Projet de loi de finances pour 2002 - Tome II - Intérieur : Police et sécurité
COURTOIS (Jean-Patrick)
AVIS 92 - TOME II (2001-2002) - commission des lois
Rapport au format Acrobat ( 114 Ko )Table des matières
-
LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES LOIS
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INTRODUCTION
-
I. UN CONTEXTE INQUIÉTANT
- A. UNE INSÉCURITÉ EN ACCROISSEMENT
-
B. UNE GÉNÉRALISATION DE LA POLICE DE
PROXIMITÉ HYPOTHÉQUÉE PAR LE MANQUE DE MOYENS
-
1. Un manque de policiers sur le terrain
- a) Les redéploiements territoriaux entre la police et la gendarmerie nationale
- b) La fidélisation des forces mobiles
- c) L'externalisation de certaines tâches
- d) La limitation des « charges indues »
- e) Le recours à des personnels administratifs
- f) L'indemnisation plutôt que la récupération des heures supplémentaires
- 2. Une police de proximité reposant sur des emplois jeunes
- 3. Une nécessaire complémentarité avec les polices municipales
-
1. Un manque de policiers sur le terrain
- C. LE MALAISE DANS LA POLICE
-
II. UN BUDGET NE RÉPONDANT PAS AUX ATTENTES
-
A. UNE AUGMENTATION DES DÉPENSES DE PERSONNEL
TRADUISANT UN EFFORT INSUFFISANT
-
1. Des recrutements supplémentaires en nombre
insuffisant
- a) Les créations et transformations d'emplois
-
b) Des effectifs restant insuffisants
- (1) Les conséquences des départs à la retraite massifs
- (2) La récupération des heures supplémentaires
- (3) Les difficultés de recrutement des adjoints de sécurité
- (4) Les conséquences prévisibles de la réduction du temps de travail
- (5) La sous-administration de la police et l'accomplissement de tâches indues
- 2. Des mesures indemnitaires et catégorielles ne répondant pas aux aspirations des personnels
-
1. Des recrutements supplémentaires en nombre
insuffisant
- B. DES CRÉDITS DE FONCTIONNEMENT ET D'ÉQUIPEMENT ENCORE INSUFFISANTS
-
A. UNE AUGMENTATION DES DÉPENSES DE PERSONNEL
TRADUISANT UN EFFORT INSUFFISANT
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I. UN CONTEXTE INQUIÉTANT
N° 92
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2001-2002
Annexe au procès-verbal de la séance du 22 novembre 2001
AVIS
PRÉSENTÉ
au nom de la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur le projet de loi de finances pour 2002 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE ,
TOME II
INTÉRIEUR :
POLICE ET SÉCURITÉ
Par M. Jean-Patrick COURTOIS,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de : M. René Garrec, président ; M. Patrice Gélard, Mme Dinah Derycke, MM. Pierre Fauchon, José Balarello, Robert Bret, Georges Othily, vice-présidents ; MM. Jean-Pierre Schosteck, Laurent Béteille, Jacques Mahéas, Jean-Jacques Hyest, secrétaires ; M. Jean-Paul Amoudry, Mme Michèle André, M. Robert Badinter, Mme Nicole Borvo, MM. Charles Ceccaldi-Raynaud, Christian Cointat, Raymond Courrière, Jean-Patrick Courtois, Marcel Debarge, Michel Dreyfus-Schmidt, Gaston Flosse, Jean-Claude Frécon, Jean-Claude Gaudin, Charles Gautier, Paul Girod, Daniel Hoeffel, Pierre Jarlier, Roger Karoutchi, Lucien Lanier, Jacques Larché, Gérard Longuet, Mme Josiane Mathon, MM. Jacques Peyrat, Jean-Claude Peyronnet, Henri de Richemont, Josselin de Rohan, Bernard Saugey, Jean-Pierre Sueur, Simon Sutour, Alex Türk, Maurice Ulrich, Jean-Paul Virapoullé, François Zocchetto.
Voir
les numéros
:
Assemblée nationale
(
11
ème
législ.) :
3262
,
3320
à
3325
et T.A.
721
Sénat
:
86
et
87
(annexe n°
28
)
(2001-2002)
Lois de finances . |
LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES LOIS
Après avoir entendu M. Daniel Vaillant, ministre de
l'Intérieur, le mercredi 21 novembre 2001, la commission des Lois,
réunie le mercredi 28 novembre 2001, sous la présidence de
René Garrec, a procédé, sur le rapport de
M. Jean-Patrick Courtois, à l'examen pour avis des crédits
de la police nationale inscrits dans le projet de loi de finances pour 2002,
dont la commission des Finances est saisie au fond.
La commission a constaté que la discussion du budget 2002 s'ouvrait dans
un contexte particulier caractérisé, outre par la mise en oeuvre
du plan vigipirate renforcé après les attentats du
11 septembre aux États-Unis et la surveillance des convoyages de
fonds liés au passage à l'euro, par
l'expression
à
travers le pays
d'un profond malaise des policiers
, tous corps confondus.
Elle a considéré que le gouvernement ne pouvait rester
indifférent à ce malaise.
Observant que le budget de la police pour 2002 s'établissait à
5,044 milliards d'euros
, soit une
hausse de 3,4%
par rapport
au budget de 2001, elle a considéré que cette augmentation
ne
serait pas suffisante pour répondre à l'accroissement de
l'insécurité ni pour achever dans de bonnes conditions la
généralisation de la police de proximité
.
Après avoir constaté que cette augmentation de crédits
permettrait principalement le recrutement de 3000 agents
supplémentaires, elle a en effet observé que cet effectif serait
entièrement absorbé par la mise en place de la réduction
du temps de travail.
Elle a considéré que de graves hypothèques pesaient sur la
généralisation de la police de proximité qui, en l'absence
d'un effectif de policiers suffisant, reposerait entièrement sur des
emplois jeunes dont le recrutement était d'ailleurs problématique.
Elle a en outre constaté que la progression des crédits de
fonctionnement et d'équipement ne serait pas suffisante pour
résorber les retards accumulés ces dernières années.
Ces observations ont conduit la commission des Lois à donner un avis de
rejet des crédits
de la section police-sécurité du
projet de loi de finances pour 2002.
INTRODUCTION
Mesdames, Messieurs,
L'examen de ce projet de budget pour 2002 s'ouvre dans un contexte très
particulier.
Après les attentats du 11 septembre aux États-Unis, le plan
vigipirate renforcé a été mis en oeuvre.
Les forces de sécurité sont appelées à une
vigilance de chaque instant. Les moyens juridiques mis à leur
disposition ont été renforcés, pour une période de
deux ans, par la loi n° 2001-1062 du 15 novembre 2001
relative à la sécurité quotidienne. Grâce au
concours du Sénat, ces nécessaires mesures ont pu être
adoptées dans un bref délai.
Mais au delà de la lutte antiterroriste, cette discussion
budgétaire s'ouvre alors que les policiers de tous corps expriment un
profond malaise à travers le pays.
Les policiers sont les premières victimes de l'insécurité.
Depuis le début de l'année, sept des leurs sont
décédés en opération de police. Votre commission
tient à exprimer sa solidarité à l'ensemble des personnels.
Ils réclament plus de considération et de moyens face à
une insécurité en accroissement. Ils souhaitent également
que leur action soit mieux relayée par la justice.
Les pouvoirs publics ne peuvent rester indifférents à un tel
malaise. Comment les citoyens peuvent-ils se sentir en sécurité
si les forces de l'ordre elles-mêmes se sentent menacées ?
En 2000, la police a constaté avec la gendarmerie nationale, plus de
3,7 millions d'infractions, soit une augmentation de 5,72 % par rapport
à l'année 1999. Elle doit faire face à une
délinquance de plus en plus violente mettant en cause un nombre alarmant
de mineurs. Les chiffres du premier semestre 2001 ont accentué la
tendance à la hausse de la criminalité.
Structurellement, la police doit relever des défis multiples tant sur le
front de la délinquance de proximité que sur celui des
réseaux internationaux impliquant une coopération internationale
active.
Ponctuellement, elle subit d'importantes contraintes en raison de la
réactivation du plan vigipirate et de la surveillance des transferts de
fonds liés au passage à l'euro fiduciaire.
Dans ce contexte, le projet de budget pour 2002 n'est pas de nature à
répondre aux attentes.
S'établissant à
5,044 milliards d'euros
(33,086 milliard
de francs), il est en augmentation de
3,4% par rapport au budget 2001
,
ce qui représente certes une augmentation supérieure à
celle du budget de l'État.
Cette augmentation n'est cependant pas suffisante pour répondre dans de
bonnes conditions à l'accroissement de l'insécurité que
connaît le pays ni pour achever, comme prévu, la
généralisation de la police de proximité.
L'accroissement des crédits permet principalement le recrutement de
3000 agents supplémentaires
.
Il est cependant à craindre que la
réduction du temps de
travail
prescrite par le décret du 25 août 2000 n'absorbe
entièrement cet effectif supplémentaire.
Or, dans la ligne des orientations définies au colloque de Villepinte en
octobre 1997, la dernière phase de la
généralisation de
la police de proximité
devrait s'achever au cours de l'année
2002. Une telle orientation nécessite cependant des moyens importants
placés au contact des populations.
