EXAMEN DES ARTICLES
TITRE IV
DISPOSITIONS
RELATIVES À LA JEUNESSE
ET À L'ÉDUCATION
POPULAIRE
Article 8
Agrément des associations de
jeunesse et d'éducation populaire, et conditions d'octroi d'une aide
financière
I. Commentaire du texte du projet de loi
L'alinéa 1 de cet article précise un certain nombre de conditions que doivent respecter les associations déclarées ayant une activité dans le domaine de l'éducation populaire et de la jeunesse, pour pouvoir prétendre à l'agrément du ministère chargé de la jeunesse.
Ces conditions, qui auraient pu être définies par la voie réglementaire, sont au nombre de cinq, et tiennent à l'existence et au respect de dispositions statutaires garantissant la liberté de conscience, le respect du principe de non discrimination, leur fonctionnement démocratique, la transparence de leur gestion et permettant l'égal accès des hommes et des femmes à leurs instances dirigeantes (sauf circonstances particulières liées à l'objet ou à la qualité des membres de l'association), ainsi que l'accès des jeunes.
Au titre de l'article 6 de l'ordonnance de 1943, seules les associations ayant l'agrément « éducation populaire et jeunesse » pouvaient recevoir des subventions de l'État et des collectivités territoriales.
L'alinéa 2 prévoit que dorénavant cet agrément ne sera plus une condition préalable que pour l'octroi des subventions du seul ministre chargé de la jeunesse. Encore prévoit-il, à titre dérogatoire, que les associations agréées puissent également recevoir une aide pour une durée et des montants limités.
L'alinéa 3 précise que les conditions de l'agrément, de son retrait, et de l'octroi d'une aide financière aux associations non agréées seront définies par décret en Conseil d'État.
La possibilité d'un retrait de l'agrément était déjà évoquée par le deuxième alinéa de l'article 6 de l'ordonnance de 1943 précitée.
II. Position de l'Assemblée nationale
L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.
III. Position de la commission
Votre commission a adopté à cet article deux amendements tendant respectivement :
- à alléger la rédaction de l'alinéa 1 ;
- à préciser que la définition des conditions de l'agrément et de son retrait d'une part, et celle de l'octroi d'une aide financière aux associations non agréées d'autre part feront l'objet de décrets en Conseil d'État distincts.
Article 9
Conseil
national de l'éducation populaire et de la jeunesse
I. Commentaire du projet de loi
Cet article dote d'un statut législatif le Conseil national de l'éducation populaire et de la jeunesse, instance consultative qui fonctionne actuellement sur la base réglementaire - juridiquement suffisante - du décret de 1986 modifié en 1990.
Cette consécration symbolique ne se traduit pas par une évolution de ses attributions, du moins telles qu'elles sont décrites par le projet de loi, et la ministre a précisé, au cours de son audition, qu'il n'est pas prévu de modifier son rôle ni sa composition.
II. Position de l'Assemblée nationale
L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification
III. Position de la commission
La commission a adopté cet article sans modification.
Article 10
Conseil
national de la jeunesse
I. Commentaire du projet de loi
Cet article a pour objet de conférer un statut législatif au « conseil permanent de la jeunesse » créé par un arrêté de 1998, et qui est rebaptisé, à cette occasion « conseil national de la jeunesse ».
Tout comme à l'article précédent, on peut s'interroger sur l'opportunité d'inscrire dans la loi l'existence d'un organisme qui a pu être valablement constitué par un simple arrêté ministériel. Certes, le Gouvernement entend, par cette consécration législative, marquer l'intérêt qu'il porte à cette instance de consultation de la jeunesse, mais la multiplication de ce type d'initiatives contribue à vider un peu plus la distinction opérée par les articles 34 et 37 de la Constitution entre le domaine de la loi et celui du règlement.
II. Position de l'Assemblée nationale
L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification
III. Position de la commission
La commission a adopté cet article sans modification.
Article 11
(articles
L. 227-1, L. 227-3 et L. 227-4 à
L. 227-11
nouveaux du code de l'aide sociale et de la
famille)
Réglementation des centres de vacances et des centres de
loisirs sans hébergement accueillant des mineurs
I. Commentaire du projet de loi
1. Les paragraphes I et III de cet article procèdent à des modifications rédactionnelles dans l'intitulé du chapitre VII du code de l'action sociale et des familles consacré à l'accueil des mineurs hors du domicile, ainsi que dans l'article L. 227-1. La substitution du mot « accueil » au mot « hébergement » répond à la volonté de prendre en compte explicitement, non seulement les centres de vacances, mais les centres de loisirs sans hébergement.
2. Les paragraphes II et IV procèdent à différentes mesures de coordination respectivement dans le deuxième alinéa de l'article L. 227-1 et dans l'article L. 227-3 en substituant aux anciennes références réglementaires, les références aux articles L. 227-4 à L. 227-11 (nouveaux).
3 . Le paragraphe V regroupe les huit articles nouveaux qui instituent la nouvelle réglementation des centres de vacances et des centres de loisirs sans hébergement.
• Article L. 227-4 (nouveau)
L'alinéa 1 confie au préfet la responsabilité de la protection des mineurs accueillis en centres de vacances et en centre de loisirs sans hébergement.
L'alinéa 2 rend obligatoire, pour les centres de vacances et les centres de loisirs, l'élaboration d'un projet éducatif, soumis au contrôle de l'État.
• Article L. 227-5 (nouveau)
Le premier alinéa impose l'obligation aux organisateurs des centres de vacances et de loisirs de déposer une déclaration préalable au préfet. Il précise qu'une nouvelle déclaration est nécessaire en cas de modification des conditions de l'accueil et de l'exploitation des locaux. Il reconnaît au préfet la possibilité de s'opposer à l'organisation de l'accueil lorsque les conditions dans lesquelles il est envisagé présentent des risques pour la santé et la sécurité physique et morale des mineurs concernés, ou en cas d'absence de projet éducatif.
L' alinéa 2 oblige les organisateurs des centres ainsi que les exploitants des locaux où l'accueil se déroule à souscrire un contrat d'assurances garantissant les conséquences pécuniaires de leur responsabilité civile, ainsi que celle de leurs préposés et des participants aux activités proposées.
L' alinéa 3 fait obligation aux organisateurs des centres d'attirer l'attention des représentants légaux des mineurs sur leur intérêt à souscrire un contrat d'assurance.
L' alinéa 4 subordonne l'octroi d'une aide financière publique au respect des dispositions de l'article.
L' alinéa 5 renvoie à un décret du Conseil d'Etat la détermination des conditions d'application des dispositions de l'article et la définition des normes d'hygiène et de sécurité et des exigences de qualification des personnels.
• Article L. 227-6 (nouveau)
Cet article interdit aux personnes ayant été condamnées pour crime ou à une peine d'emprisonnement pour un certain nombre de délits, limitativement énumérés, d'exercer des fonctions, à quelque titre que ce soit, dans les centres de vacances et les centres de loisirs pour mineurs.
Ces délits sont :
* soit des atteintes à la personne humaine ; sont ainsi visées :
- les atteintes involontaires à l'intégrité de la personne humaine ;
- les agressions sexuelles ;
- le proxénétisme et les infractions assimilées ;
- la mise en péril des mineurs ;
* soit des appropriations frauduleuses, comme l'escroquerie et l'abus de confiance.
A ces délits, désignés par leur référence dans le code pénal, s'ajoute celui de provocation à l'usage de stupéfiants, visé à l'article L. 3421-4 du code de la santé publique.
• Article L. 227-7 (nouveau)
L'article L. 227-7 sanctionne pénalement le non-respect de certaines règles applicables à l'accueil des mineurs en centres de vacances et en centres de loisirs sans hébergement, en s'inspirant de certaines des sanctions prévues par les articles 49 et 50 de la loi du 16 juillet 1984 en matière d'enseignement des activités sportives ou de surveillance des établissements sportifs.
Il punit de six mois d'emprisonnement, et de 3 750 € d'amende (25 000 F) :
- le non-respect de l'obligation de déclaration préalable, ou de nouvelle déclaration, en cas de modification des conditions de l'accueil ;
- le non-respect des obligations d'assurance.
