M. Xavier Iacovelli. Cet amendement est plus spécifique que le précédent puisqu'il a trait aux sachets de nicotine sans tabac. Contrairement au « snus », dont la vente est interdite au sein de l'Union européenne, ces sachets sont considérés comme moins nocifs, car ils ne contiennent pas de tabac et n'impliquent aucune combustion.
À ce jour, ils sont fiscalisés dans dix-huit pays européens, dont treize États membres de l'Union européenne. Aussi, la Commission européenne a récemment proposé la création d'une catégorie fiscale spécifique pour ces produits.
En France, le précédent gouvernement avait prévu d'interdire la vente de ces sachets à compter du 1er avril 2026, notamment parce que les jeunes y ont facilement accès. On est forcé de dénoncer un paradoxe, puisque, en dépit de cette interdiction, la majorité des pays européens pourraient continuer à commercialiser ces produits. Une telle situation pourrait donc favoriser l'émergence d'un marché parallèle, comme celui du tabac.
Dans ce contexte, le présent amendement vise à encadrer la commercialisation des sachets en garantissant la monopolisation de la vente aux buralistes, comme pour le tabac. Cela permettrait de mieux encadrer l'interdiction de la vente aux mineurs, en imposant un contrôle systématique de l'âge.
Par ailleurs, pour harmoniser la fiscalité à l'échelon européen, l'accise serait progressivement portée à 70 euros par kilogramme en 2028, conformément à la proposition de la Commission européenne.
Cet amendement permettrait d'en finir avec l'existence d'un vide juridique dangereux, de protéger la jeunesse, de prévenir le développement d'un marché noir et d'inscrire la France dans une dynamique européenne de régulation stricte et responsable.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Je veux tout d'abord saluer le travail que vous avez effectué sur ce sujet, mon cher collègue.
L'amendement n° 182 rectifié vise à taxer les produits du vapotage. Les travaux de la commission des affaires sociales – je pense en particulier au rapport sur la fiscalité comportementale en santé, que j'ai conjointement réalisé avec Cathy Apourceau-Poly – nous ont conduits à rejeter la taxation des produits de vapotage ou de substitution, afin d'éviter les effets de report vers le tabac. (Mme Marion Canalès opine.)
Je rappelle, par ailleurs, qu'aucune étude scientifique n'établit clairement l'effet des produits de vapotage ou de substitution sur la consommation de tabac à long terme. Autrement dit, nous ne savons pas si ces produits constituent le plus souvent une porte d'entrée vers le tabac ou si, au contraire, ils permettent d'arrêter de fumer de façon progressive.
Dans l'attente de travaux supplémentaires de la part de la Haute Autorité de santé (HAS), la commission émet un avis défavorable. Je connais beaucoup d'adultes qui ont arrêté de fumer grâce au vapotage ; on peut donc espérer qu'une partie du problème de nocivité du tabac disparaisse de cette façon-là.
L'amendement n° 181 rectifié, lui, a pour objet de taxer les sachets de nicotine à usage oral. Ces derniers seront bientôt interdits, comme s'y était engagé le ministère de la santé, par la voix de Catherine Vautrin. Un décret a été publié en septembre dernier, en vue d'interdire à compter du 1er mars 2026 les sachets, les billes et les liquides contenant de la nicotine, hors médicaments ou dispositifs médicaux.
Cette mesure, que je souhaite saluer, sera plus utile qu'un dispositif de taxation. C'est pourquoi la commission émet un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Je rejoins les propos de la rapporteure générale. Les sachets de nicotine vont être interdits aux termes du décret publié le 5 septembre dernier, comme l'avait annoncé ma prédécesseure.
Je comprends votre intention, monsieur le sénateur : plutôt qu'une interdiction, la mise en place d'une taxe pourrait empêcher les nouveaux produits tabagiques de prospérer.
Néanmoins, les sachets de nicotine, tels qu'ils sont vendus, provoquent des intoxications aigües, dont le nombre a d'ailleurs sensiblement augmenté. Ainsi, 131 intoxications ont été constatées en 2022, contre 19 deux ans plus tôt.
