Projet de loi relatif au divorce
N° 389
SÉNAT
SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2002-2003
Annexe au procès-verbal de la séance du 9 juillet 2003
PROJET DE LOI
relatif au
divorce
,
PRÉSENTÉ
au nom de M. JEAN-PIERRE RAFFARIN,
Premier ministre,
par M. DOMINIQUE PERBEN,
Garde des Sceaux, ministre de la justice.
( Renvoyé à la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement).
Divorce. |
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
L'adaptation du droit de la famille aux évolutions sociologiques qui ont
marqué ces dernières décennies constitue un objectif
indispensable à la mise en oeuvre d'une politique nouvelle en direction
des couples et des familles, à la fois respectueuse des valeurs
fondamentales de notre société, volontariste et pragmatique.
Cette politique a pour ambition de mieux reconnaître, au sein de la
sphère privée, l'aspiration de nos concitoyens à plus de
volonté et de liberté et d'affirmer les références
essentielles qui constituent le socle de notre société, au rang
desquelles la valeur de l'engagement, la solidarité et la
responsabilité.
Le projet de loi relatif au divorce constitue une première étape
de cette réforme d'ensemble ambitieuse et cohérente qui sera
poursuivie durant toute la législature.
S'agissant du droit du divorce, la loi du 11 juillet 1975 a constitué,
en son temps, une grande innovation.
Elle a substitué à l'unique procédure de divorce pour
faute, dont l'expérience a révélé les effets bien
souvent néfastes, quatre cas de divorce recouvrant le divorce sur
demande conjointe, le divorce demandé par un époux et
accepté par l'autre, le divorce pour rupture de la vie commune et le
divorce pour faute.
L'assouplissement ainsi introduit n'a cependant pas entièrement
porté ses fruits.
Ainsi, le divorce par consentement mutuel, qui représente environ
41 % des procédures, est considéré comme encore trop
formaliste par les couples que n'oppose aucun conflit. En particulier,
l'exigence d'une double comparution devant le juge apparaît trop souvent
formelle et source d'un ralentissement inutile de la procédure.
Quant au divorce demandé et accepté, il repose sur l'exigence
d'un double aveu de faits procédant de chaque époux rendant
intolérable le maintien de la vie commune et produit les effets d'un
divorce aux torts partagés. Le formalisme qui l'encadre et
l'impossibilité pour les époux, au cours d'une procédure
de divorce pour faute ou pour rupture de la vie commune, de modifier leur
demande initiale en optant pour ce cas de divorce plus consensuel, l'ont rendu,
dans les faits, peu attractif (13 % en moyenne).
Le divorce pour rupture de la vie commune suppose, quant à lui, une
séparation de fait d'une durée de six ans, délai qui ne
paraît plus adapté aux modes de vie actuels. En outre,
l'époux demandeur doit supporter l'intégralité des charges
liées à la séparation et ne peut obtenir pour
lui-même une prestation compensatoire. C'est pourquoi, en pratique, ce
divorce n'a pas eu les effets escomptés (moins de 2 % des cas).
Quant au divorce pour faute, il reste quantitativement le plus utilisé
puisqu'il représente en moyenne 42 % des procédures. Il est, en
effet, la seule voie juridiquement possible pour obtenir le divorce, à
défaut d'une séparation du couple pendant six ans ou d'un accord
sur le principe de la rupture. Aussi, recouvre-t-il des réalités
très différentes : situations dans lesquelles un
époux est victime du comportement grave de son conjoint, divorces par
défaut lorsqu'une partie ne se manifeste pas, mais aussi conflits
déguisés dans le seul but d'obtenir à son profit le
prononcé du divorce ou un avantage financier particulier.
Les effets de cette procédure sont pourtant connus : elle aiguise
les conflits par la recherche et la justification de faits fautifs qui
impliquent l'entourage du couple ; elle s'avère souvent
traumatisante pour les enfants qui voient leurs père et mère se
déchirer en compromettant de façon durable les relations
parentales après le divorce ; elle lie le sort des effets
pécuniaires du divorce à l'attribution des torts, sans prendre en
compte les conséquences excessives ou néfastes pour un
époux qui peuvent en résulter.
*
* *
Partant
de ce constat, le projet de loi entend moderniser le droit du divorce, en
simplifiant les procédures lorsque les époux s'entendent sur le
principe de la séparation et, dans le cas contraire, en apaisant autant
que possible leurs relations.
Dans ce contexte, il est apparu qu'il n'y avait pas lieu de donner
compétence pour prononcer le divorce, même pour les cas les plus
simples, à une autorité autre que judiciaire. Une telle solution
conduirait à transformer le mariage, institution républicaine
fondamentale, en un simple contrat dont le sort serait laissé à
la seule appréciation des époux. Elle risquerait, en outre, de
favoriser les pressions d'un époux sur l'autre et de
générer un contentieux après divorce important.
Il n'est pas apparu davantage souhaitable de supprimer le divorce pour faute au
regard des devoirs et obligations du mariage.
Les violations graves de ces devoirs doivent pouvoir être
dénoncées et sanctionnées. Il en est
particulièrement ainsi des comportements aussi intolérables que
les violences conjugales ou les graves humiliations subies par un époux
pendant la vie commune.
En revanche, il est essentiel de dédramatiser les conflits et de
pacifier autant que possible les procédures. C'est pourquoi, la
médiation familiale, lorsqu'elle apparaît adaptée à
la situation du couple, doit trouver une place privilégiée au
sein du nouveau dispositif.
*
* *
La réforme s'articule autour de trois axes.
I. - MODERNISER LA LÉGISLATION
1°
Le projet propose de maintenir le pluralisme des cas de divorce qui
caractérise la législation française et permet une
réelle adaptation des procédures à la diversité des
situations familiales.
Néanmoins, il réforme en profondeur l'économie
générale du dispositif actuel dont il modifie à la fois
l'esprit et les applications procédurales. Il simplifie et pacifie les
procédures, tout en affirmant les principes de protection du conjoint et
de responsabilité.
Le divorce par consentement mutuel
Il suppose que les époux s'entendent tant sur la rupture que sur
l'ensemble de ses conséquences.
Les époux pourront toujours choisir de recourir à un avocat
commun ou avoir chacun leur propre conseil.
Ils devront présenter au juge une convention réglant toutes les
conséquences de leur séparation.
Le magistrat l'homologuera et prononcera le divorce à l'issue d'une
seule audience, au lieu de deux actuellement, si la convention préserve
suffisamment les intérêts des enfants et les intérêts
propres de chacun des époux.
Ce n'est qu'en cas de refus d'homologation qu'une seconde audience sera
organisée si une nouvelle convention est présentée par les
époux dans un délai maximum de six mois.
(Articles 230, 232, 250 à 250-3 nouveaux du code civil)
.
