Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Ma chère collègue, vous proposez d’étendre aux aides à domicile fonctionnaires l’exonération de cotisations employeur dont bénéficient certaines structures pour leurs aides à domicile contractuelles. En ce sens, ces dispositions diffèrent de celles que nous avons adoptées l’année dernière.
En vertu du droit actuel, sont exonérées de cotisations patronales de sécurité sociale « les rémunérations versées aux aides à domicile employées sous contrat à durée indéterminée (CDI) ou sous contrat à durée déterminée (CDD) pour remplacer les salariés absents ou dont le contrat de travail est suspendu », au sein de diverses structures.
Adoptées sur l’initiative du Sénat, avec un avis favorable de la commission et un avis défavorable du Gouvernement, les dispositions de l’article 16 de la LFSS pour 2025 s’appliquent aux syndicats mixtes fermés et aux EPCI. Vous proposez d’aller encore plus loin en supprimant l’exigence de CDD ou de CDI pour étendre l’exonération aux fonctionnaires.
On peut toutefois s’interroger sur le bien-fondé de cet amendement. En effet, la rémunération des fonctionnaires obéit à des règles spécifiques. On ne peut pas la comparer à celle des salariés de droit privé.
Par ailleurs, voter de telles dispositions reviendrait à mettre le doigt dans un engrenage : il semble dangereux d’instaurer des réductions de cotisations employeur pour des fonctionnaires.
Aussi, la commission émet un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Madame la sénatrice, si je comprends bien, vous voulez mettre plus de monde dans la niche (Sourires.) créée via la loi de financement de la sécurité sociale pour 2025.
Mme Émilienne Poumirol. Ce n’est pas grand-chose !
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Comme l’a relevé Mme la rapporteure générale, le Gouvernement n’était pas très favorable à cette exonération l’année dernière ; son objectif est de supprimer des niches, non d’en créer ou d’étendre les niches existantes.
Mme Émilienne Poumirol. Nous parlons du rural !
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. En outre, selon nous, l’extension de l’exonération de la cotisation vieillesse à la CNRACL n’est pas justifiée. Nous parlons de fonctionnaires territoriaux, qui, par définition, ne sont pas exposés au risque de perte d’emploi. Or tel est précisément l’objet des dispositifs d’allègement de cotisations sociales.
Enfin, il s’agit d’un transfert de charges entre les collectivités territoriales et l’État, qui compense à la sécurité sociale le coût de ce dispositif. C’est notamment pourquoi, l’année dernière, mon prédécesseur n’était guère favorable à cette mesure.
L’État doit être aux côtés des collectivités territoriales, à coup sûr, mais – nous ne manquons pas de le dire aux associations d’élus locaux – chacun doit participer à l’effort de redressement des comptes publics.
Pour ces raisons, je ne puis qu’émettre un avis défavorable sur votre amendement.
Mme la présidente. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour explication de vote.
Mme Émilienne Poumirol. Madame la rapporteure générale, monsieur le ministre, dans la mesure où ils ne couvrent qu’une seule intercommunalité, les CIAS se concentrent dans les grandes agglomérations. C’est là où il y a beaucoup de population que l’on peut déployer un service d’aide à domicile à l’échelle d’une intercommunalité.
Le personnel des CIAS est exonéré, alors qu’il est composé de fonctionnaires. À l’inverse, les SIAS, qui couvrent plusieurs intercommunalités, essentiellement dans le monde rural, ne bénéficient pas de cette exonération. C’est parfaitement injuste.
Je ne suis pas du tout d’accord avec votre raisonnement.
Mme la présidente. Je suis saisie de sept amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 1164, présenté par Mmes Apourceau-Poly, Brulin, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les 1°, 2° et 6° du II de l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale sont abrogés.
La parole est à Mme Céline Brulin.
Mme Céline Brulin. Nous proposons à nouveau d’accroître les recettes de la sécurité sociale tout en incitant les entreprises à augmenter les salaires, plutôt que de recourir à d’autres formes de rémunération.
Cet amendement tend ainsi à soumettre à cotisations sociales les dividendes, l’intéressement et la participation, ainsi que les plus-values de levée-vente d’actions. Une telle mesure a été adoptée par l’Assemblée nationale lors de l’examen du PLFSS pour 2025.
