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Question de M. Guillaume Gontard (Isère - GEST) publiée le 30/05/2024

Question posée en séance publique le 29/05/2024

M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour le groupe Écologiste - Solidarité et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

M. Guillaume Gontard. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

Monsieur le Premier ministre, le 20 mai dernier, le procureur de la Cour pénale internationale requérait un mandat d'arrêt contre Benyamin Netanyahou pour « crimes de guerre » et « crimes contre l'humanité ».

Le 24 mai, la Cour internationale de justice (CIJ), la plus haute juridiction des Nations unies, ordonnait à Israël d'arrêter « immédiatement » son offensive militaire à Rafah, redoutant la « destruction des Palestiniens de Gaza ».

En réaction, le 26 mai, l'aviation israélienne bombardait un camp de déplacés à Rafah et continuait ses exactions : plus de 65 morts et des centaines de blessés, des corps déchiquetés, décapités, amputés par la violence de la déflagration, au point que certaines victimes ne peuvent pas être identifiées...

Aucun lieu n'est sûr pour un être humain dans la bande de Gaza !

Cette attaque abominable fragilise tous les efforts diplomatiques entrepris pour la libération des otages. L'entêtement guerrier du gouvernement d'extrême droite israélien menace la vie des otages, dont les morts tragiques s'égrènent semaine après semaine. Nous saluons la mémoire des disparus et tremblons avec les survivants et leurs familles.

Monsieur le Premier ministre, votre inaction confine à la complicité. (M. le Premier ministre manifeste son désaccord. - Protestations sur les travées du groupe RDPI.)

Mme Françoise Gatel. Oh !

M. Guillaume Gontard. Quand les Premiers ministres espagnol et canadien demandent l'application de l'ordonnance de la CIJ, qui exige l'arrêt total de l'offensive israélienne et la libération des otages, vous ne faites rien !

Quand le Canada cesse ses livraisons d'armes à Israël, vous ne faites rien !

Quand la Norvège, l'Irlande et l'Espagne reconnaissent l'État palestinien, vous ne faites rien !

Quand l'Irlande et l'Espagne demandent la suspension de l'accord d'association entre l'Union européenne et Israël, vous ne faites toujours rien !

Monsieur le Premier ministre, le courage de certains de vos homologues est le miroir de votre lâcheté.

La Palestine ne doit pas devenir le tombeau du droit international ; les conséquences pour l'humanité, à commencer par l'Ukraine, en seraient dramatiques. Le monde veut entendre la voix de la France et non pas attendre le « moment utile » ! (Applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées des groupes CRCE-K et SER.)

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Réponse du Premier ministre publiée le 30/05/2024

Réponse apportée en séance publique le 29/05/2024

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Gabriel Attal, Premier ministre. Monsieur le président Gontard, la situation à Gaza est grave.

Ces derniers jours, des images absolument terribles et catastrophiques nous sont parvenues, notamment celles de l'offensive à Rafah, qui nous bouleversent évidemment toutes et tous. Je pense aussi à l'annonce de la mort de notre compatriote, Orion Hernandez-Radoux, qui était retenu par le Hamas dans la bande de Gaza et qui a été tué. Je rappelle que deux otages français sont actuellement encore détenus là-bas. Il est important de le rappeler et de continuer à appeler à leur libération.

Cette situation dramatique impose que nous nous placions collectivement à la hauteur des responsabilités qui sont les nôtres. C'est la raison pour laquelle, monsieur le président Gontard, je ne comprends pas les termes que vous venez d'employer.

M. Akli Mellouli. C'est pourtant clair !

M. Gabriel Attal, Premier ministre. Je ne comprends pas que l'on puisse parler d'inaction quand la France, par la voix du Président de la République, a été l'un des premiers pays occidentaux à appeler à un cessez-le-feu, au point d'être critiquée à ce sujet par certains à l'époque.

Mme Raymonde Poncet Monge. Faites-le appliquer !