Mais du fait des difficultés à placer sur le terrain un nombre
suffisant de policiers,
cette politique repose entièrement sur des
emplois jeunes
,
mal formés, mal encadrés,
dont le
recrutement est problématique et auxquels la loi relative à la
sécurité quotidienne a accordé des pouvoirs de police
judiciaire. Cette politique ne rencontre d'ailleurs pas véritablement
l'adhésion des personnels.
De graves hypothèques pèsent donc sur la
généralisation de la police de proximité.
En outre, les
moyens d'équipement et de fonctionnement de la
police
, resteront
notoirement insuffisants pour permettre à
celle-ci d'accomplir normalement ses missions.
I. UN CONTEXTE INQUIÉTANT
A. UNE INSÉCURITÉ EN ACCROISSEMENT
1. Des statistiques globales de la délinquance orientées à la hausse
Avec
3 771 849 faits constatés
, l'année 2000 a connu
une augmentation de
5,72%
des crimes et des délits.
Après plusieurs années consécutives de baisse entre 1994
et 1997, la délinquance est donc repartie à la hausse.
Les chiffres du premier semestre 2001 amplifient ce phénomène
puisqu'une augmentation de
9,58%
a été constatée.
ÉVOLUTION DÉCENNALE DE LA CRIMINALITÉ EN FRANCE
Années |
Nombre d'infractions |
Evolution
|
Taux pour 1000 habitants |
1990 |
3.492.712 |
+ 6,93 |
62 |
1991 |
3.744.112 |
+ 7,20 |
66 |
1992 |
3.830.996 |
+ 2,32 |
67 |
1993 |
3.881.894 |
+ 1,33 |
67 |
1994 |
3.919.008 |
+ 0,96 |
67 |
1995 |
3.665.320 |
- 6,47 |
63 |
1996 |
3.559.617 |
- 2,88 |
61 |
1997 |
3.493.442 |
- 1,86 |
60 |
1998 |
3.565.525 |
+ 2,06 |
61 |
1999 |
3.567.864 |
+ 0,07 |
61 |
2000 |
3.771.849 |
+ 5,72 |
64 |
Données communiquées par le ministère de l'Intérieur
Cette
augmentation concerne
l'ensemble des catégories d'infractions
.
Les vols représentent près du tiers des infractions. A notamment
été enregistrée une recrudescence de vols de
téléphones portables.
La délinquance de voie publique augmente de 2%.
LES
CATÉGORIES D'INFRACTIONS
Catégorie |
Faits constatés |
% du total |
Évolution 2000/1999 |
Vols |
2.334.696 |
61,9 |
3,7% |
Infractions économiques et financières |
352.164 |
9,3 |
19,1% |
Atteintes aux personnes |
254.514 |
6,8 |
9,1% |
Autres infractions (dont stupéfiants) |
830.475 |
22 |
5,6% |
Total |
3.771.849 |
100 |
5,7% |
Données communiquées par le ministère de l'Intérieur
On rappellera que, sur longue période, les chiffres de la criminalité ont été multipliés par plus de 6 depuis 1950 , la croissance ayant été constante depuis cette date, à des rythmes plus ou moins élevés, avec néanmoins un premier retournement de tendance de 1984 à 1988, et un autre de moindre ampleur de 1994 à 1997.
Données communiquées par le ministère de l'Intérieur
2. Une délinquance présentant des caractéristiques inquiétantes
La
délinquance est de plus en plus
violente
et elle implique de plus
en plus de
mineurs
.
On assiste à une
recrudescence de la violence
. Les
coups et
blessures volontaires
et les
vols avec violence
ont continué
à augmenter en 2000 respectivement de 11,8% et 15,8%, et ont chacun
plus que doublé depuis 1988
.
Évolution des infractions violentes les plus
courantes
|
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Données communiquées par le ministère de l'Intérieur
Les vols
à main armée, en diminution ces dernières années
ont connu une recrudescence de plus de 15% en 2000, plus de 8500 braquages
ayant été dénombrés. Les attaques spectaculaires de
convoyeurs de fonds
impliquant des
armes de guerre
se sont
notamment multipliées en 2000 et en 2001.
La
violence urbaine
devient de plus en plus préoccupante.
Plusieurs centaines de quartiers sensibles sont régulièrement le
siège de violences anti-policières. Certains quartiers, paisibles
en apparence, sont par ailleurs placés sous la coupe des trafiquants de
drogue, les forces de sécurité hésitant à s'y
aventurer. Devant votre commission, le ministre de l'intérieur a
indiqué que la multiplication des actions ciblées menées
par les forces de l'ordre pour éliminer les trafics des cités
alimentaient provisoirement une violence anti-policière
orchestrée par des trafiquants dérangés dans leurs
activités.
Le nombre de
mineurs
mis en cause s'accroît. En 2000,
175 256 mineurs ont été mis en cause, soit une
augmentation de 2,9% par rapport à l'année 1999.
La part des mineurs dans l'ensemble des personnes mises en cause s'est
élevée à
21%.
Elle n'était que de 10% en
1970 et de 13,2% en 1991.
Les mineurs sont responsables de plus de la moitié des vols de deux
roues à moteur et de plus du tiers de la délinquance de voie
publique.
Devant un tel constat, votre commission ne peut que regretter que les
propositions effectuées par le Sénat
dans le cadre du
projet de loi relatif à la sécurité quotidienne sur le
rapport de notre excellent collègue Jean-Pierre Schosteck
1(
*
)
, n'aient non seulement pas été retenues
mais encore qu'il ait été impossible d'ouvrir un véritable
débat avec l'Assemblée nationale et le gouvernement.
Il s'agissait pourtant d'éviter l'ancrage des mineurs dans la
délinquance, notamment par une meilleure responsabilisation des parents
et par la sanction du recours aux mineurs pour commettre des infractions. Il
s'agissait également de renforcer l'efficacité des dispositions
répressives de l'ordonnance de 1945 sans remettre en question son
objectif éducatif et préventif.
3. La faiblesse des taux d'élucidation
La
faiblesse des taux d'élucidation
contribue à alimenter
l'insécurité et à décourager les citoyens de porter
plainte.
Le taux moyen d'élucidation
s'est établi à
26,8%
en 2000
. Il convient d'observer que ce taux est en
baisse constante
ces dernières années puisque qu'il était de 36,8% en 1991,
30,20% en 1996, 28,63% en 1998 et 27,63 en 1999.
Ce taux moyen cache de profondes disparités entre les infractions. Si
78,2% des homicides sont élucidés, seuls le sont 8% des
cambriolages d'habitations principales et 5,2% des vols à la
roulotte.
Les infractions subies le plus couramment par les citoyens ont donc une chance
minime d'être élucidées.
Une fois élucidées, elles ont en outre plus d'une chance sur
trois d'être
classées sans suite
par les parquets faute de
moyens. Votre commission a fréquemment déploré cette
rupture de la chaîne répressive
qui accroît le
sentiment d'impunité chez les délinquants et provoque
le
découragement des citoyens et des forces de police
.
4. Une réflexion en cours sur la mesure de la délinquance
Comme
votre commission l'a souligné les années antérieures, les
statistiques officielles de la criminalité issues des états dits
« 4001 » sont en décalage avec la
réalité. Elle reflètent en effet plus l'activité
des services de police ou la propension des citoyens à porter plainte
que la délinquance réelle si bien qu'il est justifié
d'évoquer un «
chiffre noir de la
criminalité
».
Le ministre de l'intérieur a évoqué la
création
d'un observatoire de la délinquance
qui permettrait d'évaluer
sans polémique la délinquance et l'insécurité
réelle.
Pour l'heure, une mission de réflexion a été
confiée à deux députés, MM. Christophe Caresche et
Robert Pandraud, afin d'élaborer un
nouvel instrument statistique
de mesure de l'insécurité destiné à entrer en
vigueur après 2002 et dont la mise en oeuvre conditionnerait
l'installation de l'observatoire précité.
Le ministère de l'intérieur souhaite que ce futur instrument
statistique permette, à la fois, de mesurer la délinquance et la
criminalité avec plus de rigueur et de transparence qu'aujourd'hui et de
suivre l'évolution des activités des services d'enquête,
ainsi que les suites données par l'autorité judiciaire aux
affaires dont elle est saisie.
B. UNE GÉNÉRALISATION DE LA POLICE DE PROXIMITÉ HYPOTHÉQUÉE PAR LE MANQUE DE MOYENS
Pour
lutter contre l'insécurité au quotidien, le Gouvernement est
attaché au développement d'une politique de
sécurité de proximité, dans la ligne des orientations
définies au colloque de Villepinte en octobre 1997.
Il s'agit de substituer à une police chargée principalement
d'assurer le maintien de l'ordre, une police ayant pour objectif premier
d'assurer la sécurité quotidienne des citoyens et de lutter
contre la délinquance de masse.
Cette politique repose sur la définition de territoires
géographiquement identifiés, la responsabilisation et la
polyvalence des fonctionnaires concernés et la mise en place d'un
accueil personnalisé du public ainsi que d'un partenariat actif avec
tous les acteurs des contrats locaux de sécurité.