Le divorce par acceptation du principe de la rupture du mariage
Dans cette hypothèse, les époux acceptent le principe de la
rupture du mariage sans considération des faits à l'origine de
celle-ci, mais ne parviennent pas à un accord global sur les
conséquences de la séparation qu'il reviendra au juge de trancher.
La philosophie de ce type de divorce est profondément modifiée
puisqu'il ne repose plus sur un double aveu de faits rendant la vie commune
intolérable mais sur le simple accord des parties relativement à
leur rupture.
Pour mettre fin à l'insécurité juridique, voire aux
manoeuvres dilatoires qui affectent actuellement cette procédure,
l'acceptation ainsi recueillie par le juge ne sera plus susceptible de
rétractation, même par la voie de l'appel.
La procédure applicable est également largement remaniée,
l'accord des époux, assistés de leur avocat respectif, pouvant
être recueilli dans des formes simplifiées et constaté par
le juge à tout moment de la procédure.
(Articles 233, 234 et 253 nouveaux du code civil).
Le divorce pour altération définitive du lien conjugal
Il remplace l'actuelle procédure de divorce pour rupture de la vie
commune.
Il est prononcé sur le constat, par le juge, de l'altération
définitive du lien conjugal résultant de la cessation de la
communauté de vie, tant affective que matérielle, des
époux, soit durant les deux années précédant la
requête initiale en divorce, soit pendant une période de deux ans
entre le prononcé de l'ordonnance de non conciliation et l'introduction
de l'instance.
Le projet prévoit aussi que le divorce sera également
prononcé sur ce fondement, à la demande d'un époux,
lorsque son conjoint aura introduit l'instance en invoquant une faute sans
justifier de celle-ci, l'impossibilité de maintenir le lien conjugal
étant, dans cette hypothèse, pleinement
caractérisée.
Dans tous les cas, il appartient au juge de statuer sur l'ensemble des
conséquences du divorce, celui-ci n'emportant plus aucun effet
patrimonial automatique à la charge de l'époux demandeur. Le
devoir de secours cesse avec le prononcé du divorce, le droit commun de
la prestation compensatoire s'appliquant.
(Articles 237 et 238 nouveaux du code civil)
.
Le divorce pour faute
Il est
prononcé en cas de violation grave des devoirs et obligations du mariage
qui rendent intolérable le maintien de la vie commune.
Il est apparu inutile de maintenir l'hypothèse spécifique de la
violation renouvelée de ces obligations, celle-ci étant incluse
dans la notion de gravité.
Le recours à la médiation familiale, qui favorise la reprise du
dialogue et la recherche de solutions consensuelles constituera pour ce type de
divorce, un domaine privilégié.
(Articles 242 à 246 nouveaux du code civil)
.
2° Sur le plan processuel, le parti a été pris de
renvoyer au nouveau code de procédure civile la plupart des
règles régissant les cas de divorce.
Néanmoins, les grandes étapes du déroulement de la
procédure figureront dans le code civil.
Le projet de loi institue un tronc commun pour toutes les procédures
autres que le divorce par consentement mutuel. L'objectif est de simplifier la
demande en divorce et de préserver les chances de rapprochement des
époux sur le principe de la rupture et ses conséquences.
La requête initiale en divorce ne comportera donc plus l'indication des
motifs de la séparation. Ce n'est qu'après la tentative de
conciliation que l'époux demandeur devra opter pour l'une des trois
procédures contentieuses et précisera, le cas
échéant, les torts qu'il impute à son conjoint.
Ainsi, l'audience de conciliation, qui constitue le temps fort de la
procédure, ne devrait plus être le lieu de conflits
exacerbés pour se recentrer sur l'organisation de la vie de la famille
et les véritables enjeux de la séparation
(articles 251 et 252
nouveaux du code civil)
.
Dans cette perspective, les mesures susceptibles d'être prises lors de
l'audience de conciliation sont étendues afin de permettre, notamment,
de préparer très en amont le prononcé du divorce et la
liquidation du régime matrimonial
(articles 254 et 255 nouveaux du
code civil)
.
II. - RENDRE LES PROCEDURES PLUS EFFICACES ET MOINS CONFLICTUELLES
Trois axes sont privilégiés :
* Apaiser les relations conjugales pendant la procédure
A cet effet, le projet de loi prévoit de dissocier les
conséquences du divorce de la répartition des torts. Alors
qu'aujourd'hui, un époux divorcé à ses torts exclusifs se
voit privé de toute prestation compensatoire, celle-ci ne pourra
dorénavant lui être refusée que si l'équité
le commande au regard des circonstances particulières de la rupture
(article 270 nouveau du code civil)
.
De même est-il prévu que le sort des donations et avantages
matrimoniaux entre époux, ne dépende plus de l'existence d'une
faute d'un des conjoints. Le principe retenu est celui de leur maintien
lorsqu'ils portent sur des biens présents. Quant aux dispositions
à cause de mort, elles sont révoquées de plein droit par
le prononcé du divorce, sauf volonté contraire de l'époux
qui les a consenties
(article 265 nouveau du code civil)
.
Le recours à la médiation familiale est développé
par la possibilité pour le juge d'obliger les époux à
rencontrer un médiateur qui les informera sur l'objet et le
déroulement de la médiation, celle-ci restant cependant
subordonnée à l'accord des parties
(article 255 nouveau du
code civil)
.
Enfin, des mécanismes souples sont institués afin que tout accord
entre époux, qu'il porte aussi bien sur le principe du divorce que sur
tout ou partie des ses conséquences, trouve pleinement sa place dans le
dispositif procédural et produise son plein effet.
D'une part, il sera dorénavant possible aux époux, à tout
moment de la procédure, de passer dans des formes très
simplifiées à une procédure moins conflictuelle, qu'il
s'agisse d'un divorce par consentement mutuel ou sur demande acceptée
(articles 247 et 247-1 nouveaux du code civil)
.
D'autre part, les parties pourront, pendant l'instance, soumettre à
l'homologation du juge des conventions réglant tout ou partie des
conséquences du divorce
(article 268 nouveau du code civil)
.
* Favoriser le règlement complet de toutes les
conséquences du divorce au moment de son prononcé.
A cet effet, les époux sont incités, dès le début
de la procédure, à préparer les conséquences
patrimoniales de leur séparation.
Ainsi, dès la tentative de conciliation, le juge leur demandera de
présenter pour l'audience de jugement un projet de règlement des
effets du divorce et pourra désigner un notaire ou un professionnel
qualifié dans la perspective de préparer la liquidation du
régime matrimonial
(articles 252-3 et 255 nouveaux du code
civil)
.
Quant à la demande en divorce introduite après l'ordonnance de
non conciliation, elle devra comporter, sous peine d'irrecevabilité, une
proposition de règlement des intérêts pécuniaires et
patrimoniaux des époux
(article 257-2 nouveau du code civil)
.
En outre, et à défaut d'un accord sur la liquidation lors du
prononcé du divorce, des délais stricts sont prévus pour
parvenir à un règlement amiable (un an à compter du
divorce, avec prolongation possible de six mois) et éviter ainsi la
persistance des conflits des années après le prononcé du
divorce.
