Mme la présidente. La parole est à Mme Marion Canalès, pour présenter l’amendement n° 1571.
Mme Marion Canalès. Le prix de l’alcool n’augmente pas au même rythme que celui des denrées alimentaires : par exemple, la hausse atteint 16 % pour les bières et 19 % pour les boissons sans alcool.
Ce sujet est délicat dans notre hémicycle. J’entends les différents points de vue, mais j’écarte les propositions de ceux qui n’avancent pour seul argument que le soutien de la filière, sans donner d’explication.
J’entends que la filière viticole souffre, mais je ne suis pas certaine, comme d’ailleurs mon collègue Pla, qui travaille sur ce sujet, que le problème ne soit lié qu’à l’accise ou à l’indexation d’une taxe sur l’inflation. En effet, le dérèglement climatique et de nombreux autres facteurs perturbent la filière viticole. Nous en sommes profondément convaincus et savons qu’il s’agit d’un problème dans beaucoup de territoires et pour les personnes qui y travaillent. Le problème dépasse largement la seule question du prix.
D’autres amendements déposés par mon collègue Jomier et par d’autres membres de notre groupe visent à proposer des solutions. Nous devons trouver un équilibre entre les enjeux de santé publique et la préservation de cette filière à laquelle, bien évidemment, beaucoup de territoires sont attachés.
Le présent amendement vise à déplafonner l’évolution de la taxe sur l’alcool. Une mesure similaire a été adoptée en commission des affaires sociales à l’Assemblée nationale ; nous la soumettons, désormais, au Sénat.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Ces deux amendements identiques tendent à déplafonner l’augmentation annuelle, indexée sur l’inflation, de la cotisation sur les boissons alcooliques.
Tout d’abord, une telle mesure n’aurait pas un grand effet, étant donné le faible niveau actuel de l’inflation. Ensuite se pose la question de l’intérêt d’agir sur une fiscalité peu structurante. Le prix semble assez peu efficace pour modifier les comportements, alors que tout l’enjeu est de les changer. La question est de savoir à partir de quel niveau de taxation on obtiendra un changement des comportements.
La prévention et l’accompagnement passent par beaucoup d’autres mesures que celle-ci, qui ne me semble pas efficace.
Mme la présidente. La parole est à M. Sebastien Pla, pour explication de vote.
M. Sebastien Pla. Je ne pousse pas à la consommation ! La réalité est là : la loi Évin relative à la lutte contre le tabagisme et l’alcoolisme, ainsi que de nombreuses autres mesures, ont entraîné une diminution de la consommation d’alcool en général en France. Ce n’est donc pas le moment de mettre en œuvre de nouvelles mesures fiscales, qui mettraient à mal la filière du vin.
Je serai prêt à ouvrir le débat sur la fiscalité dans la filière viticole le jour où le Gouvernement et Parlement dans son ensemble connaîtront la construction du prix final d’une bouteille, de la culture du raisin par le producteur à l’achat du vin par le consommateur. Aujourd’hui, c’est la jungle : on ignore tout du partage de la valeur. Qui gagne de l’argent dans tout cela ? Les intermédiaires ? La grande distribution ? En tout cas, ce n’est pas le producteur. Tel est le débat central aujourd’hui.
Nous allons donc nous faire plaisir et fiscaliser les uns, les autres. Cependant, en agissant ainsi, nous ne réglerons les problèmes ni de la filière ni de l’addiction. Ce n’est pas en augmentant la fiscalité que l’on fera baisser la consommation.
Si les gens consomment de l’alcool, des drogues ou d’autres substances et en deviennent dépendants, il faut s’interroger sur leurs difficultés au quotidien et, plus généralement, sur le mal-être de la société.
La consommation de vins de qualité doit être mise en parallèle avec la baisse de la consommation.