Bref, on ne peut pas continuer à autoriser la vente de ces produits, dont le risque pour la santé est prouvé. En conséquence, le Gouvernement émet, lui aussi, un avis défavorable.
Mme la présidente. La parole est à M. Xavier Iacovelli, pour explication de vote.
M. Xavier Iacovelli. Je comprends la volonté du ministère de la santé d'interdire ces produits ; c'est bien son rôle que de conduire ce type de politique. Néanmoins, je vous répète que dix-huit pays européens, dont treize États membres de l'Union européenne, ont légalisé et encadré la vente des sachets de nicotine.
Ces derniers étant bientôt interdits, il est certain que l'industrie du tabac trouvera le moyen de créer un nouveau produit de remplacement à base de nicotine.
Le problème est que nous aurons toujours un train de retard par rapport à l'industrie. Dans ces conditions, l'autorisation régulée de ces sachets, qui implique donc d'en interdire la vente aux mineurs, permettrait d'assurer un contrôle sur tous les produits à base de nicotine. C'est pourquoi je maintiens ces amendements.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marion Canalès, pour explication de vote.
Mme Marion Canalès. Même si je défends la mise en place de taxes comportementales dans le plus grand nombre de cas, j'appelle à ne pas taxer les produits de vapotage, car ils aident parfois à en finir avec la consommation de tabac. En ce sens, je rejoins les propos de la rapporteure générale.
Toutefois, le diable se cache dans les détails. On sait qu'une partie de la jeunesse se met à consommer du tabac par le biais du vapotage, lequel demeure dans l'industrie du tabac. Il faut dire que les vapoteuses sont désormais dotées de lumières roses, bleues ou vertes et contiennent souvent des goûts originaux : fruit du dragon ou fleur de cerisier, entre autres.
Encore une fois, il y a un problème de marketing publicitaire agressif qui s'adresse à un public vulnérable. J'insiste, ne taxons pas le vapotage ! Nous aurons de nouveau l'occasion de discuter de ce sujet lors de l'examen de l'article 23 du PLF.
Mme la présidente. L'amendement n° 1575 rectifié bis, présenté par M. Jomier, Mme Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Lubin, Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l'article 11 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services est ainsi modifié :
1° L'article L. 314-24 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, les mots : « 1er mars 2023 au 31 décembre 2023 » sont remplacés par les mots : « 1er janvier 2025 au 1er janvier 2032 ».
b) Le tableau du deuxième alinéa est ainsi rédigé :
«
Catégorie Fiscale |
Paramètres de l'accise |
Montant applicable au 1er janvier 2026 |
Montant applicable au 1er janvier 2027 |
Montant applicable au 1er janvier 2028 |
Montant applicable au 1er janvier 2029 |
Montant applicable au 1er janvier 2030 |
Montant applicable au 1er janvier 2031 |
Montant applicable au 1er janvier 2032 |
Cigares et cigarillos |
Taux (en %) |
38,50 |
41,50 |
44,00 |
46,40 |
48,90 |
51,00 |
53,00 |
Tarif (en €/1 000 unités) |
67,39 |
70,63 |
76,45 |
81,51 |
82,76 |
86,41 |
88,78 |
|
Minimum de perception (en €/1000 unités) |
400,40 |
468,00 |
542,90 |
626,50 |
719,20 |
821,80 |
935,60 |
|
Cigarettes |
Taux (en %) |
56,00 |
57,50 |
59,00 |
60,00 |
61,00 |
62,00 |
63,00 |
Tarif (en €/1 000 unités) |
77,13 |
78,23 |
78,25 |
81,64 |
84,40 |
86,36 |
87,31 |
|