Il punit d'un an d'emprisonnement, et de 15 000 € d'amende (100 000 F) :
- le non-respect des incapacités professionnelles de l'article L. 227-6 ;
- l'inexécution des décisions prises par les préfets en matière de police administrative ;
- le fait de s'opposer « de quelque façon que ce soit » à l'exercice des fonctions de surveillance reconnues aux agents habilités du ministère de la jeunesse par l'article L. 227-8.
• Article L. 227-8 (nouveau)
L'article L. 227-8 pose les principes régissant le contrôle exercé par les fonctionnaires habilités et assermentés du ministère de la jeunesse sur les centres de vacances et les centres de loisirs sans hébergement.
Ces dispositions ont vocation à se substituer aux dispositions prévues par l'arrêté du 19 mai 1975 pour les centres de vacances et à combler l'absence de dispositif spécifique de contrôle pour les centres de loisirs sans hébergement.
Le premier alinéa confie la surveillance des centres de vacances et des centres de loisirs aux agents placés sous la double autorité du préfet et du ministre chargé de la jeunesse et des sports.
L'alinéa 2 confie la recherche et la constatation des infractions aux officiers de la police judiciaire ainsi qu'aux fonctionnaires du ministère de la jeunesse et des sports habilités à cet effet par le ministre, et assermentés dans des conditions définies en Conseil d'Etat.
L'alinéa 3 les autorise à pénétrer dans les locaux où se déroule l'accueil des mineurs, à l'exclusion des parties de ces locaux servant de domicile. Ils peuvent se faire communiquer tout document professionnel, et recueillir sur convocation et sur place les renseignements et justifications.
L'alinéa 4 précise que le procureur de la République doit être préalablement informé des opérations envisagées.
L'alinéa 5 limite les possibilités d'inspection au créneau 8 heures/20 heures, et subordonne une visite en dehors de ces horaires à des conditions strictes :
- un appel provenant de l'intérieur des locaux (conforme au demeurant à la règle instituée par l'article 59 du code pénal) ou une plainte ou réclamation ;
- une autorisation préalable du président du tribunal de grande instance.
Les alinéas 6, 7, 8, et 9 précisent la procédure à suivre en cas de refus de l'accès aux locaux. Les étapes en sont :
- la formulation d'une demande précisant les locaux à visiter, et les raisons de nature à justifier la visite ;
- une ordonnance rendue par le président du tribunal de grande instance mentionnant les lieux dont la visite est autorisée, et les nom et qualité de l'agent habilité à y procéder ; la visite s'effectuera sous le contrôle de ce magistrat qui peut se rendre sur place au moment de l'intervention ;
- la notification de l'ordonnance à la personne responsable des locaux ;
Les alinéas 10 et 11 précisent respectivement que l'ordonnance est exécutoire à titre provisoire, et que les procès-verbaux, transmis au procureur de la République dans les cinq jours, font foi jusqu'à preuve du contraire.
Enfin, l'alinéa 11 fait obligation aux personnels des centres de fournir tous renseignements nécessaires aux agents habilités dans l'exercice de leur mission de surveillance.
• Article L. 227-9 (nouveau)
Cet article pose les bases légales du pouvoir de police administrative reconnu au préfet à l'égard des personnes travaillant dans les centres de vacances et les centres de loisirs.
Le premier alinéa autorise le préfet, après avoir pris l'avis d'une commission mixte, comprenant à la fois des représentants de l'Etat et des représentants des mouvements de jeunesse et d'éducation populaire agréés, à prononcer des mesures d'interdiction temporaire ou permanents.
Le second alinéa autorise le préfet, en cas d'urgence, à prendre des mesures de suspension d'exercice, limitées à six mois, ou en cas de poursuite pénale, s'appliquant jusqu'à l'intervention d'une décision de justice définitive.
• Article L. 227-10 (nouveau)
Cet article donne une base légale aux pouvoirs de police administrative du préfet à l'égard des centres de vacances et des centres de loisirs sans hébergement.
Jusqu'à présent, ceux-ci ne pouvaient s'exercer :
- à l'égard des centres de vacances que sur le fondement de l'article 7 du décret du 29 janvier 1960, et de l'arrêté du 19 mai 1975 ;
- à l'égard des centres de loisirs sans hébergement, en l'absence de dispositions spécifiques, par le recours aux dispositions générales des articles L. 221-5 et L. 221-6 du code de la consommation qui autorisent respectivement le ministre compétent et le préfet, en cas de danger grave ou immédiat, à suspendre la prestation d'un service.
Le dispositif proposé par le projet de loi qui s'inspire en partie du dispositif de l'article 48 de loi du 16 juillet 1984 relatif à la police administrative des établissements sportifs, reconnaît au préfet :
- un pouvoir d'injonction ;
- un pouvoir de sanction .
• Article L. 227-11 (nouveau)
Cet article prévoit que les conditions d'application des pouvoirs de police des préfets sont précisés par décret en Conseil d'Etat.
4. Le paragraphe VI de l'article précise les délais d'entrée en vigueur de l'obligation faite aux organisateurs de centres et aux exploitants de souscrire un contrat d'assurance.
II. Position de l'Assemblée nationale
Outre des amendements rédactionnels ou de précision, l'Assemblée nationale a apporté à cet article plusieurs modifications :
• à l'article L. 227-5 (nouveau) elle a adopté des amendements n'imposant l'obligation de déclaration préalable qu'aux organisateurs de l'accueil, imposant l'obligation d'assurance aux exploitants des locaux comme aux organisateurs de l'accueil, et précisant que l'obligation d'une formation n'est imposée qu'aux organisateurs ;
• Elle a adopté un article L. 227-5-1 (nouveau) excluant les garderies périscolaires de l'obligation de déclaration préalable et de l'obligation d'établir un projet éducatif ;
III. Position de la commission
Votre commission a adopté six amendements aux dispositions incluses dans le paragraphe V de cet article :
• A l'article L. 227-5 (nouveau) , elle a adopté deux amendements :
* le premier a pour objet d'imposer l'obligation de déclaration préalable aux exploitants de locaux.
L'arrêté du 19 mai 1975 relatif au contrôle des centres de vacances prévoyait en effet deux déclarations distinctes :
- la déclaration des séjours de vacances, imposée aux organisateurs de l'accueil ;
- la déclaration de première ouverture, imposée à tout établissement dans lequel des séjours de vacances collectives de mineurs de plus de quatre ans sont organisés avec hébergement d'une manière permanente ou périodique.
Cette déclaration de première ouverture, qui doit être effectuée deux mois avant l'ouverture, a pour objet de permettre à l'administration de prendre connaissance, en temps utile, de la situation des locaux, de la nature de l'hébergement envisagé et des conditions d'hygiène et de sécurité.
Estimant qu'il serait regrettable de priver l'administration de cette possibilité d'exercer un contrôle préalable sur les locaux utilisés, votre commission vous proposera de restaurer par un amendement l'obligation de déclaration pour les exploitants de locaux, en précisant que, dans son esprit, celle-ci ne doit toutefois s'appliquer qu'aux locaux où l'hébergement est organisé de manière permanente ou périodique.
* Le second amendement est destiné à préciser la portée des garanties d'assurance en mentionnant explicitement que « les assurés sont tiers entre eux ».
Cette mention permettra de garantir que les personnes assurées au titre du contrat d'assurance que doivent contracter les organisateurs de l'accueil des mineurs sont bien considérées comme des tiers entre-elles, et qu'elles sont bien couvertes même dans l'hypothèse des dommages qu'elles se créent mutuellement.
Tel pourrait être le cas lorsque la responsabilité d'un enfant est engagée lors d'un accident dont serait victime un autre enfant du centre de vacances ou de loisirs.
• A l'article L. 227-6 (nouveau), elle a adopté un amendement pour compléter la liste des délits justifiant une incapacité professionnelle.