Je le répète, je suis prêt à ouvrir le débat sur la fiscalité, croyez-moi, à condition que l’on sache exactement comment se construit le prix du vin, afin de pouvoir ensuite financer efficacement les politiques de santé publique. La filière est d’accord pour prendre sa part.
Nous avons auditionné Santé publique France, ainsi que toutes les organisations professionnelles. Nous avons conscience que le coût de l’alcoolisme pèse sur les fonds publics. Des solutions existent, mais nous ne les trouverons pas ainsi, à l’emporte-pièce.
Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Il faut faire contre l’alcool ce que nous avons fait contre le tabac. (Mme Sophie Primas proteste.) Notre collègue nous dit que ce n’est pas en taxant davantage l’alcool que l’on parviendra à changer les comportements, mais aucune mesure à elle seule ne permet de les modifier. Il faut une démarche systémique.
Pour commencer, il ne faut pas dire, mon cher collègue Pla, que la consommation d’alcool baisse « malheureusement ». C’est l’inconscient qui parle ! Mieux vaut dire que la consommation d’alcool baisse et que c’est très bien, surtout quand on sait que 22 % des gens ont une consommation d’alcool excessive. On peut d’autant plus le dire que l’on constate un report de la consommation sur le vin de qualité, sur les bonnes bouteilles. Faisons attention à notre discours ! Personne jamais ne dira que la consommation de tabac diminue « malheureusement ».
En France, tous ceux qui s’occupent de santé publique considèrent que c’est une bonne chose que l’on ne boive plus comme il y a cinquante ans. Par conséquent, si la consommation est, comme vous le dites, plus qualitative, les consommateurs peuvent davantage « subir » – j’intériorise votre vision des choses ! – la fiscalité.
En tout état de cause, il faut, comme on l’a fait pour le tabac – peut-être pas avec autant d’ampleur – prendre des mesures et envoyer plusieurs signaux, afin de montrer dans quelle direction nous allons. Il faut le faire de manière régulière. Ce n’est pas parce qu’on a fait quelque chose l’année dernière qu’il faut s’arrêter. Il faut envoyer un signal-prix.
Mme la présidente. La parole est à Mme Florence Lassarade, pour explication de vote.
Mme Florence Lassarade. Je vais soutenir Sébastien Pla. Je suis quelque peu atterrée par la façon dont l’un des fleurons de la culture française, notre excellence viticole, est attaqué ici ce soir. Le vin est un sujet qualitatif. (Mme Raymonde Poncet Monge s’exclame.)
Les viticulteurs font beaucoup d’efforts pour s’adapter à la demande, par exemple en baissant le niveau d’alcool du vin, voire en fabriquant du vin sans alcool. Ce n’est pas par le vin que l’alcoolisme s’aggrave, bien au contraire. C’est un faux procès.
Faisons attention, nous représentons ici notre pays. Donnons une bonne image du vin. Dans la majorité des départements viticoles, on est un peu atterré par ce qui se passe ici ce soir. (Très bien ! et applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Anne Souyris, pour explication de vote.
Mme Anne Souyris. Je reviens sur ce qu’a dit M. Jomier précédemment : il n’appartient évidemment pas à la sécurité sociale de résoudre le problème d’une filière économique, aussi importante soit-elle. La sécurité sociale doit s’occuper des problèmes de santé publique, du coût des addictions – le problème revêt un aspect économique –, de la prévention et de la prise en charge. Cette taxe présente l’intérêt de permettre d’absorber les coûts de la prévention et de la prise en charge.
Pour autant, cela ne signifie pas qu’il ne faille pas débattre ici de la manière de construire un système vertueux. Ma collègue Poncet Monge l’a dit, à juste titre, on peut arriver à une consommation plus qualitative. C’est tout à fait possible et c’est d’ailleurs déjà ce qui se passe : notre viticulture est beaucoup plus qualitative qu’il y a cinquante ans. On produit peut-être un peu moins en quantité. N’est-ce pas dans ce sens qu’il faut aller ?