Minimum de perception (en €/1000 unités) |
456,10 |
509,00 |
567,50 |
632,90 |
705,40 |
785,80 |
874,70 |
|
Tabacs fine coupe destinés à rouler les cigarettes |
Taux (en %) |
50,20 |
52,00 |
54,00 |
56,00 |
58,00 |
59,50 |
61,10 |
Tarif (en €/1 000 grammes) |
117,92 |
127,12 |
133,80 |
138,79 |
141,43 |
147,73 |
149,52 |
|
Minimum de perception (en €/1000 grammes) |
458,50 |
532,80 |
618,30 |
716,60 |
829,60 |
959,60 |
1104,20 |
|
Tabacs à chauffer commercialisés en bâtonnets |
Taux (en %) |
51,50 |
52,30 |
53,70 |
55,00 |
56,40 |
57,80 |
59,00 |
Tarif (en €/1 000 unités) |
60,24 |
77,77 |
82,78 |
88,16 |
91,81 |
94,31 |
97,88 |
|
Minimum de perception (en €/1000 unités) |
389,80 |
469,50 |
528,10 |
593,50 |
666,00 |
746,30 |
835,30 |
|
Autres tabacs à chauffer |
Taux (en %) |
51,50 |
53,00 |
54,50 |
56,00 |
57,50 |
58,80 |
60,00 |
Tarif (en €/1 000 grammes) |
198,83 |
212,95 |
224,68 |
233,82 |
239,12 |
246,96 |
254,57 |
|
Minimum de perception (en €/1000 grammes) |
1327,00 |
1498,20 |
1687,80 |
1899,50 |
2134,20 |
2394,20 |
2682,20 |
|
Autres tabacs à fumer ou à inhaler après avoir été chauffés |
Taux (en %) |
52,70 |
54,00 |
55,50 |
56,90 |
58,30 |
59,50 |
60,60 |
Tarif (en €/1 000 grammes) |
38,57 |
41,06 |
42,47 |
43,89 |
44,77 |
46,10 |
47,47 |
|
Minimum de perception (en €/1000 grammes) |
216,40 |
242,80 |
272,00 |
304,60 |
340,70 |
380,80 |
425,20 |
|
Tabacs à priser |
Taux (en %) |
59,54 |
60,85 |
62,03 |
63,10 |
64,07 |
64,94 |
65,73 |
Tabacs à mâcher |
Taux (en %) |
43,83 |
46,65 |
49,20 |
51,52 |
53,62 |
55,51 |
57,22 |
»
c) Le quatrième alinéa est supprimé ;
2° Le tableau du deuxième alinéa de l'article L. 314-25 est ainsi rédigé :
«
Catégorie Fiscale |
Paramètres de l'accise |
Montant applicable au 1er janvier 2026 |
Montant applicable au 1er janvier 2027 |
Montant applicable au 1er janvier 2028 |
Montant applicable au 1er janvier 2029 |
Montant applicable au 1er janvier 2030 |
Montant applicable au 1er janvier 2031 |
Montant applicable au 1er janvier 2032 |
|
Cigares et cigarillos |
Taux (en %) |
37,60 |
41,50 |
44,00 |
46,40 |
48,90 |
51,00 |
53,00 |
|
Tarif (en €/1 000 unités) |
65,83 |
70,63 |
76,45 |
81,51 |
82,76 |
86,41 |
88,78 |
|
|
Cigarettes |
Taux (en %) |
55,80 |
57,50 |
59,00 |
60,00 |
61,00 |
62,00 |
63,00 |
|
Tarif (en €/1 000 unités) |
73,14 |
78,23 |
78,25 |
81,64 |
84,40 |
86,36 |
87,31 |
|
|
Tabacs fine coupe destinés à rouler les cigarettes |
Taux (en %) |
49,10 |
52,00 |
54,00 |
56,00 |
58,00 |
59,50 |
61,10 |
|
Tarif (en €/1 000 grammes) |
111,62 |
127,12 |
127,41 |
126,03 |
122,44 |
122,04 |
118,39 |
|
|
Autres tabacs à fumer ou à inhaler après avoir été chauffés |
Taux (en %) |
50,12 |
54,00 |
55,50 |
56,90 |
58,30 |
59,50 |
60,60 |
|
Tarif (en €/1 000 grammes) |
40,29 |
41,06 |
42,47 |
43,89 |
44,77 |
46,10 |
47,47 |
|
|
Tabacs à chauffer commercialisés en bâtonnets |
Taux (en %) |
50,10 |
52,30 |
53,70 |
55,00 |
56,40 |
57,80 |
59,00 |
|
Tarif (en €/1 000 unités) |
1,09 |
1,56 |
1,66 |
1,76 |
1,84 |
1,89 |
1,96 |
|
|
Autres tabacs à chauffer |
Taux (en %) |
50,12 |
53,00 |
54,50 |
56,00 |
57,50 |
58,80 |
60,00 |
|
Tarif (en €/1 000 grammes) |
178,28 |
212,95 |
224,68 |
233,82 |
239,12 |
246,96 |
254,57 |
|
|
Tabacs à priser |
Taux (en %) |
58,33 |
60,85 |
62,03 |
63,10 |
64,07 |
64,94 |
65,73 |
|
Tabacs à mâcher |
Taux (en %) |
43,07 |
46,65 |
49,20 |
51,52 |
53,62 |
55,51 |
57,22 |
|
»
La parole est à Mme Marion Canalès.
