourrait dissuader les personnes qui craignent de passer des examens d'engager un parcours de formation.
De plus, une telle mesure pénalisera financièrement les personnes qui auront suivi des formations, respecté l'obligation de présence à laquelle elles sont soumises, et, pour cela, recouru aux droits ouverts par leur travail et anciennement libellés en heures de formation.
Tous les titulaires de CPF ne sont pas égaux face aux évaluations. Les causes de ce phénomène ne sont pas seulement individuelles : les valeurs de performance et d'hyper-productivité véhiculées par notre société, par exemple, y participent. Par ailleurs, l'Observatoire des inégalités estime que les situations d'évaluation, loin d'être neutres, ont tendance à accroître les écarts liés à l'origine sociale et au genre.
Mais, pour vous, qu'importe ! L'évaluation fait partie des normes dominantes qui favorisent les personnes disposant d'un haut capital scolaire.
La mesure que vous prévoyez à l'article 13, et que nous dénonçons au travers de cet amendement, défavorisera ceux pour qui l'évaluation est un facteur d'anxiété, notamment en raison de leur appartenance sociale, de leur trajectoire scolaire, potentiellement heurtée, et de leur capital culturel. Pour nous, il s'agit d'une forme de violence symbolique telle que l'ont définie Pierre Bourdieu et Jean-Claude Passeron, soit « tout pouvoir…
Mme la présidente. Il faut conclure, ma chère collègue.
Mme Raymonde Poncet Monge. … qui parvient à imposer des significations et à les imposer comme légitimes ».
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Pour la commission, la mesure qui prévoit qu'un décret devra préciser les motifs légitimes pouvant justifier une absence du stagiaire à l'examen et que le titulaire du CPF reste tenu, dans tous les cas, de payer l'organisme de formation est de bon sens.
D'abord, le dispositif vise à ce que des personnes qui s'engagent dans une formation certifiante se présentent à leur examen : il s'agit donc d'une disposition vertueuse, positive, qui tire les gens vers le haut. Sans compter que l'une des conditions générales pour bénéficier de Mon compte formation est que le stagiaire souscrive à un engagement de cette nature. Dans la mesure où le dispositif va dans le bon sens, je ne vois pas pourquoi nous reviendrions dessus…
Ensuite, je tiens à rappeler qu'en commission nous avons fait en sorte de préciser les motifs susceptibles d'être pris en compte en cas de non-présentation à l'examen. L'enjeu est donc bien circonscrit dans le texte.
Pour ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 110.
L'amendement n° 111, lui, vise à créer une pénalité décomptée des droits inscrits au CPF en cas d'absence de son titulaire aux examens de certification. Le fait de ne pas prendre en charge financièrement une formation, parce que la personne concernée ne se présente pas à l'examen, me semble pourtant relever du sens commun. La commission est donc également défavorable à cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Madame la sénatrice, le compte personnel de formation vise avant tout à ce que chacun de ses titulaires ait la possibilité, au nom de la solidarité nationale – il ne faut jamais l'oublier ! –, de se former à de nouvelles compétences utiles pour le marché du travail. C'est pourquoi les formations éligibles au CPF sont principalement celles qui mènent à des examens attestant de l'acquisition de certifications professionnelles. Elles sont essentielles à la progression des personnes concernées.
Nous nous attachons, depuis 2022, à responsabiliser les titulaires de CPF sur l'utilisation de leurs droits. La Caisse des dépôts et consignations a malheureusement observé un raffinement toujours croissant dans les comportements frauduleux : les fraudeurs se sont adaptés aux mesures d'encadrement précédemment mises en place. La Caisse a également noté le développement d'un sentiment d'impunité chez les titulaires de comptes qui ne subissent aucun préjudice financier.
La mesure figurant à l'article 13 est une mesure de bonne administration, car elle s'inscrit dans le cadre de la politique de responsabilisation des titulaires de CPF quant à l'utilisation de leurs droits, qui – je tiens à le redire – sont financés par la solidarité nationale.
Pour toutes ces raisons, je suis, sans surprise, défavorable aux amendements nos 110 et 111.
Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. J'avais déposé un autre amendement à l'article 13, mais il a vraisemblablement été déclaré irrecevable au titre de l'article 40 ou de l'article 45 de la Constitution.
La commission a sensiblement durci le dispositif : serait notifiée aux salariés concernés l'obligation de rembourser, sur leurs finances propres, les sommes déjà engagées pour leur formation. Heureusement que le CPF est désormais monétisé, car je ne vois pas comment ces personnes pourraient s'acquitter de ce qu'ils doivent…
Les titulaires de CPF disposeront de quinze jours pour former opposition, comme si tous les salariés étaient capables, dans un tel délai, d'introduire un recours motivé, pièces à l'appui… (M. Laurent Burgoa proteste.) Comme tous les fraudeurs, je suppose qu'ils ont des conseils…
En cas de rejet de leur recours, les frais de justice s'ajouteraient en outre au remboursement de la formation. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) Pourtant, nous évoquions tout à l'heure le cas d'entreprises qui, bien qu'étant suspectées de fraude, se voyaient délivrer durant toute la durée de la procédure de contestation, au nom du droit au recours, des attestations de vigilance, indiquant le paiement de leurs cotisations.
Mme Pascale Gruny. C'est un cas différent !
Mme Raymonde Poncet Monge. C'est surtout qu'elles ne jouent pas dans la même cour ! Contrairement aux salariés, on ne demande pas aux entreprises de tout payer en cas d'échec de leur recours et de régler une amende sévère.
D'ailleurs, je ne vois pas comment vous allez pouvoir recouvrer tous ces frais auprès des salariés, d'autant plus en cas de formation d'un recours, c'est-à-dire d'une procédure qui était, hier encore, un droit.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 110.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 111.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. L'amendement n° 248 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Le titulaire du compte personnel de formation ne peut mobiliser les droits inscrits sur son compte pour financer une action de formation sanctionnée par une certification ou un bloc de compétences mentionnés au premier alinéa qui a été précédemment obtenu ou validé, à l'exception d'une certification visant à atteindre un niveau de connaissance d'une langue. »
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Il s'agit d'une mesure de cohérence par rapport au dispositif du compte personnel de formation mis en place par la loi du 5 septembre 2018.
En effet, l'objectif du CPF est de permettre à chaque actif, sans aucun tiers prescripteur, d'acquérir de nouvelles compétences, complémentaires ou non à sa profession. Pour être opposables, ces compétences sont attestées par la réussite à des certifications enregistrées auprès de l'un des deux répertoires de France Compétences.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Cet amendement s'inscrit dans la logique d'une plus grande responsabilisation des stagiaires lorsqu'ils mobilisent les droits inscrits dans leur CPF. J'ajoute que la Caisse des dépôts et consignations nous avait alertés sur l'existence de fraudes, notamment de transferts de droits à un tiers.
Avis favorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 248 rectifié.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 13, modifié.
(L'article 13 est adopté.)
2
Candidatures à des commissions
Mme la présidente. J'informe le Sénat que des candidatures pour siéger au sein de la commission des affaires économiques et de la commission de la culture, de l'éducation, de la communication et du sport ont été publiées.
Ces candidatures seront ratifiées si la présidence n'a pas reçu d'opposition dans le délai d'une heure prévu par notre règlement.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente-cinq.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à treize heures cinq,
est reprise à quatorze heures trente-cinq, sous la présidence de M. Didier Mandelli.)
PRÉSIDENCE DE M. Didier Mandelli
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
3
Lutte contre les fraudes sociales et fiscales
Suite de la discussion en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission
M. le président. Nous reprenons l'examen du projet de loi relatif à la lutte contre les fraudes sociales et fiscales.
Dans la discussion du texte de la commission, nous en sommes parvenus à l'examen des amendements tendant à insérer un article additionnel après l'article 13.
Après l'article 13
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 211 rectifié ter est présenté par Mme Lermytte, MM. Malhuret et Chasseing, Mme Bourcier, M. Wattebled, Mme L. Darcos, MM. Pellevat, Chevalier, Grand, Rochette, Capus, Médevielle, V. Louault, Laménie et Brault, Mmes Antoine, Jacquemet et Aeschlimann, M. Daubresse, Mmes Muller-Bronn et Sollogoub, M. Menonville, Mme Romagny, M. J. B. Blanc, Mme Bellamy, MM. Chatillon, Fialaire, Khalifé, Levi et Houpert et Mme Gacquerre.
L'amendement n° 273 rectifié bis est présenté par MM. Iacovelli, Patriat et Théophile, Mme Havet et M. Buis.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 13
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La section 7 du chapitre III du titre II du livre III de la sixième partie du code du travail est complétée par un article L. 6323-…, ainsi rédigé :
« Art. L. 6323-.... – Une majoration de 10 % est applicable aux sommes réclamées qui n'ont pas été réglées aux dates d'exigibilité indiquées par le directeur général de la Caisse des dépôts et consignations.
« Lorsque le remboursement des sommes indûment versées ou mobilisées a été effectué, cette majoration peut faire l'objet d'une remise gracieuse totale ou partielle après règlement des sommes dues après demande auprès du directeur général de Caisse des dépôts et consignations.
« Une majoration de 50 % au plus est applicable aux sommes versées ou mobilisées en cas de manœuvres frauduleuses. »
La parole est à Mme Marie-Claude Lermytte, pour présenter l'amendement n° 211 rectifié ter.
Mme Marie-Claude Lermytte. Le présent amendement vise à renforcer l'efficacité du dispositif de recouvrement des sommes indûment versées par la Caisse des dépôts et consignations dans le cadre de la gestion du compte personnel de formation. Pour ce faire, serait instituée une majoration de retard applicable en cas de non-remboursement dans les délais impartis par les organismes de formation ou les titulaires de comptes personnels de formation (CPF).
Depuis la mise en œuvre de la monétisation du CPF, la Caisse des dépôts et consignations assure, pour le compte de l'État, le paiement des actions éligibles auprès des organismes de formation. Dans le cadre de ses missions, elle est parfois conduite à constater des versements indus, qu'ils résultent d'erreurs matérielles ou administratives, de manquements aux dispositions du code du travail ou aux conditions générales d'utilisation de la plateforme Mon compte formation, ou de comportements frauduleux.
Or il apparaît que les procédures actuelles de recouvrement de ces sommes indûment versées se heurtent à des absences de remboursement, qui conduisent la Caisse des dépôts et consignations à procéder à des mises en recouvrement forcé.
À l'instar des caisses de sécurité sociale, et afin d'assurer la bonne gestion des fonds publics et d'inciter à un remboursement rapide des indus, le présent amendement a pour objet la mise en place d'une majoration de retard, calculée sur le montant restant dû, pour toute somme non remboursée à l'expiration d'un délai fixé conformément à l'article R. 6333-7-2 du code du travail. Cette pénalité serait majorée en cas de manœuvres frauduleuses d'un titulaire de CPF ou de l'organisme de formation constatées par la Caisse des dépôts et consignations.
Cette majoration, de nature financière et non pénale, vise un double objectif.
Le premier est préventif : elle incite les débiteurs à rembourser les sommes indûment perçues dans les délais et décourage les titulaires de CPF ou les organismes de formation de se lancer dans des manœuvres frauduleuses.
Le second consiste à assurer discipline et équité, en alignant le régime du CPF sur les principes de gestion financière applicables à d'autres organismes publics.
En outre, cette mesure contribuera à assainir les relations entre, d'une part, la Caisse des dépôts et consignations, et, d'autre part, les organismes de formation et les titulaires de CPF, en responsabilisant davantage ces derniers. Elle participera également à préserver la soutenabilité financière du CPF, en limitant les pertes liées aux indus et en garantissant le bon emploi des fonds destinés à la formation professionnelle.
M. le président. L'amendement n° 273 rectifié bis n'est pas soutenu.
Quel est l'avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur de la commission des affaires sociales. Il s'agit d'une mesure bénéfique, puisqu'elle permettra de mieux responsabiliser les organismes et les titulaires de CPF. De plus, elle s'inscrit dans la droite ligne des travaux menés par la commission afin – permettez-moi l'expression – d'enrichir les outils à la disposition de la Caisse des dépôts et consignations.
La commission émet un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre du travail et des solidarités. Avis favorable.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 13.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 212 rectifié ter est présenté par Mme Lermytte, MM. Malhuret et Chasseing, Mme Bourcier, M. Wattebled, Mme L. Darcos, MM. Pellevat, Chevalier, Grand, Rochette, Capus, Médevielle, V. Louault, Laménie et Brault, Mmes Antoine, Jacquemet et Aeschlimann, M. Daubresse, Mmes Muller-Bronn et Sollogoub, M. Menonville, Mmes Saint-Pé et Romagny, M. J. B. Blanc, Mme Bellamy, MM. Chatillon, Fialaire, Khalifé, Levi et Houpert et Mme Gacquerre.
L'amendement n° 272 rectifié est présenté par MM. Iacovelli, Théophile et Buis, Mme Havet et M. Patriat.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 13
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le second alinéa de l'article L. 161-17-1-2 du code de la sécurité sociale est remplacé par trois alinéas ainsi rédigés :
« Le répertoire mentionné au premier alinéa fournit des informations et des données à caractère personnel nécessaires :
« 1° Au système d'information du compte personnel de formation mentionné au II de l'article L. 6323-8 du code du travail, pour l'appréciation de l'éligibilité du titulaire d'un compte personnel de formation au financement d'une action de formation par les droits inscrits sur son compte ;
« 2° Pour le passeport d'orientation, de formation et de compétences mentionné au III de l'article L. 6323-8 du code du travail, au recensement des parcours professionnels et des acquis de l'expérience professionnelle. »
La parole est à Mme Marie-Claude Lermytte, pour présenter l'amendement n° 212 rectifié ter.
Mme Marie-Claude Lermytte. Instauré par la loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010, le répertoire de gestion des carrières unique (RGCU) centralise les données de carrière de tous les assurés. La loi n° 2023-1196 du 18 décembre 2023 en a étendu les finalités et a autorisé sa consultation dans le cadre du passeport de compétences, dispositif intégré au compte personnel de formation, conformément à l'article L. 6323-8 du code du travail, et visant à recenser, pour chaque titulaire de compte, les éléments relatifs à la formation initiale ou continue, au parcours professionnel et aux activités mentionnées à l'article L. 5151-9 du code du travail susceptibles de faciliter le maintien ou l'insertion des personnes dans l'emploi.
Le présent amendement tend, dans un contexte de lutte contre la fraude au CPF et aux pratiques abusives, à étendre la consultation des données de carrière dans le cadre de la gestion globale du compte personnel de formation, en particulier pour le contrôle des droits et de leur utilisation par les titulaires de CPF.
Conformément à l'article L. 6323-3 du code du travail, « le compte personnel de formation cesse d'être alimenté et les droits qui y sont inscrits ne peuvent plus être mobilisés » lorsque son titulaire a fait valoir ses droits à la retraite à taux plein ou a atteint 67 ans. Cela signifie que les titulaires ayant liquidé leur retraite avec décote peuvent continuer à mobiliser leurs droits, ainsi qu'à alimenter leur compte.
Pour pouvoir appliquer de manière automatique cette faculté prévue dans les textes, les services de la Caisse des dépôts et consignations doivent pouvoir accéder au RGCU.
M. le président. L'amendement n° 272 rectifié n'est pas soutenu.
Quel est l'avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. La commission est favorable à cet amendement, qui vise à ouvrir à de nouveaux acteurs l'accès au RGCU, à des fins de gestion des comptes personnels de formation et, en particulier, de contrôle de l'utilisation de leurs droits par les titulaires de comptes. Je pense notamment aux personnes qui sont à la retraite ou qui font valoir leurs droits en vue de celle-ci.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Cet amendement tend à offrir de nouveaux outils à la Caisse des dépôts et consignations dans le cadre du dispositif du « dites-le-nous une fois » et à lutter contre d'éventuelles fausses déclarations de titulaires de CPF sur leur situation. Avis favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 212 rectifié ter.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 13.
L'amendement n° 186 rectifié bis, présenté par M. Fargeot, Mme Florennes, MM. Courtial, Kern, Laugier, Cambier et Bonneau, Mme Antoine, M. Menonville, Mmes Sollogoub, Romagny, Jacquemet, Billon, Patru et Gacquerre, MM. Pillefer, Parigi et Houpert et Mme Josende, est ainsi libellé :
Après l'article 13
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Pour les prestations dont l'attribution et le maintien sont conditionnés à la résidence stable et effective en France, les organismes débiteurs peuvent procéder à une vérification périodique de cette condition, au moyen d'éléments justificatifs ou d'informations dématérialisées attestant de la présence du bénéficiaire sur le territoire national.
II. – En cas d'absence de réponse ou de doute sérieux sur la réalité de la résidence, l'organisme peut suspendre le versement de la prestation, dans des conditions précisées par décret, jusqu'à régularisation.
III. – Les modalités d'application du présent article, notamment la périodicité des vérifications et la nature des informations pouvant être sollicitées sont fixées par décret.
La parole est à M. Daniel Fargeot.
M. Daniel Fargeot. Certaines prestations sociales sont soumises à une condition de résidence réelle, stable et effective en France. Or les contrôles révèlent régulièrement des cas de non-déclaration de résidence à l'étranger, avec des indus frauduleux parfois élevés. La Cour des comptes évoque une difficulté structurelle.
Contrairement à ce qui a été annoncé ce matin, les organismes ne disposent pas à l'heure actuelle d'outils simples pour vérifier cette condition de résidence. Nous proposons donc d'imposer l'obligation de fournir une preuve dématérialisée de résidence, dont la périodicité et la nature sont à définir. Cette obligation permettrait de sécuriser les droits sans alourdir les démarches des bénéficiaires.
Cette mesure est à la fois proportionnée et sécurisée. Nous ne changeons pas les droits ; nous vérifions simplement que les conditions prévues par la loi sont bien réunies. C'est la garantie que la solidarité va à ceux qui y ont réellement droit.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Nous comprenons l'intention des auteurs de cet amendement. Cela étant, la mise en œuvre du dispositif proposé est vraisemblablement complexe. En outre, un certain nombre de contrôles sont déjà effectués par les différents organismes : il s'agit de contrôles ciblés plutôt que de contrôles imposés par la loi.
Pour ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. La vérification du lieu de résidence est en effet nécessaire, mais, comme le souligne Mme la rapporteure, il existe un certain nombre de difficultés. Sauf à instaurer une surveillance généralisée de nos concitoyens, il est complexe de contrôler à tout moment la présence sur le territoire des bénéficiaires de prestations sociales, même de manière dématérialisée.
Toutefois, des vérifications sont faites de manière régulière en France par l'ensemble des organismes de sécurité sociale. Par exemple, les caisses d'assurance maladie mettent en place une série de contrôles annuels, prévus dans un référentiel homologué par l'État. Ces contrôles sont de deux types : automatiques ou ciblés. Un cadre juridique de référence en matière de vérification de la résidence existe donc d'ores et déjà ; il contribue au renforcement progressif du contrôle des organismes chargés de cette mission.
S'agissant des suites données aux contrôles, la loi autorise les caisses de sécurité sociale à demander toute pièce justificative nécessaire à la vérification des droits.
Le droit actuel permet de répondre aux préoccupations que vous venez d'exprimer, monsieur le sénateur. Par conséquent, le Gouvernement vous demande de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, il y sera défavorable.
M. le président. La parole est à M. Daniel Fargeot, pour explication de vote.
M. Daniel Fargeot. Je rappelle que les organismes concernés gèrent déjà des millions de démarches dématérialisées. Qu'y a-t-il donc d'insurmontable dans la mesure que je propose, sachant que d'autres pays appliquent des dispositions similaires sans aucune difficulté ? C'est– j'y insiste – la fraude qui mine la solidarité.
Mme Raymonde Poncet Monge. Pas seulement !
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Un certain nombre de dispositifs prévoient déjà un contrôle périodique des conditions de résidence. Il serait donc intéressant de savoir combien de contrôles ont été effectués à ce titre jusqu'à présent.
Monsieur le ministre, vous avez, hélas, raté les excellents propos que j'ai tenus hier lors de la discussion générale. Aussi, je vous rappelle que, dans le dernier rapport de l'inspection générale des affaires sociales (Igas), il est indiqué qu'au moins 2,4 millions de personnes bénéficient de prestations, alors qu'elles ne remplissent plus les conditions de résidence sur le territoire. Il y a là un vrai problème !
Mon collègue Daniel Fargeot a raison, les dispositions légales existent. Nous les avons votées, et nous avons même créé une clause de périodicité. Je le répète, la question, qui reviendra comme mars en carême lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, est de savoir combien de contrôles sur les conditions de résidence sont réalisés chaque année. Voilà le sujet !
Les difficultés sont telles que nous en sommes rendus aujourd'hui à faire voter des mesures qui existent déjà. Commençons donc par appliquer les dispositions existantes.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 186 rectifié bis.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 13 bis (nouveau)
Le code du travail est ainsi modifié :
1° L'article L. 6333-7-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les greffiers des tribunaux de commerce peuvent communiquer aux agents habilités de la Caisse des dépôts et consignations tout renseignement et tout document qu'ils recueillent à l'occasion de l'exercice de leurs missions, de nature à faire présumer des fraudes liées au compte personnel de formation ou des manœuvres ayant pour objet ou pour résultat de compromettre le remboursement de sommes indûment versées par la Caisse des dépôts et consignations. » ;
2° La section 2 du chapitre III du titre III du livre III de la sixième partie est complétée par un article L. 6333-7-3 ainsi rédigé :
« Art. L. 6333-7-3. – I. – Les personnes mentionnées aux 1° à 1° quater de l'article L. 561-2 du code monétaire et financier signalent à la Caisse des dépôts et consignations les opérations, liées à un prestataire mentionné l'article L. 6351-1 du présent code, dont elles savent, soupçonnent ou ont de bonnes raisons de soupçonner qu'elles concourent à la commission d'une infraction préjudiciable au fonds mentionné au premier alinéa de l'article L. 6333-6 ou aux ressources mentionnées au deuxième alinéa du même article L. 6333-6.
« II. – Un décret en Conseil d'État précise les conditions d'application du présent article et notamment le contenu et les modalités de transmission des informations. – (Adopté.)
Article 13 ter (nouveau)
Après l'article L. 6355-17 du code du travail, il est inséré un article L. 6355-17-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 6355-17-1. – Le fait de se prévaloir de la qualité d'opérateur de conseil en évolution professionnelle en méconnaissance du 4° de l'article L. 6123-5 ou de créer la confusion avec cette qualité est puni d'une amende de 4 500 euros. – (Adopté.)
Article 14
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° (nouveau) La section 2 du chapitre IV ter du titre Ier du livre Ier est complétée par un article L. 114-22-2-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 114-22-2-1 – Pour le calcul de l'ensemble des aides, prestations ou allocations attribuées sous condition de ressources, ou réduites en fonction des revenus, au titre du présent code, du code de l'action sociale et des familles, du code rural et de la pêche maritime, du code de la construction et de l'habitation, sont prises en compte les sommes soumises à l'impôt sur le revenu en application de l'article 1649 quater-0 B bis du code général des impôts. Ces sommes sont communiquées à l'organisme concerné par l'administration fiscale.
« Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'État. »
2° Le IV de l'article L. 136-8 est ainsi rétabli :
« IV. – Par dérogation au I, sont assujetties à la contribution sociale au taux de 25 % les sommes mentionnées au a du II de l'article L. 136-6 du présent code qui sont soumises à l'impôt sur le revenu en application de l'article 1649 quater-0 B bis du code général des impôts. »
II. – Le II de l'article 154 quinquies du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation aux dispositions du premier alinéa du présent II, la contribution afférente aux sommes mentionnées au a du II de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale qui sont soumises à l'impôt sur le revenu en application de l'article 1649 quater-0 B bis du présent code n'est pas admise en déduction du revenu imposable. »
III. – Le I s'applique à compter du 1er janvier 2026. Le II s'applique à l'impôt sur le revenu dû au titre de l'année 2026 et des années suivantes.
IV. – Après l'article L. 5425-1 du code du travail, il est inséré un article L. 5425-1-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 5425-1-1. – Les allocations prévues au présent titre ne peuvent être cumulées, au titre d'une même période, avec des sommes soumises à l'impôt sur le revenu en application de l'article 1649 quater-0 B bis du code général des impôts, communiquées à l'organisme débiteur du revenu de remplacement par l'administration fiscale.
« Les modalités d'application du présent article sont fixées :
« 1° Pour l'allocation d'assurance et l'allocation des travailleurs indépendants, par l'accord prévu à l'article L. 5422-20 du présent code ;
« 2° Pour les allocations de solidarité, par décret en Conseil d'État. »
M. le président. L'amendement n° 127, présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
Alinéas 2 à 4
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Par cet amendement, nous souhaitons procéder à la suppression d'une mesure introduite dans le texte en commission, sur proposition des rapporteurs.
Si nous nous opposons à cet article, qui a pour objet l'extension à l'ensemble des aides et prestations sociales versées sous condition de ressources du principe selon lequel les revenus illicites doivent être pris en compte systématiquement dans le calcul de l'aide par l'organisme la versant, c'est parce qu'il semblerait que cela soit déjà possible. Nous en revenons donc à la question soulevée par nos collègues il y a quelques instants.
Chaque administration dispose d'un pouvoir d'interprétation. Elle doit prendre en compte les circonstances et la gravité du manquement, le comportement de son auteur, sa défense, ainsi que ses ressources et ses charges.
La mesure que nous proposons de supprimer risquerait de rendre la loi inutilement bavarde. En tant que législateurs, nous nous devons de voter des lois effectives, non redondantes, et même dénuées de toute mesure idéologique.
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Certes, cet amendement vise à supprimer une disposition que la commission a elle-même introduite dans le projet de loi, mais j'ai bien compris que, sur le fond, nous étions d'accord, du moins avec notre collègue Raymonde Poncet Monge.
Aujourd'hui, en application d'une circulaire, c'est sur instruction du parquet, à partir du croisement d'informations de la caisse primaire d'assurance maladie, de la caisse d'allocations familiales ou d'autres organismes versant des prestations sous condition de ressources, qu'il est possible de réintroduire des revenus illicites dans le calcul de ces ressources et de considérer que les personnes concernées ont fraudé – elles avaient en effet des revenus, certes illicites, alors qu'elles avaient déclaré ne pas en avoir.
Si nous avons souhaité inscrire cette disposition dans le dur de la loi, c'est, d'une part, parce qu'elle n'est pas appliquée aujourd'hui, et, d'autre part, parce qu'elle laisse au procureur et aux caisses un pouvoir d'interprétation qui, à notre sens, n'a aucune raison d'être. Le législateur et les élus que nous sommes doivent, à un moment donné, fixer un cadre. C'est ainsi que nous pourrons faire avancer la lutte contre la fraude et améliorer le recouvrement des sommes indues.
