N° 137
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2004-2005
Annexe au procès-verbal de la séance du 21 décembre 2004
PROPOSITION DE LOI
visant à instituer un statut des collaborateurs de cabinet des collectivités territoriales ,
PRÉSENTÉE
Par MM. Jean-Claude GAUDIN, Jean-Paul ALDUY, Pierre ANDRÉ, José BALARELLO, René BEAUMONT, Michel BÉCOT, Claude BERTAUD, Roger BESSE, Laurent BÉTEILLE, Jean BIZET, Jacques BLANC, Paul BLANC, Mmes Brigitte BOUT, Paulette BRISEPIERRE, MM. Louis de BROISSIA, François-Noël BUFFET, Christian CAMBON, Jean-Claude CARLE, Gérard CÉSAR, Jean-Pierre CHAUVEAU, Marcel-Pierre CLÉACH, Christian COINTAT, Gérard CORNU, Mme Isabelle DEBRÉ, MM. Robert DEL PICCHIA, Christian DEMUYNCK, Gérard DÉRIOT, Michel DOUBLET, Alain DUFAUT, André DULAIT, Mme Bernadette DUPONT, MM. Louis DUVERNOIS, Hubert FALCO, Jean FAURE, André FERRAND, Alain FOUCHÉ, Bernard FOURNIER, René GARREC, Mme Joëlle GARRIAUD-MAYLAM, MM. Patrice GÉLARD, Alain GÉRARD, François GERBAUD, Charles GINÉSY, Francis GIRAUD, Paul GIROD, Philippe GOUJON, Alain GOURNAC, Mme Adeline GOUSSEAU, MM. Louis GRILLOT, Georges GRUILLOT, Charles GUENÉ, Michel GUERRY, Hubert HAENEL, Mmes Françoise HENNERON, Marie-Thérèse HERMANGE, MM. Michel HOUEL, Jean-François HUMBERT, Mme Christiane HUMMEL, MM. Benoît HURÉ, Jean-Jacques HYEST, Pierre JARLIER, Jean-Marc JUILHARD, Mme Christiane KAMMERMANN, M. Roger KAROUTCHI, Mme Elisabeth LAMURE, MM. André LARDEUX, Robert LAUFOAULU, Jean-René LECERF, Dominique LECLERC, Jacques LEGENDRE, Jean-François LE GRAND, Philippe LEROY, Marcel LESBROS, Gérard LONGUET, Alain MILON, Jean-Luc MIRAUX, Bernard MURAT, Philippe NACHBAR, Paul NATALI, Charles PASQUA, Jean PÉPIN, Jacques PEYRAT, Jackie PIERRE, Hugues PORTELLI, Mme Catherine PROCACCIA, MM. Jean PUECH, Henri de RAINCOURT, Charles REVET, Henri de RICHEMONT, Yves RISPAT, Roger ROMANI, Mme Janine ROZIER, MM. Bernard SAUGEY, Louis SOUVET, Yannick TEXIER, André TRILLARD, François TRUCY, Jacques VALADE, Alain VASSELLE et Jean-Paul VIRAPOULLÉ,
Sénateurs.
( Renvoyée à la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement).
Collectivités territoriales. |
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Les collaborateurs de cabinet des autorités territoriales exercent, aujourd'hui, un rôle décisif et reconnu dans la bonne marche des collectivités dirigées par les élus qui les emploient. Ce nouveau métier s'est d'ailleurs considérablement professionnalisé et un nombre grandissant de diplômes de troisième cycle préparent à ces fonctions.
Cependant, la fonction de collaborateur de cabinet est par nature ambivalente : elle mêle les contraintes qui s'imposent à tout agent public aux spécificités qui s'attachent au caractère politique des missions qui leur sont dévolues. Le collaborateur de cabinet est au service exclusif de l'autorité territoriale qui l'a recruté, mais il est rémunéré par la collectivité à laquelle il est rattaché et doit, par conséquent, agir dans le respect de l'intérêt public local.
Les textes en vigueur aujourd'hui placent les collaborateurs de cabinet dans une situation d'extrême précarité, ce qui va à l'encontre du professionnalisme croissant de leur fonction.
