Avis n° 72 (2002-2003) de M. Louis SOUVET , fait au nom de la commission des affaires sociales, déposé le 21 novembre 2002
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AVANT-PROPOS
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I. UN BUDGET QUI S'INSCRIT DANS UN CONTEXTE
MARQUÉ PAR UNE DÉTÉRIORATION DURABLE DE LA SITUATION DE
L'EMPLOI
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II. UN BUDGET QUI MARQUE UNE NETTE
RÉORIENTATION DE LA POLITIQUE DE L'EMPLOI VERS LA CRÉATION
D'EMPLOIS DANS LE SECTEUR MARCHAND
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III. UN BUDGET QUI VISE À MIEUX ACCOMPAGNER
LES RESTRUCTURATIONS ÉCONOMIQUES
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I. UN BUDGET QUI S'INSCRIT DANS UN CONTEXTE
MARQUÉ PAR UNE DÉTÉRIORATION DURABLE DE LA SITUATION DE
L'EMPLOI
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TRAVAUX DE LA COMMISSION
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II. EXAMEN DE L'AVIS
N° 72
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2002-2003
Annexe au procès-verbal de la séance du 21 novembre 2002 |
AVIS
PRÉSENTÉ
au nom de la commission des Affaires sociales (1) sur le projet de loi de finances pour 2003 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE ,
TOME II
SANTÉ
Par M. Gilbert BARBIER,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de : M. Nicolas About, président ; MM. Alain Gournac, Louis Souvet, Gilbert Chabroux, Jean-Louis Lorrain, Roland Muzeau, Georges Mouly, vice-présidents ; M. Paul Blanc, Mmes Annick Bocandé, Claire-Lise Campion, M. Jean-Marc Juilhard, secrétaires ; MM. Henri d'Attilio, Gilbert Barbier, Christian Bergelin, Joël Billard, Mme Brigitte Bout, MM. Jean-Pierre Cantegrit, Bernard Cazeau, Jean Chérioux, Mme Michelle Demessine, M. Gérard Dériot, Mme Sylvie Desmarescaux, MM. Claude Domeizel, Michel Esneu, Jean-Claude Étienne, Guy Fischer, Jean-Pierre Fourcade, Serge Franchis, André Geoffroy, Francis Giraud, Jean-Pierre Godefroy, Mme Françoise Henneron, MM. Philippe Labeyrie, Roger Lagorsse, André Lardeux, Dominique Larifla, Dominique Leclerc, Marcel Lesbros, Mmes Valérie Létard, Nelly Olin, Anne-Marie Payet, M. André Pourny, Mme Gisèle Printz, MM. Henri de Raincourt, Gérard Roujas, Mmes Janine Rozier, Michèle San Vicente, MM. Bernard Seillier, André Vantomme, Alain Vasselle, Paul Vergès, André Vézinhet.
Voir les numéros :
Assemblée nationale ( 12 ème législ.) : 230 , 256 à 261 et T.A. 37
Sénat : 67 (2002-2003)
Lois de finances . |
AVANT-PROPOS
Mesdames, Messieurs,
Le projet de budget pour 2003 fixe le montant des crédits du travail à 15,7 milliards d'euros, soit une diminution de 6,2 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2002.
Hors crédits pour la formation professionnelle 1 ( * ) , les crédits devraient diminuer de 8,3 %.
Evolution des crédits consacrés au travail (1)
(en millions d'euros)
LFI 2002 |
PLF 2003 |
Variation |
|
Gestion de la politique de l'emploi |
2.617 |
2.641 |
+ 0,9 % |
Action de l'Etat en faveur des publics prioritaires |
7.740 |
6.378 |
- 17,6 % |
Promotion de l'emploi et adaptations économiques |
911 |
1.036 |
+ 13,6 % |
Financement du retrait d'activité et indemnisation du chômage |
1.579 |
1.727 |
+ 9,4 % |
Total |
12.847 |
11.782 |
- 8,3 % |
(1) Hors crédits formation professionnelle de l'agrégat n° 2
Cette diminution des crédits ne marque pas pour autant un désengagement de l'Etat de la politique de l'emploi qui reste, comme l'a rappelé avec force le Premier ministre, une « priorité nationale » et qui a constitué « la clé de tous les arbitrages ».
Le budget du travail connaît en effet, depuis la loi de finances initiale pour 2000, une diminution tendancielle des crédits liée à la débudgétisation des crédits visant à compenser les allégements de charges au sein du FOREC. Le budget du travail 2 ( * ) est donc loin de prendre en compte l'ensemble des moyens consacrés par l'Etat à la politique de l'emploi. La baisse des charges constitue pourtant la priorité de la politique de l'emploi du Gouvernement. Et, en 2003, les baisses de charges mobiliseront un milliard d'euros supplémentaires dans le cadre du FOREC, principalement du fait de la montée en charge du nouveau dispositif d'allégements prévu par le projet de loi relatif aux salaires, au temps de travail et au développement de l'emploi actuellement en cours d'examen par le Parlement. On observera d'ailleurs que ces moyens correspondent précisément à la diminution des crédits du travail prévue par le présent budget. La politique de l'emploi bénéficie donc d'un niveau d'engagements constant de la part de l'Etat.
Plus que la diminution des crédits, le trait marquant de ce projet de budget réside en réalité dans la forte réorientation de la politique de l'emploi vers la création d'emplois dans le secteur marchand qu'il traduit.
Votre commission ne peut bien évidemment que se féliciter de cette nouvelle orientation, qu'elle appelait de ses voeux depuis plusieurs années.
Structure par agrégats du projet de budget du travail pour 2003
I. UN BUDGET QUI S'INSCRIT DANS UN CONTEXTE MARQUÉ PAR UNE DÉTÉRIORATION DURABLE DE LA SITUATION DE L'EMPLOI
L'orientation d'une politique de l'emploi et du budget y afférent doit avant tout s'évaluer à l'aune du contexte dans lequel elle s'inscrit. Ce contexte est aujourd'hui très préoccupant.
Le chômage est en effet reparti à la hausse depuis un an et demi, provoquant une profonde dégradation de la situation financière de l'Unédic, sans que la modernisation du service public de l'emploi n'ait permis d'enrayer cette progression.
A. UNE DÉTÉRIORATION PROFONDE DU MARCHÉ DU TRAVAIL
Après avoir connu de très bonnes performances en termes de création d'emplois à la suite du retour de la croissance en 1997, notre pays est confronté depuis mai 2001 à une progression significative du chômage.
1. La remontée du chômage
Entre mai 2001 et septembre 2002, le taux de chômage est passé de 8,6 % à 9 %. La modicité apparente de cette progression masque en fait une augmentation de 200.000 du nombre de demandeurs d'emploi sur la période.
Evolution récente du chômage
juin
|
septembre 2001 |
décembre 2001 |
mars 2002 |
juin
|
septembre 2002 |
Evolution depuis juin 2001 |
|
Nombre de demandeurs d'emploi de catégorie 1 |
2.092.400 |
2.136.100 |
2.220.100 |
2.237.300 |
2.262.100 |
2.278.800 |
+ 8,9 % |
Nombre de demandeurs d'emploi de catégorie 1+6 |
2.523.500 |
2.548.400 |
2.608.100 |
2.646.500 |
2.646.500 |
2.678.200 |
+ 6,1 % |
Nombre de chômeurs au sens du BIT |
2.298.000 |
2.327.000 |
2.361.000 |
2.379.000 |
2.409.000 |
2.430.000 |
+ 5,7 % |
Taux de chômage |
8,6 % |
8,7 % |
8,8 % |
9,0 % |
9,0 % |
9,0 % |
- |
Source : ANPE, DARES, Unédic (en données CVS)
Pour mémoire, on rappellera que :
- les demandeurs d'emploi de catégorie 1 sont les personnes inscrites à l'ANPE déclarant être à la recherche d'un emploi à temps plein et à durée indéterminée, ayant éventuellement exercé une activité occasionnelle ou réduite d'au plus 78 heures dans le mois ;
- l'ensemble des demandeurs d'emploi des catégories 1 et 6 recouvre toutes les personnes inscrites à l'ANPE déclarant être à la recherche d'un emploi à temps plein et à durée indéterminée, y compris celles qui ont exercé une activité réduite de plus de 78 heures au cours du mois (catégorie 6) ;
- les chômeurs au sens du bureau international du travail (BIT) sont les personnes sans emploi, à la recherche effective d'un emploi et immédiatement disponibles. Les données sont établies une fois par an à partir des résultats de l'enquête annuelle sur l'emploi effectuée par l'INSEE et sont estimées à l'aide d'un modèle économétrique pour les mois intermédiaires.
Cette détérioration du marché du travail apparaît largement liée au retournement de la conjoncture.
Ces évolutions ne sont effet pas propres à la France, mais elles sont d'autant plus inquiétantes que le taux de chômage dans notre pays continue de se situer à un niveau comparativement élevé. Seuls trois pays de l'Union européenne connaissent aujourd'hui un taux de chômage supérieur au nôtre : l'Espagne, l'Italie et la Finlande. Le taux de chômage français demeure supérieur de 1,5 point à la moyenne européenne.
Comparaison des taux de chômage européens harmonisés
juin 97 |
juin 98 |
juin 99 |
juin 00 |
juin 01 |
juin 02 |
Evolution 2002/2001 (en points) |
Evolution 2002/1997 (en points) |
|
Allemagne |
9,7 |
9,1 |
8,5 |
7,7 |
7,7 |
8,3 |
+ 0,6 |
- 1,4 |
Autriche |
4,4 |
4,6 |
3,9 |
3,7 |
3,5 |
4,1 |
+ 0,6 |
- 0,3 |
Belgique |
9,2 |
9,4 |
8,8 |
6,8 |
6,6 |
6,9 |
+ 0,3 |
- 2,3 |
Danemark |
5,2 |
4,8 |
4,9 |
4,4 |
4,3 |
4,2 |
- 0,1 |
- 1,0 |
Espagne |
17,1 |
15,4 |
12,7 |
12,7 |
10,6 |
11,2 |
+ 0,6 |
- 5,9 |
Finlande |
12,6 |
11,7 |
10,1 |
10,1 |
9,1 |
9,3 |
+ 0,2 |
- 3,3 |
France |
11,9 |
11,4 |
10,9 |
10,9 |
6,6 |
9,2 |
+ 0,6 |
- 2,7 |
Irlande |
10,1 |
7,7 |
5,7 |
5,7 |
3,8 |
4,4 |
+ 0,6 |
- 5,7 |
Italie |
11,5 |
11,7 |
11,3 |
11,3 |
9,5 |
9,0 |
- 0,5 |
- 2,5 |
Luxembourg |
2,7 |
2,7 |
2,4 |
2,4 |
2,0 |
2,3 |
+ 0,3 |
- 0,4 |
Pays-Bas |
5,1 |
3,8 |
3,1 |
3,1 |
2,4 |
2,8 |
+ 0,4 |
- 2,3 |
Portugal |
6,8 |
4,8 |
4,6 |
4,6 |
4,0 |
4,4 |
+ 0,4 |
- 2,4 |
Royaume-Uni |
7,1 |
6,2 |
5,8 |
5,8 |
5,0 |
5,1 |
+ 0,1 |
- 2,0 |
Suède |
10,5 |
8,3 |
7,3 |
7,3 |
4,7 |
4,8 |
+ 0,1 |
- 5,7 |
Moyenne Union européenne |
10,1 |
9,4 |
8,7 |
8,7 |
7,4 |
7,7 |
+ 0,3 |
- 2,4 |
Source : Eurostat (données CVS)
2. La fin de la création d'emplois
En cinq ans, de fin 1996 à fin 2001, l'emploi en France a très fortement progressé de 2,1 millions de postes de travail supplémentaires grâce à une croissance économique soutenue.
Mais, depuis le début de l'année 2002, notre économie ne crée plus d'emplois, comme le souligne une récente étude de la DARES 3 ( * ) :
« Sous l'effet d'un ralentissement de la croissance depuis le début de l'année 2001, l'emploi dans le secteur privé non agricole stagne pour le deuxième trimestre consécutif. Compte tenu des autres emplois, l'emploi total diminue de 1.000 postes ».
Evolution récente de l'emploi
Effectifs (données brutes en milliers) |
Variations trimestrielles des effectifs (données corrigées des variations saisonnières en milliers) |
Variations annuelles des effectifs (données CVS en milliers) |
||||||
2001 |
2001 |
2002 |
du 30/06/00 au 30/06/01 |
du 30/06/01 au 30/06/02 |
||||
31 décembre |
30 juin |
30 sept. |
31 déc. |
31 mars |
30 juin |
|||
Salariés des secteurs concurrentiels non agricoles |
15.347 |
44 |
34 |
47 |
1 |
1 |
427 |
83 |
dont : Industrie |
4.130 |
- 5 |
- 13 |
- 13 |
- 26 |
- 24 |
54 |
- 77 |
Construction |
1.254 |
7 |
5 |
3 |
2 |
1 |
38 |
10 |
Tertiaire |
9.963 |
42 |
42 |
58 |
26 |
24 |
335 |
150 |
CES-CEC-CEV et emplois-jeunes |
494 |
- 9 |
- 7 |
8 |
6 |
- 6 |
- 24 |
0 |
Autres emplois (1) |
8.554 |
1 |
- 6 |
5 |
2 |
4 |
8 |
7 |
Emploi total (y compris contingent) |
24.395 |
36 |
21 |
60 |
9 |
- 1 |
411 |
90 |
(1) Salariés de l'agriculture, salariés en emploi non aidé de l'administration, de l'éducation, de la santé et action sociale, militaires du contingent et non-salariés |
Source : INSEE, DARES, Unédic
Il est à craindre que ce mouvement se confirme au deuxième semestre 2002.