Lorsqu'il existe des revenus illicites, il faut énoncer clairement qu'il y a faute et fraude. Au-delà de la contribution sociale généralisée (CSG), dont l'assiette sera étendue en application de ce texte, ces revenus illicites seront réintégrés dans les ressources, ce qui permettra de contraindre les fraudeurs à rembourser tout ou partie de ce qu'ils ont perçu.
J'y insiste, nous avons inscrit cette disposition dans le texte à cet effet. Et c'est pourquoi nous sommes évidemment défavorables à cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Depuis l'adoption de la loi de finances rectificative pour 2009, les dispositifs fiscaux permettent de taxer les revenus tirés des activités illicites. C'est le cas en matière fiscale, mais ça l'est aussi en matière sociale. Dès lors que de tels revenus sont imposables, ils sont pris en compte, par extension, dans le calcul des ressources conduisant au versement des prestations familiales, des aides au logement, de l'allocation aux adultes handicapés (AAH), de la prime d'activité ou du revenu de solidarité active (RSA).
Le code de la sécurité sociale prévoit déjà, par ailleurs, des échanges de données entre administrations, comme cela a été rappelé.
Enfin, une instruction de la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf) a été diffusée le 15 mai 2025, afin de préciser les consignes à suivre en cas de signalement transmis sur la perception de revenus tirés d'une activité illicite, et ce pour harmoniser les pratiques des caisses d'allocations familiales (CAF).
Pour l'ensemble de ces raisons, et dans le prolongement des propos de Mme la rapporteure, j'émets donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Il faut maintenir absolument l'article 14 tel que la commission l'a modifié. Il s'agit en effet de la suite logique des travaux que nous avons menés contre la criminalité organisée, notamment dans le cadre de la loi pour lutter contre le narcotrafic.
Il nous faut évidemment soutenir ce genre de dispositifs et les introduire partout où nous le pouvons, de sorte qu'il n'y ait aucun doute sur la volonté du Gouvernement et du Parlement de capter ces revenus illicites et de les taxer.
Je partage donc totalement la position de la commission.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Je le redis, cet article est inutile. Cela étant, je crois comprendre que, d'une certaine manière, celui-ci vise à interdire tout pouvoir d'interprétation, ce même pouvoir qui nous est servi à toutes les sauces lorsque l'on débat de fraude fiscale.
Lorsque des revenus illicites sont connus, ils sont taxés : ils entrent donc forcément dans les bases de calcul, y compris pour les allégements généraux de cotisations.
L'intention du Gouvernement et de la commission – mais je peux me tromper – est tout simplement de neutraliser tout pouvoir d'interprétation des administrations et des caisses dans ce genre de situations. Aussi, je maintiens mon amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 127.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 122, présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 11
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
« Il peut être procédé au réexamen de la situation du demandeur d'emploi lorsqu'interviennent des éléments nouveaux, dans un délai raisonnable à compter de leur découverte, tels qu'un jugement pénal définitif ou l'annulation de la décision initiale des services fiscaux, y compris postérieurement au recouvrement du trop-perçu par France Travail.
« Le montant des allocations prévues au présent titre ne peut être réduit qu'à hauteur des revenus illicites effectivement constatés, dès lors que la sanction des actes à l'origine de ces revenus est assurée par une autre procédure.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Selon la Défenseure des droits, dont nous suivons les recommandations – pardonnez-nous de le faire, mes chers collègues ! –, le dispositif prévu à l'article 14 crée une double difficulté au regard de la protection des droits et libertés.
D'une part, il est possible que l'administration fiscale transmette à France Travail des données qui ne seront finalement pas considérées comme caractérisant des revenus illicites dans la décision définitive rendue par le juge pénal. Une telle mesure constituerait alors une violation du secret de l'instruction et pourrait conduire à adopter des décisions administratives sur le fondement d'éléments infirmés ultérieurement. Ainsi, des demandeurs d'emploi bénéficiant d'allocations chômage pourraient se voir injustement privés de leurs droits lors de la procédure.
Afin d'éviter une telle atteinte, nous proposons que soit rendu possible le réexamen de la situation d'un demandeur d'emploi en présence d'éléments nouveaux, tels qu'un jugement pénal définitif ou l'annulation de la décision initiale des services fiscaux, y compris si ces événements se produisent plusieurs années après le recouvrement du trop-perçu par France Travail, lequel sera alors considéré comme injustifié.
D'autre part, la rédaction actuelle de l'article 14 ne permet pas de déterminer si un demandeur d'emploi serait privé de l'ensemble de ses indemnités chômage dès lors que l'administration fiscale a identifié des revenus illicites sur la période considérée, ou si le montant des allocations serait simplement réduit à hauteur des revenus illicites effectivement constatés.
Le prononcé de sanctions administratives doit respecter les droits de la défense, que ce soit pour les assurés ou pour les entreprises. Afin d'éviter toute atteinte à ces droits, nous demandons à ce que soit précisé que le montant des allocations est réduit uniquement à proportion des revenus illicites effectivement constatés, dès lors que la sanction des actes à l'origine de ces revenus est prononcée dans le cadre d'une autre procédure.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement, car il vise à atténuer la portée de l'article 14.
De manière générale, en matière de fraude, qu'il s'agisse de fraude sociale ou de fraude fiscale, plus nous aurons des positions politiques claires, plus nous soutiendrons les administrations qui accomplissent un travail colossal pour mieux détecter, mieux recouvrer et mieux réprimer, et mieux la République se portera.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Les différentes mesures figurant dans ce projet de loi ont pour objectif commun de lutter contre la fraude sous toutes ses formes. Comment ? En donnant à France Travail tous les moyens nécessaires pour agir.
En l'occurrence, les dispositions dont nous discutons permettront à France Travail d'identifier de nouveaux trop-perçus, notamment dans le cas où un demandeur d'emploi aurait cumulé le versement d'une allocation et des revenus illicites. Dans la mesure où de tels revenus ne peuvent être connus directement des services de France Travail, le dispositif de l'article 14 repose sur les éléments factuels transmis par l'administration fiscale.
Je comprends l'esprit de votre amendement, madame la sénatrice, puisque certains éléments transmis par l'administration fiscale pourraient être requalifiés par un jugement pénal définitif. Toutefois, par principe, les décisions de justice s'imposent à l'autorité administrative, à qui il appartient de corriger les effets des décisions qui auraient été prises en contradiction avec un ou plusieurs jugements.
De même, pour répondre à la seconde partie de votre argumentaire, je rappelle que le cadre juridique actuel prévoit bien des sanctions pour les demandeurs d'emploi en cas de fraude : je pense à la suppression totale de l'allocation versée et à la radiation de six à douze mois de la liste des demandeurs d'emploi. À cela s'ajoute la récupération des trop-perçus, dont nous avons parlé, qui s'impute sur les droits versés à venir. Le droit positif prévoit donc d'ores et déjà un mécanisme dissuasif impliquant le remboursement des sommes injustement perçues.
Pour l'ensemble de ces raisons, j'émets un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'article 14.
(L'article 14 est adopté.)
Article 15 (précédemment examiné)
M. le président. Je rappelle que l'article 15 a été précédemment examiné.
Chapitre II
Renforcer les sanctions administratives et pénales
Article 16
Le code du travail est ainsi modifié :
1° La première phrase de l'article L. 6231-4 est complétée par les mots : « et de transmettre les données issues de la mise en œuvre de cette comptabilité analytique à l'institution mentionnée à l'article L. 6123-5 accompagnées, lorsque la comptabilité n'est pas tenue par un comptable public, de l'attestation du commissaire aux comptes ou à défaut de l'expert-comptable reconnaissant la fiabilité des données comptables transmises. » ;
1° bis (nouveau) Au premier alinéa de l'article L. 6351-4-1, les mots : « du contrôle mentionné à l'article L. 6361-1, » sont remplacés par les mots : « au cours des contrôles mentionnés aux articles L. 6361-1 et L 6361-2, » ;
2° Après l'article L. 6355-15, il est inséré un article L. 6355-15-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 6355-15-1. – Le fait de ne pas transmettre les données issues de la mise en œuvre de la comptabilité analytique et l'attestation mentionnées à l'article L. 6231-4 à l'institution mentionnée à l'article L. 6123-5 est puni d'une amende de 4 500 euros. » ;
3° Le titre V du livre III de la sixième partie est complété par un chapitre VI ainsi rédigé :
« CHAPITRE VI
« Sanctions administratives
« Art. L. 6356-1. – Sous réserve de l'absence de poursuite pénale, l'autorité administrative compétente peut, sur rapport de l'agent de contrôle mentionné à l'article L. 6361-5, soit adresser à l'employeur un avertissement, soit prononcer à l'encontre de l'organisme contrôlé une amende, en cas de manquement :
« 1° Aux articles L. 6231-2 à L. 6231-7 et aux mesures réglementaires prises pour leur application ;
« 2° Aux articles L. 6355-1 à L. 6355-24 et aux mesures réglementaires prises pour leur application ;
« 3° Aux articles L. 8114-1 et L. 8114-2 et aux mesures réglementaires prises pour leur application.
« Art. L. 6356-2. – Lorsqu'une amende est prononcée en application de l'article L. 6356-1, l'autorité administrative informe par tout moyen le procureur de la République des suites données au rapport des agents de contrôle mentionnés à l'article L. 6361-5.
« Art. L. 6356-3. – Le montant maximal de l'amende est de 4 000 euros et peut être appliqué autant de fois que les manquements constatés se sont produits.
« Le plafond de l'amende est porté au double en cas de nouveau manquement constaté dans un délai de deux ans à compter du jour de la notification de l'amende concernant un précédent manquement de même nature.
« Il est majoré de 50 % en cas de nouveau manquement constaté dans un délai d'un an à compter du jour de la notification d'un avertissement concernant un précédent manquement de même nature.
« Art. L. 6356-4. – Pour fixer le montant de l'amende, l'autorité administrative prend en compte les circonstances et la gravité du manquement, le comportement de son auteur, notamment sa bonne foi, ainsi que ses ressources et ses charges.
« Art. L. 6356-5. – Avant toute décision, l'autorité administrative informe par écrit la personne mise en cause de la sanction envisagée en portant à sa connaissance le manquement retenu à son encontre et en l'invitant à présenter, dans un délai ne pouvant être inférieur à quinze jours, ses observations.
« À l'issue de ce délai, l'autorité administrative peut, par décision motivée, prononcer l'amende et émettre le titre de perception correspondant.
« Le délai de prescription de l'action de l'autorité administrative pour la sanction du manquement par une amende administrative est de deux années révolues à compter du jour où le manquement a été commis.
« Art. L. 6356-5-1 (nouveau). – La personne à l'encontre de laquelle un avertissement ou une amende est prononcé peut contester la décision de l'administration devant le tribunal administratif, à l'exclusion de tout recours hiérarchique.
« Art. L. 6356-6. – Les amendes sont recouvrées selon les modalités prévues pour les créances de l'État étrangères à l'impôt et au domaine. L'opposition à l'exécution ou l'opposition aux poursuites n'a pas pour effet de suspendre l'action en recouvrement de la créance.
« Art. L. 6356-7. – Les modalités d'application du présent chapitre sont fixées par décret en Conseil d'État. »
M. le président. L'amendement n° 293, présenté par Mme Puissat et M. Henno, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 4
Rédiger ainsi cet alinéa :
2° L'article L. 6355-5 est ainsi rétabli :
II. – Alinéa 5
Remplacer la référence :
L. 6355-15-1
par la référence :
L. 6355-5
III. – Alinéa 9
Remplacer les mots :
de l'agent de contrôle mentionné
par les mots :
des agents de contrôle mentionnés
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Avis favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 293.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 247 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Après l'alinéa 5
Insérer quatorze alinéas ainsi rédigés :
« Art. L. 6355-15-2. – Le fait de ne pas renseigner le passeport de prévention prévu à l'article L. 4141-5 est puni d'une amende de 2 500 euros. » ;
...° L'article L. 4141-5 est ainsi rédigé :
« Art. L. 4141-5. – I.- Il est créé un passeport de prévention afin de faciliter le respect par les employeurs de leur obligation de formation prévue à l'article L. 4141-2. Il comporte les attestations, certificats, certifications professionnelles et diplômes obtenus dans le cadre des formations relatives à la santé et à la sécurité au travail mentionnées à l'article L. 4141-2.
« II. – Le passeport de prévention est ouvert à tout titulaire d'un compte personnel de formation mentionné à l'article L. 6323-1. Il est intégré au système d'information du compte personnel de formation mentionné à l'article L. 6323-8 et est géré par la Caisse des dépôts et consignations selon les modalités définies à l'article L. 6323-9.
« III.– Le passeport de prévention est renseigné :
« 1° Par l'employeur pour les formations dispensées à son initiative, sauf à ce qu'elles aient été dispensées dans les conditions du 3° ;
« 2° Par l'entreprise de travail temporaire, après information de l'entreprise utilisatrice lorsque les formations sont dispensées aux salariés temporaires à l'initiative de cette dernière, sauf à ce qu'elles aient été dispensées dans les conditions du 3° ;
« 3° Par l'organisme de formation pour les formations qu'il dispense directement ou par le biais d'un sous-traitant ;
« 4° Par les ministères et organismes certificateurs, dans le cadre de la communication des informations relatives aux titulaires des certifications prévues à l'article L. 6113-8 ;
« 5° Par les organismes mentionnés à l'article L. 6353-10 dans le cadre du partage des données relatives à l'emploi et au parcours de formation professionnelle prévu à ce même article.
« Le titulaire du passeport de prévention peut également le renseigner lorsque les attestations, certificats et diplômes ont été obtenus à l'issue de formations relatives à la santé et à la sécurité au travail qu'il a suivies de sa propre initiative.
« IV. – Le titulaire du passeport de prévention a accès à l'ensemble des données qui y figurent.
« L'employeur peut consulter et conserver, sauf opposition du titulaire, l'ensemble des données contenues dans le passeport de prévention, pour les besoins du suivi de ses obligations en matière de formation à la santé et à la sécurité, sous réserve du respect des conditions de traitement des données à caractère personnel prévues à l'article 4 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés.
« V. – Sans préjudice des dispositions prévues au II de l'article L. 6323-8, les modalités de mise en œuvre du passeport de prévention et de sa mise à la disposition de l'employeur sont déterminées par le comité national de prévention et de santé au travail et approuvées par voie réglementaire. En l'absence de décision du comité à l'issue d'un délai de six mois à compter de la publication du décret en Conseil d'État prévu au dernier alinéa de l'article L. 4641-2-1, ces modalités sont déterminées par décret en Conseil d'État. Le comité national de prévention et de santé au travail assure également le suivi du déploiement du passeport de prévention. » ;
II. – Alinéa 14
Après le montant :
4 000 euros
insérer les mots :
, sauf en cas de manquement à la disposition pénale mentionnée à l'article L. 6355-15-2 pour lequel le montant maximal de l'amende est de 2 000 euros,
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. La mesure que nous proposons à travers cet amendement est rendue nécessaire par la mise en place du passeport de prévention, créé par l'accord national interprofessionnel du 9 décembre 2020 et la loi du 2 août 2021 pour renforcer la prévention en santé au travail. La formation à la prévention est en effet l'un des principaux leviers pour réduire le nombre encore trop élevé d'accidents du travail, lesquels peuvent être graves, voire mortels.
Le passeport de prévention a vocation à rassembler dans un même outil numérique les attestations, certificats et diplômes délivrés à l'issue d'une formation à la santé et à la sécurité au travail. Il permettra donc de garantir une véritable traçabilité : l'employeur pourra s'assurer de la bonne réalisation de ces formations et les compléter si nécessaire.
Les services du ministère du travail ont créé des groupes de travail, en lien avec les partenaires sociaux représentatifs au niveau interprofessionnel, pour accompagner les développements informatiques de la Caisse des dépôts et consignations nécessaires à la mise en place de ce passeport.
Il est apparu nécessaire de clarifier les responsabilités de ceux qui le remplissent pour éviter toute rupture dans son alimentation et introduire une sanction à l'égard des organismes de formation qui auraient manqué à leurs obligations légales en s'abstenant de le renseigner.
Il importe également d'élargir le public des bénéficiaires de cet outil à l'ensemble des titulaires d'un compte personnel de formation, et ce afin d'anticiper les mobilités professionnelles, qui peuvent conduire les salariés à changer plus souvent non seulement d'emploi, mais également de statut.
Enfin, pour que ce passeport devienne un véritable instrument de pilotage de la politique de formation à la prévention, il est impératif d'en faciliter le partage avec l'employeur.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. M. le ministre a très bien rappelé l'intérêt de ce passeport de prévention et l'importance pour l'employeur de le renseigner. Cet amendement nous semble utile : avis favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 247 rectifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 16, modifié.
(L'article 16 est adopté.)
Après l'article 16
M. le président. L'amendement n° 184 rectifié bis, présenté par M. Fargeot, Mme Florennes, MM. Courtial, Kern, Laugier et Delahaye, Mme Antoine, M. Menonville, Mmes Sollogoub, Romagny, Jacquemet, Billon, Patru et Gacquerre, MM. Parigi et Houpert et Mme Josende, est ainsi libellé :
Après l'article 16
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 6351-7 du code du travail, il est inséré un article L. 6351-7–... ainsi rédigé :
« Art. L. 6351-7-.... – Pour les besoins du contrôle exercé en application du présent titre, les agents chargés du contrôle de la formation professionnelle peuvent procéder à des vérifications réalisées sous une identité d'emprunt, incluant l'acquisition d'une prestation de formation financée au titre du compte personnel de formation.
« Les agents mentionnés au premier alinéa peuvent, à ce titre, accéder aux espaces de formation, supports, communications et documents mis à disposition des personnes inscrites.
« Les organismes de formation sont tenus de conserver, pendant une durée de cinq ans, les journaux de connexion, les traces pédagogiques et tout élément permettant d'attester de la réalisation effective de la formation.
« Les conditions d'application du présent article, notamment les garanties applicables aux contrôles sous identité d'emprunt, sont fixées par décret en Conseil d'État. »
La parole est à M. Daniel Fargeot.
M. Daniel Fargeot. La fraude au compte personnel de formation (CPF) repose sur un mécanisme très simple : des formations fictives, sans contenu réel, qui disparaissent dès que la menace d'un contrôle se précise. Aujourd'hui, aucune base juridique claire ne permet aux services chargés des contrôles de réaliser des achats tests. Or il est compliqué de vérifier la réalité d'une formation si tout disparaît au moment où l'on se présente…
Cet amendement vise à permettre aux agents chargés des contrôles de la formation professionnelle de réaliser lesdits contrôles sous une identité d'emprunt, en prévoyant la conservation obligatoire des traces pédagogiques. Il s'agit d'étendre à d'autres administrations un dispositif auquel a déjà recours la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF). On ne peut pas continuer à laisser filer des millions d'euros versés pour des prestations fantômes.
Cet amendement vise à renforcer l'efficacité des contrôles et à protéger les fonds publics en donnant simplement à ces agents une vraie capacité d'agir.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Cet amendement est satisfait par l'article 11 du présent projet de loi, qui vise justement à anonymiser tous les agents des services régionaux de contrôle (SRC) de la formation professionnelle.
C'est pourquoi nous en demandons le retrait ; à défaut, nous y serons défavorables.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Même avis.
M. le président. Monsieur Fargeot, l'amendement n° 184 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Daniel Fargeot. Non, je le retire, monsieur le président, tout en rappelant que chaque euro volé au CPF est un euro en moins pour la formation réelle. Notre responsabilité est de protéger l'argent des travailleurs.
M. le président. L'amendement n° 184 rectifié bis est retiré.
Article 16 bis (nouveau)
Le livre III de la sixième partie du code du travail est ainsi modifié :
1° L'intitulé de la section 2 du chapitre II du titre V est complété par les mots : « et obligations applicables aux organismes de formation sollicitant des fonds auprès des financeurs publics » ;
2° L'article L. 6352-4 est ainsi rétabli :
« Art. L. 6352-4. – Lorsqu'il sollicite des fonds auprès des financeurs mentionnés à l'article L. 6316-1, l'organisme de formation assure le traitement égal de tous les stagiaires et apprentis. Il veille au respect de la liberté d'expression et de conscience, ainsi qu'à la neutralité des enseignements dispensés. Ces obligations sont inscrites dans le règlement intérieur mentionné à l'article L. 6352-3. » ;
3° Le premier alinéa de l'article L. 6362-3 est remplacé par cinq alinéas ainsi rédigés :
« En cas de contrôle d'un organisme chargé de réaliser tout ou partie des actions mentionnées à l'article L. 6313-1, ces actions sont réputées inexécutées et donnent lieu à remboursement des fonds auprès de l'organisme ou de la personne qui les a financées dans les cas suivants :
« 1° Lorsqu'il est constaté que des actions financées par des fonds de la formation professionnelle ont poursuivi d'autres buts que ceux définis aux articles L. 6313-1 à L. 6313-8 ;
« 2° Lorsque l'action de formation est assurée par un ou des formateurs ne disposant pas des diplômes, certificats, titres, attestations, autorisations et qualités au sens de l'article L. 6352-1 en lien avec l'action réalisée ;
« 3° Lorsque l'action de formation promeut ou conduit à l'exercice d'une profession réglementée ou d'une profession de santé au sens des dispositions de la quatrième partie du code de la santé publique alors que les formateurs ne satisfont pas aux obligations mentionnées au 2° du présent article ou que les bénéficiaires de la formation ne disposent pas des prérequis nécessaires pour entrer en formation ;
« 4° En cas de manquement de l'organisme de formation aux obligations mentionnées à l'article L. 6352-4 du présent code. »
M. le président. L'amendement n° 128, présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. En application de l'article 16 bis, tout organisme de formation qui sollicite des fonds auprès des financeurs publics est censé faire respecter les principes d'égalité de traitement de tous les stagiaires, de liberté d'expression et de conscience, ainsi que de neutralité des enseignements dispensés.
Par ailleurs, afin d'exclure ces organismes de l'accès aux financements publics, il est précisé que les actions de formation conduisant à l'exercice d'une activité réglementée, notamment médicale, ne donnent lieu à aucun remboursement lorsque les formateurs ou les bénéficiaires ne disposent pas des diplômes, titres et qualités requis.
Nous proposons la suppression de cet article, qui ne nous semble pas légitime dans un projet de loi relatif à la lutte contre les fraudes sociales et fiscales. Ces dispositions relèvent en effet davantage d'un cahier des charges définissant le périmètre des formations, leur contenu et le cadre de travail que les organismes de formation offrent que du périmètre de la loi. Selon nous, elles auraient dû être jugées irrecevables au titre de l'article 45 de la Constitution, à l'instar de nombre de nos amendements pour lesquels nous n'avons pas eu l'occasion de démontrer qu'ils visaient effectivement à lutter contre la fraude.
En outre, une partie de ces mesures sont, de fait, déjà satisfaites, étant donné que tous les organismes de formation doivent appliquer le droit existant. Il n'y a donc pas lieu de les inscrire dans le présent projet de loi.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. La commission est évidemment défavorable à cet amendement de suppression, puisqu'elle est à l'origine de l'introduction de cet article dans le texte. Pourquoi l'avons-nous fait ? Parce que, lors de nos auditions, nous avons régulièrement été alertés par les établissements ou les agences de l'État, France Compétences en particulier, qu'un certain nombre de formations étaient, par exemple, réservées aux hommes, ou que certains opérateurs se faisaient passer pour des médecins, alors qu'ils ne l'étaient pas. Il s'agit bien de fraude, et cet article a donc tout son sens dans ce projet de loi.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Madame la sénatrice, vous souhaitez supprimer l'article 16 bis. Je dois dire que cela me surprend un peu, car nous sommes, avec ces dispositions, au cœur de la lutte contre la fraude. Nous sommes même au « cœur du cœur » de ce texte. Il est incontestable qu'utiliser l'argent public pour encourager l'emprise et l'entrisme est difficilement admissible.
La lutte contre ces situations d'emprise, d'entrisme, ou contre l'exercice illégal d'activités professionnelles réglementées, comme la médecine, relève bien évidemment de la lutte contre la fraude. Outre les dangers sociaux et physiques que ces pratiques entraînent, il y a parfois, hélas, derrière ces formations des faits encore plus graves que le seul accès illégal à des financements publics : nous le savons, une fois ces organismes enregistrés, d'autres types de fraudes, comme le blanchiment d'argent, prolifèrent.
Permettez-moi enfin de souligner que cet article, introduit dans le texte par la commission, est indispensable aux agents de contrôle de la formation professionnelle pour mieux caractériser des pratiques qui, dans l'état actuel du droit, ne peuvent être que difficilement sanctionnées.
Vous le comprendrez, madame la sénatrice, je suis défavorable à votre amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'article 16 bis.
(L'article 16 bis est adopté.)
Article 16 ter (nouveau)
L'article L. 6351-3 du code du travail est complété par des 5° à 7° ainsi rédigés :
« 5° L'organisme ne dispose pas de locaux lui permettant de justifier de sa capacité à réaliser les actions mentionnées au 4° de l'article L. 6313-1 ;
« 6° Le dirigeant de droit ou de fait de l'organisme a fait l'objet, dans les quatre ans précédant la demande, d'un procès-verbal constatant l'une des infractions prévues aux articles L. 6355-1 à L. 6355-22 assorti d'une annulation de la déclaration d'activité dans les conditions fixées à l'article L. 6351-4 ;
« 7° Le dirigeant de droit ou de fait de l'organisme a fait l'objet, dans le cadre d'un contrôle de ses dépenses ou de ses activités en application des articles L. 6361-1 à L. 6361-3, dans les cinq ans précédant la demande, d'une décision de rejet et de versement mentionnée à l'article L. 6362-10 et ne justifie pas du règlement du montant exigible auprès de l'administration chargée du recouvrement dans les conditions prévues à l'article L. 6362-12. – (Adopté.)
Article 17
Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° À l'article L. 114-17-1, le dernier alinéa du III est supprimé ;
2° L'article L. 162-1-15 est ainsi modifié :
a) Le I bis est ainsi rédigé :
« I bis. – Le directeur de l'organisme local d'assurance maladie peut décider, après que le centre de santé ou la société de téléconsultation mentionnée à l'article L. 4081-1 du code de la santé publique a été mis en mesure de présenter ses observations, de subordonner à l'accord préalable du service du contrôle médical, pour une durée ne pouvant excéder six mois, la couverture d'actes, de produits ou de prestations figurant sur les listes mentionnées aux articles L. 162-1-7, L. 162-17 et L. 165-1 du présent code, la couverture des frais de transport ou le versement des indemnités journalières mentionnés au 2° de l'article L. 160-8, à l'article L. 321-1 et aux 1° et 2° de l'article L. 431-1 du présent code ainsi qu'aux 1° et 2° de l'article L. 752-3 du code rural et de la pêche maritime, en cas de constatation par ce service des situations mentionnées aux 1° à 5° du I du présent article, sous réserve des dispositions du dernier alinéa de ce même I.