En tout cas, je le répète, il n’appartient pas à la sécurité sociale de s’emparer de ce sujet. Dans le cadre du PLFSS, nous devons nous appuyer sur la loi Évin et sur des taxes pour encourager une démarche vertueuse. Nous pouvons essayer d’y arriver. La moitié des morts évitables sont dues à des cancers liés à l’alcool. C’est tout de même énorme ! Ne peut-on pas essayer d’agir sur cette question, avec les viticulteurs, de manière collective ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Pascale Gruny, pour explication de vote.
Mme Pascale Gruny. Je suis heureuse d’entendre enfin parler de prévention.
J’ai entendu que Bercy s’est ému de la baisse de la consommation de tabac. Or, quand Bercy s’inquiète, ce n’est pas pour les mêmes raisons que le ministère de santé : c’est bien en raison de la diminution du rendement des taxes. Les taxes, que ce soit sur l’alcool ou sur le tabac, ne sont malheureusement pas conçues pour favoriser la prévention.
Je soutiens les viticulteurs, qui subissent une forte concurrence étrangère aujourd’hui. Faites attention, mes chers collègues : il s’agit d’une belle filière, dont nous sommes fiers et dont nous avons besoin.
Par ailleurs, il faut en effet mettre en œuvre des mesures de prévention à destination des personnes qui s’alcoolisent. Souvent, elles ne le font même pas avec du vin…
Mme la présidente. La parole est à M. Jean Sol, pour explication de vote.
M. Jean Sol. Je m’associe aux propos de notre collègue Sébastien Pla.
Nous parlons beaucoup de prévention aujourd’hui, alors donnons-nous en les moyens.
À cet égard, je souhaite aborder un autre aspect de la question : je veux parler de la prévention des suicides de nos viticulteurs et de nos agriculteurs, qui n’échappent malheureusement pas à ce qu’ils vivent aujourd’hui. Ils participent pourtant à la protection de notre environnement. Ainsi, alors que l’Aude a connu d’importants incendies il y a quelques mois, de nombreuses zones y ont échappé grâce au travail des agriculteurs, lequel a également permis de préserver la vie des sapeurs-pompiers venus les secourir.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marion Canalès, pour explication de vote.
Mme Marion Canalès. Depuis le début de l’examen de ce PLFSS, nous n’avons pas parlé de prévention, mes chers collègues. Il n’y a pas les hygiénistes d’un côté et ceux qui attaqueraient la filière de l’autre. Sur ce sujet grave, nous essayons de poser des mots tranquillement. Nous ne cherchons pas à attaquer les territoires, nous sommes tous sénateurs de départements où il y a des enjeux de filière.
Nous devons débattre de la prévention des conduites addictives liées à la consommation d’alcool. Plusieurs séries d’amendements portent sur ce sujet. Cela crispe beaucoup d’entre vous, mais ce n’est pas parce que nous défendons des mesures de santé publique que nous sommes contre la filière.
Nous allons devoir trouver des points d’accord. Je rappelle que l’Assemblée nationale a voté des dispositions en faveur de la prévention. Or nos collègues députés vivent eux aussi dans leur territoire ; je ne pense pas qu’ils soient tous parisiens…
Nous devons défendre nos amendements sans nous donner de leçons. D’autres propositions, je l’espère, permettront d’avancer vers une solution et de dégager des fonds afin de lutter contre les conduites addictives.
Mme Catherine Conconne. La solution, ce n’est pas les taxes !