Les dispositifs de participation et d’intéressement, ainsi que les plans d’épargne entreprise, représentent pour la sécurité sociale un coût de 2,2 milliards d’euros, qui n’est pas compensé par l’État.
Ces compléments de salaire se sont peu à peu substitués au salaire de base. Le mouvement s’est fortement accéléré au cours des dernières années, aggravant l’érosion de la base contributive des cotisations sociales.
Selon la Cour des comptes, la dynamique récente des compléments de salaire a entraîné une augmentation de la perte nette de recettes équivalant à la hausse du déficit de la sécurité sociale constatée entre 2018 et 2022, soit 18 milliards d’euros.
Si l’intéressement et la participation ne sont pas soumis à cotisations sociales, les entreprises de plus de 250 salariés sont assujetties au forfait social de 10 % ou de 16 % selon les cas. Nous proposons de soumettre aux taux normaux de cotisations sociales les dividendes, l’intéressement et la participation, ainsi que les plus-values et levées-ventes d’actions. Ce faisant, l’on dégagerait 12 milliards d’euros de recettes supplémentaires pour la sécurité sociale.
Mme la présidente. Les trois amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 1171 rectifié est présenté par Mmes Apourceau-Poly, Brulin, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.
L’amendement n° 1316 rectifié est présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel.
L’amendement n° 1668 rectifié est présenté par Mme Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Lubin, Poumirol, Rossignol, Artigalas et Bélim, MM. Cardon, Chaillou et Chantrel, Mme Conway-Mouret, M. Darras, Mme Espagnac, MM. Féraud et Gillé, Mme Harribey, MM. Jacquin et P. Joly, Mme Linkenheld, MM. Lurel, Marie, Mérillou et Michau, Mme Monier, MM. Montaugé, Pla et Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Roiron, Ros, Tissot, Uzenat, M. Vallet, Ziane et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le 6° du II de l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale est abrogé.
La parole est à Mme Silvana Silvani, pour présenter l’amendement n° 1171 rectifié.
Mme Silvana Silvani. La sécurité sociale doit être financée par la valeur créée dans notre économie.
Les analyses contemporaines confirment, à cet égard, les travaux des classiques : la valeur se répartit entre deux facteurs de production, le travail et le capital.
À la Libération, lorsque Croizat et les autres bâtisseurs de la sécurité sociale écrivent les règles de notre modèle, la part du travail tend à progresser aux dépens du capital, qui, au demeurant, est orienté vers l’investissement productif, le développement industriel et la reconstruction nationale. C’est dans ce contexte que s’installe une sécurité sociale assise sur les cotisations sociales, expression directe de la contribution du monde du travail et de la solidarité.
Aujourd’hui, cet équilibre historique n’existe plus. Le capital s’arroge une part croissante de la valeur, captant des flux de revenus de plus en plus massifs et, surtout, de moins en moins productifs. La financiarisation de l’économie a considérablement déplacé les lignes. L’investissement décroît, les dividendes atteignent des niveaux record et la part de la valeur revenant aux salariés se rétracte.
Les rachats d’actions représentent sans doute l’expression la plus nette et la plus froide de cette dérive. En effet, ils ne créent aucune richesse. Ils ne financent ni machines, ni emplois, ni innovations. Ils visent un seul objectif : faire monter mécaniquement le cours considéré pour satisfaire les actionnaires et doper les rémunérations indexées sur la performance boursière.
Mes chers collègues, ce n’est pas une lubie de la gauche, mais un simple constat. Au début de l’année 2023, le Président de la République lui-même s’indignait publiquement du « cynisme à l’œuvre » dans un certain nombre d’entreprises extrêmement prospères,…
Mme la présidente. Il faut conclure, ma chère collègue.
Mme Silvana Silvani. … qui préfèrent « racheter leurs propres titres plutôt que d’investir ». (Protestations sur les travées des groupes Les Républicains et UC.) C’est une citation du chef de l’État !
Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 1316 rectifié.
Mme Raymonde Poncet Monge. Examinons les effets des rachats d’actions sur la vie des entreprises et sur notre économie.
En 2023 et en 2024, les rachats d’actions en France ont représenté près de 30 % à 50 % des sommes allouées aux dividendes, soit 33 milliards d’euros la première année et 25 milliards d’euros la seconde.
