II. LA POLITIQUE MENÉE EN MATIÈRE DE SÉCURITÉ ALIMENTAIRE
A. AU NIVEAU EUROPÉEN
1. Le Livre Blanc de la Commission sur la sécurité alimentaire
La Commission européenne a adopté, le 14 janvier 2000, un Livre Blanc sur la sécurité alimentaire alimentaire, qui se compose de deux volets.
Le premier volet prévoit la mise en place, en 2002, d'une autorité européenne alimentaire indépendante.
En collaboration avec les agences nationales, cette autorité collectera et analysera l'information nécessaire à l'élaboration d'avis scientifiques, à la demande des instances européennes et des Etats-membres.
Tout au long de l'année 2000, le Livre Blanc a été successivement débattu par les quatre formations compétentes du Conseil des ministres de l'Union européenne -agriculture, consommation, marché intérieur et santé-, par les représentants des consommateurs et des firmes agroalimentaires et, plus récemment, par le Parlement européen, qui a voté le 25 octobre dernier une résolution approuvant à une très forte majorité la création d'une agence alimentaire européenne.
Les débats ont notamment porté sur :
- les missions dévolues à l'Autorité, la majorité des Etats-membres refusant de lui confier la gestion du risque qui doit ressortir d'une décision politique ;
- la saisine de l'Autorité, les Etats-membres ayant souhaité que celle-ci ne soit pas réservée à la Commission ;
- la possibilité d'octroyer à l'Autorité des pouvoirs décisionnels, l'Autriche et le Luxembourg proposant de lui reconnaître une compétence d'approbation des produits ;
- le problème de possibles divergences entre l'Autorité et les agences nationales, posant la question d'un éventuel dernier mot de la première en matière de communication des risques.
Le 8 novembre 2000, la Commission européenne a présenté, sur la base du Livre Blanc et des débats qui ont suivi, une proposition de règlement instaurant une Autorité alimentaire européenne qui présenterait les caractéristiques suivantes :
Son champ d'action comprendrait, outre les questions de sécurité alimentaire, les domaines de la santé et du bien-être des animaux, la protection des végétaux, l'évaluation des problèmes liés aux organismes génétiquement modifiés, ainsi que l'éducation nutritionnelle.
L'Autorité alimentaire européenne se verrait confier l'évaluation des risques dans ces domaines, leur gestion restant de la compétence de la Commission.
Ses autres missions seraient les suivantes :
- la formulation d'avis scientifiques indépendants ;
- la formulation de recommandations à caractère technique visant à compléter les normes en vigueur en matière de sécurité alimentaire, de bien- être animal et de toute autre question entrant dans son champ d'action ;
- la collecte et l'analyse de données ;
- la gestion du système d'alerte rapide, dont le champ d'application est étendu à l'alimentation animale.
L'Autorité comportera un conseil d'administration, au sein duquel siégeront des représentants nommés par les Etats-membres, la Commission, le Parlement européen, ainsi que par les organisations de consommateurs et les industries agro-alimentaires. Ce conseil d'administration désignera, sur proposition de la Commission, un directeur exécutif pour une durée de cinq ans. Elle sera, en outre, assistée par un forum consultatif composé de représentants des agences alimentaires nationales.
Remplaçant les cinq comités scientifiques placés aujourd'hui auprès de la Commission européenne, huit panels scientifiques spécialisés, composés d'experts indépendants désignés par le conseil d'administration, après appel à manifestation d'intérêt, seront chargés d'examiner les questions soumises à l'Autorité et de formuler les avis.
Un comité scientifique, se substituant à l'actuel comité scientifique directeur, et composé des présidents des panels, ainsi que de six experts indépendants non membres d'un panel, coordonnera la procédure d'avis.
Destinée à agir en toute transparence, l'Autorité rendra publics les avis scientifiques rendus en son sein.
Le second volet du livre Blanc constitue un plan d'action en 84 points, destiné à actualiser et améliorer la législation alimentaire européenne, en vue notamment de permettre la mise en oeuvre d'une politique intégrée de protection du consommateur.
Outre l'adoption d'une directive alimentaire générale, ce plan d'action prévoit des adaptations portant :
- sur l'alimentation animale ;
Il s'agit notamment de prévoir l'approbation officielle de tous les usines produisant des aliments pour animaux, de clarifier les différentes catégories de produits (additifs, suppléments, produits médicamenteux) utilisés en alimentation animale, de définir des règles relatives à l'évaluation, l'autorisation et l'étiquetage des nouveaux aliments pour animaux, parmi lesquels figurent notamment ceux élaborés à partir d'organismes génétiquement modifiés. Est également programmée la suppression progressive des antibiotiques utilisés pour doper la croissance des animaux d'élevage. Enfin, les responsabilités des industriels de ce secteur devront être clarifiées.
- sur la lutte contre les zoonoses ;
Des mesures efficaces de lutte contre les zoonoses, notamment la salmonellose et la listériose, devront être mises en place, afin de prévenir les intoxications alimentaires.
Un système de déclaration obligatoire de ces zoonoses est prévu. Les données épidémiologiques rassemblées par les Etats devront être plus précises.
- sur l'organisation et la coordination des contrôles officiels dans l'Union européenne.
2. Le projet de réforme de la législation européenne en matière d'hygiène alimentaire
La Commission prépare actuellement une réforme concernant l'ensemble des règles d'hygiène alimentaire en vigueur dans l'Union européenne. Celle-ci devrait comporter plusieurs axes.
Elle consistera d'abord à regrouper sous la forme de quatre règlements les règles définies par les 17 directives intervenues en la matière depuis 1964, en distinguant les dispositions relatives à l'hygiène alimentaire, celles relatives au contrôle officiel des Etats-membres, et les règles de police sanitaire.
Cette réforme prévoit également de renforcer les règles d'hygiène applicables de la production à la commercialisation des denrées.
Ainsi, l'application des règles générales d'hygiène serait étendue au stade de la production primaire, des guides de bonnes pratiques professionnelles devant être mis en oeuvre par les producteurs.
En outre, le système HACCP (Hazard Analysis Critical Control Point), un dispositif d'autocontrôle consistant, pour l'opérateur, à renforcer lui-même la prévention des risques sur des points particuliers qu'il aura préalablement identifiés, sera rendu obligatoire pour l'ensemble du secteur agro-alimentaire, à l'exception de la production primaire.
La réforme rend, par ailleurs, obligatoire l'enregistrement de l'ensemble des entreprises du secteur alimentaire, qui se verront attribuer un numéro destiné à permettre le suivi de leurs produits tout au long de la chaîne qui va de la production à la commercialisation. Des procédures de retrait des denrées en cas de risques sérieux pour la santé compléteront ce dispositif.
Le projet préparé par la Commission autoriserait néanmoins un assouplissement de ces normes pour les produits destinés à la vente locale, ou qui sont fabriqués selon des modes traditionnels de production. De même, la mise en oeuvre du principe HACCP sera allégée pour les PME. L'élaboration de ces normes spécifiques ressortira de la compétence des Etats, mieux à même de prendre en compte les situations particulières.
Enfin, un nouveau classement des denrées animales sera élaboré, distinguant, d'une part, les produits non transformés tels que la viande, le lait, les oeufs, les poissons et les mollusques, et d'autre part les produits transformés à base de viande, de poissons ou d'oeufs.