Présidence de Mme Sylvie Vermeillet

vice-présidente

Mme la présidente. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à dix heures trente.)

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Mise au point au sujet de votes

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Fialaire.

M. Bernard Fialaire. Madame la présidente, lors du scrutin public n° 82 portant sur l'amendement n° II-549 rectifié, tous les membres du RDSE souhaitaient non pas s'abstenir, mais voter contre.

Mme la présidente. Acte est donné de cette mise au point, mon cher collègue. Elle figurera dans l'analyse politique du scrutin concerné.

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Discussion générale (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2026
Article 66

Loi de finances pour 2026

Suite de la discussion d'un projet de loi

Mme la présidente. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2026, considéré comme rejeté par l'Assemblée nationale (projet n° 138, rapport général n° 139, avis nos 140 à 145).

Nous poursuivons l'examen, au sein de la seconde partie du projet de loi de finances, des différentes missions.

Seconde partie (suite)

MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

Cohésion des territoires

Mme la présidente. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Cohésion des territoires » (et articles 66 et 67).

La parole est à Mme le rapporteur spécial.

Mme Sophie Primas, rapporteur spécial de la commission des finances. Madame la présidente, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, jamais, au cours des cinquante dernières années, notre pays n'a traversé une crise du logement aussi importante, qui ait tant frappé nos concitoyens, les comptes de la Nation et l'activité économique. La crise du logement touche l'ensemble de nos compatriotes.

Depuis 2017, une série de décisions politiques, prises indépendamment les unes des autres, a affecté durablement la politique de logement.

Évidemment, la décision de faire assumer par les bailleurs sociaux la baisse des aides personnelles au logement (APL) les prive, depuis 2018, de toute capacité d'investissement.

La fiscalité, du fait notamment de la mise en place de l'impôt sur la fortune immobilière (IFI), a détourné les petits investisseurs privés de l'immobilier. Quant à la suppression de la taxe d'habitation (TH) et à la baisse des moyens alloués aux collectivités, elles ont freiné les élus dans les projets de construction, tant la confiance dans les compensations de l'État est depuis longtemps entamée.

S'ajoute à cela la question très sensible, monsieur le ministre, de l'attribution des logements sociaux. Je combats pour rendre ce pouvoir d'attribution aux maires ; je sais que vous partagez ma position. (M. le ministre acquiesce.)

Bien sûr, les normes et la raréfaction organisée du foncier, donc son renchérissement, pèsent sur les comptes d'exploitation, rendant les opérations de plus en plus risquées.

Enfin, la crise récente qui a traversé tous les pays d'Europe a eu des effets délétères sur le coût de la construction et sur les taux d'intérêt : c'est la cerise sur le gâteau !

Par conséquent, il nous faut agir vite, en usant de tous les moyens dont nous disposons malgré le contexte budgétaire contraint.

Le premier volet sur lequel nous avons avancé est celui de la fiscalité. Je salue ainsi la création d'un statut du bailleur privé en première partie de ce projet de loi de finances. Néanmoins, certains paramètres doivent encore être travaillés en commission mixte paritaire pour que l'effet de relance du dispositif soit totalement opérant.

Le Sénat a exclu les logements locatifs de l'assiette de l'IFI : cela rendra de l'attractivité à l'investissement privé des épargnants, qui se sont détournés de la pierre.

En matière de logement social, nous avons accru de 200 millions d'euros la participation des bailleurs sociaux au fonds national des aides à la pierre (Fnap), particulièrement apprécié des collectivités territoriales.

Nous débattrons de la réduction de loyer de solidarité (RLS), que le Sénat, au-delà de ses clivages politiques, cherche à atténuer depuis 2018. Le plafonnement du dispositif à 1,1 milliard d'euros l'année précédente a redonné aux bailleurs sociaux des marges de manœuvre. Près de 100 000 logements pourraient avoir été agréés d'ici à la fin de l'année 2025 : une première depuis 2019 !