« La condition d'activité comparable des centres de santé ou des sociétés de téléconsultation s'applique dans le ressort de la même agence régionale de santé ou au niveau national. » ;
b) Le II est ainsi modifié :
– à la première phrase, le mot : « proposer » est remplacé par le mot : « demander » ;
– la seconde phrase est supprimée ;
c) Au II bis, après la référence : « I », sont insérés les mots : « et II » ;
3° (nouveau) Le premier alinéa de l'article L. 162-15-1 est complété par deux phrases ainsi rédigées : « Durant l'intégralité de la mise hors convention pour violation des engagements prévus par celles-ci, les produits de santé, les actes et les prestations prescrits par le professionnel de santé, les centres de santé et les sociétés de téléconsultation mentionnées à l'article L. 4081-1 du code de la santé publique ne donnent pas lieu à un remboursement par l'assurance maladie. L'information du patient sur le non-remboursement des prescriptions est réalisée dans les conditions prévues aux articles L. 1111-3 à L. 1111-3-2 du même code. »
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 113 est présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel.
L'amendement n° 277 rectifié est présenté par MM. Patient, Buis et Buval et Mme Schillinger.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéas 7 à 10
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l'amendement n° 113.
Mme Raymonde Poncet Monge. Le présent amendement, qui nous a été suggéré par le Conseil national de l'ordre des médecins (Cnom), vise à supprimer les dispositions de l'article 17 relatives à l'obligation de mise sous objectif de professionnels de santé ciblés pour hyper-prescription. En effet, le médecin doit pouvoir refuser une mise sous objectif, qui est souvent perçue comme une qualification implicite de fraude ou de faute – d'où la présence de cette mesure dans le présent projet de loi –, ce qui pose un problème de principe.
De plus, la méthodologie des contrôles réalisés présente de nombreux biais structurels. D'ailleurs, celle-ci s'est peu à peu resserrée. Le délai entre la prescription et le contrôle fausse l'analyse de la pertinence médicale. La typologie de la patientèle n'est pas toujours, ou est difficilement prise en compte. Les critères statistiques ne reflètent pas la complexité clinique.
Le Cnom rappelle en outre que la relation médecin-patient repose sur la confiance et qu'une approche purement quantitative du soin ne saurait se substituer à l'évaluation clinique lors de la consultation.
Par ailleurs, une mise sous objectif contrevient à l'obligation du médecin de délivrer les soins qu'il juge adaptés et de qualité, en lien avec les besoins réels et l'état de santé du patient. Elle porte également atteinte à son indépendance professionnelle et à la liberté de prescription, principes consacrés par la loi.
Le médecin ne peut être contraint dans sa pratique professionnelle par une décision unilatérale du directeur de la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM), auquel il serait alors lié par un rapport de subordination administrative. Le praticien doit pouvoir refuser cette mise sous objectif d'une réduction quantitative des prescriptions – car c'est de cela qu'il s'agit. Libre à la CPAM, ensuite, d'engager la mise sous accord préalable : ce sera alors à celle-ci d'assumer la responsabilité de récuser ou de limiter une prescription jugée pertinente par le médecin au regard de l'ensemble des particularités et de la situation du patient.
M. le président. L'amendement n° 277 rectifié n'est pas soutenu.
Les deux amendements suivants sont également identiques.
L'amendement n° 173 rectifié est présenté par MM. Sol et Milon, Mme Micouleau, M. J.B. Blanc, Mme Malet, MM. Anglars et Chatillon, Mme M. Mercier, M. Panunzi, Mme Dumont, MM. Daubresse et Naturel, Mme Richer, MM. Hugonet et Sido, Mme Petrus, MM. Khalifé, Brisson, H. Leroy, Somon, Burgoa et Houpert, Mmes P. Martin et Imbert et MM. Belin, Delia et Meignen.
L'amendement n° 222 est présenté par Mmes Silvani, Apourceau-Poly et Brulin, MM. Barros, Savoldelli et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 8
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Jean-Claude Anglars, pour présenter l'amendement n° 173 rectifié.
M. Jean-Claude Anglars. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour présenter l'amendement n° 222.
Mme Céline Brulin. Nous proposons, par cet amendement, de supprimer l'alinéa 8 de l'article 17.
Il me semble que cet article – c'est, en tout cas, la lecture que j'en fais – visait à s'attaquer aux centres de santé privés qui prolifèrent sur fond de désertification médicale, et dont un certain nombre ont été convaincus de fraude, pour ne pas dire pire. Si je peux souscrire à cet objectif de lutte contre des cabinets privés assez peu recommandables, je considère que le fait de priver les médecins de leur liberté de prescription n'est pas la bonne solution.
Je fais partie de ceux dont les exigences sont nombreuses à l'égard des médecins, mais les priver de ce qui est le cœur de leur métier me semble délétère dans la période que nous vivons. En effet, pour le dire de manière un peu caricaturale, on leur demande en quelque sorte d'être des agents comptables de la sécurité sociale.
Or nous savons bien que les contrôles d'ores et déjà opérés sont très compliqués et peu convaincants, notamment parce qu'un délai important sépare la prescription du contrôle, ce qui fausse l'analyse de la pertinence médicale. Je peux vous assurer, car j'ai en tête de nombreux exemples que je n'aurai malheureusement pas le temps de développer, que la typologie des patients, qui peuvent développer des pathologies différentes selon leur condition sociale ou la profession qu'ils exercent, n'est pas du tout prise en compte.
Ces dispositions portent donc un coup terrible à la relation de confiance, primordiale, qui doit prévaloir entre un médecin et son patient, en lui substituant une sorte de rapport de subordination administrative qui me semble très dangereux pour l'ensemble de la profession et les patients.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Olivier Henno, rapporteur de la commission des affaires sociales. Mon argumentaire sera identique pour les trois amendements en discussion commune. Selon nous, il ne s'agit aucunement, avec ces dispositions, de remettre en cause la liberté de prescription. Si tel était le cas, la commission serait évidemment favorable à ce que nos collègues proposent.
Dans tout ce que nous faisons, notamment en matière de lutte contre la fraude, la question de la proportionnalité est essentielle.
Ces amendements, pour être clair, visent à supprimer la possibilité pour l'assurance maladie de rendre obligatoire la mise sous objectif pour les médecins surprescripteurs. Or cette mise sous objectif est un outil efficace et, je le répète, proportionné de régulation des dépenses de santé couvertes par l'assurance maladie. Elle permet une réduction de 30 % en moyenne des prescriptions sous sanction, tout en respectant le principe du contradictoire. Je ne peux donc pas laisser passer ce que je viens d'entendre à l'instant. Par ailleurs, 30 % des procédures sont abandonnées après les observations du médecin, ce qui montre qu'il s'agit d'une vraie procédure contradictoire.
Encore une fois, cette mesure sanctionne non pas une faute, mais une pratique objectivement surprescriptive, identifiée à partir d'un taux de prescription deux fois supérieur à la moyenne et au plus près du terrain. Une correction a été apportée en 2022 après que des abus de l'assurance maladie ont été constatés : il s'agit d'être encore plus précis, car, effectivement, la surprescription n'est pas la même partout. Ainsi, depuis septembre dernier, le ciblage est le plus fin possible. Il prend en compte la typologie de la patientèle, les caractéristiques socioéconomiques et l'offre de soins locale.
La mesure, proportionnée – j'y insiste –, ne concerne qu'une extrême minorité de praticiens, ceux qui abusent, c'est-à-dire 0,4 % des médecins en 2024. Ces derniers sont alors suivis individuellement par un pair.
Si nous voulons vraiment lutter contre la fraude, il faut rejeter ces amendements. La commission émet par conséquent un avis défavorable.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Stéphanie Rist, ministre de la santé, des familles, de l'autonomie et des personnes handicapées. En complément, je dirai que la proportion de professionnels de santé qui abusent et qui fraudent est faible. Il y en a toutefois, et ce pour un montant estimé à 2 milliards d'euros par le Haut Conseil du financement de la protection sociale (HCFiPS).
L'article 17 s'articule autour de trois axes. Premièrement, il lève l'interdiction de cumuler la sanction conventionnelle et la sanction financière. Deuxièmement, il étend le champ du contrôle de la surprescription aux centres de santé et aux plateformes, qui ne sont aujourd'hui contrôlés que par rapport aux seules indemnités journalières. Troisièmement, il rend obligatoire la mise sous objectif pour les surprescripteurs détectés.
Par conséquent, j'émets un avis défavorable sur tous ces amendements en discussion commune.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Monsieur le rapporteur, on ne peut pas prendre pour argument la baisse de 30 % des prescriptions. Lors de leur audition par la commission des affaires sociales – si l'on ne tire aucune conséquence des auditions, autant ne plus en faire ! –, les représentants du syndicat des médecins généralistes (MG France) ont en effet indiqué que c'est la menace d'une pénalité de 30 % qui poussait les médecins à se conformer aux préconisations. En clair, c'est soit payer une pénalité, soit assumer de renouveler un arrêt de travail…
Or la prise en compte de la situation clinique et personnelle d'un patient peut conduire les praticiens à ne pas respecter les recommandations, lesquelles ne sont après tout que des repères de bonnes pratiques ou de simples informations données aux médecins. Il n'y a pas, face à une pathologie donnée, des médecins qui respectent les préconisations et d'autres qui surprescrivent.
Vous affirmez, monsieur le rapporteur, que le dispositif est efficace, car les médecins baissent leurs prescriptions. Oui, mais ils ne le font que parce qu'autrement ils pairaient ! Ils ne sont pas convaincus pour autant et maintiennent que c'est à la CPAM, dans ce cas-là, d'agir de façon autoritaire. Ils ne sont pas d'accord avec le transfert de responsabilité qui s'est opéré de la CPAM vers eux.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Anglars, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Anglars. Au vu des explications qui viennent d'être données par M. le rapporteur et Mme la ministre, je retire mon amendement.
M. le président. L'amendement n° 173 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 113.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 222.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 96, présenté par M. Fichet, Mme Canalès, MM. Lurel, Jacquin et Kanner, Mmes Le Houerou, Conconne et Féret, M. Jomier, Mmes Lubin, Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 11
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Jean-Luc Fichet.
M. Jean-Luc Fichet. L'alinéa 11 a été introduit dans le texte sur l'initiative des rapporteurs. Il tend à mettre fin au remboursement par l'assurance maladie des produits de santé et des prestations prescrites par un professionnel de santé déconventionné durant la période de la sanction. Cela revient à sanctionner non pas seulement les praticiens, mais également leurs patients. Nous ne pouvons l'accepter, les patients n'étant pour rien dans les faits reprochés au professionnel concerné.
Cette mesure pourrait avoir des conséquences très concrètes, comme des ruptures de soins, notamment dans les territoires déjà en tension où trouver un autre praticien conventionné relève parfois du parcours du combattant.
Selon France Assos Santé, 60 % des Français renoncent à des soins ou les reportent pour des raisons financières. Si, en plus, ils ne sont pas remboursés quand ils consultent un médecin déconventionné, cela va poser problème.
Il n'en reste pas moins que nous pourrons nous interroger, en d'autres temps, sur le déconventionnement et le fonctionnement du secteur 3 en médecine.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Olivier Henno, rapporteur. Cet amendement vise à revenir sur le déremboursement des prescriptions des professionnels de santé déconventionnés pour fraude, voté en commission la semaine dernière.
Le déremboursement des prescriptions durant la période de déconventionnement apparaît pourtant nécessaire, car il traduit la rupture de confiance entre l'assurance maladie et le professionnel de santé fautif. Il constitue aussi, il faut le dire, un instrument dissuasif essentiel pour lutter contre la récidive.
Contrairement à ce que je viens d'entendre, cette disposition n'aura pas d'effet significatif sur l'accès aux soins dans la mesure où celle-ci est, je le redis, proportionnée, puisqu'elle ne concernera que soixante-dix médecins par an, soit un nombre marginal à l'échelle nationale.
Je n'ai pas un goût prononcé pour la polémique, mais permettez-moi tout de même de relever que vous allez défendre dans quelques instants l'amendement n° 94, qui vise au contraire à étendre le déremboursement à tous les médecins déconventionnés. Allez chercher la logique ! Étrangement, vous ne voyez là aucun risque de rupture dans l'accès aux soins. (Mme Raymonde Poncet Monge proteste.)
L'alinéa 11 prévoyant un dispositif proportionné, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Vous souhaitez, monsieur le sénateur, supprimer le déremboursement des prescriptions des médecins déconventionnés pour fraude.
Nous avons eu ce débat en première lecture à l'Assemblée nationale, lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS). Un amendement visant à dérembourser toutes les prescriptions des médecins déconventionnés a été adopté. Nous aurons donc l'occasion d'en discuter ici aussi, au Sénat, dans quelques jours.
Pour l'heure, je m'en remettrai à la sagesse du Sénat sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Fichet, pour explication de vote.
M. Jean-Luc Fichet. Il faut faire une distinction entre les médecins déconventionnés et sanctionnés pour avoir commis une infraction et les médecins qui s'installent et font le choix de ne pas être conventionnés.
Les patients qui consultent un médecin non conventionné savent à qui ils s'adressent et que leur consultation sera à leur charge, qu'elle ne leur sera pas remboursée. En revanche, les patients ne sont pas forcément informés du fait que leur médecin a été sanctionné et qu'il est donc déconventionné. Dans ce cas, ils pourraient être pénalisés.
Il y a là une nuance qu'il convient de souligner.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Le déconventionnement et le choix volontaire d'exercer en secteur 3 sont deux choses tout à fait différentes. La consultation d'un médecin en secteur 3 est remboursée à hauteur d'un euro à peine. C'est déjà une forme de pénalité pour le patient.
L'amendement adopté dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, que Mme la ministre a évoqué, pose la question de savoir si l'on doit continuer de rembourser les prescriptions d'un médecin qui n'est pas conventionné. Ce cas de figure n'a rien à voir avec celui que vient de mentionner notre collègue, celui d'un médecin déconventionné pour fraude : ne conviendrait-il pas dans cette situation de procéder au remboursement des prescriptions, sachant que les patients pourraient pendant un certain temps ne pas être au courant du déconventionnement ?
M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour explication de vote.
Mme Céline Brulin. Nous soutiendrons cet amendement. L'alinéa 11, qui a été introduit en commission par voie d'amendement, reporte sur les patients la punition qui devrait en fait être infligée aux médecins fraudeurs.
Je vous propose de passer en revue tous les articles du projet de loi et d'appliquer à chacun d'eux le même principe qu'ici, à savoir mettre à contribution tous ceux qui dépendent de fraudeurs. Cela va vous faire bizarre !
Dans une société idéale, tout le monde aurait accès à un médecin et pourrait, comme le permet le système de santé en France, choisir son praticien. Or, aujourd'hui, ce n'est plus possible, six millions de Français étant sans médecin traitant.
J'entends qu'un faible nombre de médecins – fort heureusement ! – seraient concernés par la disposition prévue à l'alinéa 11. Néanmoins, des patients pourraient se retrouver contraints de consulter un médecin ayant été déconventionné après avoir commis une fraude sans aucune possibilité de consulter qui que ce soit d'autre, ce qui serait une double peine. Soit ils paieront pour leur médecin, soit, s'ils s'y refusent, ils se retrouveront sans médecin.
On parle beaucoup de proportionnalité des sanctions ; nous en sommes ici assez loin.
M. le président. L'amendement n° 130 rectifié bis, présenté par Mme Demas, M. Séné, Mmes Aeschlimann, Imbert, Ventalon et Joseph, M. Lefèvre, Mme Micouleau, MM. Burgoa et Sido, Mmes Primas et Evren, MM. Anglars, Brisson et Panunzi, Mmes Dumont, Belrhiti, Gosselin, Josende et Petrus et MM. Belin et Bruyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par deux alinéas ainsi rédigés :
.... ° Après le troisième alinéa de l'article L. 162-15-1, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« En cas de fraude individuelle avérée au cours des deux dernières années pour un montant au moins égal à huit fois le plafond mensuel de la sécurité sociale par un professionnel de santé alors qu'il est ou était salarié d'une structure conventionnée, la caisse primaire d'assurance maladie peut refuser de placer ce professionnel de santé sous le régime conventionnel. Un décret fixe les modalités d'application du présent alinéa, notamment la durée maximale de refus du conventionnement. En cas de récidive dans les cinq ans, le précédent alinéa s'applique. »
La parole est à Mme Marie-Do Aeschlimann.
Mme Marie-Do Aeschlimann. L'article L. 162-15-1 du code de la sécurité sociale permet déjà aux caisses primaires d'assurance maladie de renforcer leur contrôle sur les professionnels de santé. Toutefois, lorsque les structures sont fermées pour fraude, certains professionnels impliqués peuvent reconventionner leur activité individuelle sans obstacle, alors même que leurs agissements ont été établis.
Si cet amendement de notre collègue Patricia Demas était adopté, les caisses primaires d'assurance maladie pourraient refuser temporairement le conventionnement du professionnel concerné si la fraude individuelle était avérée au cours des deux dernières années et si le montant de la fraude était substantiel, en l'occurrence s'il était au moins égal à huit fois le plafond mensuel de la sécurité sociale.
Cet amendement est essentiel pour rendre les conséquences de la fraude plus tangibles. Il s'agit, au fond, de responsabiliser les professionnels sans déséquilibrer le système de santé.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Olivier Henno, rapporteur. La disposition proposée est à la fois justifiée et proportionnée. La commission y est favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Cet amendement tend à introduire une proposition figurant dans le rapport Charges et produits pour 2026 de la Caisse nationale de l'assurance maladie (Cnam). J'y suis favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 130 rectifié bis.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 17, modifié.
(L'article 17 est adopté.)
Après l'article 17
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 106 rectifié, présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
Après l'article 17
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au premier alinéa de l'article L. 114-17-1-1 du code de la sécurité sociale, les mots : « peut procéder à l'annulation de tout ou partie de » sont remplacés par les mots : « procède à l'annulation de toute ».
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Cet amendement vise à permettre à l'assurance maladie de récupérer l'ensemble des cotisations sociales du professionnel de santé qu'elle a prises en charge lorsque celui-ci est reconnu coupable de faits à caractère frauduleux.
Je rappelle, puisque nous traitons de la fraude sociale, que, selon le Haut Conseil du financement de la protection sociale, 10 % de la fraude sociale provient de la facturation par des professionnels de santé de prestations indues, 56 % de cette fraude étant imputable à l'évitement des cotisations sociales. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 a instauré la possibilité de recouvrer la participation de l'assurance maladie au financement des cotisations du professionnel frauduleux, mais cette mesure peut ne porter que sur une partie du financement et demeure facultative.
Le présent amendement vise à supprimer ce caractère facultatif afin de faire de la récupération de l'intégralité des cotisations prises en charge le principe premier. Il ne tend toutefois pas à remettre en cause le pouvoir d'appréciation de l'administration selon les circonstances, qui devrait exister dans tous les champs de la lutte contre la fraude, y compris lorsque l'appréciation au cas par cas demeure nécessaire.
On nous oppose que c'est pour permettre le recouvrement que l'on ne procède qu'à un recouvrement partiel. Je rappelle que nous avons précédemment supprimé la totalité des allocations de certains bénéficiaires et doublé le montant des amendes afin de les rendre dissuasives.
Nous devons donc recouvrer la totalité des sommes, et non une partie seulement, comme on le fait pour toutes les personnes morales ou physiques qui ont fraudé.
M. le président. L'amendement n° 88, présenté par M. Fichet, Mme Canalès, MM. Lurel, Jacquin et Kanner, Mmes Le Houerou, Conconne et Féret, M. Jomier, Mmes Lubin, Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l'article 17
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au premier alinéa de l'article L. 114-17-1-1 du code de la sécurité sociale, les mots : « peut procéder » sont remplacés par le mot : « procède ».
La parole est à M. Jean-Luc Fichet.
M. Jean-Luc Fichet. Cet amendement vise à rendre automatique l'annulation par l'assurance maladie de sa prise en charge des cotisations sociales d'un professionnel de santé reconnu coupable de faits à caractère frauduleux.
Aujourd'hui, lorsqu'un professionnel de santé commet une fraude au détriment de la sécurité sociale, il peut être sanctionné pénalement ou financièrement, mais l'annulation de la prise en charge de ses cotisations sociales n'est pas systématique. Elle relève d'une appréciation au cas par cas, ce qui crée une forme d'incohérence dans le traitement des situations et peut aboutir à une inégalité de traitement entre les auteurs de faits similaires.
Nous considérons qu'un professionnel de santé qui a bénéficié de la solidarité nationale pour le paiement de ses cotisations commet une double faute lorsqu'il fraude : il manque de probité professionnelle et de sens de la responsabilité collective.
La sécurité sociale, rappelons-le, n'est pas un fonds abstrait ; c'est le patrimoine commun de celles et ceux qui n'ont rien d'autre. Détourner ses ressources, c'est porter atteinte à un pilier de notre modèle social.
Il est donc légitime de prévoir une sanction automatique et de ne pas laisser de place à l'arbitraire. En votant cet amendement, nous renforcerions notre crédibilité en matière de lutte contre la fraude et nous adresserions un message clair : tout professionnel reconnu coupable verra la prise en charge de ses cotisations sociales par l'assurance maladie automatiquement annulée.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Olivier Henno, rapporteur. Nous ne portons pas le même regard sur ces deux amendements en discussion commune.
La commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 106 rectifié, qui tend à prévoir une obligation d'annulation totale.
L'amendement n° 88 vise, quant à lui, à prévoir une annulation partielle ou complète de la prise en charge des cotisations sociales sur les revenus indus d'un professionnel de santé reconnu coupable de fraude. Le principe de gradation et de personnalisation de la sanction par le directeur de la caisse primaire d'assurance maladie est ainsi respecté. La commission émet donc un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Monsieur le rapporteur, nous faisons une lecture quelque peu différente de ces deux amendements. Une sanction administrative doit être personnalisée, elle ne peut donc pas être automatisée. Pour cette raison, j'émets un avis défavorable sur ces amendements.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Je retire mon amendement au profit de l'amendement n° 88 de mon collègue Jean-Luc Fichet.
Je constate tout de même que les arguments développés sont véritablement orthogonaux selon que l'on parle des assurés, d'auteurs de fraude fiscale, ou des professionnels de santé, dont le montant des fraudes équivaut pourtant aux deux tiers du montant global des fraudes sociales.
Pour les professionnels de santé, on dispose d'un pouvoir d'appréciation, on tient compte de la situation et on personnalise la sanction ; pour les assurés, en revanche, on récupère tout et on double le montant des amendes !
Vous avez eu tort de traiter dans un même projet de loi la fraude sociale et la fraude fiscale, parce que cela crée une équivalence entre des individus qui ne jouent pas dans la même cour, un peu comme si vous faisiez jouer les uns contre les autres des clubs de football de Ligue 1 et de Ligue 2. Mais, après tout, tant mieux, car cela montre que vous ne justifiez pas de la même manière la fraude imputable aux professionnels de santé et celle des bénéficiaires du RSA ou de la prime d'activité. Je précise que cela ne signifie pas que nous défendons ces derniers.
Quand on demande des sanctions proportionnées, la prise en compte de la situation personnelle et un pouvoir d'appréciation pour les assurés, on nous dit non. À l'inverse, on nous oppose qu'on ne peut pas récupérer la totalité des sommes fraudées par les professionnels de santé.
Mme Stéphanie Rist, ministre. Madame la sénatrice, les infirmières qui commettent des fraudes sont également concernées par cet article. Nous ne faisons preuve, me semble-t-il, d'aucune incohérence.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 88.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 17.
L'amendement n° 171 rectifié bis, présenté par MM. Iacovelli, Théophile et Patriat, Mme Havet et M. Buis, est ainsi libellé :
Après l'article 17
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le I de l'article L. 133-4 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, après le mot : « tarification, » , sont insérés les mots : « de prescription, » ;
2° Au deuxième alinéa, après la première occurrence du mot : « articles » , est insérée la référence : « L. 160-8, » et, après la référence : « L. 162-1-7, », est insérée la référence : « L. 162-4, ».
La parole est à M. Xavier Iacovelli.
M. Xavier Iacovelli. Cet amendement vise à renforcer l'efficacité du dispositif de lutte contre la fraude à l'assurance maladie en complétant l'article L. 133-4 du code de la sécurité sociale. Nous proposons d'y intégrer explicitement le contrôle par les organismes de prise en charge du respect de certaines règles de prescription.
La qualité et les conditions de réalisation des prescriptions conditionnent l'ouverture du droit au remboursement. Lorsqu'une prescription ne respecte pas les règles, le remboursement ne doit pas être automatique.
Cet amendement vise donc à permettre de mieux identifier la responsabilité de chaque acteur en cas de manquement ou de fraude, qu'il s'agisse du prescripteur, du professionnel de santé ou de la structure qui en dépend.
Il tend par ailleurs à sanctionner les dérives constatées pour certains actes de télésanté, des prescriptions réalisées en dehors des règles ayant entraîné des prises en charge indues par la collectivité.
En somme, il s'agit d'un amendement de bon sens et de justice, qui a pour objet de renforcer la cohérence, la lisibilité et l'équité du dispositif de lutte contre la fraude dans le domaine de la santé.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Olivier Henno, rapporteur. Je rappelle la doctrine de la commission, que l'on peut résumer en une phrase : lutter contre toutes les fraudes, partout et tout le temps. Nous portons donc un regard juste tant sur la fraude fiscale que sur la fraude sociale. Pourquoi faudrait-il être plus indulgent avec l'une qu'avec l'autre ?
Mme Raymonde Poncet Monge. Ce n'est pas pareil !
M. Olivier Henno, rapporteur. Tous ceux qui fraudent doivent être sanctionnés.
L'objet du présent projet de loi est de mieux détecter, de récupérer et de sanctionner davantage, dans le respect des principes de graduation et de proportionnalité.
Nous émettons un avis défavorable sur cet amendement, qui vise à étendre le champ des sanctions financières. Il nous semble en effet que le dispositif proposé dépasse la limite et qu'il vient porter atteinte à la liberté de prescription des professionnels de santé, qui nous est chère.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Pour les mêmes raisons, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Iacovelli, l'amendement n° 171 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Xavier Iacovelli. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 171 rectifié bis est retiré.
L'amendement n° 115, présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
Après l'article 17
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le III de l'article L. 133-4-2 du code de la sécurité sociale, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :
« … – En cas de nouvelle constatation de travail dissimulé dans les cinq ans à compter de la notification d'une première constatation de travail dissimulé ayant donné lieu à redressement auprès de la même personne morale ou physique, la majoration est portée à :
« 1° 90 % lorsque la majoration de redressement prononcée lors de la constatation de la première infraction était de 25 % ;
« 2° 120 % lorsque la majoration de redressement prononcée lors de la constatation de la première infraction était de 40 %. »
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Cet amendement vise à aggraver les sanctions en cas de fraude aux cotisations patronales. Nous ne demandons pas pour autant de doubler le montant des amendes, contrairement à ce que nous avons fait précédemment…
Selon le rapport de juillet 2024 du Haut Conseil du financement de la protection sociale, le réseau de l'Urssaf est la première victime de la fraude sociale, dont le montant s'élève à près de 7 milliards d'euros – 6,91 milliards d'euros précisément. L'essentiel de la fraude sociale trouve son origine dans les pertes associées aux cotisations.