L'expérimentation a débuté au printemps 1999 dans
cinq circonscriptions de sécurité publique (Beauvais,
Châteauroux, Nîmes, Les Ulis, et Garges-les-Gonesse). Elle a
été étendue à partir d'octobre 1999 sur
62 sites ciblés.
Parallèlement a été mise en place à Paris,
dès le 18 avril 1999, une réforme de la préfecture de
police caractérisée notamment par la création d'une
direction de la police urbaine de proximité (D.P.U.P.) à laquelle
ont été rattachés les services locaux.
Au vu des conclusions de la mission d'évaluation des
expérimentations, placée sous l'égide de l'inspection
générale de la police nationale, rendues publiques le
30 mars 2000 lors des assises nationales de la police de
proximité, il a été décidé de
procéder à une
généralisation progressive en
trois phases de la police de proximité, qui devrait être
achevée au mois de juin 2002
:
- 1
ère
phase (avril à
décembre 2000) extension de la police de proximité
à l'ensemble du ressort des circonscriptions dans lesquelles
étaient inclus les 62 sites expérimentaux ;
- 2
ème
phase (octobre 2000 à
octobre 2001) : extension à 176 nouvelles
circonscriptions réparties sur 80 départements ;
- 3
ème
phase : juin 2001 à
juin 2002.
L'arrêté du 22 mai 2000 a modifié le
règlement général d'emploi de la police nationale du 22
juillet 1996 pour inscrire la police de proximité dans les missions
et l'organisation des circonscriptions de sécurité publique.
La circulaire du 11 juin 2001 a marqué le début du lancement
de la dernière phase de généralisation dont la mise en
oeuvre effective devrait débuter au début de l'année 2002.
Pour accompagner la mise en oeuvre de cette généralisation, des
enveloppes de 100 et de 200 millions de francs ont été
ouvertes par les budgets pour 2000 et 2001. Une nouvelle enveloppe de 22,87
millions d'euros (150 millions de francs) ouverte au budget 2002 lui sera
largement consacrée.
Un redéploiement de 1 206 agents du corps de maîtrise et
d'application est intervenu dans le courant de l'année 2000 au profit de
la police de proximité. 1600 nouveaux redéploiements devraient
intervenir en 2001. Ces redéploiements devraient se poursuivre en 2002.
Le Conseil de sécurité intérieur du 27 janvier 1999 avait
prévu le redéploiement de 1200 policiers par an pendant trois ans
au bénéfice des zones sensibles. Dans son rapport sur
l'exécution du budget 2000, la
Cour des comptes
fait ressortir
que les
26 départements classés les plus sensibles n'ont
en réalité bénéficié en 2000 que de
l'affectation de 132 policiers supplémentaires
, tous fonctionnaires
confondus.
Un effort particulier de formation a été engagé :
40 000 fonctionnaires devraient avoir bénéficié
d'une formation à la police de proximité à la fin du
processus de généralisation.
Cette formation est d'autant plus nécessaire que les conclusions de la
mission d'évaluation conduite par l'inspection de la police nationale
ont fait ressortir, au mois de juin dernier,
l'absence d'adhésion des
personnels de base à la réforme.
La mise en place de la police de proximité va de pair avec la mise en
oeuvre des
contrats locaux de sécurité
. En application des
circulaires interministérielles du 28 octobre 1997 et du 7 juin 1999,
ces contrats ont pour objet de mobiliser tous les partenaires publics et tous
les acteurs sociaux dans la mise en oeuvre au niveau local d'un
véritable dispositif préventif et répressif de lutte
contre l'insécurité.
Ces contrats déterminent les objectifs à atteindre et les actions
à engager sur la base d'un diagnostic local de sécurité.
Au 31 août 2001,
528 contrats avaient été
signés
et 200 autres étaient en préparation. Ces
contrats sont cosignés par le préfet, le procureur de la
République et le ou les maires concernés et associent, outre les
services de l'Etat, des partenaires privés tels les bailleurs sociaux,
les sociétés de transports en commun, les organismes consulaires,
les commerçants ou des associations.
A la même date, environ
9000 agents de médiation sociale,
relevant de la loi n° 97-940 du 16 octobre 1997 relative au
développement d'activité pour l'emploi des jeunes et de son
décret d'application n° 97-954 du 17 octobre 1997,
avaient été recrutés dans le cadre de ces contrats.
Il semblerait que l'implication sur le terrain des différents services
de l'État soit souvent insuffisante et que le bilan de ces contrats soit
souvent décevant. Une majorité de
maires estiment ne pas
être suffisamment associés
à leur mise en oeuvre.
Une réelle politique de proximité exigerait à la fois
davantage de moyens placés au contact des populations et une meilleure
implication des élus locaux.
Votre commission regrette à cet égard que les propositions
effectuées par le Sénat, sur le rapport de notre excellent
collègue Jean-Pierre Schosteck
2(
*
)
, lors
de la discussion du projet de loi relatif à la sécurité
quotidienne n'aient pas été retenues. Il ne s'agissait pas de
transformer le maire en « shérif » mais de le placer
au coeur des questions de sécurité dans sa commune, notamment en
lui permettant d'obtenir l'information indispensable dont il est le plus
souvent privé. Le Premier ministre lui-même, lors du
congrès des maires de France, a reconnu la nécessité d'une
meilleure association des maires, évoquant notamment l'information sur
les suites judiciaires données aux plaintes, disposition que le
Sénat avait pourtant adoptée contre l'avis du ministre de
l'intérieur, et qui n'a pas été retenue par
l'Assemblée nationale.
1. Un manque de policiers sur le terrain
Une
politique de proximité nécessite
des moyens importants en
personnels placés au contact des populations
. Or, les effectifs de
policiers sont à l'heure actuelle lourdement grevés par les
vacances de postes résultant du temps de formation des agents
appelés à remplacer les nombreux personnels partant en retraite.
En outre, de multiples policiers ne sont pas en contact avec les populations du
fait de l'accomplissement de tâches purement administratives, de gardes
statiques ou de tâches « indues » ne relevant pas en
principe des missions de la police.
Afin de mieux gérer la présence policière par tranche
horaire, en fonction des rythmes de travail propres à chaque
unité et des récupérations d'heures
supplémentaires, la police nationale a développé le
programme GEOPOL. L'alimentation de ce programme ne semble cependant pas encore
suffisamment automatisée pour être parfaitement crédible.
En tout état de cause, il semble que la montée en puissance de la
politique de proximité s'accompagne de
difficultés
réelles pour mettre en place les policiers nécessaires à
la réussite de cette politique.
Des recrutements conséquents
s'imposent en tout état de cause si l'on veut
éviter que la
police de proximité ne s'exerce au détriment des unités
d'investigation
.
En l'absence de recrutements, plusieurs voies ont été
recherchées sans réel succès pour redéployer des
effectifs sur le terrain.
a) Les redéploiements territoriaux entre la police et la gendarmerie nationale
A la
suite du rapport de nos collègues MM. Jean-Jacques Hyest et Roland
Carraz, le Gouvernement avait, lors du conseil de sécurité
intérieure du 27 avril 1998, retenu le principe d'un
redéploiement territorial des forces de police et de gendarmerie qui
aurait permis d'affecter un plus grand nombre de policiers et gendarmes dans
les zones sensibles. Ce plan aurait notamment conduit à la fermeture de
94 commissariats.
Devant les oppositions exprimées à ce projet, tant par les
élus concernés que par les personnels, le gouvernement avait,
dans un premier temps, chargé M. Guy Fougier de mener des
consultations complémentaires.
Le Premier ministre a en définitive annoncé, le 20 janvier 1999,
l'abandon du projet global de redéploiement, indiquant que
les
concertations seraient menées au cas par cas avec les élus
concernés
.
Depuis est intervenue la
fermeture de six circonscriptions
de
sécurité publique
3(
*
)
.
Sont également intervenus des
ajustements du ressort des
circonscriptions de sécurité publique
à la suite de
transferts de responsabilité entre la police et la gendarmerie nationale.
Au total, ces opérations ont impliqué le transfert de 43 617
habitants de la responsabilité de la gendarmerie nationale à
celle de la police nationale et de 145 846 habitants de la police vers la
gendarmerie nationale, soit un différentiel de
101 846 habitants
placés désormais sous la responsabilité de la gendarmerie
nationale.
b) La fidélisation des forces mobiles
Le
Conseil de sécurité intérieure du 19 avril 1999 a retenu
le principe d'une fidélisation dans les zones sensibles de forces de CRS
et de gendarmerie mobile à hauteur de 1500 CRS et
1500 gendarmes sur une période de trois ans. L'opération
devrait être achevée à la fin de l'année 2001.
Cette fidélisation devait être accompagnée de la
dissolution des compagnies départementales d'intervention dont les
effectifs devaient être redistribués au bénéfice de
la police de proximité. Ces compagnies ont été en fait
remplacées par des groupes d'appui à la police de
proximité.
Concernant les CRS,
cinq compagnies sont affectées à
résidence
pendant
trois ou quatre mois consécutifs
,
par roulement d'unités implantées sur un même site. Les
départements concernés sont les Bouches du Rhône (CRS
n° 53 à 55), la Haute Garonne (CRS n° 26 et 27), le
Nord (CRS n° 11 et 12), le Rhône (CRS n° 45 et 46) et
l'Essonne (CRS n° 5 et 8).