Aujourd'hui, il est nécessaire de réduire de nouveau l'ampleur du dispositif pour compenser la hausse de la participation des bailleurs au Fnap. Je vous inviterai, mes chers collègues, à voter l'amendement que la commission des finances a déposé en ce sens.

J'en viens au programme 177 « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables ». Il convient de saluer l'objectif affiché par le Gouvernement de maintenir en 2026 les 203 000 places existantes du parc d'hébergement social, alors que le dispositif national d'accueil (DNA), à destination des personnes en situation irrégulière, pourrait connaître une baisse de 1 400 places cette année.

La budgétisation initiale du programme 177, insincère depuis plusieurs années, est accrue de 110 millions d'euros à objectif constant. Toutefois, par rapport à l'anticipation de consommation prévue dans le projet de loi de finances de fin de gestion (PLFG), l'ouverture de crédits pour 2016 diminue de 14,6 millions d'euros. J'émettrai un avis favorable sur les amendements visant à combler cet écart, notamment au bénéfice des femmes et des enfants en grande précarité.

Les aides au logement, qui font l'objet du programme 109, représentent les trois quarts des crédits de la mission. Elles sont en baisse de 3,5 % dans ce projet de budget.

Cette réduction résulte du gel du barème des APL et de leur recentrage, pour les étudiants étrangers extracommunautaires, sur les seuls boursiers, comme le prévoit l'article 66. Dans le contexte budgétaire tendu, ce gel s'impose, même si je reconnais que la mesure n'est absolument pas idéale. Elle n'aura qu'une faible incidence sur les bénéficiaires cette année, mais elle ne doit en aucun cas être pérennisée.

Les crédits du programme 135 « Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat », qui constitue le cœur de la politique du logement conduite par le Gouvernement, apparaissent facialement en baisse, mais on ne sacrifie pas pour autant les moyens destinés à la rénovation énergétique des logements privés.

Ainsi, les crédits versés par l'État à l'Agence nationale de l'habitat (Anah) passeront de 2 milliards d'euros en 2025 à 1,6 milliard d'euros en 2026. Cette réduction mettra utilement à contribution la trésorerie de l'agence qui, je le rappelle, s'élevait à plus de 1 milliard d'euros en 2023. Toutefois, cette diminution des crédits budgétaires sera compensée intégralement par la captation par l'Anah d'une partie des certificats d'économies d'énergie (C2E).

Pour finir, je présenterai les crédits de la politique de la ville, inscrits dans le programme 147. Ils seront en hausse de 5,5 % en euros constants, pour atteindre 651,7 millions d'euros en 2026. Cet effort est le reflet de la participation de l'État au nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU) – il était temps ! –, qui s'élève à 116 millions d'euros cette année.

Pour autant, il reste du chemin à parcourir, car l'État est très en retard. Aussi l'article 67 repousse-t-il d'un an le délai maximum de contractualisation des opérations de renouvellement urbain ; je serai, évidemment, très favorable à cette mesure.

Concernant les autres enjeux de la politique de la ville, je salue le fait que tous les nouveaux contrats de ville sont désormais signés ou en passe de l'être, notamment en outre-mer. Ils permettront de déployer les moyens et les actions utiles : je pense notamment aux cités éducatives ou aux adultes-relais. Nous aurons évidemment des débats sur d'autres dispositifs encore.

Pour conclure, la reprise du secteur du logement est urgente et vitale pour nos concitoyens, pour l'économie et même pour nos finances publiques, mais elle ne se fera pas d'un coup de baguette magique : il faudra du temps, des moyens et de la volonté pour y parvenir.

Puisque nous parlons de volonté, je veux saluer, monsieur le ministre, celle de votre prédécesseure, Valérie Létard, que nous connaissons bien dans cette assemblée, mais aussi la vôtre, car je sais qu'elle est aussi forte.