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 1514 et 1571.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 1706, présenté par Mme Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Lubin, Poumirol, Rossignol, Artigalas et Bélim, MM. Cardon, Chaillou et Chantrel, Mme Conway-Mouret, M. Darras, Mme Espagnac, MM. Féraud et Gillé, Mme Harribey, MM. Jacquin et P. Joly, Mme Linkenheld, MM. Lurel, Marie, Mérillou et Michau, Mme Monier, MM. Montaugé, Pla et Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Roiron, Ros, Tissot, Uzenat, M. Vallet, Ziane et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 11 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La section III du chapitre II du titre III de la deuxième partie du code général des impôts est complétée par un article 1613… ainsi rédigé :
« Art. 1613…. – I. – Est instituée une contribution perçue par la Caisse nationale d’assurance maladie sur les boissons alcooliques qui répondent cumulativement aux conditions suivantes :
« 1° Définies par la catégorie » Autres bières « à l’article L. 313-15 du code des impositions sur les biens et services ;
« 2° Conditionnées dans des récipients destinés à la vente au détail, soit directement, soit par l’intermédiaire d’un professionnel, ou préalablement assemblées et présentées dans des récipients non destinés à la vente au détail afin d’être consommables en l’état ;
« 3° Contenant un ou plusieurs arômes naturels ou artificiels, notamment ceux reproduisant le goût de boissons spiritueuses, et contenant :
« a) Soit au moins 15 grammes de sucres ajoutés ou une édulcoration équivalente par litre exprimée en sucre inverti ;
« b) Soit une édulcoration destinée à masquer le goût de l’alcool, quelle qu’en soit la teneur.
« II – Le tarif de la contribution mentionnée au I est déterminé par décret. Il est relevé le 1er janvier de chaque année dans une proportion égale au taux de croissance de l’indice des prix à la consommation hors tabac de l’avant-dernière année. Il est exprimé avec deux chiffres significatifs après la virgule, le second chiffre étant augmenté d’une unité si le chiffre suivant est égal ou supérieur à cinq. Le tarif est publié au Journal officiel par arrêté du ministre chargé du budget.
« III. – A. – La taxe est due lors de la mise à la consommation en France des boissons mentionnées au I. Elle est acquittée, selon le cas, par les fabricants, les entrepositaires agréés, les importateurs, les personnes qui réalisent l’acquisition intracommunautaire de ces boissons, les représentants fiscaux des opérateurs établis dans un autre État membre de l’Union européenne mentionnés à l’article 302 bis V du présent code ou par les personnes mentionnées à l’article L. 311-28 du code des impositions sur les biens et services.
« B. – Il appartient au redevable de démontrer que les quantités de sucres comprises dans les produits taxés et non prises en compte dans le calcul de l’impôt ne sont pas des sucres ajoutés. À défaut, le redevable est tenu au paiement du complément d’impôt.
« IV. – Cette taxe est recouvrée et contrôlée sous les mêmes règles, conditions, garanties et sanctions qu’en matière de contributions indirectes.
« V. – Par dérogation au présent article, les bières répondant aux critères du I du présent article produites par les brasseries dont la production annuelle, tous produits confondus, est inférieure à 200 000 hectolitres ne sont pas sujettes à cette contribution. »
La parole est à Mme Annie Le Houerou.
Mme Annie Le Houerou. Nous souhaitons, par cet amendement, instaurer une taxe sur les bières aromatisées, sucrées ou édulcorées, sans toucher aux bières artisanales, cet amendement ne visant que les producteurs de plus de 200 000 hectolitres par an.
Le coût social de l’alcool et des sucres atteint des niveaux de plus en plus élevés, la consommation d’alcool coûtant environ 102 milliards d’euros par an à la société. Le prix, conjointement avec la publicité et l’accessibilité des produits, constitue l’un des trois principaux leviers identifiés par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) pour réduire les dommages liés à la consommation de substances nocives comme l’alcool.
Ainsi, il est démontré qu’une augmentation des prix diminue les dommages, qu’ils soient immédiats ou chroniques. Le signal-prix exerce une influence directe et manifeste sur les comportements de consommation.