La fraude aux cotisations, qui constitue une perte de recettes pour la sécurité sociale, représente 56 % de la fraude sociale. Selon le Haut Conseil, cette estimation est minorée, car elle ne prend pas en compte les redressements comptables d'assiettes de 4,6 milliards d'euros, dont une partie est nécessairement intentionnelle. Le montant de la fraude s'élève donc à près de 12 milliards d'euros.
La nature des sanctions et le montant des amendes actuelles doivent être plus dissuasifs. Aussi proposons-nous d'alourdir les sanctions en cas de fraude aux cotisations.
Un amendement similaire avait été adopté en séance publique à l'Assemblée nationale lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025, mais, comme par hasard, celui-ci n'avait pas été retenu par le gouvernement de Michel Barnier lors de la transmission du texte au Sénat.
Il convient de faire en sorte que la fraude aux cotisations ne devienne pas un jeu partiellement gagnant pour les employeurs.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Je vais répondre avec calme, ma chère collègue, même si j'apprécie peu la tonalité de cette présentation.
Cet amendement vise, en cas de nouvelle constatation de travail dissimulé dans les cinq ans à compter de la notification d'une première constatation de travail dissimulé, à majorer la sanction pour fraude. Nous sommes tous, dans cet hémicycle, mobilisés pour lutter contre le travail dissimulé et, singulièrement, contre les récidives de fraudes de cette nature.
Cela étant, je rappelle, ma chère collègue, que vous aviez initialement déposé deux amendements, le premier visant à augmenter de façon très proportionnée la majoration existante. Nous l'avons accepté et fait voter en commission, considérant qu'il était proportionné. Le second, que vous venez de présenter, ne l'est pas ; nous l'avions rejeté.
Nous aurions apprécié que cet amendement ne soit pas redéposé en séance, voire que l'avis de la commission soit pris en compte et que l'amendement soit retiré, ce qui nous aurait fait gagner un peu de temps.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
Mme Laurence Rossignol. C'est quoi ce mépris ?
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Même avis.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Je ne sais pas si d'autres verront dans le dépôt de cet amendement une marque de mépris. Quoi qu'il en soit, nous ne sommes pas à l'école, madame la rapporteure !
Je l'ai dit lors de la discussion générale – et vous me trouvez pourtant ingrate, madame la rapporteure –, j'ai beaucoup apprécié le fait que la commission ait retenu notre amendement tendant à majorer de 10 % les sanctions encourues en cas de travail dissimulé. Ce fut une surprise, c'est vrai, une heureuse surprise, mais alors que le montant de la fraude aux cotisations, je l'ai dit, atteint 12 milliards d'euros, combien récupérons-nous au bout du compte ? Ce n'est pas sérieux !
Si le nombre d'inspecteurs de la direction générale des finances publiques n'avait pas été divisé par quatre, nous n'en serions peut-être pas là aujourd'hui. Vous savez que chaque poste d'inspecteur créé rapporte plus d'argent qu'il en coûte. Nous devrions donc en augmenter le nombre et récupérer tous les postes qui ont été supprimés depuis dix ans.
Aujourd'hui, le travail dissimulé partiel est un jeu gagnant, que ce soit dans le BTP ou dans la restauration. C'est dans ces deux grands secteurs, on le sait, que l'on pratique le plus la dissimulation, seule une partie des heures travaillées étant déclarées. Les fraudeurs font un calcul mathématique, considérant que s'ils sont pris, ils seront gagnants. Ce sera le cas tant que le montant des amendes ne sera pas suffisamment dissuasif. Vous pouvez ne pas partager cet avis, madame la rapporteure, mais je maintiens mon amendement.
Encore une fois, je suis contente que notre amendement ait été retenu, mais je le redis : nous ne sommes pas à l'école. J'apprécierais que l'on ne me considère pas comme ingrate ou que l'on ne dise pas que l'on ne goûte pas le fait que je maintienne mon amendement.
M. le président. L'amendement n° 12 rectifié decies, présenté par Mme N. Goulet, MM. Canévet, Bitz, Dhersin, Fargeot, Fialaire, Laugier, Maurey et Salmon, Mmes Sollogoub, Tetuanui, Antoine et Guidez, MM. Kern, Lafon et Menonville, Mmes Vermeillet et Saint-Pé, M. Pillefer, Mmes Perrot et Guillotin, MM. Gold et Courtial, Mme Jacquemet et MM. Masset, Cabanel et Haye, est ainsi libellé :
Après l'article 17
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans les six mois qui suivent la publication de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur la situation exacte du répertoire national inter-régimes des bénéficiaires de l'assurance maladie et sur le nombre de bénéficiaires de cartes vitales par classes d'âge, ainsi que sur le nombre de contrôles effectués sur la base des articles L. 114-10-1 et L. 114-10-2 du code de la sécurité sociale.
La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Mme Nathalie Goulet. Je vais redire en partie ce que j'ai déjà dit au cours de la discussion générale : il est assez rafraîchissant, madame, monsieur le ministre, d'avoir de nouveaux ministres au banc du Gouvernement, cela m'évite d'avoir l'impression de radoter alors que je réclame les mêmes dispositifs depuis des années. (Sourires.)
Selon trois rapports de la Cour des comptes, que je tiens à votre disposition, la comparaison entre le répertoire national inter-régimes des bénéficiaires de l'assurance maladie (Rniam), et le recensement de la population française par l'Insee fait apparaître un écart d'environ 2,5 millions d'assurés ne répondant pas ou plus aux conditions d'activité ou de résidence stable en France. Dans le rapport sur la certification des comptes de la sécurité sociale pour l'exercice 2021, ce constat figure à la page 72 ; dans celui sur l'exercice 2023 à la page 43 ; dans celui sur l'exercice 2024 à la page 40.
Dans un rapport d'avril 2023, l'inspection générale des affaires sociales (Igas) estime, quant à elle, qu'« avec d'importantes approximations structurelles dans les données existantes sur les populations résidentes et assurées, l'exploration de l'écart entre les deux dénombrements semble aporétique. »
En conséquence, 2,5 millions de personnes bénéficient de notre système de santé, alors qu'elles ne répondent pas aux conditions de résidence et qu'elles ne sont pas affiliées. J'ai essayé à plusieurs reprises d'obtenir des explications. Nous avons eu plusieurs débats avec le juge Prats, entre autres, mais nous n'en avons toujours pas.
D'année en année, la Cour des comptes constate un écart entre le nombre des bénéficiaires du Rniam et le recensement de la population française par l'Insee. C'est pour en finir avec cette question que je vous demande la remise d'un rapport.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Olivier Henno, rapporteur. Je ne nie pas qu'il y ait un problème. Toutefois, sur cet amendement, je vais m'en tenir à la doctrine du Sénat concernant les demandes de rapport : avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. En fait, les bases qui alimentent l'Insee et le Rniam ne sont pas les mêmes. L'Insee est alimenté par une base d'état civil d'identification des individus et le Rniam par la base spécifique à l'assurance maladie, qui s'appuie sur le répertoire national d'identification des personnes physiques (RNIPP).
Ces bases n'ont pas le même périmètre, notamment en ce qui concerne les entrées et les sorties – surtout les sorties. Quand une personne n'a plus de droits auprès de l'assurance maladie, elle sort par exemple du Rniam la deuxième année, alors qu'elle ne sort de la base de l'Insee qu'une fois qu'elle est décédée. Il y a donc effectivement des chevauchements, qui expliquent les différences de chiffres que vous relevez, madame la sénatrice.
On pourrait effectuer des travaux pour rapprocher les deux bases, mais cela n'apporterait pas grand-chose aux assurés sociaux. J'émets donc un avis défavorable sur votre amendement.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Madame la ministre, cette explication d'un écart constaté de 2,5 millions de personnes en vaut une autre.
Concrètement, lorsque le contrat de travail d'un étranger en France se termine, son titre de séjour expire, mais sa carte Vitale n'est pas désactivée. L'Igas explique qu'entre 250 000 et 500 000 personnes continuent ainsi de bénéficier de droits, alors que leur condition de résidence n'est plus remplie. C'est comme si vous aviez un permis de conduire, que vous ne voyiez plus clair, mais que vous continuiez de conduire !
Je ne comprends pas cette obstination à ne pas nous donner d'explications, que nous sommes pourtant tout à fait prêts à entendre. Nous les avons ainsi entendues sur les cartes Vitale… Le problème se pose depuis des années.
En tout cas, je ne suis pas du tout satisfaite de votre explication, madame la ministre, mais ce n'est pas grave. Nous reparlerons de ce sujet lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale ; j'en ai l'habitude. Et je suis là jusqu'en 2029 ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Stéphanie Rist, ministre. Madame la sénatrice, un rapport dans lequel on expliquerait que les bases utilisées et la prise en compte des entrées et des sorties sont différentes ne permettra pas de régler le problème. Ensuite, l'assurance maladie travaille sur ce sujet pour essayer de faire coïncider au plus près les cotisants et les bénéficiaires des droits. À mon sens, il vaut mieux compter sur cette démarche pour améliorer la situation plutôt que sur un rapport.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 12 rectifié decies.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 17 bis (nouveau)
Au I de l'article L. 243-7-7 du code de la sécurité sociale, le taux : « 25 % » est remplacé par le taux : « 35 % » et le taux : « 40 % » est remplacé par le taux : « 50 % » – (Adopté.)
Article 17 ter (nouveau)
L'article L. 161-36-4 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Un décret prévoit les conditions dans lesquelles le bénéfice du tiers payant peut être suspendu temporairement à l'égard d'un assuré sanctionné ou condamné à la suite de la constatation, par un organisme d'assurance maladie, de l'obtention ou de la tentative d'obtention frauduleuse de prestations, notamment à l'aide de faux documents ou de fausses déclarations. »
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 98 est présenté par M. Fichet, Mme Canalès, MM. Lurel, Jacquin et Kanner, Mmes Le Houerou, Conconne et Féret, M. Jomier, Mmes Lubin, Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L'amendement n° 114 est présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Marion Canalès, pour présenter l'amendement n° 98.
Mme Marion Canalès. L'objet initial de cet article 17 ter – je dirais même son esprit et sa lettre – était de permettre à l'assurance maladie de sanctionner les comportements des professionnels de santé à l'origine d'un préjudice. La commission, par l'intermédiaire de ses rapporteurs, a estimé qu'il manquait, dans le dispositif, une référence aux assurés, et qu'il était indispensable d'évoquer de nouveau la potentielle fraude de ces derniers.
Je me fonde, une fois de plus, sur l'étude d'impact. En 2024, 800 pénalités ont été infligées par les CPAM aux offreurs de soins, pour un montant total de 628 millions d'euros de fraudes détectées et stoppées. Au total, 68 % des sanctions concernaient les professionnels ; environ 18 % de celles-ci avaient trait aux assurés, et ce pour des volumes extrêmement faibles.
Je comprends que vous vouliez rappeler régulièrement la responsabilité des assurés en matière de fraude. Cependant, pour le groupe socialiste, cette nouvelle disposition est quelque peu accessoire : supprimer le tiers payant à des assurés fraudeurs déjà sanctionnés nous semble même disproportionné. Nous sommes certes évidemment favorables à la sanction de la fraude et à la fermeté, mais, en l'occurrence, le fraudeur a déjà été condamné et sanctionné. Avec cet article, on propose en plus de lui retirer le bénéfice du tiers payant !
Cette mesure soulève des difficultés au regard du principe de proportionnalité. Hier déjà, je disais qu'il ne fallait pas sortir un bazooka pour abattre des mouches. En l'espèce, il s'agit d'une double peine. Certes, l'assuré en question a commis plus qu'une erreur, une erreur vraiment très grave, mais il a été sanctionné. Cette mesure risque surtout de renforcer le non-recours aux soins, alors que 60 % des Français déclarent déjà avoir renoncé à des soins, ou les avoir reportés.
Pour toutes ces raisons, nous souhaiterions que cet article, introduit dans le projet de loi par la commission, soit supprimé.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l'amendement n° 114.
Mme Raymonde Poncet Monge. Les dispositions de l'article 17 ter n'apparaissent ni proportionnées ni adaptées à l'objectif que l'on cherche à atteindre.
Vous êtes, je le sais, monsieur le rapporteur, attaché aux principes de gradation et de proportionnalité des sanctions : j'espère donc que vous nous suivrez sur ce point.
En prévoyant la suspension du bénéfice du tiers payant pour les assurés ayant commis une fraude, quelle qu'en soit la nature et quel qu'en soit le montant, cet article instaure une sanction uniforme qui peut se révéler manifestement excessive. Une personne ayant commis une fraude d'un montant minime pourrait ainsi se voir privée du bénéfice du tiers payant pour des dépenses bien plus importantes, telles que celles liées à une hospitalisation ou à un traitement innovant particulièrement coûteux. Une telle disposition méconnaît le principe de proportionnalité des sanctions et rompt tout lien entre la gravité de la faute et l'ampleur de ses conséquences.
Par ailleurs, la suspension du bénéfice du tiers payant constitue davantage une mesure de trésorerie qu'une véritable sanction. Elle ne remet pas en cause le droit au remboursement, mais uniquement la possibilité de ne pas avancer les frais. L'assuré reste remboursé a posteriori, ce qui rend cette mesure à la fois symbolique et peu pertinente. Elle ne répare aucun préjudice, ne modifie pas les droits, et se borne à imposer une contrainte administrative et financière temporaire.
L'argument d'un effet prétendument dissuasif n'est pas convaincant. Rien ne permet d'affirmer qu'une telle suspension découragerait les fraudeurs, d'autant que peu de personnes en ont connaissance avant le fait fautif.
En revanche, une telle mesure de rétorsion, car c'est bien de cela qu'il s'agit, n'existe pas dans les autres champs de la fraude. Ainsi, pour les fraudes massives aux cotisations, aucune mesure équivalente n'est prévue. Les entreprises redressées pour travail dissimulé ne se voient pas privées, même temporairement, des allègements généraux de cotisations sur les salaires à venir, que l'on pourrait pourtant suspendre six mois avant de les rétablir ensuite. De même, s'agissant des fraudes aux prestations des professionnels de santé, dont on vient de débattre, aucune disposition comparable n'existe.
Pour toutes ces raisons, nous proposons de supprimer cet article et de rétablir pleinement le principe de proportionnalité.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Olivier Henno, rapporteur. Un fraudeur est un fraudeur : il y a dans tous les cas de figure une forme de rupture de confiance, qui justifie une suspension temporaire du bénéfice du tiers payant. Ce dispositif constituera un frein à la récidive, une mesure efficace pour lutter contre toute fraude. C'est pourquoi la commission émet un avis défavorable sur ces deux amendements identiques.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Le tiers payant évite le renoncement aux soins. Le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. La parole est à Mme Marion Canalès, pour explication de vote.
Mme Marion Canalès. Nous sommes parfaitement d'accord avec M. le rapporteur : un fraudeur est un fraudeur. Hier, nous parlions des cabinets de conseil qui aident certaines entreprises à mettre en place des procédés constitutifs de fraude fiscale : on ne leur impose pas de double ou de triple peine ! Pourquoi s'en prendre à un dispositif annexe, le tiers payant, lorsqu'une personne est condamnée et assume sa peine – ce qui est normal ? Cela semble profondément disproportionné.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Madame la ministre, vous auriez dû aller jusqu'au bout de votre raisonnement et émettre un avis favorable sur nos amendements. Cela semble bien difficile, lorsqu'une proposition émane d'une certaine partie de l'hémicycle…
Vous avez raison de rappeler que le tiers payant sert avant tout à faire reculer le renoncement aux soins. Le fait de devoir avancer les frais conduira en effet, pour nombre de nos concitoyens, à un tel renoncement, ce qui, in fine, coûtera plus cher à la sécurité sociale.
Cette mesure est superfétatoire ; je comprends que, pour vous, en remettre une petite couche contre les assurés ne fait jamais de mal, mais, en l'occurrence, cela n'a pas lieu d'être.
Enfin, comment imaginer qu'une telle mesure soit dissuasive ? Croire que les assurés suivent nos débats dans le détail et sont au courant des dispositifs législatifs que nous votons relève de l'illusion. Le tiers payant joue un rôle dans l'accès aux soins. Il doit continuer à le faire et ne saurait devenir un instrument de rétorsion.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour explication de vote.
Mme Laurence Rossignol. J'ai une question à poser à ceux de nos collègues qui soutiennent l'article 17 ter, ou à ceux qui n'ont pas le courage de s'y opposer clairement : priver un individu de soins, est-ce une sanction juste et compatible avec la déontologie des médecins, avec l'État de droit et avec l'idée que nous nous faisons des droits humains ? On ne peut répondre que par oui ou par non. (Murmures désapprobateurs sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Olivier Henno, rapporteur. C'est une manœuvre dialectique bien connue que de réduire le débat à une opposition stérile entre partisans du « oui » et partisans du « non ». Il ne s'agit pas du tout de priver quiconque de soins. Il s'agit simplement de suspendre temporairement le bénéfice du tiers payant, parce qu'il nous semble que ce serait dissuasif. Alors, s'il vous plaît, pas de caricatures !
Mme Laurence Rossignol. On est pour ou contre !
M. Olivier Henno, rapporteur. En tous les cas, nous n'allons pas tomber dans votre piège, ma chère collègue, nous connaissons aussi la dialectique… (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 98 et 114.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 17 ter.
(L'article 17 ter est adopté.)
Après l'article 17 ter
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers amendements sont identiques.
L'amendement n° 38 rectifié quater est présenté par M. Menonville, Mme N. Goulet, MM. Laugier, Delahaye et Dhersin, Mme Saint-Pé, M. J.M. Arnaud, Mmes Antoine, Loisier et Romagny, MM. Levi et Kern, Mmes Jacquemet et Gacquerre et M. Haye.
L'amendement n° 91 rectifié est présenté par Mme Le Houerou, M. Fichet, Mme Canalès, MM. Lurel, Jacquin et Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Jomier, Mmes Lubin, Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 17 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° L'article L. 161-36-3 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est ainsi modifié :
– à la troisième phrase, après les mots : « l'organisme d'assurance maladie » , sont insérés les mots : « déclenche la procédure d'enquête ou » et les mots : « l'avant-dernier alinéa de » sont supprimés ;
– sont ajoutées deux phrases ainsi rédigées : « Ce décret fixe également les conditions et les limites dans lesquelles le tiers payant peut être suspendu, à l'issue des contrôles adéquats, dès l'envoi de la notification de placement hors de la convention ou de suspension de ses effets dans les conditions prévues à l'article L. 162-15-1. Ce décret détermine également le délai à l'expiration duquel le professionnel peut appliquer le tiers payant lorsque celui-ci est de nouveau placé sous le régime conventionnel à la suite d'une sanction ou condamnation pour fraude. » ;
b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Pour l'application des dispositions prévues au premier alinéa, il est tenu compte de l'ensemble des activités du professionnel à titre libéral ou au sein d'un ou plusieurs centres de santé. »
2° L'article L. 871-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Elles prévoient la suspension du mécanisme du tiers payant à compter de la date à laquelle les organismes d'assurance maladie complémentaire sont informés par l'organisme local d'assurance maladie de la mise en œuvre de la procédure visée à l'article L. 114-9 du code de la sécurité sociale pour des faits de nature à constituer une fraude ou de la notification de placement hors de la convention ou de suspension de ces effets dans les conditions prévues à l'article L. 162-15-1. »
La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour présenter l'amendement n° 38 rectifié quater.
Mme Nathalie Goulet. Cet amendement, déposé par notre collègue Franck Menonville, a pour objet d'autoriser la suspension du tiers payant complémentaire pour les professionnels de santé condamnés pour fraude.
M. le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour présenter l'amendement n° 91 rectifié.
Mme Annie Le Houerou. Cet amendement vise à lutter contre la fraude à l'assurance maladie et aux complémentaires santé, en agissant sur le tiers payant appliqué par certains professionnels de santé. Il s'agit de donner davantage de prérogatives à l'assurance maladie en lui permettant de suspendre le tiers payant dès l'ouverture d'une enquête ou dès la notification d'un déconventionnement.
Une telle mesure permettrait d'interrompre rapidement les versements injustifiés et de sécuriser la dépense publique. Le tiers payant constitue une avancée majeure pour les droits des personnes malades. Il garantit un accès aux soins pour toutes et tous, sans que les difficultés financières ne deviennent un obstacle. Il évite ainsi le renoncement aux soins.
Cependant, depuis quelques années, certains professionnels ont détourné ce dispositif à leur profit, au détriment des patients les plus vulnérables. D'après Alternatives économiques, qui reprend des estimations de la Caisse nationale de l'assurance maladie (Cnam), près des trois quarts des fraudes détectées, soit 237 millions sur 316 millions d'euros, résultent de professionnels de santé. Ces chiffres montrent l'importance qu'il y a à combler les déficits causés par les abus observés en matière de tiers payant, des abus qui détournent ce dispositif de sa fonction première de solidarité et d'accès aux soins.
Dans un contexte de maîtrise des dépenses sociales, il n'est pas acceptable de laisser se développer de telles pratiques. Celles-ci constituent une atteinte au système de santé, aux patients fragiles et aux principes éthiques qui régissent l'exercice médical.
Même si elle n'est en rien comparable à la fraude fiscale, la fraude aux prestations de l'assurance maladie atteint un montant que la Cour des comptes a évalué entre 3,8 et 4,5 milliards d'euros en 2023, soit plus du tiers du déficit de la branche cette année-là.
En renforçant les moyens d'action de l'assurance maladie, cet amendement vise à contribuer à la protection de notre système social et à garantir son bon fonctionnement.
M. le président. L'amendement n° 264 rectifié septies, présenté par Mmes Aeschlimann et Josende, MM. Khalifé et Panunzi, Mme Belrhiti, MM. Mizzon, Naturel et Laugier, Mme Gosselin, MM. Somon et Burgoa, Mme Bellamy, MM. Belin et H. Leroy, Mmes Micouleau et P. Martin, MM. Bruyen, Delia, Chatillon et Milon et Mmes Malet, Romagny, Guidez, Bellurot et Jacques, est ainsi libellé :
Après l'article 17 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa de l'article L. 161-36-3, les mots : « de l'avant-dernier » sont remplacés par les mots : « au quatrième ».
2° Le dernier alinéa de l'article L. 871-1 du code de la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Dans les conditions prévues à l'article L. 161-36-3, les organismes d'assurance maladie complémentaire peuvent déroger au délai maximal de paiement prévu pour le tiers payant. »
La parole est à Mme Marie-Do Aeschlimann.
Mme Marie-Do Aeschlimann. Par cet amendement, nous partons du constat qu'aujourd'hui un déséquilibre flagrant persiste dans notre système de lutte contre la fraude au tiers payant. L'assurance maladie dispose d'un outil essentiel : la possibilité de déroger au délai de remboursement en cas de contrôle pour fraude. Ce levier est efficace et permet de prévenir le versement d'indus à des professionnels faisant l'objet de contrôles.
En revanche, les organismes complémentaires, pourtant confrontés aux mêmes risques, se voient privés de cette possibilité. Cet amendement de bon sens vise donc à rétablir une égalité de traitement entre l'assurance maladie et les organismes complémentaires : nous souhaitons permettre aux organismes complémentaires de déroger également au délai de paiement du tiers payant pendant que les services de l'assurance maladie mènent leurs contrôles.
Enfin, il tend à corriger une erreur matérielle à l'article L. 161-36-3 du code de la sécurité sociale, afin de garantir la clarté et la précision de notre système juridique.
M. le président. L'amendement n° 274 rectifié septies, présenté par Mmes Aeschlimann et Josende, MM. Khalifé et Panunzi, Mme Belrhiti, MM. Mizzon, Naturel et Laugier, Mme Gosselin, MM. Somon et Burgoa, Mme Bellamy, MM. Belin et H. Leroy, Mmes Micouleau et P. Martin, MM. Bruyen, Delia, Chatillon et Milon et Mmes Malet, Romagny, Guidez, Bellurot et Jacques, est ainsi libellé :
Après l'article 17 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après la troisième phrase du premier alinéa de l'article L. 161-36-3 du code de la sécurité sociale, est insérée une phrase ainsi rédigée : « La dérogation au délai maximal comprend les activités du professionnel de santé exercées à titre libéral, au sein d'un ou plusieurs centres de santé ou sociétés de téléconsultation mentionnées à l'article L. 4081-1 du code de la santé publique. »
La parole est à Mme Marie-Do Aeschlimann.
Mme Marie-Do Aeschlimann. Nous avons vu, tout au long de ces dernières années, que certains professionnels détournaient la garantie de paiement liée au tiers payant à des fins frauduleuses.
L'article L. 161-36-3 du code de la sécurité sociale prévoit déjà la possibilité de suspendre le bénéfice du tiers payant pour un professionnel reconnu comme fraudeur. Mais, aujourd'hui, cette suspension ne s'applique qu'à l'activité concernée, quand bien même le professionnel exercerait parallèlement dans d'autres structures, parfois en téléconsultation ou sous d'autres statuts.
Cet amendement vise donc à garantir l'effectivité de la suspension du tiers payant lorsque le professionnel exerce dans différents lieux ou sous divers statuts. Il ne s'agit pas d'alourdir la sanction, mais d'en renforcer la cohérence et de garantir l'efficacité de la lutte contre la fraude à l'assurance maladie. Une fraude doit produire les mêmes effets, quel que soit le cadre d'exercice du professionnel de santé concerné.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Olivier Henno, rapporteur. Les deux amendements identiques nos 38 rectifié quater et 91 rectifié visent à déroger au délai de paiement maximal de remboursement du tiers payant pour les professionnels de santé dès l'ouverture d'une enquête pour fraude, mais aussi à suspendre le tiers payant dès la notification de la sanction de déconventionnement pour fraude, et non à la date d'effet du déconventionnement.
En allongeant les délais de remboursement du tiers payant dès l'engagement d'une enquête, cette disposition ne respecterait pas la présomption d'innocence qui s'applique aussi aux professionnels de santé. Il revient à l'assurance maladie, après avoir prouvé l'existence d'une fraude, de sanctionner le professionnel de santé et de récupérer l'indu après l'application de la sanction, pas avant. La suspension du tiers payant dès la notification d'une sanction de déconventionnement, quant à elle, violerait le droit au recours. La commission a donc émis un avis défavorable sur ces deux amendements.
