Avis n° 490 (2014-2015) de M. Albéric de MONTGOLFIER , fait au nom de la commission des finances, déposé le 9 juin 2015
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LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES
FINANCES
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EXPOSÉ GÉNÉRAL
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I. L'INEFFICACITÉ DES DISPOSITIFS DE SOUTIEN
À L'ACTIVITÉ FACE À UN MARCHÉ DU TRAVAIL
PROFONDÉMENT DÉGRADÉ
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A. UNE DÉTÉRIORATION DE L'EMPLOI EN
FRANCE DEPUIS 2013
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B. DES DISPOSITIFS DE SOUTIEN FINANCIER À
L'ACTIVITÉ DES TRAVAILLEURS DÉFECTUEUX ET MAL
ARTICULÉS
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1. La prime pour l'emploi (PPE)
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2. Le RSA
« activité »
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a) Une prestation marquée par un fort taux
de non-recours
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b) Une prestation dont l'effet en matière de
reprise d'activité et de lutte contre la pauvreté est
limité
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(1) Le RSA « activité »
a un effet incitatif à la reprise d'emploi limité
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(2) Le RSA « activité »
contribue insuffisamment à la réduction de la
pauvreté
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a) Une prestation marquée par un fort taux
de non-recours
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1. La prime pour l'emploi (PPE)
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A. UNE DÉTÉRIORATION DE L'EMPLOI EN
FRANCE DEPUIS 2013
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II. APRÈS DIVERS TRAVAUX
PRÉPARATOIRES, UNE PREMIÈRE ÉTAPE DE LA RÉFORME
ENGAGÉE À L'AUTOMNE 2014
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III. UNE RÉFORME NÉCESSAIRE MAIS
MANQUANT D'AMBITION
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I. L'INEFFICACITÉ DES DISPOSITIFS DE SOUTIEN
À L'ACTIVITÉ FACE À UN MARCHÉ DU TRAVAIL
PROFONDÉMENT DÉGRADÉ
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EXAMEN DES ARTICLES
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TITRE IV ENCOURAGER L'ACTIVITÉ
PROFESSIONNELLE PAR LA CRÉATION D'UNE PRIME D'ACTIVITÉ
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ARTICLE 24 (Art. L. 841-1,
L. 842-1 à L. 842-7, L. 843-1 à L. 843-7,
L. 844-1 à L. 844-5, L. 845-1 à L. 845-2 et
L. 846-1 [nouveaux] du code de la sécurité sociale)
Création de la prime d'activité
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ARTICLE 25 (Art. L. 262-1 à L. 262-4, L.
262-9, L. 262-10, L. 262-24, L. 262-25, L. 262-27-1, L. 262-28, L.
262-38, L. 262-40, L. 262-45, L. 262-46, L. 262-53 et L. 522-12 du code de
l'action sociale et des familles) Suppression du RSA
« activité » et mise en cohérence
législative
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ARTICLE 26 (Art. 28 et 30 de la loi
n° 2008-1249 du 1er décembre 2008
généralisant le revenu de solidarité active et
réformant les politiques d'insertion, art. 4 de la loi n° 91-647 du
10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, art. L. 115-2,
L. 121-7, L. 131-2, L. 14-10-6, L. 262-29, L. 262-32
et L. 262-33 du code de l'action sociale et des familles, art.
L. 114-16-2, L. 141-17, L. 167-3, L. 412-8, L. 523-1,
L. 553-1, L. 553-2, L. 821-5-1, L. 835-3, L. 861-2 et
L. 865-1 du code de la sécurité sociale,
art. L. 3252-3, L. 5132-3-1, L. 5134-30-2, L. 5134-72-2 et
L. 6325-1 du code du travail, art. L. 3334-6-1,
L. 3334-16-2 et L. 3335-4 du code général des
collectivités territoriales, art. 81 du code général
des impôts, art. L. 98 A du livre des procédures
fiscales, art. L. 331-2 et L. 334-5 du code de la consommation,
art. L. 351-11 du code de la construction et de l'habitat,
art. L. 120-11 et L. 120-21 du code du service national,
art. 14 de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier
1996 relative au remboursement de la dette sociale, art. 13-2
(nouveau) de l'ordonnance n° 77-1102 du 26 septembre 1977 portant
extension et adaptation au département de Saint-Pierre-et-Miquelon de
diverses dispositions relatives aux affaires sociales) Coordinations et
dispositions diverses
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ARTICLE 27 Entrée en vigueur et
application à Mayotte
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ARTICLE 28 (nouveau) Rapport
d'évaluation de la prime d'activité
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ARTICLE 29 (nouveau) Rapport concernant
l'exclusion des pensions alimentaires des ressources prises en compte pour le
calcul de la prime d'activité
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TITRE IV ENCOURAGER L'ACTIVITÉ
PROFESSIONNELLE PAR LA CRÉATION D'UNE PRIME D'ACTIVITÉ
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EXAMEN EN COMMISSION
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AMENDEMENTS
PRÉSENTÉS PAR LA COMMISSION DES FINANCES
N° 490
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2014-2015
Enregistré à la Présidence du Sénat le 9 juin 2015 |
AVIS
PRÉSENTÉ
au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE après engagement de la procédure accélérée, relatif au dialogue social et à l' emploi ,
Par M. Albéric de MONTGOLFIER,
Sénateur
(1) Cette commission est composée de : Mme Michèle André , présidente ; M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général ; Mme Marie-France Beaufils, MM. Yvon Collin, Vincent Delahaye, Mmes Fabienne Keller, Marie-Hélène Des Esgaulx, MM. André Gattolin, Charles Guené, Francis Delattre, Georges Patient, Richard Yung , vice-présidents ; MM. Michel Berson, Philippe Dallier, Dominique de Legge, François Marc , secrétaires ; MM. Philippe Adnot, François Baroin, Éric Bocquet, Yannick Botrel, Jean-Claude Boulard, Michel Bouvard, Michel Canevet, Vincent Capo-Canellas, Thierry Carcenac, Jacques Chiron, Serge Dassault, Éric Doligé, Philippe Dominati, Vincent Eblé, Thierry Foucaud, Jacques Genest, Didier Guillaume, Alain Houpert, Jean-François Husson, Pierre Jarlier, Roger Karoutchi, Bernard Lalande, Marc Laménie, Nuihau Laurey, Antoine Lefèvre, Gérard Longuet, Hervé Marseille, François Patriat, Daniel Raoul, Claude Raynal, Jean-Claude Requier, Maurice Vincent, Jean Pierre Vogel . |
Voir le(s) numéro(s) :
Assemblée nationale ( 14 ème législ.) : |
2739 , 2770 , 2773 , 2792 et T.A. 521 |
|
Sénat : |
476 (2014-2015) |
LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES FINANCES
LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES FINANCES Réunie le mardi 9 juin 2015 sous la présidence de Michèle André, présidente, la commission des finances du Sénat a procédé à l'examen du rapport pour avis d'Albéric de Montgolfier sur le projet de loi n° 476 (2014-2015) relatif au dialogue social et à l'emploi , transmis par l'Assemblée nationale. Saisie pour avis sur le titre IV du projet de loi relatif à la création de la prime d'activité , la commission a relevé que cette nouvelle prestation, bien que présentant des avantages certains par rapport au RSA « activité » et à la prime pour l'emploi qu'elle remplace, n'était pas exempte de critiques. La commission a d'abord rappelé le caractère flou du dispositif proposé , de nombreux éléments pourtant substantiels, comme les paramètres de calcul de la prime et ses modalités de fonctionnement, devant être fixés par voie réglementaire. Par ailleurs, elle a souligné que les modalités de calcul et de versement de la prime demeurent complexes , tant pour les bénéficiaires que pour les organismes gestionnaires. Ces deux écueils posent la question de la pertinence de l'hypothèse retenue par le Gouvernement d'un taux de recours à la prime d'activité de 50 % dès la première année. Or, c'est sur la base de cette hypothèse qu'a été calculé le montant de la prime en 2016, soit 4,1 milliards d'euros. En l'absence de moyen de pilotage de la dépense, la commission a relevé l'important aléa budgétaire associé à la création de cette prime, qui sera intégralement financée par le budget de l'État. Afin de clarifier les objectifs de la prime d'activité et de mieux encadrer son coût budgétaire, la commission a adopté, sur proposition du rapporteur pour avis, deux amendements . Le premier amendement vise à exclure les étudiants du bénéfice de la prime d'activité. Les conditions d'éligibilité que le Gouvernement entend leur appliquer conduiraient, en effet, à soutenir ceux dont le temps de travail semble le plus difficilement compatible avec leur scolarité. La prime d'activité constitue ainsi une mauvaise réponse aux difficultés financières que rencontrent certains étudiants. Le second amendement tend à préciser le contenu du rapport devant être remis par le Gouvernement au Parlement afin de dresser un premier bilan de la prime d'activité dix-huit mois après son entrée en vigueur, de manière à renforcer le suivi budgétaire de ce dispostif et de mieux connaitre les déterminants de la dépense. La commission a émis un avis favorable à l'adoption des articles 25, 26, 27 et 29 (nouveau) sans modification et à l'adoption des articles 24 et 28 (nouveau) tels que modifiés par ses amendements. |
EXPOSÉ GÉNÉRAL
I. L'INEFFICACITÉ DES DISPOSITIFS DE SOUTIEN À L'ACTIVITÉ FACE À UN MARCHÉ DU TRAVAIL PROFONDÉMENT DÉGRADÉ
A. UNE DÉTÉRIORATION DE L'EMPLOI EN FRANCE DEPUIS 2013
1. Un chômage massif, concentré sur les travailleurs peu qualifiés
La réforme des dispositifs d'incitation financière à la reprise d'activité et de soutien au pouvoir d'achat des travailleurs modestes, proposée par le présent projet de loi, doit s'appréhender au regard de la situation actuelle du marché du travail et de l'état de la répartition des revenus.
La France se caractérise par un taux de chômage important , qui s'élevait en moyenne sur le premier trimestre 2015 à 10,3 % de la population active (soit 2,9 millions de personnes), en augmentation de 0,2 point par rapport à l'année précédente 1 ( * ) . Le taux de chômage des jeunes actifs était de 23,7 %.
Évolution du taux de chômage en France depuis 2003
Source : INSEE
Ce chômage de masse concerne en grande partie les travailleurs peu qualifiés , tandis que les actifs qui ont poursuivi leurs études au-delà du baccalauréat connaissent un taux de chômage nettement plus faible, d'environ 5 % 2 ( * ) . Il existe ainsi une forte polarisation du marché du travail, en fonction du niveau de qualification des travailleurs.
Taux de chômage par niveau de qualification en 2012
Source : Sylvain Catherine et. al, « Marché du travail : la grande fracture », février 2015. D'après les données de l'enquête emploi de l'INSEE
2. Le phénomène des « travailleurs pauvres »
Par ailleurs, le nombre de « travailleurs pauvres » - c'est-à-dire de personnes occupant un emploi dont le niveau de vie du ménage auquel ils appartiennent est inférieur au seuil de pauvreté - est en augmentation depuis plusieurs années.
Niveau de vie médian et seuil de pauvreté Le niveau de vie médian des personnes vivant dans un ménage de France métropolitaine était de 19 740 euros en 2012, soit 1 645 euros par mois . Les 10 % des personnes les plus modestes ont un niveau de vie inférieur à 10 610 euros. Les 10 % les plus aisées disposent d'au moins 37 430 euros, soit 3,5 fois plus. Le seuil de pauvreté , fixé par convention à 60 % du revenu de vie médian de la population, s'établissait en 2012 à 987 euros mensuels . 8,5 millions de personnes se trouvaient en-dessous de ce seuil , ce qui correspond à un taux de pauvreté de 13,9 % (en baisse par rapport à 2011 où il atteignait 14,3 %). Le seuil de pauvreté correspondait en 2012 à un revenu d'activité d'environ 0,8 fois le salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC) . |
Source : INSEE
En 2012, selon l'INSEE, il y avait 1,8 million de « travailleurs pauvres » en retenant un seuil de pauvreté de 50 % du revenu médian, et 3 millions si l'on retient le seuil de 60 % du revenu médian 3 ( * ) . Ainsi que le notait notre ancien collègue Bernard Seillier dans un rapport de 2008 sur la lutte contre la pauvreté 4 ( * ) , la structure du ménage a une influence déterminante sur le taux de pauvreté des travailleurs. L'étude du niveau de pauvreté selon la composition du ménage montre la place importante que revêtent les familles monoparentales dans l'ensemble de la population pauvre ; leur part était de 22,3 % en 2012, en augmentation par rapport à 2011 (20,6 %), soit un niveau bien supérieur à leur part dans la population totale (8,6 %).
L'augmentation du nombre de « travailleurs pauvres » est également fortement liée au développement de nouvelles formes d'emploi , et en particulier des emplois avec de faibles durées de travail. Le nombre de personnes travaillant à temps partiel est passé de 17,6 % à 19 % entre 2003 et 2013 5 ( * ) .
Ces différents éléments montrent qu'il peut être pertinent de soutenir le pouvoir d'achat des travailleurs modestes dont le niveau de vie se situe autour du seuil de pauvreté, et de cibler en particulier les familles monoparentales, compte tenu de leur part relative importante dans l'ensemble de la population pauvre.
Taux de pauvreté selon la composition du
ménage en 2012
(lorsque la personne de référence du
ménage a moins de 65 ans)
Part dans la population totale |
Part dans la population pauvre |
Taux de pauvreté |
Niveau de vie médian
|
|
Personnes seules |
9,3 % |
12,2 % |
18,3 % |
18 040 |
Familles monoparentales |
8,6 % |
22,3 % |
36 % |
13 830 |
Couple sans ou avec un enfant |
26,8 % |
14,2 % |
7,4 % |
23 300 |
Couple avec deux enfants ou plus |
33,1 % |
34,4 % |
14,4 % |
19 390 |
Autre types de ménages |
2,9 % |
5,3 % |
25,6 % |
16 860 |
Source: INSEE, enquête Revenus fiscaux et sociaux 2012
B. DES DISPOSITIFS DE SOUTIEN FINANCIER À L'ACTIVITÉ DES TRAVAILLEURS DÉFECTUEUX ET MAL ARTICULÉS
1. La prime pour l'emploi (PPE)
a) Un crédit d'impôt visant à soutenir les revenus d'activité modestes
La prime pour l'emploi (PPE) a été créée par la loi n° 2001-458 du 30 mai 2001 portant création d'une prime pour l'emploi . Il s'agit d'un crédit d'impôt accordé aux foyers fiscaux domiciliés en France et calculé sur la base des revenus individuels des membres de ce foyer fiscal. Les critères d'éligibilité ainsi que les modalités de calcul du montant de cette prime sont complexes (cf. infra ).
Sous l'effet combiné du gel du barème de la prime et des effets de la création du RSA « activité », le nombre de foyers fiscaux bénéficiant de la PPE a fortement diminué depuis 2008. En 2013, le nombre de bénéficiaires s'élevait ainsi à environ 5,8 millions d'euros, pour un coût total d'environ 2,5 milliards d'euros. Le coût définitif pour l'année 2014 s'élève à 2,2 milliards d'euros .
Évolution du coût et du nombre de foyers fiscaux bénéficiaires de la PPE
Note : Le coût de la PPE, en tant que dépense fiscale, correspond à la somme de la minoration de recettes d'impôt sur le revenu au regard de la quotité d'impôt qui aurait résulté de l'application de la norme (soit en 2013, environ 580 millions d'euros) et, pour la part de crédit d'impôt excédant l'impôt effectivement dû, aux remboursements en numéraire au profit des contribuables (soit en 2013, environ 1,88 milliard d'euros).
Source : commission des finances du Sénat (à partir des données des tomes II des fascicules « Voies et moyens » annexés aux projets de loi de finances)
b) Une prestation aux objectifs confus, peu redistributive et à l'effet incitatif faible
La prime pour l'emploi a fait l'objet de nombreux rapports et évaluations. Elle a été classée comme dépense fiscale peu efficiente par le comité d'évaluation des dépenses discales et des niches sociales 6 ( * ) . Trois défauts principaux de la PPE ont été soulignés de manière récurrente par les différents travaux conduits, en particulier par la Cour des comptes en 2011 7 ( * ) , ou plus récemment, dans le rapport de notre collègue député Christophe Sirugue de 2013 8 ( * ) ou celui de Dominique Lefebvre et François Auvigne 9 ( * ) , co-présidents du groupe de travail sur la fiscalité des ménages de 2014.
(1) Une mesure aux objectifs multiples et incertains
La prime pour l'emploi a d'abord été conçue comme une incitation à l'activité professionnelle , en visant à éviter que les personnes qui reprennent une activité ne voient leurs revenu disponible stagner ou diminuer en raison de la perte de certaines allocations sociales et minima sociaux. Afin de ne pas favoriser le travail à temps très partiel, elle cible les revenus d'activité à partir de 0,3 SMIC et son montant augmente jusqu'à atteindre son maximum au niveau de 0,9 SMIC . Toutefois, les modifications apportées par la suite à la PPE, qui ont conduit à une forte revalorisation de ses taux et de ses seuils et plafonds (cf. infra ), ont conduit à une forte augmentation des montants moyens versés aux bénéficiaires. La PPE s'est ainsi transformée en complément de rémunération pour les personnes ayant des revenus d'activité modestes, c'est-à-dire en véritable mesure de soutien au pouvoir d'achat.
Comme le note la Cour des comptes, la PPE a également pu être considérée à partir de 2006 comme « un moyen d'accompagner la modération du coût du travail » 10 ( * ) , en permettant de « distribuer du pouvoir d'achat tout en modérant l'évolution du SMIC ».
La création du RSA « activité », qui poursuit des objectifs similaires en termes d'incitation à la reprise d'activité et de complément de rémunération (cf. infra ), est également venue remettre en question l'utilité de la PPE.
(2) Une prestation peu redistributive
L'une des principales critiques adressées à la PPE concerne son effet faiblement redistributif, malgré le doublement de son montant entre 2002 et 2008.
Tout d'abord, la PPE est insuffisamment familialisée . En effet, son mode de calcul prend avant tout en compte les revenus individuels des contribuables. Elle se réfère à la notion de foyer fiscal et non à celle de ménage, qui correspond à l'ensemble des personnes vivant sous le même toit. En outre, les majorations qui existent pour personnes à charge ou pour les couples mono-actifs sont d'un montant très faible.
Foyer fiscal et ménage Un foyer fiscal désigne l'ensemble des personnes inscrites sur une même déclaration de revenus. Par exemple, un couple marié avec un enfant à charge constitue un foyer fiscal. Un ménage désigne l'ensemble des personnes partageant un même logement, sans qu'elles soient nécessairement unies par un lien de parenté. Il peut être composé d'une seule personne. En conséquence, un ménage peut être constitué de plusieurs foyers fiscaux . Par exemple, un couple non marié dans lequel chaque personne remplit sa propre déclaration de revenus compte pour deux foyers fiscaux. |
Source : INSEE
Ainsi que le note la Cour des comptes, ces caractéristiques aboutissent à créer des situations peu équitables, car « une personne rémunérée au SMIC à temps plein touche la même PPE que son conjoint soit inactif ou perçoive un revenu pouvant aller jusqu'à deux fois le SMIC, voire bien davantage en cas de concubinage, puisque dans ce cas le ménage est constitué de deux foyers fiscaux distinc t » 11 ( * ) .
En outre, la PPE est mal ciblée . Son grand nombre de bénéficiaires aboutit à un saupoudrage de la prime dont les montants unitaires sont faibles : le montant moyen annuel de la PPE s'établissait en 2012 à 432 euros, soit 36 euros par mois . Ainsi, un célibataire sans enfant et rémunéré au SMIC à temps plein est éligible à 76 euros de PPE par mois ; après imputation du RSA « activité », la PPE résiduelle est de 54 euros par mois 12 ( * ) . En outre, elle ne bénéficie pas aux travailleurs les plus précaires , en particulier ceux qui travaillent à temps très partiel, puisqu'elle n'est versée qu'à partir d'un seuil de revenus d'activité supérieur à 0,3 SMIC. Au total, la PPE n'aurait contribué qu'à hauteur de 3,3 % à la réduction des inégalités de niveau de vie en 2008 13 ( * ) .
Ce manque de ciblage est manifeste au regard de la répartition du bénéfice de la PPE par décile de niveau de vie. Ainsi, elle bénéficiait en 2014 à l'ensemble des déciles, bien qu'elle soit davantage concentrée entre les deuxième et sixième déciles de niveau de vie (cf. tableau infra ). En 2011, 8 % de ses bénéficiaires appartenaient aux déciles 8 à 10 14 ( * ) et disposaient ainsi d'un revenu supérieur à 25 400 euros par an.
(3) Une prestation insuffisamment incitative
Plusieurs études ont mis en avant l'effet faiblement incitatif de la PPE pour une part importante de ses bénéficiaires. Comme le notait la Cour des comptes, « les entrées au bénéfice de la PPE résultent le plus souvent d'un changement de revenu et/ou de situation familiale. Elles ne sont que peu liées à une reprise d'activité » 15 ( * ) . Plusieurs raisons expliquent ce faible impact.
D'une part, les gains monétaires procurés à l'occasion d'une reprise d'activité sont limités et donc peu incitatifs.
D'autre part, la PPE, étant liée à la déclaration d'impôt sur le revenu, est versée de façon très décalée dans le temps et en une seule fois . Elle est donc peu réactive et peu intégrée aux paramètres pris en compte par les individus dans les choix de reprise en activité. Le versement d'acomptes et la mensualisation, qui avaient été introduits en 2004 et 2006, ont été supprimés en 2008 (cf. infra ).
Enfin, la complexité du mode de calcul de la PPE et de son articulation avec le RSA « activité » rendait cette prime peu lisible et l'éligibilité comme son montant, difficiles à anticiper pour ses bénéficiaires potentiels.
2. Le RSA « activité »
a) Une prestation marquée par un fort taux de non-recours
Le revenu de solidarité active (RSA) a été créé par la loi n° 2008-1249 du 1 er décembre 2008 généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d'insertion. Il s'agit d'une prestation versée aux foyers afin de leur garantir un certain niveau de revenu. Il se compose d'une part « socle », versée en l'absence de revenus d'activité, et d'une part « activité », versée en présence de revenus d'activité afin de permettre à tout foyer de percevoir un niveau de revenu garanti (cf. infra ).