Conformément aux voeux du personnel, la période de
sédentarisation, initialement fixée à six mois, a
été réduite à quatre mois ou trois mois selon les
unités.
Des
détachements d'intervention à résidence
de
60 fonctionnaires sont prévus dans
douze autres compagnies
.
Ils sont également fidélisés par roulement des effectifs
affectés dans les unités concernées. Huit
détachements ont déjà été mis en place en
1999 et 2000 : Alpes maritimes (CRS n° 6) ; Ille-et-Vilaine
(CRS n° 9) ; Loire (CRS n° 50), Hauts-de-Seine (CRS
n°s 2 et 61) Seine-Saint-Denis (CRS n°s 4 et 7) et
Val-de-Marne (CRS n° 3).
Les quatre derniers détachements
sont en cours de création
: Meurthe-et-Moselle (CRS
n° 39), Moselle (CRS n° 30) et Seine-Maritime (CRS
n°s 31 et 32).
Cette opération ne rencontre pas véritablement l'adhésion
des personnels. Ces derniers font ressortir que la non perception de
l'indemnité journalière d'absence temporaire (IJAT) n'est pas
entièrement compensée par l'indemnité
représentative d'heures supplémentaires dont ils
bénéficient.
c) L'externalisation de certaines tâches
Le ministre de l'intérieur souhaite encourager l'externalisation de certaines charges, concernant principalement la maintenance informatique et les ateliers de réparation de véhicules. La Cour des comptes a en effet relevé le nombre important de policiers se consacrant à ces tâches. Des consignes ont été données par une circulaire du 3 juin 1999 pour encourager le recours au secteur privé. L'ensemble des secrétariats généraux pour l'administration de la police ont eu recours en 2001 à des prestataires privés pour les petites réparations automobiles. 17,95 millions de francs ont été affectés à cette mesure. Il est envisagé en conséquence de redéployer 271 fonctionnaires de police actifs avant la fin de l'année 2001. Devrait être en outre conduite en 2002, dans deux secrétariats généraux pour l'administration de la police, une expérience de gestion pour compte du parc automobile de la police par des prestataires privés.
d) La limitation des « charges indues »
Par
ailleurs, la réflexion qui s'était engagée à
l'occasion du vote de la loi d'orientation du 21 janvier 1995
concernant la suppression de nombreuses «
charges
indues
», s'agissant notamment des gardes statiques, des
transferts de détenus, de la garde des détenus
hospitalisés ou de l'établissement des procurations de vote, n'a
pas encore abouti.
Le conseil de sécurité intérieure du
6 décembre 1999 a cependant prévu de transférer
à l'administration pénitentiaire les escortes de détenus
consultants médicaux ainsi que la garde des détenus
hospitalisés dans les unités hospitalières
sécurisées inter-régionales actuellement en cours de
création. En outre, une expérience, actuellement menée par
la chancellerie, de rationalisation des missions d'extraction des
détenus devrait être généralisée.
Il est également envisagé de limiter les
gardes statiques de
bâtiments
en ayant davantage recours aux systèmes de
vidéo-surveillance ou aux rondes mobiles motorisées. Ces gardes
ont en effet représenté 1,8 millions d'heures-fonctionnaire
en 2000 pour les seuls fonctionnaires de la direction de la
sécurité publique, ce qui correspond à l'emploi à
temps plein de plus de 1000 agents.
e) Le recours à des personnels administratifs
Les
recrutements de personnels administratifs
devant permettre de
décharger les policiers sont intervenus en nombre insuffisant par
rapport aux prévisions de la loi d'orientation du
21 janvier 1995. Alors que cette loi avait prévu la
création de 4 300 emplois administratifs au sens strict en
5 ans, moins de 500 créations de postes sont intervenues entre
le 1
er
janvier 1995 et le 1
er
janvier 2000. Les
550 emplois créés dans le budget 2001 et les 243 emplois
créés dans le budget 2002 ne permettront pas de rattraper le
retard.
Comme l'a relevé la Cour des comptes dans son rapport paru en
janvier 2000, le coût d'un agent administratif est de 50%
inférieur à celui d'un policier actif. Or, la police
française apparaît sous administrée par comparaison aux
polices étrangères : le ratio des personnels administratifs
par rapport aux actifs y est inférieur à 10% alors qu'il est de
20% aux Pays-Bas, de 30% en Allemagne et de 32,5% au Royaume-Uni. Il est
indispensable
de décharger davantage les policiers de tâches
administratives
de manière à ce qu'ils puissent se consacrer
pleinement à leurs missions proprement policières sur le
terrain.
f) L'indemnisation plutôt que la récupération des heures supplémentaires
Plus de 9 millions et demi d'heures supplémentaires sont dues aux policiers, tous services confondus. Ces derniers ont pris l'habitude de les récupérer sous forme de repos compensateurs. Or, cette forme de récupération grève considérablement la capacité opérationnelle sur le terrain, principalement quand les agents choisissent de capitaliser les heures en fin de carrière, bénéficiant ainsi d'une retraite avancée sans pouvoir être remplacés. Une expérimentation a été conduite dans deux arrondissements parisiens et deux départements pour indemniser les heures supplémentaires des agents du corps de maîtrise et d'application plutôt que d'en prévoir la récupération. Cette expérience, conduite sur le principe du volontariat, a connu un échec. Sa généralisation demeure donc très hypothétique.
2. Une police de proximité reposant sur des emplois jeunes
Faute de
policiers sur le terrain, la police de proximité repose sur des emplois
jeunes dont le
recrutement s'avère difficile
.
Étaient en fonction au mois d'août 2001,
16 322 adjoints
de sécurité
, pour un effectif budgétaire de
20 000 et environ
9 000 agents locaux de médiation
sociale
sur les 15 000 prévus.
Le recours à ces agents, opéré dans le cadre des
dispositions de la loi n° 97-940 du 16 octobre 1997 relative au
développement d'activités pour l'emploi des jeunes
suscite de
nombreuses inquiétudes
alors même que
les adjoints de
sécurité sont appelés à représenter un
cinquième de l'effectif du corps de maîtrise et d'application.
Les adjoints de sécurité sont des
« emplois-jeunes » dont le statut relève du
décret n°2000-800 du 24 août 2000
4(
*
)
.
Ils comptent 35% de femmes et 8% d'entre eux sont issus des zones urbaines
sensibles.
Ils sont rémunérés au SMIC, ce qui rend leur fonction peu
attractive.
Leur effectif, fixé budgétairement à 20 000 depuis la
loi de finances pour 2000, n'a en fait jamais réellement
dépassé les 16 000 agents, en raison des
difficultés de recrutement rencontrées
,
particulièrement en Île-de-France.
Un tiers des agents recrutés depuis l'origine sont en outre sortis de
manière prématurée du dispositif. La plupart ont
démissionné. Parmi ceux-ci, 4500 ont réussi un concours de
la police nationale. Par ailleurs, 748 adjoints ont été
licenciés pour indiscipline ou atteinte à la déontologie,
ce qui représente 8,67% des causes de départ. Il est
désormais admis que le remplaçant d'un agent ayant rompu son
contrat soit recruté pour une durée de cinq ans et non seulement
pour la durée du contrat restant à courir.
L'article 13 de la loi n° 2001-1062 du 15 novembre 2001 relative
à la sécurité quotidienne leur a attribué la
qualité
d'agent de police judiciaire adjoint
. Ils assisteront
donc de manière générale les officiers de police
judiciaire. Ils pourront également constater par procès verbal
les
contraventions au code de la route
prévus par décret
en Conseil d'État.
L'article 16 de la même loi a prévu leur intégration dans
le cadre des gardiens de la paix en cas de décès intervenant dans
l'exercice de leurs fonctions ou de blessure grave contractée en mission
de police. Il est à noter que 29 adjoints de sécurité sont
décédés depuis l'origine.
Compte tenu des nouvelles prérogatives qui leur sont accordées
les adjoints bénéficieront désormais d'une
formation
initiale d'une durée de 14 semaines
, au lieu de
10 semaines, comprenant une partie théorique en école de 12
semaines et un stage de deux semaines dans un service. Une
formation
continue de deux semaines
sera dispensée aux adjoints actuellement
en fonction pour leur permettre d'accomplir leurs nouvelles missions.
Faute d'un
encadrement suffisant
, il est fréquent de rencontrer
sur le terrain
des adjoints de sécurité livrés à
eux-mêmes
ou simplement confiés à un jeune stagiaire,
le problème étant plus aigu en région Ile-de-France
où sont affectés beaucoup de gardiens de la paix stagiaires.
En outre, leur présence en priorité dans les zones sensibles,
conduit à
exposer aux risques les plus élevés des
jeunes qui n'y sont pas préparés.
S'agissant de la qualité des personnels, la nécessité de
recrutement en masse a parfois conduit à éluder les
vérifications nécessaires sur les
antécédents
judiciaires
des jeunes. Ont ainsi pu être embauchés des jeunes
dotés d'un casier judiciaire.
Concernant leur avenir, compte tenu du grand nombre de départs à
la retraite et des recrutements attendus dans le corps de maîtrise et
d'application dans les années à venir (environ 25 000 en
cinq ans), les jeunes embauchés auront toute facilité pour passer
les concours de recrutement et être à terme intégrés
dans la police. Le décret n° 99-904 du 19 octobre 1999 leur
réserve ainsi
40% des postes ouverts aux concours
de
recrutement de gardiens de la paix
, à condition qu'ils aient trois
ans d'ancienneté.