L'amendement n° 264 rectifié septies tend à autoriser les complémentaires santé à déroger au délai maximal de paiement prévu pour le tiers payant, notamment en cas de dépôt de plainte pour fraude par l'assurance maladie. Une telle mesure respecte le principe de proportionnalité : on prévoit en effet de transposer aux complémentaires santé des prérogatives dont dispose déjà l'assurance maladie, ce qui renforcera la coordination dans la lutte contre la fraude. La commission a donc émis un avis favorable sur cet amendement.
La commission est également favorable à l'amendement n° 274 rectifié septies, qui vise à ce que l'ensemble des activités d'un professionnel de santé soient prises en compte pour la dérogation aux délais de paiement du tiers payant. Cette disposition renforcera les moyens dont dispose l'assurance maladie pour retarder temporairement le versement du tiers payant en cas de situation à risque, tout en sécurisant cette dérogation sur le plan juridique.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Je comprends qu'il faille mieux outiller les acteurs de la lutte contre la fraude que sont l'assurance maladie et les organismes complémentaires. Toutefois, le Gouvernement s'en remettra à la sagesse du Sénat sur ces quatre amendements en discussion commune. En effet, la mise en œuvre des différents dispositifs proposés paraît complexe et il semble qu'une expertise préalable de ceux-ci serait souhaitable.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 38 rectifié quater et 91 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 264 rectifié septies.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 17 ter.
Je mets aux voix l'amendement n° 274 rectifié septies.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 17 ter.
L'amendement n° 94, présenté par Mme Le Houerou, M. Fichet, Mme Canalès, MM. Lurel, Jacquin et Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Jomier, Mmes Lubin, Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l'article 17 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
I. – Après le 5° de l'article L. 162-4, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« ...° Lorsqu'ils prescrivent des produits, prestations et actes dans les conditions prévues au 26° de l'article L. 162-5. »
II. – L'article L. 162-5 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« L'ensemble des produits, prestations et actes ne sont pas remboursés par l'assurance maladie s'ils sont prescrits par un médecin qui n'est pas conventionné. Cette mesure s'applique pendant toute la durée au cours de laquelle le médecin n'est pas conventionné dans des conditions définies par décret. »
III. – L'article L. 162-32-1 est ainsi modifié :
1° Au début, est ajoutée la mention : « I. – » ;
2° Il est ajouté un paragraphe ainsi rédigé :
« II. – L'ensemble des produits, prestations et actes ne sont pas remboursés par l'assurance maladie s'ils sont prescrits par un médecin salarié mentionné à l'article L. 6323-1-5 du code de la santé publique travaillant dans un centre de santé qui n'est pas conventionné.
« Cette mesure s'applique pendant toute la durée au cours de laquelle le centre n'est pas conventionné dans des conditions définies par décret.
« Le centre de santé informe le patient que les produits, prestations et actes prescrits dans les conditions prévues au présent paragraphe ne seront pas remboursés par l'assurance maladie. »
La parole est à Mme Annie Le Houerou.
Mme Annie Le Houerou. Cet amendement a pour objet d'aligner le remboursement des soins et médicaments prescrits sur la nature du conventionnement du prescripteur, afin de réduire les risques de fraude et de responsabiliser pleinement les professionnels de santé. Il s'agit également de désinciter à la prise de rendez-vous avec des médecins du secteur 3, dont le fonctionnement ne correspond pas à l'esprit d'une protection sociale juste et équitable.
Le conventionnement n'est pas une simple formalité. Il garantit la qualité des prescriptions, un suivi rigoureux des soins, et responsabilise le prescripteur. Le dispositif que nous proposons ne doit en aucun cas pénaliser les patients ; il faut accompagner une telle mesure d'obligations de transparence renforcée et d'informations plus claires. Les plus vulnérables ne doivent pas, une fois encore, être victimes de ceux qui profitent du système.
Par ailleurs, le projet de loi de financement de la sécurité sociale impose une taxation accrue du secteur 2 et de l'option de pratique tarifaire maîtrisée (Optam) : on pourrait observer de ce fait un glissement des praticiens vers le secteur 2 hors Optam, voire vers le secteur 3. Une telle évolution affaiblirait le recours au conventionnement et, de fait, l'accès aux soins.
Il est donc nécessaire de bien délimiter les types de conventionnement et de cibler les dépassements d'honoraires. Cet amendement vise ainsi à distinguer clairement le secteur 3, dont les pratiques ne sont pas alignées sur les valeurs de notre système de sécurité sociale, et à protéger nos concitoyens tout en préservant la solidarité nationale.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Olivier Henno, rapporteur. Cet amendement a pour objet de dérembourser l'ensemble des prescriptions émises par les médecins déconventionnés. Être déconventionné, ce n'est pas frauder. Cela existe, c'est un choix que certains font. Le dispositif que vous proposez, ma chère collègue, nous semble abusif, dans la mesure où l'objet de ce texte est la lutte contre la fraude. La commission est donc défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Pour la même raison que celle que j'ai avancée tout à l'heure à propos du déremboursement des prescriptions des médecins non conventionnés, le Gouvernement s'en remettra à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Il faudrait tout de même que nous parvenions à faire la distinction entre les médecins non conventionnés du secteur 3 et les médecins déconventionnés pour cause de fraude.
Ce sujet me semble s'inscrire dans la suite logique de nos discussions précédentes. Un médecin exerçant en secteur 3 ne peut pas être mis sous objectif, puisqu'il n'est pas conventionné. Il ne répond donc de rien ; il peut faire ce qu'il veut, prescrire ce qu'il veut. Nous devons rembourser, et nous n'avons, me semble-t-il, aucun droit de regard sur la manière dont il exerce la médecine. La convention est claire de ce point de vue : s'il y a des mises sous objectif, c'est bien parce que l'on estime que certaines pratiques s'écartent des usages habituels, des normes ou des recommandations de bonnes pratiques.
Il ne faudrait pas que, par manque de volonté, nous assistions à des « fuites » vers le secteur 3. Il s'agit du moins d'une recommandation de la Cnam, des mutuelles et des assureurs. En tout état de cause, nous en reparlerons lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, puisqu'un article de ce texte est consacré à cette question. Si l'amendement de notre collègue Annie Le Houerou était rejeté, ce ne serait donc que partie remise.
M. le président. L'amendement n° 95, présenté par Mme Le Houerou, M. Fichet, Mme Canalès, MM. Lurel, Jacquin et Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Jomier, Mmes Lubin, Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l'article 17 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le II de l'article L. 315-1 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les praticiens conseils du service du contrôle médical et les praticiens conseils agissant pour le compte des entreprises régies par le code des assurances, des mutuelles ou unions régies par le code de la mutualité et des institutions de prévoyance ou unions régies par les dispositions du présent code assurant le versement d'indemnités complémentaires à celles visées aux articles L. 321-1 et L. 433-1 ou d'une pension complémentaire à celle visée à l'article L. 341-1 sont habilités à partager les informations obtenues grâce aux contrôles médicaux réalisés, dans des conditions prévues par décret. »
La parole est à Mme Annie Le Houerou.
Mme Annie Le Houerou. Cet amendement tend à renforcer les moyens des services de contrôle médical afin de leur permettre de rendre des avis sur les fraudes potentielles et d'enrichir leurs bases de données pour mieux identifier les abus.
Le dispositif proposé vise trois objectifs complémentaires.
Tout d'abord, la transmission d'informations des organismes complémentaires vers les services de contrôle médical permettra d'accélérer et d'enrichir les contrôles en mobilisant l'ensemble des expertises disponibles.
Ensuite, l'augmentation du nombre d'informations disponibles permettra de réduire les délais de décision ainsi que le volume des indus, au bénéfice tant de l'assurance maladie que des régimes de prévoyance.
Enfin, cette mesure a pour objet de renforcer la cohérence des décisions rendues pour un même assuré, en harmonisant l'évaluation médicale entre les différents payeurs, ce qui rendra l'action de l'administration plus lisible pour le patient.
Le présent amendement tend donc à faciliter l'action de l'assurance maladie et à assurer le bon suivi des décisions de versement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Olivier Henno, rapporteur. Les questions soulevées par notre collègue sont tout à fait respectables et très pertinentes, mais il nous semble que cet amendement est satisfait par l'article 5 et notamment les échanges d'informations que cet article prévoit. La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Même avis.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 95.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Articles 18, 19 et 20 (précédemment examinés)
M. le président. Je rappelle que les articles 18, 19 et 20 ont été précédemment examinés.
Articles 20 bis, 20 ter et 20 quater (nouveaux) (précédemment examinés)
M. le président. Je rappelle également que les articles 20 bis, 20 ter et 20 quater ont été précédemment examinés.
TITRE III
GARANTIR UN MEILLEUR RECOUVREMENT DES MONTANTS SOUSTRAITS PAR FRAUDE
Article 21
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° L'article L. 133-1 est ainsi modifié :
a) Le I est ainsi rédigé :
« I. – Lorsqu'un procès-verbal de travail dissimulé a été établi par les agents chargés du contrôle mentionnés au premier alinéa de l'article L. 243-7 du présent code ou à l'article L. 724-7 du code rural et de la pêche maritime, ou transmis aux organismes de recouvrement mentionnés aux articles L. 213-1 et L. 752-1 du présent code et à l'article L. 723-3 du code rural et de la pêche maritime en application de l'article L. 8271-6-4 du code du travail, l'agent chargé du contrôle peut, en cas de circonstances susceptibles de menacer le recouvrement de la créance sociale, dresser à l'encontre de la personne contrôlée un procès-verbal de flagrance sociale.
« Ce procès-verbal comporte l'évaluation du montant des cotisations et des contributions éludées, des majorations mentionnées à l'article L. 243-7-7 du présent code et, le cas échéant, des majorations et des pénalités afférentes, ainsi que du montant des réductions ou des exonérations de cotisations ou de contributions sociales dont a pu bénéficier le débiteur annulées en application du deuxième alinéa de l'article L. 133-4-2, ainsi que les voies et les délais de recours applicables.
« Le procès-verbal de flagrance sociale est signé par l'agent chargé du contrôle.
« L'original du procès-verbal est conservé par l'organisme de recouvrement et une copie est notifiée à la personne contrôlée. » ;
b) Le II est ainsi modifié :
– la première phrase est supprimée ;
– au début de la seconde phrase, les mots : « À défaut, le directeur de l'organisme de recouvrement peut » sont remplacés par les mots : « La notification du procès-verbal de flagrance permet au directeur de l'organisme de recouvrement de » ;
b) bis (nouveau) Au début du III, les mots : « La décision du directeur de l'organisme peut être contestée » sont remplacés par les mots : « Le procès-verbal de flagrance peut être contesté » ;
c) Il est ajouté un IV ainsi rédigé :
« IV. – Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'État. » ;
2° Après le premier alinéa de l'article L. 244-9, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque la contrainte mentionnée au premier alinéa résulte de la constatation d'une infraction de travail illégal définie à l'article L. 8221-1 du code du travail, elle est immédiatement exécutoire en tant qu'elle porte sur des sommes redressées à ce titre. Le débiteur, qui a formé opposition à cette contrainte devant le tribunal judiciaire spécialement désigné en application de l'article L. 211-16 du code de l'organisation judiciaire, peut demander au président de ce tribunal d'en arrêter l'exécution provisoire lorsqu'il existe un moyen sérieux d'invalidation et que l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives. Un décret en Conseil d'État précise les modalités et délais de la procédure aux fins d'arrêter l'exécution provisoire de la contrainte, prévue au présent alinéa. »
II. – Après le 1° du II de l'article L. 725-3 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un 1° bis ainsi rédigé :
« 1° bis Lorsque la contrainte résulte de la constatation d'une infraction de travail illégal définie à l'article L. 8221-1 du code du travail, elle est immédiatement exécutoire en tant qu'elle porte sur des sommes redressées à ce titre. Le débiteur, qui a formé opposition à cette contrainte devant le tribunal judiciaire spécialement désigné en application de l'article L. 211-16 du code de l'organisation judiciaire, peut demander au président de ce tribunal d'en arrêter l'exécution provisoire lorsqu'il existe un moyen sérieux d'invalidation et que l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives. Un décret en Conseil d'État précise les modalités et délais de la procédure aux fins d'arrêter l'exécution provisoire de la contrainte prévue au présent alinéa. »
III. – Le 1° du I entre en vigueur selon des modalités fixées par décret et au plus tard le 1er janvier 2027.
IV. – Le 2° du I et le II s'appliquent aux contraintes décernées à compter d'une date fixée par décret et au plus tard à compter du 1er janvier 2027.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 46 rectifié bis, présenté par Mmes Guillotin et M. Carrère, M. Guiol, Mme Jouve, MM. Laouedj et Masset, Mme Pantel, M. Roux, Mme Girardin, M. Fialaire, Mme N. Delattre et MM. Bilhac, Cabanel et Gold, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 4
Après le mot :
dissimulé
insérer les mots :
ou d'une fraude sociale caractérisée au sens de l'article L. 114-13 du présent code
II. – Alinéa 15
Après les mots :
L. 8221-1 du code du travail
insérer les mots :
ou d'une fraude sociale caractérisée au sens de l'article L. 114-13 du présent code
La parole est à M. Michel Masset.
M. Michel Masset. Cet amendement vise à étendre la procédure de flagrance sociale à l'ensemble des cas de fraude caractérisée, afin de donner aux services de l'Urssaf un outil pleinement efficace pour sécuriser le recouvrement des sommes indûment perçues.
Je salue la volonté des rapporteurs d'élargir ce dispositif à l'ensemble du travail illégal. Il s'agit certes d'une avancée, mais celle-ci ne suffit pas. Les fraudes les plus coûteuses ne relèvent pas toujours du travail dissimulé. Elles reposent souvent sur des montages complexes et délibérés : fausses déclarations, sociétés écrans, etc. Ces pratiques créent une fraude à grande échelle, qui fragilise durablement notre système social.
Selon la Cour des comptes, la fraude aux cotisations sociales représente près de 8 milliards d'euros par an. Or, faute de cadre juridique adapté, les agents de l'Urssaf sont souvent contraints d'attendre plusieurs mois avant de pouvoir agir, alors même que les fonds fraudés ont déjà disparu. Cet amendement vise à leur permettre d'intervenir dans de meilleurs délais.
M. le président. L'amendement n° 286, présenté par M. Henno et Mme Puissat, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 15, première phrase
Après la première occurrence du mot :
travail
rédiger ainsi la fin de cette phrase :
dissimulé définie aux articles L. 8221-1 et suivants du code du travail, ou d'une infraction de travail illégal qui donne lieu à remboursement d'exonérations perçues, sur le fondement de l'article L. 133-4-2 du présent code, elle est immédiatement exécutoire en tant qu'elle porte sur des sommes redressées à ce titre.
II. – Alinéa 17, première phrase
Après la première occurrence du mot :
travail
rédiger ainsi la fin de cette phrase :
dissimulé définie aux articles L. 8221-1 et suivants du code du travail, ou d'une infraction de travail illégal qui donne lieu à remboursement d'exonérations perçues, sur le fondement de l'article L. 133-4-2 du présent code, elle est immédiatement exécutoire en tant qu'elle porte sur des sommes redressées à ce titre.
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Cet amendement, dont le dispositif a été élaboré conjointement avec le Gouvernement – je le précise –, vise à joindre les deux périmètres visés par l'article 21. Il tend à permettre aux agents de l'Urssaf de recouvrer non seulement les créances issues du travail dissimulé, mais aussi le remboursement des exonérations perçues en cas de recours au travail illégal. L'article sera ainsi plus opérationnel.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 46 rectifié bis ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les deux amendements en discussion commune ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Le Gouvernement partage évidemment la volonté exprimée par les auteurs de l'amendement n° 46 rectifié bis de renforcer l'efficacité du recouvrement des dettes sociales et de la fraude, mais l'article du code visé dans le dispositif ne crée pas en lui-même de la dette sociale. C'est pourquoi il demande le retrait de ce premier amendement ; à défaut, il y sera défavorable. En revanche, il émet un avis favorable sur l'amendement n° 286 de la commission.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 46 rectifié bis.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 284, présenté par M. Henno et Mme Puissat, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 11
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Cet amendement vise à fonder le recours devant le juge de l'exécution sur la décision du directeur de l'organisme de procéder à des mesures conservatoires, et non sur le procès-verbal de flagrance, qui est le support matériel de la décision du directeur.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Le Gouvernement est favorable à cet amendement. C'est bien la décision du directeur qui porte préjudice aux cotisants, et c'est donc celle-ci qui doit faire l'objet du recours.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 284.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 285, présenté par M. Henno et Mme Puissat, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 16
Remplacer cet alinéa par trois alinéas ainsi rédigés :
II. – Le II de l'article L. 725-3 du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :
1° Au 1°, le mot : « second » est remplacé par le mot : « dernier » ;
2° Il est inséré un 1° bis ainsi rédigé :
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Avis favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 285.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 21, modifié.
(L'article 21 est adopté.)
Après l'article 21
M. le président. L'amendement n° 135, présenté par Mme N. Goulet, est ainsi libellé :
Après l'article 21
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 114-12-4 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Ces mêmes organismes et administrations communiquent, dans les mêmes conditions et sous les mêmes réserves, avec les organismes et administrations chargés des mêmes missions dans un autre État membre de l'Union européenne ou partie à l'accord sur l'Espace économique européen. »
La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Mme Nathalie Goulet. Cet amendement est une victoire de l'optimisme sur l'expérience : il vise à prévoir un échange de données entre les mêmes administrations en France et dans les États membres de l'Union européenne. En réalité, il a pour objet de réduire la fraude transfrontalière.
Sur ce sujet, madame la ministre, il était d'usage de présenter une demande de rapport, car nous ne disposons toujours pas d'un état précis de la coordination entre États et des accords conclus avec nos voisins pour limiter cette fraude transfrontalière – celles et ceux de nos collègues qui vivent dans les zones concernées voient très bien de quoi il retourne.
J'ajoute qu'il y a maintenant des années que l'on nous promet un rapport sur cette question – c'était notamment le cas lorsque notre désormais nouvelle collègue, Brigitte Bourguignon, était au banc du Gouvernement –, et que nous ne disposons toujours de rien de précis, ce qui est vraiment très ennuyeux.
Madame la ministre, il est vraiment essentiel que vous puissiez nous fournir un état détaillé des conventions : celles qui sont signées ; celles qui sont en cours ; celles qui ne le sont pas encore ; et celles qui sont appliquées sans difficulté et permettent une communication fluide des données entre organismes homologues.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Cet amendement vise à étendre l'obligation de communication entre les organismes de sécurité sociale et l'administration de l'État aux organismes et administrations européens. Ce n'est effectivement pas une demande de rapport, ma chère collègue. Cependant, pour nous, cet amendement est satisfait. La commission y est donc défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Les dispositions du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) invitent déjà à la coopération fiscale entre États membres dans le domaine de la sécurité sociale. C'est dans ce cadre que le système d'échange électronique d'informations sur la sécurité sociale (EESSI), qui connecte les administrations responsables des États membres de l'Union européenne, de l'Espace économique européen et de la Suisse, a été mis au point par la Commission européenne.
Il permet aux institutions de sécurité sociale des États membres de communiquer entre elles en ligne pour instruire et traiter les dossiers des personnes en situation de mobilité via une nouvelle interface publique de la Commission européenne. Sa mise en œuvre opérationnelle se poursuit, avec un service étendu depuis octobre 2021 au domaine des retraites. Votre amendement est donc satisfait, madame la sénatrice : avis défavorable.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Il n'est pas satisfait du tout ! (M. Alain Milon s'agace.) Je suis bien désolée, monsieur Milon, mais il ne l'est vraiment pas.
Vous nous dites, madame la ministre, que les textes existent, mais nos collègues sénateurs des départements frontaliers se plaignent de la fraude. La commission des affaires européennes du Sénat a également publié un rapport sur la question. Je reviendrai sur ce sujet lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, en espérant que vous ayez obtenu d'ici là les renseignements que je vous demande sur les conventions en vigueur.
Après tout, il n'y a pas tant de voisins avec lesquels nous ayons ce type de problèmes : la France est certes un grand pays, mais nous connaissons les pays qui l'entourent. Il suffit de voir si les conventions sont signées et, surtout, si elles sont appliquées !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 135.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 22
I. – Le code du travail est ainsi modifié :
1° Après l'article L. 8222-1, il est inséré un article L. 8222-1-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 8222-1-1. – Le maître de l'ouvrage vérifie, périodiquement jusqu'à la fin de l'exécution du contrat de sous-traitance d'un montant minimum, que le sous-traitant qu'il accepte en application de l'article 3 de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance ou de l'article L. 2193-4 du code de la commande publique, s'acquitte des formalités mentionnées aux articles L. 8221-3 et L. 8221-5 du présent code.
« Le maître de l'ouvrage est réputé avoir procédé aux vérifications mentionnées au premier alinéa lorsqu'il se fait remettre les documents dont la liste et les conditions de remise sont fixées par décret et qu'il s'assure, en cas de doute raisonnable au vu des informations dont il dispose par ailleurs, de leur authenticité.
« Le présent article ne s'applique pas au particulier qui contracte pour son usage personnel, celui de son conjoint, de son partenaire lié par un pacte civil de solidarité, de son concubin, de ses ascendants ou de ses descendants. » ;
2° Au premier alinéa de l'article L. 8222-2, après la référence : « L. 8222-1 », sont insérés les mots : « ou de l'article L. 8222-1-1 » ;
3° (nouveau) Le 2° de l'article L. 8271-9 est ainsi modifié :
a) Après la référence : « L. 8222-1 », est insérée la référence : « , L. 8222-1-1 » ;
b) Après le mot : « cocontractants », sont insérés les mots : « ainsi que le ou les sous-traitants acceptés en application de l'article 3 de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance ».
II. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° (nouveau) L'article L. 133-4-5 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa du I est ainsi modifié :
– à la première phrase, les mots : « méconnaît l'une des obligations définies à l'article L. 8222-1 du code du travail et que son cocontractant » sont remplacés par les mots : « ou le maître de l'ouvrage méconnaît l'une des obligations définies à l'article L. 8222-1 ou à l'article L. 8222-1-1 du code du travail et que son cocontractant ou un sous-traitant » et après la seconde occurrence du mot : « ordre », sont insérés les mots : « ou le maître de l'ouvrage » ;
– à la seconde phrase, les mots : « d'ouvrage » sont remplacés par les mots : « de l'ouvrage » ;
b) Au second alinéa du II, après le mot : « ordre », sont insérés les mots : « ou le maître de l'ouvrage » ;
2° Le II de l'article L. 243-7-7 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est ainsi modifié :
– les mots : « peut bénéficier » sont remplacés par le mot : « bénéficie » ;
– après le mot : « si, », sont insérés les mots : « au plus tard » ;
b) Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :
« Lorsque des sommes sont mises à la charge de la personne contrôlée en application des articles L. 8222-2, L. 8222-5 et L. 8222-6 du code du travail, le donneur d'ordre ou le maître d'ouvrage n'est pas tenu solidairement au paiement des majorations prévues au I du présent article si, au plus tard dans un délai défini par décret en Conseil d'État à compter de la notification de la mise en demeure, il procède au règlement intégral des cotisations, des pénalités et des majorations de retard notifiées ou si, dans le même délai, il présente un plan d'échelonnement du paiement au directeur de l'organisme et que ce dernier l'a accepté. »
III. – Le présent article entre en vigueur au 1er janvier 2026.
M. le président. Je suis saisi de dix amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les neuf premiers sont identiques.
L'amendement n° 39 rectifié ter est présenté par Mmes Josende, Lassarade, Lavarde, M. Mercier et Evren, MM. Frassa, Panunzi, Daubresse, Brisson, Pointereau et Naturel, Mme Dumont, M. Lefèvre, Mme Micouleau, MM. J.B. Blanc et Sol, Mme Vermeillet, M. Anglars, Mme P. Martin, MM. H. Leroy et Levi, Mme Petrus et MM. Houpert, Saury, Chaize et Belin.
L'amendement n° 125 rectifié ter est présenté par MM. Brault, Chevalier, Laménie, Chasseing et Pellevat, Mme L. Darcos, MM. V. Louault, Grand, A. Marc et Rochette et Mme Bourcier.
L'amendement n° 163 rectifié est présenté par M. G. Blanc.
L'amendement n° 167 rectifié quater est présenté par Mmes de Cidrac et Canayer, M. Laugier, Mme Antoine, MM. Menonville et Khalifé, Mmes Borchio Fontimp, Herzog et Gruny, MM. Chevrollier et Meignen et Mme Bellurot.
L'amendement n° 176 est présenté par M. Longeot.
L'amendement n° 189 rectifié bis est présenté par Mme Havet, M. Lévrier, Mme Schillinger, M. Rambaud et Mme Cazebonne.
L'amendement n° 194 rectifié ter est présenté par MM. Buis et Iacovelli et Mme Nadille.
L'amendement n° 209 rectifié est présenté par MM. Daubet, Bilhac et Cabanel, Mmes M. Carrère et N. Delattre, M. Fialaire, Mme Girardin, MM. Grosvalet et Guiol, Mme Jouve, M. Masset, Mme Pantel et M. Roux.
L'amendement n° 218 rectifié ter est présenté par MM. Kern et Hingray, Mme Devésa, M. Courtial, Mmes Billon, Perrot, Gacquerre, Patru et Sollogoub, MM. Parigi et Duffourg et Mme Jacquemet.
Ces neuf amendements sont ainsi libellés :
I. – Après l'alinéa 1
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…°Le dernier alinéa de l'article L. 8222-1 est ainsi rédigé :
« La personne mentionnée au premier alinéa est réputée avoir procédé aux vérifications imposées par le présent article lorsqu'elle se fait remettre les documents dont la liste et les conditions de remise sont fixées par décret et qu'elle s'assure, le cas échéant de leur authenticité. » ;
II. – Alinéa 3
Remplacer les mots :
périodiquement jusqu'à la fin de l'exécution du contrat de sous-traitance d'un montant minimum
par les mots :
au moment de sa présentation par l'entreprise principale
et le mot :
acquitte
par les mots :
est acquitté
La parole est à Mme Florence Lassarade, pour présenter l'amendement n° 39 rectifié ter.
Mme Florence Lassarade. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à Mme Corinne Bourcier, pour présenter l'amendement n° 125 rectifié ter.
Mme Corinne Bourcier. Défendu !
M. le président. Les amendements nos 163 rectifié, 167 rectifié quater et 176 ne sont pas soutenus.
La parole est à M. Martin Lévrier, pour présenter l'amendement n° 189 rectifié bis.
M. Martin Lévrier. Défendu !
M. le président. La parole est à M. Xavier Iacovelli, pour présenter l'amendement n° 194 rectifié ter.
M. Xavier Iacovelli. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. Michel Masset, pour présenter l'amendement n° 209 rectifié.
M. Michel Masset. Défendu !
M. le président. La parole est à Mme Nadia Sollogoub, pour présenter l'amendement n° 218 rectifié ter.
Mme Nadia Sollogoub. Il est défendu.