La montée en charge du RSA « activité » a été assez lente et le nombre d'allocataires, d'environ 822 000 en 2014 (avec ou sans socle), est resté très inférieur au nombre de foyers éligibles, estimé à 1,5 million lors de la réforme 16 ( * ) . Cette prestation est ainsi caractérisée par un taux de non-recours très élevé , évalué par le Conseil national d'évaluation du RSA « activité » à 68 % 17 ( * ) . Toutes composantes du RSA confondues, la perte moyenne mensuelle associée à ce non-recours s'élevait à 249 euros par foyer non-recourant pour l'année 2010 18 ( * ) . Le non-recours au RSA « activité » seul induisait ainsi une « non-dépense » de 1,7 milliard d'euros pour cette même année.
Plusieurs explications sont généralement apportées pour expliquer ce taux de non-recours important 19 ( * ) . Une première explication réside dans le manque de connaissance du dispositif de la part de ses bénéficiaires potentiels, en dépit des campagnes d'information menées. Par ailleurs, la complexité du dispositif a un effet désincitatif, d'une part car les bénéficiaires potentiels du RSA « activité » peuvent avoir du mal à évaluer les montants auxquels ils ont droit, et d'autre part car l'obligation de déclaration trimestrielle des revenus peut être vécue comme trop contraignante. Enfin, certains bénéficiaires potentiels n'ont pas recours au RSA « activité » par refus de dépendre d'une aide sociale et d'être assimilés aux bénéficiaires du minimum social qu'est le RSA « socle ».
Évolution du nombre d'allocataires du RSA « activité» (avec ou sans socle)
Année |
2010 |
2011 |
2012 |
2013 |
2014 |
RSA « activité » |
667 000 |
707 745 |
720 331 |
757 212 |
821 751 |
RSA « jeunes actifs » |
- |
7 332 |
6 394 |
5 739 |
5 538 |
Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires
Ce fort taux de non-recours s'est traduit par des dépenses effectives de RSA « activité » inférieures aux prévisions jusqu'en 2013. Ainsi, en 2011, les versements effectifs du Fonds national des solidarités actives (FNSA) aux organismes de sécurité sociale au titre du RSA « activité » en France métropolitaine ont été inférieurs de 21 % à la prévision initiale (1 418 millions d'euros effectivement versés contre 1 803 millions d'euros prévus).
En 2014, les dépenses de RSA « activité » en France et en outre-mer ont toutefois connu une progression significative et ont dépassé les prévisions initiales pour atteindre un montant d'environ 1,9 milliard d'euros (contre 1,58 milliard d'euros en 2013). Pour 2015, le montant prévu en loi de finances initiale s'élève à 1,95 milliard d'euros. Cette augmentation est principalement le résultat de l'augmentation du nombre de personnes éligibles depuis 2013 20 ( * ) et des deux revalorisations successives du montant forfaitaire du RSA de 2 % conduites en septembre 2013 et en septembre 2014, en sus des revalorisations annuelles opérées en fonction de l'inflation. Ces revalorisations exceptionnelles ont été mises en oeuvre dans le cadre du plan pluriannuel de lutte contre la pauvreté et pour l'inclusion sociale adopté le 21 janvier 2013, qui prévoit une revalorisation de 10 % sur cinq ans (d'ici 2017).
En revanche, le montant de la dépense de RSA « jeunes actifs » a été, en 2014, inférieur de 9 % à la prévision initiale (23,6 millions d'euros contre 26 millions d'euros prévus). Cette montée en charge limitée s'explique en grande partie par le très faible nombre de bénéficiaires de cette allocation , en raison des conditions restrictives d'accès. Le nombre de jeunes actifs allocataires du RSA « activité » (avec ou sans socle) a même diminué de plus de 24 % entre 2011 et 2014, passant de 7 332 à 5 538 (cf. tableau supra ).
Évolution du coût du RSA
« activité » (métropole + outre-mer)
et du
nombre d'allocataires
Note : Les dépenses de RSA « activité » prises en compte dans le cadre de ce calcul sont celles : en France métropolitaine, dans les départements d'outre-mer et les collectivités d'outre-mer de Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon depuis le 1 er janvier 2011, à Mayotte depuis le 1 er janvier 2012, ainsi que les dépenses de revenu supplémentaire temporaire d'activité (RSTA) 21 ( * ) jusqu'au 31 mai 2013.
Source : commission des finances du Sénat (à partir des données des projets annuels de performances de la mission « Solidarité »)
b) Une prestation dont l'effet en matière de reprise d'activité et de lutte contre la pauvreté est limité
(1) Le RSA « activité » a un effet incitatif à la reprise d'emploi limité
L'objectif du RSA « activité » était d'inciter à la reprise d'activité en rendant le travail plus rémunérateur que l'inactivité grâce par la possibilité de cumuler, de façon pérenne, les revenus d'activité avec cette allocation . Comme le précise la Cour des comptes dans l'insertion au rapport public annuel de 2013, les simulations qui peuvent être faites montrent que depuis la mise en place du RSA « activité », « la reprise d'activité se traduit toujours par un gain financier y compris pour une reprise d'emploi à mi-temps, et quelle que soit la configuration familiale » 22 ( * ) .
Pourtant, l'impact de cette prestation sur la reprise d'emploi parait limité. Dès la phase d'expérimentation en 2007-2008, l'effet incitatif RSA était apparu restreint : dans les zones d'expérimentation, le taux de retour à l'emploi était supérieur de 9 % en moyenne au niveau observé dans les zones témoins, mais les fortes incertitudes statistiques rendaient difficile l'interprétation de cet écart.
Afin de mesurer l'effet du RSA « activité » sur la reprise d'emploi, deux indicateurs de performance ont été créés au sein du programme budgétaire 304 « Inclusion sociale, protection des personnes et économie sociale et solidaire ». Ils montrent également un faible effet incitatif. Le premier mesure la part des foyers allocataires du RSA sans emploi dont au moins un des membres reprend une activité. Cette part a peu évolué dans le temps (7,3 % en 2011, 7,1 % en 2012, 6,8 % en 2013, 7 % en 2014). Le second mesure le taux de sortie du RSA pour dépassement de ressources. Celui-ci a connu une baisse régulière, passant de 4,1 % en 2011 à 3,3 % en 2014, qui s'explique en partie par la revalorisation du RSA qui a eu lieu au cours de cette période.
Dans son rapport publié en 2011, le Conseil national de l'évaluation du RSA a mené des analyses montrant que le passage du RMI et de l'API au RSA n'a eu qu'un faible impact sur le retour à l'emploi . Il avance plusieurs raisons à cela : « la conjoncture économique dégradée a contraint l'offre d'emploi faite aux bénéficiaires ; la connaissance imprécise par les bénéficiaires du mode de calcul du RSA en a limité l'impact ; le RSA, du moins à court terme, n'a pas significativement augmenté l'incitation financière à la reprise d'emploi par rapport au RMI ; des freins autres que financiers limitent souvent leur retour à l'emploi des bénéficiaires de minima sociaux » 23 ( * ) . Il est sûr que le contexte socio-économique marqué par un taux de chômage élevé vient limiter les effets des mécanismes d'intéressement au retour à l'emploi.
S'il n'a que peu d'effets incitatifs, la mise en place du RSA n'a pas non plus eu d'effets négatifs sur l'activité. Il était en effet craint que le RSA conduise à une augmentation du temps partiel « désiré », du fait du complément de revenu procuré par cette prestation, ainsi que du temps partiel « imposé » par les employeurs, le RSA pouvant être perçu comme un moyen de compenser les baisses de salaires. Les travaux conduits par le Conseil national d'évaluation du RSA 24 ( * ) n'ont pas permis de mettre en évidence l'existence de tels effets.
(2) Le RSA « activité » contribue insuffisamment à la réduction de la pauvreté
Le RSA « activité » bénéficie principalement aux travailleurs pauvres , en raison de son caractère familialisé et de son ciblage sur les faibles revenus d'activité. Il a des propriétés redistributives importantes : son montant moyen, d'environ 190 euros mensuels en 2014 , représente une part significative du revenu de ses bénéficiaires. En comparaison avec la PPE, la répartition des montants du RSA « activité » selon décile de niveau de vie des foyers montre un ciblage important sur les foyers situés dans les 1 er et 2 e déciles (environ 65 % des montants du RSA « activité » leur parviennent).
Répartition des montants simulés de PPE
et de RSA « activité »
selon le décile de
niveau de vie du foyer
Note de lecture : 31,8 % des dépenses simulées de RSA « activité » bénéficie aux 10 % des ménages les moins aisés, contre 8,6 % des dépenses de PPE.
Source : Guillaume Allègre, « RSA et lutte contre la pauvreté : quels effets sur les travailleurs pauvres ? », Politiques familiales et sociales n° 113, septembre 2013
Toutefois, l'effet du RSA « activité » sur le niveau de vie et la réduction de la pauvreté des ménages est limité. Selon les simulations menées par le Conseil national d'évaluation du RSA, le RSA « activité » a permis, en 2010, de faire baisser le nombre de pauvres de 2 % et le taux de pauvreté de 0,2 point . Il permet en outre une réduction de « l'intensité » de la pauvreté de ses bénéficiaires, c'est-à-dire la distance qui sépare le revenu des foyers pauvres du seuil de pauvreté 25 ( * ) .
L' effet redistributif de cette prestation est sensiblement atténué par le fait que le RSA « activité » vient en diminution d'autres revenus (notamment de la PPE) et qu'il est marqué par un fort taux de non-recours. Ainsi, le niveau de revenu des ménages éligibles n'a progressé que de 2 % en 2012, alors qu'il aurait pu progresser de 6,1 % avec un plein recours.
II. APRÈS DIVERS TRAVAUX PRÉPARATOIRES, UNE PREMIÈRE ÉTAPE DE LA RÉFORME ENGAGÉE À L'AUTOMNE 2014
A. LES TRAVAUX PRÉPARATOIRES À LA REFONTE DU RSA « ACTIVITÉ » ET DE LA PPE
Compte tenu de la proximité en termes d'objectifs et de publics ciblés entre la PPE et le RSA « activité », ainsi que des limites, rappelées ci-avant, que présentent ces deux dispositifs, plusieurs rapports ont élaboré des propositions de réformes .
La Cour des comptes, dans son insertion au rapport public annuel de 2011 26 ( * ) sur la prime pour l'emploi, concluait à la nécessité d'opérer un choix clair entre le RSA « activité » et la PPE, et exposait trois scénarios de réforme.
Le premier scénario consistait en l'absorption du RSA « activité » par la PPE , ce qui nécessiterait, selon la Cour des comptes, de recentrer la PPE sur les foyers les plus modestes afin de ne pas faire de perdants parmi les bénéficiaires du RSA « activité ». Pour cela, elle proposait de rendre la PPE accessible aux personnes précaires travaillant à temps très partiel en supprimant le seuil d'entrée équivalent à 0,3 SMIC, et d'exclure les ménages dont les rémunérations se situent nettement au-dessus des premiers déciles, en abaissant les plafonds de la PPE.
Le second scénario envisageait la suppression de la PPE au profit du RSA « activité » . Cette mesure, envisagée lors de la création du RSA, avait été écartée en raison du nombre important de « perdants » qu'elle aurait occasionné.
Le troisième scénario prévoyait le maintien des deux dispositifs, tout en différenciant leurs objectifs : le RSA « activité » viserait à inciter la reprise d'activité, tandis que la PPE serait une mesure de soutien financier pour les ménages. Cette piste nécessiterait que cette dernière soit aménagée afin de tenir davantage compte de la situation familiale des bénéficiaires et soit davantage ciblée sur les ménages modestes.
Le plan pluriannuel de lutte contre la pauvreté et pour l'inclusion sociale , adopté le 21 janvier 2013, a prévu de conduire une réforme du RSA « activité » et de la PPE. Afin d'identifier les pistes envisageables, une mission a été confiée par le Premier ministre au député Christophe Sirugue, qui a remis son rapport en juillet 2013 27 ( * ) .
Celui-ci identifiait quatre scénarios de réforme possibles :
- un scénario A consistant à supprimer le RSA « activité » et à rénover le barème de la PPE , qui serait accessible dès le premier euro gagné et dès l'âge de 18 ans, avec une montée en puissance du dispositif jusqu'à 0,7 SMIC et un point de sortie situé à 1,1 SMIC ;
- un scénario B consistant à supprimer la PPE au profit du RSA « activité » , en maintenant son barème mais en l'ouvrant aux travailleurs dès 18 ans et en le simplifiant afin d'augmenter le taux de recours ;
- un scénario C proposant de fusionner le RSA « activité » et la PPE au sein d'une nouvelle prestation strictement individualisée , qui serait accessible à tous les travailleurs sans condition d'âge et dès le premier euro gagné, avec une aide maximale perçue pour un revenu d'activité correspondant à 0,7 SMIC et un point de sortie du dispositif à 1,2 SMIC ;
- un scénario D consistant à soutenir les revenus d'activité modeste par une exonération ciblée de cotisations sociales salariales , sur les salaires compris entre 0 et 1,2 SMIC.
Le rapport « Sirugue » plaidait pour une réforme s'inspirant du scénario C, mais en corrigeant ses effets négatifs. Il proposait ainsi la création d'une « prime d'activité » ouverte dès 18 ans et dès le premier euro d'activité jusqu'à un revenu d'activité mensuel de 1,2 SMIC . Son montant aurait reposé sur les seuls revenus d'activité des bénéficiaires, mais les ressources du foyer auraient été prises en compte pour déterminer l'éligibilité des travailleurs au dispositif.
Le barème de la prime d'activité proposée par le rapport de Christophe Sirugue
Source : rapport précité de Christophe Sirugue, juillet 2013
Enfin, le rapport de Dominique Lefebvre et de François Auvigne sur la fiscalité des ménages 28 ( * ) , publié en avril 2014, proposait une remise à plat progressive du RSA « activité » et de la PPE, en clarifiant leurs objectifs respectifs et en les ciblant davantage. Il présentait plusieurs orientations possibles :
- un renforcement du RSA « activité » en augmentant le montant de l'aide et/ou son barème, qui permettrait d'absorber la PPE ;
- la création d'une nouvelle prestation individualisée en remplacement de la PPE et du RSA « activité » ;
- un allègement de cotisations sociales salariales pour les bas salaires.
Le rapport privilégiait une extension du RSA « activité » accompagnée d'un dispositif d'allègement de cotisations sociales salariales .
Cette dernière solution avait été retenue par le Gouvernement, qui, à l'occasion du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014, avait proposé une réduction dégressive de cotisations salariales de sécurité sociale, pour les salariés dont la rémunération est comprise entre 1 et 1,3 SMIC. Cette mesure a toutefois été censurée par le Conseil constitutionnel 29 ( * ) (cf. infra ), conduisant le Gouvernement à s'inspirer du scénario C de prime d'activité proposé par le rapport « Sirugue » .
B. LA SUPPRESSION DE LA PPE PAR LA SECONDE LOI DE FINANCES RECTIFICATIVE POUR 2014
Une première étape de la réforme a été franchie avec l' abrogation, à compter de l'imposition des revenus perçus en 2015, de l'article 200 sexies du code général des impôts relatif à la PPE , par la loi du 29 décembre 2014 de finances rectificative pour 2014 30 ( * ) .
Afin que la PPE cesse effectivement de produire ses effets en 2016, il était en effet nécessaire de supprimer ce crédit d'impôt dès la fin de l'année 2014 31 ( * ) .
En raison des nombreux défauts du dispositif, la suppression de la PPE a été relativement consensuelle . Lors de l'examen du second projet de loi de finances rectificative pour 2014, votre rapporteur général avait toutefois déploré que le dispositif amené à remplacer la PPE et le RSA « activité » n'ait pas été présenté simultanément. En outre, il avait souligné que le remplacement de ces deux aides pour une nouvelle prestation unique semblait avant tout être un choix par défaut , intervenu à la suite de la censure par le Conseil constitutionnel de la réduction dégressive de cotisations salariales de sécurité sociale sur les rémunérations comprises entre 1 et 1,3 fois le SMIC, initialement prévue par la loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014 32 ( * ) .
L'inconstitutionnalité d'une réduction
dégressive sur la part salariale
Dans sa décision n° 2014-698 DC du 6 août 2014, le Conseil constitutionnel s'est prononcé pour la première fois sur la question de la modulation du montant des cotisations salariales de sécurité sociale en fonction du niveau de rémunération. Si une telle modulation est acceptée pour la part des cotisations payée par l'employeur, notamment dans le cadre des allégements généraux dits « Fillon », le Conseil constitutionnel a considéré que l'application d'un tel dispositif aux cotisations payées par le salarié méconnaissait le principe d'égalité . En effet, selon le juge constitutionnel, si une telle mesure entrait en vigueur, « un même régime de sécurité sociale continuerait (...) à financer, pour l'ensemble de ses assurés, les mêmes prestations malgré l'absence de versement, par près d'un tiers de ceux-ci, de la totalité des cotisations salariales ouvrant droit aux prestations servies par ce régime ». Dès lors, il a été considéré que « le législateur a[vait] institué une différence de traitement , qui ne repose pas sur une différence de situation entre les assurés d'un même régime de sécurité sociale, sans rapport avec l'objet des cotisations salariales de sécurité sociale ». Cette décision exclut donc , du fait de l'objet même des cotisations de sécurité sociale, qui est d'ouvrir des droits à prestations, la prise en compte des facultés contributives pour moduler le niveau des cotisations . |
C. L'ARTICULATION AVEC LA RÉFORME DU « BAS DE BARÈME » DE L'IMPÔT SUR LE REVENU
Le Pacte de responsabilité et de solidarité présenté par le Premier ministre, Manuel Valls, le 29 avril 2014 devant l'Assemblée nationale, prévoyait à l'origine trois mesures en faveur des ménages modestes :
- une mesure provisoire d'allègement de l'impôt sur le revenu de 1,16 milliard d'euros en 2014 ;
- une mesure pérenne d'allègement de l'impôt sur le revenu de 2,5 milliards d'euros à partir de 2015 ;
- un dispositif de réduction des cotisations salariales de sécurité sociale sur les rémunérations comprises entre 1 fois et 1,3 fois le SMIC de 2,5 milliards d'euros à compter de 2015.
À l'issue de la censure par le Conseil constitutionnel de la réduction dégressive de cotisations salariales, le Gouvernement a décidé d'affecter une partie de l'enveloppe initialement prévue pour cette mesure au profit de la mesure pérenne d'allègement de l'impôt sur le revenu. La refonte du « bas de barème » de l'impôt sur le revenu prévue par l'article 1 er de la loi de finances pour 2015 33 ( * ) représente ainsi un coût budgétaire évalué à 2,7 milliards d'euros 34 ( * ) . Cette réforme a consisté, d'une part, à supprimer la tranche à 5,5 % du barème de l'impôt sur le revenu (communément appelée « 1 ère tranche ») et, d'autre part, à modifier le mode de calcul et le montant de la décote , de façon à exonérer ou à réduire le montant d'impôt d'environ 6 millions de foyers fiscaux .
D'après les simulations réalisées par la direction générale du Trésor, cet ensemble de mesures doit bénéficier principalement aux foyers fiscaux situés dans les cinquième à septième déciles de niveau de vie , c'est-à-dire les ménages à revenus « moyens » dont le revenu fiscal de référence (RFR) est supérieur à environ 14 650 euros annuels. Les ménages les plus modestes, déjà exonérés d'impôt sur le revenu, n'en bénéficient pas. Par ailleurs, le gain retiré de la réforme est d'autant plus important que le foyer fiscal comporte de parts de quotient familial, notamment du fait de la « conjugalisation » de la décote.
Répartition des bénéficiaires de
la réforme du « bas de barème »
de
l'impôt sur le revenu
Bornes inférieures de RFR (en euros) |
Bornes supérieures de RFR (en euros) |
Déciles des foyers fiscaux gagnants (en milliers) |
Gain moyen des foyers (en euros) |
0 |
14 658 |
613 |
245 |
14 658 |
15 482 |
613 |
247 |
15 482 |
16 343 |
613 |
193 |
16 343 |
17 260 |
613 |
131 |
17 260 |
19 220 |
613 |
128 |
19 220 |
25 215 |
613 |
203 |
25 215 |
28 900 |
613 |
235 |
28 900 |
32 011 |
613 |
333 |
32 011 |
36 769 |
613 |
390 |
36 769 |
613 |
370 |
|
Total |
6 130 |
248 |
(1) Par rapport à la législation appliquée en 2014.
Source : direction générale du Trésor
Selon l'étude d'impact annexée au présent projet de loi, il convient de tenir compte des effets de la réforme du « bas de barème » de l'impôt sur le revenu pour apprécier le gain ou la perte globale de pouvoir d'achat des ménages bénéficiant auparavant de la PPE. Il est notamment précisé que « la prime d'activité s'adresse prioritairement aux travailleurs aux revenus correspondant au « bas de barème » de la prime pour l'emploi, appartenant aux 20 % des ménages les plus modestes. Les travailleurs aux revenus correspondant au « milieu de barème » de la prime pour l'emploi ont, pour leur part, été aidés dans le cadre de l'allègement d'impôt sur le revenu intervenu en 2015 » 35 ( * ) .
Répartition des ménages qui auraient
bénéficié de la PPE en 2016
par décile de niveau
de vie
Source : ministère des affaires sociales
Présentée par le Gouvernement comme une mesure phare du Pacte de solidarité, destinée à rendre du pouvoir d'achat des ménages, la réforme de l'impôt sur le revenu a également été conçue comme un moyen de compenser partiellement, et de façon anticipée, la suppression de la PPE . Il s'ensuit une instabilité du niveau de prélèvements obligatoires pour un nombre élevé de ménages de la classe moyenne qui, en 2015, bénéficieront à la fois de l'allègement d'impôt sur le revenu et de la PPE mais qui, à compter de 2016, ne seront pas éligibles à la prime d'activité.
III. UNE RÉFORME NÉCESSAIRE MAIS MANQUANT D'AMBITION
A. LA PRIME D'ACTIVITÉ : UN COMPROMIS ENTRE LA PPE ET LE RSA « ACTIVITÉ »
S'inspirant du scénario C du rapport « Sirugue », le titre IV du présent projet de loi prévoit la création d'une nouvelle prestation sociale, appelée prime d'activité , à compter du 1 er janvier 2016.
Selon l'exposé des motifs, cette réforme a deux ambitions : d'une part, « encourager l'activité en soutenant le pouvoir d'achat des travailleurs modestes, de façon simple et lisible, avec une prime mensuelle », d'autre part, « ouvrir ce droit nouveau aux jeunes actifs ».
