ITALIE
Les commissions territoriales pour la reconnaissance de la protection internationale examinent les demandes d'asile sous le contrôle des tribunaux de l'ordre judiciaire.
Ces commissions se composent, dans le respect de la parité hommes/femmes, d'un membre du corps préfectoral, président, d'un fonctionnaire de la police d'État, d'un représentant d'une collectivité locale désigné par la conférence État - villes et collectivités locales, et par un représentant du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, tous nommés par décret du président du Conseil des ministres, sur proposition du ministre de l'Intérieur. Peut s'y joindre, à la demande du ministre des Affaires étrangères, un fonctionnaire de ce ministère. Les commissions délibèrent valablement lorsqu'est réunie la majorité des membres qui les composent. Elles bénéficient du soutien logistique de fonctionnaires du ministère de l'Intérieur.
1. Dépôt de la demande
Toute personne qui souhaite obtenir l'asile doit en faire la demande :
- à la police des frontières lors de son arrivée en Italie ;
- ou au commissariat de police (bureau de l'immigration) de son lieu de résidence.
Le demandeur, dont on prend la photographie et les empreintes digitales, est à cette occasion informé de la nature de la procédure qui va suivre, de ses droits et devoirs et reçoit une brochure rédigée par la Commission nationale pour le droit d'asile où figurent les coordonnées téléphoniques des principales organisations de protection des demandeurs d'asile. Les femmes sont reçues par un fonctionnaire de sexe féminin.
Un procès-verbal, soumis à la signature du demandeur est dressé d'après ses déclarations. Copie lui en est remise.
Le demandeur a le droit de rester sur le territoire pendant toute la procédure. Il peut, à tout moment, prendre contact avec une organisation de son choix.
Le commissaire de police peut :
- l'envoyer dans un « centre d'accueil » 10 ( * ) (centro di accoglienza) pour demandeurs d'asile et lui délivrer une attestation nominative qui certifie qu'il a demandé la protection internationale s'il a présenté sa demande après avoir été arrêté en tentant d'éviter des contrôles à la frontière ou en situation de séjour irrégulier (il ne peut y rester plus de 35 jours à compter du dépôt de sa demande, à l'issue de ce délai on lui remet un permis de séjour de trois mois renouvelable jusqu'à la décision) ;
- ou lui délivrer un permis de séjour de trois mois renouvelable jusqu'au terme de la procédure.
Durant la procédure, les communications avec le demandeur sont rédigées dans la première langue qu'il a indiquée ou à défaut en anglais, français, espagnol ou arabe, en fonction du choix de l'intéressé. La présence d'un interprète est garantie pendant toutes les phases de la procédure.
2. Examen de la demande
Le dossier est examiné d'une façon individuelle, objective et impartiale par l'une des dix commissions territoriales pour la reconnaissance de la protection internationale.
Le requérant a l'obligation de coopérer avec les autorités et de leur communiquer ses changements de résidence.
La commission convoque, par l'intermédiaire du commissariat, le requérant à une audition dans les trente jours suivant le dépôt de la demande. Elle peut renoncer à cette audition si elle dispose d'éléments suffisants pour faire droit à la demande ou, si le demandeur prouve par un certificat médical l'impossibilité de s'y rendre, différer cette audition.
Si le demandeur ne se présente pas à l'audition, la commission statue sur la base des éléments dont elle dispose.
A l'audition, qui n'est pas publique et à laquelle ne participent pas les autres membres de la famille du demandeur, ne peuvent prendre part, si cela est nécessaire, que les membres du même sexe que celui du demandeur. La commission questionne l'intéressé sur les éléments personnels et familiaux le concernant, sur son voyage, sur les motifs qui l'ont amené à quitter son pays et ceux qui le conduisent à ne pas souhaiter y retourner.
L'étranger peut :
- s'exprimer dans sa propre langue ;
- être assisté d'un avocat qu'il rétribue ;
- voire être accompagné d'une personne dont l'aide est rendue nécessaire par son état s'il se trouve dans une situation de vulnérabilité (personnes âgées, femmes enceintes, personnes handicapées...).
Un procès-verbal de l'audition est soumis à l'intéressé. Il fait référence aux déclarations et à la documentation en possession du requérant relative à son âge, sa condition sociale, son identité, sa nationalité, ainsi qu'aux lieux où il a séjourné auparavant, à ses demandes d'asile précédentes, à son itinéraire de voyage, à ses papiers d'identité et de voyage et aux motifs de sa demande de protection. Le demandeur en reçoit copie, peut en obtenir la traduction et refuser de le signer. Son refus est enregistré dans le document.
L'intéressé peut être retenu dans un « centre d'accueil » (centro di accoglienza) s'il est nécessaire de vérifier sa nationalité, s'il a présenté sa demande après avoir tenté d'échapper à un contrôle à la frontière ou s'il a été arrêté en séjour irrégulier sur le territoire italien. Cette mesure ne peut avoir d'incidence sur le fond de la procédure.
La commission territoriale n'a pas le droit de prendre d'informations auprès d'autorités responsables de la persécution que subit le demandeur. Celui-ci peut lui communiquer toutes les informations qu'il juge utiles pendant la procédure.
Le dossier fait l'objet d'un examen prioritaire lorsqu'il est manifestement fondé et quand la situation du demandeur est considérée comme vulnérable.
A ce stade, la commission peut déclarer la demande irrecevable lorsqu'une précédente demande a été rejetée et que le demandeur n'invoque pas de faits nouveaux pour justifier sa seconde requête.