Une formation spécifique
est
proposée aux agents à cet effet.
Le ministère envisage en outre une
validation de l'acquis
professionnel
des jeunes qui ne pourront pas entrer dans la police par la
création d'une certification reconnue par les professionnels de la
sécurité privée.
Votre commission insiste à nouveau pour que soit assurée la
qualité de la formation et de l'encadrement
de ces jeunes peu
expérimentés, à qui sont confiées des
missions
parfois dangereuses
et qui sont
le plus souvent dotés d'une
arme
.
3. Une nécessaire complémentarité avec les polices municipales
Les
polices municipales peuvent être un atout important d'une politique de
proximité en complément des forces de police de l'État.
Lors de l'examen de la loi n° 99-291 du 15 avril 1999, le
Sénat avait, sur le rapport de M. Jean-Paul Delevoye au nom de la
commission des Lois, souhaité promouvoir la
complémentarité des polices municipales et de la police
nationale
dans un
cadre partenarial respectant l'autonomie des
communes
.
Le ministre de l'intérieur s'était engagé à faire
paraître plusieurs décrets dès le mois de juillet 1999. Les
délais annoncés sont loin d'avoir été tenus.
La plupart des décrets attendus sont parus dans l'année 2000. Le
dernier décret intervenu est celui relatif à la commission
consultative des polices municipales en date du
26 décembre 2000 (n° 2000-1329). Doivent encore
intervenir les décrets relatifs au code de déontologie des agents
et aux normes applicables aux équipements qui doivent être pris
sur avis de cette commission consultative.
Des
conventions de coordination
entre les polices municipales et les
forces de sécurité de l'État devaient être
signées avant le 27 septembre 2000 dans les communes employant au
moins cinq agents de police municipale, sous peine d'interdiction du travail de
nuit et de l'armement des agents.
A ce jour, ont été signées
1 442 conventions
,
en majorité dans des communes comptant moins de cinq agents de police
municipale souhaitant voir leurs policiers dotés d'une arme. Peu de
communes employant au moins cinq agents n'ont pas signé de convention.
Le nombre de policiers municipaux en fonction est en augmentation. Il
était de
14 442
au mois d'août 2001, contre 13 098 en
1998.
S'agissant de l'armement, ont été délivrées aux
agents, 4 531 autorisations de ports d'armes de la quatrième
catégorie et 8 749 autorisations de ports d'armes de la
sixième catégorie.
Il semble que l'application de cette loi sur le terrain s'effectue
globalement dans de bonnes conditions.
C. LE MALAISE DANS LA POLICE
Depuis
le 23 octobre dernier, se sont succédées des manifestations de
policiers dans tous le pays. Elles ont regroupé plusieurs dizaines de
milliers de policiers de tous les corps.
Ces manifestations traduisent un
malaise général
,
concernant aussi bien les gardiens de la paix que les officiers et les
commissaires de police.
L'élément déclencheur a été le meurtre de
deux policiers au Plessis-Trévise par un récidiviste remis en
liberté par la justice. Mais ces manifestations traduisent un malaise
plus profond accumulé depuis plusieurs années et catalysé
notamment par l'application de la loi sur la présomption d'innocence, la
mise en oeuvre à marche forcée de la police de proximité
et l'échec des négociations sur la réduction du temps de
travail.
Votre rapporteur a reçu les principaux syndicats de personnels actifs.
Tous lui ont exprimé le profond découragement qui gagne la
police.
La plupart souhaitent une
véritable programmation pluriannuelle
des moyens de l'ensemble des acteurs de la sécurité, certains
évoquant un « plan Marshall » de la
sécurité, d'autre un « Grenelle » de la
sécurité.
Ils soulignent que la lourdeur des procédures induites par
la loi sur
la présomption d'innocence
décourage l'action des policiers
et favorise la libération des prévenus par la justice
développant chez les « voyous » un sentiment
d'impunité.
Ils réclament plus de considération et une
meilleure
reconnaissance financière de leur action
, estimant que les risques
encourus et leur qualification ne sont pas reconnus à leur juste niveau.
Ils soulignent les difficultés particulières rencontrées
en Île de France et dans les grandes villes où le coût du
logement est élevé. Ils indiquent que la
rémunération des policiers français est inférieure
à celle de beaucoup de leurs homologues européens ou
américains.
S'agissant de la négociation sur la réduction du temps de
travail, ils se déclarent choqués de voir que le ministère
leur propose, au-delà d'une récupération très
partielle en journées de repos, une rémunération des
heures supplémentaires non récupérées à
57 F de l'heure.
Les négociations avec le ministère ont été
officiellement rompues le 19 novembre.
Devant votre commission, le ministre de l'intérieur a indiqué
avoir proposé aux personnels un
plan d'action renforcée contre
la violence
, autour de quatre objectifs : «
le
renforcement de la présence policière ;
l'amélioration de la protection physique et juridique des personnels de
police ; de nouvelles mesures de lutte contre la violence ; enfin des
mesures concrètes et significatives pour prendre en compte la
difficulté du métier de policier
».
Une évaluation de l'application de la loi sur la présomption
d'innocence a été demandée à M. Julien Dray.
Votre rapporteur estime que ce malaise des policiers doit être pris en
compte par le gouvernement.
Dans un premier temps,
un effort budgétaire significatif
doit
intervenir dans le cadre du présent budget, ne serait-ce que s'agissant
de la réduction du temps de travail et des moyens de fonctionnement et
d'investissement de la police.
Par la suite, il conviendra, s'il y a lieu, d'apporter les modifications qui se
révèleraient nécessaires à la loi sur la
présomption d'innocence.
D'une manière générale, il conviendra
d'élaborer
un état des lieux
des
moyens nécessaires à
l'ensemble des acteurs de la sécurité et
de se donner
enfin les moyens d'une véritable politique de sécurité
cohérente sur le long terme
.
II. UN BUDGET NE RÉPONDANT PAS AUX ATTENTES
Le
projet de budget de la police nationale s'établit à
5,04 milliards d'euros
(soit 33,086 milliards de francs), en
progression de
3,42%
par rapport à 2001.
Le ministre de l'intérieur a affirmé devant votre commission que
cette évolution marquait la priorité accordée à la
sécurité, en particulier à la police de proximité.
Il a considéré que ce projet de budget se situait
«
dans de très hautes eaux pour le budget de la police
nationale, comparables uniquement au « Plan Joxe » de
1985
».
Cette augmentation sera cependant insuffisante pour permettre à la
police d'accomplir normalement ses missions et pour poursuivre dans de bonnes
conditions la généralisation de la police de proximité.
On peut observer en tout état de cause que
la part du budget de la
police dans le produit intérieur brut s'élève à
0,33% contre 0,34% en 1997
et que l'augmentation des crédits de
l'agrégat police nationale est moins forte que celle de l'ensemble des
crédits du ministère de l'intérieur.
A. UNE AUGMENTATION DES DÉPENSES DE PERSONNEL TRADUISANT UN EFFORT INSUFFISANT
En 2002,
les dépenses de personnels s'élèveront à
4,22 milliards d'euros (27,67 milliards de francs).
Représentant 84% des crédits, elles sont en
augmentation de
4,64%
par rapport à la loi de finances pour 2001.
Cette augmentation traduit en premier lieu la mise en oeuvre au sein de la
police nationale des
mesures intervenues au bénéfice de la
fonction publique
(relèvement du point d'indice de 0,5% au
1
er
mai 2001 et de 0,7% au 1
er
décembre, provision
pour les augmentations prévisibles devant intervenir en 2002,
attribution de points d'indice supplémentaires pour personnels
dotés d'indices les plus faibles).
Elle traduit également des
recrutements supplémentaires
et
des
mesures indemnitaires et catégorielles
.
1. Des recrutements supplémentaires en nombre insuffisant
En 2002,
les effectifs budgétaires de la police nationale
s'élèveront à
132 104 agents
(hors adjoints de
sécurité). Ils comprendront 3665 agents supplémentaires,
ce qui représente une augmentation de 2,85%. Les personnels actifs
s'élèveront ainsi à
115 652 agents
.
Compte tenu des 20 000 adjoints de sécurité, les effectifs
totaux s'élèveront à
152 104 agents
.
La situation est certes plus satisfaisante qu'en 2001 qui avait connu une
régression de 1% des effectifs budgétaires globaux et une
diminution de 39 du nombre de policiers actifs.
Effectifs budgétaires de la police
(2002)
Personnels actifs : |
115 652 |
Emplois de direction |
90 |
Commissaires |
2 032 |
Officiers |
15 283 |
Gardiens et gradés |
98 235 |
Agents de statut local |
12 |
Enquêteurs contractuels |
31 |
Personnels administratifs et techniques |
14 232 |
Contractuels (loi du 12 avril 2000 ) |
754 |
Ouvriers |
1 435 |
Adjoints de sécurité |
20 000 |
TOTAL |
152 104 |
a) Les créations et transformations d'emplois
Sont
donc prévues
3000 créations d'emplois
, à savoir
2700 emplois de gradés et gardiens de la paix et 300 emplois d'agents
administratifs et techniques.