Le véritable objectif d’une telle pratique, au-delà de l’augmentation de la rémunération des actionnaires, réside dans la croissance du bénéfice par action, afin d’enjoliver la communication financière des entreprises. Car à qui les prévisions favorables aux entreprises concernées ainsi produites sont-elles destinées ? Aux fonds d’investissement, qui s’en servent pour définir leur allocation d’actifs ! En d’autres termes, il s’agit de donner l’impression que l’action de l’entreprise devient plus attractive, même si rien n’a changé du point de vue de la réalité économique.
Le rachat d’actions ne crée aucune valeur. Ce n’est qu’un transfert de richesse vers les actionnaires. Il ne contribue nullement à la croissance de l’entreprise par les investissements, donc à l’économie.
Le contenu de la loi du 14 février 2025 de finances pour 2025 témoigne d’une prise de conscience des dérives en la matière, avec la création d’une taxe de 8 % sur les réductions de capital par annulation de titres résultant d’un rachat par les sociétés de leurs propres titres. Cependant, le fait que la taxe soit calculée en fonction de la valeur nominale des actions en limite la portée : aujourd’hui, cela représente moins de 1 % des montants engagés, ce qui est tout de même très en deçà des attentes.
Pour notre part, nous prônons une taxation sérieuse, qui ne pénalise pas l’entreprise – rappelons que les rachats d’actions ne lui reviennent pas sous forme d’investissement – et qui va dans le sens de la solidarité : abonder les comptes sociaux profite à tous. (Marques d’impatience sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
Remettons dans l’ordre dans un dispositif purement financier !
Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour présenter l’amendement n° 1668 rectifié.
Mme Annie Le Houerou. À travers ces trois amendements identiques, les groupes de la gauche sénatoriale proposent une mesure dont le bien-fondé est largement démontré : inclure les rachats d’actions dans l’assiette des cotisations. Cela permettrait d’augmenter les recettes de la sécurité sociale, à plus forte raison dans un contexte de déficit persistant.
Les rachats d’actions connaissent une progression très rapide. Ils constituent désormais un outil majeur de redistribution aux actionnaires, même s’ils sont moins connus que les dividendes. Les 425 plus grandes entreprises européennes cotées en bourse ont ainsi racheté pour 161 milliards d’euros de leurs propres actions en 2022, soit presque le double de 2021. Il s’agit donc d’un mécanisme massif, dont l’essor renforce la nécessité d’un encadrement plus juste.
Le dispositif que nous proposons a également pour objet de rétablir l’équité entre les différentes formes de rémunération. Les salariés et dirigeants qui reçoivent des actions bénéficient d’un avantage patrimonial comparable à un salaire en capital. Lorsque celui-ci n’est pas soumis aux mêmes cotisations que le salaire classique, il y a une inégalité de traitement.
Par cet amendement, nous souhaitons garantir que toutes les formes de rémunération participent de manière juste au financement collectif, notamment, des retraites, de la santé et de la protection sociale.
Mme la présidente. L’amendement n° 959 rectifié, présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 137-40 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Sont soumis à la contribution mentionnée au premier alinéa les revenus mentionnés aux 1°, 2°, 3°, 4°, 6° et 7° du II de l’article L. 242-1, ainsi que ceux mentionnés au 2° du II de l’article L. 137-13. »
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Selon le rapport Vachey : « […] l’assiette de la CSA exclut certains compléments de salaire assujettis à la CSG et la CRDS. Dans une logique d’universalité, il pourrait donc être logique que l’assiette de la contribution inclue désormais l’épargne salariale, des contributions des employeurs à la protection sociale complémentaire des salariés, les stock-options ainsi que des indemnités de rupture du contrat de travail. Cela revient, pour une grande partie, à utiliser l’assiette du forfait social pour y fixer un prélèvement de CSA. »
En parallèle, la branche autonomie reste dotée de moyens largement insuffisants pour faire face aux immenses défis de la prévention de la perte d’autonomie fonctionnelle tant des personnes âgées que des personnes en situation de handicap : besoin de dizaines de milliers d’embauches, d’une hausse sensible du taux d’encadrement dans les services et les établissements, de revalorisations salariales et d’une réforme des services d’autonomie à domicile.