L'Unédic, dans ses prévisions rendues publiques le 6 novembre dernier, table en effet sur une stabilisation de l'emploi salarié en raison de la mauvaise conjoncture économique.
Il est vrai que les entreprises sont conduites à la prudence par les faibles perspectives de croissance et la dégradation de leur situation financière.
B. L'INQUIÉTANTE DÉGRADATION DE LA SITUATION FINANCIÈRE DE L'UNÉDIC
Cette détérioration de la situation de l'emploi n'est bien sûr pas sans incidence sur la situation financière de notre régime d'assurance chômage qui se dégrade rapidement.
1. Des comptes désormais « dans le rouge »
En février 2001, l'Unédic estimait que l'année 2002 devrait se solder par un résultat net d'environ 430 millions d'euros.
En juillet dernier, prenant acte du « contexte économique moins porteur » , l'Unédic tablait sur un déficit de 2,4 milliards d'euros en 2002.
Mais les dernières prévisions rendues publiques le 6 novembre dernier sont encore plus alarmantes. Le déficit d'exploitation du régime devrait atteindre 3,7 milliards d'euros en 2002, après un excédent de 250 millions d'euros en 2001. Si l'on y ajoute un remboursement d'emprunt à hauteur de 1,83 milliard d'euros en novembre 2002, le résultat net du régime serait négatif de 5,5 milliards d'euros, soit une situation pire encore que celle qu'a pu connaître le régime en ses heures les plus sombres de 1992-1993.
D'ores et déjà, l'Unédic a dû se résoudre à recourir à l'emprunt (d'un montant de 2,9 milliards d'euros sur trois mois) pour faire face à ses échéances et pour rétablir sa trésorerie.
Le résultat financier de l'assurance chômage 4 ( * )
(en millions d'euros)
1996 ® |
1997 ® |
1998® |
1999® |
2000® |
2001® |
2002 (P) |
|
RECETTES |
20.462 |
19.629 |
20.549 |
21.331 |
22.775 |
22.723 |
22.540 |
DÉPENSES |
18.892 |
19.957 |
20.867 |
21.748 |
21.444 |
22.476 |
26.229 |
RÉSULTAT DE L'ANNÉE |
1.570 |
- 328 |
- 318 |
- 417 |
1.331 |
247 |
- 3.689 |
® : réalisé
(P) : prévision Source : Unédic, novembre 2002
Cette dégradation a été extrêmement rapide, la situation financière du régime restant très sensible aux évolutions du marché du travail.
La révision à la baisse des prévisions s'explique alors largement par « l'explosion du nombre de chômeurs indemnisés », comme l'analyse l'Unédic dans sa note du 6 novembre dernier :
« Les prévisions financières présentées dans cette note font apparaître des écarts importants par rapport à celles du 3 juillet dernier. Ces écarts sont tout d'abord imputables à des perspectives de croissance revues à la baisse. En effet, la prévision de croissance du PIB pour 2002 s'établit aujourd'hui à + 0,9 %, au lieu de + 1,2 % au mois de juillet. L'optimisme partagé qui régnait encore lors des prévisions de cet été, ne l'est plus aujourd'hui. En effet, la reprise attendue de la production et de l'investissement dès le second semestre 2002 ne s'est pas manifestée.
« Cette révision à la baisse des hypothèses de croissance entraîne des effets conséquents sur les prévisions d'emploi et de chômage pour 2002. Les prévisions d'emploi affilié ont largement été revues à la baisse depuis celles du mois de juillet : l'écart atteint - 106.000 personnes (+ 63.000 contre + 169.000). Symétriquement, les prévisions de chômage ont été revues largement à la hausse : l'écart atteint, sur l'ensemble des catégories de demandeurs d'emploi, (+ 164.000 contre + 55.000).
« Mais la plus forte révision concerne le chômage indemnisé par l'assurance chômage. L'explosion du nombre de chômeurs indemnisés (+ 415.700 entre janvier 2001 et septembre 2002, soit 2.026.000 au 30 septembre), s'explique par des entrées massives au chômage après une longue période de forte croissance économique (plus de 2 millions d'emplois créés en 5 ans) ayant conduit à des salaires de référence plus élevés qu'auparavant et, surtout, des droits à l'indemnisation plus longs. Dans ce contexte, la proportion de chômeurs indemnisés a progressé de plus de 10 points, atteignant aujourd'hui les 52 %. En juillet, l'orientation de la plupart des économistes et prévisionnistes vers une reprise rapide de la croissance aurait permis la stabilisation, voire la baisse du nombre de chômeurs. Mais, dans le contexte retenu dorénavant, c'est-à-dire celui d'une poursuite de la dégradation de la conjoncture économique en 2002 et une reprise encore incertaine pour 2003, le nombre de chômeurs indemnisés devrait encore augmenter au cours des prochains mois » .
Même si l'Unédic n'a pas publié de prévisions pour 2003, on peut craindre que cette dégradation ne se poursuive et s'amplifie en l'absence de toute mesure de redressement.
2. De nécessaires mesures de sauvegarde
Votre commission considère que cette forte dégradation impose dès maintenant l'adoption de mesures vigoureuses visant à prévenir toute nouvelle dégradation de la situation financière du régime qui perd actuellement 300 millions d'euros par mois.
Déjà, le 19 juin dernier, les partenaires sociaux gestionnaires du régime avaient adopté une série de mesures de sauvegarde, passant notamment par une hausse de 0,2 point des cotisations, permettant d'améliorer le résultat net du régime de 800 millions d'euros en 2002. Le Gouvernement avait alors accepté de reporter de 2002 à 2003 le versement de 1,22 milliard d'euros de l'Unédic à l'Etat, prévu par la loi du 17 juillet 2001, afin de prendre en compte « les grandes difficultés observées en 2002 et les efforts consentis par les partenaires sociaux ». Mais l'impact de ces mesures est déjà totalement absorbé.
Aussi, les partenaires sociaux du régime ont-ils prévu d'engager à la mi-décembre une nouvelle négociation visant à rétablir l'équilibre financier du régime.
Dans ce cadre, plusieurs paramètres pourront être mobilisés. Il s'agit notamment de :
- l'augmentation des cotisations,
- la remise en cause de la dégressivité des allocations,
- la diminution du taux de remplacement,
- la révision des délais d'indemnisation,
- le reformatage du Plan d'aide au retour à l'emploi (PARE),
- la clarification des relations financières avec l'Etat.
D'ores et déjà, il apparaît probable que l'Unédic devra en outre recourir à un nouvel emprunt à moyen terme, à l'image de la solution intervenue en janvier 1994.
Il n'appartient bien évidemment pas à votre commission de s'immiscer dans le dialogue social pour ces négociations à venir.
Tout juste se contentera-t-elle de formuler ici trois voeux :
- ces mesures de sauvegarde devraient veiller à répartir équitablement les nécessaires efforts entre cotisants (salariés et employeurs) et allocataires, à l'image des mesures prises lors de la conclusion de la convention d'assurance chômage du 1 er janvier 2001 ,
- ces mesures ne devraient pas conduire à remettre profondément en cause le PARE qui n'a à l'évidence pas encore pu produire tous ses effets et qui apparaît aujourd'hui plus encore indispensable dans la mesure où la montée du chômage rend plus que jamais nécessaire une action vigoureuse afin de favoriser une accélération du reclassement des chômeurs ;
- ces mesures exigeront une mobilisation de tous les acteurs de la politique de l'emploi et notamment de l'Etat, ses relations financières avec l'Unédic restant passablement embrouillées et étant encore marquées par des « différends » 5 ( * ) .
Dans ce contexte, on peut notamment s'interroger sur la capacité de l'Unédic à honorer l'an prochain le versement de 1,22 milliard d'euros à l'Etat, que prévoit l'article 19 du projet de loi de finances.
Déjà, dans leur relevé de décisions du 19 juin dernier, les partenaires sociaux avaient demandé que « l'opportunité de ce versement de 2003 soit examinée au regard de la situation générale du régime ».
Cette opportunité apparaît aujourd'hui pour le moins douteuse. Au moment où le Gouvernement affiche et met en oeuvre une politique vigoureuse d'allégement des charges sociales, il serait quelque peu paradoxal d'inviter les partenaires sociaux à augmenter les cotisations d'assurance chômage dans le seul but d'accroître les recettes non fiscales de l'Etat.
C. LA POURSUITE D'UNE MEILLEURE MOBILISATION DU SERVICE PUBLIC DE L'EMPLOI
Cette dégradation de la situation de l'emploi rend plus que jamais nécessaire une meilleure mobilisation du service public de l'emploi.
Celle-ci a d'ores et déjà été renforcée pour la mise en oeuvre du troisième contrat de progrès et, surtout, de la nouvelle convention d'assurance chômage. Le présent projet de budget du travail s'inscrit à son tour dans cette perspective.
1. Une modernisation déjà largement effective
Déjà, la mise en oeuvre du troisième contrat de progrès liant l'ANPE à l'Etat a permis d'améliorer significativement les performances de l'agence, notamment au travers du service personnalisé pour un nouveau départ, qui a permis de renforcer les prestations de l'agence pour le suivi individualisé des demandeurs d'emploi jusqu'à leur retour à l'emploi.
Ce mouvement a encore été amplifié par la mise en oeuvre de la nouvelle convention d'assurance chômage du 1 er janvier 2001. Celle-ci a dès à présent permis une double modernisation du service public de l'emploi.
Une amélioration des relations entre les acteurs de la politique de l'emploi
Les modalités de mise en oeuvre du dispositif d'aide au retour à l'emploi institué par la convention relative à l'aide au retour à l'emploi et à l'indemnisation du chômage du 1 er janvier 2001 sont déterminées par deux conventions signées entre l'ANPE et l'Unédic d'une part et l'Etat, l'ANPE et l'Unédic d'autre part.
La convention ANPE-Unédic définit les conditions de mise en oeuvre opérationnelles du projet d'action personnalisé (PAP) par l'ANPE et les ASSEDIC, ainsi que les modalités de financement. La convention Etat-ANPE-Unédic précise notamment les conditions dans lesquelles les ASSEDIC participent à l'instruction des dossiers des allocataires susceptibles d'encourir une mesure d'exclusion du revenu de remplacement ainsi que les principes régissant l'intervention des ASSEDIC dans le domaine de la formation professionnelle.
La mise en oeuvre de ces conventions a déjà permis de renforcer les liens des différents acteurs de la politique de l'emploi, permettant alors de contribuer à en améliorer la cohérence.
Ainsi, la mise en oeuvre du PARE a accentué la coopération entre l'ANPE et l'Unédic, l'ANPE étant chargée de prescrire et de mettre en oeuvre les mesures de retour à l'emploi financées par l'Unédic (aide à la formation, aide à la mobilité géographique, aide dégressive à l'employeur).
Cette coopération renforcée se vérifie à tous les niveaux : déclinant les conventions nationales, des protocoles locaux ont été élaborés et des instances régionales et locales de coordination ont permis d'intensifier les échanges parfois restés longtemps trop restreints.
De même, l'ANPE s'est rapprochée des autres acteurs du service public de l'emploi. Une nouvelle politique d'alliance a ainsi été élaborée avec l'APEC, les missions locales et le réseau Cap Emploi afin d'offrir un suivi personnalisé à 200.000 personnes par ces structures spécialisées. La coopération avec l'AFPA s'est également renforcée comme l'analyse notre collègue Annick Bocandé dans son avis budgétaire sur les crédits de la formation professionnelle.
Une amélioration probable des performances du service public de l'emploi
Le dispositif de retour à l'emploi, initié par les partenaires sociaux et désormais généralisé à l'ensemble des demandeurs d'emploi, poursuit et intensifie le programme « nouveau départ » instauré en 1998 dans le cadre du Plan national d'action pour l'emploi. Il s'appuie sur une gamme de services renforcée, depuis l'élaboration d'un projet personnalisé adapté à la situation du demandeur d'emploi, en passant par les actualisations du PAP effectuées régulièrement, tous les six mois, et ce jusqu'au retour à l'emploi.
Ce dispositif, effectif depuis le 1 er juillet dernier, a connu une montée en charge rapide.
Etat de la montée en charge du programme PAP au 30 juin 2002 Le programme a permis de systématiser l'approche préventive jusque-là réservée aux publics cibles du service personnalisé pour un nouveau départ. Depuis le 1 er juillet 2001, tous les nouveaux inscrits ont bénéficié d'un PAP et, depuis septembre dernier, le PAP est désormais proposé à la totalité des demandeurs d'emploi inscrits avant cette date. Ainsi, au cours des six premiers mois de mise en place du programme, 2.300.600 projets d'action personnalisés ont été élaborés, dont 1.124.470 pour des demandeurs nouvellement inscrits. De janvier à juin 2002, ce sont 1.822.305 PAP qui ont été élaborés dont 937.621 pour les nouveaux inscrits. Le suivi des demandeurs d'emploi prévu au plus tard à six mois d'inscription a donné lieu, depuis janvier 2002, à des actualisations du PAP dont le nombre s'établit à 640.161. De janvier à juin 2002, 820.000 personnes ont bénéficié, dès l'élaboration du PAP, d'un appui individualisé, sous forme d'ateliers ou de prestations d'évaluation et 260.000 ont bénéficié de prestations plus longues, sous forme d'accompagnement à l'emploi ou d'accompagnement social. Par ailleurs, une formation a été proposée dans le cadre d'un PAP à près de 500.000 personnes, marquant une augmentation de 50 % par rapport à la même période de 2001. La structure par type de propositions est différente selon les situations des demandeurs d'emploi : les propositions d'accompagnement sont plus importantes pour les demandeurs d'emploi de longue durée et les bénéficiaires du RMI, et s'intensifient au fur et à mesure des actualisations du PAP. L'accompagnement est alors utilisé dans 20 % des cas au lieu de 13 % lors de l'initialisation. |
Source : Ministère des affaires sociales, du travail et de la solidarité
L'application du PAP a donc permis une plus forte mobilisation des prestations de services proposés par l'ANPE aux demandeurs d'emploi.