De façon schématique, la prime d'activité correspond à l'actuel RSA « activité », auquel viennent s'ajouter des bonus individuels pour les travailleurs composant le foyer et gagnant plus de 0,5 SMIC (soit environ 600 euros nets mensuels). Ces bonus se concentrent principalement sur les travailleurs dont la rémunération est comprise entre 0,8 et 1,2 fois le SMIC (soit environ 950 à 1 370 euros nets mensuels).
Cette prestation, qui comprendra donc à la fois une part familialisée et une part individualisée, sera versée dès le premier euro d'activité et ouverte à tous les travailleurs, y compris aux jeunes entre 18 et 25 ans jusqu'ici exclus du RSA « activité ».
Le dispositif proposé par le Gouvernement est décrit de façon plus précise dans le commentaire de l'article 24 du présent projet de loi (cf. infra ).
La réforme proposée opère « un compris entre les deux dispositifs qu'elle remplace . Plus ciblée que la PPE, elle s'adresse à un public plus large que celui du RSA « activité », notamment aux jeunes actifs » 36 ( * ) . Elle a ainsi le mérite de remplacer deux instruments par un seul, en palliant certains de leurs défauts , en particulier le problème du saupoudrage et du décalage dans le temps de la PPE, tout en étant ouverte aux jeunes actifs.
Néanmoins, la prime d'activité présente un certain nombre de limites ainsi qu'un aléa important concernant son coût, qui dépendra largement du taux de recours des personnes qui y seront éligibles .
B. LES LIMITES DU NOUVEAU DISPOSITIF
Tout d'abord, comme le RSA « activité » et la PPE avant elle, la nouvelle prime d'activité poursuit deux objectifs : l'encouragement à la reprise ou la poursuite d'activité, d'une part, et le soutien au pouvoir d'achat, d'autre part. Il est toutefois permis de douter d'un quelconque impact sur l'emploi de la prime , dans un contexte de chômage de masse . De même, les temps partiels, notamment les plus petits, sont souvent subis par les travailleurs. Il convient d'ailleurs de noter que l'étude d'impact annexée au présent projet de loi ne se risque à aucune estimation chiffrée concernant l'impact de la prime sur le niveau d'activité.
Ensuite, la simplification proposée semble très relative . La formule de calcul de la prime d'activité est d'une telle complexité que sa définition dans le projet de loi est pratiquement illisible. La base des ressources prises en compte pour calculer la prime est présentée comme « simplifiée » mais celle-ci différera de la base des ressources utilisée pour le RSA « socle », qui n'est pas non plus identique à l'assiette des ressources utilisées pour d'autres prestations, comme par exemple la couverture maladie universelle complémentaire (CMU-C). Par ailleurs, des échanges d'information entre les caisses d'allocations familiales (CAF) et l'administration fiscale sont certes prévus afin de pré-remplir les déclarations trimestrielles de revenu, mais ceux-ci ne seront pas automatisés avant fin 2016. Il est donc permis de penser que la gestion de ce nouveau dispositif sera un exercice complexe pour les CAF.
Surtout, la nouvelle prime acte le passage à un système totalement déclaratif tandis que la PPE présentait l'avantage d'être calculée automatiquement par l'administration fiscale, à partir de la déclaration annuelle de revenus 37 ( * ) . Paradoxalement, au moment même où le Gouvernement annonce la mise en oeuvre progressive du prélèvement à la source de l'impôt sur le revenu - qui devrait permettre de supprimer le décalage temporel entre la perception des revenus et le paiement de l'impôt - il abandonne toute ambition de mettre en place un dispositif automatique de soutien financier aux travailleurs modestes, lié à l'IR. Il s'agirait pourtant d'une simplification majeure par rapport aux simples aménagements proposés par le présent projet de loi.
Enfin, l' enveloppe de 4,1 milliards d'euros prévue en 2016 par le Gouvernement - correspondant à un supplément de 300 millions d'euros par rapport au coût total qu'auraient représenté la PPE et le RSA « activité » en 2016 - pour financer la prime d'activité repose sur des hypothèses de taux de recours (50 %) et des paramètres de calcul difficiles, voire impossibles, à vérifier. Un aléa important pèse ainsi sur le coût du dispositif, appelant la plus grande vigilance dans les années à venir. En cas de dépassement important de l'enveloppe prévue, la question de la révision des conditions d'attribution de la prime et de son barème devra être posée .
EXAMEN DES ARTICLES
TITRE IV ENCOURAGER L'ACTIVITÉ PROFESSIONNELLE PAR LA CRÉATION D'UNE PRIME D'ACTIVITÉ
ARTICLE 24 (Art. L. 841-1, L. 842-1 à L. 842-7, L. 843-1 à L. 843-7, L. 844-1 à L. 844-5, L. 845-1 à L. 845-2 et L. 846-1 [nouveaux] du code de la sécurité sociale) Création de la prime d'activité
Commentaire : le présent article a pour objet de remplacer le revenu de solidarité active « activité » (RSA « activité ») et la prime pour l'emploi (PPE) par une prime d'activité en faveur des travailleurs à revenus modestes, afin d'encourager l'activité en soutenant le pouvoir d'achat.
I. LE DROIT EXISTANT
A. LA PRIME POUR L'EMPLOI
1. Les modes de calcul et de versement de la PPE
La prime pour l'emploi (PPE) a été créée par la loi n° 2001-458 du 30 mai 2001 portant création d'une prime pour l'emploi , à la suite de l'annulation par le Conseil constitutionnel de l'article 3 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 38 ( * ) , qui prévoyait d'instaurer une réduction dégressive de contribution sociale généralisée (CSG) et de contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS). Cette réduction, dite « ristourne dégressive », devait s'appliquer aux personnes percevant des revenus d'activité compris entre 1 fois et 1,4 fois le SMIC. Le Conseil constitutionnel avait considéré qu'en ne tenant compte ni des revenus du contribuable autres que ceux tirés d'une activité, ni des revenus des autres membres du foyer, ni des personnes à charge au sein de celui-ci, cette mesure entraînait une rupture d'égalité devant les charges publiques contraire à l'article 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 39 ( * ) .
La PPE poursuit le même objectif que la « ristourne dégressive » : inciter au retour à l'emploi et au maintien de l'activité , en permettant d'augmenter le revenu net que procure l'exercice d'une activité professionnelle modestement rémunérée.
Il s'agit d'un crédit d'impôt accordé aux foyers fiscaux domiciliés en France et calculé sur la base des revenus individuels des membres de ce foyer fiscal. Les modalités de calcul de la PPE sont complexes. En effet, les contribuables éligibles à ce crédit d'impôt doivent remplir une double condition :
- leurs revenus d'activité annuels doivent être compris entre un plancher de 3 743 euros et un plafond de 17 451 euros (soit entre 0,3 et 1,25 SMIC), porté à 26 572 euros pour les couples mono actifs ou pour les familles monoparentales ;
- le montant du revenu fiscal de référence du foyer auquel ils appartiennent ne doit pas dépasser 16 251 euros pour une personne seule et 32 498 euros pour un couple soumis à imposition commune. Ces plafonds sont majorés de 4 990 euros pour chaque demi-part supplémentaire de quotient familial.
Le montant de la PPE varie en fonction des revenus d'activité du bénéficiaire : elle est égale à 7,7 % du montant de ces revenus lorsque ceux-ci sont inférieurs à 12 475 euros (soit 0,9 SMIC) ; lorsqu'ils sont compris entre 12 475 euros et 17 451 euros, la prime est égale à 19,3 % de la différence entre 17 451 euros et le montant de ces revenus. Ainsi, le montant de PPE versé croît entre 0,3 et 0,9 SMIC , où il atteint son maximum, avant de baisser de nouveau jusqu'au point de sortie situé aux environs de 1,25 SMIC pour une personne célibataire sans enfant.
Barème de la PPE en 2013
Montant
(en euros)
Rémunération mensuelle
(en part de SMIC)
Note : Les montants de PPE sont ceux calculés avant éventuelle imputation du RSA « activité » pour une personne célibataire sans enfant.
Source : Rapport précité de Christophe Sirugue, « Réforme des dispositifs de soutien aux revenus d'activités modeste », juillet 2013
Lorsque l'activité professionnelle n'est exercée qu'à temps partiel ou sur une partie de l'année, le montant des revenus d'activité fait l'objet d'une conversion en équivalent temps plein. La loi de finances pour 2003 40 ( * ) a introduit un mécanisme de majoration de la PPE pour les travailleurs à temps partiel ou sur une partie de l'année seulement :
- en cas de temps de travail inférieur à un mi-temps (inférieur ou égal à 910 heures), le montant de la prime individuelle est majoré de 85 % ;
- en cas de temps de travail supérieur ou égal à un mi-temps (entre 910 et 1 820 heures), la prime individuelle est égale à 15 % de la prime temps partiel majorée de 85 % de la prime temps plein.
Barème de la PPE versée en 2014 (revenus perçus en 2013)
(en euros)
Situation de famille |
Revenus d'activité en année pleine (1) |
Montant de la prime individuelle |
Majorations |
Célibataire, veuf, divorcé ou marié bi-actif (2) ou personne à charge du foyer exerçant une activité professionnelle rémunérée au moins 3 743 € |
3743 = R = 12 475 |
R × 7,7 % |
36 € par personne à charge (3) |
12 475 < R = 17 451 |
(17 451 - R) × 19,3 % |
||
Marié mono-actif (4) |
3 743 = R = 12 475 |
(R × 7,7 %) + 83 € |
36 € par personne à charge |
12 475 < R = 17 451 |
(17 451 - R)× 19,3 % + 83 € |
||
17 451 < R = 24 950 |
83 € |
||
24 950 < R = 26 572 |
(26 572 - R) × 5,1 % |
||
Célibataire, veuf, divorcé vivant seul |
3 743 = R = 12 475 |
(R × 7,7 %) |
72 € pour la première personne à charge. 36 € par personne à charge supplémentaire |
12 475 < R = 17 451 |
(17 451 - R) × 19,3 % |
||
17 451 < R = 26 572 |
0 € |
Majoration forfaitaire de 72 € |
(1) En équivalent temps plein annuel.
(2) Les couples bi-actifs sont les couples mariés ou liés par un PACS soumis à une imposition commune dont les deux conjoints (ou partenaires) exercent une activité leur procurant au moins 3 743 € avant conversion éventuelle en équivalent temps plein.
(3) Personne sans activité professionnelle ou dont les revenus d'activité professionnelle sont inférieurs à 3 743 euros.
(4) Les couples mono-actifs sont les couples soumis à une imposition commune dont un seul des conjoints (ou partenaires) exerce une activité lui procurant un revenu d'au moins 3 743 € avant conversion éventuelle en équivalent temps plein.
Source : ministère du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social
Ainsi, la prime attribuée au foyer fiscal correspond au total des primes individuelles . De plus, elle est « familialisée » à travers des majorations , en fonction du nombre de personnes à la charge du foyer (majorations de 36 euros par personne à charge ou de 72 euros pour les familles monoparentales) ou en cas de mono-activité (majoration jusqu'à 83 euros).
Pour percevoir la PPE, le contribuable ne doit effectuer aucune démarche puisque celle-ci est automatiquement déduite de l'impôt sur le revenu du foyer fiscal 41 ( * ) , sur la base des informations fournies dans sa déclaration de revenus. Lorsque le montant de la cotisation d'impôt due est inférieur à celui de la PPE, la différence est reversée au contribuable 42 ( * ) . Ce traitement automatisé garantit un fort taux de recours de la PPE, évalué entre 95 % et 97 % 43 ( * ) .
2. Une forte réduction du nombre de bénéficiaires et des montants versés depuis 2008
La prime pour l'emploi a fait l'objet de nombreuses modifications législatives depuis sa création. Celles-ci ont tout d'abord conduit à une forte montée en charge de la prestation et du nombre de bénéficiaires. En effet, les taux utilisés pour le calcul de la prime ainsi que les seuils et plafonds de revenus d'activité ont fait l'objet de revalorisations significatives.
Les taux de la PPE permettant de calculer le montant de la prime individuelle sont ainsi passés respectivement de 2,2 % à 7,7 % et de 5,5 % à 19,3 % entre 2002 et 2007. Les seuils et plafonds de revenus de la PPE ont également été revalorisés chaque année jusqu'en 2008 afin de tenir compte de la progression salariale, tandis que les montants de majoration de PPE ont été relevés en 2008. Une majoration de prime en faveur des personnes exerçant une activité à temps partiel a été introduite par la loi de finances pour 2003 (cf. supra ). Du fait de ces diverses revalorisations, le coût total du de la PPE a fortement augmenté, passant de 2,2 milliards d'euros en 2002 à 4,5 milliards d'euros en 2008 , alors même que le nombre de bénéficiaires demeurait stable et donc sans que le ciblage de la prime soit accru.
Les principales modifications législatives de la PPE
LFI 2002 |
• Doublement des taux de la PPE versée à compter de septembre 2002 (de 2,2 % à 4,4 % et de 5,5 % à 11 %). • Revalorisation des seuils et limites de revenus servant au calcul de la PPE. |
LFI 2003 |
• Revalorisation des seuils et limites de la PPE. • Introduction d'un mécanisme spécifique de majoration de la prime pour les personnes exerçant une activité à temps partiel. |
LFI 2004 |
• Revalorisation des seuils, limites de revenus et taux (de 4,4 % à 4,6 % et de 11 % à 11,5 %) servant au calcul de la PPE. • Mise en place d'un système d'acompte forfaitaire. |
LFI 2005 |
• Revalorisation des seuils, limites de revenus et des taux (de 4,6 % à 6 % et de 11,5 % à 15 %) servant au calcul de la PPE. |
LFI 2006 |
• Revalorisation des seuils, limites de revenus et taux (de 6 % à 6,8 % et de 15 % à 17 %) servant au calcul de la PPE. • Modification des modalités d'attribution de l'acompte de PPE. • Introduction d'un mécanisme de versement mensuel pour les personnes ayant bénéficié de la PPE l'année précédente. |
LFI 2007 |
• Revalorisation des seuils, limites de revenus et taux (de 4,6 % à 7,7 % et de 17 % à 19,3 %) servant au calcul de la PPE. |
LFI 2008 |
• Revalorisation des seuils, limites de revenus et majorations de prime servant au calcul de la PPE. • Modification du mécanisme de versement mensuel de la PPE. |
Loi du 1 er décembre 2008 généralisant le RSA |
• Abrogation du mécanisme d'acompte et de versement mensuel. • Modification des modalités de calcul de la PPE : RSA « activité » considéré comme un acompte non remboursable à valoir sur la PPE. |
Ordonnance du 19 septembre 2013 |
• Minoration du montant de la PPE versée aux contribuables domiciliés dans le département de Mayotte. |
Source : commission des finances du Sénat (à partir de l'évaluation préalable annexée au présent projet de loi de finances)
Les modalités de versement de la PPE ont également été modifiées à plusieurs reprises. La loi de finances pour 2004 a introduit un système d'acomptes forfaitaires de PPE d'un montant de 250 euros versé sous certaines conditions, afin d'améliorer le caractère incitatif et la lisibilité de l'aide 44 ( * ) . La loi de finances pour 2006 45 ( * ) a conforté ce dispositif en majorant le montant de cet acompte forfaitaire et en le mensualisant. Suite à la création du RSA par la loi du 1 er décembre 2008 46 ( * ) , ce système de versement par acomptes, lourd à gérer pour les services, a été supprimé.
La mise en place du RSA « activité » , dont l'objectif est également d'inciter à la reprise d'un emploi, a conduit à une forte diminution du coût de la PPE et du nombre de bénéficiaires pour deux raisons principales.
D'une part, le barème de la PPE n'a pas été revalorisé depuis 2008 . Ce « gel » du barème s'est traduit mécaniquement par une réduction du nombre de foyers fiscaux entrant dans le périmètre de la prime ainsi que des montants versés du fait de la revalorisation annuelle du SMIC. Ainsi, le coût de la PPE est passé de 4,5 milliards d'euros en 2008 à 2,2 milliards d'euros en 2014 et le nombre de foyers fiscaux bénéficiaires est passé de 8,9 millions en 2008 à 5,8 millions en 2013.
D'autre part, l'imputation du RSA « activité » sur la PPE versée l'année suivante a également conduit à réduire le montant de la prime et le nombre de foyers bénéficiaires (cf. infra ).
B. LE RSA « ACTIVITÉ »
1. Les modes de calcul et de versement du RSA
Le revenu de solidarité active (RSA) a été créé, après une expérimentation menée dans trente-quatre départements, par la loi n° 2008-1249 du 1 er décembre 2008 généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d'insertion. Il est entré en vigueur le 1 er juin 2009 sur le territoire métropolitain et a été étendu le 1 er janvier 2011 aux départements d'outre-mer ainsi qu'aux collectivités d'outre-mer de Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon 47 ( * ) , et mis en place à Mayotte le 1 er janvier 2012 dans le cadre de la départementalisation de ce territoire 48 ( * ) .
Le RSA a remplacé le revenu minimum d'insertion (RMI), l'allocation de parent isolé (API) et les différents mécanismes d'intéressement à la reprise d'activité qui leur étaient associés, avec pour objet « d'assurer à ses bénéficiaires des moyens convenables d'existence, afin de lutter contre la pauvreté, encourager l'exercice ou le retour à une activité professionnelle et aider à l'insertion sociale des bénéficiaires » 49 ( * ) .
Le RSA est une allocation versée mensuellement aux foyers afin de leur garantir un certain niveau de revenus de manière durable . Cette prestation comporte trois composantes :
- le RSA « socle » , versé, en l'absence de revenus d'activité, à tout foyer afin de compléter ses ressources jusqu'à atteindre un montant forfaitaire, calculé en fonction de sa composition ;
- le RSA « socle + activité » , versé aux foyers dont les revenus d'activité ne sont pas suffisant pour atteindre le minimum forfaitaire garanti par le barème ;
- le RSA « activité » , versé, en présence de revenus d'activité, pour permettre à tout foyer de percevoir le montant forfaitaire augmenté de 62 % de ses revenus d'activité, de manière pérenne tant qu'il se trouve en dessous d'un certain seuil de ressources.
Le RSA « activité » est donc une prestation différentielle dont le montant est égal à la différence entre le montant garanti auquel le foyer a droit et les revenus qu'il perçoit - soit les revenus d'activité ainsi que d'autres ressources perçues par le ménage (cf. infra ). Le versement net effectué au titre du RSA « activité » diminue de 38 centimes par euro de revenu d'activité supplémentaire, jusqu'à devenir nul lorsque le revenu d'activité a atteint un certain seuil. Il se distingue en ce sens du RMI, dont le montant était réduit de 100 % des augmentations des revenus d'activité du foyer, une fois les mesures d'intéressement temporaires achevées 50 ( * ) . Pour chaque euro supplémentaire de revenu perçu, le RMI baissait du même montant, ce qui avait un effet désincitatif lors d'une reprise d'emploi.
Schéma simplifié du fonctionnement du RSA
Revenus d'activité
Montant garanti
RSA « activité »
RSA
« socle »
Revenu garanti
Ressources totales
Revenus d'activité
Le RSA est ouvert aux personnes âgées de 25 ans et plus ainsi qu'aux personnes âgées de moins de 25 ans si elles ont un enfant à charge ou à naître ou sous certaines conditions d'activité fixées par décret 51 ( * ) . Les bénéficiaires ne peuvent être élèves, étudiants ou stagiaires, ni être en congé parental, sabbatique, sans solde ou en disponibilité. Par ailleurs, le bénéfice du RSA est conditionné à la jouissance de la nationalité française ou à la détention, depuis au moins cinq ans, d'un titre de séjour autorisant à travailler 52 ( * ) . Les ressortissants d'un État membre de l'Union européenne, d'un État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Suisse doivent remplir les conditions exigées pour bénéficier d'un droit de séjour, et avoir résidé en France durant les trois mois précédant la demande 53 ( * ) .
L'accès au RSA et le montant versé dépendent de la composition du foyer, c'est-à-dire qu'il prend en compte les revenus des personnes vivant en couple (concubins, époux, ou partenaires liés par un pacte civil de solidarité) ainsi que le nombre d'enfants à charge âgés de moins de 25 ans.
Les ressources prises en compte dans le calcul du RSA, qui constituent sa « base ressources », sont étendues. Il s'agit de l'ensemble des revenus d'activité, des revenus de remplacement (comme les indemnités chômage, pensions d'invalidité, indemnités journalières), des revenus tirés de placement, d'épargne ou de biens immobiliers ou d'autres revenus comme les pensions alimentaires. Sont également inclus les avantages en nature ainsi que les prestations et aides sociales à l'exclusion de celles ayant une « finalité sociale particulière » 54 ( * ) . Par ailleurs, plusieurs prestations inclues dans la « base ressources » du RSA sont évaluées de manière forfaitaire : le complément familial majoré, l'allocation de soutien familial, l'avantage en nature lié à la disposition d'un logement ainsi que les aides personnelles au logement (l'allocation de logement familial, l'allocation de logement sociale et l'aide personnalisée au logement) 55 ( * ) .
Le montant forfaitaire fixé pour une personne seule est, depuis le 1 er janvier 2015, fixé à 513,88 euros . Ce montant est majoré de 50 % lorsque le foyer comporte deux personnes, puis de 30 % pour chaque personne supplémentaire à charge. Les parents isolés, c'est-à-dire célibataires, divorcés, séparés ou veufs avec des enfants à charge ou à naître, bénéficient également d'un montant majoré égal à 128,412 % du montant forfaitaire (soit 659,88 euros), à nouveau augmenté de 42,804 %, dans certaines conditions, pour les enfants à charge 56 ( * ) .
Montant forfaitaire du RSA « socle » depuis le 1 er janvier 2015
(en euros)
Nombre d'enfants à charge |
Personne seule |
Parent isolé |
Couple |
0 |
513,88 |
659,88 |
770,82 |
1 |
770,82 |
879,84 |
924,99 |
2 |
924,99 |
1 099 |
1 079,15 |
Par enfant supplémentaire |
205,55 |
219,96 |
205,55 |
Source : Direction de l'information légale et administrative
Le « point de sortie » du RSA « activité » , c'est-à-dire le montant de ressources du foyer au-delà duquel cette prestation n'est plus versée, dépend de la composition du foyer (en particulier du nombre d'enfants à charge) et des ressources qu'il perçoit. Il se situait en 2014 à 1,15 SMIC pour une personne célibataire sans enfant 57 ( * ) .