M. le président. L'amendement n° 181 rectifié bis, présenté par MM. Fargeot, Courtial, Kern et Maurey, Mme Florennes, M. Delahaye, Mme Antoine, M. Menonville, Mmes Sollogoub, Jacquemet, Billon, Patru et Gacquerre, MM. Parigi et Houpert et Mme Josende, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 3
Remplacer les mots :
périodiquement jusqu'à la fin de l'exécution du contrat de sous-traitance
par les mots :
lors de la demande d'acceptation et d'agrément des conditions de paiement du sous-traitant
II. – Alinéa 4
Remplacer les mots :
en cas de doute raisonnable au vu des informations dont il dispose par ailleurs
par les mots :
le cas échéant
La parole est à M. Daniel Fargeot.
M. Daniel Fargeot. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Bien que la présentation de ces dix amendements ait été succincte – je remercie mes collègues de leur efficacité –, je m'attarderai quelque peu sur cet article 22, qui me semble intéressant.
Sans doute ces amendements similaires ont-ils été élaborés de bonne foi avec l'aide des représentants locaux du secteur du bâtiment et travaux publics (BTP), un secteur qui est souvent force de proposition sur la question de l'emploi illicite.
Je rappelle que la dette sociale de l'Urssaf s'élève à environ 7 milliards d'euros et que, en regard, seulement 121 millions d'euros sont recouvrés dans le cadre de la lutte contre le travail dissimulé. Cette situation pose évidemment un certain nombre de difficultés.
Par ailleurs, nous constatons tous dans nos territoires un recours accru à la sous-traitance en cascade. La généralisation du très haut débit, un sujet sur lequel nous avons tous travaillé dans nos départements, en est une très bonne illustration : ces projets ont parfois suscité des interrogations légitimes sur les conditions de travail parfois « rock'n'roll » des salariés qui s'activaient sur les chantiers et sur leur nationalité réelle – la plupart d'entre eux n'étaient vraisemblablement pas Français. S'agissait-il de travail illicite ? En tout cas, la question mérite d'être posée.
Dans ce contexte, il était nécessaire de renforcer la responsabilité du maître d'ouvrage, acteur qui se situe tout en haut de la pyramide. C'est précisément l'objet de l'article 22, qui accroît le devoir de vigilance de celui-ci.
Ces dix amendements en discussion commune tendent à alléger non pas ce devoir de vigilance du maître d'ouvrage, mais celui du donneur d'ordre, qui se situe, dans la pyramide, au-dessous du maître d'ouvrage. S'ils étaient adoptés, je vous le dis, mes chers collègues, ce ne sont pas 121 millions d'euros que nous recouvrerions – et c'est déjà peu au regard des 7 milliards d'euros de dette sociale ! –, mais encore moins…
Par ailleurs, ces amendements visent à supprimer le caractère périodique des vérifications imposées au maître d'ouvrage. Si le projet de loi ne précise pas la périodicité en question, un décret devrait la fixer à plus ou moins six mois – peut-être M. le ministre le confirmera-t-il. Autrement dit, on demandera au maître d'ouvrage de vérifier tous les six mois qu'il n'y a aucun travail illicite dans l'ensemble de la chaîne de sous-traitance.
Honnêtement, si la tâche n'est pas négligeable, elle n'est pas non plus excessive. Du reste, le directeur de l'Office central de lutte contre le travail illégal (OCLTI) préconise, lui, des vérifications tous les trois mois, considérant que ce délai de six mois était presque trop long.
Non seulement l'ensemble des amendements dont nous débattons tendent à alléger la contrainte pesant sur le donneur d'ordre, mais leur adoption ne rendrait pas non plus les contrôles plus efficients.
Nous considérons même que les dispositifs qui sont proposés iraient à l'encontre de l'objectif visé à l'article 22, lequel prévoit, d'une part, de responsabiliser le maître d'ouvrage, et, d'autre part, de mieux recouvrer les cotisations et de sanctionner le travail illicite, qui, je le rappelle, représente 7 milliards d'euros, soit le principal manque à gagner en matière de fraude sociale.
Pour ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur l'ensemble des amendements en discussion commune.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Peut-être serait-il utile à ce stade, comme l'a fait Mme la rapporteure, d'esquisser une présentation générale de l'article 22 qui, par son ambition et les apports qu'il prévoit, peut nous permettre de réaliser de grands progrès en matière de solidarité financière.
Les concepts fondamentaux – maîtrise d'ouvrage et donneur d'ordre – sur lesquels repose cet article méritent d'être clarifiés, et ce afin d'éviter toute interprétation divergente.
Comme l'a dit Mme la rapporteure, l'idée est bien de redéfinir le rôle des différents acteurs en renforçant la responsabilité, tout en haut de la pyramide, des maîtres d'ouvrage et des donneurs d'ordre, de sorte qu'ils vérifient que toute la chaîne de sous-traitance remplit les conditions légales.
L'article 22 comporte également une dimension financière, celle liée au recouvrement des sommes non réglées. En effet, alors que le maître d'ouvrage et le donneur d'ordre sont clairement identifiés, les sous-traitants défaillants peuvent parfois disparaître. L'objectif est donc aussi de mettre en place une véritable solidarité financière.
La pratique croissante de la sous-traitance en cascade rend, dans certains secteurs, le sujet encore plus complexe à traiter. Certaines entreprises recourent en effet au travail dissimulé et disparaissent sans que l'on ait pu recouvrer les sommes éludées. Il y a là un véritable enjeu : la solidarité financière, qui fonctionne au niveau des donneurs d'ordre, s'applique mal en présence de sous-traitants de sous-traitants…
Cet article a donné lieu, je le sais, à des débats riches et fournis en commission. Certains souhaitaient durcir les contraintes, d'autres les alléger. Si nous sommes parfois tiraillés entre ces deux options, nous sommes tous convaincus qu'il faut être plus efficace.
La solidarité financière qui doit s'appliquer aux maîtres d'ouvrage n'est pas tout à fait la même que celle qui concerne les donneurs d'ordre : le lien contractuel est en effet plus étroit entre les donneurs d'ordre et les sous-traitants – ce sont eux qui concluent les contrats de sous-traitance. A contrario, la relation contractuelle est plus lâche entre maîtres d'ouvrage et sous-traitants. C'est du reste la raison pour laquelle, dans son approche, le Gouvernement distingue les deux notions.
Les collectivités locales par exemple – vous le savez, mesdames, messieurs les sénateurs, pour l'avoir vécu dans vos territoires – sont souvent maîtres d'ouvrage. Ayons donc bien en tête les responsabilités de chacun : maître d'ouvrage, d'un côté ; donneur d'ordre, de l'autre.
C'est aussi pourquoi le Gouvernement propose de limiter l'engagement de la responsabilité du maître d'ouvrage aux cas où ce dernier n'a pas demandé les attestations de vigilance des sous-traitants qu'il accepte et ne s'est donc pas assuré qu'ils étaient en règle avec la législation sociale.
Aller plus loin, en imposant notamment une vérification concrète de l'organisation de l'entreprise sous-traitante en cas de doute, introduirait une forte incertitude juridique pour les maîtres d'ouvrage.
Aussi, je vous proposerai, au cours de la navette parlementaire, d'en revenir à l'équilibre initial de l'article 22, tout en préservant l'intention exprimée par le Sénat au travers des apports opérés par les rapporteurs, dont je tiens à saluer le travail remarquable sur l'ensemble de ce texte.
Le Gouvernement est défavorable aux amendements identiques nos 39 rectifié ter, 125 rectifié ter, 189 rectifié bis, 194 rectifié ter, 209 rectifié et 218 rectifié ter, dont l'adoption aboutirait à vider le dispositif d'une part de sa substance. En effet, prévoir l'obligation de vérification de la conformité des sous-traitants à la législation sociale uniquement au stade de la conclusion du contrat reviendrait à donner une sorte de blanc-seing, ce que nous ne souhaitons pas. Ainsi rédigé, l'article n'empêcherait que marginalement les entreprises visées de disparaître, en privant la sécurité sociale de ressources légitimes.
L'amendement n° 181 rectifié bis a lui aussi pour objet de revenir sur les modifications apportées par la commission, mais son dispositif irait plus loin en supprimant l'obligation de vérification périodique. Le Gouvernement, qui plaide en effet pour une périodicité de six mois, madame la rapporteure, émet donc également un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Je suis totalement en phase avec Mme la rapporteure sur cette question – vous le voyez, je le dis quand c'est le cas ! (Sourires.)
Ceux qui veulent revenir sur le caractère périodique des vérifications manquent vraiment de cohérence. Ce sont les mêmes qui demandent que l'on vérifie tous les trois mois, ou plus régulièrement encore, si les salariés qui sont en arrêt de travail sont véritablement malades et s'ils ne sont pas aptes à retravailler.
Mes chers collègues, je vous invite à ne pas user, selon les circonstances, d'arguments totalement opposés, voire orthogonaux, comme on dit. Certes, aucun d'entre vous n'a défendu son amendement – et la Fédération française du bâtiment ne participe pas à nos débats en tant que telle –, mais vous vous faites tout de même l'écho des desiderata d'un secteur qui, tout comme celui de la restauration, est particulièrement « fraudogène » – je ne vous apprends rien – en matière de travail dissimulé.
Certes, il ne faut pas mettre tout le monde dans le même panier ni avoir l'esprit de système. Mais de là à reprendre in extenso les demandes des professionnels de ces secteurs sans même avoir le courage de les défendre ! De là à refuser qu'une chaîne de sous-traitance soit contrôlée tous les six mois et à s'en tenir à une vérification initiale qui, comme l'a dit M. le ministre, ressemble fort à un blanc-seing pour toute la durée du contrat ! Tout cela manque vraiment de pertinence.
Je remercie Mme la rapporteure d'avoir rappelé que, sur 7 milliards d'euros de fraude, seulement 121 millions d'euros sont recouvrés. Ça suffit ! Cessons d'être aussi tolérants à l'égard des responsables de la fraude sociale.
M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Fichet, pour explication de vote.
M. Jean-Luc Fichet. Un certain nombre d'entre nous ont été maires, et, donc, maîtres d'ouvrage. Nous savons la responsabilité que cela représente.
Le maître d'ouvrage délègue la mission au donneur d'ordre, qui, à mon sens, a la responsabilité pleine et entière de vérifier le bon déroulement du chantier et de s'assurer de la situation des personnes employées par les entreprises chargées de le mener à bien.
La sous-traitance de troisième rang pose un problème majeur : vous passez un marché avec une entreprise qui, étant dans l'incapacité de conduire le chantier, sous-traite à une deuxième entreprise, elle-même en difficulté, qui sous-traite à son tour à une troisième… Dans la mesure où cette dernière doit, elle aussi, réaliser un minimum de bénéfices et où la marge est quasiment réduite à zéro, que fait-elle ? Elle embauche des personnes dans des conditions déplorables, sans les déclarer…
Si nous limitions la sous-traitance, nous apporterions déjà une forme de réponse au travail dissimulé.
M. Martin Lévrier. Je retire l'amendement n° 189 rectifié bis, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 189 rectifié bis est retiré.
M. Xavier Iacovelli. Je retire mon amendement n° 194 rectifié ter !
M. le président. L'amendement n° 194 rectifié ter est retiré.
Je mets aux voix les amendements identiques nos 39 rectifié ter, 125 rectifié ter, 209 rectifié et 218 rectifié ter.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 181 rectifié bis.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 203 rectifié, présenté par M. Canévet, Mmes Patru et Sollogoub, MM. Kern et Laugier, Mmes Gacquerre et Billon, MM. Courtial et Duffourg et Mme Saint-Pé, est ainsi libellé :
Alinéas 7 à 15
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Nadia Sollogoub.
Mme Nadia Sollogoub. Le dispositif de cet amendement de notre collègue Michel Canévet repose sur le même argumentaire que celui qui vient d'être parfaitement développé par M. le ministre et par notre collègue Jean-Luc Fichet : par rapport au donneur d'ordre, le maître d'ouvrage n'exerce pas le même contrôle direct et ne dispose pas de la même visibilité sur la chaîne de sous-traitance.
Aussi, assimiler ses obligations à celles du donneur d'ordre reviendrait à lui faire supporter une responsabilité administrative et financière disproportionnée, sans qu'il ait les moyens d'en garantir l'effectivité. C'est la raison pour laquelle il est proposé de ne pas faire peser sur le maître d'ouvrage les mêmes obligations que sur le donneur d'ordre.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. En commission, nous avons souhaité renforcer le devoir de vigilance imposé au maître d'ouvrage pour éviter l'infraction au travail dissimulé chez un sous-traitant : nous avons donc étendu au maître d'ouvrage le risque d'encourir l'annulation des exonérations de cotisations ou de contributions sociales.
Une telle sanction est toutefois soumise à deux conditions : d'une part, il faut que le maître d'ouvrage ait méconnu son devoir de vigilance ; d'autre part, il faut qu'il existe un délit de travail dissimulé. Cela va certes au-delà de ce que prévoyait le texte initial, mais il s'agit d'une mesure d'équilibre.
Mes chers collègues, qu'il s'agisse des maîtres d'ouvrage – c'est-à-dire des entreprises, y compris du CAC 40 (M. Jean-Luc Fichet acquiesce.) – ou des particuliers – nous aborderons tout à l'heure la question du RSA –, en ce qui concerne les infractions et les pénalités, notre main n'a pas tremblé !
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. En la matière, les apports de la commission nous semblent aller trop loin, les maîtres d'ouvrage étant dans une situation objectivement différente de celle des donneurs d'ordre. Il sera sans doute nécessaire, je le répète, de revenir sur ce sujet au cours de la navette.
Le Gouvernement s'en remet à la sagesse de la Haute Assemblée sur cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 203 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 90 est présenté par M. Fichet, Mme Canalès, MM. Lurel, Jacquin et Kanner, Mmes Le Houerou, Conconne et Féret, M. Jomier, Mmes Lubin, Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L'amendement n° 116 est présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéas 16 à 21
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :
2° Le II de l'article L. 243-7-7 est abrogé.
La parole est à M. Jean-Luc Fichet, pour présenter l'amendement n° 90.
M. Jean-Luc Fichet. Cet amendement vise à renforcer les sanctions contre le travail dissimulé et, plus précisément, à supprimer la possibilité pour un employeur fraudeur de bénéficier d'une réduction de dix points du taux de majoration appliqué aux cotisations sociales redressées par l'Urssaf.
Le droit prévoit en effet qu'une entreprise prise en flagrant délit de travail dissimulé peut se voir accorder une telle réduction, à condition de régler les sommes dues dans les trente jours ou de présenter un plan d'échelonnement validé par l'Urssaf. En d'autres termes, même après avoir fraudé, l'entreprise peut encore bénéficier d'un geste favorable de la part de la sécurité sociale.
Nous considérons que cette possibilité est incompréhensible au regard de la gravité du travail dissimulé, qui constitue une atteinte directe au financement de notre protection sociale et à la concurrence loyale entre les entreprises.
Une entreprise qui a sciemment soustrait des cotisations au système de protection sociale ne mérite pas un traitement de faveur ; elle doit au contraire supporter l'intégralité des majorations prévues, sans bénéficier d'une quelconque réduction.
Au-delà de l'exigence de justice sociale, le dispositif de cet amendement contribue à relever un défi budgétaire majeur : le montant de la fraude aux cotisations sociales est en effet estimé à environ 7,5 milliards d'euros par an, dont seulement 829 millions d'euros sont effectivement récupérés.
Dans un contexte où la sécurité sociale est confrontée à des déficits persistants, chaque euro fraudé représente un euro de moins pour nos hôpitaux, nos retraites et la protection de nos concitoyens.
C'est pourquoi nous proposons de mettre fin à cette forme d'indulgence institutionnelle et de réaffirmer un principe clair : la lutte contre la fraude doit être ferme, cohérente et exemplaire.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l'amendement n° 116.
Mme Raymonde Poncet Monge. Nous devons tenir compte de l'extrême difficulté qu'il y a – les chiffres ont été rappelés – à détecter la fraude aux cotisations et à recouvrer.
Une entreprise fraudeuse doit selon nous payer l'intégralité des cotisations sociales majorées sans bénéficier d'une quelconque réduction, et ce d'autant plus qu'elle a la possibilité de présenter un plan d'échelonnement à l'Urssaf. Comme on l'entend pourtant souvent, aucune menace ne pèse donc sur les salariés, lesquels ne sont pas indirectement pénalisés par les sanctions.
Je ne comprends pas que le simple fait de présenter un plan d'échelonnement, c'est-à-dire de s'engager à payer les cotisations dues, suffise pour bénéficier d'une réduction de dix points du taux de majoration. Aussi sommes-nous favorables à cette mesure.
Quand il s'agit des entreprises, on accorde volontiers des réductions, mais quand il s'agit de la fraude aux prestations, on double ou on augmente systématiquement les sanctions encourues par les salariés.
M. le président. L'amendement n° 282, présenté par Mme Puissat et M. Henno, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 21
Remplacer les mots :
d'ouvrage
par les mots :
de l'ouvrage
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements identiques nos 90 et 116 ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Ces deux amendements tendent à supprimer le taux réduit de majoration appliqué aux personnes commettant une infraction assimilable à du travail dissimulé lorsque celles-ci s'acquittent dans un certain délai de leurs cotisations redressées, pénalités et majorations.
Il s'agit non pas, contrairement à ce que j'ai pu entendre, d'un geste favorable, mais d'une mesure de recouvrement semblable à celle que nous connaissons bien, malheureusement, en matière d'infractions routières : si vous payez tout de suite, vous payez moins que si vous payez plus tard…
Le principe est ici le même. Il s'applique aussi bien aux citoyens qu'aux entreprises recourant au travail illicite.
Pour ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur ces deux amendements.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. En effet, il s'agit non pas d'un cadeau, mais d'une facilité destinée à améliorer le recouvrement effectif des sommes éludées, dans un contexte où les sommes en question serviront particulièrement au redressement des comptes sociaux.
Les chiffres parlent d'eux-mêmes. Le recouvrement des cotisations éludées est un enjeu primordial pour le Gouvernement. Dans son rapport relatif à la lutte contre la fraude sociale publié en 2024, le Haut Conseil du financement de la protection sociale estime que seulement 10 % des sommes redressées au titre de la lutte contre le travail dissimulé sont recouvrées.
C'est la raison pour laquelle une telle possibilité est prévue en cas de règlement intégral des sommes dues dans un délai de trente jours ou si, dans ce même délai, l'Urssaf a accepté de travailler à un plan d'apurement.
En bref, cette disposition prévue à l'article 22 vise à encourager le paiement rapide des sommes dues dans le cadre de la lutte contre la fraude aux cotisations et à améliorer les perspectives de recouvrement des organismes. Il n'est donc pas opportun selon nous de supprimer cette mesure incitative.
Pour ces raisons, le Gouvernement est défavorable aux amendements identiques nos 90 et 116. Il sera en revanche favorable à l'amendement rédactionnel n° 282 de la commission.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Je reviens sur les propos de Mme Poncet Monge. Nous avons voté la semaine dernière, dans le cadre de l'examen de la proposition de loi pour la sécurisation juridique des structures économiques face aux risques de blanchiment, des dispositifs de prévention liés à la définition des entreprises éphémères, voire jetables pour les véhicules de transport avec chauffeur (VTC). Ce sont elles qui sont à l'origine de la fraude la plus massive en matière de TVA.
J'encourage le Gouvernement à s'inspirer du modèle qui prévaut en Belgique, où il existe un système très efficace de détection précoce de la fraude à la TVA, géré par la Banque-carrefour des entreprises. Nous aurions tout intérêt à le dupliquer.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Je vous confirme que nous demandons la suppression d'une disposition qui, selon vous, madame la rapporteure, monsieur le ministre, permettra d'améliorer le recouvrement, mais qui est en réalité déjà appliquée – et le recouvrement ne dépasse pas 121 millions d'euros sur 7 milliards d'euros… Voilà la situation actuelle ! Vous êtes-vous interrogés sur l'efficacité de cette mesure ?
Les sommes recouvrées sont déjà faibles et vous voudriez qu'on les ampute de 10 % supplémentaires ? La preuve est faite que cette disposition ne facilite en rien le recouvrement. Si c'était le cas, nous n'aurions pas ce résultat déplorable.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 90 et 116.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 282.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 287, présenté par Mme Puissat et M. Henno, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 22
Après le mot :
vigueur
rédiger ainsi la fin de cet alinéa :
à une date fixée par décret et, au plus tard, six mois après la publication de la présente loi.
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Le projet de loi fixait initialement l'entrée en vigueur des dispositions de l'article 22 au 1er janvier 2026.
Craignant que le délai soit un peu court, nous proposons de repousser cette date d'entrée en vigueur.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Avis favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 287.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 22, modifié.
(L'article 22 est adopté.)
Article 22 bis (nouveau)
Le livre II de la huitième partie du code du travail est ainsi modifié :
1° Le 4° de l'article L. 8224-3 est ainsi modifié :
a) Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« L'affichage ou la diffusion est opéré pour une durée maximale de deux ans par les services du ministre chargé du travail sur un site internet, dans des conditions prévues par décret en Conseil d'État pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés. » ;
b) La deuxième phrase du second alinéa est supprimée ;
2° Le 3° de l'article L. 8224-5 est ainsi modifié :
a) Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« L'affichage ou la diffusion est opéré pour une durée maximale de deux ans par les services du ministre chargé du travail sur un site internet, dans des conditions prévues par décret en Conseil d'État pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés. » ;
b) La deuxième phrase du second alinéa est supprimée ;
3° La seconde phrase du dernier alinéa de l'article L. 8234-1, le dernier alinéa de l'article L. 8234-2, la seconde phrase du dernier alinéa de l'article L. 8243-1, le dernier alinéa de l'article L. 8243-2, la seconde phrase du 4° de l'article L. 8256-3 et le dernier alinéa de l'article L. 8256-7 sont ainsi modifiés :
a) Au début, les mots : « Lorsqu'une amende est prononcée, » sont supprimés ;
b) Le mot : « dédié » est supprimé – (Adopté.)
Après l'article 22 bis
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 300 est présenté par M. Henno et Mme Puissat, au nom de la commission des affaires sociales.
L'amendement n° 305 est présenté par le Gouvernement.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 22 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa de l'article L. 724-7 est ainsi modifié :
a) À la fin de la première phrase, sont ajoutés les mots : « et à la caisse centrale de mutualité sociale agricole » ;
b) À la seconde phrase, après la deuxième occurrence du mot : « agricole », sont insérés les mots : « , ou à la caisse centrale de mutualité sociale agricole, » ;
2° Au premier alinéa de l'article L. 724-11, après le mot : « agricole », sont insérés les mots : « et de la caisse centrale de mutualité sociale agricole ».
II. – Au 4° de l'article L. 8271-1-2 du code du travail, les mots : « et des caisses de mutualité sociale agricole » sont remplacés par les mots : « , des caisses de mutualité sociale agricole et de leurs caisse nationale ou centrale ».
La parole est à Mme le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 300.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Cet amendement vise à renforcer les moyens dont dispose la Caisse centrale de la Mutualité sociale agricole (CCMSA) afin de lutter contre la fraude, en lui permettant notamment de mener des contrôles et de recruter directement des agents de contrôle.
M. le président. La parole est à Mme la ministre, pour présenter l'amendement n° 305.
Mme Stéphanie Rist, ministre. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 300 et 305.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 22 bis.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 301 est présenté par M. Henno et Mme Puissat, au nom de la commission des affaires sociales.
L'amendement n° 307 est présenté par le Gouvernement.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 22 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° Après le 3° bis du I de l'article 28-1, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« ...° L'infraction prévue à l'article L. 114-13 du code de la sécurité sociale ; »
2° Le I de l'article 28-2 est ainsi modifié :
a) Après le 3°, il est inséré un 3° bis ainsi rédigé :
« 3° bis L'infraction prévue à l'article L. 114-13 du code de la sécurité sociale ; »
b) Au 4°, la référence : « 3° » est remplacée par la référence : « 3° bis ».
La parole est à Mme le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 301.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Cet amendement vise à permettre à l'Office national anti-fraude (Onaf) d'intervenir en matière d'escroquerie commise au préjudice d'un organisme de protection sociale.
M. le président. La parole est à Mme la ministre, pour présenter l'amendement n° 307.
Mme Stéphanie Rist, ministre. Défendu !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 301 et 307.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 22 bis.
Article additionnel avant l'article 23 (précédemment examiné)
Article 23 (précédemment examiné)
Articles additionnels après l'article 23 (précédemment examinés)
M. le président. Je rappelle que l'amendement portant article additionnel avant l'article 23, l'article 23 et les amendements portant articles additionnels après l'article 23 ont été précédemment examinés.
Article 24
Le code du travail est ainsi modifié :
1° Après l'article L. 6362-8, il est inséré un article L. 6362-8-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 6362-8-2. – Le droit de reprise de l'administration s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année qui suit celle de la clôture de l'exercice au cours duquel les fonds versés en vue du financement des actions et activités mentionnées à l'article L. 6313-1, qui font l'objet de la reprise, ont été comptabilisés par l'entreprise ou par l'organisme.
« Par dérogation au premier alinéa du présent article, le droit de reprise de l'administration peut s'exercer jusqu'à la fin de la dixième année qui suit celle de la clôture de l'exercice au cours duquel les fonds versés ont été comptabilisés lorsque :
« 1° L'employeur ou l'organisme n'a pas respecté, au cours des deux années précédant celle de la clôture de l'exercice mentionné au premier alinéa, deux au moins des obligations mentionnées au titre III du livre II ou au titre V du livre III de la sixième partie du présent code ;
« 2° L'employeur ou l'organisme chargé de réaliser tout ou partie des actions mentionnées à l'article L. 6313-1 a commis l'une des manœuvres frauduleuses mentionnées à l'article L. 6362-7-2 ;
« 3° Des manquements aux obligations prévues à la présente partie sont révélés par une procédure judiciaire, par une procédure devant les juridictions administratives ou par une réclamation contentieuse. » ;
2° À la fin du deuxième alinéa de l'article L. 6362-9, les mots : « et des pénalités fiscales correspondantes » sont remplacés par les mots : « au titre des sanctions financières mentionnées aux articles L. 6362-2 à L. 6362-7-3 ».
M. le président. L'amendement n° 294, présenté par Mme Puissat et M. Henno, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Supprimer les mots :
et activités
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Avis favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 294.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 24, modifié.
(L'article 24 est adopté.)
Article 24 bis (nouveau)
I. – L'article L. 711-4 du code de la consommation est ainsi modifié :
1° Le 3° est complété par les mots : « ,des collectivités territoriales débitrices de prestations et d'aides sociales » ;
2° L'avant-dernier alinéa est complété par les mots : « , soit par une sanction prononcée par le président du conseil départemental dans les conditions prévues à l'article L. 262-52 du code de l'action sociale et des familles ».