En particulier, les règles relatives au niveau de rémunération des collaborateurs de cabinet sont particulièrement pénalisantes. Liant, en effet, la rémunération des collaborateurs de cabinet à celle du fonctionnaire le plus élevé de la collectivité, elles ne garantissent pas des possibles baisses de salaires, lors du changement de ce dernier. Par ailleurs, malgré plusieurs prises de position des différents ministres concernés en faveur d'une prise en compte, dans le calcul de la rémunération, de tous les avantages dudit fonctionnaire, en sus de son traitement, les organismes en charge du contrôle de légalité adoptent fréquemment une interprétation divergente et s'en tiennent à la prise en compte du seul traitement, hors primes, ce qui abaisse d'autant le plafond de rémunération des collaborateurs de cabinet.
C'est pourquoi, les associations de collaborateurs, de droite comme de gauche, oeuvrent pour la reconnaissance d'un véritable statut.
Ainsi, le 27 janvier 2004, l'Association des collaborateurs de cabinet des collectivités locales issus de la droite républicaine et du centre (Collcab) et l'Association des directeurs de cabinet des collectivités locales à direction socialiste et républicaine ont-elles signé ensemble une « Charte pour l'amélioration du statut des collaborateurs de cabinet des collectivités territoriales ».
La présente proposition de loi reprend les éléments contenus dans cette charte commune.
L' article 1 er réunit l'ensemble des dispositions applicables aux collaborateurs de cabinet, dans une nouvelle rédaction de l'article 110 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale.
En premier lieu, en ne modifiant pas les dispositions législatives existantes, il rappelle la liberté de choix de l'autorité territoriale lors du recrutement du collaborateur et de la responsabilité de ce dernier devant elle seule.
Il rappelle également que la nomination de non-fonctionnaires à ces emplois ne leur donne aucun droit à être titularisés dans un grade de la fonction publique territoriale et renvoie à un décret en Conseil d'État la détermination de l'effectif maximal des membres des cabinets.
Le paragraphe II de l'article 110 est relatif à la rémunération des collaborateurs.
Tout d'abord, il énonce des assurances relatives à la rémunération des collaborateurs de cabinet en confirmant l'interprétation extensive de la règle dite des « 90 % », instaurée en 1998 par le ministre de la Fonction publique. C'est-à-dire qu'il est désormais possible d'octroyer au collaborateur de cabinet une somme qui ne peut être supérieure à 90 % de celle qui correspond à l'indice terminal de l'emploi du fonctionnaire occupant l'emploi administratif ou technique fonctionnel (ajout) de direction le plus élevé de la collectivité ou de l'établissement public.
Cette somme intègre tous les éléments constitutifs de la rémunération tels qu'ils découlent de l'article 20 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983.
De plus, la présente proposition de loi garantit le niveau de rémunération contre les risques d'une réévaluation à la baisse, lors du changement du responsable administratif ou technique fonctionnel de référence.
Le paragraphe III de l'article 110 clarifie la rédaction de l'article 21 de la loi n° 90-1067 du 28 novembre 1990 relative à la fonction publique territoriale et portant modification de certains articles du Code des communes, afin qu'un collaborateur de cabinet de collectivité locale puisse bénéficier d'un logement et d'un véhicule de fonction.
Par ailleurs, la dernière phrase de ce paragraphe III permet aux collaborateurs de bénéficier de frais de représentation adaptés à leur fonction.
Enfin, le paragraphe IV de l'article 110 traite de la fin du contrat des collaborateurs. Actuellement, les collaborateurs de cabinet qui ne sont ni des salariés de droit commun, protégés par le Code du travail, ni des agents contractuels de la fonction publique territoriale, ne bénéficient d'aucune indemnité de licenciement. Par ailleurs, la durée du préavis auquel est tenu leur employeur est inférieure à celle généralement admise dans le droit commun des contrats. Cet article vise donc à permettre aux collaborateurs de cabinet de bénéficier d'une durée de préavis normale et d'une indemnité de licenciement.
Tel est l'objet de la présente proposition de loi.
PROPOSITION DE LOI
Article 1 er
L'article 110 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale est ainsi rédigé :
« Art. 110. - I. - L'autorité territoriale peut, pour former son cabinet, librement recruter un ou plusieurs collaborateurs.
« La nomination de non-fonctionnaires à ces emplois ne leur donne aucun droit à être titularisés dans un grade de la fonction publique territoriale.