Les règles procédurales du partage, qui relèvent du
domaine réglementaire, seront par ailleurs assouplies
(articles 267
et 267-1 nouveaux du code civil)
.
* Adapter le dispositif relatif à la prestation
compensatoire.
Les difficultés d'application de la réforme du 30 juin 2000
rendent nécessaire l'aménagement du dispositif actuel, tout en
réaffirmant le caractère forfaitaire de la prestation
compensatoire et le principe d'un versement en capital.
Afin de tenir compte de la situation économique du débiteur, les
modalités de versement sont assouplies.
Ainsi, sera-t-il possible d'utiliser les différentes formes de paiement
en capital. De même, lorsque la prestation sera fixée sous forme
de rente viagère, un complément en capital pourra être
attribué, la fixation du montant de celui-ci devant tenir compte du
montant de la rente
(articles 275-1 et 276 nouveaux du code civil)
.
Par ailleurs, dans le souci d'inciter à un apurement rapide des
relations financières entre les ex-époux, le projet
précise les modalités dans lesquelles un capital pourra
être substitué à la rente viagère. Les sommes
déjà versées seront prises en compte et des dispositions
réglementaires seront édictées, harmonisant la
méthode de calcul et répondant à l'attente des praticiens
(article 276-4 nouveau du code civil)
.
Dans tous les cas de divorce, les époux pourront définir
librement les modalités de versement de la prestation compensatoire en
soumettant une convention à l'homologation du juge. Cette liberté
de décision des époux en la matière était
jusque-là limitée au seul cas de divorce par consentement mutuel
(article 279-1 nouveau du code civil)
.
En outre, il est mis fin au principe contesté de la
transmissibilité pure et simple de la rente. Le projet prévoit en
effet que les héritiers du débiteur de la prestation
compensatoire ne seront plus tenus personnellement à son paiement, mais
seulement dans la limite de l'actif de la succession. Une somme en capital sera
alors versée au créancier sauf si les héritiers
décident d'un commun accord de maintenir les modalités de
paiement dont bénéficiait l'époux débiteur lors de
son décès. Est ainsi consacré un système adaptable
à la diversité des situations et des personnes. Il s'appliquera
à toutes les prestations antérieures lorsque la succession de
l'époux débiteur n'aura pas été liquidée
à la date d'entrée en vigueur de la loi nouvelle
(articles 280
et 280-1 nouveaux du code civil)
.
Enfin, s'agissant des rentes viagères allouées avant
l'entrée en vigueur de la loi du 30 juin 2000, le projet
prévoit un mécanisme plus souple de révision, eu
égard à l'ancienneté de celles-ci. La révision sera
en effet possible non seulement aux conditions habituelles en cas de
modification importante dans la situation de l'une ou l'autre des parties, mais
aussi lorsque le maintien de la rente serait de nature à procurer au
créancier un avantage manifestement excessif.
III. - RESPONSABILISER L'EPOUX DEFAILLANT ET PROTEGER LE CONJOINT VICTIME
Dans cet objectif, trois dispositifs sont prévus.
En premier lieu, l'époux dont l'âge ou l'état de
santé ne lui permettra pas de subvenir à ses besoins après
le divorce est protégé, le juge pouvant fixer à son profit
la prestation compensatoire sous forme de rente viagère
(article 276
nouveau du code civil)
.
En second lieu, au-delà de l'importance que représente le
maintien du divorce pour faute, un dispositif particulier permettant l'octroi
de dommages-intérêts est institué en réparation des
conséquences graves qu'un époux peut subir du fait de la
dissolution du mariage. Deux cas particuliers sont visés : lorsque
cet époux est défendeur à un divorce, pour
altération définitive du lien conjugal et lorsque le divorce est
prononcé aux torts exclusifs de son conjoint
(article 266 nouveau du
code civil)
.
Enfin, s'agissant des violences conjugales, de nouvelles dispositions sont
prévues afin de mieux protéger le conjoint victime et de
répondre aux situations d'urgence. Le projet prévoit la
possibilité pour celui-ci de saisir le juge aux affaires familiales,
avant même toute procédure de divorce, afin qu'il statue sur la
résidence séparée. Sauf circonstances
particulières, la jouissance du domicile conjugal sera attribuée
au conjoint qui n'est pas l'auteur des violences. Ces mesures prendront fin
automatiquement à l'issue d'une période de trois mois à
défaut d'une requête en divorce ou en séparation de corps
(article 220-1 nouveau du code civil)
.
*
* *
A
côté du divorce, le projet de loi maintient la séparation
de corps qui, si elle concerne moins de 8000 demandes par an, préserve
une pluralité des réponses judiciaires aux attentes des couples.
Les dispositions régissant cette séparation sont
aménagées sur le modèle du divorce à l'exception du
devoir de secours qui est maintenu.
*
* *
Enfin,
le projet de loi comporte des dispositions transitoires.
Les procédures de divorce en cours à la date d'entrée en
vigueur de la loi seront régies par la loi ancienne lorsque, selon le
type de divorce, soit la convention temporaire a déjà
été homologuée, soit l'assignation délivrée.
Toutefois, pour favoriser les divorces consensuels, les époux pourront
se prévaloir des nouvelles « passerelles »
instaurées par la loi vers le consentement mutuel ou le divorce
accepté.
Enfin, dans un souci d'apaisement, un époux séparé pourra
demander que le divorce soit prononcé pour altération
définitive du lien conjugal si les conditions en sont remplies.
PROJET DE LOI
Le
Premier ministre,
Sur le rapport du Garde des Sceaux, ministre de la justice,
Vu l'article 39 de la Constitution,
Décrète :
Le présent projet de loi relatif au divorce,
délibéré en Conseil des ministres après avis du
Conseil d'État, sera présenté au Sénat par le Garde
des Sceaux, ministre de la justice, qui sera chargé d'en exposer les
motifs et d'en soutenir la discussion.
TITRE
I
er
DISPOSITIONS MODIFIANT LE CODE CIVIL
Article
1
er
L'article 229 du code civil est ainsi rédigé :
«
Art. 229. -
Le divorce peut être prononcé en
cas :
« - soit de consentement mutuel ;
« - soit d'acceptation du principe de la rupture du mariage ;
« - soit d'altération définitive du lien
conjugal ;
« - soit de faute. »
Chapitre
I
er
Des cas de divorce
Article 2
I. -
Les intitulés : « paragraphe 1 - Du divorce sur demande
conjointe des époux » et « paragraphe 2 - Du divorce
demandé par un époux et accepté par l'autre » de
la section 1 du chapitre I
er
du titre VI du livre I
er
du
code civil sont supprimés.
II. - Cette section comprend les articles 230 et 232 ainsi
rédigés :
«
Art. 230
. - Le divorce peut être demandé
conjointement par les époux lorsqu'ils s'entendent sur la rupture du
mariage et ses effets en soumettant à l'approbation du juge une
convention réglant les conséquences du divorce.