Votre commission relève que dans la liste des délits visés, l'article L. 227-6 comprend la provocation à l'usage de stupéfiants (article L. 3421-1 du code de la santé publique) mais non l'usage de stupéfiants (article L. 3421-1) alors que celui-ci était explicitement mentionné par la loi du 6 juillet 2000 parmi les motifs d'incapacités à l'enseignement ou à l'encadrement des activités physiques et sportives. Votre commission, qui considère que l'encadrement des mineurs ne mérite pas moins de précaution que celui des sportifs, vous proposera de corriger cette omission par un amendement .
• A l'article L. 227-7(nouveau), elle a adopté un amendement destiné à harmoniser l'échelle des sanctions pénales.
Votre commission a relevé une disparité entre les peines d'amendes sanctionnant l'obstruction aux missions de surveillance des centres de vacances et de loisirs, que le projet envisage de punir de 100 000 F d'amende, et l'obstruction aux missions de surveillance des établissements sportifs, punie d'une peine de 50 000 F, aux termes de l'article 50 de la loi du 16 juillet 1984.
Elle vous propose donc de procéder à l'harmonisation nécessaire, en alignant la sanction prévue à l'article L. 227-7 sur celle de l'article 50 de la loi de 1984 précitée.
• A l'article L. 227-8 (nouveau), la commission a adopté un amendement de façon à permettre aux agents de police judiciaire, de seconder, comme le prévoit le code de procédure pénale, les officiers de police judiciaire dans l'exercice de leurs fonctions.
• A l'article L. 227-9 (nouveau), votre commission a adopté un amendement pour ramener de six à trois mois la durée des mesures de suspension provisoire que peut prononcer le préfet.
Elle a estimé que, compte tenu de la gravité des mesures envisagées pour les intéressés, cette durée de trois mois constituait un délai suffisant pour réunir la commission consultative prévue au premier alinéa de l'article et prendre une décision selon la procédure régulière.
TITRE V
DISPOSITIONS RELATIVES
À L'ÉDUCATION
ET À LA COMMUNICATION
Article 12
(article L.621-3 nouveau code de
l'éducation)
Compétences du conseil de direction
de
l'Institut d'études politiques de Paris
I. Commentaire du texte du projet de loi
L'article 12 tend d'abord à conférer au conseil de direction de l'IEP de Paris les compétences en matière d'admission des étudiants aux formations dispensées par cet établissement d'enseignement supérieur et d'organisation des études.
Il a en outre pour objet de valider, à titre de précaution, les délibérations du conseil de direction prises en mars 2001, celles-ci visant à expérimenter une nouvelle procédure d'admission en première année.
1. Une validation législative de l'autonomie de l'IEP de Paris
- Le paragraphe I de l'article 12 a d'abord pour objet de consolider pour l'avenir le rôle actuel du conseil de direction de l'IEP de Paris quant à la définition des modalités particulières d'admission, qui autrement relèverait de la compétence du ministre de l'éducation nationale.
Compte tenu de la rédaction de l'article L. 612-3 du code de l'éducation, une validation législative s'impose pour reconnaître la compétence dudit conseil de direction pour fixer, à la place du ministre chargé de l'enseignement supérieur, les modalités particulières d'admission à cet Institut, qui relève de la catégorie des grands établissements.
Il est ainsi inséré un nouvel article L. 621-3 qui déroge aux dispositions du troisième alinéa de l'article L. 612-3 du code de l'éducation et qui reconnaît une compétence générale au conseil de direction pour fixer les conditions et modalités d'admission aux formations propres à l'Institut : ledit conseil détermine ainsi les critères et les procédures permettant d'assurer la sélection et le recrutement des élèves dont la scolarité sera sanctionnée par le diplôme de l'IEP de Paris ou par le certificat d'études politiques délivré par l'Institut.
Il a également compétence pour organiser l'ensemble des études, de la première année jusqu'au doctorat, comme le prévoyait l'article 5 du décret de 1985.
- Le paragraphe I dudit article vise ensuite les modalités particulières susceptibles d'être adoptées par le conseil de direction pour diversifier le recrutement parmi les élèves du second degré, notamment sur le plan social, et qui sont susceptibles de déroger aux procédures classiques de sélection à l'entrée de l'IEP.
Afin de « sécuriser » sur le plan juridique les diverses procédures d'admission différenciées mises en oeuvre depuis de nombreuses années, en particulier en faveur des étudiants étrangers, le paragraphe I de l'article 12 reconnaît à l'IEP de Paris le droit de conclure des conventions avec des établissements de l'enseignement secondaire ou supérieur, français et étrangers, ces conventions visant à associer lesdits établissements au recrutement de leurs élèves et étudiants par l'IEP.
2. Une validation de précaution des décisions du conseil de direction de l'IEP
Le paragraphe II de l'article 12 a été introduit dans le projet de loi à la suite du recours contentieux formé par un syndicat étudiant portant sur la nouvelle procédure d'admission en faveur des lycéens méritants des zones d'éducation prioritaire, ou assimilées, et mettant en cause les compétences exercées par le conseil de direction de l'IEP de Paris pour l'admission de ses étudiants.
Comme il a été dit précédemment, l'autonomie reconnue au conseil de direction, par le décret de 1985, ne semble pas conforme au principe posé par le troisième alinéa de l'article L. 612-3 du code de l'éducation qui stipule qu'« une sélection peut être opérée, selon des modalités fixées par le ministre de l'éducation nationale, pour l'accès aux grands établissements au sens de la présente loi ... ».
Compte tenu du risque juridique susceptible d'hypothéquer les conventions entre l'IEP et les lycées de ZEP pressentis, le paragraphe II de l'article 12 propose de garantir l'entrée en vigueur et la sécurité de la procédure supplémentaire d'admission à l'IEP de Paris, visant à diversifier le recrutement, en validant les décisions du conseil de direction du 26 mars 2001.
II. Le texte adopté par l'Assemblée nationale
Après avoir repoussé deux amendements de suppression présentés par MM. Georges Sarre et Bernard Accoyer, l'Assemblée nationale a adopté sans modification l'article 12 du projet de loi en complétant toutefois celui-ci par un amendement présenté par M. Pierre-Christophe Baguet tendant à étendre le dispositif « Sciences Po » à l'ensemble des établissements d'enseignement supérieur.
Dans un cadre expérimental, et sur la base d'un volontariat, les universités pourraient ainsi passer avec les établissements du second degré, des conventions dans le but de favoriser la diversification sociale de leur recrutement.
III. La position de la commission
- S'agissant du paragraphe I de l'article 12, la commission ne saurait remettre en question l'autonomie et le statut de Sciences Po, qui sont consacrés depuis le siècle dernier, et qui sont parfaitement justifiés compte tenu du rôle majeur de cette institution qui accueille aujourd'hui quelque 4 000 étudiants, dont 15 % d'étudiants étrangers, ou remettre en cause les procédures actuelles rigoureuses et diversifiées d'admission à tous les stades de la scolarité, ainsi que la situation des étudiants en cours d'étude.
Elle est ainsi favorable, dans un souci de sécurisation juridique, à une validation de l'article 5 du décret du 10 mars 1985, dont le sort est devenu très incertain après le recours de l'UNI, et qui donne compétence au conseil de direction de l'IEP de Paris pour fixer les conditions d'admission de ses étudiants.
La commission observe par ailleurs que le nouvel article L. 621-3 du code de l'éducation introduit par le paragraphe I de cet article, précise que ledit conseil peut proposer des procédures d'admission par voie de convention passées avec les établissements d'enseignement secondaire au supérieur, français ou étrangers, pour diversifier le recrutement social à Sciences Po : toutes les possibilités de démocratisation de l'IEP de Paris sont ainsi ouvertes pour l'avenir, pour peu que celles-ci répondent au principe d'égalité.
- S'agissant du paragraphe II de l'article 12 relatif à la validation, à titre de précaution, des décisions du conseil de direction du 26 mars 2001, visant à ouvrir aux meilleurs élèves des ZEP, hors concours, l'accès en première année, la commission est en revanche beaucoup plus réservée.
