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Question de M. Hervé Gillé (Gironde - SER) publiée le 04/04/2024

M. Hervé Gillé attire l'attention de M. le ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des transports au sujet de la gratuité de l'autoroute A62 et de l'avenir des concessions autoroutières.
En Sud-Gironde, la mobilité est essentielle pour l'emploi. Nombreux sont celles et ceux qui doivent se déplacer vers la métropole bordelaise pour y travailler. Ils prennent leur voiture et empruntent alors l'autoroute A62. En plus du coût de leur véhicule et de l'essence, pour un trajet de Langon à Bordeaux, ils paient 4,60 euros de péages aller-retour, soit 92 euros par mois ou encore 1044,20 euros par an pour un travailleur. Une somme énorme et injuste.
Cette injustice est ressentie à l'échelle du département car l'accès à la métropole bordelaise est gratuit sur les autres axes reliant Bordeaux. Mais elle se fait également ressentir à une échelle plus large, compte tenu des chiffres d'affaires réalisés par les gestionnaires d'autoroutes privés. Vinci Autoroutes, qui détient la société ASF gestionnaire de l'A62, s'offrait 2,2 milliards de profits en 2022.
Le constat est clair : les contrats de concession autoroutiers sont extrêmement déséquilibrés au bénéfice des sociétés concessionnaires d'autoroutes. Et les rentes autoroutières, évaluées à 55 milliards d'euros selon l'inspection générale des finances au bénéfice des concessions, s'apprécient au détriment des finances publiques.
À quelques années de la fin des contrats de concessions, il est urgent que l'État régulateur démontre la volonté politique de reprise en main de la gestion des autoroutes françaises. L'État doit anticiper et préparer l'après-concession pour la mise en place d'un réseau autoroutier juste, au service de ses usagers, engageant aussi une réflexion sur sa transition écologique.
Le Parlement, par la voix d'élus engagés tels qu'un sénateur du Grand Est, a déjà formulé plusieurs propositions au Gouvernement, telles que l'organisation d'un « sommet des autoroutes » et la création d'un établissement public pour gérer l'ensemble du réseau routier national.
Ainsi, il l'interroge sur l'état des réflexions du Gouvernement sur les concessions autoroutières et sur leur reprise par l'État à l'horizon 2031-2036.

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Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé de la mer et de la biodiversité publiée le 08/05/2024

Réponse apportée en séance publique le 07/05/2024

Mme la présidente. La parole est à M. Hervé Gillé, auteur de la question n° 1204, adressée à M. le ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des transports.

M. Hervé Gillé. Monsieur le secrétaire d'État, en Sud-Gironde, nombreux sont celles et ceux qui doivent se déplacer vers la métropole bordelaise pour y travailler. Ils prennent leur voiture et empruntent alors l'autoroute A62. En plus du coût de leur véhicule et de l'essence, pour un trajet de Langon à Bordeaux, ils paient 4,60 euros de péage aller-retour, soit 92 euros par mois, ce qui représente plus de 1 000 euros par an et par travailleur. Cette somme est énorme et injuste !

Elle est injuste, tout d'abord, à l'échelle du département, car l'accès à la métropole bordelaise est gratuit sur les autres axes reliant Bordeaux.

Elle est injuste, ensuite, au regard du chiffre d'affaires réalisé par les gestionnaires d'autoroutes privés : Vinci Autoroutes, qui détient la société Autoroutes du sud de la France (ASF), gestionnaire de l'A62, s'offrait 2,2 milliards d'euros de profit en 2022.

Les élus du Sud-Gironde, Laurence Harribey et moi-même, avons déjà fait part de ces injustices. Votre réponse a été que la gratuité d'une portion de l'A62 était « juridiquement impossible », mais que nous pouvions être rassurés, car vous aviez « demandé » aux concessionnaires des efforts sur les abonnements et le covoiturage. Finalement, c'est le statu quo que vous privilégiez.