Or les bières aromatisées, sucrées ou édulcorées produites par l’industrie ciblent principalement les personnes âgées de 18 ans à 25 ans, voire beaucoup plus jeunes encore. Trop souvent, elles échappent à la vigilance des autorités, séduisant un public encore mineur par leur saveur accessible, leur image festive et des emballages très attractifs.
Derrière cette apparence de simplicité, l’alcoolisation précoce constitue pourtant un enjeu sanitaire majeur : elle entraîne un risque accru d’addiction, elle a des conséquences sur le développement cérébral et provoque une vulnérabilité aux comportements à risque.
Sachant que l’interdiction de la vente d’alcool aux mineurs n’est pas toujours respectée, il est légitime de s’interroger sur la consommation de ce type de boissons par les jeunes. Nous avons le devoir de les protéger. Plus la consommation d’alcool débute tôt, plus les risques sanitaires et sociaux augmentent.
L’instauration de cette taxe s’inscrirait donc dans une logique de prévention et de responsabilité. De plus, son produit permettrait de financer la prise en charge des personnes abîmées par l’alcool.
Mme la présidente. Les amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 558 rectifié bis est présenté par Mmes Guillotin, Briante Guillemont et M. Carrère, MM. Fialaire, Grosvalet et Guiol, Mme Jouve, M. Masset, Mme Pantel, M. Roux et Mme Girardin.
L’amendement n° 1520 est présenté par Mmes Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 11 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La section III du chapitre II du titre III de la deuxième partie du livre premier du code général des impôts est complété par un article L. 1613 … ainsi rédigé :
« Art. L. 1613 … . – I. – Il est institué une contribution perçue par la Caisse nationale d’assurance maladie sur les boissons alcooliques :
« 1° Définies par la catégorie « Autres bières » à l’article L. 313-15 du code d’imposition sur les biens et services ;
« 2° Conditionnées dans des récipients destinés à la vente au détail soit directement, soit par l’intermédiaire d’un professionnel ou préalablement assemblées et présentées dans des récipients non destinés à la vente au détail afin d’être consommables en l’état ;
« 3° Contenant un ou plusieurs arômes naturels ou artificiels et au moins vingt grammes de sucre ou une édulcoration équivalente par litre exprimée en sucre inverti.
« II. – Le tarif de la contribution mentionnée au I est déterminé par décret avant le 1er janvier 2026. Il est relevé au 1er janvier de chaque année dans une proportion égale au taux de croissance de l’indice des prix à la consommation, hors tabac, des ménages de l’avant-dernière année. Il est exprimé avec deux chiffres significatifs après la virgule, le second chiffre étant augmenté d’une unité si le chiffre suivant est égal ou supérieur à cinq. Le tarif est publié au Journal officiel par arrêté du ministre chargé du budget.
« III. – A. – La taxe est due lors de la mise à la consommation en France des boissons mentionnées au I. Elle est acquittée, selon le cas, par les fabricants, les entrepositaires agréés, les importateurs, les personnes qui réalisent l’acquisition intracommunautaire de ces boissons, les représentants fiscaux des opérateurs établis dans un autre État membre de l’Union européenne mentionnés à l’article 302 V bis ou par les personnes détenant ces boissons à des fins commerciales sans pouvoir justifier que les droits indirects ou accises applicables ont été acquittés ou garantis conformément à la réglementation en vigueur.
« B. – Il appartient au redevable de démontrer que les quantités de sucres comprises dans les produits taxés et non prises en compte dans le calcul de l’impôt ne sont pas des sucres ajoutés. À défaut, le redevable est tenu au paiement du complément d’impôt.
« IV. – Cette taxe est recouvrée et contrôlée sous les mêmes règles, conditions, garanties et sanctions qu’en matière de contributions indirectes.
« V. – Par dérogation aux dispositions précédentes, les bières répondant aux critères définis au présent I, produites par les brasseries dont la production annuelle, tous produits confondus, est inférieure à 200 000 hectolitres, ne sont pas redevables de cette contribution. »
La parole est à M. Michel Masset, pour présenter l’amendement n° 558 rectifié bis.