Cette procédure spécifique de recrutement, destinée à être appliquée dès la rentrée universitaire de 2001, a été adoptée par l'IEP de Paris sur le fondement juridique incertain du décret de 1985. De ce fait, la commission estime que le Parlement n'a pas à valider a posteriori une procédure juridiquement douteuse qui a toutes les chances d'être annulée par le tribunal administratif de Paris.
Outre le fait que le Parlement est mis en quelque sorte devant le fait accompli, ce dispositif apparaît critiquable à la commission, même s'il s'inspire du principe de la discrimination positive qui a été consacré au début des années 80 par la mise en place des zones d'éducation prioritaire.
Un tel dispositif, destiné à une vingtaine d'élèves, introduit d'abord incontestablement une inégalité de traitement entre les bacheliers des lycées classés en ZEP, puisque seuls sept lycées de trois académies ont été retenus selon des critères qui restent particulièrement vagues.
Il est par ailleurs incontestablement discriminatoire à l'égard des élèves méritants de lycées hors ZEP, qui resteront, eux, soumis au régime de droit commun du concours d'entrée, sauf s'ils ont obtenu une mention « très bien » au baccalauréat.
Dans la pratique, on peut craindre que les lycéens de ZEP retenus dans le cadre de ce dispositif soient surtout des enfants d'enseignants regroupés dans les classes dites « CAMIF » ou « MAIF », qui disposent, comme le montrent les statistiques, de tous les atouts pour réussir à Sciences Po.
Compte tenu de la rédaction du paragraphe I de l'article 12, qui n'appelle pas d'objection, l'IEP de Paris aura toute liberté, à partir d'une base législative désormais sûre, pour mettre en place de nouveaux dispositifs destinés à diversifier son recrutement : à titre d'exemple, des classes préparatoires « Sciences Po » pourraient sans difficultés être mises en place dans un certain nombre de lycées d'enseignement général classés en ZEP, une telle formule répondant, elle, au principe d'égalité devant le concours.
Par ailleurs, et compte tenu de la désaffection qui touche de plus en plus les filières scientifiques supérieures, la commission estime qu'il conviendrait de favoriser simultanément l'orientation des bacheliers méritants d'origine modeste vers ces filières, y compris vers les grandes écoles, qui ont besoin d'élèves brillants venant de tous les horizons.
En conséquence, la commission proposera de supprimer le paragraphe II de l'article 12 du projet de loi.
- S'agissant du paragraphe III de l'article 12, celui-ci étend aux universités le dispositif prévu pour l'IEP de Paris par le paragraphe I du même article.
Dans un cadre expérimental et fondé sur le volontariat, les établissements d'enseignement supérieur pourraient ainsi passer des conventions avec des établissements de l'enseignement secondaire pour favoriser la diversification sociale de leur recrutement. Une telle extension s'appliquerait également aux IEP de province, qui relèvent des universités, et qui étaient exclus par la rédaction initiale de l'article 12.
La commission considère qu'une telle disposition, qui est incontestablement de nature à démocratiser encore davantage l'accès à l'enseignement supérieur, est aussi susceptible de donner un nouvel élan à l'autonomie de nos universités qui sont trop souvent confrontées à une réglementation excessivement rigide.
Elle est donc favorable au maintien de ce paragraphe III, sous réserve des explications que le ministre chargé de l'enseignement supérieur ne manquera pas de produire en séance publique.
Sous réserve de ces observations, et de la suppression du paragraphe II, la commission a donné un avis favorable à l'adoption de cet article.
Article 13
(articles
30-1, 30-5, 39, 41 et 41-2-1 de la loi n° 86-1067
du 30 septembre
1986 relative à la liberté de communication)
Dispositif
anti-concentration applicable à la
télévision
numérique hertzienne terrestre
I. Commentaire du texte du projet de loi
Dans sa rédaction initiale, l'article 13 du projet de loi comportait trois paragraphes, le premier modifiant les conditions d'application aux services de télévision diffusés par voie hertzienne terrestre numérique du plafond de détention par une même personne du capital des sociétés détentrices d'autorisation, les deux derniers modifiant les conditions d'application du système anti-concentration aux services rediffusés par voie hertzienne terrestre numérique.
A. L'APPLICATION DU PLAFOND DE DÉTENTION PAR UNE MÊME PERSONNE DU CAPITAL DES SOCIÉTÉS DÉTENTRICES D'AUTORISATION
1. Le dispositif prévu par la loi du 1er août 2000
Il convient de rappeler sommairement les conditions d'élaboration et la portée des dispositions dont la modification est proposée au Parlement.
• L'extension à la télévision numérique de terre de la règle des 49%
Le plafond de détention par une même personne du capital d'une société titulaire d'une autorisation de service de télévision par voie hertzienne terrestre a son origine dans la décision n° 86-217 DC du 18 septembre 1986 du Conseil constitutionnel. La loi du 27 novembre 1986 a, en conséquence de cette décision, institué un plafond de détention de 25%, que la loi du 1 er février 1994 a porté à 49 %.
Cette règle figure dans le premier alinéa du I de l'article 39 de la loi du 30 septembre 1986, que la loi du 1 er août 2000 n'a pas modifié. Visant les « sociétés titulaires d'une autorisation relative à un service national de télévision par voie hertzienne terrestre », sans autre précision, elle est devenue applicable à l'ensemble des chaînes qui seront diffusées par voie hertzienne terrestre numérique.
• Une extension irréaliste
Toutes les études économiques, et le simple bon sens, montrent que le lancement de la télévision numérique de terre se fera largement grâce à la reprise sur ce support des chaînes créées pour le câble et pour le satellite. L'équilibre économique des chaînes thématiques est trop fragile et les ressources supplémentaires d'abonnement ou publicitaires trop incertaines pour que la trentaine de canaux disponibles en numérique de terre soient occupés, à côté des chaînes hertziennes traditionnelles actuellement diffusées en analogique, par des service spécifiques et nouveaux.
Or nombre des chaînes thématiques créées pour le câble et pour le satellite ont été conçues par les opérateurs traditionnels, TF1, M6 et Canal Plus, en fonction d'une stratégie globale de développement et de marketing qui implique souvent, de leur point de vue, la détention de parts de capital supérieures à 49 %. Ces opérateurs ont repoussé la perspective d'avoir à céder des parts de capital de leurs services thématiques, à la seule fin de participer à l'aventure incertaine de la télévision numérique de terre. Notons à titre d'illustration que M6 détient 50 % du capital de Série Club, 51 % du capital de Téva, 100 % du capital de M6 musique et de Fun TV ; Canal Plus détient 100 % de i Télévision et de Demain, ainsi que plus de 60 % de Multithématiques, société qui contrôle Planète, Seasons, etc. ; TF1 détient 100 % du capital de LCI et 20 % du capital de Série Club.
L'assouplissement de la règle du plafond de 49 % en fonction de cette situation est apparu nécessaire pour assurer la participation des diffuseurs hertziens traditionnels au lancement de la télévision numérique de terre.
• L'absence d'initiative du gouvernement et les solutions de fortune avancées lors de l'élaboration de la loi du 1 er août 2000
Le ministre de la culture et de la communication a déclaré à l'Assemblée nationale le 10 mai dernier, au cours de la première lecture du présent projet de loi, que l'assouplissement de la règle des 49 % avait été souhaité par le gouvernement mais qu'il n'avait pas été accepté par la majorité sénatoriale.
Il est utile de rappeler à cet égard que le gouvernement a élaboré le régime juridique du numérique de terre figurent dans la loi du 1 er août 2000 en méconnaissant parfaitement les réalités économiques du secteur audiovisuel et en ignorant totalement aussi bien les avis raisonnables prodigués par les opérateurs, que les propositions efficaces présentées par votre commission et adoptées par le Sénat en deuxième lecture.
Aussi la question du plafond de 49 % n'a-t-elle fait l'objet d'aucune initiative de sa part, et n'a-t-elle été abordée qu'en nouvelle lecture, au Sénat, sous la forme d'un amendement parlementaire dont votre rapporteur a dû proposer le rejet au Sénat, observation faite des graves défauts de ce texte élaboré dans la hâte à l'extrême fin du débat législatif 5 ( * ) .