Afin de percevoir le RSA, les bénéficiaires doivent fournir une déclaration trimestrielle de ressources (DTR) contenant l'ensemble des ressources précitées perçues par chaque membre du foyer auquel ils appartiennent, et déclarer tout changement de situation intervenant dans cet intervalle de nature à modifier leurs droits au RSA, tel qu'une modification du statut d'activité ou de la composition du foyer. Le RSA est versé chaque mois par les caisses d'allocations familiales (CAF) et de Mutualité sociale agricole (MSA) 58 ( * ) . Lors des trois premiers mois suivant la reprise d'une activité, le bénéficiaire du RSA « socle » continue de percevoir cette prestation à taux plein et ne perçoit pas de RSA « activité », ce qui constitue un mécanisme d'intéressement supplémentaire temporaire. Le RSA est dans son ensemble non imposable au titre de l'impôt sur le revenu et exonéré de contribution sociale généralisée (CSG). Le RSA « activité », en tant que prestation sociale, est soumis à la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS) au taux de 0,5 % sans abattement.
2. Le financement du RSA « activité »
La part « activité » du RSA est financée par l'État, à travers le Fonds national des solidarités actives (FNSA) , tandis que le financement du RSA « socle » est à la charge des départements. En revanche, l'intégralité du RSA versé aux moins de 25 ans (part socle et activité) est prise en charge par le FNSA.
Depuis la loi de finances pour 2015, qui a procédé à la suppression de l'affectation d'une fraction du prélèvement de solidarité sur les produits de placement et les revenus du patrimoine 59 ( * ) , le FNSA est financé par deux types de ressources :
- une subvention d'équilibre de l'État , retracée dans le programme n° 304 de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », d'un montant de 2,3 milliards d'euros en 2015 ;
- une fraction de la contribution exceptionnelle de solidarité des fonctionnaires , pour un montant estimé à 200 millions d'euros en 2015 60 ( * ) .
C. LA DIFFICILE ARTICULATION ENTRE LE RSA « ACTIVITÉ » ET LA PPE
1. Le RSA « activité » s'impute sur le montant de PPE versé
Lors des travaux préparatoires à la création du RSA, la commission présidée par Martin Hirsch prévoyait l'intégration de la prime pour l'emploi à cette nouvelle prestation 61 ( * ) . Cette piste a toutefois été écartée ; la suppression de la PPE en 2008 aurait en effet concerné près de 6 millions de ménages, pour une perte annuelle d'environ 500 euros 62 ( * ) , et aurait conduit à exclure de tout mécanisme de soutien aux faibles revenus la plupart des jeunes actifs âgés de 18 à 25 ans.
La PPE et le RSA « activité » poursuivent des objectifs similaires, en termes d'incitation à la reprise d'un emploi et de soutien aux revenus des travailleurs modestes. Toutefois, ces deux prestations ne se cumulent pas , mais s'articulent de la manière suivante : la PPE, calculée annuellement sur la base des revenus de l'année précédente, est minorée, le cas échéant, des sommes perçues par les membres du foyer fiscal au titre du RSA « activité » . Ainsi, le RSA « activité » est considéré comme un acompte à faire valoir sur la PPE versée l'année suivante. En revanche, le montant correspondant à la différence entre le montant forfaitaire du RSA et les ressources du foyer, c'est-à-dire le RSA « socle », ne vient pas minorer le montant de la PPE.
Lorsque le montant du RSA « activité » est supérieur à celui de la PPE devant être versée l'année suivante, le foyer ne touche pas de prime. Lorsque le montant de PPE est supérieur à celui du RSA « activité » perçu, une prime résiduelle est versée. Selon le rapport de Christophe Sirugue 63 ( * ) , cette prime résiduelle concernait 600 000 foyers fiscaux pour un montant de 200 millions d'euros. Enfin, lorsque les bénéficiaires potentiels de RSA « activité » n'y ont pas recours, ils bénéficient de la totalité de la PPE.
L'articulation entre le RSA « activité » et la PPE
Montant de RSA ou de PPE
Montant des revenus d'activité
RSA
PPE
RSA seul,
non éligibles PPE
(1)
RSA seul,
éligibles à la PPE
(2)
RSA
+ PPE résiduelle (3)
PPE seule
(4)
Note : (1) Ménages percevant le RSA « activité » et non éligibles à la PPE
(2) Ménages percevant seulement le RSA « activité » et éligibles à la PPE, mais dont le montant de PPE dû est inférieur ou égal au montant de RSA « activité »
(3) Ménages percevant le RSA « activité » ainsi qu'un montant de PPE résiduel correspondant à la différence entre la PPE calculée et le RSA « activité » déjà perçu
(4) Ménages percevant uniquement la PPE
Source : Dominique Lefebvre et François Auvigne, Rapport sur la fiscalité des ménages, mai 2014
L'existence de deux dispositifs , aux objectifs proches et à l'articulation peu lisible est un facteur de dispersion des moyens publics et de complexité pour leurs bénéficiaires. Ainsi, la différence de périmètre entre le RSA « activité », perçu par le ménage, et la PPE, versée au foyer fiscal, conduit à ce que l'imputation du RSA sur la PPE se fasse dans des conditions plus ou moins avantageuses selon la configuration professionnelle et fiscale du ménage.
Comme le rappelait le rapport Sirugue, cette complexité est également liée aux différences de gestion, tant en termes de périodicité de la déclaration (annuelle pour la PPE, trimestrielle pour le RSA « activité »), de périodicité du versement (annuelle en année n+1 pour la PPE, mensuelle en année n pour le RSA « activité »), que de formalités administratives ou de différence d'organisme gestionnaire.
Les principales caractéristiques de la PPE et du RSA « activité »
Prime pour l'emploi |
RSA « activité » |
|
Année de création |
2001 |
2008 |
Nature du dispositif |
Crédit d'impôt |
Aide sociale différentielle |
Objectifs (selon les textes) |
« Inciter au retour à l'emploi ou au maintien de l'activité » |
« Lutter contre la pauvreté au travail et inciter au retour à l'emploi en complétant les revenus d'activité » |
Nombre de bénéficiaires (foyers) |
5,9 millions |
0,8 million |
Montant moyen mensuel |
36 euros |
190 euros |
Périodicité de versement |
Annuelle (versement en année n+1) |
Mensuelle (versement en année n) |
Démarche et guichet de versement |
Demande par la déclaration annuelle de revenus - DGFiP |
Déclarative et actualisation trimestrielle - CAF et MSA |
Taux de recours |
Entre 95 % et 97 % |
32 % |
Source : commission des finances d'après le rapport de Christophe Sirugue, « Réforme des dispositifs de soutien aux revenus d'activités modeste », juillet 2013
2. Un coût cumulé de la PPE et du RSA « activité » d'environ 4 milliards d'euros
Le coût cumulé du RSA « activité » et de la PPE représente un montant d'environ 4 milliards d'euros , qui tend à décroitre du fait du gel du barème de la PPE.
Coût cumulé du RSA « activité » et de la PPE
(en milliards d'euros)
2008 |
2009 |
2010 |
2011 |
2012 |
2013 |
2014 |
2015 |
|
Dépenses totales de PPE |
4,48 |
3,94 |
3,61 |
3,10 |
2,90 |
2,46 |
2,20 |
2,10 |
Dépenses totales de RSA « activité » |
- |
0,44 |
1,31 |
1,6 |
1,65 |
1,57 |
1,93 |
1,95 |
Coût cumulé de PPE et RSA « activité » |
4,48 |
4,38 |
4,92 |
4,7 |
4,55 |
4,03 |
4,13 |
4,05 |
Source : commission des finances du Sénat (à partir des tomes II des fascicules « Voies et moyens » annexés aux projets de loi de finances et des projets annuels de performances de la mission « Solidarité »)
Selon l'étude d'impact annexée au présent projet de loi, le coût cumulé du RSA « activité » et de la PPE se serait établi à 3,8 milliards d'euros en 2016 , en l'absence de réforme et sous l'effet du gel du barème de la PPE. Il n'est toutefois pas précisé si cette prévision intègre ou non le montant final de l'exécution des dépenses de RSA « activité » en 2014, qui ont été nettement supérieures à la prévision initiale.
*
Compte tenu des défauts notable de la PPE et du RSA « activité », rappelés ci-avant dans l'exposé général, l'exécutif a, dans un premier temps, envisagé de transformer la PPE en une réduction dégressive de cotisations salariales de sécurité sociale. Cette mesure ayant été censurée par le Conseil constitutionnel en août 2014 (cf. supra ), le Gouvernement s'est inspiré des travaux du rapport « Sirugue » pour proposer la prime d'activité, dont les grands principes sont inscrits à l'article 24 du présent projet de loi.
II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ
Le présent article crée le dispositif de la prime d'activité destinée à remplacer à la fois le RSA « activité » et la prime pour l'emploi (PPE), à « périmètre financier constant » par rapport au budget consacré à ces deux dispositifs en 2014, comme le préconisait le rapport « Sirugue », soit une enveloppe correspondant à 4,1 milliards d'euros (en tenant compte de l'inflation entre 2014 et 2016).
La « prime d'activité » reposerait sur les principes suivants :
- l'éligibilité du bénéficiaire au dispositif serait fonction des revenus du foyer ;
- le montant de la prime serait déterminé selon « une approche à la fois familialisée et individualisée », en tenant compte des revenus d'activité du bénéficiaire et de la composition de son foyer. Il s'agit ainsi de maintenir le montant versé aux bénéficiaires actuels du RSA « activité » et de le majorer d'un bonus individuel » pour ceux qui ont un revenu supérieur à 0,5 SMIC, en soutenant plus particulièrement ceux dont la rémunération se situe entre 0,8 et 1,2 SMIC ;
- la prime serait servie mensuellement, dès le premier euro d'activité, en fonction d'une déclaration trimestrielle des ressources du bénéficiaire, à compter de ses 18 ans.
À cet effet, le présent article crée un nouveau titre IV intitulé « Prime d'activité » au sein du huitième livre du code de la sécurité sociale, composé de 22 nouveaux articles.
Il convient de préciser que le présent article se contente de fixer le cadre général de cette nouvelle prestation , l'essentiel des éléments de calcul et des modalités de mise en oeuvre devant être établi par voie réglementaire. L'étude d'impact accompagnant le projet de loi fournit cependant un certain nombre d'éléments permettant de connaître les orientations qui devraient être retenues par le Gouvernement et les hypothèses à partir desquelles les simulations budgétaires ont été élaborées pour déterminer la dépense engendrée.
L'article L. 841-1 du code de la sécurité sociale, qui constitue le premier chapitre du titre IV consacré aux dispositions générales, précise ainsi l'objet et le champ des bénéficiaires de la prime d'activité. Ainsi, la prime « a pour objet d'inciter les travailleurs aux ressources modestes, qu'ils soient salariés ou non-salariés, à l'exercice ou à la reprise d'une activité professionnelle ». La prime d'activité est donc destinée à la fois aux travailleurs salariés et indépendants.
Ainsi, selon l'étude d'impact, tout revenu et assimilé, tiré d'une activité professionnelle devrait ouvrir droit à la prime d'activité, ce qui couvre, outre les salaires, « les traitements, la rémunération sous forme de chèque emploi service universel (CESU), ou encore les indemnités journalières de sécurité sociale perçues à l'occasion des congés légaux de maternité, de paternité ou d'adoption ou, durant les trois mois suivant l'arrêt de travail, perçues en cas d'incapacité physique, d'accident du travail ou de maladie professionnelle ». Les indemnités de chômage ne seraient, en revanche, pas incluses dans les revenus assimilés à des revenus d'activité, à l'exception des indemnités de chômage partiel.
Il convient de signaler que, toujours selon l'étude d'impact, le décret d'application devrait prévoir que les travailleurs en établissements et services d'aide par le travail (ESAT) soient désormais inclus dans le champ des bénéficiaires de la prime d'activité. Leur rémunération serait ainsi assimilée à des revenus d'activité contrairement à ce qui est actuellement pratiqué pour le RSA « activité ». Selon l'étude d'impact, « ces travailleurs en ESAT, environ 26 000, seront donc gagnants à la réforme en obtenant le bénéfice de la prime d'activité ».
En vertu de l'article L. 842-6 du code de la sécurité sociale, les travailleurs indépendants devraient justifier ne pas réaliser un chiffre d'affaires d'un niveau supérieur à un montant fixé par décret pour bénéficier de la prime d'activité. Il en sera de même pour le travailleur agricole (soumis au régime de protection sociale des professions agricoles mentionné à l'article L. 722-1 du code rural et de la pêche maritime) qui « doit mettre en valeur une exploitation pour laquelle le dernier bénéfice agricole connu n'excède pas un montant fixé par décret » .
Ainsi, selon l'étude d'impact, les travailleurs non-salariés devraient voir leurs ressources évaluées « annuellement par les organismes gestionnaires selon des modalités définies par décret, fondées essentiellement sur la prise en considération de leurs bénéfices » , sauf pour ceux ayant « opté pour la déclaration trimestrielle auprès de leur régime social ». S'agissant du chiffre d'affaires ou du bénéfice annuel maximal, il serait quant à lui « variable selon qu'il s'agit d'une activité commerciale, artisanale, agricole ou libérale, proches du régime de l'éligibilité au régime de la micro entreprise ou au régime déclaratif spécial prévus respectivement aux articles 50-0 et 102 ter du code général des impôts. »
A. LES CONDITIONS D'ATTRIBUTION DE LA PRIME D'ACTIVITÉ
Le chapitre II , consacré aux conditions d'ouverture du droit à la prime d'activité, est composé de sept articles (articles L. 842-1 à L. 842-7 du code de la sécurité sociale).
1. L'élargissement du champ des bénéficiaires, en particulier aux actifs de 18 à 24 ans
Afin d'être éligible à la prime d'activité, la personne active doit tout d'abord résider en France « de manière stable et effective » et percevoir des revenus professionnels (article L. 842-1).
L'article L. 842-2 précise ensuite les conditions devant être remplies par le bénéficiaire.
En premier lieu, le bénéficiaire doit être âgé de plus de dix-huit ans . La prime d'activité devrait donc être ouverte aux travailleurs ayant entre 18 et 24 ans, dans les mêmes conditions et selon les mêmes modalités que les autres bénéficiaires . Cette disposition constitue une différence fondamentale avec le RSA « activité » pour lequel le bénéficiaire doit nécessairement avoir au moins 25 ans, sauf s'il a la charge d'un ou plusieurs enfants nés ou à naître ou sous certaines conditions d'activité fixées par décret (cf. supra ). En revanche, la PPE était déjà ouverte aux jeunes actifs de plus de 18 ans.
Cette évolution fait suite à la préconisation du rapport précité « Sirugue » de ne plus tenir compte de cette condition d'âge. L'étude d'impact indique d'ailleurs que l'accès à ce dispositif de soutien à l'emploi se justifie d'autant plus que le taux de chômage des 18-25 ans s'élève à 23,7 % au troisième trimestre 2014, « soit 13,3 points de plus que le taux de chômage moyen sur l'ensemble de la population . »
L'étude d'impact précise également que le jeune actif pourrait exercer un droit d'option , susceptible d'être revu annuellement , « en fonction de l'évolution de sa situation et de ses ressources d'activité » :
- soit il bénéficierait de la prime en propre, « en constituant son propre foyer au sein de la prime d'activité », tout en résidant encore ou non chez ses parents ;
- soit il en bénéficierait en restant dans le foyer de ses parents, en majorant le montant forfaitaire de la prime versée à l'ensemble du foyer.
La possibilité de modifier cette option chaque année est justifiée par le « caractère potentiellement très évolutif de la situation des jeunes de cette tranche d'âge ».
En deuxième lieu, l'article L. 842-2 prévoit que le bénéficiaire doit être Français ou titulaire d'un titre de séjour autorisant l'exercice d'une activité professionnelle depuis au moins cinq ans . Cette dernière condition n'est toutefois pas applicable aux ressortissants de l'Union européenne, d'un État partie à l'accord de l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse. Elle ne l'est pas non plus pour les réfugiés, les bénéficiaires de la protection subsidiaire, les apatrides et les étrangers titulaires d'une carte de résident ou d'un autre titre de séjour conférant les mêmes droits.
Enfin, comme pour le RSA « activité », cette condition de nationalité ou de titre de séjour n'est pas applicable aux parents isolés c'est-à-dire aux actifs susceptibles de bénéficier de la majoration prévu à l'article L. 842-7 du code de la sécurité sociale 64 ( * ) . Toutefois, ils doivent tout de même répondre aux conditions de régularité de séjour exigé pour les prestations familiales à l'article L. 512-2 du code de la sécurité sociale.
Ensuite, le bénéficiaire ne doit pas être élève, étudiant, stagiaire 65 ( * ) ou apprenti 66 ( * ) . Tout comme pour le RSA « activité », cette condition ne s'applique toutefois pas aux parents isolés.
L'exclusion des étudiants et des apprentis est justifiée dans l'étude d'impact par le fait que ces populations, tout en percevant souvent des revenus professionnels, ne sont pas concernées par la prime d'activité destinée à inciter à l'exercice d'une activité professionnelle pour « les personnes entrées sur le marché du travail, ou en train de s'y insérer ».
En outre, l'étude d'impact indique que l'ouverture de la prestation à l'ensemble des étudiants exerçant une activité salariée régulière conduirait, pour rester dans l'enveloppe budgétaire, à la baisse de 10 euros par mois du « bonus individuel » pour l'ensemble des bénéficiaires 67 ( * ) .
Enfin, l'article L. 842-2 prévoit que les personnes ayant la qualité de travailleur détaché 68 ( * ) sont exclues du bénéfice de la prime .
2. Le calcul du montant de la prime d'activité, à la fois familialisée et individualisée
Les modalités de calcul du montant de la prime d'activité sont prévues à l'article L. 842-3 du code de la sécurité sociale, qui reste, toutefois, pour le moins flou .
Ainsi, selon le dispositif proposé, la prime « prend en compte » :
- un montant forfaitaire « dont le niveau varie en fonction de la composition du foyer et du nombre d'enfants à charge » (1° de l'article L. 842-3 nouveau du code de la sécurité sociale). Ce forfait permettrait donc à la prime d'activité, qui repose sur les revenus d'activité du bénéficiaire, d'être familialisée.
Par ailleurs, ce montant forfaitaire peut fait l'objet d'une bonification , établie « pour chaque travailleur , membre du foyer, compte tenu de ses revenus professionnels ». Le montant bonifié est « une fonction croissante des revenus situés entre un seuil et un plafond ». Le montant est fixe au-delà de ce plafond.
- d'une fraction des revenus professionnels des membres du foyer ;
- les autres ressources du foyer.
Les règles de calcul de la prime d'activité, y compris s'agissant de la bonification, seront fixées par décret en Conseil d'État. Un autre décret déterminera le montant forfaitaire ainsi que la fraction des revenus professionnels des membres du foyer pris en compte.
L'étude d'impact présente ainsi le calcul envisagé de la prime d'activité :
[constante familiale - ressources du ménage] + [62 % des revenus d'activité du ménage + bonus individuels] |
Toujours selon l'étude d'impact, les deux termes du calcul correspondraient :
- pour le premier (soit [constante familiale - ressources du ménage]), à un « sous-jacent familialisé ». À partir de cette « constante familiale », correspondant à un montant fixé par décret seraient déduites « les ressources du ménage mobilisées pour le calcul de la prime », une partie d'entre elles « étant appréciées forfaitairement ».
La variation de la constante familiale serait fonction de la composition du foyer du bénéficiaire de la prime d'activité et pourrait être, selon les informations transmises à votre rapporteur pour avis, à tout le moins dans un premier temps, équivalente à celle existant actuellement dans le cadre du RSA, telle qu'issu de l'article R.262-1 du code de l'action sociale et des familles 69 ( * ) ;
- pour le second (soit [62 % des revenus d'activité du ménage + bonus individuels]), aux revenus d'activités du ménage , en intégrant le cas échéant un bonus individualisé par actif.
Le cas échéant, le montant du RSA « socle » serait déduit du montant obtenu par cette formule de calcul.
Selon les informations fournies par le Gouvernement, la prime d'activité, tout comme le RSA « activité », prendrait en compte 62 % des revenus professionnels des membres du foyer.
Les bonus individuels constituent ainsi la principale différence entre le RSA « activité » et la prime d'activité. Compte tenu de la formule de calcul retenue, la prime versée conjuguerait à la fois familialisation et individualisation.
a) Une prime qui reste pour une large part familialisée
Selon l'étude d'impact, la familialisation du revenu permettrait de différencier le point de sortie du dispositif selon la configuration du foyer et des revenus du conjoint ou du concubin.
Le point de sortie du dispositif pour
différentes
configurations familiales
Configuration familiale |
Revenu d'activité net mensuel
|
Personne seule |
1 550 € (soit 1,3 SMIC) |
Couple mono-actif sans enfants ou famille monoparentale avec 1 enfant |
2 265 € (soit 1,9 SMIC) |
Couple bi-actif sans enfants (avec un membre rémunéré au SMIC) |
1 250 € (soit 1,05 SMIC)
2 450 € (soit 2,05 SMIC) pour le couple |
Couple bi-actif avec 2 enfants (avec un membre rémunéré au SMIC) |
1 730 € (soit 1,4 SMIC)
2 930 € (soit 2,4 SMIC) pour le couple |
Source : étude d'impact annexée au présent projet de loi
Selon l'étude d'impact, le mode de calcul retenu devrait permettre de garantir que les bénéficiaires actuels du RSA « activité » ne subissent pas de perte du fait de la réforme.
En vertu de l'article L. 842-5 du code de la sécurité sociale, le conjoint, le concubin ou le partenaire lié par un pacte civil de solidarité, serait pris en compte, au titre des droits du bénéficiaire, s'il remplit lui-même les conditions de nationalité ou de résidence sur le sol français prévues au 2° de l'article L. 842-2 et s'il n'a pas la qualité de travailleur détaché.
Ce même article prévoit que les enfants étrangers d'un bénéficiaire de la prime d'activité, lui-même étranger non ressortissant d'un État membre de l'Union européenne, d'un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse, serait pris en compte s'il remplit les conditions définies pour percevoir les prestations familiales en vertu de l'article L. 512-2 du code de la sécurité sociale.
Ce mode de calcul aurait ainsi pour conséquence de revenir sur l'une des caractéristiques de la PPE qui prenait uniquement en compte les revenus déclarés par le travailleur , indépendamment de la rémunération, éventuellement plus élevée, de son concubin (déclarée séparément). Désormais, la prime d'activité pourrait ne plus être versée à un travailleur disposant d'un faible revenu compte tenu des ressources globales du foyer.
