Question de M. LAFFITTE Pierre (Alpes-Maritimes - RDSE) publiée le 14/11/2002

M. Pierre Laffitte demande à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie s'il lui paraît légitime que l'administration fiscale taxe la TVA aux sociétés innovantes à fort potentiel de développement qui ont pu obtenir des disponibilités en capital dès lors que plus de 5 % de leur chiffre d'affaires provient de ressources financières. Cela se présente pour toutes les sociétés qui consacrent l'essentiel de leur activité à l'innovation. Par voie de conséquence, le chiffre d'affaires est encore limité. La position de l'administration fiscale, si elle devait être confirmée, conduirait toutes les sociétés qui ont levé des fonds - qui doivent leur permettre d'effectuer de la recherche et du développement, par exemple en biotechnologie - soit à placer leur siège social hors de France, soit à ne pas placer les fonds qu'elles ont levés. Cela les met dans une situation économique moins favorable que leurs concurrents, qui avec le même potentiel financier peuvent recueillir les intérêts au-delà des 5 % (art. 212-2 b de l'annexe II du CGI). On notera que ce seuil ne paraît pas compatible avec les objectifs de la règle de neutralisation des opérations accessoires prévues à l'article 19-2 de la directive européenne. Dans le cadre de l'arrêt du 11 juillet 1996 de la Cour de justice des Communautés européennes, l'avocat général a très clairement indiqué que " le seuil rigide fixé par la France selon lequel les opérations accessoires ne sauraient dépasser le seuil de 5 %, ne paraissait pas compatible avec les objectifs de la règle de neutralisation des opérations accessoires prévues à l'article 19-2 de la directive ". La non-prise en compte du critère quantitatif a été plusieurs fois confirmée par les tribunaux dès lors que le critère accessoire est rempli, au motif que les opérations de placement de trésorerie ne constituent pas le prolongement direct, permanent et nécessaire d'une activité taxable. La plupart des start up n'ont ni les moyens ni l'envie de systématiquement attaquer l'administration fiscale devant un tribunal administratif ou en Cour de justice des Communautés européennes. Certes, un groupement de start up pourrait demander à une compagnie d'assurance d'assurer ses membres contre des excès de pouvoir de l'administration et donc obtenir, outre les remboursements des redressements indus, l'ensemble des frais et des dommages et intérêts. Il lui demande si la vraie solution ne serait pas de modifier l'article 212-2 b de l'annexe II du code général des impôts pour le mettre en conformité avec la 6e directive européenne et à ne mentionner que la notion d'accessoire sans prévoir de seuil.

- page 2701


Réponse du Ministre de l'économie, des finances et de l'industrie publiée le 27/03/2003

Pour le calcul du pourcentage de déduction des redevables de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) qui ne réalisent pas exclusivement des opérations ouvrant droit à déduction, l'article 212-2 b de l'annexe II au code général des impôts (CGI) prévoit qu'il est fait abstraction du chiffre d'affaires afférent aux opérations financières exonérées de ladite taxe et présentant un caractère accessoire par rapport à l'activité principale, à condition que ce produit représente au total 5 % au plus du montant du chiffre d'affaires total, toutes taxes comprises. La question de la prise en compte des produits financiers au dénominateur du rapport servant à la détermination du pourcentage de déduction prévu à l'article 212 de l'annexe II au code général des impôts déjà cité ne se pose toutefois que si ces produits sont placés dans le champ d'application de la TVA. Or il résulte de la jurisprudence communautaire et interne récente que ces produits ne sont pas placés dans le champ d'application de la taxe lorsqu'ils résultent de la simple gestion d'investissements, à l'instar d'un investisseur privé, qui ne constitue pas, de ce fait, une activité économique. Dans ce cas, et suivant la jurisprudence constante en ce domaine, les dépenses supportées pour la réalisation de cette activité ne peuvent, bien entendu, pas ouvrir droit à déduction. En revanche, les produits financiers tirés du placement de la trésorerie sont placés dans le champ d'application de la TVA et, en principe, exonérés, notamment lorsqu'ils constituent le prolongement direct, permanent et nécessaire de l'activité imposable de l'assujetti. C'est en ce sens qu'a jugé la Cour de justice dans son arrêt rendu le 11 juillet 1996 (Aff. C-306/94) citée par l'auteur de la question. La Cour a, de plus, estimé dans cette affaire que de tels placements ne sauraient être qualifiés d'opérations accessoires au sens de l'article 19 paragraphe 2 de la sixième directive, transposé en droit interne à l'article 212-2 b de l'annexe II au code général des impôts déjà cité. C'est, du reste, la raison pour laquelle elle n'a pas eu à se prononcer sur le critère quantitatif de 5 % applicable en France. Ce critère demeure donc applicable pour apprécier si des produits financiers, placés dans le champ d'application de la TVA mais qui présenteraient un caractère qualitativement accessoire par rapport à l'activité principale de l'assujetti, doivent, ou non, être pris en compte pour la détermination du pourcentage de déduction. S'ils excèdent ce seuil de 5 %, il est toutefois admis que de tels produits financiers puissent constituer un secteur distinct d'activités, dans les conditions prévues par l'article 213 de l'annexe II au code général des impôts. Au regard de ces règles, il pourra être procédé à un examen approfondi de la situation des jeunes entreprises auxquelles il est fait référence dans la question si son auteur communique à l'administration les dénominations sociales et les adresses de ces entreprises.

- page 1046

Page mise à jour le