Evolution des prestations de services de l'ANPE
Année
2000
|
Année
2001
|
Année 2002
|
Année 2003
|
|
Ateliers |
357.777 |
402.455 |
1.000.000 |
1.360.000 |
Evaluations |
99.169 |
109.301 |
175.000 |
310.000 |
Accompagnements |
318.748 |
422.056 |
650.000 |
800.000 |
Bilan de compétence approfondi |
4.306 |
135.000 |
160.000 |
|
Total prestations |
780.164 |
951.449 |
1.960.000 |
2.630.000 |
Source : Contribution de l'ANPE au bilan du PARE, bilan de la mise en oeuvre du dispositif - juin 2002
Votre commission observe toutefois que la mise en oeuvre des mesures de reclassement proposées aux demandeurs d'emploi reste pour l'instant inégale. Ainsi, la mobilisation des aides à la formation a été relativement rapide. En revanche, le recours à l'aide à la mobilité géographique et à l'aide dégressive à l'employeur est plus limité.
Auditionné par votre rapporteur pour avis, M. Michel Bernard, directeur général de l'ANPE, observait ainsi que les moyens nouveaux étaient d'ores et déjà mis en oeuvre à hauteur de 95 % et que les mesures étaient mises en oeuvre à hauteur de 70 %.
Si la montée en charge du dispositif apparaît satisfaisante, cela ne signifie pas pour autant que l'on puisse conclure à l'efficacité d'un dispositif dont l'objectif est de favoriser un retour rapide à l'emploi.
Il apparaît en effet prématuré de dresser dès à présent un premier bilan. Les partenaires sociaux gestionnaires de l'Unédic et l'ANPE, qui réaliseront cette première évaluation qualitative, ne devraient d'ailleurs la présenter que d'ici la fin de l'année.
Sans doute peut-on craindre que ces résultats soient en deçà des espérances initiales.
Il est vrai que le dispositif n'est entré en application que tardivement, au moment même du retournement conjoncturel.
A cet égard, votre commission regrette profondément que le précédent gouvernement ait délibérément pris le risque d'en limiter la portée en reportant durablement son entrée en application. Celui-ci a en effet par deux fois refusé d'agréer les conventions conclues par les partenaires sociaux, reportant par là-même de six mois la date d'agrément, puis a attendu près de cinq mois supplémentaires pour déposer le projet de loi nécessaire à son entrée en vigueur. Une année pleine a ainsi été perdue au plus mauvais moment : il est clair que la montée en charge du dispositif et la phase de « rodage » du dispositif en période de croissance aurait renforcé son efficacité au moment du retournement conjoncturel.
2. Une mobilisation à confirmer
Le présent budget accompagne la poursuite de la montée en charge du dispositif.
Certes, la croissance des moyens repose largement sur les dotations de l'Unédic.
Ainsi, le régime d'assurance chômage a-t-il financé 3.650 des 4.650 nouveaux emplois créés 6 ( * ) pour l'agence en 2001 et 2002 pour l'application du dispositif d'aide au retour à l'emploi.
De même, l'Unédic prend également très largement en charge le financement des prestations 7 ( * ) .
La répartition des ressources de l'ANPE en 2001
Mais le budget de l'Etat n'est pas en reste.
La subvention de fonctionnement de l'Etat à l'ANPE devrait ainsi progresser de 1,7 % en 2003, permettant à l'agence de poursuivre les actions engagées dans le cadre du contrat de progrès.
Evolution de la subvention de fonctionnement à l'ANPE
(en millions d'euros)
1999 |
2000 |
2001 |
2002 |
2003 |
879 |
969 |
1.050 |
1.165 |
1.185 |
Cette dotation pour 2003 traduit en effet très directement, pour sa dernière année d'application, les dispositions du contrat de progrès. Elle devrait notamment permettre à l'agence de poursuivre la mise en oeuvre généralisée du PAP et de continuer la modernisation du réseau d'agences locales et du système d'information.
Votre commission considère que ce processus d'adaptation et de renforcement de l'efficacité de l'agence devra se poursuivre au travers du futur contrat de progrès.
A cet égard, elle estime que le futur contrat de progrès devrait s'articuler autour de trois objectifs principaux :
- la priorité confirmée accordée à la qualité et à l'efficience, notamment par la poursuite du passage d'une logique de moyens à une logique de résultats ;
- l'adaptation de l'agence à l'évolution du marché du travail (et, en particulier à l'accentuation de la mobilité professionnelle), qui passe par un positionnement sans doute plus en amont de l'agence pour accompagner la construction des parcours professionnels ;
- le renforcement de la « territorialisation » de l'action de l'agence, afin de mieux l'ancrer dans les politiques locales ou régionales de l'emploi et de la rapprocher des acteurs locaux, et notamment des collectivités locales. A cet égard, il serait souhaitable que l'agence s'attache à favoriser le retour à l'emploi des titulaires du RMI, en étroite coordination avec les politiques d'insertion des conseils généraux.
II. UN BUDGET QUI MARQUE UNE NETTE RÉORIENTATION DE LA POLITIQUE DE L'EMPLOI VERS LA CRÉATION D'EMPLOIS DANS LE SECTEUR MARCHAND
L'année passée, dressant le bilan de la politique de l'emploi menée depuis 1997, votre commission avait, une nouvelle fois, regretté la priorité accordée à l'emploi non marchand, considérant qu'elle n'était pas de nature à réduire durablement le niveau du chômage dans notre pays dans la mesure où elle ne permettait pas la création d'emplois durables :
« Le bilan de la législature en matière de politique en faveur de l'emploi des publics prioritaires n'est pas satisfaisant. Certes, les moyens considérables qui ont pu être mobilisés ont permis d'obtenir des résultats quantitatifs. Mais comme cela a déjà été expliqué, le coeur du chômage structurel n'a pas été véritablement attaqué.
« En fait, le vrai problème réside dans le fait que la politique de l'emploi menée depuis 1997 a donné la priorité au secteur non marchand aux dépens du secteur marchand 8 ( * ) . »
Le présent budget marque incontestablement une forte rupture par rapport à la politique antérieure, ce dont se félicite votre commission : la priorité est clairement donnée à l'emploi dans le secteur marchand, ce qui se traduit par une réallocation des moyens correspondants en faveur des publics prioritaires.
Certes, cette orientation passe également par une diminution significative des crédits en faveur des publics prioritaires. Ils devraient ainsi baisser de 17,6 % en 2003.
Evolution des crédits en faveur des publics prioritaires
(en millions d'euros)
LFI 2002 |
PLF 2003 |
Evolution
|
|
A - Actions spécifiques en faveur des jeunes |
3.393,51 |
3.105,01 |
- 8,5 |
Nouveaux services emplois-jeunes |
3.219,71 |
2.781,33 |
- 13,6 |
Réseau d'accueil, TRACE, bourse d'accès à l'emploi et contrats jeunes |
173,80 |
323,68 |
86,2 |
B - Actions d'insertion en faveur des publics en difficulté |
3.389,78 |
2.270,69 |
- 33,0 |
Contrats emploi-solidarité |
1.015,62 |
279,50 |
- 72,5 |
Contrats emploi-consolidé |
999,00 |
959,00 |
- 4,0 |
Emplois ville |
6,71 |
0,00 |
- 100,0 |
Contrats de retour à l'emploi - CERMI |
9,91 |
9,91 |
0,0 |
Contrats d'initiative emploi |
781,45 |
483,95 |
- 38,1 |
Programme chômeur de longue durée (SIFE, SAE, mesures d'accompagnement de la globalisation) |
394,87 |
360,14 |
- 8,8 |
Contrats de plan Etat-Régions |
17,56 |
20,32 |
15,7 |
Insertion par l'économique |
164,66 |
146,85 |
- 10,8 |
Dotation globalisée expérimentale de la région Centre |
11,02 |
||
C - Actions en faveur des travailleurs handicapés |
957,16 |
1.002,35 |
4,7 |
Total |
7.740,45 |
6.378,05 |
- 17,6 |
Mais cette réduction des crédits ne semble pas devoir faire obstacle aux deux priorités affichées par le Gouvernement en la matière : lutter énergiquement contre le chômage des jeunes, en particulier des moins qualifiés, en encourageant l'accès à une première expérience professionnelle en entreprise ; mobiliser les dispositifs d'insertion dans le secteur non marchand pour les recentrer sur les publics les plus éloignés de l'emploi et notamment sur les personnes handicapées.
A. LA PRIORITÉ ACCORDÉE À L'INSERTION PROFESSIONNELLE DES JEUNES LES MOINS QUALIFIÉS DANS LE SECTEUR MARCHAND
Le Gouvernement a fait de la lutte contre le chômage des jeunes une de ses priorités. Cet engagement se justifie pleinement au regard de l'évolution très préoccupante du chômage des jeunes depuis un an. Sur cette période, le taux de chômage a augmenté chez les jeunes deux fois plus vite que le taux de chômage moyen. Cette situation affecte en particulier les jeunes les moins qualifiés, pour lesquels le taux de chômage atteint désormais 33 %.
Le projet de budget du travail tire alors les conséquences des mesures prises par le Gouvernement pour favoriser l'emploi des jeunes.
1. Privilégier l'insertion dans le secteur marchand : les contrats « jeunes en entreprise »
La création du contrat « jeunes en entreprise », entré en application rétroactivement au 1 er juillet 2002, concrétise la résolution du Gouvernement d'offrir aux jeunes peu ou pas qualifiés une possibilité d'insertion durable dans le secteur privé. Le dispositif proposé complète tant les dispositifs d'alternance que les régimes de droit commun d'allégement des charges. Il permet d'abaisser le coût du travail des jeunes non qualifiés par l'octroi aux entreprises d'un soutien forfaitaire, qui, ajouté aux exonérations de charges existantes, permette de compenser tout ou partie des charges patronales sur le salaire (sécurité sociale, Unédic, retraites complémentaires, autres prélèvements).
Le contrat « jeunes en entreprise » Le contrat « jeunes en entreprise » institué par la loi n° 2002-1095 du 29 août 2002 portant création d'un dispositif de soutien à l'emploi des jeunes en entreprise , vise à favoriser l'embauche en entreprise et à offrir une expérience professionnelle à des jeunes entre 16 et 22 ans qui, en raison de leur faible niveau de formation (inférieur au baccalauréat), éprouvent des difficultés à s'insérer sur le marché du travail. Ces contrats à durée indéterminée ouvrent droit à une aide de l'Etat pendant trois ans, sous la forme du versement à l'employeur d'une compensation forfaitaire de cotisations sociales à hauteur de 225 euros par mois, cumulable avec les allégements de charges existants. Cette aide est versée à taux plein les deux premières années et à 50 % la troisième année. Le soutien de l'Etat est équivalent (les deux premières années), pour une entreprise à 35 heures, à une exonération totale des charges patronales au niveau du salaire minimum, et pourra progresser avec le salaire dans des conditions fixées par décret afin d'éviter toute trappe à bas salaire. Le dispositif est géré par l'Unédic, les DDTEFP en assurant le suivi (ils statuent notamment sur les dossiers difficiles, sur les recours éventuels et vérifient la déclaration de l'employeur). |
La dotation arrêtée pour 2003 au titre des contrats « jeunes en entreprise » s'élève à 200 millions d'euros et doit permettre de prendre en charge 74.000 contrats en année pleine.
2. Préparer une « sortie en bon ordre » du dispositif des emplois-jeunes
En octobre 2000, votre commission avait, dans un rapport d'information 9 ( * ) , dressé un premier bilan du programme « nouveaux services - emplois-jeunes ».
Elle avait alors établi un bilan très mitigé de ce programme, observant notamment que, contrairement aux objectifs initiaux et pour un coût budgétaire très élevé, ce programme s'adressait principalement aux jeunes les moins éloignés de l'emploi et ne permettait que très imparfaitement le développement d'activités nouvelles répondant à des besoins non satisfaits. Elle s'était tout particulièrement inquiétée des perspectives de pérennisation des postes et d'insertion professionnelle ultérieure des jeunes entrés dans le dispositif. En conséquence, elle s'était prononcée en faveur d'une « sortie en bon ordre » du dispositif et avait formulé plusieurs propositions en ce sens.
Elle ne peut donc que partager la décision prise par le Gouvernement -et transcrite par le présent projet de budget du travail- de mettre un terme à l'entrée de nouveaux jeunes dans le dispositif et d'organiser ainsi son extinction progressive.
Au 31 décembre dernier, 224.000 jeunes étaient effectivement en poste pour un total de 272.000 postes créés et de 355.000 jeunes passés dans le dispositif depuis son origine en octobre 1997.
Situation des emplois-jeunes au 31 décembre 2001
Collectiv. territ |
Assoc. |
Etablis publics |
Autres |
Education nationale |
Police |
Justice |
Total |
|
Nombre de postes créés |
62.007 |
87.558 |
26.426 |
7.103 |
67.017 |
20.000 |
2.000 |
272.111 |
Nombre d'embauches réalisées |
73.925 |
117.058 |
32.894 |
8.612 |
92.258 |
27.614 |
2.158 |
354.519 |
Nombre de jeunes en poste |
48.739 |
71.046 |
20.947 |
5.351 |
60.430 |
15.800 |
1.701 |
224.014 |
Source : DARES
Dans cette perspective, le présent projet de budget du travail prévoit logiquement une diminution de 13,6 % des crédits budgétaires correspondants.