Ce budget est la première pierre apportée à l'édifice, si j'ose dire. Je mesure que les crédits pour l'hébergement d'urgence, la rénovation énergétique et la politique de la ville pourraient être accrus : en outre, le gel du barème des APL ne saurait être durable. Il n'en faut pas moins tenir compte de nos contraintes budgétaires.

« Il n'est de défaites que celles que l'on accepte », nous enseignait Jean Monnet. Vous trouverez, monsieur le ministre, le Sénat à vos côtés dans cette bataille. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)

M. Vincent Jeanbrun, ministre de la ville et du logement. Merci !

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Bernard Delcros, rapporteur spécial de la commission des finances. Madame la présidente, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, il me revient de vous présenter la partie essentiellement rurale de la mission « Cohésion des territoires », qui relève de deux programmes : le programme 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire », qui comprend notamment les crédits du fonds national d'aménagement et de développement du territoire (FNADT), et le programme 162 « Interventions territoriales de l'État », qui regroupe sept actions territorialisées.

Je commencerai, madame la ministre, par un point positif. (Mme la ministre témoigne de sa satisfaction.) Je me réjouis que ce projet de budget conserve le FNADT, dont les crédits de paiement sont même en hausse de près de 10 %. Si j'évoque d'emblée ce sujet, c'est parce que, il y a quelques mois seulement, le FNADT était menacé de disparition. Je devrais plutôt parler de fusion, mais cela revient au même… (Mme la ministre sourit.)

C'est pourquoi j'ai voulu conduire une mission à ce sujet au nom de la commission des finances, au terme de laquelle j'ai présenté un rapport démontrant l'intérêt du FNADT, sa souplesse d'utilisation et son puissant effet levier sur les dynamiques territoriales. Je vous l'ai d'ailleurs transmis dès sa publication.

Le FNADT est un outil financier qui accompagne les collectivités, les acteurs privés et les associations dans leurs projets d'investissement, notamment dans le cadre du volet territorial des contrats de plan État-région (CPER).

Le fonds aide également au fonctionnement des collectivités via les maisons France services (MFS), l'ingénierie locale, les programmes Petites Villes de demain et Villages d'avenir, ou encore les actions culturelles dans les établissements scolaires. C'est bien ce qui fait sa particularité.

Je tenais à rappeler ces éléments, pour éviter toute tentative de supprimer ces dispositifs une autre année. (Mme la ministre sourit.)

Pour 2026, les crédits inscrits aux programmes 112 et 162 s'élèvent à 362 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et à 348 millions d'euros en crédits de paiement (CP). Ces montants sont en légère hausse par rapport à la loi de finances pour 2025.

Cette année, le programme 112 a largement été mis à contribution pour les efforts d'économies. Une nouvelle baisse en 2026 aurait tout simplement mis fin, dans les territoires, à de nombreuses actions très concrètes et appréciées des élus.

À ces crédits s'ajoutent près de 800 millions d'euros de dépenses fiscales adossées à des zonages. Je pense en particulier au zonage France Ruralités Revitalisation (FRR), successeur des zones de revitalisation rurale (ZRR), dont nous avons largement débattu les années précédentes.

Les crédits inscrits au programme 112 permettent de poursuivre la quasi-totalité des actions du plan France Ruralités : le programme Petites Villes de demain, qui profite à 1 646 communes, le programme Villages d'avenir, qui accompagne 2 965 communes rurales, et le programme Territoires d'industrie, qui a permis de labelliser 127 sites. N'oublions pas la politique de la montagne et le programme Action cœur de ville, dont la seconde génération vient d'être annoncée par le Premier ministre.

Enfin, je veux redire ici tout le succès des maisons et espaces France Services. On prévoyait d'atteindre 1 million d'accompagnements par mois en 2026 ; cet objectif a été rempli dès 2025. Nous pouvons nous féliciter de ce dispositif, dans une société de plus en plus numérisée et dématérialisée, car il a permis de replacer l'humain au cœur des relations entre les citoyens et les administrations. Ce sont aussi des services de proximité, puisque maisons et espaces sont répartis sur l'ensemble du territoire national.