Par ailleurs, selon le rapport de la mission d’évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss), la fameuse « boîte à outils » du Sénat – c’est d’ailleurs la première fois qu’elle est citée aujourd’hui ! –, la notion de « politiques inchangées » sur l’autonomie « pourrait être peu adaptée » s’agissant d’une branche créée seulement en 2021.
Le rapport de la Mecss continue ainsi : « Ainsi, selon les projections de 2024 de la Commission européenne, dans le cas de la France, les dépenses publiques en faveur de l’autonomie passeraient de 1,9 point du PIB en 2022 à 2,6 points de PIB en 2070 selon le scénario de référence, mais à 4,8 points de PIB selon le scénario de risque », c’est-à-dire de conformité à la moyenne européenne.
Aussi, nous souhaitons, par cet amendement, reprendre la proposition du rapport Vachey d’étendre la CSA à certains compléments de salaire, aux contributions des employeurs à la protection sociale complémentaire des salariés, aux stock-options et aux indemnités de rupture du contrat de travail. Cela rapporterait 240 millions d’euros à la branche autonomie.
Mme la présidente. L’amendement n° 1677, présenté par Mme Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Lubin, Poumirol, Rossignol, Artigalas et Bélim, MM. Cardon, Chaillou et Chantrel, Mme Conway-Mouret, M. Darras, Mme Espagnac, MM. Féraud et Gillé, Mme Harribey, MM. Jacquin et P. Joly, Mme Linkenheld, MM. Lurel, Marie, Mérillou et Michau, Mme Monier, MM. Montaugé, Pla et Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Roiron, Ros, Tissot, Uzenat, M. Vallet, Ziane et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« …. – Le bénéfice des 1° à 3° du II du présent article n’est pas applicable aux travailleurs dont la rémunération est supérieure à trois fois le montant du salaire minimum interprofessionnel de croissance mentionné à l’article L. 3231-2 du code du travail. »
La parole est à Mme Annie Le Houerou.
Mme Annie Le Houerou. Cet amendement vise à supprimer les exonérations de cotisations de sécurité sociale applicables à l’intéressement, aux réserves de participation et à l’abondement versé dans le cadre des plans d’épargne salariale pour les rémunérations dépassant trois Smic.
Depuis plusieurs années, une part croissante de la rémunération des salariés prend la forme de dispositifs dits de « partage de la valeur ». Si ceux-ci peuvent constituer un complément utile, ils sont surtout, pour les plus hauts salaires, un moyen d’accroître la part variable de la rémunération non soumise à cotisations sociales, donc non génératrice de droits, notamment en matière de retraite.
Nous proposons donc qu’au-delà de trois Smic, cette part de rémunération contribue normalement au financement de notre système de retraite, comme c’est le cas des salaires classiques. C’est une question de cohérence et de justice sociale. Il n’y a pas de raison que la rémunération variable la plus élevée échappe durablement à la solidarité nationale.
Une telle mesure permettra, dans un premier temps, de renforcer l’équilibre financier du régime de retraite et, dans un second temps, d’ouvrir de nouveaux droits pour les salariés concernés, en réintégrant dans l’assiette cotisable une rémunération aujourd’hui exclue.
Selon l’économiste Michaël Zemmour, la suppression d’une telle exonération pourrait rapporter environ 3,5 milliards d’euros par an au financement des retraites. Ce n’est pas marginal ; c’est une ressource significative, pérenne et parfaitement alignée avec le principe contributif qui fonde notre modèle.
Mes chers collègues, cet amendement vise simplement à restaurer l’équité entre les différentes formes de rémunération et à consolider durablement le financement de nos retraites. Je vous invite donc à l’adopter, puisque nous cherchons des recettes.