À quelques années de la fin des contrats, il est urgent que l'État ait une politique volontariste, notamment en faveur des salariés interconnectés avec les métropoles.

Monsieur le secrétaire d'État, ma question est donc la suivante : êtes-vous favorable à l'évolution des cahiers des charges des sociétés concessionnaires pour permettre la gratuité de ces tronçons, ou a minima en diminuer significativement les coûts ?

Dans la perspective désormais urgente de la préparation du renouvellement de ces concessions, seriez-vous favorable à une réduction expérimentale des coûts pour les automobilistes qui n'ont pas d'autres choix, en particulier sur l'axe Bordeaux-La Réole avec l'A62 ?

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Hervé Berville, secrétaire d'État auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé de la mer et de la biodiversité. Monsieur le sénateur Hervé Gillé, je vous remercie de votre question ; elle est importante pour nos concitoyens qui doivent emprunter ces autoroutes pour aller travailler. Dans le cadre des enjeux de pouvoir d'achat que nous connaissons, votre interrogation est parfaitement légitime.

Vous le savez, le modèle de la concession réside dans le financement de l'infrastructure par ses usagers. En particulier, le contrat de concession d'ASF, que vous avez mentionné, repose sur un péage payé par les usagers de l'autoroute A62.

Toute réduction ou suppression de ce péage conduirait, ce qui est logique, à la mise en oeuvre de l'obligation contractuelle de compenser le concessionnaire des pertes de recettes induites en augmentant ailleurs les péages. Le ministre vous a déjà fait cette réponse, et je la réitère, car les conditions n'ont pas changé. Pour faire simple, cela reviendrait donc à déplacer le problème.

S'ajouterait à cela une fragilisation du péage, qui doit être proportionnel au service rendu. Or la mise à péage de cette section a été instaurée pour financer, justement, la construction de l'autoroute.

Ainsi, la gratuité de l'A62 jusqu'à La Réole conduirait à faire payer par les usagers empruntant d'autres trajets sur cette autoroute des travaux portant sur une section qu'ils n'utilisent pas. Il n'est donc pas possible d'envisager, comme vous le souhaitez, la gratuité de l'autoroute A62 entre Langon et Bordeaux dans le contexte actuel, comme cela vous a été indiqué par le ministre des transports.

Pour réduire l'impact du péage pour les usagers qui empruntent quotidiennement l'autoroute, par exemple lors des trajets domicile-travail, les sociétés ont mis en place depuis des années, sur la demande du Gouvernement, des formules d'abonnement. Ainsi, les usagers fréquents - ceux qui réalisent plus de dix allers-retours sur un trajet - peuvent bénéficier d'une réduction de 30 % du péage sur ce trajet.

Le Gouvernement partage, en revanche, votre avis sur la nécessité d'anticiper la gestion du réseau autoroutier actuellement concédé après la fin des concessions historiques entre 2031 et 2036.

Sur le volet financier, une telle réflexion doit permettre d'appréhender les enjeux d'aménagement du réseau routier en termes de meilleur service aux usagers, d'accompagnement du report modal et d'adaptation aux changements climatiques.

Mme la présidente. Il faut conclure, monsieur le secrétaire d'État !

M. Hervé Berville, secrétaire d'État. Nous travaillerons avec vous et les sénateurs Hervé Maurey et Marie-Claire Carrère-Gée pour approfondir la réflexion sur le renouvellement des concessions.

Mme la présidente. La parole est à M. Hervé Gillé, pour la réplique.

M. Hervé Gillé. Les rentes autoroutières sont tout de même évaluées à 55 milliards d'euros ! Il serait regrettable que le Gouvernement ne trouve pas les moyens de lancer des expérimentations sur ce type de tronçon que les salariés sont obligés d'emprunter.

La compensation peut être apportée par les collectivités, mais aussi par l'État. Après tout, pourquoi pas ?

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