Rappelons que, même s'il s'agit d'un programme d'État, les deux tiers des lieux France Services sont à la charge des collectivités. C'est pourquoi je plaide depuis longtemps pour qu'on offre à celles-ci, pour chacun de ces lieux – maisons, espaces et bus –, une dotation socle de 50 000 euros, à laquelle s'ajouteraient 10 000 euros pour les communes classées en zone FRR.

L'objectif que nous avons fixé sera atteint, madame la ministre. En 2026, grâce à l'effort des onze opérateurs concernés, nous porterons déjà la dotation socle à 47 500 euros, de sorte qu'elle atteigne 50 000 euros dès 2027, comme prévu.

Les crédits inscrits dans ce projet de budget permettent en outre de financer les 61 nouveaux lieux France Services, qui ont été labellisés tout récemment, à l'occasion du salon des maires et des collectivités locales.

J'attire votre attention, madame la ministre, sur le fait que la mutualisation n'est pas un inconvénient : elle est un avantage, notamment en zone rurale. À cet égard, il faut absolument veiller à ne pas pénaliser ces lieux, qui accomplissent énormément de ce point de vue. Je songe à des exemples extraordinaires, où dans le même bâtiment, les habitants peuvent trouver à la fois un guichet France Services, une agence postale communale, un secrétariat de mairie et, parfois, une antenne de l'office de tourisme !

Je ne saurais davantage insister : il faut favoriser ce type d'organisation, d'autant que nous avons été alertés, lors du renouvellement des labels, sur des cas moins satisfaisants de mutualisation.

Pour conclure sur ce sujet, je veux, depuis la tribune de la chambre des territoires, adresser un grand bravo à tous les conseillers France Services, dont la qualité d'accueil est la clé de la réussite de ces lieux.

Mme Sophie Primas, rapporteur spécial. Absolument !

M. Bernard Delcros, rapporteur spécial. Ils accueillent les usagers avec beaucoup de bienveillance et le souci permanent d'exécuter leur mission de service public au profit des habitants de tous nos territoires.

Je suis moins satisfait, madame la ministre, de relever qu'aucun crédit n'est ouvert en faveur des tiers-lieux, à l'exception du soutien à l'animation du réseau. Il s'agit pourtant de lieux de vie qui favorisent le lien social et le partage de compétences. Les tiers-lieux jouent ainsi un rôle non négligeable dans la vitalité des territoires et dans la cohésion sociale, dont notre pays a tant besoin. Nous ferons tout notre possible pour sauver le programme Nouveaux Lieux, nouveaux liens. La commission émettra donc un avis favorable sur plusieurs amendements tendant à abonder cette ligne budgétaire.

Concernant le FNADT contractualisé, les crédits inscrits permettent de poursuivre les politiques contractuelles, y compris les CPER, puisque nous avons réglé la question des crédits manquants dans le projet de loi de finances de fin de gestion. Reste à traiter le sujet des conventions interrégionales de massif (Cimac) ; nous en reparlerons tout à l'heure, lors de la discussion des amendements.

Enfin, concernant l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), principal opérateur de l'État rattaché à cette mission budgétaire, je note que sa subvention pour charges de service public (SCSP) s'élève à 66 millions d'euros.

Nous savons que plusieurs agences sont dans le viseur du Gouvernement, qui agite la menace de leur suppression. S'il suffisait de fusionner les agences pour faire des économies, cela se saurait ! Nous avons vu les limites de cette logique lors de la mise en place des grandes intercommunalités et des grandes régions.

Disons-le clairement : sur le terrain, les programmes conduits et animés par l'ANCT sont utiles et appréciés des élus. (Marques d'impatience sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. Veuillez conclure, monsieur le rapporteur spécial !

