Rétablissement des compétences de l'État en matière d'incendie et de secours
N°
158
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2002-2003
Annexe au procès-verbal de la séance du 29 janvier 2003
PROPOSITION DE LOI
rétablissant les
compétences de l'État
en
matière d'
incendie
et de
secours
,
PRÉSENTÉE
Par MM Alain VASSELLE, Louis de BROISSIA, Jean FRANÇOIS-PONCET, Jean-François LE GRAND, Roland du LUART, Henri de RAINCOURT, Jean-Paul ALDUY, Pierre ANDRÉ, Gérard BAILLY, Daniel BERNARDET, Roger BESSE, Gérard BRAUN, Dominique BRAYE, Mme Paulette BRISEPIERRE, MM., Jean CLOUET, Christian COINTAT, Robert DEL PICCHIA, Fernand DEMILLY, Christian DEMUYNCK, Michel DOUBLET, Alain DUFAUT, Michel ESNEU, Jean-Claude ETIENNE, Alain FOUCHÉ, Alain GÉRARD, François GERBAUD, Daniel GOULET, Alain GOURNAC, Louis GRILLOT, Georges GRUILLOT, Charles GUENÉ, Michel GUERRY, Hubert HAENEL, Emmanuel HAMEL, Mme Françoise HENNERON, MM. Jean-François HUMBERT, Christian de LA MALÈNE, Dominique LECLERC, Marcel LESBROS, Gérard LONGUET, Jean-Louis LORRAIN, Pierre MARTIN, Serge MATHIEU, Jean-Luc MIRAUX, Georges MOULY, Paul NATALI, Mme Nelly OLIN, MM. Joseph OSTERMANN, Ladislas PONIATOWSKI, Mme Janine ROZIER et M. André VALLET,
Sénateurs.
(Renvoyée à la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement).
Collectivités territoriales . |
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
La protection de nos concitoyens face aux risques et aux accidents de tous
ordres est l'une des responsabilités essentielles de la
sécurité intérieure, au même rang que la
sécurité publique. A ce titre, les catastrophes naturelles ou
industrielles qui ont frappées notre pays ces dernières
années ont révélé, dans des conditions souvent
dramatiques, l'utilité de cette mission aux yeux de nos concitoyens.
Aussi, l'organisation collective de la sécurité de nos
concitoyens en matière d'incendie et de secours est l'une des
compétences pour laquelle il ne saurait être question de
déroger au
principe d'égalité de traitement pour
tous
.
Ce principe, inscrit dans le préambule de notre Constitution
-« une même sécurité des citoyens face aux
calamités »- est pourtant aujourd'hui
mis en
péril
.
En effet, le dispositif juridique échafaudé au fil des ans pour
répondre à cet impératif se caractérise par un
enchevêtrement complexe et ambigu des compétences au point de
rendre leur exercice contradictoire.
Ainsi, si le maire et le préfet exercent leur autorité sur les
services d'incendie et de secours dans le cadre de leurs pouvoirs respectifs de
police, la loi du 27 février 2002 relative à la démocratie
de proximité transfère au département d'ici le
1
er
janvier 2006
la totalité du financement des moyens
humains, matériels et d'immobiliers des Services départementaux
d'incendie et de secours (SDIS) alors que la mise en oeuvre
opérationnelle de ces moyens lui échappe totalement
,
notamment en matière d'organisation, de choix des matériels ou de
gestion des carrières.
Une seule voie peut permettre de corriger les imperfections que sont :
- la
séparation entre le prescripteur des dépenses et le
payeur
, source de dilution des responsabilités ;
- l'
inégalité
de traitement
pour le citoyen
consécutive au mode de financement des services d'incendie et de secours.
Cette solution consiste à
rendre à l'Etat la
responsabilité et l'exercice d'une compétence
régalienne
.
Bien loin de contrer le mouvement de décentralisation, ce choix est
celui d'une décentralisation bien comprise dans laquelle l'Etat se
concentre sur son coeur de métier et peut ainsi transférer au
profit des collectivités les domaines d'action qui n'engagent pas la
cohésion nationale.
De plus, rendre à l'Etat la compétence qui lui revient dans le
domaine des services d'incendie et de secours permet d'offrir aux
sapeurs-pompiers :
- un déroulement de carrière beaucoup plus valorisant au sein
d'un
corps national unique
;
- des conditions d'exercice mieux adaptées aux exigences de leur
profession, en particulier dans les zones sensibles où ils sont parfois
pris à partie au cours de leurs interventions ;
- la reconnaissance du risque inhérent à leur métier.
Cette réorganisation clarifierait enfin le système tout en
garantissant l'égalité de traitement et l'efficacité du
service que sont en droit d'attendre nos concitoyens.
En outre, elle permettrait de renforcer durablement les corps de
sapeurs-pompiers volontaires qui pourraient être intégrés
aux forces de réserve et bénéficier de contrats de
volontariat aussi attractifs que ceux proposés par les armées.
Enfin, en ce qui concerne le financement du retour de cette compétence
à l'Etat, un dispositif transitoire organisera une sortie progressive du
dispositif actuel afin de ne pas entraîner une surcharge
financière brutale pour l'Etat.
Pour toutes ces raisons, et en premier lieu au nom de la nécessaire
égalité des citoyens et de leur droit à la
sécurité, je vous demande, Mesdames et Messieurs les
sénateurs, de voter la présente proposition de loi.
PROPOSITION DE LOI
Article 1
er
Toutes les compétences en matière de protection et de secours contre l'incendie et les catastrophes naturelles ou industrielles sont transférées à l'Etat.
Article 2
Les
sapeurs-pompiers professionnels sont des fonctionnaires de l'Etat, régis
par la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires
relatives à la fonction publique de l'Etat.
Les modalités de leur intégration dans les cadres de la fonction
publique de l'Etat sont fixées par décret en Conseil d'Etat.
Article 3
Les
modalités de dévolution à l'Etat des biens affectés
aux services d'incendie et de secours sont fixées par décret en
Conseil d'Etat.
Sont abrogées toutes les dispositions contraires à la
présente loi.
Article 4
Il est institué une période transitoire de cinq ans à compter de l'adoption de la présente loi durant laquelle l'Etat est autorisé à prélever de manière dégressive sur les dotations aux départements et aux établissements publics intercommunaux les ressources nécessaires à l'exercice des compétences transférées aux termes de la présente loi. La dégressivité de ce prélèvement, liée dans son volume à l'indice des prix à la consommation, est fixée par décret en Conseil d'Etat.
Article 5
Il est créé un comité départemental de la sécurité civile composé des élus locaux, des sapeurs-pompiers, de représentants de la sécurité sociale et des entreprises présentant un risque industriel. Ce comité est consulté par le préfet pour toutes les questions liées à l'organisation territoriale du service d'incendie et de secours et à la promotion du volontariat.
Article 6
Les dépenses occasionnées par la présente loi seront compensées à l'échéance du délai prévu à l'article 4 à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux taxes prévues par les articles 575 et 575 A du Code général des impôts.