Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Tout d'abord, les bières sont déjà taxées à un niveau supérieur à celui du vin, mais inférieur à celui qui est applicable aux spiritueux. Ce niveau est assez haut.

Ensuite, 70 % des bières consommées en France sont fabriquées en France. Vous proposez de taxer les bières sucrées ou aromatisées, sauf si elles sont fabriquées de façon artisanale. Il y a là une incohérence.

Enfin, la réalité est que ce sont bien les jeunes qui sont ciblés. Dans ce contexte, on voit bien que ce n'est pas le levier fiscal qu'il faut utiliser. Il faut plutôt mettre en œuvre une véritable politique de prévention et d'éducation en matière de santé.

Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur ces amendements.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Stéphanie Rist, ministre. Je précise qu'aux termes d'une directive européenne, deux taux sont possibles : un taux réduit pour les bières titrant moins de 3,5 % et un taux normal pour les bières situées au-dessus de ce seuil. Ainsi, les États membres ne peuvent pas créer de tranche supplémentaire de fiscalité sans une modification des textes européens.

Par ailleurs, je vous alerte, dans le sillage du rapport d'initiative citoyenne de la Cour des comptes d'avril 2025 sur Les taxes à faible rendement, sur la nécessité d'éviter dans la mesure du possible la création de tels prélèvements. Or plusieurs amendements déposés visent à créer des taxes dont le produit attendu sera insuffisant au regard des charges de recouvrement et des coûts induits par leur complexité pour les acteurs concernés.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur ces trois amendements.

Mme la présidente. La parole est à M. le vice-président de la commission.

M. Alain Milon, vice-président de la commission des affaires sociales. Je prie mes collègues de bien vouloir m'excuser, mais comme j'ai pris un verre de vin pendant le repas, je ne dois pas avoir le bon état d'esprit pour aborder ce sujet ! (Sourires.)

Mme Nathalie Goulet. C'est patriote !

M. Xavier Iacovelli. Attention, vous êtes enregistré ! (Sourires.)

M. Alain Milon, vice-président de la commission des affaires sociales. Ce n'est pas une honte, bien au contraire ! J'ai pris un bon verre de bordeaux... (Nouveaux sourires.)

Je m'interroge : ces amendements ont-ils été déposés pour protéger la jeunesse ou uniquement pour imposer une taxe supplémentaire à ceux qui produisent 200 000 hectolitres et plus ?

En effet, une bière aromatisée ou sucrée, qu'elle soit brassée par des producteurs dépassant ce seuil ou non, provoquera la même addiction chez les jeunes. Je ne comprends donc pas pourquoi il ne faudrait cibler que les producteurs dépassant un volume annuel de 200 000 hectolitres. En tout cas, ce n'est pas pour protéger les jeunes !

Mme la présidente. La parole est à Mme Marion Canalès, pour explication de vote.

Mme Marion Canalès. Monsieur le vice-président de la commission, lorsque nous proposons des taxes modérées, en tentant d'en exonérer une partie de la filière pour ne pas frapper un territoire, cela ne convient pas.

Quand nous parlons de bière sucrée – nous avons eu un débat sur les prémix –, nous abordons la transition entre l'enfance et l'âge adulte. Si on ajoute du sucre à l'alcool, c'est pour obtenir un pur produit marketing, destiné à attirer les jeunes. Mais là encore, notre proposition ne convient pas.

On ne peut pas invisibiliser ce sujet et ne plus jamais l'évoquer. Il faut continuer d'en parler, trouver des points d'accord et avancer.

Je comprends, lorsque nous proposons des mesures un peu fortes, comme un relèvement des droits d'accise dans le projet de loi de finances, que nos collègues qui défendent la filière viticole s'y opposent, mais là, nous essayons de trouver des compromis et cela ne va toujours pas !

Par conséquent, nous allons laisser prospérer les bières sucrées ou édulcorées et ne pas adopter la solution de repli que nous proposons. Je trouve cela réellement dommage, car on n'avance pas. Pour notre part, nous continuerons de rendre ce sujet visible, jusqu'à ce qu'un point d'accord puisse être trouvé. Nous y arriverons !

Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.

Mme Raymonde Poncet Monge. Non, les taxes dont nous parlons ne sont pas des taxes de rendement ; ce sont des taxes comportementales. Si Bercy s'en désole, c'est parce qu'il ne voit que des euros !

Il n'en demeure pas moins que les taxes comportementales fonctionnent. Pour preuve, la consommation de tabac diminue, ce qui est une bonne nouvelle, n'en déplaise à Bercy.