Evolution des crédits budgétaires relatifs aux emplois-jeunes 10 ( * )
(en millions d'euros)
LFI 1998 |
LFI 1999 |
LFI 2000 |
LFI 2001 |
LFI 2002 |
PLF 2003 |
1.227 |
2.122 |
3.253 |
3.355 |
3.219 |
2.781 |
Cette diminution prend principalement en compte la diminution des effectifs en lien avec l'arrivée au terme des cinq années d'aide des emplois créés en 1998.
Ainsi, le nombre de jeunes en poste devrait passer de 213.300 au 31 décembre 2002 à 161.400 au 31 décembre 2003.
Evolution prévue des effectifs d'emplois-jeunes en 2003
2002 |
2003 |
|
Emplois-jeunes hors administration |
139.000 |
108.600 |
Emplois jeunes dans l'administration |
74.300 |
52.800 |
dont Education nationale |
57.000 |
37.000 |
dont Intérieur |
15.500 |
14.000 |
dont Justice |
1.800 |
1.800 |
Total |
213.300 |
161.400 |
Source : Ministère des affaires sociales, du travail et de la solidarité
Pour autant, afin d'accompagner la sortie progressive du dispositif, des mécanismes de consolidation sont d'ores et déjà prévus pour permettre à certains employeurs de prendre en charge progressivement le coût total des emplois créés :
- la possibilité, pour les associations, de différer, à leur demande, une partie du versement de l'aide de l'Etat au-delà de la période initiale de cinq ans prévue par la convention pour la reporter sur trois années supplémentaires avec un abondement supplémentaire de l'Etat (mécanisme dit de l'« épargne consolidée) est maintenue ;
- des conventions d'objectif à l'issue des cinq ans pourront être conclues pour certains organismes de droit privé à but non lucratif ; elles s'appuient sur une aide financière dégressive sur trois ans, ou moins, selon la situation de l'association, dès lors qu'elle a créé de nouveaux services répondant à des besoins collectifs d'intérêt général non encore solvabilisés ;
- le secteur associatif bénéficiera dans le cadre du budget 2003 d'une possibilité complémentaire de soutien financier exceptionnel ;
- l'ensemble des organismes publics ou privés bénéficiant actuellement de l'aide au poste peut bénéficier des crédits d'accompagnement et d'ingénierie destinés à financer des prestations d'appuis et de conseils pour la pérennisation des activités.
Ainsi, le projet de budget du travail prévoit une mesure nouvelle de 50 millions d'euros, au-delà des seuls crédits de rémunération et d'accompagnement, destinée à favoriser la pérennisation des emplois :
- 40 millions d'euros seront destinés à la conclusion de conventions d'objectifs pluriannuelles dégressives pour les organismes de droit privé à but non lucratif ;
- 10 millions d'euros seront consacrés à un soutien financier exceptionnel au secteur associatif, lui permettant de conclure un certain nombre de contrats dont la procédure d'agrément était en cours au moment où la décision de suspendre le programme a été prise.
Il reste que ce dispositif d'extinction progressive, s'il propose effectivement des mesures d'aide à la pérennisation des emplois créés par les associations dont l'utilité serait avérée mais dont le financement ne serait pas assuré, n'apporte aucune solution pour faciliter la sortie du programme des jeunes pour lesquels les perspectives de pérennisation du poste sont faibles.
Votre commission avait formulé en son temps des propositions en faveur de ces jeunes qui risquent d'être les grands perdants de ce dispositif conçu à la hâte. Elle se permet ici de les rappeler et considère qu'elles mériteraient sans doute d'être explorées plus avant pour garantir une réelle « sortie en bon ordre ».
« Pour les emplois dont la pérennisation est incertaine et pour les jeunes dont les possibilités d'insertion durable sont les plus faibles, il serait souhaitable de réfléchir à un possible « basculement » de l'aide au poste versée par l'Etat.
« Ainsi, au bout de deux ou trois ans de contrat, si le jeune est recruté par une entreprise, l'aide au projet pourrait être versée à l'entreprise s'engageant à embaucher le jeune en contrat à durée indéterminée. Cette aide serait toutefois minorée par rapport à l'aide actuelle et dégressive. L'entreprise pourrait toucher par exemple 60 % du SMIC la première année, 40 % la deuxième et 20 % la troisième.
« Un tel système permettrait ainsi d'assurer la sortie des emplois-jeunes du dispositif, en allégeant la charge budgétaire pour l'Etat et sans entraver le développement des nouvelles activités (le « basculement » n'étant possible qu'à partir du moment où la perspective de pérennité de l'emploi apparaît insuffisante).
« Cette possibilité de basculement pourrait être limitée aux jeunes les moins qualifiés pour éviter les effets d'aubaine. »
3. Prévenir l'exclusion : le programme TRACE
L'accès des jeunes à l'emploi doit également reposer sur un accompagnement renforcé préalable des jeunes les plus en difficulté, confrontés au risque d'exclusion.
A cet égard, le programme TRACE mis en place par la loi d'orientation du 29 juillet 1998 relative à la lutte contre les exclusions a pour objectif d'offrir un accompagnement personnalisé aux jeunes les plus éloignés de l'emploi afin de leur permettre de construire un parcours d'insertion individualisé d'une durée maximale de 18 mois. Le pilotage du programme est confié au réseau d'accueil des jeunes (missions locales ou PAIO).
Les crédits d'accompagnement des jeunes vers l'emploi devraient diminuer en 2003 parallèlement au recentrage du dispositif.
(en millions d'euros)
LFI 2002 |
PLF 2003 |
Évolution |
|
TRACE |
18,3 |
11,7 |
- 36,1 % |
Bourse d'accès à l'emploi |
75,5 |
30,2 |
- 60 % |
Réseau d'accueil, d'information et d'orientation des jeunes |
79,9 |
81,8 |
+ 2,4 % |
TOTAL |
173,7 |
123,7 |
- 28,7 % |
Les résultats du programme TRACE apparaissent en effet ambivalents.
Si le programme TRACE s'est traduit par la prise en charge de 180.000 jeunes entre octobre 1998 et juin 2002 et a permis à près de la moitié d'entre eux d'accéder à l'emploi, plus de 37 % des jeunes sortant du programme se retrouvent au chômage, sans indemnisation le plus souvent. En outre, le programme n'atténue qu'imparfaitement les inégalités de formation : 60 % des jeunes de niveau IV et plus sortent du programme pour accéder à l'emploi contre 45 % seulement pour les jeunes de niveau VI. On observe enfin que le programme, initialement ciblé vers les jeunes les moins qualifiés, s'est progressivement écarté de sa vocation initiale : alors que 64 % des entrants en 1999 étaient de niveau V bis ou VI, cette proportion n'était plus que de 54 % en 2001.
Aussi, les moyens budgétaires sont-ils adaptés en conséquence afin de recentrer le dispositif et de renforcer son efficacité.
Les crédits alloués au réseau d'accueil (missions locales et PAIO) augmentent de 2,4 % afin de poursuivre le processus de restructuration et de professionnalisation du réseau.
Les crédits de fonctionnement diminuent de 36 %, reflétant en cela la diminution constatée en 2002 du nombre de jeunes pris en charge par les opérateurs extérieurs. Le nombre de jeunes pris en charge dans ce cadre devrait néanmoins être maintenu à 14.000 en 2003 soit un nombre équivalent à celui qui devrait être réalisé en 2002.
Les crédits relatifs à la bourse d'accès à l'emploi sont en forte diminution, celle-ci n'étant pas reconduite en 2003. Les crédits devraient donc simplement permettre la poursuite de la prise en charge des jeunes qui en ont bénéficié en 2002.
La bourse d'accès à l'emploi a été créée, à titre expérimental pour 2002, pour les jeunes inscrits dans le programme TRACE. Elle est attribuée pendant les périodes du parcours non rémunérées, ni indemnisées au titre de l'assurance chômage. Elle garantit un montant de ressources maximum de 300 euros par mois et peut être versée dans la limite de 900 euros, renouvelable si nécessaire.
A cet égard, votre commission s'était inquiétée l'année passée des imprécisions de ce nouveau dispositif. Elle avait notamment regretté que rien n'ait été prévu « pour déterminer comment sera évaluée cette expérimentation avant qu'elle ne devienne caduque » . Dans ces conditions, l'extinction de ce dispositif expérimental élaboré dans la précipitation ne saurait surprendre, les retards constatés pour la mise en place de l'expérimentation 11 ( * ) n'ayant pas permis d'en effectuer une évaluation.
B. LE RECENTRAGE DES ACTIONS D'INSERTION VERS LES PUBLICS LES PLUS EN DIFFICULTÉ
L'un des principaux traits marquants de ce projet de budget du travail consiste dans le rééquilibrage réalisé entre les dispositifs d'insertion des personnes les plus éloignées de l'emploi.
Ce rééquilibrage prend une triple forme :
- le ciblage des contrats aidés d'insertion sur les publics les plus en difficulté ;
- le soutien réaffirmé aux structures d'insertion par l'économique ;
- un effort soutenu en faveur de l'insertion professionnelle des travailleurs handicapés.
1. Un meilleur ciblage des contrats aidés
Les crédits consacrés aux contrats aidés sont en diminution sensible, notamment pour les contrats aidés dans le secteur non-marchand.
Evolution des crédits en faveur des contrats
aidés
et des mesures d'insertion
(en millions d'euros)
LFI 2002 |
PLF 2003 |
Evolution |
|
Contrat emploi-solidarité (CES) |
1.015,6 |
279,5 |
- 72,5 % |
contrat emploi consolidé (CEC) |
999 |
959 |
- 4 % |
Emplois - ville |
6,7 |
0 |
ns |
Contrat de retour à l'emploi (CRE) |
9,9 |
9,9 |
6 % |
contrat initiative-emploi (CIE) |
781,4 |
483,9 |
- 38,1 % |
stages d'insertion et de formation à l'emploi (SIFE) et stages d'accès à l'entreprise (SAE) |
394,9 |
360,1 |
- 8,8 % |
TOTAL |
3.207,5 |
2.092,4 |
- 34,8 % |
Cette diminution des crédits témoigne, en réalité, de la volonté du Gouvernement de poursuivre le recentrage de ces dispositifs vers les publics les plus en difficulté, qui se traduit alors logiquement par une diminution prévisible du nombre des entrées dans ces dispositifs en 2003.
Evolution du nombre de contrats aidés
et
mesures d'insertion
(en flux d'entrées annuels)
2001 |
2002 |
2003 |
||
Réalisé |
Prévision budgétaire |
Prévision de réalisation |
Prévision budgétaire |
|
CES |
294.544 |
260.000 |
252.000 |
80.000 |
CEC |
47.062 |
45.000 |
40.000 |
30.000 |
CIE |
90.870 |
90.000 |
70.000 |
70.000 |
SIFE collectifs |
102.195 |
90.000 |
93.000 |
80.000 |
SIFE individuels |
24.618 |
25.000 |
25.000 |
25.000 |
SAE |
17.577 |
20.000 |
18.500 |
20.000 |
TOTAL |
576.866 |
530.000 |
498.500 |
290.000 |
Cette diminution relève d'une double logique :
- d'abord, un recentrage accéléré des mesures vers les publics les plus éloignés de l'emploi , le présent budget s'inscrivant à cet égard dans le prolongement des budgets précédents.
Depuis plusieurs années, la part des publics prioritaires croît fortement dans ces dispositifs. Sont ainsi considérés comme public prioritaire les chômeurs de longue durée inscrits depuis plus de trois ans à l'ANPE ; les bénéficiaires du RMI sans emploi depuis un an ; les allocataires de l'allocation spécifique de solidarité sans emploi depuis un an ; les allocataires de l'allocation parent isolé sans emploi depuis un an ; les travailleurs handicapés ; les personnes âgées de plus de 50 ans sans emploi depuis un an ; les jeunes de 16 à 25 ans accompagnés dans le cadre du programme TRACE.
On est ainsi passé de 53 % de bénéficiaires d'un CES appartenant à un public prioritaire en 1998 à 88,5 % en 2001 en France métropolitaine. Ainsi, 37 % des personnes en CES sont bénéficiaires du RMI, 26 % sont chômeurs depuis plus de trois ans, 19 % sont des jeunes en grande difficulté et 12 % sont des travailleurs handicapés.
De même, pour les CIE, la part des publics prioritaires s'est également renforcée, passant de 68 % en 1997 à 86 % en 2001.
- ensuite, une réorientation des crédits en faveur des emplois aidés vers le secteur marchand .
Les diminutions de crédits affectent, en effet, principalement les contrats aidés dans le secteur non marchand (CEC et surtout CES).
A l'inverse, la diminution des crédits en faveur du CIE ne devrait pas limiter le nombre d'entrées dans ce dispositif. On observera à ce propos qu'une telle diminution apparaît être la conséquence directe des dispositions de la loi de finances initiale pour 2002 qui, à son article 141, a réformé le dispositif 12 ( * ) , avec pour effet de limiter sensiblement son attractivité 13 ( * ) .
Votre commission partage ce souci de recentrage des contrats aidés qu'elle appelait de ses voeux dans son dernier avis budgétaire.
Elle considère, en effet, qu'il importe de cibler ces contrats, dont le coût budgétaire reste élevé 14 ( * ) , sur les publics les plus en difficulté, mais aussi d'améliorer leur efficacité en matière d'insertion. Cette dernière apparaît encore bien trop faible. Ainsi, la dernière enquête réalisée en 2001 sur le devenir des personnes en CES, six mois après leur sortie du dispositif, montre que 41 % d'entre eux sont au chômage, 25 % occupent un nouveau CES ou un CEC, et seulement 18 % ont un emploi non aidé.
Il reste que les restrictions prévues par le présent projet de budget sur les CES n'ont pas manqué de susciter une certaine émotion, notamment chez les professionnels de l'insertion. Il est vrai que ces contrats peuvent constituer une réponse adaptée pour prévenir un chômage prolongé des personnes les plus en difficulté qui sont souvent les premières victimes du retournement de la conjoncture.
