2. Les relations financières entre l'État et les organismes du champ des lois de financement de la sécurité sociale

En 2002, le budget de l'État comprendra 56,2 milliards d'euros de dépenses entrant dans le champ de la loi de financement de la sécurité sociale, soit 150 millions d'euros de moins qu'en 2001.

L'État versera, comme employeur, 42,1 milliards d'euros en 2002, correspondant aux charges de pensions, aux charges de compensation vieillesse et aux autres charges.

Comme puissance publique, l'État contribuera à hauteur de 20,7 milliards d'euros aux recettes de la sécurité sociale, sous forme de prises en charge de cotisations, de prestations, de subventions à divers régimes de protection sociale, dont il convient de déduire les reversements des organismes sociaux.

Synthèse des charges nettes du budget de l'État en matière de protection sociale

(en millions d'euros)

2000

Prévision 2001

2002

Etat-employeur

32 651

33 117

35 490

Engagements sociaux

38 907

39 579

42 086

Cotisations des assurés

- 4 454

- 4 625

- 4 741

Recettes atténuatives diverses

- 1 802

- 1 837

- 1 854

Etat-puissance publique

26 994

23 251

20 723

Cotisations prises en charge

4 710

3 056

2 972

Prestations prises en charge

19 290

18 649

18 157

Subventions aux régimes

4 900

4 465

3 917

Reversements des organismes sociaux

- 1 906

- 2 919

- 4 325

Total

59 645

56 367

56 213

Source : Bilan des relations financières entre l'État et la protection sociale, annexe au projet de loi de finances pour 2002.

3. Les transferts de recettes et de dépenses

Les deux projets de loi pour 2002 contiennent plusieurs dispositions communes ou étroitement liées, sous forme de transferts de recettes et de dépenses.

a) Les transferts de recettes
(1) De l'État vers le champ de la loi de financement de la sécurité sociale

Deux types de transferts de recettes sont prévus dans les projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2002 : le premier concerne l'équilibrage du Fonds de réforme des cotisations sociales patronales (FOREC) ; le second concerne l'alimentation du Fonds de réserve pour les retraites (FRR).

Pour les besoins du FOREC, c'est-à-dire du financement des 35 heures, l'État va ainsi transférer à nouveau à ce fonds des recettes fiscales, à hauteur de 765 millions d'euros au titre de la taxe sur les conventions d'assurance 33 ( * ) .

Il convient de rappeler que le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 prévoit par ailleurs, au titre de 2001, des transferts de ressources fiscales à hauteur de 457 millions d'euros en provenance de la même taxe sur les conventions d'assurance 34 ( * ) .

S'agissant de l'abondement du FRR 35 ( * ) , lors de leur présentation, les projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2001 prévoyaient l'affectation au fonds en 2001 et en 2002 de 2,82 milliards d'euros provenant de la cession par l'Etat des licences de téléphonie mobile de 3 ème génération, dites licences UMTS, auxquels devaient suivre pendant treize ans un versement de 720 millions d'euros au fonds. L'attribution de deux licences au lieu de quatre a conduit le gouvernement à diviser ces nombres par deux dans le cadre de la présentation des projets de loi de finances et de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 36 ( * ) , se traduisant donc par l'affectation au fonds de 1,24 milliards d'euros en 2002.

La décision du gouvernement, par voie d'amendement à l'article 17 du projet de loi de finances pour 2002 en première lecture à l'Assemblée nationale, de ramener à 620 millions d'euros par opérateur le droit d'entrée et d'y ajouter une redevance fonction des résultats des entreprises attributaires a pour conséquence de minorer les recettes du Fonds de réserve des retraites. Au titre de 2001, il ne devrait percevoir que 1,24 milliard d'euros si le collectif budgétaire de 2001 décide l'affectation au FRR de la totalité des recettes liées à l'UMTS. Au titre de 2002, le transfert de recettes pour l'UMTS serait également de 1,24 milliard d'euros.

Afin de compenser cette perte de recettes déjà subies par le FRR - qui ne serait que venu s'ajouter à toutes celles précédemment subies par le biais de l'affectation au FOREC de ressources fiscales destinées à alimenter le FRR par le biais du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) - le gouvernement a décidé d'alimenter pour 1,24 milliard d'euros le FRR à partir des excédents du compte d'affectation spéciale n° 902-24 retraçant le produit des privatisations 37 ( * ) .

En pratique, cela signifie que le projet de loi de finances organise le transfert vers le FRR, outre le produit de la vente des licences UMTS, d'une partie du produit des cessions à venir des parts détenues par l'Etat dans plusieurs entreprises : Thomson CSF, Thomson Multimédia, Compagnie financière Hervet, Banque Hervet, fonds de capital investissement, Société des autoroutes du sud de la France.

(2) De la sécurité sociale vers l'Etat : l'allégement des charges budgétaires par le prélèvement sur le produit de la C3S au profit du BAPSA et au détriment du FRR

L'article 18 du projet de loi de finances pour 2002 prévoit l'affectation au BAPSA, au titre de 2002, de 520 millions d'euros de produit de la C3S destiné à financer le déficit du régime vieillesse des exploitants agricoles et, notamment, la dernière étape du plan pluriannuel de revalorisation des petites retraites agricoles 38 ( * ) .

La conséquences de ce prélèvement est double :

• la subvention d'équilibre versée par le budget général, donc les dépenses budgétaires, se voit minorée d'autant ;

• la part de C3S destinée au Fonds de réserve des retraites se voit aussi minorée d'autant.