En écoutant les propos de certains de mes collègues, je me dis qu'il est heureux que nous ne produisions pas de tabac en France.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Ça a été le cas !

M. Alain Joyandet. Du tabac est produit en France !

Mme Raymonde Poncet Monge. Nous n'aurions jamais pu mener la politique de prévention avec le slogan « fumer tue » si la France avait compté des producteurs de tabac. Dans les pays producteurs, il n'est certainement pas possible de taxer le tabac comme nous le faisons.

Je ne compare pas le vin et le tabac. J'estime que l'on peut défendre la filière viticole en encourageant la qualité et en baissant les quantités. Mais votre argument sur les filières est tout de même dingue… Alors que nous abordons des questions de santé publique, j'en viens à me dire : « Heureusement que nous ne produisons pas de tabac ! »

Nous avons eu de la chance de pouvoir mener notre politique de prévention en la matière. Nous pourrions à présent faire un peu plus de publicité pour encourager les gens à moins boire. Voilà une politique de santé publique, madame la ministre !

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Masset, pour explication de vote.

M. Michel Masset. Madame Poncet Monge, nous produisons toujours du tabac en France ! Je vous invite à venir visiter des cultures de tabac en Lot-et-Garonne. (MM. Pierre Cuypers et Alain Joyandet applaudissent.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 1706.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 558 rectifié bis et 1520.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 1572, présenté par M. Jomier, Mmes Canalès, Bonnefoy, Brossel, de La Gontrie, Féret et Le Houerou et M. Ros, est ainsi libellé :

Après l'article 11 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le chapitre 5 du titre IV du livre II du code de la sécurité sociale est complété par une section 3 bis ainsi rédigée : 

« Section 3 bis

« Taxation des publicités en faveur de boissons alcooliques 

« Art. L. 245-12-.... – I. – Est instituée une taxe perçue sur les dépenses de publicité portant sur la promotion d'une boisson alcoolique. 

« II. – Sont redevables de cette taxe les entreprises produisant, important ou distribuant en France des boissons alcooliques ou leurs représentants et dont le chiffre d'affaires du dernier exercice est supérieur ou égal à 10 millions d'euros, hors taxe sur la valeur ajoutée. 

« III. – La taxe est assise sur les frais d'achats d'espaces publicitaires, quelle que soit la nature du support retenu et quelle que soit sa forme, matérielle ou immatérielle, ainsi que les frais d'événements publics et de manifestations de même nature.

« IV. – Le taux de la taxe est fixé à 3 % du montant hors taxes sur la valeur ajoutée des dépenses mentionnées au I.

« V. – Les modalités du recouvrement sont fixées par décret dans un délai de trois mois à compter de la date d'entrée en vigueur de la loi n° du de financement de la sécurité sociale pour 2026. 

« VI. – Le produit de la taxe mentionnée au I est affecté à la sécurité sociale dans les conditions prévues au 6° de l'article L. 131-8 du présent code. » 

II. – Le présent article entre en vigueur le 1er janvier 2026.

La parole est à Mme Marion Canalès.

Mme Marion Canalès. Nous allons à présent parler de la publicité. Comme vous pouvez le constater, nous essayons de trouver des points d'accord pour dégager des moyens afin de lutter contre les addictions. C'est d'autant plus nécessaire que le budget de la mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (Mildeca) ne m'a pas l'air d'être sanctuarisé dans le PLF 2026.

L'Organisation mondiale de la santé dénonce le marketing ciblé et agressif que pratiquent les industries : 79 % des jeunes âgés de 15 à 21 ans voient des publicités pour de l'alcool tous les jours, en particulier sur les réseaux sociaux. C'est incommensurable !

Lorsqu'ils ont adopté la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires (HPST), qui assouplissait la loi Évin en autorisant la publicité sur les supports numériques, les parlementaires de l'époque n'avaient pas conscience de la masse de publicité à laquelle tous les jeunes seraient confrontés au quotidien sur tous les réseaux sociaux, dont ils sont de grands utilisateurs.

Désormais, des influenceurs, contre lesquels nous essayons de renforcer les sanctions, font de la publicité pour de grandes marques d'alcool, notamment d'alcool fort, sans être inquiétés.

En réalité, les alcooliers ne consacrent qu'une petite partie – 450 millions d'euros par an – de leur budget publicitaire au marketing. En renforçant la taxe sur la publicité des boissons alcoolisées, notre objectif est donc de trouver des fonds pour financer la prévention. Au-delà, un gros travail de régulation des réseaux sociaux est nécessaire sur ce sujet.

