EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

L'accélération et l'aggravation de la crise démocratique nous obligent.

Au-devant de la montée en puissance de l'abstention et de la défiance à l'égard des institutions et des élus, personne ne peut plus ignorer la déconnexion croissante entre le peuple et ses représentants, au premier rang desquels les membres de la représentation nationale.

Portées par François Hollande puis Emmanuel Macron, les deux grandes lois de moralisation et de financement de la politique ont contribué à amorcer une amélioration. Pour autant, le seul souci de transparence ne saurait, à lui seul, rétablir durablement la confiance.

Trop souvent accusés d'être hors-sol et loin des réalités locales, les élus nationaux font face à une défaveur grandissante dont le remède semble résider dans le lien qu'ils ont à justifier et à cultiver auprès de leurs électeurs. Car si le député est, certes, un élu national, il ne demeure pas moins un ambassadeur de son territoire et de ses habitants ; l'interlocuteur incontournable de Français qui veulent pouvoir compter sur des personnalités qui les connaissent, qui leur ressemblent et qui sont en mesure de porter leurs préoccupations et leurs espoirs à Paris et auprès du Gouvernement.

Dans un contexte où le débat et le compromis parlementaires redeviennent décisifs, c'est en étant résolument attaché à un parlementarisme ancré dans les territoires que nous relèverons le défi de cette nouvelle donne démocratique.

Au-delà de l'incontournable réforme de nos institutions, il nous faut repenser les bases de la relation entre l'élu et sa circonscription ; c'est en ayant connaissance des enjeux économiques, culturels et sociaux qui s'y font jour qu'un représentant parvient à agir et à peser concrètement sur la vie de ses concitoyens.

Il est d'autant plus impérieux de retrouver les conditions de la confiance qu'une enquête réalisée un an avant les élections législatives de 2022 a conclu que seuls 44% des Français avaient une opinion favorable à l'égard de leur député et que près d'un électeur sur deux ne le connait pas. Des données d'autant moins surprenantes que trop d'élus prétendument représentants d'un territoire n'y résident pas, n'y travaillent pas et n'y sont parfois pas même inscrits sur les listes électorales.

C'est cette méconnaissance réciproque qui nourrit le sentiment de déconnexion qui pèse sur la représentation nationale et alimente les ressentiments à l'égard de l'institution parlementaire. Une réforme récente a largement pris part à cette crise : l'interdiction stricte pour un député ou sénateur d'exercer une fonction exécutive locale (loi organique n° 2014-125 du 14 février 2014 interdisant le cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de député ou de sénateur). Sans porter atteinte à cette législation devenue largement consensuelle, une autre voie est possible pour redonner aux députés cet indispensable ancrage territorial.

Si l'article L.156 du Code électoral limite d'ores et déjà le nomadisme électoral en disposant l'impossibilité d'être candidat dans plusieurs circonscriptions, la présente proposition de loi organique vise à aller plus loin. Au même titre que les prétendants aux fonctions électives locales, l' article unique de ce texte prévoit de contraindre tout candidat aux scrutins législatif et sénatorial à être électeur au sein de sa circonscription ou à être inscrit au rôle des contributions directes dans la ou l'une des commune(s) de sa circonscription.

Par souci d'équité et de cohérence et en vertu de la règle générale qui leur rend applicable les dispositions relatives à l'éligibilité des députés, les sénateurs feront l'objet de ces mêmes obligations. Moins coutumiers de cette pratique qualifiée d'aussi vieille que la République, les membres de la chambre haute du Parlement ne sauraient néanmoins faire l'économie de cet impératif de proximité et de cette faculté à comprendre leur territoire.

Telle est l'ambition de cette initiative législative.

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