M. le président. La parole est à M. Pierre Barros.

M. Pierre Barros. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, si la fin de gestion 2025 n'est pas marquée par un dérapage comptable, elle porte l'empreinte d'un dérapage politique.

Lorsque le chef d'état-major des armées, devant les maires de France, évoque « le prix du sang », il impose dans le débat public une parole d'autorité qui n'a aucune légitimité démocratique. Ces propos nous obligent à regarder la situation en face : la politique budgétaire favorise le climat délétère actuel.

Cette politique budgétaire est révélatrice de ce que l'État se permet, de ce qu'il délègue et de ce qu'il renonce à assumer.

Dans ce contexte, le Gouvernement nous explique que 2025 marquerait le retour à la maîtrise. Déficit public stabilisé à 5,4 % du PIB, solde de l'État à –131 milliards : est-ce vraiment de la maîtrise ou, plutôt les résultats d'une année passée à rattraper ses propres erreurs ?

L'année 2024 a été marquée par un dérapage des comptes, mais aussi du respect des institutions.

Le Gouvernement a ainsi refusé d'établir un projet de loi de finances rectificative après l'annulation de 10 milliards d'euros de crédits, à peine deux mois après le vote du projet de loi de finances par 49.3 !

S'est ensuivi un pilotage par décrets, surgels, réserves et reports – autrement dit, un exercice budgétaire sans Parlement, donc sans contrôle. Bruno Le Maire a depuis lors confirmé que cette mise à l'écart des assemblées était une décision du Président de la République.

Cette verticalité déborde aujourd'hui du champ budgétaire : elle s'exprime dans les finances, dans la conduite de l'État ou encore dans l'expression militaire.

Nous aurions tort de séparer ce qui, en réalité, est intimement lié : l'état du budget, l'état du pays, l'état du monde et l'état du pouvoir ne font en réalité que se répondre.

C'est pour cela que les projets de loi de finances rectificative et les projets de loi de finances de fin de gestion ne sont pas des photographies, mais bien des radiographies. Ces textes révèlent là où tombent les coups.

Cette année, les suppressions et sous-exécutions se concentrent sur les programmes relatifs au travail et à l'emploi, à la recherche, à l'économie productive et à l'innovation.

Ils révèlent aussi un déséquilibre de recettes. Celles qui sont issues de l'impôt sur les sociétés sont ainsi plus élevées de 5,2 milliards d'euros que les prévisions, parce que les marges progressent. En revanche, le produit de la TVA est inférieur de 4 milliards – c'est le montant que vous avez évoqué, madame la ministre – à 10 milliards d'euros aux prévisions en raison de la stagnation des salaires et du recul de la consommation.

Ainsi, pour la troisième année consécutive, nous constatons un écart massif entre prévisions et exécution des recettes de la TVA. Cela n'a rien d'un aléa.

Vous confirmez cette trajectoire en inscrivant, au sein du PLF pour 2026, plus de 30 milliards d'euros d'ajustements, dont les deux tiers en dépenses. Comme en 2025, cet effort frappera exclusivement les plus fragiles, les collectivités et les services publics.

Cette trajectoire ne convainc personne, à en croire le rejet du PLF à l'unanimité, moins une voix, par l'Assemblée nationale.

Néanmoins, ce que ce projet de loi de finances de fin de gestion révèle avant tout, c'est la sous-traitance croissante de notre souveraineté aux marchés financiers.

Et cela révèle bien la contradiction centrale de votre discours lorsque vous présentez la maîtrise comme un choix politique : en réalité, les leviers techniques de cette maîtrise vous échappent déjà !

Vous ne maîtrisez pas la dynamique de la TVA, non plus que le coût de la dette, fixé par les agences de notations.

Vous ne maîtrisez plus les comptes spéciaux, dégradés de 4,7 milliards d'euros, dont 2,4 milliards sur les participations de l'État.

Vous ne maîtrisez pas davantage l'investissement public, puisque les crédits d'avenir sont systématiquement les premiers à être gelés.

Et vous ne maîtrisez même plus le périmètre stratégique de l'État, désormais négocié dans des tours de table financiers !

Pourtant, cette dépendance n'a rien d'inéluctable.