Cet aboutissement est entièrement du à l'obstination, pour ne pas dire l'autisme, du gouvernement lors de la phase initiale d'élaboration de la loi. Aussi est-on surpris que le ministre de la culture et de la communication ait cru bon de réagir au juste rappel de cet arrière-plan, qui lui était fait le 10 mai à l'Assemblée nationale, en déclarant qu'il ne pouvait pas laisser réécrire l'histoire du travail gouvernemental et parlementaire, et en imputant à la majorité sénatoriale une situation dont le gouvernement est seul responsable.
2. La solution proposée
Le gouvernement ne s'est rendu aux objections et arguments des futurs opérateurs de la télévision numérique de terre que pour proposer au Parlement l'adoption d'un dispositif extrêmement contestable sur le plan juridique.
• L'application du plafond de 49 % serait soumise à un critère d'audience
Le I de l'article 13 du projet de loi propose pour le premier alinéa du I de l'article 39 de la loi du 30 septembre 1986 une nouvelle rédaction aux termes de laquelle le plafond de 49 % de détention par une même personne du capital ou des droit de vote d'une société titulaire d'une autorisation relative à un service national de télévision resterait appliqué à tout service diffusé par voie hertzienne terrestre, en mode analogique ou numérique, mais désormais à la condition que l'audience moyenne annuelle, tous supports confondus, du service, y compris ses rediffusions, dépasse 3 % de l'audience totale des services de télévision.
Le CSA serait chargé d'appliquer cette nouvelle règle dont les modalités seraient fixées par décret en Conseil d'État, la loi précisant simplement que les personnes franchissant le seuil de 3 % auraient un délai maximum d'un an pour se défaire de leur part de capital excédant le niveau de 49 %.
• Le dispositif proposé a été conçu afin que le plafond de 49 % ne frappe que les chaînes hertziennes actuellement diffusées en mode analogique
Aucune des chaînes thématiques existantes ne dépasse actuellement le taux de 1 % d'audience calculé par rapport au public potentiel de chacune.
Compte tenu de la tendance à l'éclatement de l'audience provoquée par l'extension continuelle de l'offre de télévision, il semble peu probable que le seuil de 3 % soit franchi dans un proche avenir par ces chaînes, et moins encore par celles qui seront créées pour le numérique de terre.
Cette analyse concerne surtout les chaînes thématiques, dont l'audience est par nature très fractionnée.
On peut imaginer en revanche qu'une chaîne de format généraliste proche de celui de M6 à ses débuts, créée pour la diffusion terrestre numérique, obtienne assez rapidement 3 % d'audience nationale et passe dès lors sous le régime du plafond de 49 %.
Quoiqu'il en soit, le système imaginé par le gouvernement donne satisfaction aux opérateurs, qui se sentent assurés, en moyenne période, de la stabilité du tour de table de leurs thématiques.
• Un double soupçon d'inconstitutionnalité
Dans son tardif et partiel ralliement aux réalités économiques du numérique de terre, le gouvernement a négligé les contraintes que la jurisprudence constitutionnelle impose à la modification du régime des libertés publiques.
(1) On notera d'abord que le mécanisme prévu au I de l'article 13 du projet de loi tombe directement sous le coup de la vigoureuse critique que le Conseil constitutionnel adressait dans sa décision n° 84-181 DC du 10 octobre 1984, à d'éventuelles dispositions législatives qui « imposeraient à tout moment aux personnes possédant ou contrôlant les quotidiens visés le respect de plafonds dont le dépassement peut dépendre du succès auprès du public desdits quotidiens ou des mécomptes des quotidiens concurrents » . De telles dispositions « porteraient ainsi à la liberté de ces personnes et, plus encore, à la liberté des lecteurs, une atteinte directement contraire à l'article II de la Déclaration de 1789 » .
« Prises isolément ces dispositions seraient évidemment inconstitutionnelles » , énonçait le Conseil, avant de constater que les plafonds en cause, institués par les articles 10, 11 et 12 de la loi visant à limiter la concentration et à assurer la transparence financière et le pluralisme des entreprises de presse, n'étaient pas viciés par ce motif d'inconstitutionnalité dans la mesure où, en application de son article 13, « la loi elle-même exclut le jeu des plafonds au cas ... de développement de la diffusion dû à d'autres causes que des opérations d'acquisition ou de prise de contrôle ; que, donc, la liberté de création et de développement des quotidiens n'est en rien atteinte ni le libre choix des lecteurs » .
Rappelons d'une part que l'article 11 de la Déclaration de 1789, point de départ de l'analyse du Conseil Constitutionnel, énonce le principe de la libre communication des pensées et des opinions, et d'autre part que la décision du Conseil Constitutionnel n° 86-217 DC du 18 septembre 1986 place expressément la communication audiovisuelle sous le régime de la libre communication des pensées et des opinions énoncé par l'article 11 de la Déclaration, précisant en particulier que « l'objectif à réaliser est que les auditeurs et les téléspectateurs qui sont au nombre des destinataires essentiels de la liberté proclamée par l'article 11 de la Déclaration de 1789 soient à même d'exercer leur libre choix sans que les intérêts privés ni les pouvoirs publics puissent y substituer leurs propres décisions, ni qu'on puisse en faire l'objet d'un marché » .
Il est bien évidemment indispensable, dans ces conditions, d'appliquer au dispositif du I de l'article 13 du projet de loi le raisonnement énoncé par la décision n° 84-181 DC du 10 octobre 1984, ce qui conduit à constater que le jeu du seuil de 3 % d'audience, résultant indiscutablement du succès des services de télévision auprès du public, ferait manifestement obstacle à la liberté de création et de développement naturel de ces services et au libre choix des auditeurs . Il faut alors bien admettre que, pour reprendre l'expression de la décision n° 84-181, « ces dispositions seraient évidemment inconstitutionnelles » .
Et si l'on opposait à ce raisonnement la faible probabilité du dépassement du seuil de 3 % par un service numérique non soumis initialement au plafond de 49 %, il n'en resterait pas moins tout à fait possible qu'une chaîne généraliste nouvelle ou une thématique pouvant intéresser un assez large public atteignent rapidement ce seuil. Les projets élaborés à cet égard par certains « nouveaux entrants » n'ont d'ailleurs de sens que compte tenu de cette perspective.
(2) On notera par ailleurs que le I de l'article 13 du projet de loi ne satisfait pas l'objectif de valeur constitutionnel du pluralisme des courants d'expression socioculturels, appliqué à la communication audiovisuelle par la décision n° 86-217 DC du 18 septembre 1986 mentionnée ci-dessus. En effet, cette disposition permet à une même personne de posséder la totalité du capital de cinq sociétés détentrices d'autorisations relatives à des services nationaux de télévision par voie hertzienne terrestre numérique, à condition que chaque service ne dépasse pas le seuil de 3 % d'audience. Une même personne pourrait donc contrôler un ensemble de services atteignant 15 % de l'audience nationale, ce qui représente presque celle de M6, qui est assujettie à la règle des 49 %.
Un élément important du dispositif créé à la demande du Conseil Constitutionnel afin d'assurer le pluralisme dans la communication audiovisuelle disparaîtrait ainsi sans qu'aucune mesure compensatoire soit proposée et sans qu'aucun bouleversement du paysage audiovisuel le justifie.
On ne saurait en particulier soutenir que le passage de six à une trentaine du nombre des canaux utilisables pour la diffusion hertzienne terrestre crée une telle abondance dans l'offre de services de télévision qu'il serait possible d'entamer le démantèlement du dispositif anti-concentration de la loi de 1986, dont le plafond de 49 % est un élément crucial.
B. L'APPLICATION DU SYSTÈME ANTI-CONCENTRATION AUX SERVICES REDIFFUSÉS
1. Le dispositif prévu par la loi du 1er août 2000
La loi du 1 er août 1986 a prévu (au 14° de l'article 28-1 de la loi du 30 septembre 1986) l'encadrement par les conventions des services des modalités de rediffusion, intégrale ou partielle, d'un service de télévision en plusieurs programmes.