«
Art. 232
. - Le juge homologue la convention et prononce le
divorce s'il a acquis la conviction que la volonté de chacun des
époux est réelle et que leur consentement est libre et
éclairé.
« Il peut refuser l'homologation et ne pas prononcer le divorce s'il
constate que la convention préserve insuffisamment les
intérêts des enfants ou de l'un des époux. »
Article 3
I. - L'intitulé de la section 2 du chapitre I er du titre VI du livre I er du même code est ainsi modifié :
« Section 2
«
Du divorce accepté
»
II. -
Cette section comprend les articles 233 et 234 ainsi rédigés :
«
Art. 233. -
Le divorce peut être demandé par
l'un ou l'autre des époux ou par les deux lorsqu'ils acceptent le
principe de la rupture du mariage sans considération des faits à
l'origine de celle-ci.
« Cette acceptation n'est pas susceptible de rétractation,
même par la voie de l'appel.
«
Art. 234. -
S'il a acquis la conviction que chacun des
époux a donné librement son accord, le juge prononce le divorce
et statue sur ses conséquences. »
Article 4
I. -
Avant l'article 237 du même code, est insérée une section 3
intitulée : « Du divorce pour altération
définitive du lien conjugal ».
II. - Cette section comprend les articles 237 et 238 ainsi
rédigés :
«
Art. 237. -
Le divorce peut être demandé par
l'un des époux lorsque le lien conjugal est définitivement
altéré.
«
Art. 238
. - L'altération définitive du lien
conjugal résulte de la cessation de la communauté de vie, tant
affective que matérielle, entre les époux durant les deux
années précédant la requête initiale en divorce ou
pendant une période de deux ans entre le prononcé de l'ordonnance
de non-conciliation et l'introduction de l'instance.
« Nonobstant ces dispositions, le divorce est prononcé pour
altération définitive du lien conjugal dans le cas prévu
au deuxième alinéa de l'article 246, dès lors que la
demande présentée sur ce fondement est formée à
titre reconventionnel. »
Article 5
I. - Il
est créé après l'article 238 du même code une
section 4 intitulée : « Du divorce pour faute ».
Elle comprend les articles 242, 244, 245, 245-1 et 246.
II. - L'article 242 du même code est ainsi rédigé :
«
Art. 242
. - Le divorce peut être demandé par
l'un des époux lorsque des faits constitutifs d'une violation grave des
devoirs et obligations du mariage sont imputables à son conjoint et
rendent intolérable le maintien de la vie commune.
»
III. - L'article 246 du même code est ainsi rédigé :
«
Art. 246
. - Si une demande pour altération
définitive du lien conjugal et une demande pour faute sont concurremment
présentées, le juge examine en premier lieu la demande pour faute.
« S'il rejette celle-ci, le juge statue sur la demande en divorce
pour altération définitive du lien conjugal. »
Article 6
Les articles 247, 248-1, 251, 252, 252-1, 252-2, 252-3, 271 alinéa 2, 275-1, 276-2 et 280 du même code, deviennent respectivement les articles 228, 245-1, 252, 252-1, 252-2, 252-3, 252-4, 272, 275, 280-2 et 281.
Article 7
I. -
Après l'article 246 du même code, il est créé une
section 5 intitulée : « Des modifications du fondement d'une
demande en divorce ».
II. - Cette section comprend les articles 247, 247-1 et 247-2 ainsi
rédigés :
«
Art. 247
. - Les époux peuvent, à tout moment
de la procédure, demander au juge de constater leur accord pour voir
prononcer leur divorce par consentement mutuel en lui présentant une
convention réglant les conséquences de celui-ci.
«
Art. 247-1
. - Les époux peuvent également,
à tout moment de la procédure, lorsque le divorce aura
été demandé pour altération définitive du
lien conjugal ou pour faute, demander au juge de constater leur accord pour
voir prononcer le divorce pour acceptation du principe de la rupture du mariage.
«
Art. 247-2
. - Si, dans le cadre d'une instance introduite
pour altération définitive du lien conjugal, le défendeur
demande reconventionnellement le divorce pour faute, le demandeur peut invoquer
les fautes de son conjoint et modifier le fondement de sa demande. »
CHAPITRE
II
De la procédure du divorce
Article 8
Dans la
section 1 du chapitre II du titre VI du livre I
er
du même
code, les articles 249, 249-3 et 249-4 sont modifiés comme suit :
I. - au premier alinéa de l'article 249 :
- après les mots : « du conseil de famille »,
sont insérés les mots : « ou du juge des
tutelles, » ;
- les mots : « et, dans la mesure du possible, après
audition de l'intéressé par le juge ou le conseil de
famille. » sont ajoutés à la fin de l'alinéa.
II. - Il est ajouté à la fin de l'article 249-3 une phrase ainsi
rédigée :
« Toutefois, le juge peut prendre les mesures provisoires
prévues aux articles 254 et 255 et les mesures urgentes de l'article
257. »
III. - A l'article 249-4, après les mots : « par
consentement mutuel » sont ajoutés les mots :
« ou pour acceptation du principe de la rupture du
mariage ».
Article 9
I. - L'intitulé de la section 2 du chapitre II du titre VI du livre I er du même code est ainsi modifié :
« Section 2
«
De la procédure applicable au divorce par consentement
mutuel
»
II. -
Cette section comprend les articles 250, 250-1, 250-2 et 250-3 ainsi
rédigés :
«
Art. 250.
- La demande en divorce est
présentée par les avocats respectifs des parties ou par un avocat
choisi d'un commun accord.
« Le juge examine la demande avec chacun des époux, puis les
réunit. Il appelle ensuite le ou les avocats.
«
Art. 250-1
. - Lorsque les conditions prévues
à l'article 232 sont réunies, le juge homologue la convention
réglant les conséquences du divorce et, par la même
décision, prononce celui-ci.
«
Art. 250-2.
- En cas de refus d'homologation de la
convention, le juge peut cependant homologuer les mesures provisoires au sens
des articles 254 et 255 que les parties s'accordent à prendre
jusqu'à la date à laquelle le jugement de divorce passe en force
de chose jugée, sous réserve qu'elles soient conformes à
l'intérêt du ou des enfants.
« Une nouvelle convention peut alors être
présentée par les époux dans un délai maximum de
six mois.
«
Art. 250-3.
- A défaut de présentation d'une
nouvelle convention dans le délai fixé à l'article 250-2
ou si le juge refuse une nouvelle fois l'homologation, la demande en divorce
est caduque.
»
Article 10
I. - L'intitulé de la section 3 du chapitre II du titre VI du livre I er du même code est ainsi modifié :
« Section 3
«
De la procédure applicable aux autres cas de
divorce
»
Cette section comprend les articles 251 à 259-3.