Il existe des solutions sérieuses et éprouvées : une politique du crédit renouvelée, un circuit du Trésor modernisé, une épargne nationale qui contribue réellement à investir pour l'avenir. Mais ces alternatives supposent un choix : celui de desserrer l'étau budgétaire dans lequel votre gouvernement maintient le pays.

Notre groupe s'emploiera à défendre ces solutions, parce que notre pays ne peut être gouverné ni par la peur, ni par l'austérité, ni par la résignation, mais seulement par un projet débattu, notamment au Parlement.

Mes chers collègues, pour conclure, je vous invite à méditer ce mot de Rosa Luxemburg, qui n'a jamais été autant d'actualité : « La liberté, c'est toujours la liberté de celui qui pense autrement. » (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur des travées du groupe GEST.)

M. le président. La parole est à M. Grégory Blanc. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

M. Grégory Blanc. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le Gouvernement présente aujourd'hui ce projet de loi de finances de fin de gestion comme une simple mise à jour comptable. Mais personne n'est obligé de faire semblant d'y croire !

Ce texte est de fait révélateur de prévisions une nouvelle fois trop optimistes et d'un budget initial mal calibré.

Alors que l'année 2025 n'a pas été marquée par la moindre réforme structurelle pour gagner en efficience, nous n'avons toujours aucune trajectoire pluriannuelle crédible et documentée pour revenir à un déficit inférieur à 3 % du PIB.

Pire, cette absence de responsabilité s'est accompagnée d'un scénario digne de Dallas, dans la cacophonie que nous avons connue au sortir de l'été – il faut se rappeler l'épisode Bayrou-Lecornu-Retailleau, qui nous a coûté 0,3 point de PIB, soit plus de 10 milliards d'euros selon l'Insee !

Avoir le sens de l'État, ce n'est pas ajouter du désordre aux désordres. (Mme Sophie Primas proteste.) C'est dire la vérité et affronter ces désordres avec lucidité.

L'année 2025, de ce point de vue, s'inscrit dans une certaine continuité, à l'œuvre depuis 2022. Depuis cette date, en effet, pas un seul budget n'a été respecté.

Chaque année, c'est le même scénario : on nous présente des prévisions souvent irréalistes, en nous promettant que tout va rentrer dans les clous… et une fois que la réalité apparaît, on coupe dans les politiques publiques pour essayer de rattraper les dérapages !

En définitive, tout cela n'est que du bricolage, hors de tout contrôle démocratique.

De facto, c'est la technique du rabot qui est privilégiée, et elle s'attaque d'abord aux cibles les plus faciles, à savoir les budgets d'investissement. L'environnement et le logement en font clairement les frais, alors même que le secteur du bâtiment est désormais sous la ligne de flottaison. Il en va de même pour le soutien aux politiques industrielles.

Mes chers collègues, en souscrivant à ce mode de gestion qui cède à la facilité, c'est l'avenir que nous hypothéquons.

Et que prévoit le PLFG présenté aujourd'hui pour corriger cela ? Rien ! On enregistre 5 milliards de recettes de TVA en moins, sans savoir pourquoi, on prend acte des écarts avec les prévisions – et on passe à autre chose.

Le résultat, ce sont des annulations de crédits toujours plus brutales pour boucler le budget : sont ainsi supprimés 800 millions d'euros sur la mission « Travail, emploi et administration des ministères sociaux », 250 millions d'euros sur la mission « Recherche et l'enseignement supérieur », et 180 millions d'euros sur la mission « Économie ».

Pis : on coupe là où les besoins du pays sont les plus importants, notamment dans la période que nous venons de vivre.

À titre d'exemple, jusqu'à la réserve de précaution sur les crédits de lutte contre la fraude est amputée ! La fraude explose, et le Gouvernement répond en réduisant les moyens du contrôle fiscal. Où est la logique ?

Vos choix témoignent d'un véritable problème de politique économique : nous y reviendrons lors des débats sur le projet de loi de finances. Mais ils révèlent aussi un problème de fonctionnement démocratique.

Alors que le pays est divisé et la représentation nationale fragmentée, il est indispensable de construire un compromis : nous ne pouvons plus souscrire à une procédure budgétaire en deux temps, comme c'est aujourd'hui le cas.

Dans un premier temps, le Parlement vote les impôts et adopte une loi de finances, ce qui soulève les problèmes de prévisions que j'évoquais dans mon propos liminaire.