Mme la présidente. L'amendement n° 452 rectifié, présenté par Mme Antoine, M. J.M. Arnaud, Mme Canayer, M. Courtial, Mmes L. Darcos, Gacquerre et Guidez, MM. H. Leroy, Levi, Mizzon et Panunzi et Mmes Perrot, Sollogoub et Vérien, est ainsi libellé :

Après l'article 11 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le chapitre 5 du titre IV du livre II du code de la sécurité sociale est complété par une section… ainsi rédigée :

« Section…

« Taxation des publicités en faveur de boissons alcooliques

« Art. L. 245-.... – I. – Est instituée une taxe perçue sur les dépenses de publicité portant sur la promotion d'une boisson alcoolique.

« II. – Sont redevables de cette taxe les entreprises produisant, important ou distribuant en France des boissons alcooliques ou leurs représentants et dont le chiffre d'affaires du dernier exercice est supérieur ou égal à 50 millions d'euros, hors taxe sur la valeur ajoutée.

« III. – La taxe est assise sur les frais d'achats d'espaces publicitaires, quelle que soit la nature du support retenu et quelle que soit sa forme, matérielle ou immatérielle, ainsi que les frais d'événements publics et de manifestations de même nature.

« IV. – Le taux de la taxe est fixé à 3 % du montant hors taxes sur la valeur ajoutée des dépenses mentionnées au I.

« V. – Le produit de la taxe mentionnée au I est affecté à la sécurité sociale dans les conditions prévues au 6 de l'article L. 131-8 du présent code. »

II. – Le présent article entre en vigueur le 1er janvier 2026.

La parole est à Mme Jocelyne Antoine.

Mme Jocelyne Antoine. Par cet amendement, je souhaite également alerter sur l'absence de véritable régulation des réseaux sociaux.

En effet, depuis quelques années, les producteurs d'alcool font de manière croissante la promotion de leurs boissons alcoolisées sur les plateformes, notamment par le biais d'influenceurs. En près de trois ans, Addictions France a ainsi recensé plus de 11 300 contenus valorisant l'alcool sur Instagram et sur TikTok.

La cible touchée par ces publicités est très jeune. Aussi cette exposition fréquente ouvre-t-elle la voie à un alcoolisme de plus en plus précoce.

Cet amendement vise donc à taxer la publicité pour les produits alcoolisés afin de financer le fonds de lutte contre les addictions.

Mme la présidente. L'amendement n° 914 rectifié, présenté par Mmes Bélim et Canalès, M. Lurel, Mme Bonnefoy, MM. Temal, Omar Oili, Ros et Tissot, Mmes Poumirol et Le Houerou, MM. Jomier et M. Weber, Mme Briquet et MM. Féraud et Mérillou, est ainsi libellé :

Après l'article 11 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Après la section 3 du chapitre 5 du titre IV du livre II du code de la sécurité sociale, est rétablie une section 4 ainsi rédigée :

« Section 4

« Taxation des publicités numériques en faveur de boissons alcooliques

« Art. L. 245-.... – I. – Il est institué une taxe perçue sur les dépenses de publicité numérique portant sur la promotion de boissons alcooliques. Le produit de cette taxe est versé à la Caisse nationale de l'assurance maladie.

« II. – Sont redevables de cette taxe les entreprises :

« 1° Produisant, important ou distribuant en France des boissons alcooliques, ou leurs représentants ;

« 2° Et dont le chiffre d'affaires du dernier exercice est supérieur ou égal à 5 millions d'euros, hors taxe sur la valeur ajoutée.

« III. – La taxe est assise sur les frais d'achat d'espaces publicitaires numériques, incluant notamment :

« 1° Les publicités diffusées sur les sites internet et applications mobiles ;

« 2° Les publicités sur les réseaux sociaux et plateformes de partage de contenus ;

« 3° Les campagnes de marketing digital et d'influence ;

« 4° Tout autre support publicitaire numérique.

« IV. – Le taux de la taxe est fixé à 3 % du montant hors taxes sur la valeur ajoutée des dépenses mentionnées au III du présent article.

« V. – Les modalités du recouvrement de la taxe sont précisées par décret. »

II. – Le présent article entre en vigueur le 1er janvier 2026.

La parole est à Mme Audrey Bélim.