En conséquence, l'article 18 du projet de loi de finances pour 2002 opère, par une voie détournée, un prélèvement indirect du Fonds de réserve des retraites afin de minorer le déficit budgétaire de l'Etat.

b) Les transferts de dépenses de l'État vers le champ de la loi de financement de la sécurité sociale
(1) Le transfert explicite de dépenses budgétaires : 61 millions d'euros

Le budget de la santé et de la solidarité a prévu pour 2002 un transfert de dépenses de l'État vers l'assurance maladie de 61 millions d'euros correspondant à la prise en charge des dépenses des écoles de formation relevant d'un établissement public de santé et des dépenses liées aux stages extrahospitaliers des résidents.

Ce transfert de dépenses fait suite à des mouvements similaires réalisés depuis 1998 qui tendent, au nom de la clarification des relations financières avec la sécurité sociale, à débudgétiser des dépenses de l'État en les mettant à la charge de l'assurance maladie.

(2) L'inconnue du financement du protocole hospitalier : 305 millions d'euros

Le gouvernement a signé, le 14 mars 2000, un protocole d'accord sur la fonction publique hospitalière avec plusieurs organisations syndicales représentatives.

Parmi les nombreuses dispositions de ce protocole, la plus importante en termes financiers concerne l'accroissement des moyens budgétaires pour la prise en charge des dépenses liées aux remplacements. Deux milliards de francs par an étaient ainsi prévus, sous forme de crédits « pérennes au niveau national ». Ils furent inscrits dans le budget de l'État, par voie de collectif budgétaire, en juin 2000.

Texte du protocole hospitalier du 14 mars 2000 relatif aux remplacements

Les hôpitaux rencontrent, à des degrés divers, des difficultés de fonctionnement qui tiennent en particulier à l'insuffisance des possibilités de remplacement des agents absents. Des moyens seront dégagés à ce titre et répartis en enveloppes régionales. L'attribution aux établissements se fera après examen de leur situation existante.

2 000 MF seront attribués aux établissements pour faire face aux remplacements des congés maternité, maladie, de formation, congés bonifiés et pour activité syndicale, ainsi que ceux résultant de la mise en oeuvre des temps partiels ;

30 % de ces crédits seront spécifiquement affectés aux remplacements des agents en formation au titre de la promotion professionnelle ; l es crédits ainsi dégagés sont pérennes au niveau national ;

Ils ont vocation à évoluer, pour chaque établissement, en fonction de sa situation et des actions qui y sont menées.

En revanche, s'agissant de 2001, le gouvernement s'était engagé lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2001 à les inscrire en collectif budgétaire. Le projet de loi de finances rectificative n'ayant pas encore été déposé, votre rapporteur pour avis ne peut pour l'instant que constater que les établissements hospitaliers, donc le champ de la loi de financement de la sécurité sociale, supportent sur leur trésorerie ces 305 millions d'euros manquants.

S'agissant de l'exercice 2002, il n'existe pour l'instant aucune déclaration du gouvernement explicitant la manière dont il entend rendre pérennes, au moins pour cet exercice, ces crédits. Là aussi, votre rapporteur pour avis craint qu'ils ne soient mis à la charge des établissements hospitaliers.

Il existe donc 305 millions d'euros de dépenses hospitalières certaines pour 2002 dont on ne sait où les trouver, dans le projet de loi de finances ou dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale.

*

Dans ce sombre tableau, la réforme de l'ordonnance n° 59-2 du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances, apporte quelques lueurs d'espoir quant à des améliorations possibles dès l'exercice 2003.

En effet, si lors de l'élaboration de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances il avait été clairement posé comme principe que la réforme s'arrêterait aux frontières constitutionnelles, plusieurs dispositions ont été introduites, principalement à l'initiative du Sénat, afin d'apporter des clarifications quant à l'articulation des deux textes :

• introduction d'une limite à l'affectation d'impositions de toute nature, ces dernières ne pouvant être attribuées à un tiers qu'à raison des missions de service public confiées à lui 39 ( * ) ;

• annexion au projet de loi de finances de la liste et l'évaluation, par bénéficiaire ou catégorie de bénéficiaires, des impositions de toute nature affectées à des personnes morales autres que l'État 40 ( * ) ;

• introduction d'un rapport sur les prélèvements obligatoires déposé avant l'examen, par le Parlement, du projet de loi de finances et du projet de loi de financement de la sécurité sociale, et pouvant faire l'objet d'un débat 41 ( * ) .

Cependant, la différence entre les propos tenus à l'occasion de la réforme de la loi organique, par exemple sur le thème de la nécessaire transparence des comptes, et les mesures mises en place par le gouvernement qui, cette année encore, brouillent un peu plus le paysage des finances publiques, ne peut qu'étonner. Il n'est qu'à rappeler la réouverture des comptes 2000 de la sécurité sociale, la création du fonds de financement de la l'allocation prestation autonomie (APA), les transferts d'impositions de toutes natures entre le FOREC d'une part, l'État, la sécurité sociale et le FSV d'autre part, les « impasses budgétaires », les tours de passe-passe autour du Fonds de réserve des retraites, pour prendre la mesure des progrès à réaliser.

* 33 Article 19 du projet de loi de finances pour 2002 et I de l'article 6 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002.

* 34 I de l'article 6 du projet de loi de financement de la sécurité sociale et article à venir du futur projet de loi de finances rectificatives pour 2001.

* 35 Voir les développements sur ce point dans le III du chapitre second, consacré à la branche vieillesse.

* 36 Article 17 du projet de loi de finances, compris dans les prévisions de recettes du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002.

* 37 II de l'article 17 bis du projet de loi de finances pour 2002, adopté par l'Assemblée nationale en première lecture.

* 38 Cette dernière étape est prévue par l'article 57 du projet de loi de finances pour 2002.

* 39 Second alinéa de l'article 2.

* 40 1° de l'article 51.

* 41 Article 52.

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