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Question de Mme Valérie Boyer (Bouches-du-Rhône - Les Républicains) publiée le 28/03/2024

Mme Valérie Boyer attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer sur la multiplication des violences sexuelles contre nos aînés. Au premier jour de l'année 2024, un individu est entré sans effraction par une fenêtre d'une maison d'Ozoir-la-Ferrière (77) et a violé son habitante, une septuagénaire. Le mari de la victime, en situation de handicap, était présent mais incapable d'intervenir.
Le suspect qui serait originaire de la République démocratique du Congo, qui avait été interpellé, a été depuis placé en centre de rétention administrative (CRA) en l'absence d'éléments pour établir avec certitude qu'il a commis les faits. Ce dernier serait toutefois en séjour irrégulier sur le territoire français.
Le 3 mai 2023 une femme de 83 ans, handicapée physique et mentale, est victime de viol à son domicile de La Courneuve (93). Ses agresseurs seraient deux Algériens, en situation irrégulière, dont l'un déjà sous obligation de quitter le territoire (OQTF).
Quimper, Clichy-la-Garenne, Toulouse, Alès, Lorient, au Creusot, Nanterre et tant d'autres communes... depuis plusieurs mois les violences sexuelles contre nos aînés semblent se multiplier dans notre pays.
Comme l'a expliqué dans les médias, notamment Atlantico, le directeur de l'institut français de la psychanalyse active (IFPA) : « Depuis 10 ans, des études soulèvent plus de 100 agressions impliquant du personnel hospitalier mais aussi des jeunes qui n'hésitent pas à gravir les murs d'Ehpad et violer des personnes vulnérables. Une enquête fait état d'agressions survenues dans des maisons de retraite situées dans l'Ain, les Yvelines, les Bouches-du-Rhône, le Tarn, la Creuse, l'Hérault, les Deux-Sèvres, en Martinique, en Isère, en Loire-Atlantique. Des faits ont été jugés, d'autres vont l'être prochainement. »
Comme l'a expliqué un criminologue dans ce même journal, même si ces actes ne sont pas nouveaux, leur multiplication est nouvelle : « Nous en sommes à plusieurs de ces viols/agressions par mois ; la plupart commis par des individus bien sûr égarés par leur frustration sexuelle et aussi, issus de pays dans lesquels, selon des cultures tribales-ancestrales, ou religieuses, la femme doit se plier au désir des hommes. »
Malheureusement de nombreux criminologues regrettent l'absence de données précises. En effet, selon les services de police, l'index du registre (État 4001) ne suffit pas à répondre aux besoins d'information statistique sur la délinquance. La nomen­clature des index, très ancienne (qui remonte à 1972), ne permet pas d'identifier certaines catégories de délinquance apparues récemment, ou que l'on souhaite davantage appréhender aujourd'hui : la cybercriminalité, les violences conjugales, les atteintes du type crimes de haine (racistes, xénophobes, antireligieux, homophobes, sexistes...). Ces crimes et délits se retrouvent répartis dans divers index (escroqueries, coups et blessures volontaires, menaces ou chantage...) mais ne peuvent être isolés pour être quantifiés séparément.
Pour toutes ces raisons, elle souhaiterait obtenir davantage d'informations sur ces violences sexuelles contre nos aînés et sur les agresseurs sous forme d'une cartographie détaillée. Il semblerait qu'il faille également étoffer cette cartographie en y ajoutant le profil des agresseurs (âge, nationalité, motifs, antécédents judiciaires et psychologiques) et des victimes (âge, nationalité, relations avec l'agresseur) afin de pouvoir établir un plan d'actions pour garantir la sécurité des Français.
La représentation nationale doit connaître précisément quelle est la cartographie de cette violence sexuelle pour en tirer les enseignements. Enfin, elle aimerait pouvoir comparer ces crimes avec les années précédentes afin d'établir s'il y a bel et bien une multiplication de ces drames en France, et dans quelles proportions.

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Réponse du Ministère auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des collectivités territoriales et de la ruralité publiée le 05/06/2024

Réponse apportée en séance publique le 04/06/2024

M. le président. La parole est à Mme Valérie Boyer, auteure de la question n° 1190, adressée à M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Mme Valérie Boyer. Madame la ministre, en mai dernier, deux hommes se sont introduits chez une femme de 83 ans handicapée, à La Courneuve, pour la violer.

Le 16 mars, un mineur de 14 ans a été placé en garde à vue à Villeneuve-sur-Lot. Il aurait violé une femme âgée de 70 ans.

Le 5 février, une femme de 80 ans, habitant à La Madeleine, dans le Nord, a déposé plainte pour des faits de viols, de violences et des humiliations qui se sont produits à son domicile.

Au premier jour de l'année 2024, un individu est entré dans une maison d'Ozoir-la-Ferrière, en Seine-et-Marne, et a violé une septuagénaire.