M. Bernard Delcros, rapporteur spécial. Vous l'aurez compris, nous serons bien attentifs à l'avenir de ces programmes.

Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure pour avis.

Mme Amel Gacquerre, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques. Madame la présidente, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, en tant que rapporteure pour avis des crédits relatifs au logement, je me suis fixé un cap clair : lutter contre la crise du logement en toute responsabilité, en veillant à la maîtrise des dépenses publiques.

Je relève d'abord que les aides personnelles au logement sont en baisse de 590 millions d'euros, en raison de trois mesures d'économie.

La commission des affaires économiques a validé deux d'entre elles : le gel des APL et leur recentrage sur les étudiants extracommunautaires boursiers.

En revanche, nous déplorons le recul que représente la hausse de la RLS par rapport à l'an dernier. Cela réduirait significativement les capacités d'investissement des bailleurs sociaux et, partant, la production de nouveaux logements, alors que nous connaissons une pénurie de logements sans précédent.

Je salue donc l'adoption, en première partie de ce PLF, d'amendements visant à abonder le Fnap. Cela témoigne d'un constat largement partagé au sein de notre hémicycle et devrait inciter le Gouvernement à acter la baisse de la RLS.

Concernant la rénovation énergétique, la commission estime que le recours accru aux C2E est une réponse pragmatique à la contrainte budgétaire. Il permettra à l'Anah de poursuivre son action, malgré une dotation réduite.

Néanmoins, j'appelle votre attention sur les conséquences de cette débudgétisation : elle limite le contrôle parlementaire des crédits et fait peser le financement non plus sur les contribuables, mais sur tous les ménages de manière égale, ce qui va à l'encontre de la redistribution.

Plus largement, les épisodes récents et les changements de cap incessants en matière de politique de rénovation énergétique témoignent d'un manque de stratégie claire du Gouvernement. Pour mettre en cohérence les travaux et rendre chaque euro dépensé plus efficace, je plaide, monsieur le ministre, pour l'élaboration d'un parcours de rénovation par geste.

Enfin, nous saluons l'augmentation de 110 millions d'euros des crédits alloués à l'hébergement et au logement adapté, parmi lesquels 29 millions d'euros seront consacrés à la montée en puissance du deuxième plan quinquennal Logement d'abord. Pour le moment, les résultats de ce plan sont encourageants.

Cependant, en matière d'hébergement d'urgence, l'enveloppe supplémentaire prévue de 81 millions d'euros ne sera malheureusement pas suffisante pour assurer la sincérité budgétaire, car les besoins sont systématiquement sous-estimés en loi de finances initiale.

Cette pratique met sous pression les opérateurs, les travailleurs sociaux et les administrations, tandis que la détresse des personnes à la rue reste dramatique.

C'est pourquoi je défendrai, au nom de la commission des affaires économiques, un amendement visant à corriger cette sous-budgétisation. Si l'on ne fait pas cela en priorité, tout débat sur l'augmentation du parc sera vain.

Au total, les crédits consacrés au logement traduisent un effort d'économie de plus de 4 % par rapport à 2025. Aussi, sous réserve de l'adoption de l'amendement relatif à l'hébergement d'urgence, la commission des affaires économiques se montrera favorable au vote des crédits de la mission « Cohésion des territoires ». (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – Mme Maryse Carrère applaudit également.)

Mme Viviane Artigalas, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques. Madame la présidente, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, alors que la politique de la ville fait régulièrement les frais de coupes budgétaires, le programme 147 est doté cette année d'une enveloppe de 651 millions d'euros, en hausse de 42 millions d'euros par rapport à la loi de finances pour 2025.

Cette progression tient exclusivement à l'augmentation de 66 millions d'euros du financement par l'État du nouveau programme national de rénovation urbaine (NPNRU).

Cette hausse n'était pas seulement attendue, elle était devenue impérative après l'annulation des crédits en cours de gestion en 2024 et le faible montant versé en 2025. Pour rappel, seuls 50 millions d'euros avaient finalement été inscrits à la suite de notre mobilisation face au silence du texte initial.