La rediffusion décalée, avec une grille de programmes éventuellement redistribuée afin de privilégier un aspect particulier, du programme d'une chaîne hertzienne traditionnelle sera en effet l'une des principales modalités de lancement de la télévision numérique de terre. Canal Plus a d'ores et déjà fait du « multiplexage » de ses programmes un argument de vente de son bouquet satellitaire.
Or la loi du 1 er août 2000 n'a pas prévu d'autorisation spécifique pour les programmes rediffusés (article 30-1 de la loi du 30 septembre 1986), mais a simplement transposé au numérique de terre le texte de l'article 30 de la loi de 1986 disposant que « l'usage des fréquences pour la diffusion de services de télévision par voie hertzienne terrestre en mode analogique est autorisé par le Conseil supérieur de l'audiovisuel » .
Cette rédaction, combinée avec celle du troisième alinéa de l'article 41 de la loi de 1986, qui prévoit la séparation juridique des sociétés titulaires d'autorisations pour le numérique contrôlées par une même personne, aboutit, selon l'exposé des motifs du projet de loi -car l'ensemble de ce dispositif est conçu et rédigé de façon particulièrement compliquée et obscure 6 ( * ) , à soumettre à l'obligation de filialisation et par suite à la règle des 49 % les rediffusions du programme d'une chaîne de télévision.
2. La solution proposée
La solution proposée par le projet de loi aux exigences découlant de la rédaction de la loi du 1 er août 2000, comporte deux volets, figurant au II et au III de l'article 13.
Le II prévoit l'octroi d'une autorisation à chaque programme consistant en la rediffusion intégrale ou partielle d'un service.
On peut estimer inopportune l'introduction dans la loi de 1986, déjà fort complexe, et dans le régime juridique de la télévision numérique de terre, particulièrement complexe, de la notion d'autorisation délivrée à un programme à côté de la notion habituelle et bien cernée d'autorisation délivrée à un service de télévision. Puisque l'objectif est, afin de dénouer le problème évoqué ci-dessus, de prévoir expressément la délivrance d'autorisations d'utiliser des fréquences pour la rediffusion d'un service autorisé, pourquoi introduire dans la loi la notion ambiguë de programme, au lieu de mentionner directement et simplement la possibilité d'autoriser des rediffusions ?
Compte tenu de la distinction opérée au II entre les autorisations relatives à des services et les autorisations relatives à des programmes (ces programmes étant en fait des services rediffusés), le III de l'article 13 du projet de loi reformule le troisième alinéa de l'article 41 de la loi de 1986, relatif au nombre maximum de sociétés titulaires d'autorisations pour la diffusion en mode numérique, contrôlées par une même personne, afin de soustraire les « programmes » rediffusés à l'obligation de filialisation et par voie de conséquence à la règle des 49 % quand le service principal n'y est pas lui-même soumis.
On ne saurait affirmer que le texte proposé à cet effet est d'une parfaite limpidité.
II. Position de l'Assemblée nationale
L'Assemblée nationale a précisé que l'audience prise en compte pour l'application du plafond de 49 % devait être calculée sur l'ensemble des vecteurs de diffusion du service considéré : voie hertzienne terrestre, câble et satellite.
C'est donc l'ensemble du marché qui sera pris en compte.
L'Assemblée nationale a réduit par ailleurs à 2,5 % le seuil d'audience au-delà duquel s'appliquera le plafond de 49 % de parts du capital d'un service de télévision détenues par une même personne. Il convient d'observer que pour Canal Plus, dont l'audience tend à régresser depuis quelques années et se situe en 2001 aux alentours de 3,8 % (contre 4,1 % en 2000 et 4,5 % en 1999), la fixation initiale du seuil à 3 % rendait tout à fait possible un franchissement permettant une concentration accrue du capital de la chaîne : qui peut aujourd'hui mesurer l'impact que la perte d'un grand contrat sportif pourrait avoir sur l'audience de Canal Plus ? La fixation du seuil à 2,5 % rend plus improbable l'acquisition du droit de franchir le plafond de 49 % de détention de parts du capital.
La fixation du seuil à 2,5 % apparaît donc plutôt positive du point de vue de l'efficacité du régime anti-concentration. Elle rend cependant plus probable à plus court terme la perspective du franchissement du seuil par une télévision du câble ou du satellite, dont les propriétaires devraient alors se conformer à la règle des 49 %. A titre d'exemple, on notera que RTL 9 représentait en 1999 3,8 % de l'audience dans la population accédant à l'offre élargie, c'est-à-dire à l'ensemble des chaînes distribuées par le câble et diffusées par satellite. Dans la mesure où le paysage de la télévision numérique de terre sera relativement proche de celui que l'offre élargie propose à l'heure actuelle, il est tout à fait concevable qu'une chaîne comme RTL 9 ou toute chaîne nouvelle à format plus ou moins généraliste, conçue pour un public non segmenté, franchisse à moyen terme le seuil de 2,5 %, concrétisant l'inconstitutionnalité du système proposé par le gouvernement.
L'Assemblée nationale a aussi adopté un amendement rédactionnel afin de préciser plus clairement, pour autant que cela soit possible, que le II de l'article 13 est destiné à modifier les conditions d'application de la règle qui autorise un opérateur à contrôler jusqu'à cinq chaînes hertziennes terrestres numériques.
L'Assemblée nationale a enfin réparé une erreur de référence introduite dans la loi du 30 septembre 1986 par la loi du 1 er août 2000, et une imprécision de la même loi en ce qui concerne le champ d'application du dispositif anti-concentration applicable aux services locaux de télévision terrestre numérique.
III. Position de la commission
Votre commission a poursuivi deux objectifs : d'une part proposer une modalité d'assouplissement du plafond de 49% conforme aux exigences de la jurisprudence constitutionnelle, d'autre part clarifier la rédaction des dispositions concernant la position des rediffusions à l'égard du système anti-concentration.
C. LE PLAFOND DE 49 %
• Le principe
Votre commission a estimé que l'application aux quelque 30 chaînes de formats très divers qui formeront la télévision numérique de terre du plafond de 49%, conçu pour les 5 ou 6 chaînes généralistes diffusables actuellement par voie hertzienne terrestre, était non seulement inopportune au regard des nécessités du lancement de la télévision numérique de terre, mais encore injustifié au regard des motifs de la création de ce plafond. La sauvegarde du pluralisme des courants d'expression socioculturels, unique raison d'être du dispositif anti-concentration de la loi du 30 septembre 1986, n'exige manifestement l'application du plafond de 49% qu'aux chaînes jouant un rôle à l'égard de l'objectif de pluralisme, celles dont les programmes contribuent à l'information politique et générale.
C'est d'ailleurs une faiblesse du système proposé par le gouvernement que soumettre potentiellement à la règle des 49% des chaînes thématiques tout à fait anodines du point de vue du pluralisme, comme par exemple une chaîne musicale ou une chaîne cuisine. Inversement, on ne comprends pas qu'une chaîne généraliste créée pour le numérique puisse attendre d'atteindre le seuil de 2,5 ou 3% pour être soumise à la règle des 49%. Indépendamment du problème de constitutionnalité mentionné ci-dessus, le dispositif proposé par le gouvernement ne me semble manifestement pas très bon.
Votre commission a donc retenu l'idée de limiter l'application du plafond de 49% aux services, existants ou futurs, dont les programmes contribuent à l'information politique et générale.
Le plafond resterait en conséquence appliqué aux services actuellement diffusés par voie hertzienne terrestre, dont les programmes généralistes contribuent manifestement à l'information politique et générale, y compris ceux de M6, dont la convention (art. 25) définit le format comme généraliste et exige (art. 27) une « politique de programmation de magazines et de documentaires favorisant la compréhension du monde contemporain, en abordant des domaines diversifiés tels que par exemple l'emploi, l'intégration, l'économie, la science, l'écologie, la consommation » .
Le plafond de 49% deviendrait par ailleurs en principe applicable, au moment de leur migration vers le numérique de terre, aux services existants du câble et du satellite contribuant à l'information politique et générale.