M. Gabriel Attal, Premier ministre. Je ne comprends pas que l'on puisse parler d'inaction quand la France est le pays qui a permis l'adoption par le Conseil de sécurité des Nations unies d'une résolution appelant à un cessez-le-feu, alors même que beaucoup disaient que l'adoption d'une telle résolution était impossible.

Je ne comprends pas que l'on puisse parler d'inaction quand la France a été le premier pays à larguer de l'aide humanitaire dans la bande de Gaza - c'est une fierté.

Je ne comprends pas non plus que l'on puisse parler d'inaction quand la France a envoyé l'un de ses bâtiments militaires, le Dixmude, pour soigner des blessés palestiniens sur zone.

M. Yannick Jadot. Un seul navire ne suffit pas !

M. Gabriel Attal, Premier ministre. Je ne comprends pas davantage que l'on puisse parler d'inaction quand la France joue aujourd'hui un rôle moteur, avec les pays arabes et nos partenaires européens, pour apporter une solution politique durable.

Le ministre de l'Europe et des affaires étrangères l'a rappelé : le Président de la République a déclaré hier que la reconnaissance d'un État palestinien n'était pas un « tabou », mais qu'elle devait être « utile » au processus qui nous permettra de parvenir, d'abord, à un cessez-le-feu et, ensuite, à une solution politique. (Protestations sur les travées du groupe GEST.)

Tout à l'heure, Stéphane Séjourné a posé une question à Mme la sénatrice Jourda, qui ne lui a pas répondu : au lendemain de la reconnaissance unilatérale de l'État de Palestine par certains pays européens, qu'est-ce qui a changé ?

Mme Raymonde Poncet Monge. Ça change tout !

M. Gabriel Attal, Premier ministre. Notre responsabilité est de traiter cette question en vue de trouver un accord global : une reconnaissance unilatérale de l'État palestinien, qui n'aurait aucun effet en termes diplomatiques ou militaires, n'y contribuerait pas.

Mme Raymonde Poncet Monge. Ne rien faire, c'est encore pire !

M. Yannick Jadot. Et l'accord d'association avec Israël ?

M. Gabriel Attal, Premier ministre. Il est important d'être factuel : certains termes que vous avez employés ici, les mêmes que ceux qui ont été prononcés hier à l'Assemblée nationale par un député de La France Insoumise, sont inexacts : non, les armes qui sont utilisées par l'armée israélienne à Gaza ne sont pas des armes françaises !

Le ministre des armées l'a rappelé à de nombreuses reprises, les livraisons effectuées par la France concernent des armes et des composants exclusivement dédiés à la défense du territoire israélien et au dôme de fer. Rappelez-vous que, il y a quelques semaines, 200 drones iraniens ont été lancés sur Israël. Nous étions alors bien contents que l'État hébreu dispose de ce système de défense aérienne. Je le redis, aucune arme française livrée à Israël n'est utilisée dans la bande de Gaza. Compte tenu de la gravité de la situation, il importe de rester factuel.

M. Yannick Jadot. Cela n'a rien à voir avec la question qui vous est posée !

M. Gabriel Attal, Premier ministre. Je me réjouis que les débats, ici, au Sénat, ne donnent pas lieu aux mêmes scènes que celles que nous avons connues hier à l'Assemblée nationale. Il est important d'éviter de faire de la politique spectacle ! (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, INDEP, RDSE, UC et Les Républicains.)

M. Bruno Retailleau. Très bien !

M. Gabriel Attal, Premier ministre. Le drapeau de la France et celui de l'Europe se suffisent à eux-mêmes pour appeler à la paix dans la région, parce qu'ils véhiculent des valeurs de liberté, d'égalité et de fraternité entre les peuples. Voilà ce qui doit nous unir pour la paix dans la région ! (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, INDEP, RDSE, UC et Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour la réplique.

M. Guillaume Gontard. Monsieur le Premier ministre, je suis désolé, mais je ne vous comprends pas non plus. Je ne comprends pas vos discours qui n'ont aucun sens. Un génocide est en train de se produire sous nos yeux et vous regardez vos chaussures ! Alors, s'il vous plaît, agissez ! (Applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées du groupe CRCE-K.)

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