S'agissant des gradés et gardiens de la paix,
1000 postes
correspondent à la
pérennisation des recrutements en
surnombre
opérés en 2001 à la suite du Conseil de
sécurité intérieure du 30 janvier 2001. Il est en outre
prévu la
création nette de
1700 postes
(50
brigadiers et 1650 gardiens). Au total, ces créations d'emplois de
personnels actifs représentent 53,36 millions d'euros (350 millions
de francs).
Le recrutement des
300 agents administratifs et techniques
correspond à une dépense supplémentaire de
7,47 millions d'euros (49 millions de francs).
Le
repyramidage des corps
actifs initié par la réforme des
corps et carrières intervenue en 1996 dans le droit fil de la loi
d'orientation du 21 janvier 1995 se poursuit à travers la
transformation
de
400 emplois d'officiers
et de
cinq emplois
de commissaires
en 375 emplois de gardiens et brigadiers majors et en
30 emplois d'attachés de police. 40 emplois de commandants
échelon fonctionnels seront créés au même titre que
les années précédentes. Cette mesure de repyramidage
permet de dégager une économie de 2,97 millions d'euros
(19,5 millions de francs).
Dans son rapport sur la fonction publique en date du 10 janvier 2000,
la Cour des comptes avait souligné que les objectifs de repyramidage
fixés n'étaient pas tenus. En tout état de cause, il
importe que la déflation des corps de commissaires et d'officiers au
profit du corps des gardiens et gradés
reste compatible avec les
besoins en officiers de police judiciaire.
En application de la loi du 12 avril 2000 faisant suite à l'arrêt
Berkani du tribunal des conflits du 25 mars 1996, ont été
intégrés dans les effectifs budgétaires
754 agents
contractuels
de droit privé exerçant des tâches
d'entretien ou de gardiennage, qui deviennent des agents contractuels de droit
public.
b) Des effectifs restant insuffisants
Les chiffres budgétaires ne sont pas en adéquation avec la présence policière réelle sur le terrain, si bien que les créations d'emploi seront insuffisantes pour permettre à la police nationale d'assurer une présence effective sur le terrain .
(1) Les conséquences des départs à la retraite massifs
Du fait
des recrutements massifs intervenus à la fin des années 60 et au
début des années 70, la police doit faire face à un
afflux de départs à la retraite
, aggravé par le
phénomène des prises de
retraite anticipée
.
En application de la loi du 8 avril 1957, les agents peuvent en effet, s'ils
justifient de vingt-cinq ans de service, solliciter leur départ à
la retraite cinq ans avant la limite d'âge de leur corps. Les
gradés et gardiens peuvent donc, en application de cette règle
dite de la «
bonification du cinquième
»
partir à la retraite dès 50 ans.
Les années précédentes, plus des deux tiers des agents du
corps de maîtrise et d'application et près de la moitié des
commissaires partis à la retraite ont bénéficié de
ces dispositions.
Les flux de départ culmineront d'ailleurs au cours de cette année
2002.
Le
repyramidage des corps
crée en outre des besoins
supplémentaires de recrutement pour le corps des gradés et
gardiens de la paix qui voit ses effectifs augmenter au fur et à mesure
que diminue celui des commissaires et des officiers.
Entre 2001 et 2006, devront ainsi être recrutés plus de
29 000 policiers, dont 25 000 agents du corps de maîtrise
et d'application, soit le quart de ce corps.
Compte tenu de la durée de formation, il existe un décalage d'un
an entre le recrutement d'un agent et sa prise de poste. Pour éviter une
désorganisation totale des services, il est indispensable de
prévoir un lissage des recrutements. A ainsi été
autorisé, au mépris de la stricte orthodoxie budgétaire,
le recrutement en surnombre de 1190 gradés et gardiens en 1999, de 1000
pour l'année 2000 et de 1000 pour l'année 2001.
(2) La récupération des heures supplémentaires
Le phénomène de départ à la retraite est aggravé par le cumul en fin de carrière des heures supplémentaires non rémunérées qui permet à un agent de partir à la retraite avant que son poste budgétaire ne soit considéré comme vacant. A l'heure actuelle, plus de 9 millions et demi d'heures supplémentaires restent dues aux personnels, tous services confondus, ce qui, au taux horaire de 8,72 € (57,20 F) de l'heure prévu par le décret n° 2000-194 du 3 mars 2000 représenterait une dépense de 84,27 millions d'euros (552,80 millions de francs). En tout état de cause, les personnels restent attachés à la récupération des heures supplémentaires . Les expériences de paiement des heures supplémentaires des agents du corps de maîtrise et d'application menées dans des sites test sur une base volontaire n'ont ainsi pas eu de résultat probant faute de volontariat significatif parmi les personnels sollicités. Les personnels estiment, à juste titre, que le taux de rémunération qui leur est proposé est dérisoire.
(3) Les difficultés de recrutement des adjoints de sécurité
L'effectif de 20 000 adjoints de sécurité, successivement inscrit dans les lois de finances pour 2000 et pour 2001 n'a jamais été atteint. Au 1 er août 2001, seuls 16. 322 adjoints de sécurité étaient en fonction, ce qui représentait un effectif opérationnel de 12 805 agents sur le terrain. Malgré un effectif théorique budgétaire inchangé, ce déficit de recrutement a été pris en compte par une diminution de 5,2 millions d'euros (34,11 millions de francs) des crédits de rémunération de ces personnels inscrits au budget du ministère de l'intérieur 5( * ) .
(4) Les conséquences prévisibles de la réduction du temps de travail
La
mise en oeuvre des 35 heures
prévue par le décret du
25 août 2000
est difficile dans une administration
caractérisée par la diversité des rythmes de travail et
soumise à une véritable tension dans la gestion des effectifs. La
réduction du temps de travail devrait entrer en application au
1
er
janvier 2002. Elle fait pourtant encore l'objet de
négociations. En tout état de cause, il est à craindre que
le passage aux 35 heures n'
absorbe entièrement les effectifs
supplémentaires recrutés et réduise la capacité
opérationnelle sur le terrain
.
Les personnels soumis à un rythme de travail hebdomadaire travaillent en
effet actuellement 40 heures 30 par semaine et non 39 heures.
Ils bénéficient en compensation d'un congé
supplémentaire de dix jours pendant l'hiver. Un passage à
35 heures entraînerait une compensation supplémentaire de
26,5 jours.
Les solutions envisagées actuellement en cours de négociation
combineraient la récupération de jours et le paiement d'heures
supplémentaires.
(5) La sous-administration de la police et l'accomplissement de tâches indues
Les
créations de postes administratifs
ne suffiront pas à combler
la sous-administration de la police.
La loi d'orientation du
21 janvier 1995 avait prévu la création en 5 ans de
5 000 emplois administratifs et techniques, dont 4 300 emplois
administratifs. Entre le 1
er
janvier 1995 et le
1
er
janvier 2001, seuls 1 077 emplois de ce type ont
été créés, dont 466 emplois administratifs. Le
ratio des membres des forces de l'ordre en France, d'un pour 250 habitants, est
plus élevé que dans certains pays européens voisins,
notamment la Grande-Bretagne (un pour 380), les Pays-Bas (un pour 340) ou
l'Allemagne (un pour 300). Mais ce ratio ne tient pas compte du fait que de
nombreuses tâches administratives effectuées en France par les
policiers actifs le sont à l'étranger par du personnel
administratif. Ce ratio est en tout état de cause moins
élevé en Espagne (un pour 215) et en Italie (un pour 205).
De nombreuses tâches effectuées par les policiers sont en outre
considérées comme des «
tâches
indues
» ne devant pas leur revenir (transfèrement des
condamnés, gardes statiques).
2. Des mesures indemnitaires et catégorielles ne répondant pas aux aspirations des personnels
La police nationale obtient en 2002 une enveloppe catégorielle et indemnitaire de 361 millions de francs, plus importante que celle des années précédentes.
a) La réduction du temps de travail
Une enveloppe de 40,40 millions d'euros (265 millions de francs) est prévue dans le cadre de la mise en oeuvre de la réduction du temps de travail. Il semble que pour maintenir la capacité opérationnelle des services, la réduction du temps de travail se concrétiserait partiellement par le paiement d'heures supplémentaires. Le taux horaire proposé aux personnels de 8,72 euros (57,20 F) semble cependant dérisoire.
b) La réforme du régime indemnitaire des agents du corps de maîtrise et d'application
Une
enveloppe de 8,42 millions d'euros (55,25 millions de francs) sera
consacrée à la
réforme du régime indemnitaire
des agents du corps de maîtrise et d'application
en complément
de celle déjà inscrite dans la loi de finances pour 2001. Le
coût total de la réforme serait ainsi de
27,44 millions d'euros (180 millions de francs) en année
pleine.