Le CSA aurait à préciser le contenu de cette notion dans le cadre du pouvoir de définir les catégories de services numériques, que lui attribue le § I de l'article 30-1. Il ne s'agit d'ailleurs pas d'une véritable novation. Les articles 10 et 11 (abrogés) de la loi du 23 octobre 1984, visant à limiter la concentration et à assurer la transparence financière et le pluralisme des entreprises de presse, faisaient des « quotidiens d'information politique et générale » une catégorie juridique spécifique, et cette notion est toujours utilisée dans le cadre du régime des aides publiques à la presse. Par ailleurs, la loi du 1 er août 2000 a introduit la notion d'émission d'information politique et générale dans l'article 13 de la loi de 1986, en confiant au CSA le soin de veiller particulièrement au respect du pluralisme dans ces émissions.
Si la proposition de votre commission est suivie, le CSA devra appliquer dans les conventions des services, prévues à l'article 28 de la loi de 1986, la définition qu'il aura élaborée. C'est principalement lors de l'élaboration des conventions liant le CSA et les services autorisés, qu'il conviendra de préciser la position de chaque service à l'égard du plafond de 49%.
A titre de première approche, il est possible de considérer qu'entreraient vraisemblablement dans la catégorie des services dont les programmes contribuent à l'information politique et générale les services généralistes et les services thématiques diffusant de façon autre qu'occasionnelle des journaux, documentaires, magazines ou débats consacrés à l'histoire, l'économie, l'information, la culture.
• L'exception
On aura noté que la position de principe évoquée ci-dessus ne résout pas le problème de LCI, dont TF1 refuse assez naturellement de partager le capital, et qui apparaît comme un des principaux services susceptibles de faciliter le lancement de la télévision numérique de terre.
Il parait alors opportun de tenir compte de cette situation en exemptant de la règle des 49% les services existants dont les programmes contribuent à l'information politique et générale, et dont le capital était détenu à plus de 49% par une même personne à la date d'entrée en vigueur de la loi du 1 er août 2000.
Cette exemption peut dans une certaine mesure être fondée sur le principe de non remise en cause des situations existantes légalement acquises intéressant une liberté publique (décision n° 84-181 DC du 10 octobre 1984). Il faut cependant tenir compte, en sens contraire, du fait que c'est à l'occasion de leur migration vers le numérique, migration facultative et ouvrant potentiellement la voie à une montée en puissance importante de leur audience, que les chaînes concernées verraient leur actionnariat remis en cause en l'absence de dérogation. Le principe du maintien des droits acquis n'est donc pas indiscutablement applicable au cas que nous examinons. En revanche, l'adoption d'une dérogation en faveur des chaînes existantes crée une inégalité entre leurs actionnaires et ceux des chaînes de même format créées pour le numérique de terre, qui seraient soumises au respect du plafond de 49%. Un risque d'inconstitutionnalité découle de cette inégalité que ne justifie pas indubitablement le principe constitutionnel du maintien des situations existantes légalement acquises intéressant une liberté publique. Il est utile de prévenir ce risque en instituant une mesure compensatrice.
• La compensation
Le nombre des autorisations que peut détenir pour la diffusion hertzienne terrestre numérique une personne bénéficiant de la dérogation mentionnée ci-dessus pourrait être réduit d'une unité afin de rétablir l'égalité avec les actionnaires des nouveaux services dont les programmes contribueront à l'information politique et générale. Cette formule aurait aussi l'avantage de maintenir le niveau global du dispositif anti-concentration en compensant la perte de portée de la règle des 49%, actuellement applicable à l'ensemble des services diffusés par voie hertzienne terrestre. En effet, en multipliant par un facteur de cinq ou six le nombre de services diffusés par voie hertzienne terrestre, la télévision numérique de terre ne va pas provoquer un bouleversement du paysage audiovisuel tel que les exigences relatives au pluralisme posées par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 86-127 DC du 18 septembre 1986 pourraient être globalement revues à la baisse.
En fin de compte, votre commission a estimé possible et opportun d'adopter les orientations suivantes :
- le plafond de 49% serait à l'avenir appliqué aux seuls services dont les programmes contribuent à l'information politique et générale ;
- il ne serait pas appliqué aux services contribuant à l'information politique et générale existant à la date d'entrée en vigueur de la loi du 1 er août 2000 et dont une même personne détient plus de 49% du capital ;
- le nombre des autorisations que peut détenir une personne bénéficiant de la dérogation précédente serait réduit d'une unité.
Votre commission a adopté un amendement de réécriture du I de l'article 13 en fonction de ces orientations.
D. L'APPLICATION DU SYSTÈME ANTI-CONCENTRATION AUX SERVICES REDIFFUSÉS
Convaincue que la façon la plus claire de mentionner dans la loi la possibilité de délivrer des autorisations pour la rediffusion de services autorisés par ailleurs est d'énoncer directement cette possibilité à l'endroit approprié, votre commission a adopté un amendement de réécriture du II de l'article 13 afin d'énumérer dans le premier alinéa de l'article 30-1 de la loi de 1986 les trois objets possibles de l'octroi d'une autorisation d'utiliser en télévision les fréquences hertziennes terrestres en mode numérique.
Votre commission a enfin adopté un amendement de réécriture du III de l'article 13 afin de clarifier la rédaction de cette disposition.
Sous réserve de l'adoption de ces trois amendements, la commission a émis un avis favorable à l'adoption de cet article .
Article 14
(article 45-3
de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986
relative à la
liberté de communication)
Obligations des distributeurs de
services
à l'égard de la chaîne parlementaire
I. Position de l'Assemblée nationale
L'article 45-3 de la loi de 1986, inséré par la loi du 1 er août 2000, impose à « tout distributeur de services » l'obligation de diffuser à ses frais les programmes de la chaîne parlementaire.
L'Assemblée nationale a précisé que cette obligation ne s'appliquait qu'aux distributeurs du câble et du satellite. En effet, dans sa rédaction actuelle, l'article 45-3 est applicable aux distributeurs de services diffusés en numérique de terre, ce qui est inutile puisque la loi attribue un canal de diffusion à la chaîne parlementaire, et absurde puisque les distributeurs du numérique de terre ne seront que des opérateurs commerciaux ou techniques dépourvus de toute maîtrise de l'offre.
II. Position de la commission
Votre commission a émis un avis favorable à l'adoption de cet article.
Article 16
(nouveau)
Prorogation de la validité des
diplômes
délivrés par les fédérations
sportives
I. Position de l'Assemblée nationale
Cet article additionnel adopté par l'Assemblée nationale a pour objet de proroger jusqu'au 31 décembre 2002 les décisions d'inscription sur la liste d'homologation des diplômes prises avant le 10 juillet 2000.
Avant le 10 juillet 2000, date d'entrée en vigueur de la loi du 6 juillet 2000, modifiant la loi de 1984 relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives, les diplômes fédéraux permettaient à leurs titulaires, sous réserve de leur homologation, d'enseigner ou d'encadrer contre rémunération les activités physiques et sportives.
La loi du 6 juillet 2000 précitée a supprimé cette possibilité, lui préférant un mécanisme de validation des expériences acquises dont les modalités devront être définies par un décret en Conseil d'Etat attendu pour la fin de l'année.
Dans l'intervalle, plusieurs fédérations sportives, et en particulier la fédération de voile, risquent de se trouver confrontées à une pénurie de moniteurs, particulièrement pendant la période estivale.
Cet article additionnel propose, pour prévenir ce risque, de proroger jusqu'à la fin de l'année 2002 la validité des diplômes fédéraux qui ont été homologués avant l'entrée en vigueur de la nouvelle législation.
II. Position de la commission
La commission a adopté cet article sans modification .
Article 17 (nouveau)
(article
L. 167-1 du code électoral)
Campagnes législatives sur les
antennes
des sociétés nationales de programmes
I. Position de l'Assemblée nationale
Le I de l'article L. 167-1 du code électoral, qui régit l'utilisation des antennes des sociétés nationales de programmes pour les campagnes législatives des partis et groupements, prévoyait la diffusion simultanée des émissions par les sociétés concernées. Il s'agit de France 2, de France 3 ainsi que de la Cinquième, devenue société nationale de programmes depuis l'entrée en vigueur de la loi du 1 er août 2000.
