N° 383
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1999-2000
Annexe au procès-verbal de la séance du 6 juin 2000 |
PROPOSITION DE LOI
tendant à assurer la sincérité des listes électorales ,
PRÉSENTÉE
PAR MM. Bertrand DELANOË, Claude ESTIER, Mme
Danièle POURTAUD
et les membres du groupe socialiste et
apparentés,
Sénateurs.
(Renvoyée à la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement).
Elections et référendums. |
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Les instructions judiciaires relatives à l'inscription de faux électeurs sur les listes électorales de Paris portent sur l'existence d'un système organisé de fraudes électorales dans la capitale. De telles atteintes à la démocratie sont intolérables. Elles touchent à l'essence même du pacte républicain qui unit les citoyens de notre pays. Elles ternissent l'image d'une ville qui s'est identifiée tout au long de son histoire au progrès de la démocratie de la République.
Les enquêtes déclenchées notamment par les plaintes d'élus socialistes parisiens suivent leur cours. Il faut souhaiter, dès lors que les faits sont avérés, qu'elles débouchent sur des sanctions exemplaires à l'encontre de ceux qui ont bafoué le suffrage universel.
Mais il convient également de tout mettre en oeuvre pour que soient garanties à l'avenir la sincérité et la transparence de l'établissement des listes électorales sur l'ensemble du territoire national.
C'est l'objet de cette proposition de loi. Il paraît en effet nécessaire de préciser et de renforcer le cadre législatif permettant notamment au préfet d'intervenir plus efficacement dans ce domaine.
Plutôt qu'une hasardeuse refonte des listes électorales, qui à Paris contraindrait plus d'un million d'électeurs à se rendre en mairie d'ici le 31 décembre 2000, et dont le statut juridique est incertain, cette proposition de loi vise à permettre un contrôle effectif de l'établissement des listes électorales.
A cette fin, elle poursuit les objectifs suivants :
- élargir la composition des commissions administratives en l'étendant aux maires d'arrondissement ou à leur représentant dans les villes de Paris, Lyon, Marseille ( article 1 ) ;
- donner à ces commissions les moyens d'assurer, dans la transparence, la sincérité des listes électorales, en leur conférant des pouvoirs accrus ( article 2 ) ;
- conférer au préfet un pouvoir de saisine de la commission administrative ( article3 ) dans les conditions suivantes :
• en cas de doute sérieux sur la sincérité de la liste électorale, celle-ci serait invitée à statuer de nouveau entre le 1er janvier et le 15 février ;
• le préfet pourrait alors demander aux autorités gestionnaires des fichiers administratifs de transmettre ces informations aux commissions administratives dans le respect de la confidentialité et des dispositions relatives à la loi « informatique et libertés » ;
Cette disposition permettrait à ces commissions de vérifier notamment les conditions de domiciliation des électeurs inscrits sur les listes électorales ;
- accroître les sanctions contre la domiciliation fictive des électeurs ( articles 4 et 5 ).
L'adoption de cette proposition de loi permettra d'assurer l'organisation des prochaines consultations électorales à Paris dans des conditions incontestables de transparence et de sincérité.
PROPOSITION DE LOI
TITRE I
DISPOSITIONS VISANT À AMÉLIORER LA TRANSPARENCE DE LA PROCÉDURE D'ÉTABLISSEMENT DES LISTES ÉLECTORALES
Article 1er
I - Dans le deuxième alinéa de l'article L.17 du code électoral, après les mots : « du maire ou de son représentant », sont insérés les mots : « , le cas échéant du maire d'arrondissement ou de son représentant ».
II - Après le deuxième alinéa de l'article L.17 précité, est inséré l'alinéa suivant :
« Lorsqu'il est fait application du deuxième alinéa de l'article L. 38, des représentants des services de l'Etat concernés sont membres de droit de la commission».
Article 2
Après le deuxième alinéa de l'article L.17 du code électoral, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« La commission administrative procède à tous contrôles et vérifications utiles pour l'exécution de la mission qui lui est impartie. Les mairies et les services de l'Etat sont tenus de fournir tous les renseignements et de communiquer tous les documents nécessaires à l'exécution de leur mission».
Article 3
Après le premier alinéa de l'article L.38 du code électoral, sont insérées les dispositions suivantes :
« Si le préfet estime qu'un doute sérieux existe sur la sincérité de la liste électorale au regard de l'article L.11, il peut inviter la commission administrative à se saisir à nouveau, nonobstant les dispositions du deuxième alinéa de l'article L.16, du 1er janvier au 15 février. A cette fin, il peut demander aux autorités gestionnaires des fichiers administratifs les informations nécessaires à l'établissement de la liste électorale pour l'application de l'article L.11. Les informations contenues dans ces fichiers sont transmises à la commission administrative par l'intermédiaire de l'Institut national de la statistique et des études économiques. Les membres de la commission administrative sont tenus de respecter la confidentialité des informations qui leur sont communiquées.
« La commission administrative fait détruire les informations qui lui sont transmises soit à l'expiration des délais des recours prévus aux articles L.20 et L.25, soit, dans le cas où un recours a été introduit, après l'intervention de la décision définitive.
« Les règles relatives au traitement des informations nominatives prévues au présent articles sont fixées dans les conditions définies par la loi n°78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'information, aux fichiers et aux libertés» .
TITRE II
DISPOSITIONS VISANT À SANCTIONNER LA DOMICILIATION FICTIVE SUR LES LISTES ELECTORALES
Article 4
L'article L. 88 du code électoral est complété par les alinéas suivants :
« Quiconque, par des dons ou libéralités en argent ou en nature, par des promesses de libéralités, de faveurs, d'emplois publics ou privés ou d'autres avantages particuliers aura fait inscrire ou tenté de faire inscrire indûment sur une liste électorale, un ou plusieurs électeurs en méconnaissance des dispositions de l'article L.11, sera puni de deux ans d'emprisonnement et d'une amende de 100 000 francs ».
« Toute personne qui aura sciemment accepté de solliciter son inscription sur une liste électorale dans l'un des cas prévus à l'article L. 88-2 sera passible d'un emprisonnement d'un an et d'une amende de 50 000 francs ».
Article 5
Le premier alinéa de l'article L.117 du code électoral est ainsi rédigé :
« Les personnes physiques coupables des infractions prévues par les articles L. 88, L.88-2, L.88-3, L. 91 à L. 104, L. 106 à L. 109, L.111, L. 113 et L. 116 encourent également l'interdiction des droits civiques mentionnés aux 1e et 2e de l'article 131-26 du code pénal suivant les modalités prévues par cet article ».