Mme Audrey Bélim. Nous sommes confrontés à un bombardement publicitaire permanent, parfaitement ciblé et totalement déconnecté de nos objectifs de santé publique. Les stratégies adoptées sont très fines, les campagnes massives et redoutablement efficaces. Nous ne pouvons plus rester sans réagir.

Par cet amendement, nous ne faisons pas un geste idéologique ; nous souhaitons rétablir une forme de justice. Nous devons faire pencher la balance du bon côté, entre des stratégies commerciales agressives et la responsabilité collective qui est la nôtre, d'une part, et, bien sûr, entre les profits amassés en ligne et les coûts humains que nous devons assumer, d'autre part.

La taxe de 3 % que nous proposons est mesurée, elle est ciblée, elle ne vise aucune consommation individuelle. Elle s'appliquera uniquement à ceux qui organisent la pression publicitaire, et non à ceux qui en subissent les effets.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Lorsque nous avons évoqué ce fléau – on peut le qualifier comme tel – l'année dernière, nous avions conclu que la solution la plus pertinente était non pas de créer des taxes, mais d'améliorer l'encadrement.

Dans le rapport d'information sur la fiscalité comportementale dans le domaine de la santé que nous avons réalisé, Cathy Apourceau-Poly et moi-même, nous avions jugé nécessaire d'actualiser la loi Évin, en particulier pour l'adapter aux usages numériques.

Mme Cathy Apourceau-Poly. Ce qui n'a pas été fait !

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Force est de constater que les choses n'ont toujours pas évolué sur le sujet, mais il n'en demeure pas moins qu'il me semble plus pertinent de faire évoluer le cadre que de créer une taxe.

La commission émet donc un avis défavorable sur ces trois amendements.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Stéphanie Rist, ministre. Il convient avant tout de déployer un plan de prévention prenant en compte les outils numériques. Du reste, des influenceurs peuvent également contribuer à l'éducation à la santé, en apportant d'autres informations. Un plan est en train d'être construit.

Le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces trois amendements.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marion Canalès, pour explication de vote.

Mme Marion Canalès. J'ai oublié de mentionner le rapport d'information d'Élisabeth Doineau et de Cathy Apourceau-Poly, mais il est en effet indispensable de passer à une loi Évin 3.0, car l'esprit originel de ce texte, qui a par ailleurs été rogné, n'est plus adapté à la société actuelle.

Cette loi n'est pas pensée pour les réseaux sociaux. Je suis d'accord avec Mme la rapporteure générale : il faut un meilleur encadrement. Mais les taxes sont le seul levier dont nous disposons pour traiter cette question dans le cadre de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale.

C'est l'occasion pour nous de sensibiliser nos collègues : il nous faut une loi Évin 3.0, qui encadre strictement la publicité massive pour des produits alcoolisés à destination des jeunes !

Mme la présidente. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.

M. Pascal Savoldelli. Comme certains de mes collègues, je découvre la fiscalité comportementale.

M. Pascal Savoldelli. Je reste donc prudent sur la question. Si je me suis abstenu sur les amendements précédents, c'est parce que – je le dis très sincèrement – je n'étais pas sûr que ces taxes puissent avoir un effet préventif. Elles présentaient néanmoins un avantage, c'est que leur produit devait revenir à la sécurité sociale. Cela ne signifie pas que nous allons faire de la prévention, mais tant mieux si nous nous engageons sur cette voie.

Mais, cette fois-ci, je vais voter ces amendements, parce qu'ils visent des supports qui induisent des comportements. Il s'agit donc bel et bien de fiscalité comportementale.

Vous voyez, chers collègues, on peut très bien, comme moi, s'être abstenu ou avoir voté contre les amendements précédents et voter les suivants. Ces amendements sont tout à fait responsables. Ces publicités façonnent et structurent des comportements.

Mme la présidente. La parole est à M. Sebastien Pla, pour explication de vote.

M. Sebastien Pla. J'entends des collègues en appeler à une loi Évin 3.0. Nous avons déjà la loi la plus restrictive en matière de promotion et de communication sur les produits de consommation.

En premier lieu, ces amendements, par leur périmètre, pose problème : ils visent à taxer celles et ceux qui font de l'œnotourisme. Il faudrait savoir… Si nous voulons modifier les comportements et aller vers une économie du vin globale, et non centrée sur la seule consommation, c'est un problème !

En second lieu, s'ils étaient adoptés, ces amendements créeraient une distorsion de concurrence. C'est une réalité. Il est faux de dire que l'on peut, aujourd'hui, faire de la communication et de la promotion à outrance pour le vin, notamment sur les réseaux sociaux, sans être poursuivi.