Puis, dans un second temps, tout le reste de l'année, le Parlement n'a plus la main un seul instant sur le contrôle démocratique, et nous assistons, impuissants, à des salves de décrets de gel, de surgel, et d'annulation de crédits.

Madame la ministre, mes chers collègues, comment croire que l'on peut construire un compromis sur du sable ? C'est impossible ! Pour parvenir à un compromis, il faut que le Gouvernement s'engage à consulter le Parlement à mi-année, et que les parlementaires, et eux seulement, puissent décider d'éventuels gels ou annulations de crédits.

Avoir le sens de l'État, c'est regarder les désordres en face, dire la vérité et agir. Nous attendons donc de véritables perspectives. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST et sur des travées du groupe SER. – M. Pierre Barros applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Christian Bilhac. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

M. Christian Bilhac. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la feuille morte budgétaire continue de tomber au gré des vents, mais elle se rapproche un peu moins vite du sol ! Ainsi, 2025 sera l'année du « moins pire ».

Le gouvernement Barnier proposait un déficit à 5 % du PIB. Le gouvernement Bayrou prévoyait de le maintenir à 5,4 %. Le gouvernement Lecornu devrait tenir sur les derniers mètres, avec un pilotage serré !

Le passage de témoin dans la course de relais entre Barnier, Bayrou et Lecornu fut délicat, mais il a redonné un peu de crédibilité à la France.

Si l'exécution du déficit s'améliore de 8 milliards d'euros par rapport aux prévisions et recule de 25 milliards par rapport à 2024, en réalité, cette victoire à la Pyrrhus a coûté cher à la France.

Premièrement – je sais que vous n'y êtes pour rien, madame la ministre –, l'amélioration aurait été plus nette sans l'instabilité politique devenue structurelle. Depuis juillet 2024, cette situation nous a coûté 15 milliards d'euros. C'est un luxe que la France ne peut plus se permettre.

Les mesures de gestion illustrent un pilotage budgétaire tributaire de ce contexte : 2,6 milliards d'euros d'annulations de crédits en avril, 5 milliards d'euros de surgel des dépenses de l'État et de la sécurité sociale en juin, puis 4,2 milliards d'euros d'annulations inscrits dans ce texte.

Le comité d'alerte des finances publiques aura permis de sauver les meubles, mais pas d'empêcher la dérive des dépenses des administrations centrales, supérieures de 0,4 point en valeur aux prévisions.

A contrario, les collectivités locales ont fait preuve de discipline : leurs dépenses sont inférieures de 0,6 point aux prévisions. Lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2026, il faudra éviter les coups de rabot à l'aveugle : les divers organismes d'administration centrale représentent 34 % de la dépense publique, contre 20 %, pour les administrations publiques locales, qui, je le répète, ont fait leur part dans l'effort.

Deuxièmement, l'année 2025 est marquée par l'aggravation d'un déficit encore plus grave pour notre démocratie, bien qu'il ne soit pas mesuré dans les bleus budgétaires : celui de la confiance.

En témoignent les 5 milliards d'euros de recettes de TVA qui manquent au budget de l'État cette année – soit un total de 10 milliards d'euros, si l'on prend en compte la part de la sécurité sociale et celle des collectivités territoriales.

M. Claude Raynal, président de la commission des finances. Eh non !

M. Christian Bilhac. Comment expliquer cette diminution ? N'est-elle pas le résultat de certaines mesures budgétaires, comme la suspension des aides à la rénovation de l'habitat ou la baisse du budget des collectivités territoriales ?

Avec mes collègues du groupe RDSE, je m'inquiète de plusieurs aspects du projet de loi de finances de fin de gestion pour 2025. J'en évoquerai brièvement quelques-uns.

Tout d'abord, l'absence d'une politique ambitieuse pour le commerce extérieur est regrettable, car il serait urgent de revenir à l'équilibre.

Ensuite, l'annulation de crédits de la mission « Aide publique au développement » se fait au détriment de l'influence de la France.

Enfin, de nombreux maires nous ont alertés sur le gel du solde des crédits de la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) : les communes n'obtiennent plus de subventions lorsqu'elles envoient leurs derniers projets aux préfectures. Le Gouvernement prévoit-il de débloquer ces crédits ? De nombreuses communes sont inquiètes.