Mme la présidente. L’amendement n° 1678, présenté par Mme Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Lubin, Poumirol, Rossignol, Artigalas et Bélim, MM. Cardon, Chaillou et Chantrel, Mme Conway-Mouret, M. Darras, Mme Espagnac, MM. Féraud et Gillé, Mme Harribey, MM. Jacquin et P. Joly, Mme Linkenheld, MM. Lurel, Marie, Mérillou et Michau, Mme Monier, MM. Montaugé, Pla et Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Roiron, Ros, Tissot, Uzenat, M. Vallet, Ziane et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« …. – Les 1° à 3° du II du présent article ne sont pas applicables à la part des sommes supérieures à 6 000 euros versées sur une année civile aux travailleurs dont la rémunération est supérieure à trois fois le montant du salaire minimum interprofessionnel de croissance mentionné à l’article L. 3231-2 du code du travail. »
II. – Le XIII de l’article 10 de la loi n° 2023-1107 du 29 novembre 2023 portant transposition de l’accord national interprofessionnel relatif au partage de la valeur au sein de l’entreprise est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « Pour les travailleurs dont la rémunération est supérieure à trois fois le montant du salaire minimum interprofessionnel de croissance mentionné aux articles L. 3231-1 à L. 3231-12 du même code, l’exonération des cotisations sociales d’origine légale ou conventionnelle à la charge du salarié et de l’employeur, de la contribution prévue à l’article L. 137-15 du code de la sécurité sociale est applicable dans la limite de 6 000 euros par bénéficiaire et par an. » ;
2° À la deuxième phrase du deuxième alinéa, les mots : « code de la sécurité sociale » sont remplacés par les mots : « même code ».
La parole est à Mme Corinne Féret.
Mme Corinne Féret. Les compléments de salaire distribués au titre de l’intéressement, de la participation, de l’épargne salariale, des actions gratuites ou encore des primes de partage représentent aujourd’hui 25,4 milliards d’euros selon la Cour des comptes. Ces 25,4 milliards d’euros sont intégralement exonérés de cotisations sociales, sans le moindre plafond, y compris pour les rémunérations les plus élevées. Concrètement, cela signifie que des salariés disposant déjà de revenus très importants peuvent percevoir des sommes considérables sans verser un seul euro à la sécurité sociale. Ce n’est tenable ni du point de vue de l’équité ni pour le financement de notre modèle social.
La Cour des comptes alerte elle-même sur les effets cumulatifs de ces exemptions et sur la substitution progressive de ces compléments au salaire de base qui, eux, financent la solidarité nationale. Elle recommande donc de réduire et d’harmoniser les plafonds d’exemption en les alignant sur celui de la prime de partage de la valeur, soit 6 000 euros par an et par bénéficiaire.
C’est exactement l’objet de notre amendement : appliquer une telle limite aux salariés dont la rémunération dépasse 3 Smic, afin de mettre fin à un système dans lequel les hauts revenus captent l’essentiel des avantages fiscaux et sociaux sans participer à l’effort collectif.
Il s’agit d’une mesure de justice sociale : rétablir une contribution équitable entre les salariés, entre les entreprises, et garantir que ceux qui perçoivent les compléments de rémunération les plus importants participent, eux aussi, au financement de notre protection sociale.
Il s’agit également d’une mesure de responsabilité financière. La Cour des comptes, encore une fois, est très claire. Elle écrit que l’ampleur prise par les régimes dérogatoires pour les compléments de salaire porte atteinte aux équilibres financiers de la sécurité sociale et à l’équité du prélèvement social. Dans un contexte de déficit croissant, continuer à laisser filer ces exonérations au profit d’une minorité n’a plus aucun sens.
Renforcer l’assiette de cotisation, garantir l’équité : tel est le sens de notre proposition.
Rappel au règlement
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Canévet, pour un rappel au règlement.
M. Michel Canévet. Mon rappel se fonde sur l’article 35 bis de notre règlement, aux termes duquel la durée d’intervention d’un sénateur en séance ne peut pas excéder deux minutes.
Plusieurs amendements viennent de nous être présentés et, à cette occasion, trois orateurs au moins se sont exprimés pendant plus de deux minutes.
Je demande que toutes les dispositions soient prises pour que chacun, par égard pour tous, respecte le temps de parole qui lui est imparti et ne fasse pas subir aux autres de tels dépassements. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)
Mme Sophie Primas. Très bien !
Mme la présidente. Monsieur Canévet, je me permets quand même de vous indiquer qu’en six heures de présidence aujourd’hui, je n’ai laissé qu’une seule oratrice dépasser son temps de parole. Je pense que cela devrait vous convenir…
Cela étant, acte vous est donné de votre rappel au règlement.