II. -
Il est créé au sein de cette section un paragraphe 1
intitulé : « De la requête initiale » et
comprenant l'article 251 ainsi rédigé :
«
Art. 251
. - L'époux qui forme une demande en divorce
présente, par avocat, une requête au juge. L'indication des motifs
du divorce n'est pas requise. »
Article 11
I. -
Après l'article 251 du même code, il est créé un
paragraphe 2 intitulé : « De la conciliation »,
qui comprend les articles 252, 252-1, 252-2, 252-3, 252-4 et 253.
II. - A l'article 252 du même code :
- au premier alinéa, les mots : « Quand le divorce est
demandé pour rupture de la vie commune ou pour faute, » sont
supprimés ;
- le deuxième alinéa est remplacé par les dispositions
suivantes :
« le juge cherche à concilier les époux tant sur le
principe du divorce que sur ses conséquences. »
III. - A l'article 252-1 du même code :
- le deuxième alinéa est remplacé par les dispositions
suivantes :
« Les avocats sont ensuite appelés à assister et
à participer à l'entretien. »
- le troisième alinéa est ainsi rédigé :
« Dans le cas où l'époux qui n'a pas formé la
demande ne se présente pas à l'audience ou se trouve hors
d'état de manifester sa volonté, le juge s'entretient avec
l'autre conjoint et l'invite à la réflexion. »
IV. - L'article 252-3 du même code est ainsi rédigé :
«
Art. 252-3
. - Lorsque le juge constate que le demandeur
maintient sa demande, il incite les époux à régler les
conséquences du divorce à l'amiable.
« Il leur demande de présenter pour l'audience de jugement un
projet de règlement des effets du divorce. A cet effet, il peut prendre
les mesures provisoires prévues à l'article 255. »
V. - L'article 253 du même code est ainsi rédigé :
«
Art. 253
. - Les époux ne peuvent accepter le
principe de la rupture du mariage et le prononcé du divorce sur le
fondement de l'article 233 que s'ils sont chacun assistés par un
avocat. »
Article 12
I. -
Après l'article 253 du même code, il est créé un
paragraphe 3 intitulé : « Des mesures
provisoires » qui comprend les articles 254, 255, 256 et 257.
II. - L'article 254 du même code est ainsi rédigé :
«
Art 254
. - Lors de l'audience prévue à
l'article 252, le juge prescrit, en considération des accords
éventuels des époux, les mesures nécessaires pour assurer
leur existence et celle des enfants jusqu'à la date à laquelle le
jugement passe en force de chose jugée. »
III. - L'article 255 du même code est ainsi rédigé :
«
Art. 255
. - Le juge peut notamment :
« 1° Proposer aux époux une mesure de médiation
et, après avoir recueilli leur accord, désigner un
médiateur familial pour y procéder ;
« 2° Enjoindre aux époux de rencontrer un
médiateur familial qui les informera sur l'objet et le
déroulement de la médiation ;
« 3° Statuer sur les modalités de la résidence
séparée des époux ;
« 4° Attribuer à l'un d'eux la jouissance du logement et
du mobilier du ménage ou partager entre eux cette jouissance, en
précisant son caractère gratuit ou non et, le cas
échéant, en constatant l'accord des époux sur le montant
d'une indemnité d'occupation ;
« 5° Ordonner la remise des vêtements et objets
personnels ;
« 6° Fixer la pension alimentaire et la provision pour frais
d'instance que l'un des époux devra verser à son conjoint,
désigner celui ou ceux des époux qui devront assurer le
règlement provisoire de tout ou partie des dettes ;
« 7° Accorder à l'un des époux des provisions
à valoir sur ses droits dans la liquidation du régime matrimonial
si la situation le rend nécessaire ;
« 8° Statuer sur l'attribution de la jouissance ou de la
gestion des biens communs ou indivis
autres que ceux visés au
4° du présent article, sous réserve des droits de chacun des
époux dans la liquidation du régime matrimonial ;
« 9° Désigner un notaire ou un autre professionnel
qualifié en vue de dresser un inventaire estimatif ou de faire des
propositions quant au règlement des intérêts
pécuniaires des époux ;
« 10° Désigner un notaire en vue d'élaborer un
projet de liquidation du régime matrimonial. »
Article 13
I. -
Après l'article 257 du même code, il est créé un
paragraphe 4 intitulé : « De l'introduction de l'instance
en divorce » et comprenant les articles 257-1, 257-2 et 258.
II. - Les articles 257-1 et 257-2 du même code sont ainsi
rédigés :
«
Art. 257-1
. - Après l'ordonnance de
non-conciliation, un époux peut introduire l'instance ou former une
demande reconventionnelle pour acceptation du principe de la rupture du
mariage, pour altération définitive du lien conjugal ou pour
faute.
« Toutefois, lorsqu'à l'audience de conciliation les
époux ont déclaré accepter le principe de la rupture du
mariage et le prononcé du divorce sur le fondement de l'article 233,
l'instance ne peut être engagée que sur ce même fondement.
«
Art. 257-2
. - A peine d'irrecevabilité, la demande
introductive d'instance comporte une proposition de règlement des
intérêts pécuniaires et patrimoniaux des
époux
.
»
Article 14
I. - La
section 4 du chapitre II du titre VI du livre I
er
du même code
devient le paragraphe 5 de la section 3 du même chapitre.
II. - A l'article 259 du même code, il est ajouté une phrase
ainsi rédigée :
« Toutefois, les descendants ne peuvent jamais être entendus
sur les griefs invoqués par les époux. »
III. - Au premier alinéa de l'article 259-3 du même code, les
mots : « désignés par lui » sont
remplacés par les mots : « et autres personnes
désignées par lui en application des 9° et 10° de
l'article 255, ».
Chapitre III
Des conséquences du divorce
Article 15
L'article 262-1 du même code est ainsi rédigé :
«
Art. 262-1
. - Le jugement de divorce prend effet dans les
rapports entre les époux, en ce qui concerne leurs biens :
« - Lorsqu'il est prononcé par consentement mutuel, à
la date de l'homologation de la convention réglant l'ensemble des
conséquences du divorce, à moins que celle-ci n'en dispose
autrement ;
« - Lorsqu'il est prononcé pour acceptation du principe de la
rupture du mariage, pour altération définitive du lien conjugal
ou pour faute, à la date de l'ordonnance de non-conciliation organisant
les modalités de la résidence séparée des
époux.
« L'un ou l'autre des époux peut saisir le juge afin qu'il
fixe les effets du jugement à la date à laquelle ils ont
cessé de cohabiter et de collaborer. Cette demande ne peut être
formée qu'à l'occasion de l'action en divorce. La jouissance du
logement conjugal par un seul des époux conserve un caractère
gratuit jusqu'à l'ordonnance de non-conciliation, sauf décision
contraire du juge. »
Article 16
Le
paragraphe 1 de la section 2 du chapitre III du titre VI du livre
I
er
du même code comprend, outre l'article 263, les articles
264, 265 et 265-1 ainsi rédigés :
«
Art. 264
. - A la suite du divorce, chacun des époux
perd l'usage du nom de son conjoint.