Cette année, donc, les objectifs budgétaires ont été atteints sans briller : croissance ralentie, recettes moins dynamiques, dépenses sociales et de chômage en hausse.

Résultat : l'investissement des entreprises reculerait de 1,3 % en 2025, puis de 1,7 % en 2026, entraînant la destruction de 160 000 emplois marchands sur deux ans. Le chômage augmenterait pour atteindre 8,2 % à la fin de 2026.

Dans le brouillard qui entoure l'avenir des documents budgétaires à venir, je m'abstiendrai sur ce projet de loi de finances de fin de gestion pour 2025, et les votes des membres du groupe RDSE se partageront. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Vincent Delahaye. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – M. Marc Laménie applaudit également.)

M. Vincent Delahaye. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, ce texte, que vous qualifiez de technique, madame la ministre, est l'occasion de revenir sur les prévisions et la situation financière de notre pays cette année.

Vous vous réjouissez que nous parvenions à maintenir un déficit à 5,4 %. C'est mieux, certes, que le déficit à 5,8 % en 2024, à l'époque où Bruno Le Maire affirmait qu'il gérait le budget de l'État « à l'euro près »… Mais c'est moins bon, madame la ministre, que la trajectoire que nous avions transmise à Bruxelles et qui prévoyait un déficit à 5 %.

Ce résultat n'est donc pas mauvais, mais nous pourrions faire mieux. Malheureusement, il ne cache pas la situation dramatique de nos finances publiques.

Permettez-moi de faire une comparaison, qui sera certainement parlante à ceux qui nous écoutent – en nombre, j'espère !

Imaginons que l'État soit un particulier qui gagne 3 000 euros par mois. Chaque mois, il dépense 4 500 euros, sachant qu'il est endetté à hauteur de 430 000 euros. Tous les ans, sa dette augmente de 18 000 euros. Dans de telles conditions, pourquoi la banque continuerait-elle à lui prêter de l'argent ? Simplement parce que papa et maman sont très riches !

Si l'on en revient à l'État, ces parents très riches, c'est l'Europe, qui est en quelque sorte garante de notre dette, même si, le jour venu, elle pourrait nous imposer des mesures drastiques.

Nous sommes favorables au redressement de nos comptes publics, et nous considérons que les efforts doivent prioritairement reposer sur la dépense publique. Or j'ai le regret de vous annoncer que, en 2025, tel n'a pas été le cas !

Alors que nous espérions faire peser la plus grande partie de l'effort sur la dépense publique, ce sont les recettes qui y ont intégralement contribué. En effet, 25 milliards d'euros d'impôts et de taxes supplémentaires ont été prélevés en 2025. Ce n'est pas moi qui l'affirme, mais le Haut Conseil des finances publiques.

Du point de vue des recettes, nous dites-vous, madame la ministre, nous sommes alignés avec nos prévisions. Mais ce n'est pas tout à fait le cas, puisqu'il manque 5 milliards d'euros de produit de TVA.

Pour ma part, dès le début de l'année 2025, lorsque nous avons voté le budget, je vous avais avertis que les prévisions étaient trop optimistes. Et c'est encore le cas pour 2026 : bien que les éléments manquent pour appuyer les prévisions pour l'année à venir, il me semble que nous devrions retrancher 5 milliards d'euros de recettes.

Nous devrions nous attendre à une bonne nouvelle quant au produit de l'impôt sur les sociétés, dites-vous. Je l'espère : mais jusqu'à présent, on nous a toujours dit qu'il était impossible de prévoir les recettes tirées de cet impôt avant le cinquième acompte, soit en fin d'année !

Le PLFG entérine donc une augmentation des recettes de 5 milliards d'euros, et d'une baisse des recettes de TVA de 5 milliards également.

J'en viens aux dépenses.

À ceux qui pensent que nous sommes en période d'austérité, je réponds que tel n'a pas été le cas en 2025 : cette année, les dépenses publiques totales ont augmenté de 45 milliards d'euros !

Concernant les missions de l'État, il faut se référer à l'année 2019 pour que la comparaison soit pertinente. En effet, depuis lors, la crise du covid et l'augmentation des prix de l'énergie liée à la guerre en Ukraine ont provoqué une très forte hausse des dépenses des missions de l'État.