L'article L. 842-7 du code de la sécurité sociale prévoit également une majoration du montant forfaitaire pour les parents isolés . Ainsi, elle bénéficierait, pendant une période déterminée et jusqu'à ce que le dernier enfant ait atteint un âge limite (qui devrait être fixé à 3 ans) aux personnes isolées qui assument la charge d'un ou plusieurs enfants ainsi qu'aux femmes isolées « en état de grossesse, ayant effectué la déclaration de grossesse et les examens prénataux ».
Est considérée comme isolée la personne « veuve, divorcée, séparée ou célibataire, qui ne vit pas en couple de manière notoire et permanente et qui notamment ne met pas en commun avec un conjoint, concubin ou partenaire de pacte civil de solidarité ses ressources et ses charges. Lorsque l'un des membres du couple réside à l'étranger, n'est pas considéré comme isolé celui qui réside en France ».
Ce dispositif de majoration est strictement identique à celui actuellement existant à l'article L. 262-9 du code de l'action sociale et des familles pour le RSA.
b) Une prime individualisée par l'instauration d'un bonus tendant à soutenir l'activité
Un bonus individuel supplémentaire est calculé pour chaque individu actif du foyer. Innovation par rapport au RSA « activité », il constitue l'élément principal destiné à inciter à l'activité.
L'étude d'impact indique que ce bonus serait construit de façon à favoriser plus spécifiquement les travailleurs gagnant entre 0,8 et 1,2 SMIC . Seraient ainsi ciblés les ménages modestes qui disposent de ressources trop importantes pour bénéficier de certains dispositifs de solidarité, notamment les aides personnelles au logement, mais insuffisantes pour bénéficier de la réforme de l'impôt sur le revenu figurant dans la loi de finances pour 2015, qui a procédé à la suppression de la première tranche d'imposition et l'aménagement de la décote.
Le bonus ne serait d'ailleurs pas servi pour ceux ayant des revenus mensuels de 0,5 SMIC ou en-deçà.
Montant mensuel de prime d'activité et supplément perçu par rapport au RSA « activité » pour un célibataire sans enfant (en 2016)
(en euros par mois)
Montant de la prime d'activité |
Supplément par rapport au RSA « activité » |
|
Inactif |
0 |
0 |
Quart temps - 0,25 SMIC |
185 |
0 |
Mi temps - 0,5 SMIC |
246 |
0 |
0,6 SMIC |
222 |
22 |
0,7 SMIC |
199 |
44 |
3/4 temps - 0,75 SMIC |
188 |
56 |
0,8 SMIC |
176 |
67 |
0,9 SMIC |
136 |
67 |
Plein temps - SMIC |
132 |
67 |
Plein temps - 1,1 SMIC |
105 |
67 |
Plein temps - 1,2 SMIC |
60 |
60 |
Plein temps - 1,3 SMIC |
15 |
15 |
Plein temps - 1,4 SMIC |
0 |
0 |
Source : étude d'impact annexée au présent projet de loi
Ainsi, la prime d'activité constituerait, par rapport au RSA « activité », un supplément variant, pour un célibataire sans enfant, de 22 euros mensuels pour une rémunération de 0,6 SMIC, à 67 euros pour une rémunération allant de 0,75 SMIC à 1,1 SMIC. À 1,2 SMIC, la prime d'activité s'élèverait à 60 euros pour un travailleur qui ne touche actuellement rien au titre du RSA « activité ».
Toujours selon l'étude d'impact, une personne célibataire sans enfant bénéficiaire de la prime d'activité pourrait la percevoir jusqu'à un revenu d'activité équivalant à 1 150 euros nets par mois, soit 1,3 SMIC.
Différentes simulations ont été fournies par le Gouvernement à la demande de votre rapporteur pour avis. Elles mettent en évidence les conséquences de la création de la prime d'activité pour différents cas-types de foyers composés d'un couple mono ou biactif, ayant ou non deux enfants, et en fonction du revenu de l'ensemble du foyer.
Principales hypothèses retenues par le Gouvernement pour la construction de ces cas-types : - les couples sont mariés ou pacsés ; - la situation familiale et les ressources (en euros constants) des cas-types n'ont pas été modifiées au cours des trois dernières années (2014 à 2016) ; - les cas-types sont supposés être locataires en zone 2 (agglomérations de plus de 100 000 habitants hors Ile de France) et avoir un loyer supérieur au loyer plafond (environ 250 euros pour une personne seule) ; - les cas-types ne bénéficient pas de réduction ou de crédit d'impôts ; - les enfants ont 6 et 8 ans 70 ( * ) ; - le barème de RSA considéré est celui de 2016, avant revalorisation exceptionnelle de septembre, prévue dans le cadre du plan de lutte contre la pauvreté ; - ils ne perçoivent pas d'autres ressources que leurs revenus d'activité (ni revenus de remplacement, ni revenus du patrimoine) ; - ils sont locataires et n'ont pas d'autres revenus que leurs éventuels salaires. Les calculs ont été établis à partir d'une maquette reflétant la législation en vigueur en 2014, adaptée pour refléter en projection la législation en vigueur en 2016 (en incluant en particulier les revalorisations exceptionnelles du montant forfaitaire du RSA des 1 er septembre 2014 et 2015). Une inflation anticipée de 3,25 % entre 2014 et 2016 a notamment été appliquée. Les hypothèses de calcul peuvent expliquer des différences de quelques euros avec les montants réels qui seront versés en 2016. |
Cas-type d'un couple monoactif sans enfant
Note : dans le cas d'un couple monoactif, les ressources totales du foyer correspondent au salaire du membre du couple qui travaille.
Source : réponses au questionnaire du rapporteur pour avis
Cas type : couple monoactif avec deux enfants
Note : dans le cas d'un couple monoactif, les ressources totales du foyer correspondent au salaire du membre du couple qui travaille.
Source : réponses au questionnaire du rapporteur pour avis
Cas type : couple biactif sans enfant
Note : dans le cas d'un couple biactif, les ressources totales du foyer correspondent à la somme des salaires des deux membres du couple. Jusqu'à 1 SMIC, on considère que les deux membres du couple perçoivent le même salaire (chacun 0,25 SMIC quand le couple gagne au total 0,5 SMIC). À partir de 1,5 SMIC, l'un des membres du couple est supposé percevoir 1 SMIC et l'autre le salaire résiduel (0,5 SMIC quand le couple gagne au total 1,5 SMIC).
Source : réponses au questionnaire du rapporteur pour avis
Cas type : couple biactif avec deux enfants
Note : dans le cas d'un couple biactif, les ressources totales du foyer correspondent à la somme des salaires des deux membres du couple. Jusqu'à 1 SMIC, on considère que les deux membres du couple perçoivent le même salaire (chacun 0,25 SMIC quand le couple gagne au total 0,5 SMIC). À partir de 1,5 SMIC, l'un des membres du couple est supposé percevoir 1 SMIC et l'autre le salaire résiduel (0,5 SMIC quand le couple gagne au total 1,5 SMIC).
Source : réponses au questionnaire du rapporteur pour avis
Il convient de noter l'importance des montants de la prime d'activité pour les couples qui se trouvent dans la cible des bonus individuels . L'effet de la familiarisation associé aux bonus individuels contribue ainsi à ce qu'un couple mono actif avec deux enfants, et disposant pour ressources totales d'un SMIC , bénéficie de 448 euros, correspondant à 22 % de son revenu disponible mensuel (contre 20 % pour un même couple disposant de 0,5 SMIC et 369 euros de prime d'activité).
De nouveaux effets des seuils sont également créés puisqu'un couple biactif avec deux enfants, dont le montant des ressources augmenterait de 2 à 2,5 SMIC passerait d'une prime d'activité de 221 euros à rien, alors qu'avec le système actuel, il subissait une perte de seulement 46 euros 71 ( * ) .
Les tableaux mettent également en évidence la perte engendrée par cette réforme pour ceux qui, disposant d'au moins deux SMIC, bénéficiaient de la PPE mais ne se verront pas verser de prime d'activité ou bien pour un montant très faible . Ainsi, le couple biactif sans enfant passe, de 100 euros de PPE à 33 euros pour la prime d'activité, ou encore le couple biactif avec deux enfants ne perçoit plus rien avec 2,5 ou 3 SMIC mensuels, alors qu'il percevait auparavant 60 euros par le biais de la PPE. Ces situations sont la conséquence du fait que la prime d'activité est volontairement plus ciblée, afin d'éviter le « saupoudrage » .
La prime d'activité serait servie mensuellement , pour un montant minimal fixé par décret. Selon l'étude d'impact, celui-ci s'établirait à 15 euros.
Le projet de loi prévoit enfin une revalorisation annuelle du montant forfaitaire et du montant maximum de bonification en fonction de l'évolution des prix à la consommation hors tabac au cours des douze derniers mois.
Les règles de revalorisation de la prime d'activité Aux termes de l' article L 842-3 du code de la sécurité sociale , créé par l'article 24 du présent projet de loi, les deux principaux éléments de calcul de la prime, c'est-à-dire le montant forfaitaire et le montant maximal de la bonification, sont « revalorisés annuellement en fonction de l'évolution des prix à la consommation, hors tabac, au cours des douze derniers mois ». Cette règle innove par rapport à la revalorisation en deux temps actuellement utilisée pour la plupart des prestations sociales. En effet, selon la règle en vigueur, la revalorisation annuelle intègre la prévision d'inflation pour l'année n , retenue par la commission économique de la nation (CEN) avant le 15 avril de l'année n , sur laquelle s'impute un ajustement au titre de l'année n-1 . Cet ajustement correspond à l'écart entre le taux d'inflation définitif constaté par l'INSEE pour l'année n-1 et la prévision initiale de la CEN. La revalorisation en fonction de l'évolution des prix des douze derniers mois permettra d'éviter un décalage entre le niveau de revalorisation de la prestation et l'évolution effective des prix à la consommation. |
3. Une base simplifiée des ressources du foyer prises en compte
Les revenus professionnels et les autres ressources du foyer qui sont pris en compte afin de calculer le montant de la prime d'activité sont, en vertu de l'article L. 842-4 du code de sécurité sociale, les suivants :
« 1° les ressources ayant le caractère de revenus professionnels ou qui en tiennent lieu ;
« 2° les revenus de remplacement des revenus professionnels ;
« 3° l'avantage en nature que constitue la disposition d'un logement à titre gratuit, déterminé de manière forfaitaire ;
« 4° les prestations et aides sociales, à l'exception de certaines d'entre elles en raison de leur finalité sociale particulière ;
« 5° les autres revenus soumis à l'impôt sur le revenu. »
La « base ressources » de la prime se trouve simplifiée comparée à celle du RSA « socle », qui tient compte de toutes les ressources du foyer, à quelques exceptions limitativement prévues.
À l'inverse, la « base ressources » de la prime d'activité énumère précisément la liste des ressources prises en compte dans le calcul de la prestation. Elle exclut les autres ressources, et notamment les avantage en nature autre que le logement mis à disposition gratuitement, les libéralités, les capitaux qui ne produisent pas de revenus, les revenus du capital non imposables, les biens immobiliers non loués ou encore certaines aides comme l'allocation d'entretien versée par l'aide sociale à l'enfance aux tiers de confiance.
Cette différence entre les deux prestations tient au fait que la prime d'activité est versée aux travailleurs justifiant de revenus tirés de leur activité professionnelle et est destinée à les compléter. Pour le RSA « socle », il s'agit de déterminer les ressources du foyer afin de fixer le montant permettant d'atteindre un revenu garanti, dans le cadre d'un minimum social.
Le dispositif prévoit qu'un décret en Conseil d'État devra déterminer les modalités d'application de l'article L. 842-4 ainsi que l'évaluation des ressources.
Comme indiqué supra, les revenus professionnels et assimilés devraient recouvrir les salaires, traitements et autres revenus définis actuellement à l'article R. 262-8 du code de l'action sociale et des familles pour le RSA. Les revenus des travailleurs en ESAT devraient également appartenir à cette catégorie. Ces revenus professionnels se verront appliquer un abattement de 62 % pour le calcul de la prime.
Les « revenus de remplacement des revenus professionnels » font référence aux revenus perçus en remplacement d'une rémunération issue du travail. Il s'agit principalement des allocations de chômage ou de préretraite, des pensions de retraite et des pensions d'invalidité ainsi que les indemnités journalières de sécurité sociale au-delà de trois mois d'arrêt de travail.
Comme pour le RSA, la disposition d'un logement à titre gratuit constitue un « avantage en nature déterminé de manière forfaitaire » , qui est pris en compte dans les ressources du bénéficiaire de la prime.
Les autres revenus soumis à l'imposition sur le revenu entrent également dans le champ des ressources retenues pour déterminer la prime d'activité. Il s'agit notamment des pensions alimentaires, des revenus fonciers ou encore des revenus imposables des capitaux.
Certaines prestations et aides sociales seraient, en revanche, exclues du champ des ressources prises en compte « en raison de leur finalité sociale particulière », comme pour le RSA pour lequel l'article R. 262-11 du code de l'action sociale et des familles établit une liste de 23 prestations parmi lesquelles figurent notamment la prime à la naissance ou à l'adoption, l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé, l'allocation de rentrée scolaire, la majoration pour âge des allocations familiales ou encore des bourses d'études.
Selon les informations fournies à votre rapporteur pour avis, la liste dressée pour le RSA serait reprise à l'identique pour la prime d'activité. À ces 23 prestations exclues du fait de leur finalité sociale particulière, s'ajouterait également le RSA « socle » .
En vertu de l'article L. 842-5 du code de la sécurité sociale, le conjoint, le concubin ou le partenaire lié à un pacte civil de solidarité doit répondre aux mêmes exigences que le bénéficiaire.
Selon les informations fournies par le Gouvernement, les informations concernant les ressources des foyers ne devraient pas être trop difficiles à vérifier, y compris en cas de concubinage. Ainsi, les revenus d'activité et de remplacement des allocataires feraient l'objet d'une déclaration trimestrielle, tandis que le montant forfaitaire établi pour les aides au logement et les prestations sociales seraient déjà connues des Caisses d'allocations familiales. Les autres revenus imposables pourraient quant à eux être préremplis à la suite d'échanges avec la DGFiP, « sur la base d'une requête individualisée pour chacun des membres du foyer ».
Selon l'étude d'impact, 5,6 millions de personnes actives seraient éligibles à la prime d'activité, correspondant à 4 millions de ménages et 11 millions de personnes au total.
Le Gouvernement retient un taux de recours de la prestation de 50 %, quand le RSA « activité » n'atteint actuellement que 32 %. 2 millions de ménages seraient ainsi allocataires. Le montant d'allocation mensuel moyen serait de 160 euros.
B. LES MODALITÉS D'APPLICATION
1. Une prestation gérée par les caisses d'allocations familiales, versée à des bénéficiaires dont les droits seraient « figés » pour un trimestre et financée par le budget de l'État
Le chapitre III du titre IV du huitième livre du code la sécurité sociale, qui comprend six articles, est consacré à l'attribution, au service et au financement de la prime d'activité.
a) Une fois ouverts, les droits des bénéficiaires de la prime d'activité sont « figés » pour un trimestre
Sous réserve de remplir les conditions de son attribution, le droit à la prime d'activité est ouvert à compter de la date de la demande (article L. 843-2 du code de la sécurité sociale). Ainsi, quel que soit le temps d'instruction du dossier, la personne éligible pourra en bénéficier à compter de cette date.
Contrairement au RSA « activité », la prime d'activité ne verra pas son montant varier à chaque évolution des ressources du foyer . En effet, le projet de loi prévoit l'introduction d'un « effet figé » des droits , avec un réexamen prévu « selon une périodicité définie par décret ». Celle-ci devrait, selon les informations fournies par l'étude d'impact, être fixée à trois mois .
Ainsi, entre chaque réexamen, la prime d'activité restera identique, sans qu'il ne soit tenu compte de l'augmentation ou de la baisse des ressources du foyer.
Le fait de prévoir des droits « figés » pour un trimestre constitue une modification notable et bienvenue par rapport au RSA « activité » qui tenait compte chaque mois du changement de niveau de situation des bénéficiaires. Cette disposition était ainsi source de complexité et engendrait des indus pour de nombreux dossiers.
Le projet de loi prévoit également que la prime d'activité peut être réduite ou suspendue dans l'hypothèse où l'un des membres du foyer est admis dans un établissement de santé ou relève de l'administration pénitentiaire, selon des conditions fixées par décret. Il précise que « la date d'effet et la durée de la réduction ou de la suspension ainsi que, le cas échéant, la quotité de la réduction varient en fonction de la durée du séjour en établissement » (article L. 843-3 du code de la sécurité sociale).
Enfin, en l'absence de versement de la prestation ou du RSA pendant une certaine période, fixée par décret, le bénéficiaire de la prime d'activité est radié (article L. 843-5 du code de la sécurité sociale).
b) La gestion de la prime d'activité, une compétence confiée aux caisses d'allocations familiales
La gestion de la prime d'activité sera assurée par les caisses d'allocations familiales (CAF) et, pour ceux qui relèvent de leur compétence, par les caisses de mutualité sociale agricole (article L. 843-1 nouveau du code de la sécurité sociale).
Déjà compétentes s'agissant du RSA « activité », les CAF devraient toutefois connaître une hausse de leur activité . En effet, le nombre des bénéficiaires devrait être sensiblement plus important , non seulement car le nombre de personnes éligibles au dispositif est supérieur à celui du RSA « activité », compte tenu notamment des jeunes actifs de 18 à 25 ans et du fait qu'elle est censé englober davantage de salariés à temps complet et de couples bi-actifs, mais aussi en raison du taux de recours attendu de 50 %, contre 32 % actuellement constaté pour le RSA « activité ».
Parallèlement, les efforts de simplification annoncés, s'agissant en particulier de la base de ressources prises en compte, l'effet « figé » des droits pour un trimestre ou encore du développement de la dématérialisation des procédures, devraient permettre de faciliter le travail des CAF. S'agissant de l'informatique, l'étude d'impact précise également que les systèmes d'information des CAF devront être adaptés et qu'un simulateur permettant à chaque personne de tester son éligibilité avant de demander la prime d'activité devrait être mis en place. Enfin, la déclaration de ressources du RSA « socle » devrait, le cas échéant, pouvoir être utilisée par les CAF pour calculer la prime d'activité des bénéficiaires qui seraient éligibles aux deux dispositifs.
L'étude d'impact du projet de loi indique qu'« une estimation des impacts sur l'activité des CAF et des moyens nécessaires à la mise en oeuvre de la prime d'activité sera réalisée dans le cadre de la mission d'évaluation à mi-parcours de la convention d'objectifs et de gestion de la [caisse nationale d'allocations familiales (CNAF)] : cette mission sera réalisée conjointement par l'inspection générale des affaires sociales et par l'inspection des finances. »
c) Une prestation financée par le budget de l'État
La prime d'activité devrait être intégralement financée par le budget de l'État (article L. 843-6 du code de la sécurité sociale), dans le cadre de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ».
À l'occasion d'une prochaine loi de finances, l'étude d'impact indique qu'il conviendra de « statuer sur l'évolution ou le devenir du Fonds national des solidarités actives, concourant au financement du RSA « activité » [et] géré par la Caisse des dépôts et consignations ».
Selon les informations fournies par le Gouvernement, une enveloppe de 4,1 milliards d'euros est ainsi prévue pour l'année 2016. Cela correspond à un effort supplémentaire de 300 millions d'euros par rapport à ce qu'aurait représenté la somme des budgets consacrés à la PPE et au RSA « activité » à cette date, compte tenu du gel du barème de la PPE en vigueur depuis 2008.
Cette enveloppe budgétaire a été calculée sur l'hypothèse d'un taux de recours de 50 %, représentant 66 % de la masse financière potentielle de la prime - puisque, selon l'étude d'impact, ce sont les personnes éligibles pour les plus petits montants qui devraient le plus souvent renoncer à s'engager dans les démarches administratives pour obtenir la prime d'activité.
Misant sur une montée en charge rapide, le Gouvernement devrait, selon l'étude d'impact, prévoir 4 milliards d'euros de crédits consacrés à la prime d'activité dans le projet de loi de finances pour 2016, puis 4,2 milliards d'euros en 2017 et 4,3 milliards d'euros en 2018.
2. Contrôle, récupération de l'indu et lutte contre la fraude
Dans le chapitre IV, les cinq articles concernent le contrôle de l'attribution de la prime d'activité, l'éventuelle récupération de l'indu et la lutte contre la fraude.
En vertu de l'article L. 844-1, il est prévu que les caisses d'allocations familiales et les caisses de mutualité sociale agricole disposent des règles, procédures et moyens d'investigation déjà applicables par ces organismes pour procéder à des contrôles et des enquêtes.
Préalablement à l'exercice d'un recours contentieux, il est prévu qu'une réclamation doit faire l'objet d'un recours auprès de la commission de recours amiable, qui est composée et constituée au sein du conseil d'administration de l'organisme concernée pour connaître des réclamations relevant du contentieux général de la sécurité sociale. Ensuite, le recours contentieux est éventuellement porté devant la juridiction administrative (article L. 844-2 du code de la sécurité sociale).
En se fondant sur les dispositions actuellement applicables pour le RSA, l'article L. 844-3 prévoit également les modalités de répétition des sommes indument perçues par le bénéficiaire.
Ainsi, les caisses d'allocations familiales et les caisses de mutualité sociale agricole sont compétentes en la matière.
La répétition de l'indu peut être réalisée en une seule fois, si le bénéficiaire fait ce choix, sinon, la caisse d'allocations familiales ou la caisse de mutualité sociale agricole compétente recouvre la somme « par retenues sur les montants à échoir ». À défaut de le pouvoir, elle procède à des retenues sur les versements d'autres prestations sociales : les prestations familiales, l'allocation de logement sociale, l'allocation pour adulte handicapé, l'aide personnalisée au logement ou encore le revenu de solidarité active.
Dans l'hypothèse où l'indu aurait été constitué sur une prestation versée en tiers-payant, l'organisme concerné peut recouvrer l'indu sur d'autres prestations versées directement à l'allocataire « dans des conditions précisées par décret ».
Les retenues opérées sur les montants des prestations à échoir sont déterminées selon les règles fixées pour les prestations familiales par l'article L. 553-2 du code de sécurité sociale, et notamment « en fonction de la composition de la famille, de ses ressources, des charges de logement, des prestations servies par les organismes débiteurs de prestations familiales, à l'exception de celles précisées par décret ».