À titre d'exemple, un grand opérateur de vente de vins du Languedoc à l'international, Gérard Bertrand, a été attrapé par la patrouille, en application de la loi Évin, parce qu'il faisait appel à des influenceurs pour promouvoir son vin. Mais s'il le faisait, c'était pour faire face à la concurrence de vins étrangers, produits en Europe ou aux États-Unis, pays où la publicité sur les réseaux sociaux est autorisée.

Les enfants et les personnes qui utilisent les réseaux sociaux en France voient tous les jours des messages de promotion ou de communication encourageant la consommation de vins et d'alcools forts provenant de pays étrangers.

Si nous adoptons ces amendements, nous allons, une fois de plus, mettre en difficulté les entreprises françaises face à la concurrence étrangère, qui communique quotidiennement sur les réseaux sociaux. C'est la raison pour laquelle je ne les voterai pas.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 1572.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 452 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 914 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 1698, présenté par Mmes Bélim et Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Lubin, Poumirol, Rossignol et Artigalas, MM. Cardon, Chaillou et Chantrel, Mme Conway-Mouret, M. Darras, Mme Espagnac, MM. Féraud et Gillé, Mme Harribey, MM. Jacquin et P. Joly, Mme Linkenheld, MM. Lurel, Marie, Mérillou et Michau, Mme Monier, MM. Montaugé, Pla et Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Roiron, Ros, Tissot, Uzenat, M. Vallet, Ziane et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l'article 11 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Après la section 3 du chapitre 5 du titre IV du livre II du code de la sécurité sociale, il est inséré une section… ainsi rédigée :

« Section…

« Taxation des publicités en faveur de boissons alcooliques

« Art. L. 245-…. – I. – Il est institué une taxe perçue sur les dépenses de publicité portant sur la promotion d'une boisson alcoolique à La Réunion. Le produit de cette taxe est respectivement versé à la Caisse générale de la sécurité sociale de La Réunion.

« II. – Sont redevables de cette taxe les entreprises :

« 1° Produisant, important ou distribuant en France des boissons alcooliques ou leurs représentants ;

« 2° Et dont le chiffre d'affaires du dernier exercice est supérieur ou égal à 5 millions d'euros, hors taxe sur la valeur ajoutée.

« III. – La taxe est assise sur les frais d'achats d'espaces publicitaires, quelle que soit la nature du support retenu et quelle que soit sa forme, matérielle ou immatérielle, ainsi que les frais d'évènements publics et de manifestations de même nature.

« IV. – Le taux de la taxe est fixé à 1 % du montant hors taxes sur la valeur ajoutée des dépenses mentionnées au I du présent article.

« V. – Les modalités du recouvrement sont précisées par décret. »

II. – Le présent article entre en vigueur le 1er janvier 2026.

La parole est à Mme Audrey Bélim.

Mme Audrey Bélim. L'année dernière, cet amendement, qui vise à taxer la promotion de l'alcool spécifiquement à La Réunion, avait été adopté par notre assemblée. Il n'a finalement pas été retenu dans le texte final.

J'en présente donc cette année une version enrichie, après avoir procédé à des ajustements et sécurisé techniquement le dispositif, comme l'avaient demandé les filières et les acteurs de mon territoire.

Pourquoi insistons-nous ? Chez moi, à La Réunion, l'alcool n'est pas seulement une question de comportement. C'est un fléau, qui tue : l'alcool est à l'origine de 11 % des décès à La Réunion, contre 6 % dans l'Hexagone, soit presque le double. Après avoir actualisé ses données, en s'appuyant sur de meilleures connaissances et des critères plus adaptés, Santé publique France a dénombré 600 morts chaque année.

La taxe de 1 % que je propose est strictement calibrée. Elle ne vise ni les consommateurs ni les acteurs de terrain. Elle cible uniquement les dépenses publicitaires, parce que les entreprises qui incitent à la consommation d'alcool doivent participer financièrement à la prévention des risques et à la réparation des dommages liés à l'alcool sur notre île.

Et les dommages sont énormes : 10 % des buveurs réunionnais consomment 69 % du volume total d'alcool consommé sur l'île. La part de personnes ayant une consommation excessive d'alcool y est bien supérieure que dans l'Hexagone.