Le 14 octobre 2023, à Argenteuil, une femme de 93 ans meurt après avoir été violée dans sa chambre d'hôpital par un récidiviste.

Madame la ministre, je pourrais malheureusement évoquer d'autres cas tragiques similaires rapportés par la presse quotidienne régionale.

Selon votre gouvernement, le nombre moyen de femmes âgées de 18 ans à 74 ans victimes, chaque année, de viols, de tentatives de viol ou d'agressions sexuelles s'élève à 217 000 ; les chiffres relatifs à la tranche d'âge des seniors ne sont malheureusement pas connus, alors même que la recrudescence de tels faits semble attester d'une augmentation de ces drames.

Le criminologue Xavier Raufer indique que l'on dénombrait jusqu'alors quelques affaires par an, dont les coupables étaient des pervers au sens psychiatrique du terme, ainsi que de rares ivrognes. Désormais, nous en sommes à plusieurs viols ou agressions par mois.

S'agit-il de faits divers ou d'un véritable fait de société ? Ma question est simple, madame la ministre : quelle est la réalité de ces chiffres ? Êtes-vous en mesure de présenter à la représentation nationale une cartographie détaillée de ces drames, précisant les profils des victimes et ceux des criminels ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Madame la sénatrice Boyer, la loi du 8 avril 2024 portant mesures pour bâtir la société du bien vieillir et de l'autonomie témoigne de l'attention que le Parlement et le Gouvernement portent aux personnes âgées. Cette loi comporte d'ailleurs un volet sur la prévention et la lutte contre les maltraitances dont peuvent être victimes ces personnes.

Les faits que vous avez cités sont particulièrement ignobles et révoltants. Je tiens toutefois à vous rassurer : le ministère de l'intérieur et des outre-mer dispose depuis maintenant plusieurs années d'un service statistique hautement performant, conforme aux plus hauts standards de la statistique publique. Ce service statistique ministériel de la sécurité intérieure (SSMSI) est d'ailleurs dirigé par une inspectrice générale de l'Insee. Je ne puis que vous recommander la richesse et la variété de sa production statistique, de ses bilans, études et analyses. Son site internet, Interstats, répondra à toutes vos interrogations.

Vous y trouverez, par exemple, une étude récente sur les violences sexuelles hors cadre familial enregistrées en 2023, ou bien ces études régulières sur les violences conjugales ou intrafamiliales, qui comportent bien sûr des données par sexe et par âge.

Les bilans annuels sur la délinquance enregistrée par les forces de l'ordre comportent également de nombreuses données chiffrées sur les violences sexuelles, par âge et par sexe.

La transparence est totale sur ces chiffres et ils sont entièrement accessibles sur cette plateforme. Depuis 2016, le SSMSI dispose en effet d'outils qui lui permettent d'isoler toutes les infractions ; ses bases de données fournissent par ailleurs des éléments sur les liens entre la victime et l'auteur, sur leur nationalité et sur leur âge.

Tous les outils nécessaires existent donc bien pour mesurer les différentes formes de délinquance que vous citez, et que nous déplorons.

M. le président. La parole est à Mme Valérie Boyer, pour la réplique.

Mme Valérie Boyer. Madame la ministre, je vous plains de devoir vous contenter de lire les fiches qui vous ont été préparées par vos collègues !

Je me suis rendue sur le site que vous évoquez pour constater que les informations que je sollicite n'y figurent pas. J'avais d'ailleurs posé une question similaire sur les attaques à l'arme blanche.

Aujourd'hui, mon interrogation porte précisément sur le profil des auteurs et sur celui des victimes. De quoi s'agit-il exactement ? Si nous nous abstenons de nommer les choses, si nous renonçons à les étudier, nous nous privons des moyens de lutter contre ces dérives abominables.

Deux hypothèses s'offrent à nous : soit nous exagérons un phénomène rapporté par la presse quotidienne régionale, auquel cas il vous appartient d'en administrer la preuve ; soit nous sommes confrontés à un véritable fait de société, et il est alors de votre devoir de nous fournir des informations précises. Tel n'est pas le cas aujourd'hui.

Je ne peux que déplorer que, dans votre réponse, vous vous borniez à citer un site ministériel que j'ai déjà consulté, sans pour autant apporter de réponse précise sur ces agressions visant des femmes très âgées.

S'agit-il d'un phénomène de société ? Quel peut en être le sens ? La grande vulnérabilité de ces personnes explique-t-elle qu'elles soient ainsi violentées ? Quel est le profil des auteurs de ces faits ?

M. le président. Il faut conclure, ma chère collègue.

Mme Valérie Boyer. Madame la ministre, il faut être précis, car il s'agit d'une question terrible. Chacun de ces faits constitue un drame !

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