Le présent article prévoit également que l'article L. 161-5-1 du code de la sécurité sociale est applicable, permettant ainsi au directeur de l'organisme compétent de délivrer une contrainte pour le recouvrement des sommes indument perçues, laquelle, « à défaut d'opposition du débiteur devant la juridiction compétente, comporte tous les effets d'un jugement et confère notamment le bénéfice de l'hypothèque judiciaire ».
Un décret doit déterminer le montant minimal en-deçà duquel les sommes indument versées au titre de la prime d'activité ne donne pas lui à répétition.
L'organisme peut également décider de remettre ou réduire la créance, « en cas de bonne foi ou de précarité de la situation du débiteur, sauf si cette créance résulte d'une manoeuvre frauduleuse ou d'une fausse déclaration. »
L'article précise également le caractère suspensif de toute réclamation portée par un bénéficiaire contre une « décision de récupération de l'indu », mais aussi du « dépôt d'une demande de remise ou de réduction de créance » ainsi que des « recours administratifs et contentieux, y compris en appel, contre les décisions prises sur ces réclamations et demandes ».
En renvoyant à l'article L. 553-1 du code de la sécurité sociale applicable aux prestations familiales, l'article L. 844-4 prévoit un délai de prescription de deux ans pour la prime d'activité.
Enfin, en référence à la peine déjà prévue à l'article L. 554-2 du code de la sécurité sociale, une amende de 4 500 euros d'amende est prévue par l'article L. 844-5 pour punir le « fait d'offrir ou de faire offrir ses services à un allocataire, moyennant émoluments convenus d'avance, en vue de lui faire obtenir la prime d'activité ».
3. Transmission à l'État de données à des fins statistiques
Reprenant les dispositions déjà prévues pour le RSA « activité », le chapitre V est relatif au suivi statistique, à l'évaluation et à l'observation comprend deux articles qui prévoient la transmission par la caisse nationale des allocations familiales et la caisse nationale de la mutualité sociale agricole à l'État, dans des conditions fixées par décret :
- les informations concernant « la situation sociale, familiale et professionnelle des bénéficiaires de la prime d'activité et aux dépenses engagées à ce titre » (article L. 845-1 du code de la sécurité sociale) ;
- les informations relatives « aux personnes physiques destinées à la constitution d'échantillons statistiquement représentatifs en vue de l'étude des situations et des parcours d'insertion des personnes physiques figurant dans ces échantillons » (article L. 845-2 du code de la sécurité sociale).
Enfin, le chapitre VI, à l'article unique et relatif aux dispositions finales, prévoit que, sauf disposition contraire, les modalités d'application de la prime d'activité sont fixées par décret en Conseil d'État (article L. 846-1 du code de la sécurité sociale).
III. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
En commission des affaires sociales, huit amendements ont été adoptés dont :
- cinq amendements du rapporteur , Christophe Sirugue . Un amendement vise à compléter les objectifs de la prime d'activité, en mentionnant explicitement le soutien aux pouvoir d'achat . Un autre amendement vise à corriger un oubli au nouvel article L. 843-3 du code de la sécurité sociale, en précisant qu'il est tenu compte des charges de famille du bénéficiaire lorsque celui-ci est hospitalisé ou emprisonné. Un amendement prévoit l'information « par tout moyen » du bénéficiaire de la prime d'activité concernant les modalités de réclamation et de recours fixées par le présent projet de loi.
Le rapporteur, Christophe Sirugue, a également inséré un nouvel article L. 845-1-1 du code de la sécurité sociale prévoyant, par symétrie avec la disposition existante en matière de RSA socle, la transmission mensuellement par Pôle emploi à l'État des inscriptions des bénéficiaires de la prime d'activité sur la liste des demandeurs d'emploi et de leur radiation de cette liste. L'exposé sommaire de l'amendement indique qu'il est nécessaire de prévoir cette mesure « car il est vraisemblable qu'une partie au moins des bénéficiaires de la prime d'activité connaîtra des allers-retours entre l'emploi et la recherche d'emploi ». Enfin, un dernier amendement du rapporteur, adopté au stade de la commission, prévoit que Pôle emploi, à l'instar de la CNAF et de la CCMSA, doit transmettre à l'État les informations nécessaires au suivi du parcours des bénéficiaires de la prime (situation sociale, familiale et professionnelle).
- un amendement du Gouvernement tendant à inclure parmi les bénéficiaires de la prime d'activité les étudiants, stagiaires et apprentis dont la rémunération excède un certain plafond , correspondant au seuil de rattachement au foyer dans le cadre des prestations familiales (soit 0,78 SMIC ou environ 900 euros mensuels nets). L'exposé sommaire de l'amendement précise que cette modification du champ de la prime d'activité vise « davantage des travailleurs qui par ailleurs poursuivent des études que des personnes en formation initiale ». Ce dernier ne donne toutefois aucune indication concernant le nombre de personnes concernées et le coût de cette mesure. Selon les informations transmises à votre rapporteur pour avis, 70 000 apprentis et 80 000 étudiants auraient ainsi accès à la prime d'activité, pour un coût d'environ 100 millions d'euros ;
- un amendement de notre collègue députée Sandrine Mazetier, rapporteure au nom de la délégation aux droits des femmes , qui vise à compléter les informations transmises par la caisse nationale d'allocations familiales (CNAF) et la caisse centrale de la mutualité sociale agricole (CCMSA) à l'État, afin d'assurer le suivi statistique des bénéficiaires, par des « indicateurs sexués ». L'objectif est ici notamment de vérifier si la prime d'activité favorise bel et bien la bi-activité des couples, qui est l'un de ses objectifs. Un sous-amendement du rapporteur Christophe Sirugue, procède à l'ajout de la mention des indicateurs sexués à l'article L. 845-2 du code de la sécurité sociale relatif à la constitution d'échantillons statistiques de bénéficiaires de la prime d'activité par la CNAF, la CCMSA et Pôle emploi et à la transmission de ces informations à l'État.
En séance publique , 17 amendements ont été adoptés, dont neuf amendements rédactionnels du rapporteur, Christophe Sirugue.
Trois amendements « d'allègement rédactionnel », adoptés à l'initiative du rapporteur, avec un avis favorable du Gouvernement, suppriment le renvoi explicite à un décret en Conseil d'État s'agissant des règles de calcul de la prime pour les travailleurs salariés et les travailleurs indépendants et agricoles et de la définition de la « base ressources ». Il est en effet considéré que l'article L. 846-1 du code de la sécurité sociale, créé par le présent projet de loi, est suffisant dans la mesure où il indique que les modalités d'application de l'ensemble du titre relatif à la prime d'activité « sont déterminées par décret en Conseil d'État sauf disposition contraire ».
Cinq amendements adoptés en séance publique apportent des modifications plus substantielles à l'article 24 du présent projet de loi :
- un nouveau chapitre III bis a été inséré, à l'initiative du rapporteur Christophe Sirugue, avec un avis favorable du Gouvernement, créant un « droit à un accompagnement adapté à ses besoins » au profit de chaque bénéficiaire de la prime d'activité lorsqu'il est en recherche d'emploi. Ce principe « souple et non contraignant », selon les termes de l'exposé sommaire de l'amendement, pourrait notamment trouver une traduction dans le cadre de l'expérimentation relative à l'adaptation de l'offre de services de Pôle emploi en direction des salariés en activités réduites subies, prévue dans le cadre de la convention avec l'État et l'Unédic ;
- à l'initiative de notre collègue députée Dominique Orphé, il est proposé de tenir compte de la surface agricole exploitée au lieu du montant du bénéfice agricole pour le calcul de la prime d'activité des exploitants agricoles dans les départements d'outre-mer et les collectivités de Saint-Martin et de Saint Barthélémy. Une disposition semblable existe pour l'assujettissement au régime social agricole en outre-mer. Cet amendement a reçu un avis favorable de la commission et du Gouvernement ;
- deux amendements identiques , l'un du rapporteur pour avis de la commission des finances, Dominique Lefebvre, et l'autre de Michel Liegott et des membres du groupe socialiste, républicain et citoyen, adoptés avec un avis favorable de la commission et du Gouvernement, ont pour objet de rendre la prime d'activité incessible et insaisissable . Il s'agit d'aligner le régime de la nouvelle prime sur celui du RSA socle, prévu par l'article L. 262-48 du code de l'action sociale et des familles, et de garantir ainsi le versement de la prime même en cas de saisie par un créancier ;
- à l'initiative de notre collègue député Michel Pouzol et des membres du groupe socialiste, républicain et citoyen, un amendement prévoit la mise en place d'une campagne dématérialisée d'information auprès des actuels bénéficiaires du RSA « activité » et de la PPE par les CAF et la DGFiP . Cette disposition a pour but de renforcer le taux de recours à la future prime d'activité. Il convient toutefois de noter qu'elle n'est réellement pertinente que pour les actuels bénéficiaires de la PPE dans la mesure où le projet de loi prévoit le basculement automatique des allocataires du RSA « activité » vers la prime d'activité.
IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES
A. UN CIBLAGE DE LA PRIME ENTRAÎNANT UNE CONCENTRATION DES GAGNANTS PARMI LES MÉNAGES LES PLUS PAUVRES
1. Moins d'un quart des ménages concernés gagnants à la réforme
Selon l'étude d'impact annexée au présent projet de loi, environ 4,5 millions de ménages verront leur situation financière modifiée à la suite du remplacement du RSA « activité » et de la PPE par la prime d'activité. Toutefois, la répartition entre « gagnants » 72 ( * ) et « perdants » 73 ( * ) à la réforme varie selon la prise en compte ou non des effets de la réforme de l'impôt sur le revenu adoptée fin 2014.
Ainsi, en intégrant les effets de la réforme du « bas de barème » de l'impôt sur le revenu , la répartition serait la suivante :
- environ 1,24 million de ménages seraient gagnants et bénéficieraient d'une augmentation de leurs revenus ;
- environ 820 000 ménages seraient perdants et verraient donc leur revenu diminuer ;
- enfin, 2,45 millions de ménages ne verraient pas d'évolution significative de leur revenu ; pour ces derniers, les effets combinés des différentes réformes seraient neutres.
La réforme de l'impôt sur le revenu permettrait notamment de compenser les effets négatifs de l'instauration de la prime d'activité pour environ 370 000 ménages.
Globalement, le montant mensuel moyen de gain s'élève à 99 euros pour l'ensemble des ménages gagnants, tandis que le montant mensuel moyen de perte s'élève à 53 euros . Pour mémoire, le montant moyen de prime d'activité serait de 160 euros mensuels parmi les recourants, contre 38 euros pour la PPE et 183 euros pour le RSA « activité » en 2012.
Ménages concernés par la réforme par décile de niveau de vie
(en milliers)
Impact de la réforme seule |
Total en tenant compte de la réforme de l'impôt sur le revenu |
||||||||
Décile |
1 |
2 |
3 |
4 |
5 |
6 |
7 à 10 |
Total |
|
Gagnants |
270 |
324 |
201 |
65 |
40 |
27 |
42 |
969 |
1 245 |
Perdants
|
76 |
164 |
241 |
246 |
200 |
145 |
124 |
1 197 |
824 |
Neutres |
304 |
376 |
382 |
337 |
287 |
262 |
398 |
2 347 |
2 444 |
Champ : ménages ordinaires de France métropolitaine
Note : Parmi les 10 % ménages les plus modestes (1 er décile), 270 000 ménages sont gagnants 76 000 sont perdants, et 304 000 voient leur revenu disponible être modifié de moins de 1 %. Le total en tenant compte de la réforme IR a été calculé sur le champ des ménages qui touchaient l'ancien RSA-activité ou la PPE.
Source : étude d'impact annexée au présent projet de loi
Par ailleurs, le nombre de perdants à la réforme est supérieur si l'on tient compte du phénomène de non-recours à la future prime d'activité. En effet, selon l'hypothèse retenue pour le Gouvernement pour l'année 2016, seuls 50 % des ménages éligibles à la prime devraient effectivement y recourir. Ainsi, après prise en compte du non recours, en particulier parmi les actuels bénéficiaires de la PPE, environ 560 000 ménages supplémentaires seraient perdants à la réforme.
En tenant compte à la fois des effets de la réforme du « bas de barème » et du non-recours, le nombre de ménages perdants (environ 1,4 million) serait donc supérieur au nombre de ménages gagnants (environ 1,2 million). La réforme resterait neutre pour environ 2,4 millions de ménages.
2. La concentration des gagnants dans les premiers déciles de niveau de vie
Les effets positifs de la mise en place de la prime d'activité devraient se concentrer sur les ménages appartenant aux trois premiers déciles de niveau de vie, c'est-à-dire chez les ménages dont le revenu mensuel est inférieur à 1 363 euros. Ainsi, en tenant compte des effets de la réforme de l'impôt sur le revenu, hors non-recourants, 48 % des gagnants se trouvent parmi les 20 % des ménages les plus pauvres .
Selon le Gouvernement, la mise en place de la prime d'activité s'adresse en priorité aux travailleurs qui n'ont bénéficié ni du plan de lutte contre la pauvreté (en particulier de la revalorisation du RSA socle), ni de la réforme de l'impôt sur le revenu, dans la mesure où ces ménages étaient déjà non imposables.
Le montant mensuel moyen de gain serait de 116 euros pour les 10 % de ménages les plus pauvres , de 87 euros pour les ménages du deuxième décile et de 79 euros pour ceux du troisième décile.
Ventilation des gagnants par décile de niveau de
vie
(après prise en compte de la réforme de l'IR et hors
non-recourants)
Source : commission des finances du Sénat (à partir des données de l'étude d'impact annexée au présent projet de loi et des données transmises par le ministère des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes)
Plusieurs catégories de personnes devraient notamment voir leurs revenus augmenter grâce à la prime d'activité :
- les jeunes travailleurs, âgés entre 18 et 25 ans , qui étaient auparavant exclus du RSA « activité », auxquels s'ajouteraient les étudiants et les apprentis dont le revenu d'activité est supérieur à 0,78 fois le SMIC ;
- la moitié des allocataires actuels du RSA « activité » (soit environ 480 000) qui percevraient une prime d'activité plus importante grâce aux bonus individuels ;
- les familles monoparentales , qui, en principe, bénéficieront à la fois de la familiarisation de la prime d'activité et de la prise en compte individuelle des revenus d'activité.
Toutefois, si l'on analyse plus en détail la situation des ménages situés parmi les 30 % des plus pauvres, il s'avère que 400 000 à 800 000 d'entre eux - selon que l'on tient ou non compte du non-recours - verraient leur revenu diminuer après la réforme.
3. Entre 820 000 et 1,4 million d'actuels bénéficiaires de la PPE seraient perdants
Les résultats des simulations de la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (DREES) présentés dans l'étude d'impact, indiquent que les quelques 820 000 perdants de la réforme seraient concentrés entre les deuxième et quatrième déciles de niveau de vie , y compris après avoir pris en compte la réforme du « bas de barème » de l'IR. Le montant moyen mensuel de perte serait d'environ 50 à 60 euros tous déciles de niveau de vie confondus.
Ventilation des perdants par décile de niveau de
vie
(après prise en compte de la réforme de l'IR et hors
non-recourants)
Source : commission des finances du Sénat (à partir des données de l'étude d'impact annexée au présent projet de loi et des données transmises par le ministère des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes)
Si l'on tient compte des personnes actuellement éligibles à la PPE et qui ne recourront pas à la prime d'activité, il est encore plus flagrant que la majorité des perdants se situeront également dans les premiers déciles de niveau de vie : sur 1,4 million de perdants, en tenant compte du non recours et de la réforme de l'IR, environ 830 000, soit 60 % des perdants feraient partie des 30 % des ménages les plus pauvres.
Cette situation s'explique par la redistribution opérée par la prime d'activité entre certains bénéficiaires de la PPE, d'une part, et les allocataires du RSA « activité » et les personnes qui entreront dans le champ de la nouvelle prime, d'autre part. En effet, les allocataires du RSA « activité » verront tous leur revenu augmenter à l'issue de la réforme, tandis que 25 % des bénéficiaires de la PPE seront perdants (55 % auront un gain ou une parte de revenu inférieur à 1 % et seuls 20 % seront gagnants).
Répartition des gagnants et des perdants parmi
les bénéficiaires de la PPE
(après prise en compte de
la réforme de l'IR)
Source : commission des finances du Sénat (à partir des données de l'étude d'impact annexée au présent projet de loi)
Plus précisément, l'étude d'impact décompose les quelques 820 000 perdants de la façon suivante :
- 40 % seraient des bénéficiaires actuels de la PPE vivant en concubinage , c'est-à-dire des ménages constitués de plusieurs foyers fiscaux. En cas d'imposition séparée, il est en effet possible pour l'un des concubins de bénéficier de la PPE, même si son partenaire perçoit des revenus plus élevés ;
- 55 % seraient des bénéficiaires de la PPE qui perdraient du fait de la modification du mode de calcul de la nouvelle prime (base trimestrielle à la place d'une base annuelle) ou de l'élargissement des ressources prises en compte (revenus d'activité pour la PPE et « base ressources » plus large pour la prime d'activité) ;
- 5 % seraient des bénéficiaires de la PPE éligibles à la prime d'activité, mais pour un montant inférieur.
Par ailleurs, la fixation du seuil de versement de la prime d'activité à 15 euros mensuels , contre 6 euros mensuels pour le RSA « activité » et 30 euros annuels pour la PPE, explique l'existence d'un certain nombre de perdants parmi les bénéficiaires de faibles montants d'aide.
B. UNE OUVERTURE DU CHAMP DES BÉNÉFICIAIRES AUX ÉTUDIANTS DONT LES EFFETS SONT HASARDEUX
En intégrant, sous certaines conditions très restrictives, les étudiants parmi les bénéficiaires de la prime d'activité, l'Assemblée nationale a apporté une mauvaise réponse aux difficultés financières, bien réelles, rencontrées par certains étudiants .
La mesure, issue d'une initiative gouvernementale et tendant à concrétiser une annonce du Président de la République, prévoit que les étudiants et les apprentis pourront bénéficier de la prime d'activité s'ils justifient percevoir des revenus professionnels qui seraient fixés à 0,78 SMIC net mensuels (soit environ 900 euros) et exercer leur activité professionnelle pendant une période minimale qui devrait être de trois mois.
Lors de l'examen, par la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale, de l'amendement ayant introduit ce dispositif, Marisol Touraine, ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes a précisé que le seuil de 78 % du SMIC avait été retenu car il était « cohérent avec la notion de foyer social : les jeunes en formation initiale qui bénéficient d'un revenu d'activité supérieur à 0,78 SMIC ne peuvent plus dépendre du foyer de leurs parents pour la caisse d'allocations familiales et sont considérés comme des actifs pour le calcul des allocations familiales ou des allocations logement » .
Il semble pour le moins paradoxal que la prime d'activité soit servie aux étudiants alors que le principal objectif de cette prestation est d'inciter à l'exercice ou à la reprise d'une activité professionnelle . Ces personnes devraient plutôt être encouragées à réussir leur cursus . C'est d'ailleurs ce qui était indiqué dans l'étude d'impact du projet de loi pour justifier l'exclusion des étudiants du bénéfice de la prime d'activité.
Certes, certains étudiants rencontrent d'indéniables difficultés financières pour mener à bien leur scolarité. Toutefois, sans méconnaître cette réalité , leur octroyer la prime d'activité n'est pas une solution adaptée à leur situation. Il paraîtrait préférable de s'appuyer sur un système de bourses sur critères sociaux efficace et une offre de logements adaptée pour y répondre aux besoins constatés.
En outre, il pourrait exister un risque que la perspective de bénéficier de la prime d'activité puisse inciter certains étudiants à augmenter leur temps de travail salarié, au détriment de leurs activités scolaires.
Le dispositif proposé cible les personnes qui ont vraisemblablement le temps de travail le plus difficilement compatible avec un cursus de l'enseignement supérieur et qui rend difficile de suivre des cours avec assiduité. Des études économiques ont d'ailleurs démontré que l'activité salariée était susceptible d'avoir un impact négatif sur la réussite scolaire . Ainsi en est-il notamment d'une étude publiée par l'INSEE, de novembre 2009, qui établit que « travailler plus de 16 heures par semaine a un effet très significativement négatif (en moyenne de près de 49 points) sur la probabilité d'obtenir son diplôme. En revanche, l'effet du travail salarié est réduit de moitié et peu significatif lorsque l'étudiant travaille moins de 16 heures par semaine » 74 ( * ) .
Il convient également de rappeler que l'enveloppe budgétaire consacrée à la prime d'activité est d'ores et déjà contrainte . Or l'ouverture du bénéfice de cette prestation aux étudiants et aux apprentis, estimés respectivement à 80 000 et 70 000 d'après les informations reçues du Gouvernement, conduirait à une dépense supplémentaire de 100 millions d'euros .
Pour toutes ces raisons, la commission des finances a adopté un amendement de votre rapporteur pour avis tendant à exclure les étudiants du bénéfice de la prime d'activité, en ne la maintenant que pour les apprentis qui répondraient aux critères fixés par le présent article tel qu'adopté par l'Assemblée nationale : disposer d'une rémunération de plus de 0,78 SMIC et exercer leur activité pendant une période d'au moins trois mois. Les apprentis concernés sont alors considérés comme ayant suffisamment avancé dans leur scolarité et seraient les plus susceptibles à bénéficier d'une prestation tendant à encourager et à faciliter l'intégration dans le monde du travail. En effet, selon le Gouvernement, sont visés par le dispositif les apprentis majeurs de troisième année ainsi que la majorité des apprentis de deuxième année de plus de 21 ans.
Votre rapporteur pour avis a conscience que la solution proposée fait débat. Elle ne tient, notamment, pas compte de la situation des étudiants salariés qui, tout en exerçant une activité professionnelle, poursuivraient une formation initiale, notamment par des cours universitaires du soir. Des dispositions spécifiques leur permettent toutefois déjà de souscrire au régime général de la sécurité sociale et de ne pas cotiser à celui des étudiants.
En tout état de cause, l'amendement proposé par votre commission met en évidence les contradictions du Gouvernement : tout en affirmant que la prime d'activité a pour principal objectif d'inciter à l'exercice ou la reprise d'une activité professionnelle, il prévoit qu'elle serait également servie aux étudiants et aux apprentis, sous réserve d'une rémunération si élevée qu'elle conduit à cibler, parmi ces publics, les plus à même de renoncer à leur scolarité !