M. Michel Masset. Je précise que nous parlons bien de bières aromatisées qui touchent une population âgée de 15 ans à 24 ans, dont le prix unitaire se situe aux alentours de 1,50 euro à 2 euros.
Puisque ces produits échappent à une fiscalité adaptée, ils exercent une concurrence déloyale.
En outre, je rappelle que les bières produites par des brasseries artisanales seraient exemptées de cette taxe, afin de préserver des produits culturels locaux, qui ne s’appuient pas sur la même logique de commercialisation.
Mme la présidente. La parole est à Mme Anne Souyris, pour présenter l’amendement n° 1520.
Mme Anne Souyris. Cet amendement vise à créer une contribution spécifique sur les bières aromatisées, sucrées ou édulcorées et à flécher le produit de cette contribution vers l’assurance maladie, pour financer la prévention.
Ces boissons, produites par les grands industriels, ciblent clairement les 18-25 ans et, de ce fait, attirent aussi les mineurs. Leur goût sucré et aromatisé masque celui de l’alcool et favorise une consommation importante sans en avoir conscience. De plus, le packaging et le marketing de ces bières sont souvent conçus pour séduire les plus jeunes. Or plus la consommation d’alcool commence tôt, plus le risque de dommages sociaux et sanitaires est élevé.
Nous proposons donc de taxer spécifiquement ces bières, à un taux défini par décret et indexé sur l’inflation. Vous voyez bien que je n’ai rien contre les viticulteurs !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Tout d’abord, les bières sont déjà taxées à un niveau supérieur à celui du vin, mais inférieur à celui qui est applicable aux spiritueux. Ce niveau est assez haut.
Ensuite, 70 % des bières consommées en France sont fabriquées en France. Vous proposez de taxer les bières sucrées ou aromatisées, sauf si elles sont fabriquées de façon artisanale. Il y a là une incohérence.
Enfin, la réalité est que ce sont bien les jeunes qui sont ciblés. Dans ce contexte, on voit bien que ce n’est pas le levier fiscal qu’il faut utiliser. Il faut plutôt mettre en œuvre une véritable politique de prévention et d’éducation en matière de santé.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur ces amendements.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Je précise qu’aux termes d’une directive européenne, deux taux sont possibles : un taux réduit pour les bières titrant moins de 3,5 % et un taux normal pour les bières situées au-dessus de ce seuil. Ainsi, les États membres ne peuvent pas créer de tranche supplémentaire de fiscalité sans une modification des textes européens.
Par ailleurs, je vous alerte, dans le sillage du rapport d’initiative citoyenne de la Cour des comptes d’avril 2025 sur Les taxes à faible rendement, sur la nécessité d’éviter dans la mesure du possible la création de tels prélèvements. Or plusieurs amendements déposés visent à créer des taxes dont le produit attendu sera insuffisant au regard des charges de recouvrement et des coûts induits par leur complexité pour les acteurs concernés.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur ces trois amendements.
Mme la présidente. La parole est à M. le vice-président de la commission.
M. Alain Milon, vice-président de la commission des affaires sociales. Je prie mes collègues de bien vouloir m’excuser, mais comme j’ai pris un verre de vin pendant le repas, je ne dois pas avoir le bon état d’esprit pour aborder ce sujet ! (Sourires.)
Mme Nathalie Goulet. C’est patriote !
M. Xavier Iacovelli. Attention, vous êtes enregistré ! (Sourires.)
M. Alain Milon, vice-président de la commission des affaires sociales. Ce n’est pas une honte, bien au contraire ! J’ai pris un bon verre de bordeaux… (Nouveaux sourires.)
Je m’interroge : ces amendements ont-ils été déposés pour protéger la jeunesse ou uniquement pour imposer une taxe supplémentaire à ceux qui produisent 200 000 hectolitres et plus ?