Dans ces conditions, votre commission ne peut que se féliciter que le Gouvernement ait décidé d'assouplir quelque peu sa position sur ce point.
Initialement, le projet de budget traduisait un double encadrement de ce dispositif :
- un encadrement quantitatif, le recentrage du dispositif sur les publics prioritaires ramenant le flux cumulé d'entrée en CES en 2003 à 80.000 personnes, contre 250.000 probablement en 2002 ;
- un encadrement financier, une circulaire du 5 septembre dernier ayant diminué à compter du 1 er octobre, le taux de la prise en charge financière par l'Etat de ces contrats pour les nouveaux contrats conclus après cette date : en application de cette circulaire, les CES ne peuvent plus être pris en charge par l'Etat aux taux majorés de 90 % ou 95 %, seuls les taux réglementaires de 65 % et 85 % étant applicables.
Depuis, le Gouvernement est revenu en partie sur ce double encadrement.
Il a, en effet, annoncé sa décision de maintenir un rythme de conclusion moyen d'environ 20.000 nouveaux contrats par mois ; cela correspond alors à une quasi-stabilisation des flux d'entrées.
En outre, une nouvelle instruction du ministère des affaires sociales, du travail et de la solidarité du 24 octobre dernier permet le maintien des taux majorés jusqu'à 95 % -et jusqu'au 31 juillet 2003- dans deux cas :
- pour les jeunes en grande difficulté, et notamment ceux engagés dans le programme TRACE et ceux qui sont suivis par la protection judiciaire de la jeunesse, dans la mesure où ils ne peuvent intégrer dans l'immédiat le programme « jeunes en entreprise » ;
- pour les publics accueillis dans les chantiers d'insertion.
Le coût supplémentaire de ces « assouplissements » n'implique pas, dans l'immédiat, une majoration des crédits budgétaires, comme l'a indiqué le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité lors de son audition par votre commission. Les crédits inscrits au budget permettent, en effet, de financer d'ores et déjà 160.000 entrées, dont la moitié par le report de crédits de 2002 sur 2003. On rappellera, à ce propos, que 384 millions d'euros de crédits avaient du être reportés fin 2001, faute d'avoir été consommés. Ce montant est supérieur au montant des crédits prévus par le budget pour 2003. Le complément de crédits pourra alors être inscrit, selon les besoins constatés, dans le collectif 2003. A cet égard, votre commission croit qu'il serait également possible de mieux mobiliser les crédits du Fonds social européen, encore trop mal sollicités.
Pour autant, votre commission juge souhaitable d'engager une réflexion d'ensemble sur la modernisation de nos dispositifs d'insertion des publics les plus en difficulté, qui ne peut à l'évidence se résumer à la seule dimension de leur régulation budgétaire.
Le Gouvernement a, d'ores et déjà annoncé son intention de mettre en place un nouveau « contrat d'insertion dans la vie sociale » (CIVIS), qui pourrait être effectif dès la mi-2003. Lors de son audition par notre commission, M. François Fillon a précisé les grandes lignes de ce futur contrat. Réservé aux jeunes de 18 à 25 ans d'un niveau de formation inférieur ou égal au baccalauréat, ce contrat serait géré de manière décentralisée, les missions locales évaluant les capacités des jeunes et leur proposant un contrat personnalisé. Ce contrat pourrait, notamment, prévoir une bourse d'accès à l'emploi, une aide à la création d'entreprise ou le financement d'actions humanitaires. Il ouvrirait la possibilité d'une prise en charge, sur 3 ans, de 80 % du salaire du jeune travaillant dans une association ou pour l'éducation nationale, et reposerait sur une intervention importante des collectivités locales (et notamment les régions pour son volet formation).
Le Gouvernement a également indiqué envisager, conformément aux propositions d'un récent rapport du commissariat général au Plan 15 ( * ) , la fusion des CES et des CEC dans le cadre d'un nouveau contrat unique, dont les caractéristiques pourraient être modulables afin de mieux répondre aux besoins des publics concernés.
Ces premières pistes apparaissent intéressantes. Mais votre commission estime, pour sa part, que cette réflexion devrait s'inscrire dans un cadre plus global afin d'intégrer l'ensemble des mesures en faveur des personnes les plus éloignées de l'emploi (CIE, SIFE, SAE).
Tous ces instruments ont leurs mérites, mais aussi leurs faiblesses. Leur articulation est loin d'être toujours claire et leurs résultats en matière d'insertion durable sur le marché du travail sont, pour le moins, contrastés. Aussi, tous ces dispositifs semblent devoir être réexaminés en profondeur afin de renforcer notamment leur dimension professionnalisante et leur adéquation avec les besoins du marché du travail.
2. Le soutien réaffirmé à l'insertion par l'économique
L'insertion par l'économique a constitué un des leviers privilégiés des politiques d'insertion et de lutte contre les exclusions conduites ces dernières années. Cette priorité s'est traduite par une augmentation importante des crédits alloués par l'Etat aux structures d'insertion, afin de dynamiser la création d'activités et l'offre d'insertion.
De fait, en 2001, 960 entreprises d'insertion et 288 entreprises de travail temporaire d'insertion, 980 associations intermédiaires et 1.960 chantiers d'insertion étaient en activité. On estime que ces structures ont permis le retour à l'activité de quelques 228.000 personnes en difficulté.
Crédits en faveur de l'insertion par l'économique
(en millions d'euros)
LFI 1999 |
LFI 2000 |
LFI 2001 |
LFI 2002 |
PLF 2003 |
114 |
139 |
146 |
165 |
147 |
En 2003, le soutien à l'insertion par l'activité économique est réaffirmé. La baisse de la dotation globale n'est, en effet, qu'apparente : la diminution des crédits tient compte de la prise en charge par le FOREC des exonérations de cotisations sociales pour les structures d'insertion passées au 35 heures. Par ailleurs, 4 millions d'euros sont transférés sur un autre chapitre budgétaire, nouvellement créé dans le cadre de l'expérimentation région Centre.
Il reste que le taux de consommation de ces crédits reste traditionnellement faible du fait d'une inadaptation des modalités de financement des structures d'insertion. Or, les structures d'insertion connaissent une réelle fragilité financière, qui n'est alors qu'accentuée par ces inadaptations.
Le Gouvernement a annoncé son intention de modifier les modalités de financement de ces structures en 2003. Votre commission ne peut que s'en féliciter.
3. Un effort soutenu en faveur de l'insertion professionnelle des travailleurs handicapés
Le Gouvernement a fait de l'insertion professionnelle des travailleurs handicapés une de ses priorités. A ce titre, les moyens consacrés au reclassement des travailleurs handicapés bénéficieront d'un renforcement substantiel en 2003.
Crédits en faveur des travailleurs handicapés
(en millions d'euros)
LFI 2002 |
PLF 2003 |
Evolution |
|
Aide à l'emploi |
7,3 |
7,3 |
- |
Ateliers protégés |
38,7 |
42,9 |
+ 10 % |
Garantie de ressources |
911,1 |
952,1 |
+ 4,5 % |
TOTAL |
957,1 |
1.002,3 |
+ 4,7 % |
L'augmentation des crédits correspond très largement à l'effort consenti pour augmenter le nombre de places en centre d'aides par le travail (+ 3.000 en 2003) et le nombre d'emplois en ateliers protégés (+ 500 en 2003).
Ainsi, la majoration de la dotation de financement des ateliers protégés permettra la mise en oeuvre de la tranche 2003 du plan triennal de modernisation et la création de 500 nouveaux emplois, conformément au plan quinquennal de création d'emplois.
Surtout, l'augmentation de la garantie de ressources est la conséquence directe de ces nouveaux emplois et places (à hauteur de 30 millions d'euros), mais aussi de la revalorisation du SMIC (à hauteur de 10 millions d'euros).
C. LE REDÉPLOIEMENT DES AUTRES MESURES EN FAVEUR DU DÉVELOPPEMENT DE L'EMPLOI DANS LE SECTEUR MARCHAND
Au-delà des crédits consacrés aux publics prioritaires, le budget du travail comporte également des crédits permettant de financer des actions en faveur du développement de l'emploi dans le secteur marchand. Il s'agit des mesures d'allégement du coût du travail et des mesures en faveur de la promotion de l'emploi.
Ces crédits font également l'objet d'un redéploiement significatif.
1. L'évolution contrastée des mesures ciblées d'allégement du coût du travail
Le FOREC prenant en charge la compensation aux organismes de sécurité sociale de l'ensemble des allégements à portée générale, seules les mesures ciblées d'exonération de charges sociales sont encore inscrites au budget du travail. Elles apparaissent en cela largement résiduelles, ne concernant plus que certaines zones géographiques particulières et certains secteurs spécifiques.
Les crédits correspondant sont en forte hausse par rapport au budget 2002 (+ 142 millions d'euros), mais évoluent de manière contrastée.
Crédits consacrés à la compensation des exonérations de charges sociales
(en millions d'euros)
LFI 2002 |
PLF 2002 |
Évolution
|
|
Zones de revitalisation rurales (ZRR) et de redynamisation urbaine (ZRU) |
34 |
30 |
- 10,61 % |
Zones franches |
271 |
213 |
- 21,4 % |
Exonération en faveur de la presse locale |
0,09 |
0,09 |
- |
Exonération des cotisations sociales dans les DOM |
351 |
524 |
+ 49,3 % |
Exonération de l'avantage en nature pour les hôtels, cafés et restaurants |
76 |
107 |
+ 40,8 % |
TOTAL |
732 |
874 |
+ 13,8 % |
Les crédits consacrés à la compensation des exonérations dans les DOM sont en forte hausse et tiennent compte de l'élargissement du champ des mesures d'exonération opéré par la loi d'orientation pour l'outre-mer. La dotation 2003 intègre également l'application de la réduction d'un tiers du montant de l'allégement complémentaire applicable aux entreprises passées aux 35 heures.
Les crédits pour les exonérations dans les zones franches urbaines (ZFU) diminuent sensiblement, en application de l'article 145 de la loi de finances pour 2002 :
- les seules nouvelles entrées en exonération concernent les embauches des entreprises créées avant le 1 er janvier 2002 et sont donc moins importantes ;
- le taux de prise en charge des exonérations liées aux rémunérations des salariés embauchés dans les ZFU en 1997 et 1998 baisse respectivement à 60 % et à 40 %.
L'exonération sur les avantages en nature dans le secteur des hôtels, cafés, restaurants continue à augmenter compte tenu de l'augmentation de la dépense constatée par les organismes de recouvrement des cotisations en 2001 et sur les premiers mois 2002, l'exonération étant assise depuis 2001 sur la totalité des avantages en nature octroyés par l'employeur.
La diminution de crédits des exonérations dans les ZRR et les ZRU et dans la zone franche de Corse s'explique par le nombre croissant d'entreprises à 35 heures qui ne bénéficieront plus de ces exonérations mais des allégements de charges prévus par les lois « Aubry » assortis d'une majoration spécifique du barème applicable.
2. Le reformatage des mesures de promotion de l'emploi
Les mesures de promotion de l'emploi sont destinées à favoriser l'émergence d'activités nouvelles et à participer ainsi au renouvellement du tissu économique local et au développement de l'emploi.
Parmi elles, on compte notamment :
- le financement de « chèques conseil » visant à contribuer à la formation en gestion des créateurs d'entreprise ;
- les aides au conseil dans le cadre de la réduction du temps de travail ;
- le dispositif EDEN (encourageant au développement d'entreprises nouvelles).
Le présent projet de budget modifie fortement le montant des dotations affectées à ces mesures afin de prendre en compte l'évolution de la politique de l'emploi.
Crédits consacrés à la promotion de l'emploi
(en millions d'euros)
LFI 2002 |
PLF 2003 |
Évolution
|
|
TOTAL |
111 |
85 |
- 23,7 % |
Dont programme EDEN |
52 |
52 |
- |
Dont chèques conseil |
6 |
6 |
- |
Dont aides au conseil par la RTT |
39 |
0 |
- 100 % |
Dont aides au conseil |
1,5 |
14 |
ns |
A cet égard, l'accent est mis sur la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences. Les crédits prévus à ce titre sont décuplés, parallèlement il est vrai à la disparition des crédits d'aide au conseil dans le cadre de la réduction du temps de travail.
La loi de modernisation sociale a, en effet, créé un dispositif d'appui à la conception, dans les entreprises de moins de 250 salariés, de plan de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, qui prévoit la prise en charge par l'Etat d'une partie des frais liés aux études préalables à la modernisation de la gestion des compétences et des carrières. Ces aides doivent jouer un rôle important en matière de prévention des licenciements et de prise en compte du vieillissement des salariés par les petites entreprises. Elles pourront être conclues en faveur d'une ou plusieurs entreprises ou, sous la forme de conventions d'animation conclues avec les organismes professionnels.
III. UN BUDGET QUI VISE À MIEUX ACCOMPAGNER LES RESTRUCTURATIONS ÉCONOMIQUES
Au-delà de la priorité accordée aux aides à l'emploi dans le secteur marchand, l'autre ligne de force du présent budget concerne ce qu'il est convenu d'appeler l'accompagnement des restructurations économiques. Les crédits correspondants augmentent en effet de 9,6 %.
Cette hausse prend notamment en compte le risque d'une dégradation de la situation de l'emploi. A ce titre, les dotations destinées à financer le chômage partiel ou l'indemnisation du chômage sont ajustées en conséquence.
Mais le projet de budget traduit également une démarche plus volontariste du Gouvernement, qui souhaite à juste titre limiter le secours aux mesures d'âges par les entreprises.
A. L'INDISPENSABLE PRISE EN COMPTE DE L'ÉVOLUTION DE LA SITUATION DE L'EMPLOI
L'évolution de la situation de l'emploi en 2003 reste très difficile à prévoir tant qu'elle dépendra de l'évolution de la conjoncture économique.