Mme Marion Canalès. Par cet amendement, mon collègue Jomier propose de mettre en place une trajectoire fiscale de hausse des prix du tabac. Cela tombe bien, car l'OMS rappelle que le levier de la fiscalité est extrêmement efficace pour réduire le tabagisme.
Pardonnez-moi si je suis un peu taquine, mais je suis certaine que mes collègues seront d'accord avec cette proposition, dès lors que 80 % des membres de notre assemblée gagent l'intégralité de leurs amendements et de leurs propositions de loi sur la hausse de la fiscalité du tabac. (M. Xavier Iacovelli et Mme la rapporteure générale rient.)
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Il fallait bien qu'on finisse par discuter d'un amendement contre le tabagisme ! La proposition de M. Jomier, qui consiste à élever le prix du paquet de cigarettes à 25 euros d'ici à 2032, me semble peu réaliste. Lors de l'examen du PLFSS, l'an dernier, nous avions déjà tenté, par voie d'amendement, de porter ce prix à 13 euros.
Notez que la politique conduite ces derniers mois a permis une large augmentation du nombre d'espaces publics sans tabac ; cet effort significatif doit être salué.
Il y a d'autres leviers sur lesquels nous pourrions travailler. Frédéric Valletoux, par exemple, préconise de cibler les paquets de cigarettes achetés par les transfrontaliers dans les pays proches de la France. Cela fait déjà un moment que nous envisageons de conduire un travail sur cette question. J'invite la ministre à s'en saisir, si elle en a le temps.
Pour l'ensemble de ces raisons, la commission émet un avis défavorable, même si cet amendement nous a permis de discuter du tabac, que nous considérons tous comme un fléau.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Actuellement, la France conduit un travail sur l'harmonisation du prix du paquet de cigarettes en Europe. Il me semble que le niveau de taxation du tabac dans notre pays nous permettra d'avancer sur ce sujet à l'échelon européen. Cette harmonisation est indispensable, sans quoi les fumeurs continueront à se fournir en tabac dans les autres pays de l'Union.
Nous pouvons nous féliciter d'une diminution de la consommation de tabac chez les jeunes, bien qu'il reste du travail à faire en matière de prévention et d'éducation. Une chose est sûre : une concertation européenne est nécessaire si nous voulons une génération sans tabac.
En attendant, le Gouvernement émet un avis défavorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 1575 rectifié bis.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Mes chers collègues, je vais lever la séance.
Nous avons examiné 186 amendements au cours de la journée ; il en reste 763 à examiner sur ce texte.
8
Ordre du jour
Mme la présidente. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd'hui, samedi 22 novembre 2025 :
À neuf heures cinquante, quatorze heures trente, le soir et la nuit :
Suite du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2026, transmis en application de l'article 47-1, alinéa 2, de la Constitution (texte n° 122, 2025-2026).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée le samedi 22 novembre 2025, à zéro heure cinquante.)
Pour le Directeur des comptes rendus du Sénat,
le Chef de publication
JEAN-CYRIL MASSERON


