B. UNE ÉVOLUTION COMPARABLE A CELLE OBSERVÉE DANS LA PLUPART DES PAYS ÉTRANGERS

La tendance observée en France au rapprochement de la justice militaire avec la justice de droit commun se retrouve dans la plupart des démocraties occidentales.

Selon une étude du Sénat, portant sur la justice militaire dans cinq pays (Allemagne, Espagne, Italie, Royaume-Uni, Suisse) de décembre 2000 9 ( * ) , « malgré leur diversité, les différents systèmes étudiés se caractérisent à la fois par leur intégration croissante à la justice pénale ordinaire et par leur fonctionnement de plus en plus proche de celui de la justice pénale ordinaire, ainsi que par la professionnalisation de leurs acteurs ».

1. L'Allemagne et la Belgique ont supprimé les juridictions militaires en temps de paix
a) En Allemagne

En Allemagne , les auteurs d'infractions pénales militaires sont jugés, en temps de paix, par les juridictions de droit commun.

En revanche, la Loi fondamentale prévoit l'institution de tribunaux pénaux militaires pour les forces armées en temps de guerre (article 96). Elle précise que ces tribunaux militaires relèvent du ministère de la justice et que les juges qui y siègent doivent « satisfaire aux conditions requises pour l'exercice de la fonction de juge » et que la Cour fédérale de justice, c'est-à-dire l'équivalent de notre Cour de cassation, fait fonction de cour militaire suprême.

b) En Belgique

De même, la Belgique a supprimé, par la loi du 10 avril 2003, les juridictions militaires en temps de paix 10 ( * ) et les infractions commises par les militaires relèvent des juridictions de droit commun.

Avant cette réforme, il existait une juridiction de première instance appelée conseil de guerre et une juridiction d'appel appelée cour militaire, qui étaient composées d'un juge civil et de quatre militaires. Les fonctions du ministère public étaient exercées par un corps de magistrats constituant un office spécialisé appelé auditorat militaire. L'auditeur militaire exerçait également, en cas d'instruction judiciaire, les fonctions de juge d'instruction.

Dans son arrêt Pauwels c/ Belgique de 1988 11 ( * ) , la Cour européenne des droits de l'homme avait condamné l'Etat belge pour violation de l'article 5§3 de la Convention, considérant que lorsqu'un même magistrat exerce des fonctions d'instruction et de poursuite, il n'est plus indépendant des parties et son impartialité peut être sujette à caution.

Depuis la loi du 10 avril 2003, ce sont les juridictions de droit commun qui connaissent des affaires militaires en temps de paix et ce sont les règles de droit commun qui trouvent à s'appliquer.

La loi belge prévoit, comme en Allemagne, le rétablissement des juridictions militaires en temps de guerre. La loi du 10 avril 2003 précise ainsi qu'en temps de guerre, peuvent être institués des tribunaux militaires permanents et une Cour militaire, dont le siège et le ressort sont fixés par le Roi. La loi précise qu'en temps de guerre, les infractions sont recherchées et leurs auteurs poursuivis et jugés selon le droit commun de la procédure pénale. Toutefois, la partie lésée ne peut pas se constituer partie civile et elle ne peut pas faire citer directement le prévenu devant la juridiction militaire. Il existe également des règles particulières concernant la détention provisoire.


* 9 Sénat, Division des études de législation comparée du service des affaires européennes, « La justice militaire », Les documents de travail du Sénat, n°LC 83,5 décembre 2000.

* 10 Voir l'article de MM. Henri D. Bosly et Thierry Moreau, « Les tribunaux militaires en Belgique », dans l'ouvrage collectif « Les juridictions militaires et tribunaux d'exception en mutation, perspectives comparées et internationales » sous la direction de Mme Elisabeth Lambert Abdelgawad, Agence universitaire de la Francophonie, décembre 2007, pp. 33-48.

* 11 Cour européenne des droits de l'homme, 26 mai 1988, Pauwels c/Belgique.

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