EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
L'incendie qui a détruit dans la nuit du 25 au 26 septembre 2019 les unités d'entreposage et d'enfutage du site de Lubrizol à Rouen est l'un des pires accidents industriels que la France ait connu depuis l'explosion de l'usine AZF en 2001.
Cet incendie, qui suscite les inquiétudes compréhensibles des habitants de la région, soulève des interrogations quant aux règles applicables en matière d'installations dangereuses, en particulier celles qui sont proches de lieux d'habitation.
En raison de la grande dangerosité des substances et des mélanges qui y sont maniés, l'usine Lubrizol relève de la nomenclature « Seveso seuil haut », qui correspond à une catégorie particulièrement sensible d'installations classées pour la protection des hommes et de l'environnement. Ce classement implique la mise en oeuvre d'importantes mesures de prévention des risques, parmi lesquelles la réalisation d'une étude de dangers présentant plusieurs scénarii, la mise en place d'actions de sensibilisation et l'information des riverains. En outre, la loi dite « Risques » de 2003 1 ( * ) prévoit l'élaboration de plans de prévention des risques technologiques approuvés par arrêté préfectoral pour les territoires accueillant ces sites à haut risque.
L'incendie de Lubrizol a mis en lumière les limites de ces dispositifs. Cet accident, qui s'est produit dans une usine située à seulement trois kilomètres du centre-ville de Rouen, est susceptible d'avoir causé d'importants dégâts environnementaux, sanitaires et économiques. Le préfet de la Seine-Maritime a d'ailleurs ordonné des mesures conservatoires sur les productions agricoles et l'Agence régionale de santé de Normandie recommande d'éviter tout contact cutané avec les suies retombées sur les sols.
Par ailleurs, les informations qui ont été diffusées par le Gouvernement et la préfecture dans les jours qui ont suivi l'accident ont entrainé le sentiment d'une certaine confusion et témoigné d'une transparence imparfaite. Dès le lendemain de l'incendie, la préfecture indiquait que les analyses de la toxicité de l'air n'avaient pas mesuré de toxicité aigüe, tout en renvoyant à des analyses complémentaires la composition des fumées.
Au-delà de ce cas particulier, cet incendie interroge sur les modalités d'application de la législation et de la réglementation relatives aux installations classées, et ce d'autant plus que cette installation a déjà connu des incidents ces dernières années.
Alors que 1 312 sites « Seveso », dont 705 sites seuil haut, étaient recensés en 2018 en France, il apparaît urgent d'examiner les règles applicables en matière de prévention des risques pour déterminer si ces règles sont aujourd'hui les plus adaptées pour réduire au maximum les probabilités de tels accidents et leurs conséquences. Une enquête approfondie sur les conditions dans lesquelles les services de l'État interviennent dans ces cas de figure s'avère indispensable.
La création d'une commission d'enquête doit permettre de recueillir les éléments d'information nécessaires pour formuler des propositions afin d'améliorer les dispositifs existants afin d'assurer la protection des populations et la préservation de l'environnement.
* 1 Loi n° 2003-699 du 30 juillet 2003 relative à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages .