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Question de M. Stéphane Demilly (Somme - UC) publiée le 14/03/2024

M. Stéphane Demilly attire l'attention de M. le ministre des armées sur l'avenir de l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord (OTAN).
Le 10 février 2024, lors d'un meeting électoral, Donald Trump a relaté une discussion qu'il aurait eue avec le dirigeant d'un État membre de l'Alliance atlantique: « Si l'on est attaqués par la Russie, est-ce que vous nous protégerez ? ». Réponse nette du candidat à la présidentielle américaine : « Non, je ne vous protégerai pas. En fait, je les encouragerai à faire ce qu'ils veulent. Vous devez payer vos factures ». L'ancien président des États-Unis a clairement fait comprendre qu'il pourrait ne pas protéger un allié en cas d'attaque russe. Cette probabilité d'un recul du soutien américain dans les années à venir « sape la sécurité de tous », de l'avis du secrétaire général de l'OTAN, Jens Stoltenberg. Ces paroles ne constituent pas une surprise, de la part d'un homme déjà convaincu dans les années 2000 que « les conflits en Europe de l'Est ne valent pas des vies américaines » (tiré de son livre « The America We Deserve »). Le sujet était au coeur des débats de la 60ème conférence de Munich sur la sécurité, qui s'est tenue du 16 au 18 février 2024.
A l'image des dirigeants français et allemands, les leaders européens réunis ont durci le ton face à Moscou, insistant non seulement sur la nécessité d'aider davantage l'Ukraine, mais aussi d'augmenter leurs propres capacités de défense, car le recul du soutien américain face à la menace russe serait dramatique. En 2023, le budget de la défense américaine représentait 67 % de l'ensemble des dépenses militaires de l'OTAN. L'Organisation dépend des États-Unis pour l'obtention de certaines capacités essentielles, notamment en matière de renseignement ou de défense antimissile. La défense américaine est absolument cruciale pour l'Europe en matière de dissuasion.
Un sentiment d'urgence se confirme au fur et à mesure des actualités : la mort tragique d'Alexeï Navalny, le retrait des forces ukrainiennes de la petite ville d'Avdiïvka face à l'envahisseur russe, à la veille du deuxième anniversaire de l'invasion, les appels au secours des dirigeants ukrainiens sur la pénurie de munitions...
Ainsi, il lui demande quelles mesures vont être prises pour bâtir une défense européenne forte, capable de répondre seule aux menaces ?

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Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé du numérique publiée le 08/05/2024

Réponse apportée en séance publique le 07/05/2024

Mme la présidente. La parole est à M. Stéphane Demilly, auteur de la question n° 1167, adressée à M. le ministre des armées.

M. Stéphane Demilly. Madame la secrétaire d'État, le 4 avril dernier, les trente-deux ministres des affaires étrangères des pays membres de l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord (Otan) ont célébré le soixante-quinzième anniversaire de la signature de ce traité.

Cet anniversaire est teinté d'interrogations sur l'avenir de l'Otan, notamment à la suite des déclarations que Donald Trump a tenues le 10 février dernier lors d'un meeting électoral, l'ancien président des États-Unis ayant clairement fait comprendre qu'il pourrait ne pas protéger un allié en cas d'attaque russe.

Ces paroles ne constituent pas une surprise de la part d'un homme déjà convaincu dans les années 2000 que les conflits en Europe de l'Est « ne valent pas des vies américaines » - je cite une phrase tirée de son livre The America We Deserve.

La probabilité d'un recul du soutien américain dans les années à venir « sape la sécurité de tous », de l'avis même du secrétaire général de l'Otan, Jens Stoltenberg.

Les leaders européens tentent quant à eux de durcir le ton face à Moscou, en insistant sur la nécessité non seulement d'aider davantage l'Ukraine, mais aussi d'augmenter leurs propres capacités de défense, car un recul du soutien américain serait dramatique.

En 2023, le budget de la défense américaine représentait 67 % de l'ensemble des dépenses militaires de l'Otan. Ce pourcentage montre à quel point nous dépendons des États-Unis.

Parallèlement à nos propres doutes, l'Ukraine continue à subir les assauts militaires russes. Pour le seul mois de mars, elle a été frappée par plus de quatre-vingt-quinze missiles balistiques, et les appels au secours des dirigeants ukrainiens sur la pénurie de munitions se font de plus en plus pressants.

De plus, l'Union européenne montre des difficultés à s'accorder sur sa politique de défense, ne serait-ce qu'en mer Rouge, où les attaques contre des navires marchands européens se multiplient depuis décembre.

Madame la secrétaire d'État, ma question résonne avec le calendrier électoral : quelle défense européenne voulons-nous ? Quel mode de gouvernance efficace voulons-nous dans ce monde instable, où la résurgence de nombreuses menaces inquiète les populations de notre continent européen ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Marina Ferrari, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée du numérique. Monsieur le sénateur Stéphane Demilly, la défense du continent européen se construit tant par l'Otan que par l'Union européenne, ces deux entités étant complémentaires.

La responsabilité de la défense du continent européen est donc collective. La quote-part américaine au financement du budget de l'Otan est d'environ 16 %, alors que la part combinée du financement des États européens de l'Alliance est d'environ 72 %.

Ces chiffres démontrent bien que, du côté européen, l'engagement est déjà en cours et qu'il contribue efficacement à la défense collective sur notre continent. Nous sommes engagés à disposer de forces entraînées, équipées, interopérables et immédiatement déployables, en faisant en sorte que 2 % de notre PIB soit réellement utiles militairement.

De plus, en matière de préparation à la mission de défense collective, l'Otan offre un processus de planification capacitaire qui engage les trente-deux États membres sur le long terme. Les accords dits Berlin plus prévoient des capacités de commandement et de contrôle utilisables dans le cadre d'un mandat de l'Union européenne ainsi qu'une standardisation et un processus de certification des forces à l'échelle du niveau d'ambition d'un conflit majeur sur le continent européen.

Par ailleurs, l'Union européenne travaille efficacement dans des domaines connexes. Par exemple, dans le cas de l'Ukraine, nous assurons des formations militaires ou la construction de coalitions capacitaires et industrielles, dans l'esprit de l'initiative lancée par le Président de la République.

En outre, les fonds européens de défense mobilisés par les règlements Asap (Act in Support of Ammunition Production) et Edirpa (European Defence Industry Reinforcement Through Common Procurement Act) sont autant d'outils communautaires mis en place depuis 2017 pour développer et renforcer l'industrie de défense européenne.

Enfin, la France mène une politique de réarmement qui contribue indéniablement à la défense de l'Union européenne. Sous l'impulsion du Président de la République, au terme de deux lois de programmation militaire, la France aura doublé son budget de défense entre 2017 et 2030. Pour la période 2024-2030, cela représente des augmentations cumulatives d'au moins 3,2 milliards d'euros par an. La France consacre 29 % de ses dépenses de défense à l'investissement, à la fois dans ses moyens conventionnels et dans la modernisation de sa dissuasion nucléaire. Nous devons continuer à avancer en Européens.

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