II. – Le code de l'action sociale et des familles est ainsi modifié :
1° Après le premier alinéa de l'article L. 262-28, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation au premier alinéa, le bénéficiaire du revenu de solidarité active tirant, depuis deux années, des revenus d'une activité professionnelle soumis au régime déterminé à l'article 50-0 du code général des impôts est tenu de rechercher un emploi. » ;
2° Au 1° du XI de l'article L. 549-1, le mot : « deuxième » est remplacé par le mot : « troisième ».
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 296, présenté par Mme Puissat et M. Henno, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 2
Remplacer les mots :
débitrices de prestations et d'aides sociales
par les mots :
versant des prestations et aides sociales
II. – Alinéa 7
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
M. le président. L'amendement n° 259 rectifié, présenté par MM. Rambaud, Iacovelli et Lévrier, Mme Nadille, MM. Théophile, Patriat, Buis et Buval, Mmes Cazebonne et Duranton, M. Fouassin, Mme Havet, MM. Kulimoetoke, Lemoyne, Mohamed Soilihi et Patient, Mme Phinera-Horth, M. Rohfritsch, Mme Schillinger et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :
Alinéas 4 à 7
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Xavier Iacovelli.
M. Xavier Iacovelli. Défendu !
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 259 rectifié ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. La commission y est défavorable, car nous avons nous-mêmes fait en sorte d'introduire dans le texte l'impossibilité de cumuler, pour une période indéterminée, la perception du RSA et le statut d'autoentrepreneur. Ce cumul sera limité à deux ans, car nous considérons que tout allocataire du RSA doit, à un moment donné, s'inscrire dans une logique de droits et de devoirs.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Le Gouvernement est défavorable aux amendements nos 296 et 259 rectifié.
M. Xavier Iacovelli. Je retire l'amendement n° 259 rectifié !
M. le président. L'amendement n° 259 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 296.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 24 bis, modifié.
(L'article 24 bis est adopté.)
Article 25
Le code du travail est ainsi modifié :
1° (nouveau). – L'article L. 6323-44 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque la contrainte prévue au premier alinéa résulte de la constatation d'une manœuvre frauduleuse, elle est immédiatement exécutoire. Le prestataire, qui a formé opposition à cette contrainte devant la juridiction compétente, peut demander d'en arrêter l'exécution provisoire lorsqu'il existe un moyen sérieux d'invalidation et que l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives. Un décret en Conseil d'État précise les modalités et délais de la procédure aux fins d'arrêter l'exécution provisoire de la contrainte prévue au présent alinéa. » ;
2° La section 7 du chapitre III du titre II du livre III de la sixième partie est complétée par un article L. 6323-45-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 6323-45-1. – En cas de manœuvres frauduleuses et pour le remboursement des sommes correspondant à la mobilisation par le titulaire du compte personnel de formation de droits indus ou à une mobilisation de droits par celui-ci en violation de la réglementation, le directeur général de la Caisse des dépôts et consignations peut délivrer une contrainte qui, à défaut d'opposition du titulaire du compte personnel de formation devant la juridiction compétente, comporte tous les effets d'un jugement. »
M. le président. L'amendement n° 117, présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
L'opposition formée par le titulaire du compte personnel de formation n'entraîne à sa charge aucuns frais systématiques de poursuite ou de procédure.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Le présent amendement vise à garantir l'effectivité du droit de recours reconnu au titulaire du compte personnel de formation lorsqu'une contrainte est délivrée par la Caisse des dépôts et consignations.
La procédure actuelle expose la personne concernée à des frais de justice ou de poursuite susceptibles de la dissuader d'exercer son droit d'opposition, notamment pour des montants modestes.
Afin de prévenir cet effet dissuasif, le présent amendement tend à consacrer le principe de gratuité du recours et à exclure la prise en charge par les assurés concernés de l'ensemble des frais de poursuite ou de procédure. En l'adoptant, nous renforcerions l'équité et la sécurité juridique du dispositif tout en maintenant, je le souligne, la possibilité de sanctionner les recours abusifs.
Les recours abusifs existent – c'est un fait – dans de nombreux pans du droit, mais ils ne sont en aucun cas systématiques. Ils doivent être fondés et ne sauraient remettre en cause le droit au recours et la gratuité de ce dernier.
Il s'agit d'ailleurs d'un amendement de repli : le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires s'oppose, par principe, à toute reprise financière d'un droit personnel. En l'occurrence, le titulaire du CPF ne tire aucun bénéfice financier de la situation.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Cet amendement vise à préciser que l'opposition formée par le titulaire du CPF n'entraîne aucun frais systématique de poursuite ou de procédure à sa charge.
Il semble plus cohérent de ne dispenser le débiteur des frais de signification de la contrainte et des actes de procédure que lorsque l'opposition a été jugée fondée. Il n'y a rien d'anormal à ce que celui qui engage une procédure en assume le coût.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Même avis.
M. le président. Je mets aux voix l'article 25.
(L'article 25 est adopté.)
Article 26
I. – Après le premier alinéa de l'article L. 133-4-9 du code de la sécurité sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque l'opposition est formée par les organismes de recouvrement mentionnés aux articles L. 213-1 et L. 752-1 du présent code et à l'article L. 723-2 du code rural et de la pêche maritime et porte sur un contrat d'assurance rachetable, elle entraîne le rachat forcé de ce contrat. Elle a pour effet d'affecter à ces organismes la valeur de rachat du contrat d'assurance au jour de la notification de l'opposition, dans la limite du montant de cette dernière. Ces dispositions s'appliquent à tout contrat d'assurance rachetable, y compris si la possibilité de rachat fait l'objet de limitations. »
II. – Aux articles L. 132-14 du code des assurances et L. 223-15 du code de la mutualité, après le mot : « territoriales », sont insérés les mots : «, de l'article L. 133-4-9 du code de la sécurité sociale » – (Adopté.)
Article 27
I. – Le code du travail est ainsi modifié :
1° L'article L. 5426-8-2 est ainsi modifié :
a) Au début, est ajoutée la mention : « I. – » ;
b) Il est ajouté un II ainsi rédigé :
« II. – En cas de manquement délibéré ou de manœuvres frauduleuses, les sommes indues peuvent faire l'objet d'une saisie administrative à tiers détenteur, dans les conditions prévues par l'article L. 262 du livre des procédures fiscales.
« L'avis de saisie administrative à tiers détenteur est notifié par le directeur général de l'opérateur France Travail ou par des agents placés sous son autorité qu'il désigne selon des modalités fixées par décret en Conseil d'État, au redevable et au tiers détenteur. L'exemplaire notifié au redevable mentionne, sous peine de nullité, les délais et les voies de recours. » ;
2° Le premier alinéa de l'article L. 5428-1 est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Ces dispositions ne sont pas applicables lorsque, pour le remboursement de sommes indûment versées en raison d'un manquement délibéré ou de manœuvres frauduleuses, l'opérateur France Travail procède, en application de l'article L. 5426-8-1, à des retenues sur les paiements à venir. »
II. – Le 4 de l'article L. 262 du livre des procédures fiscales est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsqu'une personne est simultanément destinataire d'une saisie administrative à tiers détenteur émise par le comptable public en application du présent article et d'une saisie à tiers détenteur émise par le directeur général de l'opérateur France Travail ou par les agents placés sous son autorité en application de l'article L. 5426-8-2 du code du travail, elle doit, en cas d'insuffisance des fonds, exécuter en priorité la saisie administrative à tiers détenteur émise par l'administration fiscale. »
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 124 est présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel.
L'amendement n° 239 rectifié est présenté par Mmes Silvani, Apourceau-Poly et Brulin, MM. Barros, Savoldelli et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l'amendement n° 124.
Mme Raymonde Poncet Monge. L'article 27 ouvre à France Travail la possibilité, d'une part, d'émettre des saisies administratives à tiers détenteur, d'autre part, de retenir la totalité des versements à venir des allocations d'assurance chômage en cas d'indus engendrés par des manquements délibérés ou par des manœuvres frauduleuses.
Dans son avis, le Conseil d'État s'est prononcé contre la seconde mesure : « Le Conseil d'État constate tout d'abord qu'aucun élément de l'étude d'impact ne permet d'apprécier l'importance des situations, vraisemblablement marginales, mentionnées au deuxième paragraphe du présent point et que le Gouvernement n'a pas été́ en mesure de lui apporter plus d'informations – il nous en donnera peut-être dans cet hémicycle – […]. Il souligne ensuite les difficultés d'articulation de la mesure avec la mise en œuvre des dispositifs visant à garantir un niveau de ressources minimal. Dans ces conditions et au regard des objectifs poursuivis par le projet de loi, le Conseil d'État suggère de ne pas retenir la mesure envisagée. »
De même, la Défenseure des droits appelle spécifiquement l'attention du législateur sur le fait que, conformément aux dispositions du code du travail, les aides, prestations et allocations versées par France Travail sont cessibles et saisissables dans les mêmes conditions et limites que les salaires. Ces retenues doivent rester strictement dans le cadre de la fraction saisissable prévue par le code du travail, qui fixe le montant maximal de la saisie, en fonction des revenus et de la composition familiale du foyer du demandeur d'emploi. Une autre fraction des revenus est, quant à elle, totalement insaisissable, de sorte qu'une personne seule dispose au moins d'une somme équivalente au montant forfaitaire du revenu de solidarité active. Ces mécanismes assurent au salarié comme au demandeur d'emploi un reste à vivre, permettant de subvenir à ses besoins essentiels.
Il convient donc de ne pas légiférer pour des situations « vraisemblablement marginales », pour reprendre les termes du Conseil d'État, en contradiction avec le principe de garantie d'un niveau de ressources minimal.
Suivant les recommandations du Conseil d'État et de la Défenseure des droits, nous proposons de supprimer l'article 27
M. le président. La parole est à Mme Silvana Silvani, pour présenter l'amendement n° 239 rectifié.
Mme Silvana Silvani. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur ces amendements identiques de suppression.
La commission soutient l'article 27, qui a pour objet de renforcer les prérogatives de France Travail afin d'améliorer le taux de recouvrement des indus frauduleux. Je rappelle que ces derniers s'élèvent à 84 millions d'euros.
À l'heure où nous parlons du déficit de l'Unédic, pour des raisons diverses et variées, il nous semble important de pouvoir lutter contre cette fraude. Cet article vise les indus provoqués par un manquement délibéré ou par une manœuvre frauduleuse : ces dispositions sont donc bien au cœur de ce projet de loi.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. L'adoption de ces amendements identiques empêcherait France Travail de disposer de moyens supplémentaires dont il a besoin, à savoir avoir l'autorisation de procéder à des saisies administratives à tiers détenteur et créer une exception au respect de la quotité saisissable dans certains cas.
Vous avez cité l'avis du Conseil d'État, madame la sénatrice. Il est vrai que l'étude d'impact n'était pas finalisée lorsque des premiers échanges entre mon ministère et le Conseil d'État ont eu lieu. Je tiens toutefois à souligner que mes services, en lien avec les équipes de France Travail, ont pu évaluer l'impact financier de cette mesure et que le chiffrage est désormais consultable en ligne sur le site du Sénat. Les éléments que vous avez demandés sont donc à votre disposition.
Le Gouvernement estime que la mesure proposée pourrait se traduire par une hausse de 20 % du taux de recouvrement des trop-perçus frauduleux. C'est significatif.
Vous avez également avancé l'argument de la privation du droit à bénéficier de moyens convenables d'existence. Je tiens à rappeler que nous ne prévoyons la levée de l'opposabilité de la quotité insaisissable que dans les cas de fraude. Nous ne remettons nullement en cause cette protection lorsque les sanctions sont prononcées pour tout autre motif.
Vous comprendrez donc que le Gouvernement émette un avis défavorable sur ces amendements identiques.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 124 et 239 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 123, présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 5
Remplacer les mots :
manquement délibéré ou de manœuvres frauduleuses
par le mot :
fraude
II. – Alinéas 7 et 8
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. L'article 27 autorise l'opérateur France Travail à réaliser des saisies à tiers détenteur en cas de manquement délibéré ou de manœuvres frauduleuses.
La Défenseure des droits a rappelé que la notion de « manœuvres frauduleuses » ne correspond à aucune qualification expressément prévue par la réglementation de l'assurance chômage, tandis que celle de « manquement délibéré » ne renvoie qu'à la pénalité prévue dans le code du travail.
Par conséquent, sur la recommandation de la Défenseure des droits, qui, jusqu'à présent, a été peu entendue, nous proposons de ne permettre à France Travail de réaliser des saisies à tiers détenteur ou de procéder à la retenue intégrale des versements à venir pour rembourser un trop-perçu de prestations de chômage qu'en cas de fraude.
En ne mobilisant qu'une seule qualification, cette approche garantirait la sécurité juridique du dispositif, tout en distinguant clairement les situations où l'intentionnalité frauduleuse est établie de celles qui sont liées à des erreurs ou à des négligences.
L'article 27 confère également à France Travail la possibilité de retenir l'intégralité des versements à venir pour rembourser un trop-perçu de prestations de chômage.
Nous proposons de supprimer cette disposition. En effet, le Conseil d'État – mais peut-être celui-ci a-t-il précisé sa position depuis la publication de son avis – et la Défenseure des droits appellent spécifiquement l'attention du législateur sur le risque que cette mesure n'entraîne une privation du droit à bénéficier de moyens convenables d'existence.
Par ailleurs, les rares personnes demandant la réouverture des droits à l'assurance chômage après une radiation pour fraude le font sur le fondement de droits nouveaux ou d'anciens droits acquis de manière légitime. En effet, lorsqu'ils résultent uniquement d'une fraude, les droits attribués sont systématiquement annulés. Les prestations susceptibles d'être entièrement récupérées correspondent donc à des droits légalement obtenus et financés par des cotisations sociales.
M. le président. L'amendement n° 47 rectifié bis, présenté par Mmes Pantel et M. Carrère, MM. Roux, Masset et Guiol, Mmes Jouve, Guillotin et Girardin et MM. Bilhac, Cabanel et Gold, est ainsi libellé :
Alinéa 8
Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :
« Pour le recouvrement de sommes indûment versées à la suite d'un manquement délibéré ou de manœuvres frauduleuses, l'opérateur France Travail peut, en application de l'article L. 5426-8-1, effectuer des retenues sur les versements à venir.
« Ces retenues sont effectuées dans la limite assurant le maintien d'un montant minimal de ressources laissé à la disposition du bénéficiaire, conformément à l'article L. 3252-2 du code du travail. »
La parole est à M. Michel Masset.
M. Michel Masset. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 295, présenté par Mme Puissat et M. Henno, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 8
Remplacer le mot :
paiements
par le mot :
échéances
La parole est à Mme le rapporteur, pour présenter cet amendement et pour donner l'avis de la commission sur les amendements nos 123 et 47 rectifié bis.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. L'amendement n° 295 est rédactionnel.
L'amendement n° 123 vise, d'une part, à remplacer l'expression « manquement délibéré ou de manœuvres frauduleuses » par le mot « fraude », d'autre part, et surtout, à supprimer les alinéas 7 et 8, afin de rétablir l'application de la quotité insaisissable pour les allocations chômage.
Comme je l'ai déjà indiqué, la commission est favorable au projet de loi, notamment à l'article 27 dans son intégralité. Par conséquent, elle émet un avis défavorable sur les amendements nos 123 et 47 rectifié bis.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Le Gouvernement émet, comme la commission, un avis défavorable sur les amendements nos 123 et 47 rectifié bis, et un avis favorable sur l'amendement n° 295.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 123.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 47 rectifié bis.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 27, modifié.
(L'article 27 est adopté.)
Après l'article 27
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements identiques.
L'amendement n° 67 rectifié quater est présenté par Mme Lermytte, MM. Malhuret et Chasseing, Mmes Bourcier et L. Darcos, MM. Wattebled, Pellevat, Chevalier, Grand, Rochette, Capus, Médevielle, V. Louault, Laménie et Brault, Mme Vermeillet et M. Houpert.
L'amendement n° 80 rectifié est présenté par M. Milon.
L'amendement n° 87 rectifié quater est présenté par Mme Gruny, MM. Milon et J.P. Vogel, Mmes Muller-Bronn, M. Mercier et Malet, MM. Hugonet, Sol et Panunzi, Mme Micouleau, MM. H. Leroy, Daubresse et de Nicolaÿ, Mme Josende, M. Khalifé, Mmes Petrus, Dumont et Gosselin, M. Sido, Mmes Belrhiti et Ventalon, MM. Chatillon, Burgoa et Rapin, Mmes P. Martin, Lassarade et Imbert et M. Belin.
L'amendement n° 161 rectifié ter est présenté par Mmes Romagny et N. Goulet, MM. Cambier et J.B. Blanc, Mme Billon, MM. Mizzon, Lévrier, Menonville, Kern et Pillefer, Mme Antoine, M. Fargeot, Mmes Perrot et Aeschlimann, M. Levi, Mmes Saint-Pé, Guidez, Demas, Patru et Gacquerre, MM. Canévet et Hingray, Mme Devésa, MM. Courtial, Parigi et Meignen et Mme Jacquemet.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 27
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 711-13 du code de la sécurité sociale, il est rétabli un article L. 711-13-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 711-13-1. – Sous réserve de l'application des dispositions prévues au présent titre, les organismes gestionnaires d'un régime spécial visé à l'article L. 711-1 sont habilités à délivrer une contrainte en vue de recouvrer une pénalité financière dans les conditions prévues au deuxième alinéa du c du I de l'article L. 114-17-2. »
La parole est à Mme Corinne Bourcier, pour présenter l'amendement n° 67 rectifié quater.
Mme Corinne Bourcier. Il existe aujourd'hui une incertitude quant à la possibilité pour les organismes gestionnaires d'un régime spécial de recouvrer une pénalité financière par voie de contrainte. Il est par conséquent nécessaire, si l'on veut renforcer la lutte contre la fraude sociale, de sécuriser l'usage d'une telle prérogative par les caisses de sécurité sociale, afin d'assurer la cohérence de l'action des organismes gestionnaires, quel que soit le régime concerné, notamment en matière de recouvrement des prestations indues.
M. le président. L'amendement n° 80 rectifié n'est pas soutenu.
La parole est à Mme Pascale Gruny, pour présenter l'amendement n° 87 rectifié quater.
Mme Pascale Gruny. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour présenter l'amendement n° 161 rectifié ter.
Mme Nathalie Goulet. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Ces amendements identiques visent à conférer une base légale aux organismes gestionnaires d'un régime spécial afin qu'ils puissent recouvrer les pénalités financières par voie de contrainte.
La commission émet un avis favorable sur ces amendements.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Les organismes gestionnaires d'un régime spécial peuvent d'ores et déjà prononcer des contraintes en application des dispositions de l'article L. 133-4 du code de la sécurité sociale.
En particulier, la caisse de coordination aux assurances sociales (CCAS) de la RATP, même si celle-ci n'est juridiquement pas distincte de l'établissement public de la RATP, a bien la personnalité morale.
Par ailleurs, le champ de ces amendements nous semble trop large. Ces derniers visent ainsi l'ensemble des prérogatives attribuées aux organismes de sécurité sociale, mais certaines d'entre elles ne sont pas applicables aux régimes spéciaux. C'est pourquoi, en l'état du droit, la CCAS de la RATP peut prendre des mesures contraignantes. Tels qu'ils sont rédigés, ces amendements, ont en partie pour objet des dispositions qui ne sont pas applicables.
Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces amendements.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 67 rectifié quater, 87 rectifié quater et 161 rectifié ter.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 27.
Article 28 (nouveau)
Après le chapitre II du titre Ier du livre III de la cinquième partie du code du travail, il est inséré un chapitre II bis ainsi rédigé :
« CHAPITRE II bis
« Lutte contre la fraude
« Art. L. 5312-15. – Pour l'accomplissement de leur mission de lutte contre la fraude, les agents chargés de la prévention des fraudes agréés et assermentés mentionnés à l'article L. 5312-13-1 peuvent interroger l'unité de gestion mentionnée au VI de l'article L. 232-7 du code de la sécurité intérieure en vue d'être destinataires de données mentionnées au II du même article L. 232-7 aux seules fins de contrôler le respect de la condition de résidence en France, dès lors que les allocations mentionnées à l'article L. 5421-2 du présent code sont soumises à une telle condition.
« Art. L. 5312-16. – Pour l'accomplissement de leur mission de lutte contre la fraude, les agents chargés de la prévention des fraudes agréés et assermentés mentionnés à l'article L. 5312-13-1 peuvent interroger les services du ministre chargé des affaires étrangères tenant le registre mentionné à l'article L.12 du code électoral, aux seules fins de contrôler le respect de la condition de résidence en France, dès lors que les allocations mentionnées à l'article L. 5421-2 du présent code sont soumises à une telle condition.
« Art. L. 5312-17. – Pour l'accomplissement de leur mission de lutte contre la fraude, les agents chargés de la prévention des fraudes agréés et assermentés mentionnés à l'article L. 5312-13-1 sont autorisés à traiter, en application de l'article 47 du règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016, relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la directive 95/46/CE (règlement général sur la protection des données), et dans le respect des dispositions de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, les données de connexion des bénéficiaires dont ils disposent, aux seules fins de contrôler le respect de la condition de résidence en France, dès lors que les allocations mentionnées à l'article L. 5421-2 du présent code sont soumises à une telle condition.
« Art. L. 5312-18. – Les modalités d'application des articles L. 5312-15 à L. 5312-17 sont fixées par décret en Conseil d'État, pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés.
« Art. L. 5312-19. – Lorsque les agents chargés de la prévention des fraudes agréés et assermentés mentionnés à l'article L. 5312-13-1 réunissent plusieurs indices sérieux de manœuvres frauduleuses, de manquement délibéré à ses obligations ou de commission d'infractions de la part d'un bénéficiaire d'une des allocations mentionnées à l'article L. 5421-2, le directeur général de France Travail peut procéder à la suspension conservatoire de tous paiements au titre de ladite allocation.
« Cette décision motivée est immédiatement notifiée à l'intéressé. Elle précise les voies et délais de recours, ainsi que la possibilité pour l'intéressé de présenter, lors d'un débat contradictoire tenu à sa demande, dans un délai de deux semaines à compter de ladite notification, des éléments de nature à rétablir le versement de l'allocation.
« La durée de la mesure de suspension ne peut excéder trois mois à compter de sa notification.
« Un décret en Conseil d'État détermine les modalités d'application du présent article, et notamment les garanties de respect du contradictoire dont dispose le bénéficiaire dont l'allocation est suspendue. »
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° 100 est présenté par M. Fichet, Mme Canalès, MM. Lurel, Jacquin et Kanner, Mmes Le Houerou, Conconne et Féret, M. Jomier, Mmes Lubin, Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L'amendement n° 118 est présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel.
L'amendement n° 238 rectifié est présenté par Mmes Silvani, Apourceau-Poly et Brulin, MM. Barros, Savoldelli et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Jean-Luc Fichet, pour présenter l'amendement n° 100.
M. Jean-Luc Fichet. Cet article, introduit sur l'initiative des rapporteurs lors de l'examen en commission, vise prétendument à renforcer les moyens de France Travail dans la lutte contre la fraude.
Nous partageons évidemment cet objectif : la fraude doit être combattue avec fermeté et discernement. En l'occurrence toutefois, les moyens prévus dépassent largement le champ de ce qui est nécessaire et acceptable.
Donner aux agents de France Travail accès à des fichiers aussi sensibles que ceux des compagnies aériennes ou que ceux qui contiennent les données de connexion ou les relevés téléphoniques, c'est franchir une ligne rouge. Cela revient à introduire une forme de surveillance généralisée des demandeurs d'emploi, assimilés à des fraudeurs potentiels.
Une telle extension des pouvoirs de contrôle constitue une atteinte grave à la vie privée des demandeurs d'emploi. La lutte contre la fraude ne doit jamais se faire au détriment des libertés individuelles ni au prix d'une suspicion permanente envers celles et ceux qui cherchent simplement à retrouver un emploi.
Nous sommes également très inquiets en ce qui concerne la possibilité donnée au directeur général de France Travail de suspendre le versement d'une allocation sur le simple fondement d'« indices sérieux » de fraude.
Derrière cette formule vague, il y a des allocataires, des femmes et des hommes, qui, en cas d'erreur ou de suspicion infondée, pourraient se voir temporairement privés de toute ressource du jour au lendemain, ce qui aurait des conséquences graves sur leur situation personnelle et familiale.
En réalité, cet article s'inscrit dans une logique de défiance à l'égard des chômeurs, alors qu'il faudrait, au contraire, leur faire confiance et leur donner les moyens de se réinsérer durablement.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l'amendement n° 118.
Mme Raymonde Poncet Monge. Je pourrais me contenter de dire que cet amendement est déjà défendu, mais il convient, me semble-t-il, de l'examiner avec attention, car il dote France Travail de prérogatives particulièrement intrusives en matière de contrôle des allocataires.
Monsieur le ministre, vous disiez refuser tout dispositif de surveillance généralisée. Pourtant, nous y sommes !
L'article 28 permet ainsi aux agents d'interroger les fichiers de compagnies aériennes pour vérifier la résidence des personnes indemnisées. Cette mesure introduit un contrôle sur les déplacements individuels, au mépris de la vie privée et du droit à la libre circulation. Donner accès à des données sensibles sans soupçon avéré de fraude – il n'y a donc plus de présomption d'innocence – est contraire aux principes de nécessité et de proportionnalité définis par le règlement général sur la protection des données (RGPD).
Cet article instaure également un droit de communication auprès des opérateurs téléphoniques pour accéder aux relevés d'appels. Cette disposition, d'une nature intrusive manifeste, autoriserait France Travail à examiner les habitudes de communication des allocataires, ce qui porte atteinte au secret de leurs données personnelles intimes.
Nous le disons fermement : un tel dispositif ouvre la voie à des dérives incompatibles avec un État de droit.
La possibilité d'accéder au registre des Français établis hors de France participe du même esprit de suspicion. Le ministre de l'Europe et des affaires étrangères estime que seuls 70 % des Français établis hors de France s'y sont inscrits, car l'inscription n'est pas obligatoire. Quel fraudeur cette mesure permettra-t-elle donc réellement d'identifier ?
La possibilité de traiter les données de connexion des personnes inscrites à France Travail achève de dessiner un dispositif de traçage numérique. L'extension des données exploitables crée un précédent dangereux pour les libertés individuelles.
En outre, le directeur général de France Travail pourrait suspendre le versement d'une allocation, simplement sur le fondement d'« indices sérieux », qu'il définirait lui-même. Cette mesure, contraire à la présomption d'innocence et au principe du contradictoire, introduit une insécurité juridique inacceptable.
M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour présenter l'amendement n° 238 rectifié.