Il aurait cependant été irresponsable de ne pas anticiper une éventuelle augmentation du chômage au moment où notre économie ne crée plus d'emplois.
A l'évidence, le présent projet de budget a choisi la voie de la responsabilité en ajustant les crédits en conséquence.
1. Une mobilisation des moyens de prévenir une nouvelle hausse du chômage
La mise en oeuvre des dispositifs publics d'accompagnement des fluctuations d'activité et des restructurations répond à l'impératif de solidarité nationale à l'égard des individus et des collectivités menacés par des licenciements collectifs.
Ces aides n'ont bien évidemment pas vocation à se substituer à l'entreprise et à sa contribution au financement des mesures de reclassement, l'effort de la collectivité devant être consacré en priorité à l'aide au retour à l'emploi des salariés licenciés. C'est pourquoi l'utilisation des outils du fonds national pour l'emploi reste aujourd'hui principalement concentrée sur l'accompagnement social des situations les plus difficiles pour les salariés et les bassins d'emploi les plus fragiles (PME en liquidation, fermeture d'entreprise en zone rurale, faible qualification des salariés...).
Ces aides reposent principalement sur trois types de dispositifs :
- la participation de l'Etat à l'indemnisation du chômage partiel, instrument d'aide aux entreprises qui l'utilisent en cas de variation brutale de la conjoncture ou de période de difficultés exceptionnelles ;
- les dispositifs d'accompagnement social des restructurations (cellules de reclassement, congés de conversion, actions de formation, aide au passage à temps partiel...), financées par une dotation globale décentralisée ;
- les allocations temporaires dégressives visant à favoriser le reclassement externe par une compensation financière, partielle ou totale, de la perte de salaire subie par un salarié, licencié pour motif économique, qui accepte un emploi assorti d'une rémunération inférieure à son salaire antérieur.
Le projet de budget du travail pour 2003 prévoit une augmentation sensible de près de 15 % des crédits correspondants.
Crédits destinés à l'accompagnement social des restructurations
(en millions d'euros)
LFI 2002 |
PLF2003 |
Évolution
|
|
Indemnisation du chômage partiel |
20,6 |
30,5 |
+ 48,2 |
Dotation globale décentralisée |
42,7 |
42,7 |
- |
Allocation temporaire dégressive |
4,6 |
4,6 |
- |
TOTAL |
67,9 |
77,8 |
+ 14,6 |
Cette hausse tient à la forte majoration des crédits consacrés à l'indemnisation du chômage partiel, manifestement sous-évalués pour 2002.
Le nombre de journées de chômage partiel indemnisables a en effet fortement progressé passant de 1,5 million en 2000 à 2,5 millions en 2001. Pour le premier semestre 2002, on compte déjà 1,2 million de journées, alors même que les crédits ouverts en loi de finances initiale ne permettent de financer que 1,3 million de journées.
La forte progression des crédits pour 2003 vise donc à mieux ajuster les crédits aux besoins prévisionnels. Ces crédits devraient permettre le financement de 1,8 million de journées de chômage partiel en 2003.
2. Une forte croissance des crédits d'indemnisation du chômage
L'Etat participe au financement de l'indemnisation du chômage, en finançant les allocations versées par le fonds national de solidarité 16 ( * ) : allocation d'insertion (AI), allocation spécifique de solidarité (ASS) et, depuis la loi de finances pour 2002, allocation équivalent retraite (AER).
L'action de l'Etat reste néanmoins subsidiaire par rapport à celle du régime d'assurance chômage : en 2001, les dépenses de l'Etat à ce titre se sont élevées à 1,4 milliard d'euros contre 22,5 milliards d'euros pour le régime d'assurance chômage.
Le projet de budget du travail pour 2003 prévoit une forte augmentation de ces crédits.
Subvention de l'Etat au fonds de solidarité
(en millions d'euros)
LFI 2002 |
PLF 2003 |
Évolution
|
1.117 |
1.299 |
+ 16,3 |
Paradoxalement, cette hausse tient moins à une hausse des dépenses d'indemnisation du chômage liée à la dégradation de la situation de l'emploi qu'à la forte montée en charge de l'allocation équivalent retraite.
En effet, l'un des effets principaux de la nouvelle convention d'assurance chômage du 1 er janvier 2001 a été la forte augmentation de la proportion de chômeurs indemnisés par le régime d'assurance chômage, du fait de l'assouplissement des conditions d'ouverture du droit à indemnisation et de la suppression de la dégressivité des allocations. Ainsi, entre janvier 2001 et septembre 2002, la proportion de chômeurs indemnisés par l'Unédic a progressé de plus de 10 points, atteignant aujourd'hui 52 % 17 ( * ) .
Dès lors, le présent projet de budget ne prévoit qu'une simple stabilisation du nombre de bénéficiaires de l'allocation de solidarité spécifique (à hauteur de 355.000) et une légère augmentation du nombre de bénéficiaires de l'allocation d'insertion (qui passerait de 35.000 en 2002 à 38.000 en 2003), compte tenu d'une modification prévisible de cette dernière allocation (extension aux demandeurs d'asile).
En revanche, la montée en charge de l'allocation équivalent retraite (AER) apparaît très rapide.
L'article 144 de la loi de finances pour 2002 a institué, sous condition de ressources, l'allocation équivalent retraite (AER) qui garantit un niveau minimum de ressources aux demandeurs d'emploi qui ne peuvent percevoir leur pension de retraite faute d'avoir 60 ans alors qu'ils ont totalisé 160 trimestres de cotisations dans les régimes de base obligatoires de l'assurance vieillesse. Ce nouveau dispositif s'est substitué à l'allocation spécifique d'attente. Il vise à assurer à des chômeurs âgés qui ont commencé à travailler jeunes et se trouvent en fin de droits ainsi qu'à ceux trop faiblement indemnisés par le régime d'assurance chômage un revenu de remplacement jusqu'à l'âge de leur retraite. L'AER de remplacement est accordée aux allocataires du régime d'assurance chômage en fin de droits, aux bénéficiaires de l'ASS, du RMI ou de l'allocation spécifique d'attente (ASA). L'AER de complément est versée en complément de l'allocation de l'assurance chômage. Dans les deux cas, l'AER est une allocation différentielle. Le montant de l'AER versée est calculé pour assurer au moins 877 euros par mois de ressources personnelles compte non tenu des revenus d'activité, allocations chômage ou rémunération de stage du conjoint, concubin ou pacsé.
Une convention de gestion Etat-Unédic a
été signée le 3 mai 2002, qui confie l'instruction des
dossiers de demande des allocataires potentiels et le versement des allocations
aux Assédic.
|
Alors que le coût estimé de cette mesure était de 45 millions d'euros en 2002, il pourrait atteindre 322 millions d'euros en 2003. Le nombre d'allocataires en 2003 pourrait en effet être de 39.000 alors qu'on ne comptait en 2002 que 22.000 bénéficiaires de l'allocation spécifique d'attente à laquelle l'AER s'est substituée. En outre, en 2002, le dispositif n'a été applicable qu'à compter du mois d'avril.
B. UNE LIMITATION SOUHAITABLE DES AIDES AU RETRAIT D'ACTIVITÉ
Dans les années 1980, dans un contexte de chômage massif, se sont multipliées les aides au retrait d'activité des salariés âgés largement financées par l'Etat.
Ces mesures apparaissent aujourd'hui largement inadaptées à l'évolution du marché du travail ; particulièrement coûteuses pour l'Etat, elles conduisent à écarter prématurément du marché du travail les salariés les plus expérimentés alors même que les évolutions démographiques à venir impliqueront nécessairement une augmentation du taux d'emploi des salariés les plus âgés.
En cela, votre commission ne peut que s'associer aux récents propos du ministre des Affaires sociales, du travail et de la solidarité, qui déclarait que « les préretraites sont une catastrophe pour l'économie nationale et pour nos régimes de retraite » 18 ( * ) .
Elle se félicite donc que le présent budget poursuive le processus mis en oeuvre depuis plusieurs années d'un encadrement plus restrictif du recours aux mesures d'âge par les entreprises.
1. Des dispositifs critiquables
L'activité et surtout l'emploi des personnes de 55 à 64 ans est particulièrement faible en France, comparativement aux autres pays européens.
En 2000, seuls 29,7 % des personnes âgées de 55 à 64 ans occupaient un emploi, contre 37,7 % en moyenne pour l'Union européenne.
Taux d'emploi par âge et par sexe en 2000
(en pourcentage)
Femmes |
Hommes |
|||||
50-54 ans |
55-59 ans |
60-64 ans |
50-54 ans |
55-59 ans |
60-64 ans |
|
France |
66,1 |
42,5 |
9,8 |
83,8 |
53,8 |
10,6 |
Allemagne |
64,7 |
46,6 |
12,1 |
83,8 |
66,1 |
27,2 |
Espagne |
65,6 |
24,8 |
14,8 |
82,1 |
68,4 |
39,5 |
Italie |
67,8 |
22,9 |
7,5 |
78,9 |
50,8 |
29,4 |
Pays-Bas |
55,5 |
38,6 |
11,0 |
86,7 |
69,2 |
26,3 |
Suède |
83,7 |
76,6 |
43,2 |
84,0 |
80,4 |
49,1 |
Royaume-Uni |
70,4 |
55,9 |
25,4 |
81,4 |
70,8 |
47,3 |
UE-15 |
57,7 |
40,6 |
14,7 |
82,5 |
63,4 |
30,9 |
Source : Eurostat, Enquête sur les forces de travail 2000
L'élévation du taux d'emploi des salariés âgés apparaît donc aujourd'hui comme un enjeu crucial de la politique de l'emploi, au moment où le vieillissement de la population active pourrait entraîner des difficultés d'emploi dans notre pays à l'horizon 2010.
Le conseil européen de Stockholm, en mars 2001, a d'ailleurs fixé pour l'Union européenne l'objectif d'atteindre un taux d'emploi des personnes de 55 à 64 ans de 50 % d'ici 2010.
Dans ces conditions, il apparaît nécessaire d'améliorer profondément la gestion prévisionnelle de l'emploi des salariés âgés et notamment de limiter le recours aux mesures d'âge.
L'existence de nombreux dispositifs de retrait anticipé d'activité explique en effet en grande partie la chute de l'activité après 55 ans dans notre pays.
La préretraite AS-FNE Les conventions d'allocations spéciales licenciements du FNE permettent, dans le cadre d'une procédure de licenciement économique et sur la base d'une convention entre l'Etat et l'entreprise, d'assurer, jusqu'à ce qu'ils aient pu faire valoir leurs droits à la retraite, un revenu de remplacement à des salariés âgés dont l'emploi est supprimé et dont les perspectives de reclassement sont réduites. Pour en bénéficier, le salarié doit adhérer volontairement à la convention s'il remplit les conditions d'âge (au moins 57 ans), d'ancienneté dans l'entreprise (au moins un an), de durée de cotisation (au moins 10 ans d'appartenance à un régime de sécurité sociale) et n'exerce plus d'activité professionnelle. L'allocation est égale à 65 % du salaire brut de référence, dans la limite du plafond retenu pour le calcul des cotisations sociales et à 50 % du salaire brut de référence pour la part du salaire comprise entre une et deux fois ce plafond. L'allocation peut être versée jusqu'à 65 ans. Le salarié et l'employeur contribuent tous deux au financement de l'allocation : le salarié, pour la part de l'indemnité conventionnelle de licenciement supérieure à l'indemnité légale ; l'entreprise, en fonction de la qualité du plan social, de sa taille et de ses capacités contributives. La cession d'activité de certains travailleurs salariés (CATS) Ce dispositif a été mis en place par le décret n° 2000-105 du 9 février 2000. Il prévoit la possibilité d'une prise en charge partielle par l'Etat du revenu de remplacement versé par l'entreprise à des salariés âgés de plus de 57 ans ayant pendant plus de 15 ans effectué des travaux pénibles (travail à la chaîne, travail de nuit, travailleurs handicapés). Pour ouvrir droit à l'aide de l'Etat, cette cessation d'activité doit être organisée par un accord de branche et un accord d'entreprise dans lesquels des engagements sur la fixation de la durée du travail à 35 heures et des dispositions relatives à la gestion prévisionnelle de l'emploi et des compétences sont pris pour faire en sorte de ne plus recourir aux mesures d'âge. La mise en oeuvre de ces accords ne peut excéder 5 ans. L'Etat prend en charge une part de l'allocation, selon des taux déterminés en fonction de l'âge des salariés, dès lors que les bénéficiaires ont accompli leur activité professionnelle dans des conditions particulières de pénibilité ou ont été reconnus travailleurs handicapés. Le premier accord a concerné le secteur automobile qui prévoit de faire bénéficier 36.600 salariés de ce dispositif dont près de 23.000 font l'objet d'une prise en charge partielle de l'Etat sur 5 ans. D'autre accords ont été conclus dans les secteurs de la métallurgie, le papier carton, la chimie, la presse, l'industrie alimentaire ou la banque. La préretraite progressive (PRP) Les conventions de préretraites progressives, conclues entre l'Etat et un employeur permettent à des salariés âgés de plus de 55 ans de transformer leur emploi à temps plein en emploi à temps partiel. Elles poursuivent plusieurs objectifs en terme d'emploi : offrir une alternative aux retraits complets d'activité des salariés âgés, aider les entreprises à résoudre leurs problèmes de pyramides des âges, favoriser l'insertion des publics en difficulté. En complément de leur rémunération au titre du temps partiel, les salariés en préretraite progressive reçoivent une allocation égale à 30 % de leur salaire brut de temps plein dans la limite du plafond de la sécurité sociale et 25 % pour la part de ce salaire excédant ce plafond dans la limite de deux fois ce dernier. Le taux de participation de l'entreprise est modulé en fonction de deux critères : l'effectif de l'entreprise, l'engagement de recrutement de demandeurs d'emploi rencontrant des difficultés particulières sur le marché du travail. Ce taux varie de 0 à 5 % dans le cadre d'une préretraite progressive avec embauche et de 5 à 8 % dans le cadre d'une préretraite progressive plan social ou sans embauche. Le taux moyen de participation des entreprises est de 6,6 % en 2002. L'ARPE (allocation de remplacement pour l'emploi)
De leur côté, les partenaires sociaux ont
instauré, par un accord en date du 6 septembre 1995, l'ARPE, qui
permet à des salariés remplissant certaines conditions
d'âge et de durée de cotisation au titre de l'assurance
vieillesse, de mettre fin à leur activité professionnelle de
façon anticipée. Ce dispositif a été reconduit par
plusieurs accords successifs. Dans son état actuel, il doit s'achever en
2003, et ne concerne plus que les personnes nées en 1942, qui justifient
de 160 trimestres de cotisation vieillesse. En contrepartie, les entreprises
s'engagent à opérer des embauches compensatrices permettant de
maintenir le volume d'heures travaillées et pour lesquelles un public
prioritaire est défini. Cette formule a connu un succès
important : les taux d'adhésion des générations
nées entre 1938 et 1940 sont compris entre 58,6 % et 67,5 %,
ce qui correspond à des flux d'entrées de 42.800 en moyenne sur
la période 1996-2000.
|
Certes, on observe depuis quelques années une tendance à la réduction du recours à ces mesures d'âge.