Les conséquences humaines et sanitaires sont plus graves qu'en métropole. Plus de 90 % des violences intrafamiliales sont commises sous l'influence de l'alcool, qui est le facteur numéro un du passage à l'acte. En outre, 62 % des accidents de la route mortels sont attribués à la vitesse ou à la combinaison entre alcoolémie et vitesse. Le taux de mortalité des personnes atteintes des principales pathologies directement liées à l'alcool est 40 % plus élevé à La Réunion que dans l'Hexagone.

Enfin, l'une des conséquences les plus silencieuses est la plus ravageuse : un enfant victime du syndrome d'alcoolisation fœtale naît tous les deux jours à La Réunion.

Je le répète, chez nous, l'alcool n'est pas qu'une question de comportement, c'est un fléau qui brise des vies, qui broie des familles et qui tue.

Cet amendement est, me semble-t-il, raisonnable. Vous l'avez adopté l'année dernière. Nous l'avons ajusté et il est pleinement opérationnel. Il vise à prendre une mesure porteuse d'espoir face à un fléau qui gangrène la société réunionnaise.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Madame Bélim, je salue la manière dont vous défendez votre territoire au travers de cet amendement. De nombreux habitants de La Réunion partagent sans doute vos préoccupations.

L'année dernière, la commission avait émis un avis défavorable sur cet amendement. En un an, nous n'avons pas changé d'avis.

Je reconnais que la situation que vous décrivez est catastrophique, mais la commission estime que le levier fiscal n'est pas efficace, et qu'il convient de lui préférer une politique de prévention ciblée, en particulier sur les plus jeunes.

Mme Pascale Gruny. Très bien !

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Madame la ministre, conduisez-vous, avec l'agence régionale de santé (ARS) de La Réunion, des actions particulières sur ce territoire ?

J'ai eu l'occasion de rencontrer, il y a quelques mois, le directeur de cette ARS. Nous avons beaucoup parlé de l'obésité, qui est un autre fléau auquel sont confrontés les Réunionnais. Sur ce sujet, des actions ciblées sont mises en place, plus vigoureusement qu'ailleurs. Il faut procéder de la même manière sur la question de l'alcoolisme. C'est pourquoi j'insiste auprès de vous, madame la ministre, pour que l'ARS soit fortement mobilisée.

Madame Bélim, le problème que vous soulevez est dramatique, mais la ligne de la commission m'oblige, je le regrette, à émettre un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Stéphanie Rist, ministre. L'ARS de La Réunion s'est bien saisie du sujet. Elle a organisé il y a peu une réunion sur cet enjeu majeur, à laquelle ont participé de nombreux acteurs.

Vous l'avez dit, le problème se concentre sur 10 % des buveurs, qui consomment à eux seuls presque 70 % des volumes. Il convient donc de conduire une action ciblée, d'où l'intérêt de travailler avec l'ARS et, plus généralement, à l'échelle régionale. La région elle-même a d'ailleurs d'ores et déjà engagé des actions en augmentant la fiscalité locale.

Je suis très favorable au fait de travailler avec les parlementaires de ces territoires pour imaginer des actions très concrètes susceptibles d'améliorer la situation.

Néanmoins, comme sur tous les amendements visant à introduire des taxes, le Gouvernement émet un avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marion Canalès, pour explication de vote.

Mme Marion Canalès. La force de conviction de notre collègue Audrey Bélim nous avait permis de faire adopter cet amendement l'année dernière.

Comme elle l'a dit, le syndrome d'alcoolisation fœtale est un véritable fléau dans son département. Il a été rendu particulièrement visible par l'action de ses parlementaires qui, en se mobilisant sur cette question, sont parvenus à faire venir une équipe sur le terrain pour établir un diagnostic.

Cela ne signifie pas pour autant que La Réunion est le seul département touché ou le plus touché. Ce syndrome est sous-diagnostiqué dans tous nos territoires, notamment chez les 600 000 ou 700 000 enfants qui développent des troubles liés à ce syndrome.

Certes, une journée mondiale est consacrée à la sensibilisation à ce syndrome, mais il n'en demeure pas moins que l'on en parle assez peu. La Réunion est l'un des fers de lance sur ce sujet. Ses élus se sont mobilisés avec conviction, et vous avez pu constater la détermination d'Audrey Bélim.

Le syndrome d'alcoolisation fœtale est un problème bien plus large qu'il n'y paraît. Il nous touche toutes et tous. L'amendement de ma collègue vise à expérimenter une action très circonscrite, avec des acteurs qui, vous l'avez dit, madame la ministre, sont déjà sensibilisés et, en partie, organisés.