L'Assemblée nationale a supprimé l'obligation de diffusion simultanée, qui représente une contrainte inutile pour la programmation des chaînes publiques.
II. Position de la commission
Votre commission a émis un avis favorable à l'adoption de cet article .
Article 18 (nouveau)
(article
27 du code de l'industrie cinématographique)
Formules
d'accès au cinéma donnant droit
à des entrées
multiples
I. Position de l'Assemblée nationale
Cet article additionnel résulte d'un amendement du gouvernement proposant une nouvelle rédaction de l'article 27 du code de l'industrie cinématographique, déjà réécrit par la loi du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques, qui n'avait pas encore été publiée lors de l'examen par l'Assemblée nationale du présent projet de loi.
La promulgation de cette loi est maintenant intervenue. Aussi votre commission prendra-t-elle pour point de départ de son examen le texte de l'article 27 du code de l'industrie cinématographique, tel qu'il résulte de l'article 97 de la loi du 15 mai 2001 précitée.
Le texte adopté par l'Assemblée nationale s'écarte sur trois points de ce dispositif, destiné à encadrer les conditions de mise en place de formules d'accès au cinéma donnant droit à des entrées multiples, c'est-à-dire des formules de « cartes illimitées ».
1) Les modalités de calcul de la rémunération des ayants droit
Dans le deuxième alinéa du 2 de l'article 27 du code précité, le projet précise que la rémunération des ayants droit de chaque oeuvre cinématographique ne sera pas calculée seulement sur la base d'un prix de référence par place (correspondant au prix réduit moyen pratiqué par chaque exploitant) mais aussi sur la base d'un « taux de location ».
Le « taux de location » est un pourcentage, négocié à l'occasion de la location d'un film par une salle, et qui procède à la répartition des recettes entre, d'une part l'exploitant, et de l'autre le distributeur, en qualité de mandataire du producteur et des autres ayants droit.
Cette précision vise à rassurer les distributeurs, qui craignent que la mise en service des formules d'accès illimité ne soit l'occasion, pour les exploitants de salles, d'exercer une pression sur le taux de location.
Un sous-amendement ayant même objet, déposé par le groupe socialiste du Sénat, lors de la discussion en nouvelle lecture du projet de loi sur les nouvelles régulations économiques, avait été adopté par le Sénat dans sa séance du 18 avril 2001, mais n'avait pu, pour des raisons de procédure, être retenu par l'Assemblée nationale.
2) La création d'une nouvelle catégorie intermédiaire d'exploitants
L'article 27 du code précité oblige les exploitants de salles d'une certaine importance à associer à la formule de cartes d'abonnement illimité qu'ils mettraient en place les petits exploitants qui le souhaiteraient.
Cette obligation est assortie de celle de garantir à ces petits exploitants « un montant minimal de la part exploitant par billet émis » qui soit au moins égal au montant de la part qu'ils devront reverser au distributeur.
Ce dispositif a pour objet, dans l'hypothèse d'une forte utilisation de la carte d'accès qui réduirait fortement le montant de la recette par place, d'obliger les grands exploitants initiateurs de la formule à garantir un revenu minimum aux petits exploitants associés, et à assumer seuls le risque économique.
Ces deux catégories d'exploitants sont définies par référence à des pourcentages de recettes, ou d'entrées, enregistrées au niveau national, ou au niveau d'une zone d'attraction :
- les grands exploitants sont définis comme ceux qui détiennent plus de 25 % des entrées ou des recettes dans une zone d'attraction (seuil ramené à 8 % dans la zone constituée par Paris et la petite couronne), ou plus de 0,5 % au niveau national ;
- tous les autres sont considérés comme petits exploitants.
Le texte du projet de loi remet en question les frontières de ces catégories en reprenant un dispositif défendu sans succès par le groupe socialiste du Sénat, au cours de la nouvelle lecture du projet de loi relatif aux nouvelles régulations économiques, le 18 avril 2001.
Une nouvelle définition des seuils lui permet de dessiner une catégorie intermédiaire d'exploitants. Ceux-ci, s'ils deviennent opérateurs de carte, ne sont pas tenus de l'ouvrir aux petits exploitants, mais ils ne peuvent pas non plus revendiquer, s'ils adhèrent à une carte, la garantie de recettes réservée aux petits exploitants.
Cette nouvelle catégorie des « exploitants intermédiaires » est obtenue par un relèvement de certains des seuils définissant les grands exploitants, et qui permet d'en retrancher certains établissements. Les grands exploitants y sont en effet définis comme ceux qui détiennent plus de 25 % des entrées dans une zone d'attraction donnée (chiffre inchangé) ou plus de 15 % (et non 8 %) des entrées dans la zone de Paris et de la petite couronne, ou qui, à l'échelon national, réalisent plus de 3 % des recettes, et non plus 0,5 %.
3) Enfin, dans le 4 de l'article 27 du code, le texte de l'Assemblée nationale précise que les engagements pris par les exploitants vis-à-vis des distributeurs le sont aussi vis-à-vis des producteurs et des ayants droit.
Cette disposition rappelle que, dans leur négociation avec les exploitants de salles, les distributeurs n'agissent pas seulement en leur nom propre, mais en qualité de mandataire des producteurs et des ayants droit.
II. Position de la commission
L'article 18 nouveau complète le texte de l'article 27 du code de l'industrie cinématographique adopté dans le cadre de la loi NRE pour y inclure des amendements présentés lors de la nouvelle lecture du Sénat, dont un seul avait été adopté et n'avait pu être inclus dans le texte adopté en lecture définitive à l'Assemblée nationale, laquelle, en application du dernier alinéa de l'article 45 de la constitution, avait dû reprendre tel quel le texte voté par elle en nouvelle lecture.
Il constitue donc, en quelque sorte, une nouvelle « nouvelle lecture » de ce dispositif, et souligne les inconvénients du recours abusif à la procédure d'urgence, et au dépôt, en cours de discussion, d'amendements du gouvernement hâtivement préparés.
Votre commission vous propose une rédaction de l'article 18 procédant à l'insertion dans l'article 27 du code précité de deux des nouvelles dispositions incluses dans le texte adopté par l'Assemblée nationale et qui précisent :
- que la rémunération des ayants droit de chaque oeuvre est calculée non seulement sur la base d'un prix de référence par place, mais aussi d'un taux de location ;
- que les engagements pris par les exploitants à l'égard des distributeurs, le sont aussi à l'égard des producteurs et des ayants droit, dont ils sont les mandataires.
En revanche, votre commission vous propose de ne pas retenir la nouvelle définition des seuils qui aboutit à la constitution d'une catégorie intermédiaire d'exploitants.
Celle-ci ne rassemblerait en effet que cinq exploitants de salles. Encore trois d'entre eux exercent-ils leur activité en province, encore peu concernée par le phénomène des formules de cartes d'accès illimité.
Il semblerait donc que ce dispositif ne soit susceptible de s'appliquer, dans l'immédiat, qu'à deux exploitants de salles. On peut donc légitimement s'interroger sur l'opportunité de remettre en question, quelques jours après son entrée en vigueur, le dispositif adopté dans la loi du 15 mai 2001 précitée, et ce, au bénéfice d'un nombre aussi limité de sociétés.
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Sous réserve de l'adoption des amendements proposés, votre commission a émis un avis favorable à l'adoption des dispositions du projet de loi faisant l'objet du présent avis.
* 5 Cf. J.O. Sénat - Séance du 27 juin 2000, pp. 4467 à 4469
* 6 Remarquons à titre d'exemple que le troisième alinéa du III de l'article 30-1 invite le CSA à accorder à tout éditeur de télévision hertzienne terrestre existante qui en fait la demande une autorisation pour un service édité par une autre personne morale. Cette personne doit être contrôlée par l'éditeur bénéficiaire de l'autorisation. La délivrance des autorisations par personne interposée n'en est pas moins une curieuse novation juridique.