3. Décision
La commission se prononce dans les trois jours ouvrables suivant l'audition du demandeur. Si elle n'a pas rendu sa décision dans ce délai vu la nécessité de se procurer d'autres informations, elle en informe le demandeur.
Le fait que le demandeur a quitté sans autorisation un centro di accoglienza ne constitue pas un motif de rejet de sa demande d'asile.
La décision, immédiatement transmise au demandeur par écrit, est motivée en fait et en droit lorsqu'elle est négative. Elle indique les voies de recours.
La commission peut rejeter une demande manifestement infondée et une demande qui a pour seul objet de retarder une mesure d'éloignement. Dans ce cas un recours juridictionnel contre cette décision n'a pas pour effet de suspendre son application sauf si le juge saisi par le demandeur ordonne le sursis à exécution pour des motifs graves et fondés.
4. Voies de recours
La décision de rejet peut faire l'objet d'un premier recours dans les 30 jours suivant sa communication au demandeur d'asile, devant le tribunal du chef-lieu du ressort de la cour d'appel où siège la commission territoriale. Ce délai est de 15 jours si le demandeur est hébergé dans un « centre d'accueil » (centro di accoglienza) ou dans un centre de rétention (par exemple parce qu'il a été condamné en Italie ou qu'il a fait l'objet d'une décision d'expulsion non encore exécutée).
Le recours est suspensif lorsque le demandeur :
- se trouvait en situation régulière lors du dépôt de sa demande ;
- a été placé dans un centro di accoglienza afin de vérifier son identité ou sa nationalité.
Il est dépourvu d'effet suspensif lorsque la commission régionale :
- a déclaré la demande irrecevable ;
- a rejeté une demande manifestement infondée ;
- a octroyé au demandeur le bénéfice de la protection subsidiaire 11 ( * ) ;
- rend sa décision après que le demandeur s'est éloigné sans motifs d'un (centro di accoglienza) ;
- statue sur un recours présenté après que le demandeur a été placé dans un centro di accoglienza pour avoir tenté d'échapper aux contrôles ou a été arrêté en séjour irrégulier.
Seul le tribunal peut ordonner le sursis à exécution des mesures d'éloignement si le demandeur formule une requête en ce sens en se basant sur des motifs graves et fondés.
La procédure a lieu devant un juge unique qui statue en la chambre du conseil.
Dans les cinq jours du dépôt du recours, ce magistrat fixe la date de l'audience par une décision communiquée à l'intéressé, au ministère public et à la commission territoriale. Un représentant de cette commission peut y intervenir.
Le tribunal rend sa décision dans les trois mois suivant le recours. Il peut rejeter celui-ci ou reconnaître le statut de réfugié et faire droit à la demande d'asile.
La constitution d'avocat est obligatoire. Le demandeur peut bénéficier de l'aide juridictionnelle s'il répond aux critères de droit commun pour obtenir celle-ci.
La décision de première instance est susceptible d'appel interjeté par l'intéressé ou le ministère public devant la cour d'appel dans les dix jours suivant la notification ou la communication de la sentence. La constitution d'avocat est également obligatoire. Le recours n'est pas suspensif mais la cour peut décider, par une ordonnance rendue à la demande de l'intéressé, le sursis à exécution de la décision lorsqu'existent des motifs graves et fondés. La procédure devant la cour d'appel se déroule en la chambre du conseil. La cour détermine, dans les cinq jours suivant le dépôt du recours, la date de l'audience. Elle rend sa décision dans les trois mois suivant la date du dépôt du recours.
La décision de la cour d'appel peut faire l'objet d'un recours en cassation formé dans les trente jours suivant la notification de la décision. La cour de cassation se prononce elle aussi en la chambre du conseil.
5. Conséquences de la décision
L'étranger auquel est accordé le statut de réfugié peut demeurer dans le pays. Il perd ce statut par exemple s'il se prévaut de la protection du pays dont il a la citoyenneté ou s'il recouvre cette citoyenneté. Ce statut lui est retiré notamment s'il a commis certains crimes graves dont la loi fixe la liste.
Le retrait est prononcé sur la base d'un dossier élaboré par l'équivalent du commissariat de police, après audition du réfugié par la Commission nationale pour le droit d'asile, entité composée de membres nommés par décret du président du Conseil des ministres, présidée par un préfet dans sa composition mentionnée supra .
LA PROCÉDURE DE RECONNAISSANCE DU DROIT D'ASILE
* 10 Les personnes envoyées dans un centre d'accueil ne sont tenues d'y résider que la nuit en respectant les horaires fixés par le règlement du centre. Elles peuvent sortir plus longtemps, par dérogation à ces règles, pour des motifs de santé ou de famille, sous réserve de l'obtention de l'autorisation préalable du fonctionnaire chargé du centre. Elles sont tenues de résider dans le centre pendant une période maximum de vingt jours à l'issue desquels elles reçoivent un permis de séjour de trois mois si la commission territoriale n'a pas statué sur leur demande. Ces centres sont distincts des « centres d'identification et d'expulsion » (centri di identificazione ed espulsione) , équivalents des centres de rétention.
* 11 Il s'agit de la protection accordée à un étranger qui, bien qu'il ne remplisse pas les conditions posées pour bénéficier du statut de réfugié, prouve qu'il est exposé dans son pays d'origine à un risque d'atteintes graves à sa personne.