C. UN DISPOSITIF ENCORE FLOU ET COMPLEXE
1. Un dispositif législatif flou, qui renvoie à nombreuses dispositions règlementaires
Le dispositif de la prime d'activité, tel que détaillé dans le présent article, demeure flou. Si les grands principes de fonctionnement et d'attribution de la prime sont présentés, de nombreux éléments pourtant substantiels sont renvoyés au pouvoir réglementaire . Ainsi, l'article mentionnait dans sa version initiale 16 décrets d'application devant être pris afin de préciser la manière dont la prime sera calculée et versée à ses bénéficiaires.
Les principaux éléments devant être déterminés par décret sont les suivants :
- les règles de calcul de la prime d'activité, dont les modalités de calcul de la bonification ;
- le montant forfaitaire et la fraction des revenus professionnels des membres du foyer pris en compte dans le calcul de la prime ;
- les ressources non prises en compte dans le calcul de la prime ;
- la périodicité selon laquelle il est procédé au réexamen du montant de la prime d'activité ;
- le montant minimum de la prime d'activité en-dessous duquel celle-ci n'est pas versée.
Le Gouvernement aura ainsi toute latitude pour ajuster les modalités de calcul de la prime ainsi que le ciblage du bonus « individuel », qui constitue la véritable nouveauté du dispositif proposé par rapport au RSA « activité ». Le projet de loi se contente en effet d'indiquer que le montant de cette bonification est « une fonction croissante des revenus situés entre un seuil et un plafond ».
Il est difficile pour le législateur de pouvoir se prononcer sur la pertinence du dispositif proposé, compte tenu de l'importance des renvois au pouvoir réglementaire ; ils concernent en effet les montants de revenus garantis, les publics faisant l'objet d'un soutien financier majoré, le point de sortie du dispositif, ou encore les types de ressources exclues du calcul de la prime. Il s'agit pourtant d'éléments essentiels, qui conditionnent non seulement l'efficacité du dispositif envisagé, mais également son coût pour les finances publiques.
Votre rapporteur pour avis regrette donc que la réforme proposée, bien que nécessaire, n'ait pas fait l'objet d'une expérimentation préalable , à l'instar de celle qui avait été conduite préalablement à la mise en place du RSA « activité ». Ceci est d'autant plus regrettable que le nombre de personnes concernées et les montants en jeu sont très significatifs. Une réforme d'une telle ampleur, compte tenu des nombreux paramètres d'incertitude qui l'accompagnent, aurait mérité mieux que des simulations et des modélisations dont l'administration reconnait elle-même les limites.
La question du cumul intégral du RSA
« socle »
Dans l'état actuel du droit, une personne percevant le RSA « socle » qui reprend un emploi bénéficie d'un cumul intégral du RSA « socle » et de ses revenus d'activité pendant une durée de trois mois . Ce mécanisme constitue une sorte de « sur-intéressement » temporaire. Il résulte d'une disposition règlementaire inscrite à l'article R. 262-12 du code de l'action sociale et des familles qui prévoit : « Les ressources mentionnées à l'article R. 262-8 [soit les revenus d'activité et les indemnités journalières] ne sont pas prises en compte pendant les trois premiers mois suivant le début ou la reprise d'un emploi, d'une formation ou d'un stage. La durée cumulée de bénéfice des dispositions du premier alinéa, pour chaque personne au sein du foyer, ne peut excéder quatre mois par période de douze mois ». La Cour des comptes , dans son rapport public de 2013 75 ( * ) , recommandait la suppression de ce dispositif , en rappelant qu'il ne correspond pas à la logique du RSA « activité », fondé sur la suppression des effets de seuil lors de la reprise d'un emploi. En effet, à la fin de cette période de trois mois de cumul, le passage au RSA « activité » induit une perte relative de revenu pour l'allocataire. Selon la Cour, « il s'ensuit, pour certains allocataires, une mauvaise compréhension du RSA « activité » qui apparait comme un intéressement dégradé » 76 ( * ) . La mise en place de la prime d'activité ne modifie pas cette possibilité de cumul . Il sera donc possible, pour une personne reprenant un emploi, de bénéficier intégralement du montant de son RSA « socle » pendant trois mois et de faire parallèlement une demande de prime d'activité dès son premier mois d'activité. Ceci conduit à brouiller les objectifs , pourtant différents, de ces deux prestations. En effet, comme le Gouvernement l'a affirmé à plusieurs reprises, la future prime d'activité a pour vocation à apporter un soutien financier à la reprise ou au maintien dans l'emploi. Pour aller dans le sens de cet engagement, il conviendrait de distinguer le RSA « socle », un minimum social versé en l'absence de revenus d'activité, et la future prime d'activité, versée dès le premier euro gagné afin d'apporter un soutien financier aux travailleurs modestes. Il serait donc opportun de mettre fin au cumul intégral entre RSA « socle » et revenus d'activité pendant trois mois , afin que seule la prime d'activité constitue la mesure d'intéressement lors de la reprise d'un emploi. |
2. Une prestation dont les modalités d'attribution et de mise en oeuvre demeurent complexes
Bien que dans le cadre de la réforme proposée, des éléments de simplification soient mis en avant, comme l'instauration d'un effet « figé » de trois mois ou encore la simplification de la base des ressources prises en compte pour le calcul de la prime d'activité, il apparait que cette nouvelle prestation, successeur du RSA « activité » et de la PPE, demeure, par de nombreux aspects, complexe .
Ainsi, la formule de calcul envisagée par le Gouvernement et développé supra est d'une telle complexité, sous l'effet à la fois de son caractère familialisé et individualisé, qu'elle fait l'objet d'une définition législative pour le moins illisible . Il sera vraisemblablement indispensable pour la personne susceptible d'être éligible à la prime d'user du simulateur qui devrait être mis à disposition sur Internet pour connaître ses droits.
Ensuite, même si les droits sont « figés » pour trois mois et la base de ressources simplifiée, les bénéficiaires doivent toujours fournir chaque trimestre des documents justifiant de leurs revenus professionnels . Les CAF auront, de leur côté, nécessairement un important travail de vérification et d'instruction des demandes, ce qui pourrait également s'avérer être un exercice difficile. Le risque d'indus reste a priori élevé . En outre, si des échanges d'information entre la DGFiP et les CAF sont prévus, ils ne seront pas immédiatement automatisés.
Enfin, le fait de différencier désormais les bases de ressources applicables au RSA et à la prime d'activité est également source de complexité .
Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, il est également permis de douter du fait que le taux de recours de 50 % soit rapidement atteint, ainsi que l'espère le Gouvernement .
Comparaison des « bases ressources » du RSA et de la prime d'activité
RSA |
Prime d'activité |
|||||
Ressources faisant l'objet d'un abattement de 62% |
Ressources prises en compte à 100% |
Ressources non prises en compte |
Ressources faisant l'objet d'un abattement de 62% |
Ressources prises en compte à 100% |
Ressources non prises en compte |
|
Traitements et salaires |
X |
X |
||||
Rémunération des stages de formation professionnelle |
X |
X |
||||
Rémunération dans le cadre d'un chèque emploi service universel (CESU) |
X |
X |
||||
Indemnités journalières de maternité, paternité, d'adoption |
X |
X |
||||
Indemnités journalières de maladie, accident du travail, maladie professionnelle des 3 premiers mois |
X |
X |
||||
Indemnités de chômage partiel |
X |
X |
||||
Revenus des travailleurs non salariés |
X |
X |
||||
Rémunération des aidants familiaux faisant partie du foyer du bénéficiaire |
X |
X |
||||
Indemnités journalières de maladie, accident du travail, maladie professionnelle, à partir du 4 ème mois |
X |
X |
||||
Indemnités de chômage |
X |
X |
||||
Rémunération garantie perçue en ESAT |
X |
X |
||||
Pensions alimentaires |
X |
X |
||||
Allocation journalière d'accompagnement de personne en fin de vie |
X |
X |
||||
Rentes viagères imposables (retraites, etc .) |
X |
X |
||||
Dédommagement versé aux victimes de l'amiante |
X |
X |
||||
Libéralités |
X |
X |
||||
Revenus fonciers |
X |
X |
||||
Revenus de valeurs mobilières (actions, obligations) |
X |
X |
||||
Capitaux placés non producteurs de revenus |
X |
X |
||||
Capitaux non placés et non producteurs de revenus |
X |
X |
||||
Biens immobiliers non loués |
X |
X |
||||
Avantages en nature |
X |
X * |
||||
Forfait logement |
X |
X |
||||
Prestations familiales et sociales incluses dans la « base ressources » (allocations familiales, etc. ) |
X |
X |
||||
Prestations familiales exclues de la « base ressources » |
X |
X |
* Autres que le logement mis à disposition à titre gratuit.
NB : Les lignes grisées identifient les ressources qui sont différemment prises en compte pour le calcul du RSA et de la prime d'activité.
Source : ministère des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes
Votre rapporteur pour avis considère qu'une réforme plus ambitieuse des prestations sociales aurait pu conduire à aligner les bases de ressources en les rapprochant par ailleurs de l'assiette fiscale.
D. UNE GRANDE INCERTITUDE SUR LE COÛT RÉEL DU DISPOSITIF
Comme l'indique l'étude d'impact annexée au projet de loi, le montant prévu de la dépense associée à la prime d'activité correspond au budget consacré au RSA « activité » et à la prime pour l'emploi en 2014, soit 4,1 milliards d'euros (en tenant compte de l'inflation entre 2014 et 2016). Il intègre le montant de la prime d'activité versée aux jeunes actifs éligibles entre 18 et 24 ans, estimé à environ 800 millions d'euros.
Ce montant correspond à une hypothèse de taux de recours à 50 % , pour une dépense correspondant à 66 % de la masse financière potentielle 77 ( * ) , en supposant que ce taux soit atteint dès le 1 er janvier 2016. Pour justifier cette cible de 50 %, soit un niveau bien plus élevé que l'actuel taux de recours du RSA « activité » (estimé à 32 %), l'étude d'impact mentionne le dispositif britannique « working tax credit », comparable à la prime d'activité, et dont le taux de recours serait de 61 %. Surtout, le Gouvernement met en avant plusieurs mesures destinées à favoriser le recours à cette prestation : la simplification des démarches par rapport au RSA « activité » (cf. supra ), la déconnection de la prime d'activité du RSA « socle », ainsi que la campagne d'information qui sera menée auprès des anciens bénéficiaires de la PPE lors de l'envoi de l'avis d'imposition aux contribuables. Le basculement automatique des actuels bénéficiaires du RSA « activité » vers la prime d'activité est également un élément devant crédibiliser cette hypothèse.
Il est prévu qu'à l'instar d'autres prestations sociales, la prime d'activité fasse l'objet d'une période de montée en charge assez rapide . Selon l'étude d'impact, le coût de la prime d'activité s'établirait ainsi à 4,2 milliards d'euros en 2017 et à 4,3 milliards d'euros en 2018 .
Pourtant, plusieurs incertitudes demeurent quant au coût réel que représentera la prime d'activité en 2016 , dont le financement repose intégralement sur des crédits budgétaires de l'État.
D'une part le taux de recours retenu par le Gouvernement, qui conditionnera le montant qui sera inscrit en loi de finances pour financer la prime d'activité, parait incertain , en l'absence d'expérimentation locale du dispositif. L'incertitude porte en particulier sur le recours à la prime d'activité par les actuels bénéficiaires de la prime pour l'emploi.
D'autre part, la prime d'activité constituant une prestation de « guichet », il n'existera par définition aucun moyen de pilotage et de maîtrise de la dépense . Ainsi, si le taux de recours à la prime d'activité était inchangé par rapport à celui du RSA « activité », la dépense totale s'élèverait en 2016 à 3,3 milliards d'euros. En revanche, en cas de montée en charge plus rapide que prévue, le montant pourrait être supérieur à 4,1 milliards d'euros. Il existe donc un aléa important sur le coût réel que représentera ce dispositif.
Afin de réaliser un premier bilan de la prime d'activité, la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale a inséré dans le projet de loi, en première lecture, un nouvel article 28 tendant à prévoir la remise par le Gouvernement d'un rapport au Parlement relatif à l' évaluation de la prime d'activité , dix-huit mois après son entrée en vigueur. La commission des finances a adopté, à ce même article, un amendement de votre rapporteur pour avis visant à préciser le contenu de ce rapport, afin de permettre un meilleur contrôle du coût budgétaire de ce dispositif 78 ( * ) .
Il conviendra en tout état de cause de demeurer vigilant , au cours des prochaines années, sur le coût engendré par cette nouvelle prestation dans le cadre de l'examen, en loi de finances, des crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ».
Décision de votre commission : votre commission a émis un avis favorable à l'adoption de cet article ainsi modifié.
ARTICLE 25 (Art. L. 262-1 à L. 262-4, L. 262-9, L. 262-10, L. 262-24, L. 262-25, L. 262-27-1, L. 262-28, L. 262-38, L. 262-40, L. 262-45, L. 262-46, L. 262-53 et L. 522-12 du code de l'action sociale et des familles) Suppression du RSA « activité » et mise en cohérence législative
Commentaire : le présent article procède à la suppression du volet « activité » du revenu de solidarité active (RSA) et à une mise en cohérence de certaines dispositions relatives au RSA « socle ».
I. LE DISPOSITIF PROPOSÉ
Le présent article vise à opérer les modifications législatives nécessaires au sein du code de l'action sociale et des familles , afin de supprimer le volet « activité » du revenu de solidarité active (RSA) et de mettre en cohérence certaines dispositions relatives au RSA « socle », consécutivement à la création de la prime d'activité à l'article 24 du projet de loi.
Il opère ainsi plusieurs modifications au chapitre II du titre VI du livre II du code de l'action sociale et des familles, en particulier :
- il supprime l'objectif du RSA mentionné à l'article L. 262-1 d'inciter à l'exercice d'une activité professionnelle pour le restreindre au fait d'« assurer à ses bénéficiaires des moyens convenables d'existence, de lutter contre la pauvreté et de favoriser l'insertion sociale et professionnelle » ;
- il supprime à l'article L. 262-2 la notion de « revenu garanti » , associée au RSA « activité », ainsi que ses modalités de calcul ;
- il supprime les dispositions à l'article L. 262-24 confiant au Fonds national des solidarités actives (FNSA) le financement du RSA « activité » et prévoit que celui-ci finance les charges de gestion de la prime d'activité supportées par les caisses d'allocations familiales (CAF) et de mutualité sociale agricole (MSA).
Par ailleurs cet article insère un nouvel article L. 262-27-1 dans le code de l'action sociale et des familles qui prévoit que tout bénéficiaire du RSA qui exerce, prend ou reprend une activité professionnelle est réputé avoir sollicité le bénéfice de la prime d'activité, sauf mention contraire de sa part. Cet article permet que les actuels bénéficiaires du RSA « activité » n'aient pas à faire une nouvelle demande pour bénéficier de la prime d'activité lors de son entrée en vigueur.
L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.
II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES
En ce qu'il se contente de tirer les conséquences de la création de la prime d'activité en supprimant le RSA « activité » et en mettant en cohérence les dispositions relatives au RSA « socle », cet article ne présente pas d'enjeu majeur .
Il permet aux bénéficiaires du RSA « activité » de ne pas devoir faire une nouvelle demande lors de l'entrée en vigueur de la prime d'activité, ce qui est indispensable pour faciliter la transition entre l'ancienne et la nouvelle prestation, et éviter une diminution du taux de recours.
Décision de la commission : votre commission a émis un avis favorable à l'adoption de cet article sans modification.
ARTICLE 26 (Art. 28 et 30 de la loi n° 2008-1249 du 1er décembre 2008 généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d'insertion, art. 4 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, art. L. 115-2, L. 121-7, L. 131-2, L. 14-10-6, L. 262-29, L. 262-32 et L. 262-33 du code de l'action sociale et des familles, art. L. 114-16-2, L. 141-17, L. 167-3, L. 412-8, L. 523-1, L. 553-1, L. 553-2, L. 821-5-1, L. 835-3, L. 861-2 et L. 865-1 du code de la sécurité sociale, art. L. 3252-3, L. 5132-3-1, L. 5134-30-2, L. 5134-72-2 et L. 6325-1 du code du travail, art. L. 3334-6-1, L. 3334-16-2 et L. 3335-4 du code général des collectivités territoriales, art. 81 du code général des impôts, art. L. 98 A du livre des procédures fiscales, art. L. 331-2 et L. 334-5 du code de la consommation, art. L. 351-11 du code de la construction et de l'habitat, art. L. 120-11 et L. 120-21 du code du service national, art. 14 de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale, art. 13-2 (nouveau) de l'ordonnance n° 77-1102 du 26 septembre 1977 portant extension et adaptation au département de Saint-Pierre-et-Miquelon de diverses dispositions relatives aux affaires sociales) Coordinations et dispositions diverses
Commentaire : le présent article procède aux coordinations et adaptations des codes et textes législatifs existants afin de tenir compte de la création de la prime d'activité. Il fixe également le régime fiscal de la prime d'activité : tout comme le RSA « activité », celle-ci sera exonérée d'impôt sur le revenu et de contribution sociale généralisée, mais sera soumise à la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS) .
I. LE DISPOSITIF PROPOSÉ
Le présent article procède à diverses coordinations afin de tirer les conséquences de la suppression du RSA « activité » et de la création de la prime d'activité dans le code de l'action sociale et des familles, le code de la sécurité sociale, le code du travail, le code des collectivités territoriales, le code général des impôts, le code de la consommation, le code de la construction et de l'habitat et le code du service national. Il modifie également loi n° 2008-1249 du 1 er décembre 2008 généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d'insertion et l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale.
Trois adaptations méritent plus particulièrement l'attention de votre commission des finances :
- le VI rétablit, à l' article 81 du code général des impôts listant les revenus exonérés d'impôt sur le revenu , un 9° quinquies faisant référence à la prime d'activité créée par l'article L. 841-1 du code de la sécurité sociale. Pour mémoire, l'exonération de l'actuel RSA « activité » et du RSA socle est prévue par le 9° de l'article 81 précité. La mention des « allocations, indemnités et prestations servies, sous quelque forme que ce soit, par l'État, les collectivités et les établissements publics, en application des lois et décrets d'assistance et d'assurance » englobe en effet les deux volets du RSA.
De plus, le 3° du III de l'article L. 136-2 du code de la sécurité sociale prévoyant que les revenus mentionné au 9° quinquies de l'article 81 du code général des impôt sont exclus de l'assiette de la contribution sociale généralisée (CSG) sur les revenus d'activité et de remplacement, la prime d'activité est également exonérée de CSG ;
- le VII ajoute la prime d'activité à la liste des prestations mentionnées à l'article L. 98 A du livre des procédures fiscales. Cet article impose aux organismes débiteurs de certaines prestations sociales (allocation pour adulte handicapé, allocation supplémentaire d'invalidité et revenu minimum d'insertion) de transmettre à l'administration fiscale , avant le 31 décembre de chaque année, la liste des personnes auxquelles l'allocation a été attribuée ou supprimée au cours de l'année précédente. Il supprime également la référence, obsolète, au revenu minimum d'insertion ;
- le XI prévoit d' assujettir la prime d'activité à la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS) , comme c'est actuellement le cas pour le RSA « activité ».
II. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
À l'initiative du rapporteur, Christophe Sirugue, quatre amendements ont été adoptés, avec un avis favorable du Gouvernement :
- trois amendements visent à remplacer des références au RSA « socle » , qui n'existera plus en tant que tel à l'issue de la suppression du volet « activité » du RSA, par une simple référence au RSA ;
- un amendement vise à préciser les références aux articles du code pénal relatifs aux faux et usages de faux au 1° du III relatif aux sanctions applicables en cas de fraude dans l'obtention de la prime d'activité.
Deux amendements , adoptés à l'initiative du rapporteur pour avis de la commission des finances, Dominique Lefebvre, avec un avis favorable du Gouvernement, modifient le VII afin de supprimer la référence à la prime d'activité à l'article L. 98 A du livre des procédures fiscales . La transmission de la liste des bénéficiaires prévue par cet article, utilisée par l'administration fiscale pour identifier les foyers éligibles à certaines mesures fiscales, serait en effet inutile pour les bénéficiaires de la prime d'activité.
Enfin, à l'initiative du Gouvernement, le présent article a été complété par un XII prévoyant l' application de la prime d'activité à Saint-Pierre-et-Miquelon .
III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES
Le présent article propose de calquer le régime fiscal de la prime d'activité sur celui du RSA « activité » : il prévoit ainsi une exonération d'IR et de CSG mais un assujettissement à la CRDS. Cette différence entre IR et CSG, d'une part, qui sont les deux grandes impositions sur le revenu des personnes physiques en France, et CRDS d'autre part, tient à la conception de la CRDS comme un prélèvement obligataire temporaire, qui a vocation à être payé par tous, tant que subsiste une dette de la sécurité sociale. À ce titre, la CRDS a une assiette plus large que celle de la CSG (elle inclut notamment les prestations familiales). Toutefois, il convient de signaler que le RSA « socle » est exonéré à la fois d'IR, de CSG et de CRDS.
À titre personnel, votre rapporteur pour avis considère que l'ensemble des revenus d'activité et de remplacement, y compris les prestations sociales, devraient en principe être soumis à l'IR et à la CSG.
Par ailleurs, le coût total de la prime d'activité étant estimé à plus du double de celui du RSA « activité », son assujettissement à la CRDS entraînera mécaniquement une hausse des recettes de cette contribution, affectée à la Caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES). L'étude d'impact annexée au présent projet de loi ne précise toutefois pas le surcroît de recettes attendu.
Décision de la commission : votre commission a émis un avis favorable à l'adoption de cet article sans modification.
ARTICLE 27 Entrée en vigueur et application à Mayotte
Commentaire : le présent article fixe la date d'entrée en vigueur des articles 24 à 26 créant la prime d'activité au 1 er janvier 2016. Il prévoit également que les bénéficiaires, au 1 er janvier 2015, du RSA seront réputés avoir déposé une demande de prime d'activité. Enfin, il habilite le Gouvernement à prendre par ordonnance, dans un délai de six mois suivant la promulgation de la présente loi, les mesures permettant de mettre en oeuvre la prime d'activité à Mayotte.