« Un décret en Conseil d'État détermine l'effectif maximal des membres des cabinets en fonction, pour les communes, départements, régions et établissements publics de coopération intercommunale, de leur importance démographique et, pour les établissements publics administratifs, du nombre de fonctionnaires employés.
« Ces collaborateurs ne rendent compte qu'à l'autorité territoriale auprès de laquelle ils sont placés et qui décide des conditions et des modalités d'exécution du service qu'ils accomplissent auprès d'elle. Cette disposition ne saurait interdire aux juridictions compétentes et aux autorités administratives chargées du contrôle de légalité d'exercer leurs missions dans les conditions du droit commun.
« II. - La rémunération individuelle de chaque collaborateur de cabinet est fixée par l'autorité territoriale. En aucun cas, cette rémunération ne doit être supérieure à 90 % de celle qui correspond à l'indice terminal de l'emploi du fonctionnaire occupant l'emploi administratif ou technique fonctionnel de direction le plus élevé de la collectivité ou de l'établissement public. Elle intègre tous les éléments constitutifs de la rémunération tels qu'ils découlent de l'article 20 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires.
« En cas de changement concernant le fonctionnaire de référence, ce changement ne pourra pas aboutir, pour le collaborateur de cabinet, à une situation moins favorable que la situation antérieure.
« En l'absence de fonctionnaire occupant un tel emploi administratif fonctionnel de direction, cette rémunération ne doit pas être supérieure à 90 % de celle qui correspond à l'indice terminal du grade détenu par le fonctionnaire territorial titulaire du grade le plus élevé en fonction dans la collectivité territoriale.
« L'exercice des fonctions de collaborateur de cabinet ouvre droit à la perception de rémunérations accessoires, dans la limite et par équivalence de celles dont bénéficie l'ensemble des agents non-titulaires de droit public.
« III. - Dans les mêmes conditions que celles prévues par l'article 21 de la loi n° 90-1067 du 28 novembre 1990 relative à la fonction publique territoriale, un logement et un véhicule de fonction peuvent être attribués, par nécessité absolue de service, à un seul emploi de collaborateur de cabinet du président de conseil général ou régional, d'un maire d'une commune de plus de 5 000 habitants ou d'un président d'un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre de plus de 20 000 habitants. Les frais de représentation inhérents aux fonctions des collaborateurs de cabinet sont fixés par décision de l'organe délibérant de la collectivité territoriale ou de l'établissement public de coopération intercommunale.
« IV. - Un collaborateur de cabinet ne peut être licencié, par l'autorité territoriale qui l'emploie avant le terme de son engagement, qu'après un préavis de trois mois qui lui est notifié par lettre recommandée avec accusé de réception. Le même délai de préavis s'applique lorsque le contrat prend fin par arrivée du terme du mandat électif de l'autorité territoriale de rattachement, et ce pour quelque cause que ce soit.
« L'autorité territoriale de rattachement peut dispenser le collaborateur de cabinet de l'exécution de son préavis, sous réserve du versement d'une indemnité correspondante.
« Toutefois, aucun préavis n'est nécessaire en cas de licenciement prononcé, soit en matière disciplinaire, soit pour inaptitude physique, soit à la suite d'un congé sans traitement d'une durée égale ou supérieure à un mois, soit au cours ou à l'expiration d'une période d'essai. »
Article 2
En conséquence du III de l'article 110 de la loi n°84-53 du 26 janvier 1984 résultant de l'article 1 er de la présente loi, l'avant dernière phrase du dernier alinéa de l'article 21 de la loi n°90-1067 du 28 novembre 1990 relative à la fonction publique territoriale est ainsi rédigée :
« Dans les mêmes conditions, un logement et un véhicule de fonction peuvent être attribués, par nécessité absolue de service, à un seul emploi de collaborateur de cabinet du président de conseil général ou régional, d'un maire d'une commune de plus de 5 000 habitants ou d'un président d'un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre de plus de 20 000 habitants. »
Article 3
Les charges éventuelles qui résulteraient, pour les collectivités locales, de l'application de la présente loi sont compensées à due concurrence par une augmentation de la dotation globale de fonctionnement et de la dotation générale de décentralisation.
Les charges éventuelles qui résulteraient pour l'État de l'application de la présente loi sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux tarifs visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.