M. Pascal Savoldelli. Je partage les arguments qui viennent d'être exposés par mes collègues Jean-Luc Fichet et Raymonde Poncet Monge.
Cet article, comme d'autres, ne justifie d'ailleurs pas le « et » entre fraudes sociales et fraudes fiscales, qui figure dans l'intitulé du projet de loi.
Si nous avons bien compris le dispositif proposé, il s'agit d'instaurer une surveillance de masse systématique et uniforme de l'adresse IP de tous les allocataires de l'assurance chômage. Quel autre corps social accepterait un tel dispositif ? D'ailleurs, qui pourrait accepter cela ? Voilà un sujet qui relève non pas du social, mais de la protection des libertés.
Je vous le dis franchement, à mon sens, la transformation de l'État social à laquelle nous assistons ne correspond ni à l'esprit républicain ni à nos valeurs d'égalité et de fraternité. Dans ce projet de loi, la misère devient suspecte et il en est alors de même pour l'allocataire, et ce systématiquement. Permettre l'accès aux données IP, c'est entrer dans une autre société.
Il me semble qu'il convient de disposer d'un avis éclairé de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil). Si vous me prouvez que ce n'est pas nécessaire, je m'inclinerai. L'avez-vous saisie ? Il importe en effet d'évaluer les dispositifs avant de les mettre en place. La Cnil a-t-elle donc donné son accord à ce dispositif, à l'aune du respect des libertés ?
J'avoue être effaré par ce texte.
Il est nécessaire de combattre la fraude. C'est là une évidence qui nous rassemble. Cependant, je ne suis pas sûr que cette atteinte aux libertés de chacun et l'instauration de ce climat de suspicion s'inscrivent dans la continuité des valeurs républicaines de notre pays, la France.
Cela évoque une noirceur et des époques historiques que je n'ai pas envie de revivre (Murmures sur les travées du groupe Les Républicains.). On doute de celui qui ne travaille pas, de celui qui ne peut plus travailler. On instaure une méfiance généralisée.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. La commission émet évidemment un avis défavorable sur ces amendements identiques, puisque c'est elle qui a introduit cet article dans le texte. Nous assumons cette décision.
Rappelons d'abord que la fraude à l'assurance chômage représente 136 millions d'euros. Le premier motif de fraude, que les représentants de France Travail ont évoqué lors de leur audition, est la fraude à la condition de résidence. Il faut également évoquer la difficulté de recouvrement.
Ce qui nous importe, comme nous l'avons indiqué lors de la discussion générale, c'est de ne pas placer les administrations et les agences de l'État face à des injonctions paradoxales. Nous demandons aux agences de l'État de recouvrer les sommes dues. Nous leur demandons presque de nous fournir des évaluations chiffrées pour savoir combien il est possible d'inscrire, à ce titre, en recettes dans le projet de loi de finances et le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Cependant, en contrepartie, nous ne leur donnons pas les moyens de procéder au recouvrement et de mener ce travail de détection de la fraude.
Un certain nombre d'établissements et d'agences se sont pourtant pourvus d'outils et de services de lutte contre la fraude. L'agence France Travail s'est ainsi dotée de tels outils et d'une cellule de lutte contre la fraude, parce que nous lui avons demandé de le faire à plusieurs reprises et parce que cela figure dans la convention Unédic. Il s'agissait donc d'une demande des partenaires sociaux. C'est une très bonne chose et nous devons encourager France Travail en la matière, au même titre que tous les autres opérateurs.
Il faut exhorter tout le monde à faire de même : France Travail, France Compétences, toutes les agences, mais aussi les départements, qui doivent mettre en place des cellules de lutte contre la fraude au RSA. La lutte contre la fraude sociale et contre la fraude fiscale constitue un véritable enjeu.
France Travail nous demande justement de lui fournir des outils pour pouvoir exercer de tels contrôles. C'est bien ce que faisons-nous au travers de l'article 28.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Le Gouvernement remercie la commission des affaires sociales de soutenir son action en matière de lutte contre la fraude et de veiller à ce que France Travail dispose de tous les outils pour remplir sa mission. Celle-ci est importante, nous l'avons dit : il s'agit de récupérer l'argent qui nous manque pour assurer l'équilibre de nos comptes.
Pour autant, nous constatons qu'il y a un débat sur le caractère licite, ou non, de l'accès aux données qui est prévu. Faute d'avoir eu le temps d'étudier dans le détail cet article, le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat sur ces amendements identiques.
M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.
M. Pascal Savoldelli. La Cnil n'a donc pas été consultée ! Il ne s'agit pourtant pas d'une simple formalité. Ce n'est pas peanuts !
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Nous n'avons eu que trois semaines pour examiner le texte !
M. Pascal Savoldelli. Si vous voulez dire que ce projet de loi est mal écrit et qu'il entretient la confusion entre fraude fiscale et fraude sociale, c'est certain ! Chacun doit désormais assumer ses positions.
Je ne savais pas que la commission était favorable à l'instauration d'un « scoring social » à la chinoise, car c'est bien vers cela que l'on se dirige.
Dès lors que l'on systématisera le relevé des adresses IP, nous aurons l'impression de vivre non plus en France, mais en Chine ! Là-bas, tous les comportements sont notés, contrôlés, sanctionnés. Est-ce votre modèle ? (Mme le rapporteur sourit.) Vous pouvez sourire, madame le rapporteur : pour ma part, je ne trouve pas cela drôle, parce que je n'ai pas envie de vivre dans une telle société !
Vous vous réjouissez, par ailleurs, que l'on se dote de nouveaux outils, alors que nous devrions être très prudents en matière d'usage des algorithmes. Leurs marges d'erreur sont de 2 %. Si nous entrons dans cette société panoptique de contrôle total, avec de tels taux d'erreur, qui peuvent aller jusqu'à 5 %, ce seront entre un et trois millions de Français qui seront concernés, parce que les algorithmes fonctionnent selon des biais discriminants.
Il s'agit donc non pas de s'opposer au progrès et aux nouvelles technologies, mais de s'assurer qu'il y ait un vrai contrôle humain. Pour l'instant, nous n'avons aucune garantie à cet égard.
Finalement, cette discussion me rappelle celle que nous avons eue sur la santé. Les termes du débat sont les mêmes et ce sont eux qui nous posent problème.
Nul ici n'est pour la fraude ! Évitons d'avoir ces débats manichéens inutiles entre nous.
Toutefois, je vous le dis très sincèrement – mais j'ai peut-être tort –, ce texte constitue l'amorce d'une société liberticide. Nous devons faire très attention, car il suscitera des réactions. Lorsque l'on témoigne d'un soupçon aussi exagéré envers ceux qui sont en difficulté, il ne faut pas s'étonner que la défiance progresse !
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Monsieur le ministre, madame la ministre, je vous ai demandé tout à l'heure un rapport sur le répertoire national inter-régimes des bénéficiaires de l'assurance maladie (Rniam) et sur le problème de la violation de la condition de résidence, y compris par les dizaines de milliers de personnes domiciliées « chez » un tiers de façon abusive et dont il faudrait vérifier la situation.
Le code de la sécurité sociale comporte déjà des dispositions sur le contrôle de résidence.
Monsieur le ministre, lors de l'examen d'un précédent amendement et dans la perspective de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, je vous ai demandé de nous donner le nombre de contrôles réalisés sur le fondement de ces dispositions. Ce serait une bonne pratique.
Je considère que nous devons fournir des outils de contrôle aux organismes si l'on veut lutter contre la fraude. Pour autant, nous devons, au préalable, disposer de l'évaluation de ce qui a été fait.
Commençons par comprendre pourquoi entre 250 000 et 500 000 personnes sur le territoire bénéficient de droits, alors qu'elles ne satisfont plus à la condition de résidence. Tant que vous ne répondrez pas à cette question et que vous n'utilisez pas les dispositifs qui figurent déjà dans le code de la sécurité sociale, il n'est pas utile de prévoir des moyens aussi intrusifs.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Parlons chiffres.
Le montant des fraudes à l'assurance chômage s'élève à 136 millions d'euros. Des outils permettent déjà de les détecter.
Reste que les prestations versées au titre de l'assurance chômage s'élèvent à 34 milliards d'euros. La fraude représente donc 0,3 % de ce montant. Certes, il faut en tenir compte, mais cela justifie-t-il l'instauration d'une surveillance généralisée ? Telle est la question. Tout est affaire de proportionnalité. Il existe déjà, j'y insiste, des moyens pour effectuer le contrôle de résidence.
Vous voulez donner aux opérateurs des outils de lutte contre la fraude, sans vous demander si ces derniers ne sont pas privatifs des libertés fondamentales. Pourtant, aucun outil n'est neutre ! La Chine s'est dotée d'outils, mais cela a des conséquences.
Le problème est que nous vivons dans une société de plus en plus illibérale. Chacun connaît les risques qui pèsent sur notre pays et qui pourraient se réaliser dans un avenir proche. Voilà pourtant que vous offrez aux partisans d'une société illibérale des outils de surveillance généralisée. Il est à craindre d'ailleurs qu'ils serviront plutôt à mettre en œuvre une surveillance très ciblée ; nous savons comment cela fonctionne.
Les outils actuels sont suffisants. Ce n'est pas parce que l'on refuse les outils privatifs de liberté que l'on est contre la lutte contre la fraude. Tout à l'heure, nous parlions de dialectique, mais il y a des raccourcis qui posent problème !
Non, nous ne voulons pas de n'importe quels outils. Les outils ne sont pas neutres. Leur usage doit s'inscrire dans une société régie par un État de droit.
Ne méprisez pas les avis de la Cnil, du Conseil d'État et de la Défenseure des droits, au nom de la nécessité de donner des outils, quels qu'ils soient, à France Travail. Est-ce véritablement l'opérateur qui demande ces outils ? Je ne le sais pas. En tout cas, cela m'étonnerait que les organisations syndicales les réclament.
Nous sommes absolument contre le développement de cette surveillance qui tend à se généraliser.
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.
M. Marc Laménie. Ces amendements visent l'article 28, relatif au droit d'information de France Travail et à la possibilité de suspension conservatoire des allocations versées dans le cas d'un doute sérieux de fraude.
Ce matin, en commission des finances, nous avons examiné les crédits de la mission « Travail, emploi et administration des ministères sociaux ». France Travail, qui emploie 50 000 agents, est un opérateur très important de l'État.
Comme les rapporteurs de la commission des affaires sociales l'ont indiqué, dans ce débat comme dans leur rapport, qui, comme toujours, est d'une grande qualité, le montant total des fraudes à l'assurance chômage détectées s'élève à 136 millions d'euros.
Dans le détail, les chiffres sont les suivants : 56 millions d'euros pour les fraudes à la résidence ou le travail à l'étranger non déclarés, 20 millions d'euros pour les reprises d'activité non déclarée, 22,4 millions d'euros pour les usurpations d'identité, 7 millions d'euros en raison de l'usage de faux documents.
Tous les amendements sont légitimes, c'est ce qui fait la richesse des débats parlementaires.
Sur ces amendements identiques, ainsi que sur l'article 28, les membres du groupe Les Indépendants – République et Territoires suivront l'avis de la commission.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 100, 118 et 238 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L'amendement n° 297 rectifié, présenté par Mme Puissat et M. Henno, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 6
Remplacer la référence :
article 47
par la référence :
article 49
II. – Alinéa 11
Remplacer les mots :
l'allocation est suspendue
par les mots :
le paiement de l'allocation est suspendu
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. C'est un amendement de sécurisation juridique.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Sagesse !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 297 rectifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 28, modifié.
(L'article 28 est adopté.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Avant d'entamer l'examen de l'article suivant, je tiens à préciser la position du Gouvernement sur l'amendement n° 259 rectifié, qui a été déposé sur l'article 24 bis, dont l'examen a été un peu rapide.
Le Gouvernement était favorable à cet amendement. Sans entrer dans le détail de l'argumentation, j'indique toutefois que son avis est guidé par l'analyse du cadre constitutionnel.
Je m'engage, par ailleurs, à tenir Mme la rapporteure informée de la poursuite de notre travail et à proposer des actions concertées et soutenues par l'ensemble des acteurs chargées de l'accompagnement des bénéficiaires du RSA.
Je me devais d'apporter ces précisions.
M. Laurent Somon. Cet amendement a été retiré !
Article 29 (nouveau)
Après l'article L. 114-12-3-1 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 114-12-3-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 114-12-3-2 – Lorsque les agents chargés du contrôle mentionnés aux articles L. 114-10 et L. 243-7 et à l'article L. 724-7 du code rural et de la pêche maritime réunissent plusieurs indices sérieux de manœuvres frauduleuses, de manquement délibéré à ses obligations ou de commission d'infractions de la part d'un bénéficiaire d'une aide, prestation ou allocation, le directeur de l'organisme auquel ils appartiennent peut procéder à la suspension conservatoire de tous paiements au titre de ladite aide, prestation ou allocation.
« Cette décision motivée est immédiatement notifiée à l'intéressé. Elle précise les voies et délais de recours, ainsi que la possibilité pour l'intéressé de présenter, lors d'un débat contradictoire tenu à sa demande, dans un délai de deux semaines à compter de ladite notification, des éléments de nature à rétablir le versement de l'allocation.
« La durée de la mesure de suspension ne peut excéder deux mois à compter de sa notification.
« Un décret en Conseil d'État détermine les modalités d'application du présent article, et notamment les garanties de respect du contradictoire dont dispose le bénéficiaire dont l'allocation est suspendue. »
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 99 est présenté par M. Fichet, Mme Canalès, MM. Lurel, Jacquin et Kanner, Mmes Le Houerou, Conconne et Féret, M. Jomier, Mmes Lubin, Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L'amendement n° 119 est présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Marion Canalès, pour présenter l'amendement n° 99.
Mme Marion Canalès. Cet article, introduit en commission, permettrait aux organismes de sécurité sociale de suspendre à titre conservatoire le versement d'aides, d'allocations et de prestations, lorsqu'un doute sérieux de fraude est constaté.
Nous retrouvons le principe qui sous-tend l'article 17 ter, également introduit en commission, qui vise à suspendre le tiers payant, lorsque l'allocataire fraudeur a déjà été sanctionné, mais avec cet article, cela va encore plus loin : la suspension interviendrait à titre conservatoire, alors qu'il y a simplement un doute sérieux de fraude. Le doute ne profite donc pas à la personne concernée.
Évidemment, la fraude doit être combattue avec fermeté – nous partageons tout cet objectif –, mais elle doit aussi l'être avec discernement. Toutefois, nous voyons se dessiner une logique de suspicion généralisée – nous en avons parlé.
Les dispositifs de contrôle et de recouvrement existent déjà pour sanctionner les fraudes avérées. Il nous semble donc inutile d'ajouter une mesure qui fragilise encore davantage les allocataires.
Suspendre immédiatement le versement d'une aide sociale, même pour deux mois, peut avoir des conséquences graves. Cette mesure ne prévoit, à notre sens, aucune garantie ; elle s'inscrit dans une logique extrêmement punitive, d'autant qu'elle concerne un fraudeur potentiel et non un fraudeur avéré.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l'amendement n° 119.
Mme Raymonde Poncet Monge. Monsieur le ministre, vous avez tout à l'heure défendu le principe selon lequel, tant que les faits n'étaient pas établis, la présomption de fraude ne pouvait entraîner d'effets.
En l'espèce, il serait bon d'appliquer ce principe. Le dispositif proposé à des effets qui paraissent à la fois disproportionnés et porteurs d'un risque d'arbitraire, sans que son efficacité en matière de lutte contre la fraude soit clairement établie ou démontrée.
La formulation retenue permet une appréciation subjective de la fraude. En effet, un doute étayé par des indices pourrait conduire à une suspension. Par conséquent, une présomption de fraude vaudrait suspension. Cela ouvre la voie à un contrôle préventif sur la jouissance de droits, ce qui est incompatible avec le principe de présomption d'innocence, que vous nous avez à juste titre souvent opposé, comme avec les garanties fondamentales.
De plus, la mesure s'appliquerait à tout paiement afférent à l'aide, à la prestation ou à l'allocation. Cette suspension peut donc concerner l'intégralité des ressources d'un ménage, même les allocataires qui dépendent fortement, voire exclusivement, de ces versements pour subvenir à leurs besoins. Il est manifeste que ce sont les ménages les plus précaires qui risquent de subir les conséquences les plus lourdes de cette mesure.
Enfin, bien qu'une notification à la personne intéressée soit prévue, le dispositif présente un calendrier extrêmement contraignant. Pendant cette suspension, l'allocataire peut très vite se retrouver sans ressources.
En définitive, cet article instaure un pouvoir de suspension conservatoire, ce qui est nouveau, qui fragilise les droits fondamentaux des allocataires, en particulier ceux qui sont en situation de vulnérabilité, et ce, sur le fondement d'indices et non d'une condamnation. Quand il s'agit d'aides sociales ou d'allocations visant à lutter contre la pauvreté et les inégalités, le champ des mesures conservatoires de suspension ne peut pas être élargi. Le maintien d'un minimum d'existence doit être garanti.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Ces amendements reviennent sur l'apport de la commission qui vise à permettre aux organismes de sécurité sociale, pour les cas les plus graves ou manifestes, de suspendre, à titre conservatoire, le versement de prestations dans l'attente de la fin de l'enquête administrative.
Je rappelle qu'en la matière, et cela nous a été confirmé par toutes les agences et tous les services de l'État, la vitesse d'exécution est primordiale pour éviter de voir les fraudeurs disparaître et pour mieux recouvrer les sommes dues.
La commission émet donc un avis défavorable sur ces amendements identiques de suppression.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Le Gouvernement émet un avis favorable sur ces amendements identiques.
En effet, des possibilités de suspension à titre conservatoire existent déjà dans le droit positif.
Les caisses de sécurité sociale peuvent user de cette possibilité en cas de suspicion de fraude. La loi autorise alors à suspendre tout versement jusqu'à la production des éléments demandés, puis à supprimer définitivement les droits si ceux-ci ne paraissent pas établis.
M. le président. La parole est à Mme Marion Canalès, pour explication de vote.
Mme Marion Canalès. Nous avons déjà débattu de ce sujet en commission et je remercie la rapporteure de son écoute.
Depuis le début de l'examen de ce texte, j'essaye de m'appuyer sur l'étude d'impact, seule à même de nous permettre de mesurer l'effet de telle ou telle mesure. Pour ce dispositif, ce n'est pas possible, puisque cet article a été introduit en commission.
Madame le rapporteur, à quoi pensez-vous quand vous évoquez les cas les plus graves ou manifestes ? Combien de cas seraient concernés ? Nous avons vraiment très peu d'explications.
C'est la raison pour laquelle nous maintenons notre amendement de suppression.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Madame le rapporteur, nous parlons d'une mesure conservatoire, préventive, visant à suspendre des aides ou allocations sociales en l'absence de fait avéré. Il ne s'agit donc pas d'une question de vitesse de réaction après la découverte d'une fraude ! Je ne sais pas si vous mesurez bien la portée de cet article.
Il n'existe aucun autre dispositif équivalent pour les entreprises ! Rien ne vise à suspendre, de manière conservatoire, sur le fondement d'« indices sérieux », sans que l'on sache exactement de quoi il s'agit, les exonérations de cotisations sociales ou les subventions – ces fameux 211 milliards d'euros d'aides publiques – dont elles bénéficient !
Avec cet article, je le redis, il s'agit donc non pas une réaction à un fait ou à une condamnation, c'est ce n'est rien d'autre qu'une mesure conservatoire, c'est-à-dire préventive.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 99 et 119.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L'amendement n° 298, présenté par M. Henno et Mme Puissat, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Remplacer les mots :
l'allocation est suspendue
par les mots :
le paiement de l'allocation est suspendu
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Par cohérence avec sa position sur l'article 29, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 298.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 29, modifié.
(L'article 29 est adopté.)
Après l'article 29
M. le président. L'amendement n° 243 rectifié bis, présenté par Mmes Silvani, Apourceau-Poly et Brulin, MM. Barros, Savoldelli et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky, est ainsi libellé :
Après l'article 29
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 114-9 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 114-9-... ainsi rédigé :
« Art. L. 114-9-.... – I. – Les organismes chargés de la gestion d'un régime obligatoire de sécurité sociale et l'opérateur mentionné à l'article L. 5312-1 du code du travail veillent à la prévention des erreurs déclaratives et à l'accompagnement des usagers dans leurs démarches.
« II. – Lorsqu'un manquement constaté dans une déclaration ou une omission résulte d'une erreur de bonne foi, l'organisme concerné procède d'abord à une correction amiable et à un rappel d'information avant toute procédure de sanction ou de recouvrement.
« III. – L'erreur de bonne foi est présumée lorsque le bénéficiaire justifie :
« 1° Avoir signalé spontanément une erreur ou fourni les documents manquants dans un délai raisonnable ;
« 2° Ou avoir été confronté à une complexité administrative ou à une information contradictoire dans ses échanges avec l'administration.
« IV. – Chaque organisme met en place un dispositif de médiation interne chargé d'examiner les contestations relatives à la qualification d'erreur ou de fraude avant la transmission au parquet ou l'application de sanctions financières.
« V. – Un décret en Conseil d'État fixe les modalités d'application du présent article, notamment les critères permettant de distinguer l'erreur de bonne foi de la fraude délibérée. »
La parole est à Mme Silvana Silvani.
Mme Silvana Silvani. Dans ce projet de loi, il manque une dimension préventive.
Ce texte privilégie une approche essentiellement punitive – suspension, sanction automatique, interconnexion de fichiers – sans prise en compte de la bonne foi des allocataires, alors même que la confusion entre erreur et fraude conduit à des suspensions injustifiées de prestations, qui aggravent la précarité et minent la confiance envers les services publics.
Par cet amendement, il s'agit de réintroduire de l'humanité dans un système qui peut, aujourd'hui, broyer les plus vulnérables.
Les erreurs de bonne foi, déclenchées par la complexité des procédures ou des informations contradictoires, sont sanctionnées de la même manière que les fraudes délibérées. En 2024, 3 000 allocataires ont été saisis à tort pour des erreurs de déclaration. Un allocataire sur trois renonce à ses droits par peur des contrôles ou du fait de la complexité administrative.
Enfin, les révélations récentes sur les dérives des algorithmes dans les caisses d'allocations familiales et l'essor du contrôle algorithmique à France Travail montrent que nous sommes en train de basculer dans une société de la défiance, où la machine décide à la place de l'humain, souvent sans recours possible.
Nous proposons un autre choix : rétablir la présomption d'innocence, instaurer un droit à l'erreur et placer l'accompagnement avant la sanction.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Cet amendement vise à instaurer un devoir d'accompagnement déclaratif des assurés des organismes de sécurité sociale.
Il existe déjà de nombreux dispositifs en la matière – peut-être ne sont-ils pas suffisants, mais ce n'est pas l'objet de ce projet de loi.
C'est pourquoi la commission émet un avis défavorable sur cet amendement, qui lui paraît satisfait.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Même avis.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 243 rectifié bis.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 172 rectifié, présenté par MM. Sol et Milon, Mme Micouleau, M. J.B. Blanc, Mme Malet, MM. Anglars et Chatillon, Mme M. Mercier, M. Panunzi, Mme Dumont, MM. Daubresse et Naturel, Mmes Richer et Lassarade, MM. Hugonet et Sido, Mme Petrus, MM. Khalifé, Brisson et H. Leroy, Mme Aeschlimann, MM. Somon, Burgoa et Houpert, Mmes P. Martin et Imbert et MM. Belin, Delia et Meignen, est ainsi libellé :
Après l'article 29
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le III de l'article L. 133-4 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Le troisième alinéa est ainsi modifié :
a) Après les mots : « ou à l'établissement » , sont insérés les mots : « par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception » ;
b) Sont ajoutés les mots : « dans un délai de deux mois » ;
2° Au début du cinquième alinéa, sont insérés les mots : « À l'issue du délai de deux mois susmentionné et ».
La parole est à M. Laurent Somon.
M. Laurent Somon. Cet amendement déposé par M. Sol vise à modifier l'article du code de la sécurité sociale relatif à la procédure de recouvrement. Il tend à apporter des précisions quant au mode de notification du montant des sommes réclamées et au délai laissé à l'intéressé pour répondre et présenter ses observations.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. La commission n'a pas eu le temps d'expertiser cet amendement et n'a reçu aucune demande à ce sujet.
C'est pourquoi, sous réserve des éléments que pourra apporter le Gouvernement, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. L'adoption de cet amendement ne modifierait ni le droit positif ni la pratique des caisses, puisqu'il s'agit de reprendre des dispositions de niveau réglementaire.
Le Gouvernement s'en remet donc à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est maintenant l'avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. À titre personnel, au regard de ces explications, je suis favorable à cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 172 rectifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 29.
Intitulé du projet de loi
M. le président. L'amendement n° 245, présenté par Mmes Silvani, Apourceau-Poly et Brulin, MM. Barros, Savoldelli et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky, est ainsi libellé :
Remplacer les mots :
sociales et fiscales
par les mots :
fiscales et sociales
La parole est à Mme Silvana Silvani.
Mme Silvana Silvani. En politique, les mots ont un sens. À cet égard, l'ordre dans lequel sont présentées les différentes fraudes dans l'intitulé de ce texte n'est pas anodin. Il traduit une hiérarchie implicite, un choix idéologique : d'abord, les fraudes sociales, ensuite les fraudes fiscales, et ce malgré des volumes sans commune mesure.
Je voulais vous proposer d'inverser cet ordre afin d'afficher et d'affirmer que la priorité du Gouvernement est bien de s'attaquer à la fraude fiscale qui mine l'économie du pays.
En fin de compte, compte tenu des débats, il apparaît que l'intitulé reflète bien vos priorités. Je retire donc cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 245 est retiré.
Mes chers collègues, nous avons terminé l'examen des articles de ce texte.
Je vous rappelle que les explications de vote et le vote par scrutin public sur l'ensemble du projet de loi se dérouleront le mardi 18 novembre, à quatorze heures trente.
4
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mardi 18 novembre 2025 :
À quatorze heures trente :
Explications de vote des groupes puis scrutin public solennel sur le projet de loi relatif à la lutte contre les fraudes sociales et fiscales (procédure accélérée ; texte de la commission n° 112, 2025-2026) ;
Débat sur la dette publique.
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-sept heures trente.)
nomination de membres de commissions
Le groupe Les Républicains a présenté une candidature pour la commission des affaires économiques et pour la commission de la culture, de l'éducation, de la communication et du sport.
Aucune opposition ne s'étant manifestée dans le délai d'une heure prévu par l'article 8 du règlement, cette candidature est ratifiée : Mme Pauline Martin est proclamée membre de la commission des affaires économiques ; M. Bruno Retailleau est proclamé membre de la commission de la culture, de l'éducation, de la communication et du sport.
Pour le Directeur des comptes rendus du Sénat,
le Chef de publication
JEAN-CYRIL MASSERON