Après la création par le décret du 25 mars 1996 de
l'allocation de service des commissaires et la mise en oeuvre, en 1998, de la
prime de commandement au profit des officiers, est en effet actuellement en
cours une réforme du système indemnitaire des agents du corps de
maîtrise et d'application. Les principes retenus sont à la fois de
regrouper de multiples indemnités dans un souci de simplification, de
moduler le montant de la rémunération en fonction du lieu
d'affectation des personnels et de favoriser l'exercice des missions de police
de proximité. Le système serait organisé à trois
niveaux :
- une
allocation de maîtrise
attribuée à chaque
agent du corps de maîtrise et d'application, réunissant les primes
actuellement versées de façon forfaitaires (indemnité pour
service continu et l'indemnité d'agent de police judiciaire, dite APJ
20). Cette prime a été instituée par le décret
n° 2001-722 du 31 juillet 2001. Son montant annuel est de
1097,64 euros (7 200 F) ;
- une indemnité compensatoire pour
sujétions
spécifiques
en
Ile-de-France
, au profit des
agents exerçant dans les ressorts des secrétariats
généraux pour l'administration de la police (SGAP) de Paris et de
Versailles, y compris les fonctionnaires des services centraux. Cette prime,
instituée par le décret n° 2001-721 du 31 juillet
2001 regroupera les actuelles indemnités pour postes difficiles, pour
sujétions exceptionnelles et pour charge d'habitation. Il est
prévu de la verser annuellement selon trois taux
différents : 1739,76 euros (11 412 F) pour le SGAP
de Paris, 1156,86 euros (7 587 F) pour le SGAP de Versailles et
1383,60 euros (9 076 F) pour les services centraux ;
- une
prime de police de proximité
accordée aux
agents exerçant des missions de police de proximité.
Cette prime devrait conjuguer une prime forfaitaire de métier à
taux unique et une prime tenant compte des spécificités horaires
de la police de proximité.
Sa création fait cependant encore l'objet de négociations. Les
représentants du corps de maîtrise et d'application n'y sont pas
favorables. Ils craignent en effet que cette prime n'entraîne un
fractionnement du corps et ils font valoir que l'ensemble des personnels, et
non seulement ceux qui l'exercent sur le terrain, concourent à la
réussite de la police de proximité.
c) Les autres mesures catégorielles
Les
autres mesures catégorielles concernent :
- une provision de 1,043 millions d'euros (6,84 millions de francs) au
bénéfice du
corps de commandement et d'encadrement
.
A cet égard, votre rapporteur tient à souligner à nouveau
le
malaise profond qui semble actuellement régner dans le corps des
officiers
. Ces derniers sont appelés à exercer des
responsabilités de plus en plus lourdes du fait du repyramidage des
corps. Plusieurs circonscriptions de sécurité publique ont ainsi
actuellement à leur tête un commandant. Ce corps estime avoir
été lésé à plusieurs titres à travers
la réforme des corps et carrières, notamment du fait de
l'institution en février 1998 de la prime unifiée de
commandement.
Votre commission souhaite donc que la situation des
fonctionnaires de ce corps soit mieux prise en considération
;
- un repyramidage du corps de conception et de direction par la
création de 34 postes de commissaires divisionnaires pour maintenir
l'avancement à ce grade pour un coût de 0,402 millions
d'euros (2,64 millions de francs) ;
- une provision de 3,549 millions d'euros (23,28 millions de francs)
pour rapprocher le régime indemnitaire
des personnels
administratifs
de celui du personnel des préfectures. Dans le cadre
de la refonte de la catégorie C entamée en 2001, une mesure de
0,364 millions d'euros (2,39 millions de francs) permettra la transformation de
500 emplois d'agents administratifs de 1
ère
classe en
autant d'adjoints administratifs ;
- l'amélioration du régime indemnitaire des personnels de la
police technique et scientifique
à travers une augmentation de
leur indemnité de fonction pour un coût de 0,409 millions
d'euros (2,68 millions de francs). Cette mesure a pour but de
reconnaître l'activité de ces personnels, largement
sollicités ces dernières années dans le cadre des
enquêtes pénales par un recours croissant aux examens et analyses
techniques et scientifiques ;
- la poursuite de l'action entreprise depuis la loi de finances pour 2000
tendant à
diminuer le rythme des départs à la retraite
anticipée
grâce à la création de 200
échelons exceptionnels de gardiens de la paix supplémentaires
acquis automatiquement à 52 ans pour un coût de 0,16 million
d'euros (1,73 million de francs) ;
- la poursuite de
l'extension de la qualification d'officier de police
judiciaire aux agents du corps de maîtrise et d'application
. 1000
agents supplémentaires se verraient attribuer la qualité
d'officier de police judiciaire, en application de la loi du
18 novembre 1998, et donc percevoir la prime correspondante (dite
prime OPJ 16) pour un coût de 0,15 million d'euros
(1 million de francs) uniquement car la mesure n'interviendrait qu'en fin
d'année. On rappellera que ladite prime est d'un montant mensuel de
220 F.
B. DES CRÉDITS DE FONCTIONNEMENT ET D'ÉQUIPEMENT ENCORE INSUFFISANTS
Les crédits de fonctionnement et d'équipement seront insuffisants pour répondre aux retards accumulés ces dernières années s'agissant notamment du parc de véhicules lourds et légers, du parc immobilier, du développement du réseau ACROPOL et du logement des policiers. Il sera en outre difficile de satisfaire des besoins de formation en considérable accroissement.
1. Une progression insuffisante des crédits de fonctionnement
Les
crédits de fonctionnement s'établissent à
667,99 millions d'euros (4, 38 milliards de francs) soit une
augmentation de 0,89% par rapport à la loi de finances pour 2001 (cette
augmentation est cependant de 3,32% à structure constante). Les
crédits, que votre commission avait jugés insuffisants
l'année dernière, le restent donc à maints égards.
Le ministère indique que la priorité sera donnée à
la
poursuite de la généralisation de la police de
proximité
. Il est cependant difficile, comme l'a souligné la
Cour des comptes dans son rapport sur l'exécution de la loi de finances
pour 2000, de cerner les dépenses réellement consacrées au
développement de la police de proximité.
Il est à craindre que les
crédits de formation
ne soient
pas suffisants pour répondre à l'accroissement des besoins.
Les prévisions de recrutement, tous corps confondus, pour 2002
s'élevant à 7421 agents contre 6111 en 2001, la poursuite de la
généralisation de la police de proximité, la formation des
adjoints de sécurité aux fonctions d'agent de police judiciaire
adjoint et le développement des nouvelles technologies devraient
conduire à un fort accroissement des crédits de formation
initiale et continue.
Il est à craindre également que les sommes consacrées au
renouvellement du parc automobile léger
ne soit insuffisantes.
Elles sont en effet des variables d'ajustement de crédits de
fonctionnement globalisés fortement mis à contribution par
ailleurs.
L'âge moyen des véhicules s'est régulièrement
élevé générant des immobilisations pour
réparation beaucoup trop fréquentes. La loi de finances
rectificative pour 2000 avait certes accordé des moyens
supplémentaires pour la rénovation du parc léger, soit
59,61 millions d'euros (391 millions de francs).
Le retard cumulé
évalué par le ministère de l'intérieur
s'établit cependant encore à
297 millions de
francs
On rappellera que la même loi de finances rectificative avait en outre
consacré 10,67 millions d'euros (70 millions de francs)
à l'achat de moyens d'enregistrement audiovisuels pour les
gardes
à vue des mineurs
de manière à assurer l'application
de l'article 14 de la loi du 15 juin 2000. Dans ce cadre, chaque
circonscription de sécurité publique a été
dotée de deux configurations numériques fixes composées
d'un micro-ordinateur, d'une webcam, d'un micro, de graveurs CD et
d'imprimantes laser, ces matériels pouvant être utilisées
pour d'autres usages. Au total, au 16 juin 2001, avaient été
mises en place 2704 configurations fixes et 428 configurations portables.
La loi de finances rectificative pour 2001 comporte une mesure de
450 millions de francs
pour renforcer les moyens de la police
nationale pour lutter contre le terrorisme. Le ministre a indiqué
à votre commission que ces crédits supplémentaires
permettraient de doter chaque policier d'un
gilet pare-balles
. Il
importe également d'améliorer les moyens de
communication
mis à la disposition des fonctionnaires.
Il convient également de prendre en compte les dépenses
supplémentaires liées à la mise
en oeuvre du plan
vigipirate renforcé dont aucun chiffrage n'a été
effectué.
Doit également être financée la contribution de la police
au plan de surveillance des transferts de fonds liés au passage à
l'euro fiduciaire.
Les forces de l'ordre seront fortement mobilisées
à la fin de l'année 2001 et au début de l'année
2002 par cette opération d'envergure.
2. La poursuite des opérations informatiques et de transmissions
Les
crédits consacrés aux dépenses d'informatique et de
télématique s'établissent à
37,26 millions
d'euros
(244,41 millions de francs) au titre des dépenses de
fonctionnement et à
66,16 millions d'euros
(433,98 millions de francs) en crédits de paiement et en
autorisations de programme au titre des dépenses en capital.
Ces crédits permettront la poursuite des grands projets informatiques en
cours et d'en démarrer de nouveaux.
a) La poursuite et le démarrage de projets informatiques
Conformément aux orientations données dans le
schéma directeur informatique et télécommunications et
réaffirmées dans le plan de modernisation de la police nationale
2001-2003, la priorité sera donnée au développement du
programme d'architecture de réseau (CHEOPS) ainsi qu'à celui du
système de traitement des infractions constatées (STIC) et du
fichier automatisé des empreintes digitales (FAED). Sera
également développé le fichier national des empreintes
génétiques (FNAEG). Sera poursuivie la modernisation des salles
d'information et de commandement (SIC).
