EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Cette proposition de loi visant à améliorer la sécurité de la pratique de la chasse est issue du rapport de la mission conjointe de contrôle sur la sécurité à la chasse intitulé La sécurité : un devoir pour les chasseurs, une attente de la société qui a été présenté et largement adopté à la mi-septembre 2022 par les commissions des affaires économiques et des lois.

En effet, en novembre 2021, à la suite d'une pétition ayant réuni plus de 120 000 signatures, le Sénat a créé pour la première fois une mission de contrôle pour examiner toutes les questions posées par la sécurité à la chasse. Cette mission a accompli un travail important auditionnant plus de 170 personnes et effectuant cinq déplacements sur le terrain.

À l'issue de ce travail collectif, la mission a formulé trente propositions directement inspirées d'expériences concrètes en France ou à l'étranger pour améliorer la sécurité à la chasse et le dialogue entre chasseurs et non-chasseurs. Certaines relèvent des pratiques des chasseurs et des autres acteurs de la nature, d'autres du pouvoir réglementaire mais certaines nécessitent des évolutions législatives. C'est l'objectif de la présente proposition de loi de leur donner corps et de permettre leur entrée en vigueur.

Le rapport a mis en lumière la forte baisse du nombre des accidents de chasse au cours des vingt dernières années (46 % d'accidents et 74 % de morts en moins) alors que la pression de chasse au grand gibier est plus importante. Cette diminution s'explique par des évolutions législatives mais également du comportement des chasseurs. Ceux-ci sont en effet concernés au premier chef, huit à neuf victimes sur dix, en moyenne, étant des chasseurs.

Cependant, tout en reconnaissant cette évolution très encourageante et le faible nombre des accidents de chasse aux regards d'autres risques, la mission a relevé que deux tiers des accidents s'expliquaient par des fautes graves enfreignant les règles élémentaires de sécurité et qu'il y avait une réelle possibilité de progression dès lors que l'on se fixait l'objectif de tendre vers le zéro accident.

Dans une société qui connaît et comprend moins bien la chasse comme nécessité de régulation et comme loisir, la sécurité est en réalité une question de crédibilité et de confiance entre chasseurs et non-chasseurs et peut-être même une condition pour que cette activité ait un avenir et conserve son ancrage populaire.

Comme annoncé au moment de la présentation du rapport, le souhait était que l'important travail de la mission et ses trente propositions soient versés au débat public et fassent l'objet de discussions avant que ne soit déposé un texte législatif. Si certaines dispositions font au final l'unanimité comme l'instauration d'un contrôle d'alcoolémie aligné sur le code de la route, d'autres ont été jugées disproportionnées par l'une ou l'autre partie comme un contrôle médical annuel des chasseurs ou la création d'un délit d'entrave aux activités et loisirs légaux venant compenser l'obligation de déclaration des battues.

La présente proposition de loi tient compte de ce riche débat tout en confirmant la volonté de progresser encore en termes de sécurité avant et pendant la chasse et en termes de dialogue et de cohabitation pour vivre ensemble la nature.

L'article 1 er vise à inscrire la sécurité des chasseurs et des tiers comme un prérequis de la pratique de la chasse et comme l'une des missions explicites de l'ensemble des instances qui l'encadrent. S'il est évident qu'aucun chasseur n'est aujourd'hui indifférent à la sécurité, se fixer l'objectif de tendre vers le zéro accident impose que chacun s'en saisisse et travaille dans ce but.

Dans le même esprit, l'article 2 vise à renforcer les possibilités de sanction des chasseurs ayant des comportements dangereux au sein des associations communales de chasse agréées (ACCA), à travers l'intervention du président de la fédération départementale des chasseurs concernée.

L'article 3 instaure l'obligation de présenter une attestation de formation aux premiers secours lors de la candidature au permis de chasser. Il s'agirait du certificat de compétences de prévention et secours civiques de niveau 1 (PSC1) afin de s'assurer que les chasseurs connaissent les gestes d'urgence alors qu'un accident peut survenir dans des zones reculées. Cette exigence ne sera pas un frein au passage du permis par les jeunes générations puisque cette formation est obligatoire au sein de l'éducation nationale depuis 2016.