Or si l'État avait dépensé au même niveau que l'inflation, sans compter les dégrèvements et les remboursements, le niveau de dépenses serait inférieur de 30 milliards d'euros, et nous nous porterions nettement mieux.

Nous ne pouvons donc que vous inciter, madame la ministre, à davantage d'économies sur les dépenses. À cet égard, je me permets de vous offrir un ouvrage que je viens de produire : Des économies, en veux-tu en voilà. (M. Vincent Delahaye brandit son livre. – Sourires.)

M. François Bonhomme. Il n'est pas très gros !

M. Vincent Delahaye. C'est une bonne idée de cadeau pour les fêtes de fin d'année !

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. C'est le père Noël !

M. Olivier Paccaud. Un cadeau hors taxe !

M. Vincent Delahaye. Ce livre vous donnera quelques idées d'économies à réaliser.

Je veux aussi revenir sur les dépenses liées à l'aide médicale de l'État (AME). Je suis en effet un peu surpris que rien ne soit prévu sur ce point dans ce texte.

En effet, les dépenses pour l'AME de droit commun – entièrement prises en charge, jusqu'à présent, par l'État – devraient atteindre un total de 200 millions d'euros supérieur au montant budgété pour l'année. Nous sommes donc en train de constituer une dette vis-à-vis de la sécurité sociale, qui, selon mes calculs, pourrait atteindre 670 millions d'euros à la fin de l'année 2026.

Madame la ministre, comptez-vous continuer à sous-budgéter cette dépense et, ce faisant, à creuser le déficit de la sécurité sociale ? Je ne pense pas que cela soit une bonne chose.

Pour conclure, quand bien même ils auraient souhaité davantage d'efforts sur les dépenses, les membres du groupe Union Centriste, dans leur grande sagesse, voteront pour ce PLFG, considérant que la situation aurait finalement pu être pire ! (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – MM. Emmanuel Capus et Marc Laménie applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. Marc Laménie. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)

M. Marc Laménie. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous sommes nombreux à être rassemblés aujourd'hui : c'est bien la preuve que l'examen du projet de loi de finances de fin de gestion revêt une importance particulière.

Ce texte fixe les ajustements budgétaires nécessaires pour clore l'exercice budgétaire en cours. En ce sens, je tiens à saluer l'important travail mené par les rapporteurs du Sénat comme de l'Assemblée nationale. En outre, madame la ministre, je vous remercie pour votre effort de pédagogie sur les principes de bonne gestion et de transparence, que vous avez rappelés dans votre propos liminaire.

Il est cependant regrettable que ce texte ait été rejeté par les députés en première lecture. Aussi, il nous revient, à nous, sénateurs, de faire preuve de responsabilité pour que ce texte aboutisse et soit examiné dans les meilleures conditions. Il y va de l'intérêt général.

Ce projet de loi prévoit environ 3 milliards d'euros d'ouvertures de crédits. Ceux-ci visent notamment à financer les dépenses liées au versement de certaines aides et prestations sociales, l'ajustement du financement du parc d'hébergement d'urgence pour le maintenir à 203 000 places, le soutien de l'effort en matière de défense et les missions de soutien à Mayotte et à la Nouvelle-Calédonie, qui sont une marque importante de la solidarité due par la métropole à nos concitoyens d'outre-mer.

Ce texte fixe en outre le déficit public à 5,4 %, conformément aux prévisions. Si un tel objectif manque objectivement d'ambition, le fait que nous l'ayons tenu en 2025 est peut-être le signe que nous amorçons une certaine maîtrise de nos finances publiques.

Le déficit de l'État s'élèverait ainsi à 131 milliards d'euros en 2025, contre 156 milliards d'euros en 2024. Cette amélioration de 6,6 milliards d'euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2025 s'explique notamment par une diminution des dépenses du budget général et par une progression des recettes fiscales.

Plusieurs points du texte initial restent bien sûr à reprendre. C'est le cas des alinéas 6 et 7 de l'article 2, qui prévoient de réduire le plafond de la taxe pour frais de chambres de commerce et d'industrie (CCI) de 30 millions d'euros par rapport au montant inscrit dans la loi de finances initiale pour 2025.