Ainsi, l'allocation de remplacement pour l'emploi (ARPE) gérée par les partenaires sociaux, est en phase d'extinction et doit disparaître en 2003.
De même, les entrées en AS-FNE sont en forte régression, les crédits étant largement redéployés vers la CATS qui concerne en priorité les salariés ayant connu des périodes importantes de travail reconnu pénible.
Evolution des entrées et des effectifs dans les dispositifs de préretraite
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
2002 (1) |
|
Conventions AS-FNE |
||||||
- nombre d'entrées annuelles |
21.669 |
18.672 |
11.993 |
8.071 |
6.418 |
3.431 |
- nombre d'allocataires en fin d'année |
116.218 |
98.497 |
80.775 |
65.160 |
51.381 |
40.049 |
Préretraite progressive |
||||||
- nombre d'entrées annuelles |
20.870 |
16.717 |
13.372 |
11.603 |
12.324 |
7.746 |
- nombre d'allocataires en fin d'année |
55.952 |
53.256 |
48.942 |
43.067 |
39.418 |
43.794 |
ARPE |
||||||
- nombre d'entrées annuelles |
35.353 |
43.438 |
45.170 |
37.461 |
21.500 |
900 |
- nombre d'allocataires en fin d'année |
65.795 |
76.917 |
84.519 |
86.580 |
73.100 |
56.379 |
CATS |
||||||
- nombre d'entrées annuelles |
- |
- |
- |
5.218 |
4.407 |
2.914 |
- nombre d'allocataires en fin d'année |
- |
- |
- |
5.218 |
7.494 |
nd |
TOTAL |
||||||
- nombre d'entrées annuelles |
77.892 |
78.827 |
70.535 |
61.716 |
44.649 |
14.491 |
- nombre d'allocataires en fin d'année |
228.616 |
219.683 |
202.605 |
193.782 |
171.393 |
nd |
(1) au 30 juin (sauf pour les CATS : 31 mai)
Source : Unédic, DARES.
Il reste que le récent retournement de la conjoncture pourrait renforcer l'attractivité de ces dispositifs tant pour les entreprises que pour les salariés.
Pour les entreprises, les préretraites constituent un moyen commode de traiter les conséquences sociales des restructurations en évitant les licenciements et en rajeunissant la pyramide des âges.
Pour les salariés, les préretraites représentent un moyen de prévenir le chômage tout en s'assurant des revenus suffisants et en anticipant l'âge de la retraite.
On observe d'ailleurs une augmentation sensible des flux d'entrée en préretraite progressive et en CATS et un arrêt du déclin des préretraites AS-FNE.
Votre commission considère pour sa part que la dégradation de la conjoncture économique ne doit pas conduire à une relance des mesures d'âge, solution bien commode mais largement contre-productive et coûteuse.
Elle estime au contraire qu'il importe de privilégier résolument les reclassements internes, voire externes, aux mesures d'âge. Il n'est pas raisonnable, en effet, pour notre économie de se priver de l'expérience et des compétences des salariés les plus âgés alors même que subsistent, en dépit de la hausse du chômage, d'importantes difficultés de recrutement dans de nombreux secteurs.
2. Des mesures nécessaires qui doivent être poursuivies
Le projet de budget du travail pour 2003 poursuit et accentue le mouvement engagé depuis 1997 de resserrement des conditions d'accès dans les dispositifs de préretraites financées par l'Etat. Cette politique est cohérente avec les orientations arrêtées par les partenaires sociaux interprofessionnels en matière de cessation anticipée d'activité (ARPE) ainsi qu'avec la nécessité d'oeuvrer au relèvement des taux d'emploi des salariés de plus de 55 ans conformément aux engagements européens de la France.
Les crédits budgétaires diminuent de plus de 7 % compte tenu notamment d'une responsabilisation financière accrue des entreprises.
Crédits consacrés aux retraits d'activités
(en millions d'euros)
LFI 2002 |
PLF 2003 |
Evolution
|
|
Allocations spéciales du FNE |
145 |
80 |
- 44,8 % |
CATS |
105 |
144 |
+ 36,5 % |
Préretraites progressives |
192 |
191 |
- 0,7 % |
Conventions de la sidérurgie |
16 |
11 |
- 35 % |
TOTAL |
459 |
425 |
- 7,3 % |
Le Gouvernement a en effet annoncé son intention de majorer substantiellement le taux de participation des entreprises au financement de ces dispositifs, afin de les dissuader d'y recourir massivement.
Ainsi, le Gouvernement devrait procéder, par circulaire, à une nouvelle augmentation du taux moyen de participation des entreprises au financement des préretraites AS-FNE, le portant à 50 % 19 ( * ) .
De même, le taux de participation des entreprises au financement des préretraites progressives sera porté à 10 % contre 6,6 % en 2002.
Enfin, s'agissant des CATS, le Gouvernement prévoit de supprimer la prise en charge par l'Etat du coût des cotisations de retraite complémentaire.
Ces mesures, ajoutées à la poursuite de la réduction globale du nombre de bénéficiaires, devraient permettre de diminuer significativement les crédits sans pour autant restreindre à l'excès les entrées nouvelles dans les dispositifs.
Évolutions prévues du nombre d'entrées dans les dispositifs
LFI 2002 |
Prévision de réalisation 2002 |
PLF 2003 |
|
Allocations spéciales du FNE |
7.200 |
7.200 |
7.000 |
CATS |
7.500 |
9.000 |
10.225 |
Préretraites progressives |
11.000 |
15.000 |
10.000 |
TOTAL |
25.700 |
31.200 |
27.225 |
Votre commission considère toutefois qu'il est nécessaire d'avancer plus avant dans la voie de la réforme des dispositifs de retrait d'activité.
Le renforcement de la participation financière des entreprises aux préretraites ne permettra pas, à lui seul, en effet, d'améliorer durablement le taux d'emploi des travailleurs âgés. Il risque plutôt de conduire à une augmentation de leur taux de chômage.
Depuis l'entrée en vigueur de la nouvelle convention d'assurance chômage, on observe une augmentation sensible du nombre de chômeurs de plus de 55 ans indemnisés par le régime d'assurance chômage, compte tenu de l'amélioration de leurs conditions d'indemnisation. L'alternative aux préretraites est donc moins, pour l'instant, l'emploi que le chômage.
Or, le régime d'assurance chômage participe déjà largement au financement des préretraites. En 2001, il a ainsi contribué, à hauteur de 385 millions d'euros, au financement des préretraites AS-FNE et, en 2002, sa contribution devrait atteindre 349 millions d'euros, soit un montant bien supérieur à celle de l'Etat 20 ( * ) .
Nos dispositifs de retrait d'activité, pourtant fondés sur une logique de solidarité nationale, conduisent paradoxalement à mettre à la charge de l'Unédic une part croissante du coût de la prise en charge des salariés âgés.
Cette situation n'est, à l'évidence, pas saine et ne fait, en outre, que déséquilibrer plus encore les relations financières déjà passablement embrouillées entre l'Etat et l'Unédic.
Votre commission ne peut alors que souhaiter la poursuite du réexamen des dispositifs de retrait d'activité, qui devra nécessairement préciser les modalités de participation de l'Unédic au financement des préretraites et évaluer la pertinence de la « contribution Delalande » qui semble constituer un obstacle non négligeable à l'embauche des salariés âgés.
*
* *
Au total, votre commission considère que le projet de budget du travail pour 2003 témoigne d'une première réorientation de la politique de l'emploi dans le sens qu'elle souhaitait depuis plusieurs années. Elle a donc émis un avis favorable à son adoption.
TRAVAUX DE LA COMMISSION
I. AUDITION DU MINISTRE
Réunie le jeudi 7 novembre 2002, sous la présidence de M. Nicolas About, président , la commission a procédé à l' audition de M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité sur les crédits consacrés au travail et à l'emploi dans le projet de loi de finances pour 2003.
Rappelant que le projet de budget du travail et de la solidarité s'inscrivait dans la stratégie gouvernementale visant à stimuler la croissance et l'emploi, M. François Fillon a tout d'abord présenté les grandes lignes du budget travail.
Il a indiqué que les crédits s'élèveraient à 15,7 milliards d'euros en 2003, tout en observant que ce chiffre ne rendait pas intégralement compte de l'effort en faveur de l'emploi, puisqu'il faut également y ajouter les baisses de charges sur les bas salaires, qui mobiliseront 1 milliard d'euros supplémentaires.
M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, a précisé que ce budget participait d'une stratégie générale pour l'emploi reposant sur deux piliers : la revalorisation du travail et la restauration de la compétitivité des entreprises, mais aussi la priorité donnée à l'emploi dans le secteur marchand.
A cet égard, il a souligné le caractère emblématique de la politique menée en faveur de l'emploi des jeunes que traduit le présent budget. Il a ainsi indiqué que les crédits en faveur du contrat jeune en entreprise permettraient l'embauche de 90.000 jeunes et que les crédits en faveur de l'alternance devraient autoriser une progression de 8 % du nombre de contrats. Il a également indiqué qu'il serait progressivement mis fin au système des emplois-jeunes : mal ciblé, peu valorisant en termes de rémunération et de débouchés, il ne fera plus l'objet d'aucun recrutement même si, pour les associations dont les projets sont les plus utiles, des mesures d'appui seront mises en place durant trois ans, afin de rendre leurs activités viables au-delà des cinq années couvertes par l'aide initiale.
M. François Fillon a souligné que les emplois-jeunes seraient progressivement remplacés par les contrats d'insertion dans la vie sociale (CIVIS), indiquant que ce contrat sera plus resserré vers les jeunes les plus en difficulté et que le plus grand soin sera apporté à la formation proposée aux jeunes afin d'assurer leur insertion professionnelle à l'issue de leur contrat.
Concernant la promotion de l'emploi et les adaptations économiques, M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, a indiqué que le budget reflétait une double priorité. D'une part, le Gouvernement souhaite permettre aux entreprises dont l'existence est menacée de gérer très en amont, et dans les meilleures conditions possibles, les restructurations auxquelles elles doivent faire face, ce qui conduit alors le Gouvernement à privilégier les dispositifs en faveur des salariés des petites et moyennes entreprises et des entreprises les plus en difficulté. D'autre part, alors que le taux d'emploi en France des personnes âgées de plus de 55 ans est l'un des plus faibles d'Europe, la politique de retrait anticipé des salariés âgés et expérimentés du marché du travail est clairement contraire aux orientations du Gouvernement qui a décidé, dans le présent budget, de réduire l'impact du dispositif de cessation anticipée d'activité en prévoyant une augmentation de la participation des entreprises aux préretraites fonds national de l'emploi (FNE) et, surtout, aux préretraites progressives.
Il a également insisté sur la très forte hausse des crédits relatifs à la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, dont le montant est presque décuplé et sur la création d'une cellule interministérielle visant à mieux anticiper les mutations économiques et industrielles.
S'agissant de la gestion des politiques de l'emploi, il a mis l'accent sur les efforts significatifs consentis au profit de l'Agence nationale pour l'emploi (ANPE) et de l'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA), dont les crédits progressent de 1,7 % dans chaque cas.
Au total, M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, a considéré que le projet de budget du travail reposait sur un double choix : la priorité aux mesures d'insertion dans l'emploi marchand, grâce aux baisses de charges, mais aussi grâce à des dispositifs plus ciblés, comme le contrat jeune en entreprise, et la priorité aux publics les plus en difficulté pour l'accès aux contrats aidés et aux différents instruments de soutien à la formation et à la recherche d'emploi. Il a jugé que ces priorités étaient de nature à affermir la situation de l'emploi dans un contexte économique particulièrement difficile.
M. Louis Souvet, rapporteur pour avis des crédits du travail, s'est inquiété de l'évolution de la situation financière de l'Union nationale pour l'emploi dans l'industrie et le commerce (UNEDIC) et s'est interrogé sur sa capacité à verser une contribution de 1,2 milliard d'euros au budget de l'Etat pour 2003.
Il s'est également interrogé sur une éventuelle majoration des crédits consacrés aux contrats emploi-solidarité après les récentes annonces du Gouvernement indiquant une augmentation du nombre de contrats et des dérogations pour rétablir le taux de participation de l'Etat.