Cependant, nous ne pouvons pas nous contenter de ces 66 millions d'euros supplémentaires et mettre sous le tapis le retard accumulé par l'État dans le financement du NPNRU.

À mi-parcours du programme, l'État n'a tenu, je le rappelle, que 13 % de ses engagements financiers. Il faudra verser au moins 250 millions d'euros l'an prochain et augmenter drastiquement les crédits sur les dernières années du programme si nous ne voulons pas mettre en péril le rythme des opérations et, par conséquent, les conditions de vie des habitants concernés.

Par ailleurs, si le report d'un an de la date limite des engagements de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru) est bienvenu, il ne constitue pas une solution pérenne. Cela ne dispensera pas le Gouvernement de travailler, dès 2026, à un troisième programme de renouvellement urbain.

La commission des affaires économiques salue également la sanctuarisation des crédits alloués au dispositif adultes-relais, au programme de réussite éducative (PRE) et aux cités éducatives, qui ont montré toute leur utilité sociale.

En revanche, elle déplore que le dispositif Quartiers d'été paie le prix des choix budgétaires. Il voit ses crédits divisés par six, à l'heure où les « colos apprenantes » sont, elles aussi, supprimées.

Nous comprenons cependant que, dans une optique de redressement des finances publiques, les restrictions soient ciblées sur un seul dispositif, afin d'épargner les autres actions de la politique de la ville, trop souvent malmenées ces dernières années par des à-coups budgétaires.

Malgré mes réserves personnelles sur le volet logement, la commission des affaires économiques a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Cohésion des territoires ».

Elle tient néanmoins à rappeler, monsieur le ministre, que ce sursaut budgétaire doit être non pas un coup de pouce exceptionnel en faveur des habitants des quartiers, mais la première étape vers une réelle prise en main par l'État de la rénovation urbaine et de la politique de la ville. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme la présidente. La parole est à Mme le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

Mme Nadia Sollogoub, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales. Madame la présidente, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, le programme 177 « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables » représente le dernier filet de sécurité de la République, celui qui tente de réparer l'humain lorsque toutes les autres politiques ont échoué, celui qui redonne confiance, garantit la sécurité et, surtout, offre un toit.

Depuis 2018, les deux plans Logement d'abord ont eu des effets qu'il convient de saluer : un parc annualisé qui compte aujourd'hui 203 000 places, le relogement de 195 000 ménages et un renforcement de l'accompagnement social.

Mais aujourd'hui, du fait de l'échec de nos politiques sociales et de logement, ce programme connaît une crise profonde. En dépit de sa taille, le parc d'hébergement est saturé, si bien que près de 2 200 enfants dorment chaque soir dans la rue.

Le sans-domicilisme a des conséquences catastrophiques, en particulier pour les plus jeunes, dont la plupart présentent un retard de développement cognitif. C'est une bombe à retardement social dont nous ne pouvons plus tarder à prendre conscience.

Le projet de loi de finances pour 2026 prévoit d'augmenter de 110 millions d'euros les crédits du programme 177. Force est de constater que l'État ne fait pas d'économies sur le sans-domicilisme.

Cependant, cette hausse, concentrée sur le logement adapté, ne corrige nullement la sous-budgétisation de l'hébergement d'urgence, pourtant largement documentée par la Cour des comptes, l'inspection générale des finances (IGF), l'inspection générale des affaires sociales (Igas) et l'inspection générale de l'administration (IGA).

Disons-le clairement, le Gouvernement fait preuve en la matière d'insincérité budgétaire, laquelle se chiffre à 120 millions d'euros en 2026. En plus d'être insincère, cette sous-budgétisation a de lourdes conséquences. Elle engendre des coûts de gestion pour les administrations et des frais de trésorerie pour les associations – ce sont des dépenses bien inutiles.