Une telle diminution remet en cause la stabilisation du plafond des taxes affectées telle qu'elle a été négociée entre le Gouvernement et CCI France, en contrepartie d'un prélèvement progressif de 100 millions d'euros sur les fonds de roulement à réaliser entre 2024 et 2027.

De fait, je soutiens les amendements déposés par plusieurs collègues, dont l'excellent Emmanuel Capus et le rapporteur général Jean-François Husson,…

M. Emmanuel Capus. Très bien !

M. Marc Laménie. … pour maintenir le plafond des taxes affectées à 525,1 millions d'euros, conformément à ce qui a été voté dans la loi de finances pour 2025.

En outre, le présent texte augmente de 10,4 millions d'euros le montant du produit de la TVA affecté aux recettes du compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public » pour l'année 2025.

Il actualise également la répartition de la part fixe de l'accise sur les énergies accordée aux régions pour le financement de la création de places en instituts de formation en soins infirmiers.

Sur ce point, je partage les réserves du rapporteur général Husson sur le fait qu'un tel dispositif ne semble pas relever du domaine des lois de finances de fin de gestion. Il risque donc d'être censuré par le Conseil constitutionnel.

Par ailleurs, je soutiens l'amendement visant à revenir sur une part des annulations de crédits visant les 10 millions d'euros dédiés au déploiement de caméras de vidéoprotection par les collectivités territoriales.

L'objectif de cet amendement est de préserver ce budget nécessaire aux politiques de sécurité publique des collectivités territoriales.

En définitive, mes chers collègues, le projet de loi de finances de fin de gestion n'est pas un texte anodin, loin de là. Il nécessite un travail sérieux et de qualité.

Il permet de couvrir des dépenses clés intervenues en cours d'années, dont certaines sont essentielles pour le quotidien de nos concitoyens.

En responsabilité, le groupe Les Indépendants votera unanimement en faveur de ce texte. Il restera cependant vigilant, car il est essentiel que le sérieux budgétaire et des objectifs plus ambitieux en matière de réduction du déficit prédominent dans les prochains exercices. Il y va de l'avenir des générations futures et de notre souveraineté. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP et sur des travées du groupe UC. – M. Emmanuel Capus applaudit également.)

M. Emmanuel Capus. Excellent !

M. le président. La parole est à M. Jean-Baptiste Blanc. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Jean-Baptiste Blanc. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, aux termes du projet de loi de finances de fin de gestion que nous examinons aujourd'hui, le déficit public pour 2025 s'établirait à 5,4 % du PIB, conformément à la loi de finances initiale. Après deux exercices marqués par des dérives majeures, ce résultat constitue un premier signe de maîtrise qu'il convient de souligner.

Toutefois, le Haut Conseil des finances publiques le dit sans équivoque : l'effort structurel vient exclusivement des hausses de prélèvements obligatoires, à hauteur de 25 milliards d'euros. La dépense publique, elle, continue sa progression au même rythme que le PIB.

Le texte qui nous est présenté procède donc à des ajustements techniques : des mises à jour de crédits pour tenir compte des dernières informations macroéconomiques ; des besoins apparus en cours de gestion ; des dépenses obligatoires – charge de la dette, énergie, prestations sociales, etc.

Parmi ces ajustements techniques, le Gouvernement ouvre 119,5 millions d'euros supplémentaires pour l'hébergement d'urgence. Ces ajustements permanents révèlent surtout une politique mal maîtrisée, parfois chaotique, sur ce sujet, comme l'a souligné la Cour des comptes. Je le dénonce à chacune de mes interventions en tant que rapporteur spécial – et désormais ancien rapporteur spécial – de la mission « Cohésion des territoires », et je suis certain que Sophie Primas reprendra ce combat dans les prochaines semaines.

L'État entretient lui-même l'instabilité en refusant la contractualisation pluriannuelle avec les gestionnaires. Résultat : des régulations urgentes, désordonnées, qui compliquent la maîtrise des dépenses et alourdissent la charge des services déconcentrés. Et ce même si, comme je l'observe dans le projet de loi de finances pour 2026, une hausse de 110 millions d'euros, à objectifs constants, réduit de moitié l'écart de budgétisation. Il manque encore au moins 100 millions d'euros pour une budgétisation sincère. Cela signifie, madame la ministre, que nous devrons – je le crains – évoquer de nouveau ce sujet à l'occasion de l'examen du projet de loi de finances de fin de gestion pour 2026.