De nouveaux projets plus récents seront également
développés, tels le projet SINBAD de la direction centrale de la
police de l'air et des frontières pour lutter contre les faux documents,
ou le projet du fichier national de faux monnayage lié à la mise
en place de l'euro.
Enfin, des dotations seront dédiées au développement et
à la mise en oeuvre du programme DIALOGUE de gestion des personnels et
à l'application au ministère de l'intérieur du programme
gouvernemental PAGSI (programme d'action préparant l'entrée de la
France dans la société de l'information).
S'agissant des applications de police résultant des engagements
européens de la France, les systèmes EUROPOL et EURODAC vont
entrer dans leur première phase opérationnelle de
réalisation et de déploiement. Des
incertitudes pèsent
sur la gestion future du projet SIS
(système d'information Schengen)
dont la prise en charge communautaire est envisagée. A l'heure actuelle
le fichier central est géré par la France. Il contient plus de
10 millions de signalements de personnes recherchées ou d'objets.
Les frais de fonctionnement et d'investissement sont avancés par la
France et récupérés auprès des partenaires. La
capacité de connexion au système a été
portée à 18 pays.
Votre commission rappelle que
le fichier de traitement des infractions
constatées (STIC)
a enfin fait l'objet d'une autorisation par le
décret n° 2001-583 du 5 juillet 2001, après
les observations émises en fin 1998 et au début 1999
respectivement par la Commission nationale de l'informatique et des
libertés et le Conseil d'État. L'article 28 de la loi
n° 2001-1062 du 15 novembre 2001 relative à la
sécurité quotidienne, adopté dans le cadre des mesures
antiterroristes, a autorisé la consultation de ce fichier à des
fins de police administrative, y compris s'agissant des affaires judiciaires en
cours.
Le
fichier national des empreintes génétiques
(FNAEG)
créé, en application de la loi du 17 juin 1998,
par le décret n° 2000-413 du 18 mai 2000 et dont le
contenu, au départ réservé aux infractions sexuelles, a
été étendu à d'autres infractions graves contre les
personnes par l'article 56 de la loi relative à la
sécurité quotidienne, devrait devenir opérationnel
à la fin 2001 dans une version provisoire au sein de la sous-direction
de la police scientifique et technique. Une équipe s'est rendue aux
Etats-Unis pour expertiser le système employé par le FBI (CODIS)
qui devrait être utilisé sous réserve d'adaptations et de
compléments.
b) Le lent développement du réseau ACROPOL
Malgré une importante sous-utilisation des
crédits
ouverts en 2001, les dotations liées au développement du
programme ACROPOL de réseau de communications cryptées
numérique sont reconduites à leur niveau de 2001,
soit 60,98
millions d'euros (400 millions de francs) en autorisations de programme
comme en crédits de paiement.
Ce programme
devrait arriver à son terme en 2007
, selon le
scénario médian retenu en 2000, sachant qu'une hypothèse
de développement plus rapide aurait permis l'achèvement du
réseau en 2004. En attendant, priorité est donnée au
développement du réseau dans les zones les plus
criminogènes.
Sont à ce jour déployés les réseaux de base des
départements suivants :
- Région Picardie (palier A3) : Aisne, Somme et Oise ;
- Région Rhône-Alpes (palier A2) : Rhône, Loire et
Isère ;
- Région Ile-de-France (palier A3) : Seine Saint Denis, Hauts de
Seine, Val de Marne, Paris. La mise en service opérationnelle sur Paris
a commencé pour les premiers services de police au mois d'octobre 2001.
- Corse (palier A3): circonscriptions de Bastia et Ajaccio.
Parmi les prochains développements devant intervenir en 2002 figurent
quatre départements de la grande couronne parisienne, la mise à
niveau de la région Rhône-Alpes, la région Nord
Pas-de-Calais, l'Eure et Loire, l'Yonne et la Corse.
Des essais d'interopérabilité avec le réseau RUBIS de la
gendarmerie sont menés en Corse. Votre commission tient à
souligner à nouveau la
nécessité de la
compatibilité des réseaux employés par les forces de
sécurité
.
Votre commission rappelle qu'elle est très attachée à la
réalisation du réseau ACROPOL.
Elle constate avec regrets
l'important accroissement des dépenses liées à la
maintenance du réseau analogique
qui doit être entretenu tant
que le réseau numérique n'aura pas été
étendu à tout le territoire.
Il est d'autant plus regrettable
que n'ait pas été retenu un scénario plus rapide de
développement d'ACROPOL.
3. Des crédits d'investissement en stagnation
Les
crédits d'équipement de la police nationale s'établissent
à 156,87 millions d'euros en
crédits de paiement
(1,03 milliards de francs), soit une
baisse de 14,21%.
Les
autorisations de programme s'élèvent à
216,58 millions d'euros (1,42 milliard de francs), ce qui
représente en revanche une progression de
3,93%.
Les crédits d'équipement consacrés au
parc de
véhicules lourds
se situent à un niveau équivalent
à celui de 2001, soit 9,90 millions d'euros (64,94 millions de
francs) en autorisations de programme et en crédits de paiement. La
durée d'utilisation opérationnelle des véhicules est
comprise entre huit et douze ans. Au delà, les charges de maintenance de
véhicules s'accroissent corrélativement à une baisse
d'efficacité de matériels connaissant des problèmes
mécaniques récurrents. Or,
il apparaît que les
crédits ouverts ne permettront pas de rattraper un retard cumulé
de 220 millions de francs dans le renouvellement des matériels
.
Les crédits
immobiliers
s'établissent à 106,71
millions d'euros (700 millions de francs) en autorisations de programme et
à 67,08 millions d'euros (440 millions de francs) en
crédits de paiement ce qui correspond à une
stagnation des
autorisations de programme et à une baisse importante des crédits
de paiement (-16,7%)
par rapport au budget 2001
.
Cette diminution des crédits de paiement s'explique par le
retard
pris dans les opérations en cours
. De nombreux appels d'offres ont
ainsi été déclarés infructueux et certaines
opérations foncières n'ont pu être réalisées
conformément aux prévisions.
La poursuite de la généralisation de la police de
proximité se traduira par l'affectation de
12,16 millions d'euros
(80 millions de francs) à l'équipement immobilier. A ce jour, 223
postes de police ont été créés. Compte tenu de
l'objectif fixé visant à créer ou réaménager
320 bureaux en 3 ans, il reste à équiper environ 100 locaux
supplémentaires, dont 75 le seront en 2002.
Devraient être livrés en 2002, 44 600 m² de locaux,
notamment :
- les hôtels de police d'Agen, d'Auxerre de Saint Maur ;
- les commissariats de Saint-Claude, Bron, Paris-Bercy et Savigny le
temple ;
- le casernement de CRS de Furiani et la structure de restauration du
casernement de Joigny.
L'année 2002 verra en outre, au mois de janvier, la livraison du premier
« grand projet immobilier » (GPI), à savoir de
l'hôtel de police de Strasbourg. La livraison des hôtels de police
de Montpellier et de Bordeaux devrait intervenir en fin d'année 2002.
Les besoins de rénovation et de construction de locaux resteront
cependant très importants
, compte tenu, là encore, des
retards accumulés en la matière.
Les dotations consacrées au
logement des policiers
sont en
augmentation. La contribution aux dépenses de construction de logement
pour les fonctionnaires s'établira en 2002 à 12,2 millions
d'euros (80,03 millions de francs) en autorisations de programme et à
13,72 millions d'euros (90 millions de francs) en crédits de
paiement, soit une augmentation de 4,57 millions d'euros (30 millions
de francs) en autorisations de programme et de 6,1 millions d'euros (40
millions de francs) en crédits de paiement par rapport aux dotations
2001. Ces dotations supplémentaires, qui étaient rendues
indispensables par le non report des crédits 2001, seront
affectées principalement dans les zones où l'offre du
marché est insuffisante (région parisienne, agglomération
lyonnaise et Nice). Elles devraient permettre la réservation de
400 logements par an au bénéfice des personnels de la police
national.
Mais les mesures en faveur du logement des policiers restent
notoirement
insuffisantes
, si l'on considère que la politique du logement est un
élément essentiel de
fidélisation des agents
à leur poste, notamment en région parisienne.
Votre commission constate donc encore une fois que l'effort en
matière de fonctionnement et d'équipement des services est
insuffisant pour permettre à la police d'accomplir normalement ses
missions.
*
* *
Ces observations ont conduit la commission des Lois à donner un avis de rejet du budget de la section police-sécurité du projet de loi de finances pour 2002.
1
Rapport n° 329 (2000-2001)
2
Rapport n° 329, 2000-2001.
3
Les Andelys (Eure), Aubusson (Creuse), Vitry-le-François
(Marne), Hirson (Aisne), Bagnière-de-Bigorre
(Hautes-Pyrénées) et Saint-Junien (Haute-Vienne).
4
Ce décret remplace, pour des raisons de procédure,
le décret n° 97-1007 du 30 octobre 1997, dont il
reprend l'essentiel des dispositions.
5
On rappellera que seuls 20% des rémunérations des
adjoints de sécurité figurent au budget de la police nationale,
les 80% restant figurant au budget de l'emploi.