II. MIEUX ENCADRER L'ACTIVITÉ DES MANDATAIRES JUDICIAIRES PROFESSIONNELS
Dans la plupart des cas, les mesures de protection judiciaires sont assurées par des proches ou des parents. Toutefois, au cours des dernières années, l'éclatement de la cellule familiale et l'éloignement de ses membres ont entraîné la sollicitation de plus en plus fréquente de l'intervention de personnes extérieures à la famille.
A. DES PRATIQUES HÉTÉROGÈNES ET PEU CONTROLÉES
1. La multiplicité des intervenants tutélaires
A l'heure actuelle, un peu plus de la moitié des mesures de protection judiciaire est confiée à des tiers, qu'il s'agisse de personnes physiques ou de services spécialisés. Ces intervenants recouvrent des réalités souvent très diverses - gérants de tutelle privés, associations tutélaires ou encore préposés d'établissements - et dont les activités varient selon la nature des mesures de protection juridique qui leur sont confiées par le juge.
Les situations dans lesquelles ces mesures sont mises en oeuvre sont aussi extrêmement variables. Ainsi, la tutelle exercée sur une personne accueillie dans une clinique psychiatrique par un préposé à cet établissement prendra une forme très différente de la protection assurée par une association tutélaire en charge d'une personne atteinte d'un handicap mental.
Hormis l'obligation légale d'être inscrit sur une liste établie par le procureur de la République, pour les personnes physiques et morales exerçant des mesures de protection, il n'existe par exemple aucune réglementation contraignante en termes de formation ou de qualification pour les professionnels. Les critères de recrutement dans les associations tutélaires notamment n'obéissent à aucune règle particulière et peuvent varier selon leurs propres exigences, car aucun statut n'encadre ni ne reconnaît les métiers de la protection judiciaire.
2. Des contrôles insuffisants ou défaillants
Les services de tutelles font aujourd'hui l'objet d'un contrôle à la fois judiciaire et administratif.
Depuis la loi du 8 février 1995, le contrôle et le visa des comptes de gestion ont été confiés au greffier en chef du tribunal d'instance, tout en laissant au juge des tutelles la possibilité de l'exercer lui-même. Selon le rapport du Conseil économique et social 4 ( * ) , compte tenu de la faiblesse des moyens dévolus au contrôle, celui-ci se limite bien souvent au simple enregistrement des dossiers. Les chiffres sont éloquents : il existe seulement quatre-vingt juges des tutelles en équivalents temps plein pour plus de 700 000 personnes protégées.
Cela explique par exemple que le contrôle annuel des comptes des personnes protégées ne soit pas toujours réalisé dans de bonnes conditions. Ces comptes sont, en effet, rarement vérifiés, tout au moins de façon approfondie. Par ailleurs, les greffiers en chef, auxquels a été transférée la responsabilité du contrôle, ne possèdent pas véritablement les compétences comptables permettant d'en assurer la réalisation et ne disposent par ailleurs d'aucune assistance extérieure. Ce contrôle est donc souvent lacunaire ou inopérant.
Parallèlement, les Ddass sont en charge du contrôle de 360 services de tutelles essentiellement gérés par des associations, qui traitent les mesures de protection d'environ 230 000 majeurs. L'objet de ces contrôles administratifs varie selon le type de mesures auquel il s'applique (tutelle aux prestations sociales destinées aux adultes, tutelle ou curatelle), mais ils portent principalement sur les comptes des associations. La vérification de leur authenticité est rarement effectuée, les Ddass se contentant souvent, faute de moyens, d'enregistrer ceux qui leur ont été transmis par les associations.
* 4 « Réformer les tutelles », rapport présenté par Rose Boutaric - septembre 2006.