« L'un des époux peut néanmoins conserver l'usage du
nom de l'autre, soit avec l'accord de celui-ci, soit avec l'autorisation du
juge, s'il justifie d'un intérêt particulier pour lui ou pour les
enfants.
«
Art. 265
. - Le divorce est sans incidence sur les avantages
matrimoniaux qui ne sont pas subordonnés au
prédécès de l'un des époux et sur les donations de
biens présents quelle que soit leur forme.
« Le divorce emporte révocation de plein droit de toutes les
dispositions à cause de mort, y compris les avantages matrimoniaux,
accordées par un époux envers son conjoint par contrat de mariage
ou pendant l'union, sauf volonté contraire de l'époux qui les a
consenties. Cette volonté est constatée par le juge au moment du
prononcé du divorce.
«
Art. 265-1
. - Le divorce est sans incidence sur les droits
que l'un ou l'autre des époux tient de la loi ou des conventions
passées avec des tiers. »
Article 17
I. - Le
paragraphe 2 de la section 2 du chapitre III du titre VI du livre
I
er
du même code est intitulé : « Des
conséquences propres aux divorces autres que par consentement
mutuel ».
II. - Il comprend les articles 266, 267, 267-1 et 268 ainsi
rédigés :
«
Art. 266
. - Sans préjudice de l'application de
l'article 270, des dommages et intérêts peuvent être
accordés à un époux en réparation des
conséquences d'une particulière gravité qu'il subit du
fait de la dissolution du mariage soit lorsqu'il était défendeur
à un divorce prononcé pour altération définitive du
lien conjugal soit lorsque le divorce est prononcé aux torts exclusifs
de son conjoint.
« Cette demande ne peut être formée qu'à
l'occasion de l'action en divorce.
« Dans tous les cas, le juge peut décider que cette
réparation pourra s'effectuer en nature ou en valeur.
«
Art. 267
. - A défaut d'un règlement
conventionnel par les époux, le juge, en prononçant le divorce,
ordonne la liquidation et le partage de leurs intérêts
patrimoniaux.
« Il statue sur les demandes de maintien dans l'indivision ou
d'attribution préférentielle.
« Il peut aussi accorder à l'un des époux ou aux deux
une avance sur sa part de communauté ou de biens indivis.
« Si le projet de liquidation du régime matrimonial
établi par le notaire désigné sur le fondement du 10°
de l'article 255 contient des informations suffisantes, le juge, à
la demande de l'un ou l'autre des époux, statue sur les
désaccords persistant entre elles.
«
Art. 267-1.
- Si les opérations de liquidation et de
partage ne sont pas achevées dans le délai d'un an après
que le jugement de divorce est passé en force de chose jugée, le
notaire transmet au tribunal un procès-verbal de difficultés
reprenant les déclarations respectives des parties.
« Au vu de celui-ci, le tribunal peut accorder un délai
supplémentaire d'une durée maximale de six mois.
«
Art. 268
. - Les époux peuvent, pendant l'instance,
soumettre à l'homologation du juge des conventions réglant tout
ou partie des conséquences du divorce, autres que celles relatives
à la liquidation du régime matrimonial.
« Le juge, après avoir vérifié que les
intérêts de chacun des époux et des enfants sont
préservés, homologue les conventions en prononçant le
divorce. »
Article 18
I. -
L'article 270 du même code est ainsi rédigé :
«
Art. 270
. - Le divorce met fin au devoir de secours entre
époux.
« L'un des époux peut être tenu de verser à
l'autre une prestation destinée à compenser, autant qu'il est
possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les
conditions de vie respectives. Cette prestation a un caractère
forfaitaire. Elle prend la forme d'un capital dont le montant est fixé
par le juge.
« Toutefois, le juge peut refuser d'accorder une telle prestation si
l'équité le commande, soit en considération des
critères prévus à l'article 271 notamment lorsque la
demande est fondée sur l'altération définitive du lien
conjugal, soit, lorsque le divorce est prononcé aux torts exclusifs de
l'époux qui demande le bénéfice de cette prestation, au
regard des circonstances particulières de la rupture. »
II. - L'article 271 du même code est complété par les
dispositions suivantes :
« A cet effet, le juge prend en considération notamment :
« - la durée du mariage ;
« - l'âge et l'état de santé des
époux ;
« - leur qualification et leur situation professionnelles ;
« - les conséquences résultant des choix
professionnels faits pendant la vie commune pour l'éducation des enfants
et
du temps qu'il faudra encore consacrer à celle-ci ;
« - le patrimoine estimé ou prévisible des
époux, tant en capital qu'en revenu, après la liquidation du
régime matrimonial ;
« - leurs droits existants et prévisibles ;
« - leur situation respective en matière de pensions de
retraite. »
III. - L'article 274 du même code est ainsi rédigé :
«
Art. 274
. - Le juge décide des modalités
selon lesquelles s'exécutera la prestation compensatoire en capital
parmi les formes suivantes :
« 1° Versement d'une somme d'argent, le prononcé du
divorce pouvant être subordonné à son versement effectif ou
à la constitution des garanties prévues à l'article
277 ;
« 2° Attribution de biens en propriété ou d'un
droit temporaire ou viager d'usage, d'habitation ou d'usufruit, le jugement
opérant cession forcée en faveur du créancier. »
IV. - A l'article 275 du même code :
- la référence à l'article 275 est remplacée par
la référence à l'article 274 ;
- au deuxième alinéa, le mot :
« notable » est remplacé par le mot :
« important » ;
- le troisième alinéa est abrogé ;
- l'avant-dernier alinéa est ainsi rédigé :
« Le débiteur peut se libérer à tout moment du
solde du capital indexé. » ;
- à la fin du dernier alinéa est ajouté le mot :
« indexé ».
V. - L'article 275-1 du même code est ainsi rédigé :
«
Art. 275-1
. - Les modalités de versement
prévues au premier alinéa de l'article 275 ne sont pas exclusives
du versement d'une partie du capital dans les formes prévues par
l'article 274. »
VI. - L'article 276 du même code est ainsi rédigé :
«
Art. 276
. - A titre exceptionnel, le juge peut, par
décision spécialement motivée, lorsque l'âge ou
l'état de santé du créancier ne lui permet pas de subvenir
à ses besoins et qu'aucune amélioration notable de sa situation
financière n'est envisageable, fixer la prestation compensatoire sous
forme de rente viagère. Il prend en considération les
éléments d'appréciation prévus à l'article
271.