Il a enfin souhaité avoir des précisions sur les dotations inscrites au projet de budget, à hauteur de 50 millions d'euros, et destinées à permettre la pérennisation des emplois-jeunes créés par les associations.
En réponse au rapporteur pour avis, M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité , a déclaré que l'Etat n'était pas indifférent aux difficultés que rencontre le régime d'assurance chômage. Il a rappelé qu'à l'issue de l'accord du 19 juin 2002, le Gouvernement avait validé les mesures envisagées par les partenaires sociaux, en agréant l'ensemble des avenants à la convention d'assurance chômage et en acceptant de reporter en 2003 le versement de 1,2 milliard d'euros. Précisant que des négociations importantes s'engageront à la fin de l'année pour faire face au déficit prévu du régime, il a indiqué qu'il examinerait avec attention les solutions proposées par les partenaires sociaux, en fonction de la situation financière de l'UNEDIC, dans le cadre de la procédure d'agrément.
Rappelant que les contrats emploi-solidarité constituent un dispositif utile pour prévenir un chômage prolongé des publics présentant les plus grandes difficultés pour accéder à l'emploi, M. François Fillon a jugé nécessaire d'adapter le volume de ces contrats à l'évolution de la situation de l'emploi. Il a précisé que, conformément à l'arbitrage du Premier ministre, le Gouvernement entendait maintenir un rythme de création moyen, d'environ 20.000 contrats par mois sur 2003. Il a indiqué que les crédits disponibles permettaient actuellement de financer 160.000 contrats pour 2003 et qu'il faudrait donc sans doute inscrire un complément de crédits lors de l'examen du collectif pour 2003.
Il a fait part de son souhait de moderniser le dispositif, en annonçant son intention de fusionner les contrats emploi-solidarité et les contrats emploi consolidé dans le cadre d'un contrat unique mais modulable, pour mieux répondre aux besoins des publics concernés. Il a toutefois souligné que ce dispositif de traitement social du chômage ne constituait pas une solution pour réduire le chômage, ni pour offrir une insertion durable sur le marché du travail. Il a en conséquence indiqué que le Gouvernement avait décidé de ne plus subventionner uniformément, à hauteur de 95 %, ces contrats et qu'il était prévu de ramener le taux de participation de l'Etat au niveau prévu par le décret du 30 janvier 1990, soit 65 % et 85 % pour les publics les plus en difficulté. Il a néanmoins estimé que la mise en oeuvre de ces règles ne devait compromettre ni la viabilité des structures d'insertion des plus fragiles, ni l'emploi des personnes les plus vulnérables. Il a alors indiqué avoir demandé à ses services de conserver, à titre temporaire, la possibilité de maintenir des taux de prise en charge majorés jusqu'à 95 % dans deux cas : les jeunes en grande difficulté et les chantiers d'insertion. Il a indiqué que le coût de ces mesures, soit 10 millions d'euros environ, pourrait être absorbé sans difficulté dans le cadre de la gestion 2003.
M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité , a toutefois souligné que la politique de l'emploi ne pouvait se réduire au soutien à l'emploi public ou parapublic et que le Gouvernement avait choisi de réorienter les dispositifs d'aide à l'emploi et à l'insertion vers le secteur marchand et notamment les contrats jeunes, dont les premiers résultats sont extrêmement encourageants.
S'agissant des emplois-jeunes, il a rappelé que le Gouvernement avait abordé avec pragmatisme le devenir de ce programme, soucieux avant toute chose du sort des jeunes concernés. A cet égard, il a observé que le poids budgétaire de ce programme s'élèverait à 2,7 milliards d'euros en 2003, ce qui est considérable. Rappelant qu'il s'était engagé à offrir des mesures de pérennisation des emplois créés, dans le but d'accompagner les associations dans la recherche de sources alternatives de financement, il a indiqué que, pour les associations qui, au terme de 5 ans n'auraient pas atteint leur autonomie, des conventions d'une durée de 3 ans pourraient, de manière dégressive, prolonger l'aide de l'Etat et que ces mesures de pérennisation seraient mises en oeuvre avec une exigence renforcée quant à la professionnalisation des jeunes.
M. François Fillon a précisé que les 10 millions d'euros de crédits consacrés au soutien financier exceptionnel visent à permettre la conclusion d'un petit nombre de contrats dont la procédure d'agrément est en cours, au moment où la décision de suspendre le programme a été prise.
Pour les collectivités locales, il a jugé que le maintien des missions remplies par les emplois-jeunes devait faire l'objet d'une évaluation, mais que leur consolidation et leur pérennisation relevaient toutefois de leurs seules compétences, conformément au principe de libre administration des collectivités locales, même si les services de l'Etat contribueront naturellement à les aider pour mettre en place des voies d'accès à la fonction publique territoriale.
S'agissant enfin des jeunes ne pouvant entrer dans le cadre des dispositifs de pérennisation des emplois et ne trouvant pas de solution immédiate sur le marché du travail, il a déclaré que le service public de l'emploi serait mobilisé en leur faveur.
M. Gilbert Chabroux a souligné l'ampleur des modifications intervenues depuis la présentation du projet de loi de finances, notamment quant au nombre annoncé de contrats emploi-solidarité, et à la participation de l'Etat. Il s'est alors interrogé sur la nature du vote demandé au Parlement, se demandant s'il s'agissait de voter des crédits ou d'approuver de simples perspectives.
Il a fait part de son impression d'une « navigation à vue » du Gouvernement en matière de politique de l'emploi, même s'il a reconnu que celle-ci devait s'adapter à l'évolution de la conjoncture. Observant la forte progression du chômage des jeunes, il s'est interrogé sur le sort du programme « trajet d'accès à l'emploi » (TRACE) et de la bourse d'accès à l'emploi. Il a souhaité avoir de plus amples précisions sur le nouveau CIVIS annoncé par le Gouvernement.
Mme Gisèle Printz a estimé que le projet de budget pour 2003 restait très vague et faisait peu de cas des actions en faveur de l'égalité entre les femmes et les hommes.
M. Roland Muzeau a regretté la diminution de 960 millions d'euros des crédits consacrés à l'emploi, et notamment la situation réservée par le budget aux contrats emploi-solidarité, au programme TRACE et aux emplois-jeunes. Il a alors estimé que le projet de budget marquait une forte réorientation de la politique de l'emploi vers le secteur marchand, alors même que les exonérations de charges ne produisent pas les effets escomptés et que les employeurs ne jouent pas le jeu de la lutte contre le chômage. Il a également souhaité avoir des précisions sur le CIVIS et sur les aides à la pérennisation des emplois-jeunes.
M. Jean-Pierre Fourcade s'est déclaré favorable à la réorientation de la politique de l'emploi, mais a estimé que celle-ci ne produirait le résultat voulu qu'à la condition d'un important effort de communication en direction des structures d'insertion existantes. A cet égard, prenant l'exemple du nouveau contrat-jeune, il a souligné qu'il rencontrait dans sa commune une forte demande des entreprises, mais une absence d'appétence des jeunes, d'ailleurs peu orientés vers ce programme par les missions locales.
Il a également fait part de trois pistes en faveur d'une réorientation de la politique de l'emploi : accompagner l'arrêt du programme emplois-jeunes par le développement de l'apprentissage dans les collectivités locales, pénaliser le retrait anticipé des salariés âgés du marché du travail, et mettre en oeuvre rapidement le contrat d'intégration annoncé par le Président de la République pour favoriser l'accès à l'emploi des immigrés.
En réponse aux différents intervenants, M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité , a souligné qu'à l'exception du nombre de contrats emploi-solidarité, le budget du travail n'avait en rien été modifié depuis sa première présentation. Il a, à ce propos, indiqué que la modulation du nombre de ces contrats en cours d'année était une pratique ancienne, que la fixation de leur taux de prise en charge n'était pas du domaine législatif et que le financement de tous les contrats serait garanti, soit en loi de finances initiale, soit en loi de finances rectificative.
Il a précisé que le programme TRACE n'était absolument pas abandonné puisque le projet de budget prévoyait 98.000 entrées pour 2003. Il a en revanche annoncé la suppression de la bourse d'accès à l'emploi, dans la perspective de la création à venir du CIVIS.
S'agissant du CIVIS, il a précisé que son objectif était de permettre sa mise en oeuvre à la mi-2003. Il a indiqué que ce contrat s'adresserait aux jeunes de 18 à 25 ans, de niveau baccalauréat, et serait géré de manière décentralisée, les missions locales évaluant les capacités des jeunes et leur proposant un contrat personnalisé. Il a déclaré que ce contrat pourrait notamment prévoir une bourse d'accès à l'emploi, une aide à la création d'entreprise ou le financement d'actions humanitaires et ouvrirait la possibilité d'une prise en charge, sur 3 ans, de 80 % du salaire des jeunes travaillant dans une association ou dans l'éducation nationale. Il a enfin indiqué que ce contrat ouvrirait une part importante à l'intervention des collectivités locales, et notamment aux régions pour son volet formation.
En réponse à M. Jean-Pierre Fourcade, M. François Fillon a reconnu être conscient de la nécessité de mobiliser plus encore le service public de l'emploi à l'occasion de la réorientation de la politique de l'emploi. Il a toutefois observé une forte demande des entreprises pour le nouveau contrat-jeune.
En réponse à M. Roland Muzeau, il a insisté sur le nécessaire changement d'orientation de la politique de l'emploi. Il a constaté, de fait, que si les crédits diminuaient de 969 millions d'euros pour l'emploi aidé, ils augmentaient d'un milliard d'euros pour les allégements de charges.
II. EXAMEN DE L'AVIS
Réunie le mardi 12 novembre 2002, sous la présidence de M. Nicolas About, président , la commission a procédé à l'examen du rapport pour avis de M. Louis Souvet sur le projet de loi de finances pour 2003 (crédits consacrés au travail et à l'emploi ) .
M. Louis Souvet, rapporteur pour avis, a présenté les grandes lignes de son rapport pour avis (cf. exposé général du présent avis).
MM. Guy Fischer et Gilbert Chabroux ont indiqué qu'ils avaient déjà fait part de leurs observations négatives sur ce budget du travail et de l'emploi à l'occasion de l'audition du ministre.
M. Michel Esneu s'est félicité de la réorientation de la politique de l'emploi que traduit le projet de budget. Il a également souhaité que les redéploiements des crédits soient l'occasion d'en optimiser la gestion et que le service public de l'emploi se mobilise fortement pour la promotion et la mise en oeuvre du nouveau contrat « jeunes en entreprise ».
M. André Vantomme s'est interrogé sur les premiers résultats rencontrés par les nouveaux contrats « jeunes en entreprise ».
En réponse, M. Louis Souvet, rapporteur pour avis, a indiqué qu'il était à l'évidence prématuré d'établir un premier bilan de ce nouveau programme, celui-ci ayant été seulement officiellement lancé le mois dernier.
Sur la proposition de son rapporteur, la commission a alors émis un avis favorable à l'adoption des crédits du travail et de l'emploi pour 2003.
* 1 analysés dans l'avis budgétaire de notre excellente collègue, Annick Bocandé.
* 2 même s'il comporte encore des crédits correspondant à des mesures ciblées d'exonérations de charges sociales.
* 3 Premières informations et premières synthèses , octobre 2002, n° 41-2.
* 4 Ce résultat ne prend pas en compte le fait que l'assurance chômage devra rembourser la deuxième tranche de l'emprunt à hauteur de 1,83 milliard d'euros en novembre 2002 et a inscrit une contribution exceptionnelle à l'Etat de 1,22 milliard d'euros reportée en 2003.
* 5 L'Etat s'est en effet progressivement déchargé ces dernières années sur l'Unédic notamment du financement des préretraites ASFNE et de l'inscription des demandeurs d'emploi.
* 6 Pour des effectifs budgétaires totaux de 20.000 agents en équivalent temps plein en 2002.
* 7 En 2001, les dotations de l'Unédic atteignaient 13,3 % des ressources de l'ANPE contre 6,7 % en 2000.
* 8 Avis n° 91 - Tome IV (2001-2002).
* 9 Rapport d'information de notre collègue Alain Gournac « Pour une sortie en bon ordre : bilan à mi-parcours des emplois-jeunes », n° 25 (2000-2001).
* 10 Il s'agit ici des seuls crédits inscrits au budget du travail. Ne sont donc pas pris en compte les crédits inscrits aux budgets de l'Éducation nationale, de l'Intérieur, de la Justice et de l'Outre-mer.
* 11 Elle n'est véritablement devenue effective qu'à partir de mai dernier.
* 12 Elle prévoyait son recentrage vers les publics prioritaires, une modulation de l'aide selon les publics accueillis et la suppression de l'exonération spécifique de charges sociales.
* 13 On constate, en effet, une nette diminution des entrées dans ce dispositif entre le premier semestre 2001 et le premier semestre 2002 pendant lequel seuls 27.000 CIE ont été conclus.
* 14 Les coûts moyens de ces dispositifs sont : 3.756 euros pour un CES, 25.145 euros pour un CEC pour une durée moyenne constatée de 3, 4 ans.
* 15 Rapport de l'instance d'évaluation présidée par M. Yves Robineau, « les mesures d'aide aux emplois en secteur non marchand », février 2002.
* 16 Ce fonds est également financé, outre la subvention de l'Etat, par l'affectation du produit de la contribution de solidarité des fonctionnaires, égale à 1 % de leur traitement net.
* 17 En 2001, alors que le nombre de demandeurs d'emplois de catégorie 1 n'a augmenté que de 48.000, le nombre de chômeurs indemnisés par l'Unédic a progressé de 218.000.
* 18 Déclaration du 4 novembre à Nantes.
* 19 Ce taux moyen était de 18 % en 2000, de 23 % en 2001 et de 30 % en 2002.
* 20 La contribution de l'Unédic est égale à la moitié des recettes perçues par la régime au titre de la « contribution Delalande ».