Puisque j'ai l'occasion de m'exprimer sur l'hébergement d'urgence, je souhaite exprimer à cette tribune une certaine incompréhension, voire un sentiment de colère. Alors que nous avions obtenu, en commission mixte paritaire (CMP), 20,6 millions d'euros pour créer 1 000 places pour les enfants et 1 000 places pour les femmes proches de la maternité, ces crédits ont été utilisés pour combler l'écart de budgétisation. C'est totalement inacceptable ! Certes, on connaît la maxime : les promesses n'engagent que ceux qui les croient, mais tout de même…

Vous avez dit tout à l'heure, madame la ministre, qu'il fallait bien finir l'année. En matière d'hébergement d'urgence, ce n'est malheureusement pas le cas !

Pour le reste, le présent projet de loi n'est pas un texte d'ambition, mais de stabilité. Dans la situation actuelle, c'est déjà une forme de responsabilité. Nous voulons tous qu'il y ait moins de hausses d'impôt, une baisse de la dépense, un effort structurel, etc.

Ayant épuisé mon temps de parole, je conclurai en disant que le principal, c'est d'envoyer un signal de stabilité. Car la stabilité, c'est déjà la responsabilité.

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Ah oui !

M. Jean-Baptiste Blanc. C'est la raison pour laquelle nous voterons ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Raymond Hugonet.

M. Jean-Raymond Hugonet. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, les occasions de constater une conformité à la prévision n'étant pas légion, disons-le tout de suite, ce projet de loi de finances de fin de gestion pour 2025 atteint son objectif. C'est assez rare pour être signalé !

En effet, après deux années de coupable dérive des comptes publics, avec un scénario macroéconomique proche de celui présenté dans la loi de finances initiales pour 2025 et un déficit public identique à la prévision initiale, c'est-à-dire égal à 5,4 % du PIB, la cible est atteinte.

Rendez-vous compte : pour la première fois depuis plus de dix ans, le PLFG annule plus de crédits qu'il n'en ouvre. Pour un peu on déboucherait le champagne… (Sourires au banc de la commission.)

Mais non ! Nous en resterons à l'eau pour aujourd'hui, en attendant le pain sec qui ne saurait tarder, car ce résultat n'autorise qui que ce soit à aucune gloriole lorsque l'on sait dans quelles conditions tout cela a été réalisé.

En effet, cet objectif peu exigeant est atteint grâce à une conjoncture relativement favorable et un recours aux bonnes vieilles ficelles : la régulation budgétaire – gels, surgels, et j'en passe !

Les ouvertures et les annulations de crédits répondent à des motivations diverses, sans sortir du cadre habituel des collectifs budgétaires de fin d'année.

Le PLFG pour 2025 confirme l'amélioration du solde, même si l'on est au regret de constater une dégradation supplémentaire des fameuses recettes de TVA, lesquelles donnent décidément bien du fil à retordre à notre administration fiscale. La situation est plus que préoccupante, puisque les recettes ont augmenté moins vite que la base taxable qui est, elle, en hausse de 1,7 %.

Il nous faut donc absolument comprendre les causes de cette situation et je sais, madame la ministre, que vous y serez particulièrement attentive.

Votre attention ne sera pas de trop, car des points d'inquiétudes demeurent.

Il s'agit, tout d'abord, du déséquilibre profond entre nos dépenses, qui sont très dynamiques dans la sphère sociale, et nos recettes, qui ne sont pas infiniment disponibles dans un pays où le taux de prélèvements obligatoires s'élève déjà à près de 44 % du PIB, et au total à 53 % pour le taux de recettes publiques.

L'effort structurel en 2025 provient presque intégralement des mesures nouvelles de hausses de prélèvements obligatoires, tandis que l'effort en dépense est nul. En effet, les mesures mises en œuvre pour le volet dépenses conduisent à contenir celles-ci, en volume, dans une augmentation à peu près en ligne avec la croissance potentielle.

Et pendant ce temps-là, alors que nous maintenons des niveaux de déficit très élevés, la dette publique, elle, continue de croître à un rythme plus que préoccupant, nous plaçant de facto dans une situation peu enviable. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)