La formation décennale à la sécurité souhaitée et mise en place par les chasseurs est une avancée importante mais le non-respect de cette obligation n'est pas aujourd'hui sanctionné. L'article 4 prévoit donc de conditionner la validation annuelle du permis de chasser à l'accomplissement de cette formation dans un délai de dix ans.

L'article 5 introduit plusieurs évolutions importantes des règles de sécurité à la chasse et assure leur harmonisation au plan national. Il généralise le port d'un gilet fluorescent pour toutes les actions de chasse à tir collectives. Il introduit un volet pratique au sein de la remise à niveau décennale, l'ancrage concret des gestes de sécurité étant essentiel à leur compréhension et à leur assimilation. Il inscrit ensuite dans le code de l'environnement la matérialisation obligatoire de l'angle de tir sécurisé et donc des zones où celui-ci est dangereux (zone de 30° autour des points à protéger), la formation des organisateurs de battue et l'utilisation d'un témoin de chambre vide garantissant la sécurisation des armes. Il interdit les tirs vers les zones dangereuses comme les voies de circulation ou les bâtiments et les tirs sans identification formelle du gibier.

L'article 5 permettra également au ministre chargé de la chasse d'harmoniser et de compléter ces règles de sécurité. Enfin, il précise les missions des commissions de sécurité des fédérations départementales des chasseurs, celles-ci devant notamment signaler toute mise en danger de la vie d'autrui ou risque d'utilisation dangereuse d'une arme de chasse aux autorités compétentes. Ces commissions devront également mener, avec l'OFB, des audits de sécurité des territoires où des accidents ou incidents auront eu lieu.

L'article 6 rend obligatoire la souscription d'une assurance responsabilité civile pour les organisateurs d'actions de chasse collective à tir au grand gibier ou de destruction.

L'article 7 crée une obligation de déclaration publique préalable des chasses collectives au grand gibier et sanctionne son non-respect ainsi que, de manière égale, l'utilisation de ces données pour empêcher le déroulement de l'action de chasse déclarée. Il crée en outre une infraction spécifique en cas de sabotage, dégradation ou destruction d'un équipement contribuant à la sécurité de la chasse.

L'article 8 permet au préfet de s'assurer de la conformité du schéma départemental de gestion cynégétique, le SDGC, à la loi, notamment en termes de sécurité.

L'article 9 aligne le droit de la chasse sur le code de la route en matière d'usage de l'alcool et de stupéfiants. Cette limite s'appliquera dans le cadre de toute action de chasse ou de destruction et pourra être contrôlé par les officiers et agents de police judiciaire de la gendarmerie et de la police nationales et, dans certaines conditions, des agents de police judiciaires adjoints.

L'article 10 aménage l'échelle des peines complémentaires en cas d'accident de chasse notamment pour punir plus sévèrement les homicides ou blessures involontaires suite à un tir direct sans identification, en prévoyant le retrait systématique du permis de chasser avec interdiction d'en solliciter un nouveau pendant dix ans.

L'article 11 améliore le suivi des armes et l'effectivité des inscriptions au fichier national des personnes interdites d'acquisition et de détention d'armes (FINIADA).

L'article 12 donne aux policiers municipaux les mêmes compétences que les gardes champêtres en matière de police de la chasse, afin de permettre aux maires, et notamment à ceux n'employant pas de gardes-champêtres, de traiter de ces questions.

Afin de contribuer au dialogue entre les chasseurs et les différents acteurs de la nature, l'article 13 vise à permettre aux fédérations départementales des chasseurs et aux fédérations départementales de pêche et de protection des milieux aquatiques de participer à l'élaboration des plans départementaux des espaces sites et itinéraires.

L'article 14 assure l'application des dispositions de la proposition de loi outre-mer.

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