« Le montant de la rente peut être minoré, lorsque les
circonstances l'imposent, par l'attribution d'une fraction en capital parmi les
formes prévues à l'article 274. »
VII. - L'article 276-4 du même code est ainsi modifié :
A. - Les deux premiers alinéas sont remplacés par l'alinéa
suivant :
« Le débiteur d'une prestation compensatoire sous forme de
rente viagère peut à tout moment saisir le juge d'une demande de
substitution d'un capital à tout ou partie de la rente. Le montant du
capital substitué prend notamment en compte les sommes
déjà versées. La substitution s'effectue selon des
modalités fixées par décret en Conseil
d'État. »
B. - Il est créé un dernier alinéa ainsi
rédigé :
« Les modalités d'exécution prévues aux
articles 274 et 275 sont applicables. »
VIII. - Il est créé après l'article 279 un article 279-1
du même code ainsi rédigé :
«
Art. 279-1
. - Lorsqu'en application de l'article 268, les
époux soumettent à l'homologation du juge une convention relative
à la prestation compensatoire, les dispositions des articles 278 et 279
sont applicables. »
IX. - L'article 280 du même code est ainsi rédigé :
«
Art. 280
. - A la mort de l'époux débiteur, le
paiement de la prestation compensatoire, quelle que soit sa forme, est
prélevé sur la succession. Le paiement est supporté par
tous les héritiers, qui n'y sont pas tenus personnellement, dans la
limite de l'actif successoral et, en cas d'insuffisance, par tous les
légataires particuliers, proportionnellement à leur
émolument, sous réserve de l'application de l'article 927.
« Lorsque la prestation compensatoire a été
fixée sous forme d'un capital payable dans les conditions de l'article
275, le solde de ce capital devient immédiatement exigible.
« Lorsqu'elle a été fixée sous forme de rente,
il lui est substitué un capital immédiatement exigible dont le
montant prend en compte les sommes déjà versées. La
substitution s'effectue selon des modalités fixées par
décret en Conseil d'État. »
X. - L'article 280-1 du même code est ainsi rédigé :
«
Art. 280-1
. - Par dérogation à l'article 280,
les héritiers peuvent décider ensemble de maintenir les formes et
modalités de règlement de la prestation compensatoire qui
incombaient à l'époux débiteur, en s'obligeant
personnellement au paiement de cette prestation. A peine de nullité,
l'accord est constaté par un acte notarié. Il est opposable aux
tiers à compter de sa notification à l'époux
créancier lorsque celui-ci n'est pas intervenu à l'acte.
« L'action en révision prévue aux articles 275 et
276-3 est ouverte aux héritiers. »
Article 19
Le
paragraphe 5 de la section 2 du chapitre III du titre VI du
livre I
er
du même code devient le paragraphe 4. Il
comprend l'article 285-1 ainsi rédigé :
«
Art. 285-1
. - Si le local servant de logement à la
famille appartient en propre ou personnellement à l'un des époux,
le juge peut le concéder à bail au conjoint qui exerce seul ou en
commun l'autorité parentale sur un ou plusieurs de leurs enfants lorsque
ceux-ci résident habituellement dans ce logement et que leur
intérêt le commande.
« Le juge fixe la durée du bail et peut le renouveler
jusqu'à la majorité du plus jeune des enfants.
« Le juge peut résilier le bail si des circonstances
nouvelles le justifient. »
Chapitre IV
De la séparation de corps
Article 20
I. - A
l'article 297 du même code, il est inséré après la
première phrase, une phrase ainsi rédigée :
« Toutefois, lorsque la demande principale en divorce est
fondée sur l'altération définitive du lien conjugal, la
demande reconventionnelle ne peut tendre qu'au divorce. »
II. - Il est créé après l'article 297 du même code
un article 297-1 ainsi rédigé :
«
Art. 297-1
. - Lorsqu'une demande en divorce et une demande
en séparation de corps sont concurremment présentées, le
juge examine en premier lieu la demande en divorce. Il prononce celui-ci
dès lors que les conditions en sont réunies. A défaut, il
statue sur la demande en séparation de corps.
« Toutefois, lorsque ces demandes sont fondées sur la faute,
le juge les examine simultanément et, s'il les accueille, prononce
à l'égard des deux conjoints le divorce aux torts
partagés. »
III. - L'article 300 du même code est ainsi rédigé :
«
Art. 300
. - Chacun des époux séparés
conserve l'usage du nom de l'autre. Toutefois, le jugement de séparation
de corps ou un jugement postérieur peut, compte tenu des
intérêts respectifs des époux, le leur
interdire. »
IV. - Le troisième alinéa de l'article 303 du même code
est remplacé par les deux alinéas suivants :
« Cette pension est soumise aux règles des obligations
alimentaires.
« Toutefois, lorsque la consistance des biens de l'époux
débiteur s'y prête, la pension alimentaire est remplacée,
en tout ou partie, par la constitution d'un capital, selon les règles
des articles 274 à 275-1 et 277. Si ce capital devient insuffisant pour
couvrir les besoins du créancier, celui-ci peut demander un
complément sous forme de pension alimentaire. »
Chapitre V
Des biens des époux
Article 21
I. -
L'article 1096 du même code est ainsi rédigé :
«
Art. 1096
. - La donation de biens à venir faite
entre époux pendant le mariage sera toujours révocable.
« Les donations faites entre époux, de biens présents
ou de biens à venir ne sont pas révoquées par la
survenance d'enfants. »
II. - A l'article 1442 du même code, la phrase : « Celui
auquel incombe à titre principal les torts de la séparation ne
peut obtenir ce report. » est supprimée.
III. - Le second alinéa de l'article 1450 du même code est
remplacé par les dispositions suivantes :
« Lorsque la liquidation porte sur des biens soumis à la
publicité foncière, la convention doit être passée
par acte notarié. »
IV. - L'article 1518 du même code est ainsi modifié :
A. - Après le mot : « survie » sont
ajoutés les mots : « sous réserve de
l'article 265. »
B. - Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« L'époux au profit duquel le préciput a
été stipulé peut exiger une caution de son conjoint en
garantie de ses droits. »
Chapitre VI
Dispositions diverses
Article
22
I. - Le
troisième alinéa de l'article 220-1 du même code est
remplacé par les dispositions suivantes :
« Lorsque les violences exercées par un époux
mettent gravement en danger son conjoint, un ou plusieurs enfants, le juge
peut statuer sur la résidence séparée des époux en
précisant lequel des deux continuera à résider dans le
logement conjugal. Sauf circonstances particulières, la jouissance du
logement conjugal est attribuée au conjoint qui n'est pas l'auteur des
violences. Le juge se prononce, s'il y a lieu, sur les modalités
d'exercice de l'autorité parentale. Les mesures prises sont caduques si,
à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de leur
prononcé, aucune requête en divorce ou en séparation de
corps n'a été déposée.
« La durée des
autres mesures prises en application du
présent article
doit être déterminée par le
juge et ne saurait, prolongation éventuellement comprise,
dépasser trois ans. »
II. - L'article 228 du même code est inséré au titre VI du
livre I
er
avant le chapitre I
er
.