En effet, une bière aromatisée ou sucrée, qu’elle soit brassée par des producteurs dépassant ce seuil ou non, provoquera la même addiction chez les jeunes. Je ne comprends donc pas pourquoi il ne faudrait cibler que les producteurs dépassant un volume annuel de 200 000 hectolitres. En tout cas, ce n’est pas pour protéger les jeunes !
Mme la présidente. La parole est à Mme Marion Canalès, pour explication de vote.
Mme Marion Canalès. Monsieur le vice-président de la commission, lorsque nous proposons des taxes modérées, en tentant d’en exonérer une partie de la filière pour ne pas frapper un territoire, cela ne convient pas.
Quand nous parlons de bière sucrée – nous avons eu un débat sur les prémix –, nous abordons la transition entre l’enfance et l’âge adulte. Si on ajoute du sucre à l’alcool, c’est pour obtenir un pur produit marketing, destiné à attirer les jeunes. Mais là encore, notre proposition ne convient pas.
On ne peut pas invisibiliser ce sujet et ne plus jamais l’évoquer. Il faut continuer d’en parler, trouver des points d’accord et avancer.
Je comprends, lorsque nous proposons des mesures un peu fortes, comme un relèvement des droits d’accise dans le projet de loi de finances, que nos collègues qui défendent la filière viticole s’y opposent, mais là, nous essayons de trouver des compromis et cela ne va toujours pas !
Par conséquent, nous allons laisser prospérer les bières sucrées ou édulcorées et ne pas adopter la solution de repli que nous proposons. Je trouve cela réellement dommage, car on n’avance pas. Pour notre part, nous continuerons de rendre ce sujet visible, jusqu’à ce qu’un point d’accord puisse être trouvé. Nous y arriverons !
Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Non, les taxes dont nous parlons ne sont pas des taxes de rendement ; ce sont des taxes comportementales. Si Bercy s’en désole, c’est parce qu’il ne voit que des euros !
Il n’en demeure pas moins que les taxes comportementales fonctionnent. Pour preuve, la consommation de tabac diminue, ce qui est une bonne nouvelle, n’en déplaise à Bercy.
En écoutant les propos de certains de mes collègues, je me dis qu’il est heureux que nous ne produisions pas de tabac en France.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Ça a été le cas !
M. Alain Joyandet. Du tabac est produit en France !
Mme Raymonde Poncet Monge. Nous n’aurions jamais pu mener la politique de prévention avec le slogan « fumer tue » si la France avait compté des producteurs de tabac. Dans les pays producteurs, il n’est certainement pas possible de taxer le tabac comme nous le faisons.
Je ne compare pas le vin et le tabac. J’estime que l’on peut défendre la filière viticole en encourageant la qualité et en baissant les quantités. Mais votre argument sur les filières est tout de même dingue… Alors que nous abordons des questions de santé publique, j’en viens à me dire : « Heureusement que nous ne produisons pas de tabac ! »
Nous avons eu de la chance de pouvoir mener notre politique de prévention en la matière. Nous pourrions à présent faire un peu plus de publicité pour encourager les gens à moins boire. Voilà une politique de santé publique, madame la ministre !
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Masset, pour explication de vote.
M. Michel Masset. Madame Poncet Monge, nous produisons toujours du tabac en France ! Je vous invite à venir visiter des cultures de tabac en Lot-et-Garonne. (MM. Pierre Cuypers et Alain Joyandet applaudissent.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 1706.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 558 rectifié bis et 1520.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 1572, présenté par M. Jomier, Mmes Canalès, Bonnefoy, Brossel, de La Gontrie, Féret et Le Houerou et M. Ros, est ainsi libellé :
Après l’article 11 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le chapitre 5 du titre IV du livre II du code de la sécurité sociale est complété par une section 3 bis ainsi rédigée :
« Section 3 bis