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Question de Mme Laurence Garnier (Loire-Atlantique - Les Républicains) publiée le 14/03/2024

Mme Laurence Garnier attire l'attention de Mme la ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse sur les difficultés des municipalités concernant la délivrance d'autorisation d'instruction en famille (IEF).
En séance publique au Sénat, le Gouvernement a été interrogé en novembre 2023 sur les conditions dans lesquelles les maires exercent les missions confiées par la loi n° 2021-1109 du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République et notamment le régime de déclaration de l'instruction en famille qui a été remplacé par un régime d'autorisation préalable, délivrée par l'autorité de l'État compétente en matière d'éducation : l'enquête du maire, prévue à l'article L131-10 du code de l'éducation, et le contrôle pédagogique par les services de l'éducation nationale.
Dans sa réponse publiée au Journal officiel du Sénat le 21 décembre 2023, le Gouvernement précise que lorsque le directeur académique des services de l'éducation nationale délivre une autorisation d'instruction dans la famille, le maire de la commune de résidence de l'enfant doit, d'une part, vérifier la réalité des motifs avancés par les personnes responsables de l'enfant pour obtenir l'autorisation et, d'autre part, contrôler s'il est donné à l'enfant une instruction compatible avec son état de santé et les conditions de vie de la famille.
Toutefois, pour mettre concrètement en oeuvre cette disposition sur le terrain, au sein des communes, auprès de leurs administrés, les maires rencontrent une réelle difficulté à appliquer cette évolution législative de l'encadrement de l'enseignement à domicile qui résonne comme une tentative de se décharger sur les élus locaux dont la vocation n'est effectivement pas de s'immiscer dans la vie des familles et d'en contrôler des aspects très personnels. Aujourd'hui, les maires reçoivent de la direction des services départementaux de l'éducation nationale, sans aucune autre forme d'information, une simple note dans laquelle il est écrit : « cette enquête mairie (...) a également pour objectif de vérifier que l'instruction est compatible avec l'état de santé de l'enfant et les conditions de vie de la famille ». Les élus locaux n'ont pas la compétence d'apprécier les données médico-sociales dont ils pourraient avoir connaissance. Aussi, elle lui demande si un ou une assistante sociale de l'éducation nationale peut être attachée à cette fonction.

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Réponse du Ministère auprès de la ministre du travail, de la santé et des solidarités, chargé de la santé et de la prévention publiée le 08/05/2024

Réponse apportée en séance publique le 07/05/2024

Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Garnier, auteure de la question n° 1151, adressée à Mme la ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.

Mme Laurence Garnier. Monsieur le ministre, la loi confortant le respect des principes de la République a modifié les modalités d'encadrement et de contrôle de l'instruction en famille.

Nous sommes notamment passés d'un régime de simple déclaration à un système d'autorisation préalable pour les familles qui souhaitent faire l'école à la maison.

Les maires de nos communes sont en première ligne face à ces évolutions. Ce sont eux qui reçoivent de la part des services départementaux de l'éducation nationale un courrier les priant de réaliser une enquête de la mairie. Il leur est notamment demandé de s'assurer que l'instruction délivrée à l'enfant est compatible avec son état de santé.

Je suis heureuse que ce soit le ministre de la santé qui me réponde ce matin, car les maires et les élus locaux n'ont aucune compétence pour évaluer l'état de santé des enfants !

En Loire-Atlantique, les maires qui m'ont interpellée sur ce sujet sont respectivement cadre bancaire, agriculteur et retraité de la fonction publique territoriale. Aucun d'entre eux n'estime être à même de juger de l'état de santé de ces enfants.

Cette situation n'est bonne ni pour les enfants concernés ni pour les maires et les élus locaux, auxquels on ne peut pas faire assumer toutes les exigences de suivi de l'État en matière d'encadrement de l'instruction en famille.

Aussi, comment entendez-vous mobiliser les services de l'éducation nationale et ceux de votre ministère de la santé, pour assurer le suivi de ces enfants ?

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Frédéric Valletoux, ministre délégué auprès de la ministre du travail, de la santé et des solidarités, chargé de la santé et de la prévention. Madame la sénatrice Laurence Garnier, depuis 2022, il ne peut plus être dérogé à l'obligation de scolarisation que sur autorisation préalable d'instruction dans la famille, délivrée par les services académiques pour des motifs tirés de la situation de l'enfant et limitativement définis par la loi.

Le directeur académique des services de l'éducation nationale (Dasen) qui a rendu l'autorisation en informe le maire de la commune de résidence de l'enfant. Le maire, agent de l'État, a le soin de mener une enquête visant les enfants résidant sur les territoires de la commune qui reçoivent l'instruction en famille.

Cette enquête doit être réalisée dès la première année, puis tous les deux ans. Son résultat est communiqué aux Dasen et aux personnes responsables de l'enfant.

La loi du 24 août 2021 a modifié l'objet de l'enquête du maire.

Ainsi, depuis la rentrée scolaire 2022, il s'agit pour le maire de vérifier non pas l'état de santé des enfants, mais la réalité des motifs qui ont été avancés par les personnes responsables de l'enfant. L'édile est également chargé de contrôler si l'instruction donnée à l'enfant est compatible avec son état de santé et les conditions de vie de la famille.

Enfin, il est demandé au maire d'obtenir une attestation de suivi médical, qui est un document établi par un professionnel de santé - et non par lui-même - attestant que l'enfant fait l'objet d'un suivi individuel de son état de santé. Cette enquête vise à s'assurer de la réalité du motif pour lequel l'enfant a reçu une autorisation d'instruction dans la famille.

Vous aviez proposé que soit confiée à une assistante sociale de l'éducation nationale, plutôt qu'au maire, la charge de réaliser cette enquête. Toutefois, la loi ne prévoit pas que les services académiques puissent se substituer aux services municipaux pour effectuer l'enquête. Ce rôle de substitution a été dévolu au préfet de département.

L'enquête du maire complète le contrôle pédagogique mis en oeuvre par les autorités académiques, qui porte sur la qualité de l'instruction et la vérification de l'acquisition progressive par l'enfant des compétences et des connaissances du socle commun.

Le Gouvernement entend préserver cette dualité de contrôle de l'instruction dans la famille. Afin d'accompagner les maires, le guide interministériel relatif au rôle des acteurs locaux dans le cadre de l'instruction dans la famille est en cours d'actualisation par le Gouvernement.

Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Garnier, pour la réplique.

Mme Laurence Garnier. Monsieur le ministre, je vous remercie de ces précisions.

Dans un contexte de réduction croissante de l'offre médicale sur notre territoire, soyons attentifs à ne pas faire porter cette responsabilité aux maires, qui ne sont pas compétents en la matière.

Demain, d'autres enjeux les attendront, comme le maintien à domicile. Or, monsieur le ministre, ils ne pourront faire face à tout.

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