La première phrase du quatrième alinéa de cet article est
ainsi rédigée :
« Il est également seul compétent, après le
prononcé du divorce, quelle qu'en soit la cause, pour statuer sur les
modalités de l'exercice de l'autorité parentale, sur la
modification de la contribution à l'entretien et l'éducation des
enfants et pour décider de confier ceux-ci à un tiers ainsi que
sur la révision de la prestation compensatoire ou de ses
modalités de paiement. »
III. - A l'article 245-1 du même code, les mots : « En
cas de divorce pour faute, et » sont supprimés.
IV. - A l'article 248-1 du même code, les mots : « aux
affaires familiales » sont supprimés.
V. - A l'article 256 du même code, les mots : « Les
conséquences de la séparation pour les » sont
remplacés par les mots : « Les mesures provisoires
relatives aux ».
VI. - A l'article 276-3 du même code, après les mots :
« les besoins des parties » sont insérés les
mots : « ou de l'une ou l'autre d'entre elles ».
VII. - A l'article 278 du même code, les mots : « demande
conjointe » sont remplacés par les mots :
« divorce par consentement mutuel ».
VIII. - Au troisième alinéa de l'article 279 du même code :
- les mots : « et les besoins » sont remplacés
par les mots : « ou les besoins de l'une ou
l'autre » ;
- la référence à l'article 275-1 est remplacée par
la référence à l'article 275.
IX. - A l'article 280-2 du même code :
- la première phrase est supprimée ;
- les mots : « de la rente versée au
créancier » sont remplacés par les mots :
« du montant de la prestation compensatoire transmise aux
héritiers, lorsque celle-ci, au jour du décès, prenait la
forme d'une rente ».
X. - Sont insérés à l'article 281 du même code,
après le mot : « sont », les mots :
« , quelles que soient leurs modalités de
versement, ».
XI. - A l'article 298 du même code, les mots : « au
chapitre II » sont remplacés par les mots :
« à l'article 228 ainsi qu'au chapitre II » ;
XII. - A l'article 301 du même code :
- la deuxième phrase est abrogée ;
- les mots : « sur demande conjointe » sont
remplacés par les mots : « par consentement
mutuel ».
XIII. - A l'article 306, le mot : « trois » est
remplacé par le mot « deux ».
XIV. - A l'article 307, les mots : « sur demande
conjointe » sont remplacés par les mots : « par
consentement mutuel ».
Article 23
I. -
Sont abrogés :
A. - Le chapitre VIII du titre V du livre I
er
du même
code ;
B. - Les articles 231, 235 et 236, 239 à 241, 243, 261 à 261-2,
264-1, 268-1 et 269, 273, 276-3 alinéa 3, 282 à 285, 297
alinéa 2, 307 alinéa 2, 309, 1099 alinéa 2, du
même code.
II. - A la section 2 du chapitre III du titre VI du livre I
er
du
même code, l'intitulé : « paragraphe 4 - Du
devoir de secours après le divorce » est supprimé.
TITRE II
DISPOSITIONS DIVERSES ET TRANSITOIRES
Article 24
La présente loi est applicable à la Nouvelle-Calédonie et aux collectivités de Polynésie française et de Wallis et Futuna conformément à l'article 3 de la loi n° 70-589 du 9 juillet 1970 et à Mayotte conformément à l'article 3-I de la loi n° 2001-616 du 11 juillet 2001.
Article 25
I. - La
présente loi entrera en vigueur le premier jour du neuvième mois
suivant sa publication au
Journal officiel
de la République
Française.
II. - Elle s'appliquera aux procédures en divorce introduites avant son
entrée en vigueur sous les exceptions qui suivent :
a)
toutes les fois que la convention temporaire a été
homologuée avant l'entrée en vigueur de la présente loi,
l'action en divorce est poursuivie et jugée conformément à
la loi ancienne ;
b)
toutes les fois que l'assignation a été
délivrée avant l'entrée en vigueur de la présente
loi, l'action en divorce est poursuivie et jugée conformément
à la loi ancienne.
Par dérogation au
b
ci-dessus, les époux peuvent se
prévaloir des dispositions des articles 247 et 247-1 du code civil
; le divorce peut également être prononcé pour
altération définitive du lien conjugal si les conditions de
l'article 238 sont réunies.
III. - Les dispositions du II ci-dessus sont applicables aux procédures
en séparation de corps.
IV. - L'appel et le pourvoi en cassation sont formés, instruits et
jugés selon les règles applicables lors du prononcé de la
décision de première instance.
V. - Les demandes de conversion sont formées, instruites et
jugées conformément aux règles applicables lors du
prononcé de la séparation de corps
VI. -
Les rentes viagères fixées par le juge ou par
convention avant l'entrée en vigueur de la loi n° 2000-596 du 30
juin 2000 peuvent être révisées, suspendues ou
supprimées à la demande du débiteur ou de ses
héritiers lorsque leur maintien en l'état procurerait au
créancier un avantage manifestement excessif au regard des
critères posés à l'article 276 du code civil.
L'article 276-3 est applicable à la révision des rentes
viagères fixées par le juge ou par convention entre
l'entrée en vigueur de la loi précitée et l'entrée
en vigueur de la présente loi.
La substitution d'un capital aux rentes viagères attribuées
avant l'entrée en vigueur de la présente loi peut être
demandée dans les conditions fixées à l'article 276-4.
VII. - Les rentes temporaires fixées par le juge ou par convention
avant l'entrée en vigueur de la présente loi peuvent être
révisées, suspendues ou supprimées à la demande du
débiteur ou de ses héritiers en cas de changement important dans
les ressources ou les besoins de l'une ou l'autre des parties. Leur
révision ne peut conduire à proroger leur durée initiale,
sauf accord des parties. La révision ne peut avoir pour effet de porter
la rente à un montant supérieur à celui fixé
initialement par le juge.
Les rentes temporaires peuvent également faire l'objet d'une demande
tendant à leur substituer un capital dans les conditions prévues
aux articles 274, 275 et 275-1 du code civil.
Ces actions peuvent être engagées par le débiteur ou ses
héritiers. Le créancier peut demander la substitution d'un
capital à la rente s'il établit qu'une modification de la
situation du débiteur permet cette substitution.
VIII. - Les VI et VII du présent article sont applicables aux instances
en cours qui n'ont pas donné lieu à une décision
passée en force de chose jugée.
IX. - Les dispositions des articles 280 à 280-3 du code civil sont
applicables aux prestations compensatoires allouées avant
l'entrée en vigueur de la présente loi sauf lorsque la succession
du débiteur a donné lieu à partage définitif
à cette date.
X. - Les pensions de réversion versées du chef du conjoint
décédé à la date d'entrée en vigueur de la
loi n° 2000-596 du 30 juin 2000 peuvent être, sur décision du
juge saisi par les héritiers du débiteur de la prestation
compensatoire, déduites du montant des rentes en cours.
Fait à Paris, le 9 juillet 2003
Signé : JEAN-PIERRE RAFFARIN
Par le Premier ministre :
Le garde des Sceaux, ministre de la justice,
Signé : DOMINIQUE PERBEN