Dans un contexte politique particulièrement instable, les associations nous envoient un message clair : elles ne peuvent plus se permettre d'avancer leur trésorerie en espérant être compensées par un hypothétique abondement de crédits via une loi de finances de fin de gestion.

C'est donc maintenant, mes chers collègues, qu'il nous faut sortir de cette sous-budgétisation toxique, d'autant que cela est possible.

Le secteur de l'hébergement d'urgence est, lui aussi, en voie de financiarisation. Permettre d'optimiser l'achat des nuitées et redonner des marges de négociations et du poids aux associations, face aux groupes qui investissent dans les hôtels sociaux, c'est choisir de faire plus et mieux à budget constant. Encore faut-il que le budget soit certain, dès le début de l'exercice, et qu'il ne soit pas consolidé a posteriori.

C'est pourquoi, tout en étant favorable à l'adoption du programme 177, la commission des affaires sociales a déposé un amendement visant à corriger la sous-budgétisation via l'instauration d'un plancher de 85 millions d'euros, en deçà duquel les associations ne passeront pas l'année 2026.

Je vous remercie donc tous par avance de votre soutien sur un sujet sensible, qui ne peut laisser aucun de nous indifférent. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Louis-Jean de Nicolaÿ, rapporteur pour avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable. Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Cohésion des territoires ».

Il ne s'agit pas pour autant d'un blanc-seing, car la commission estime que notre assemblée devra être vigilante, à l'avenir, vis-à-vis de certaines évolutions.

Deux points de vigilance ont été identifiés à l'issue des travaux de la commission. Ils sont tous deux liés au soutien en ingénierie, qui est devenu, depuis 2020, le principal mode d'intervention de l'État en matière d'aménagement du territoire.

Nous sommes à la fin d'un cycle, avec l'imminence du terme annoncé des programmes Action cœur de ville, Petites Villes de demain, Villages d'avenir et Territoires d'industrie. La concomitance de ces échéances rend d'autant plus nécessaire la réflexion sur l'après-2026.

Cependant, le présent PLF ne tranche pas cette question et ne permet pas d'appréhender les grandes tendances de ce que pourrait être l'héritage de ces programmes. Pour les programmes Petites Villes de demain et Villages d'avenir, les crédits sont reconduits à l'identique : respectivement 11 millions et 8 millions d'euros financent les postes de chefs de projet.

Pour le programme Petites Villes de demain, on peut parler d'une prolongation de crédits, car le dispositif devait prendre fin cette année.

Quant aux autres programmes, certains sont si fortement mis à contribution que se pose la question de la pertinence de leur maintien, au vu du caractère désormais symbolique de leur enveloppe.

Si le PLF 2026 ne tranche rien, le prochain PLF ne pourra faire l'économie d'une réflexion stratégique sur ce que seront les outils et leviers à mobiliser pour le cycle à venir en matière de cohésion des territoires.

Au regard du contexte budgétaire, la commission formule le souhait suivant : concernant le programme Petites Villes de demain, il serait pertinent de capitaliser sur les réussites des précédents outils, comme Nicole Bonnefoy et moi-même le proposons, et d'appuyer l'essaimage des acquis du programme à une échelle plus vaste, comme celle du dispositif Territoires de demain.

J'en viens brièvement à mon second point. L'ANCT a consacré, en 2024, plus de 18 millions d'euros au recours à des prestations privées externalisées en matière d'ingénierie territoriale. Cette somme correspond environ au quart du montant de sa subvention pour charges de service public.

Il nous paraît indispensable de nous interroger sur ce soutien public apporté à de grands cabinets de conseil privés. Peut-être conviendrait-il d'affecter une part de ce montant au soutien direct à l'ingénierie territoriale des collectivités, par la création d'une enveloppe entièrement décentralisée.

Tels sont, mes chers collègues, les éléments que je souhaitais porter à votre connaissance sur ce projet de budget pour 2026. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Rappel au règlement