I. LE DISPOSITIF PROPOSÉ
Selon le I du présent article, les articles 24 à 26 instaurant la prime d'activité entrent en vigueur au 1 er janvier 2016 . Cette date est cohérente avec la suppression de la prime pour l'emploi (PPE) 79 ( * ) , à compter de l'imposition des revenus perçus en 2015. Cette dernière cessera donc de produire ses effets à la fin de l'année 2015 (au titre des revenus perçus en 2014).
Par souci de simplification et d'allègement des démarches pour les bénéficiaires, le II prévoit que les personnes bénéficiant du revenu de solidarité active (RSA) au 31 décembre 2015 sont réputées avoir déposé une demande de prime d'activité. Cette mesure vise à garantir le transfert « automatique » des actuels titulaires du RSA « activité » vers la prime d'activité , dans la mesure où ces derniers remplissent en principe les conditions d'éligibilité au nouveau dispositif. Elle vient en complément de l'article L. 262-27-1 du code de l'action sociale et des familles , créé par l'article 25 du présent projet de loi, selon lequel tout titulaire du RSA exerçant, entamant ou reprenant une activité professionnelle est réputé avoir formulé une demande de prime d'activité, sauf mention contraire de sa part.
Le présent article fait référence aux bénéficiaires du RSA, sans distinguer le RSA « socle » du RSA « activité ». La prime d'activité n'étant toutefois ouverte qu'aux travailleurs ayant perçu des revenus tirés d'une activité professionnelle, elle concernera uniquement les personnes qui auraient, en théorie, bénéficié du RSA « activité » en 2016.
Enfin, le III habilite le Gouvernement à adapter par voie d' ordonnance , dans un délai de dix-huit mois à compter de la publication de la loi, la mise en oeuvre de la prime d'activité dans le département de Mayotte . Jusqu'à l'entrée en vigueur de cette ordonnance, le RSA « activité » continue de s'appliquer à Mayotte.
II. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
À l'initiative du Gouvernement, un amendement a été adopté dans le texte établi par la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale visant à créer une ouverture rétroactive du droit à la prime d'activité au 1 er janvier 2016 pour toutes les personnes ayant déposé leur demande avant le 1 er avril de cette même année. Les personnes déposant leur dossier de demande de prime d'activité en retard ne seront donc pas pénalisées. Cette disposition transitoire vise à faciliter le basculement des bénéficiaires de la PPE vers la prime d'activité et, ainsi, à encourager le recours à la nouvelle prime.
En séance publique, cinq amendements supplémentaires ont été adoptés au présent article :
- quatre amendements du rapporteur , Christophe Sirugue , ayant reçu un avis favorable du Gouvernement, dont trois amendements rédactionnels et un amendement prévoyant que les indus non recouvrés, les rappels de droits et les frais de contentieux relatifs au RSA « activité » continueront à être pris en charge par le fonds national des solidarités actives (FNSA) après la suppression du RSA « activité ». Cet ajout a pour but d'éviter que les départements, qui financent le RSA « socle », n'aient à assumer les frais liés au RSA « activité » lorsque la distinction entre les deux volets du RSA aura disparu dans les textes législatifs et réglementaires ;
- un amendement de nos collègues députés Monique Orphé et Boinali Said réduisant le délai d'adoption de l'ordonnance relative à l'adaptation de la prime d'activité à Mayotte de dix-huit à six mois . Cet amendement a reçu un avis favorable du Gouvernement.
III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES
Certaines dispositions du présent article visent à répondre à quelques-unes des difficultés liées à la transition entre l'ancien système et la nouvelle prime d'activité , qui doit entrer en vigueur dans moins de sept mois. Le basculement automatique des actuels bénéficiaires du RSA « activité » vers la prime d'activité apparaît comme une mesure de bon sens afin de minimiser les charges, tant pour les bénéficiaires que pour les caisses d'allocations familiales (CAF).
Il n'en demeure pas moins que l'enjeu essentiel réside dans la mise en place par la Caisse nationale d'allocations familiales (CNAF), dans des délais très brefs, d'un nouveau système d'information adapté à l'instruction et à la gestion de la prime. Selon les informations transmises à votre rapporteur pour avis, dans un premier temps, un simulateur sera mis en place d'ici septembre 2015, puis le nouveau logiciel de calcul de la prestation sera utilisé à compter de janvier 2016. L'intégration en temps réel des données fiscales détenues par la direction générales des finances publiques (DGFiP) n'est prévue que pour la fin de l'année 2016.
Enfin, il apparait logique que l'État, via le FNSA, assume les charges liées aux indus non recouvrés, aux rappels de droits et aux frais de contentieux du RSA « activité », qui pourront s'étaler sur environ deux ans. La correction de cet oubli du projet de loi initial est donc la bienvenue.
Décision de la commission : votre commission a émis un avis favorable à l'adoption de cet article sans modification.
ARTICLE 28 (nouveau) Rapport d'évaluation de la prime d'activité
Commentaire : le présent article sollicite du Gouvernement la remise d'un rapport au Parlement permettant de dresser un bilan de la prime d'activité, dix-huit mois après son entrée en vigueur.
I. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
Cet article a été inséré par la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale, avec un avis favorable du Gouvernement. Il vise à demander au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport d'évaluation de la prime d'activité , dix-huit mois après son entrée en vigueur, c'est-à-dire au 1 er juillet 2017 .
Ce rapport devra dresser un premier bilan de la prime d'activité sur les aspects suivants : le taux de recours à la prime d'activité, son coût budgétaire, le nombre de ses bénéficiaires, la ventilation des bénéficiaires par décile de niveau de vie, ses effets sur le taux de pauvreté monétaire, la situation des bénéficiaires sur le marché de l'emploi, notamment la durée moyenne des contrats des bénéficiaires salariés, ainsi que l'impact de la création de la prime d'activité sur les femmes et leurs parcours d'insertion.
Un amendement présenté en séance par notre collègue députée Sandrine Mazetier et adopté avec un avis favorable du Gouvernement prévoit que ce rapport mesure en outre l'impact de la création de la prime d'activité sur les femmes et leurs parcours d'insertion, après consultation du Conseil supérieur de l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et du Haut conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes. Cet amendement prévoit également que toutes les évaluations contenues dans ce rapport soient sexuées , notamment afin de connaitre la proportion de femmes bénéficiaires de la prime d'activité et les montants correspondants, ainsi que leurs parcours d'insertion.
II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES
Dans la même logique que ce qui a prévalu pour le revenu de solidarité active (RSA), dont l'évaluation a été réalisée sous l'égide du comité national d'évaluation du RSA trois ans après la création de cette prestation 80 ( * ) , cet article prévoit dresser un bilan de la prime d'activité.
L'évaluation des dispositifs sociaux au regard de leurs objectifs est un impératif , afin de s'assurer qu'ils atteignent leurs objectifs en termes de public ciblé, de montant des versements ou de taux de recours. Une telle évaluation est a fortiori nécessaire s'agissant d'une prestation qui n'a pas seulement vocation à soutenir le pouvoir d'achat des travailleurs modestes, mais qui doit aussi avoir un effet incitatif sur le maintien ou le retour à l'emploi.
À l'initiative de son rapporteur pour avis, votre commission a adopté un amendement visant à préciser les informations relatives au coût de la prime d'activité , contenues dans le rapport. Ce dernier devra ainsi analyser l' impact de la part familialisée, de la bonification individuelle et des autres composantes de la prime sur le coût total de la prime d'activité ainsi que l' « effet volume », lié à l'évolution du nombre de bénéficiaires .
En cas de dépassement important de l'enveloppe budgétaire prévue pour les trois années à venir (entre 4,1 milliards d'euros en 2016 et 4,3 milliards d'euros en 2018), la question de la révision des conditions d'attribution de la prime et de son barème devra en effet être posée. Les précisions apportées par cet amendement pourraient alors s'avérer utiles pour mieux comprendre les raisons d'un éventuel dépassement et identifier les ajustements à opérer , en vue de contenir son coût, le cas échéant.
Décision de la commission : votre commission a émis un avis favorable à l'adoption de cet article ainsi modifié.
ARTICLE 29 (nouveau) Rapport concernant l'exclusion des pensions alimentaires des ressources prises en compte pour le calcul de la prime d'activité
Commentaire : le présent article demande au Gouvernement la remise d'un rapport sur les ressources incluses dans le calcul de la prime d'activité et sur la possibilité d'en exclure les pensions alimentaires .
I. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
Cet article a été inséré en séance publique par l'Assemblée nationale, à l'initiative de notre collègue députée Sandrine Mazetier, avec un avis favorable du Gouvernement. Il vise à demander au Gouvernement la remise , dans un délai de quatre mois suivant la promulgation de la loi, d' un rapport présentant les ressources prises en compte dans le calcul de la prime d'activité « à l'exception de la contribution à l'éducation et à l'entretien de l'enfant en raison de sa nature particulière ».
Sandrine Mazetier a indiqué en séance publique qu'il s'agissait « d'un amendement d'appel, visant à ouvrir le débat sur la prise en compte de ce que l'on appelle en français courant la pension alimentaire . Nous sommes plutôt hostiles à une telle prise en compte dans la mesure où elle réduirait voire annulerait l'effet de la prime d'activité pour les femmes qui élèvent seules les enfants nés d'un couple désormais divorcé. Elles seraient pénalisées puisque le montant qui pourrait leur être versé au titre de la prime d'activité s'en trouverait réduit. »
Le 4° de l'article L. 842-4 du présent projet de loi prévoit en effet que « les autres revenus [que les revenus professionnels, les revenus de remplacement des revenus professionnels, l'avantage en nature que constitue la disposition d'un logement et les prestations et aides sociales] soumis à l'impôt sur le revenu » sont inclus dans la base des ressources de la prime d'activité . Or les pensions alimentaires reçues d'un ex-conjoint pour l'entretien de l'enfant sont soumises à l'impôt sur le revenu, dans la limite du montant qui peut être déduit par le conjoint versant la pension, et avec un abattement de 10 %.
II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES
Si le versement irrégulier des pensions alimentaires peut soulever des difficultés pour certaines familles monoparentales, leur exclusion de la base des ressources de la prime d'activité n'apparaît pas être une bonne solution. Elle soulève en effet des questions d'équité entre allocataires , qui, à niveau de revenu égal, percevraient une prime d'un montant différent. De plus, la prime d'activité , à la fois familialisée et individualisée, est censée tenir compte de la situation spécifique des familles monoparentales qui devraient figurer parmi les principaux bénéficiaires de la réforme.
Enfin, l'exclusion des pensions alimentaires de la base des ressources, en augmentant le montant de prime perçue par les parents élevant seuls leur(s) enfant(s), aurait un coût non négligeable 81 ( * ) . Entendue par la commission des affaires sociales du Sénat le 3 juin 2015 sur le présent projet de loi, la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, Marisol Touraine, a indiqué que le surcoût lié à l'exclusion des pensions alimentaires de l'assiette des ressources prises en comptes pour calculer la prime « pourrait s'établir entre 330 et 350 millions d'euros par an environ, ce qui implique nécessairement une révision du barème ».
Décision de la commission : votre commission a émis un avis favorable à l'adoption de cet article sans modification.
EXAMEN EN COMMISSION
Réunie le mardi 9 juin 2015, sous la présidence de Mme Michèle André, présidente, la commission a examiné le rapport pour avis de M. Albéric de Montgolfier, rapporteur, sur le projet de loi n° 476 (2014-2015) relatif au dialogue social et à l'emploi.
Mme Michèle André , présidente . - Nous examinons ce matin deux textes dont notre commission est saisie pour avis, afin de permettre à nos rapporteurs de participer, demain, à la réunion de chacune des commissions saisies au fond.
M. Albéric de Montgolfier , rapporteur pour avis . - Le projet de loi relatif au dialogue social et à l'emploi, présenté le 22 avril dernier en Conseil des ministres, a pour objet principal de réformer le dialogue social dans les entreprises. Il comporte également une partie relative au régime d'assurance chômage des intermittents du spectacle ainsi qu'un volet instaurant la prime d'activité, correspondant au titre IV du projet de loi.
La prime d'activité doit remplacer, à compter du 1 er janvier 2016, le volet « activité » du revenu de solidarité active (RSA) et la prime pour l'emploi (PPE), dont nous avons approuvé la suppression à la fin de l'année dernière dans le cadre de la loi de finances rectificative pour 2014. Le Gouvernement a prévu une enveloppe de 4,1 milliards d'euros pour cette nouvelle prime, qui sera intégralement financée par le budget de l'État. Il est donc apparu légitime que la commission des finances du Sénat se saisisse pour avis de ce titre IV - comme l'a fait la commission des finances de l'Assemblée nationale. À l'origine, il comprenait quatre articles - les articles 24 à 27 - ; il en compte désormais six, à l'issue de l'examen en première lecture par l'Assemblée nationale, achevé le 29 mai dernier et qui n'a apporté que peu de modifications au texte présenté par le Gouvernement.
La prime d'activité a vocation à pallier les défauts des dispositifs actuels de soutien financier à l'activité des travailleurs pauvres ou à revenus modestes.
En premier lieu, la prime pour l'emploi est un crédit d'impôt accordé sur une base individuelle à chaque membre du foyer fiscal percevant des revenus d'activité professionnelle compris entre 0,3 et 1,25 fois le SMIC. Elle est largement critiquée en raison de son manque de ciblage, du décalage d'au moins un an entre la perception des revenus et le versement de la prime - lié à l'imposition sur le revenu - et de la complexité de son articulation avec le RSA « activité » - le montant de RSA « activité » versé l'année n étant déduit de la PPE perçue l'année n+1 .
En second lieu, le RSA « activité » est une prestation sociale familialisée, versée dès le premier euro d'activité, à partir de 25 ans, jusqu'à un certain seuil de revenu d'activité. Il correspond à 1,15 SMIC pour une personne seule. En 2010, dans le cadre d'un rapport d'information, j'avais eu l'occasion, avec des collègues de la commission des finances et de la commission des affaires sociales, de souligner un certain nombre de ses dysfonctionnements. De fait, son efficacité est contestée en raison d'un faible taux de recours - environ 32 % -, dû à la complexité du fonctionnement de la prestation, dont le versement mensuel génère de nombreux indus et récupérations, ainsi qu'au caractère « stigmatisant » de son lien avec le RSA « socle ».
Un consensus semble donc exister sur la nécessité de modifier ces deux aides. Dès juillet 2013, notre collègue député Christophe Sirugue, a remis au Premier ministre de l'époque, Jean-Marc Ayrault, un rapport esquissant des scénarios de réforme. La question du coût semble toutefois avoir conduit l'exécutif à repousser la mise en oeuvre de ces scénarios.
La censure par le Conseil constitutionnel de la réduction dégressive de cotisations salariales, en août 2014, a conduit le Président de la République à annoncer la « fusion » de la PPE et du RSA « activité ». Une première étape a été franchie en décembre dernier avec la suppression de la PPE - qui a d'ailleurs suscité très peu de débats.
En quoi consiste la prime d'activité proposée par le Gouvernement ?
L'exposé des motifs la présente comme une prestation sociale, correspondant à l'actuel RSA « activité » auquel viennent s'ajouter des bonus individuels pour les travailleurs composant le foyer et gagnant plus de 0,5 SMIC. Ces bonus se concentrent principalement sur les travailleurs dont la rémunération est comprise entre 0,8 et 1,2 SMIC.
Cette prestation unique, qui sera versée dès le premier euro d'activité, comprendra à la fois une part familialisée et une part individualisée. Elle sera ouverte à tous les travailleurs, y compris aux jeunes entre 18 et 25 ans.
Selon le Gouvernement, la prime d'activité a donc vocation à opérer « un compromis entre les deux dispositifs qu'elle remplace. Plus ciblée que la PPE, elle s'adresse à un public plus large que celui du RSA « activité », notamment aux jeunes actifs ».
L'étude d'impact annexée au projet de loi indique que la réforme s'inscrit également dans une « démarche de simplification », à la fois pour les bénéficiaires et pour les caisses d'allocations familiales (CAF) qui géreront la prime. En particulier, l'introduction d'un « effet figé » de trois mois, durant lesquels la prime ne peut varier, même en cas d'évolution des revenus d'activité, devrait en faciliter la gestion par rapport à l'actuel RSA « activité ». Il est également prévu d'exclure de la base des ressources prises en compte dans le calcul de la prime certains revenus, comme les avantages en nature, les capitaux non producteurs de revenus ou les revenus du capital non imposables, afin d'alléger les démarches des bénéficiaires.
Il n'en demeure pas moins que la nouvelle prestation demeure extrêmement complexe et peu lisible. En effet, le projet de loi se borne à définir le cadre général du dispositif, l'essentiel de ses règles de fonctionnement et de ses paramètres devant être fixés par voie réglementaire. D'un point de vue financier, le projet de loi précise toutefois clairement que la prime d'activité sera financée par le budget de l'État. L'enveloppe de 4,1 milliards d'euros prévue pour l'année 2016 représente un effort supplémentaire de 300 millions d'euros comparé au coût total qu'auraient représenté, en 2016, le RSA « activité » et la PPE. Cette estimation est construite à partir de l'hypothèse d'un taux de recours à la prime de 50 % des personnes éligibles - contre 32 % actuellement pour le RSA « activité ». La dépense correspondant à un taux de recours théorique de 100 % est estimée à environ 6 milliards d'euros.
En raison du ciblage spécifique de la prime sur les travailleurs gagnant entre 0,8 et 1,2 SMIC et de sa base familialisée, la prime d'activité devrait faire environ 1,2 million de gagnants, concentrés parmi les 20 % des ménages les plus pauvres, et 820 000 perdants, correspondant à environ un quart des actuels bénéficiaires de la PPE, notamment les concubins imposés séparément qui percevaient la PPE sans qu'il soit tenu compte des revenus de leur conjoint. La réforme serait neutre pour environ la moitié des ménages concernés. J'appelle toutefois votre attention sur le fait que les chiffres communiqués par le Gouvernement intègrent non seulement les effets de la nouvelle prime d'activité mais aussi ceux de la réforme du « bas de barème » de l'impôt sur le revenu (IR), adoptée dans le projet de loi de finances pour 2015, qui a permis d'éviter 370 000 ménages perdants du fait de la suppression de la PPE.
Si donc un certain consensus semble se dégager autour de cette nouvelle prestation, qui paraît corriger certains défauts des dispositifs antérieurs - la prime d'activité répond donc au problème du saupoudrage et du décalage dans le temps de la PPE, tout en étant ouverte aux jeunes actifs -, il n'en faut pas moins souligner les limites et la vigilance qu'appellent certains points.
Premièrement, le caractère très vague du dispositif législatif et la complexité du mécanisme de la prime obligent le législateur à se reposer entièrement sur le pouvoir réglementaire, auquel il reviendra de préciser à partir de quand et selon quel rythme la prime sera versée, ainsi que de définir l'essentiel de ses paramètres de calcul et de ses modalités de fonctionnement. D'ailleurs, la complexité de la formule de calcul est telle que sa définition législative est pratiquement illisible.
Deuxièmement, la simplification proposée paraît bien relative. En effet, la formule de calcul de la prime d'activité, à la fois familialisée et individualisée, est si complexe qu'il sera toujours malaisé, voire impossible à un bénéficiaire d'anticiper, sans simulateur, le montant qui lui sera versé !
Ensuite, même légèrement simplifiée, la base des ressources prises en compte exigera des bénéficiaires qu'ils fournissent un certain nombre de justificatifs et des CAF un important travail de vérification et de gestion. Des échanges d'information entre la direction générale des finances publiques (DGFiP) et les CAF sont certes prévus mais ils ne seront pas immédiatement automatisés. On comprend mal que n'aient pas été retenues les bases fiscales figurant sur les certificats d'imposition ou de non-imposition.
En outre, compte tenu des modifications apportées, la base de la prime d'activité n'est désormais plus identique à celle applicable au RSA. L'exclusion de certaines aides dans la base des ressources prises en compte pour le calcul des prestations sociales est source de complexité. Je souscris pleinement au principe d'un dispositif unique, mais le Gouvernement manque d'ambition : au lieu de « bricoler » un dispositif existant, il aurait pu proposer une véritable réforme en alignant ces différentes bases de ressources et en les rapprochant de l'assiette fiscale.
Enfin, même si les CAF semblent prêtes à gérer cette nouvelle prestation, il est permis de penser que le calcul des primes d'activité sera pour elles un exercice complexe et que le risque d'indus restera élevé.
Troisièmement, l'ouverture de la prime d'activité aux étudiants et aux apprentis, par le biais d'un amendement du Gouvernement, adopté pour mettre en oeuvre l'annonce du Président de la République du 19 avril, soulève une question de principe : compte tenu des seuils d'éligibilité à la prime d'activité, ne risque-t-on pas d'encourager les étudiants qui ont une activité professionnelle à travailler davantage, au détriment de leurs études ? Alors que certains étudiants rencontrent des difficultés pour se loger et pour financer leurs études, il serait plus logique de se pencher sur la question des bourses que de leur attribuer le bénéfice de la prime d'activité, qui les poussera à travailler davantage plutôt qu'à s'investir dans leurs études. Cette extension du champ de la prime est également paradoxale au regard de son objectif principal : inciter et encourager l'exercice ou la reprise d'une activité professionnelle. Concrètement, très peu d'étudiants et d'apprentis devraient finalement pouvoir y prétendre, compte tenu des critères très restrictifs qui sont prévus. Je vous présenterai tout à l'heure un amendement qui tend à restreindre l'ouverture du bénéfice de la prime aux seuls apprentis répondant aux conditions de rémunération et de durée d'activité prévus par le texte.
Quatrièmement, alors que le Gouvernement assigne pour objectifs à cette prime l'encouragement à la reprise ou la poursuite d'activité et le soutien au pouvoir d'achat des travailleurs modestes, il est permis de douter de son impact sur l'emploi, surtout dans un contexte de chômage de masse. D'autant que les temps partiels, notamment les plus petits, sont souvent subis par les travailleurs. Ce n'est donc pas la prime d'activité qui, toute incitative qu'elle soit, fera qu'ils travailleront davantage mais bien une politique efficace de lutte contre le chômage.
Enfin, d'un point de vue financier, l'enveloppe prévue - 4,1 milliards d'euros - repose, comme cela a déjà été dit, sur des hypothèses de taux de recours et des paramètres de calcul difficiles à vérifier. Il conviendra d'être extrêmement vigilant, au cours des prochaines années, dans le cadre de l'examen des crédits de la mission « Solidarité », sur les coûts qui résulteront de cette nouvelle prestation.
Je ne suis pas un fanatique des rapports, mais puisque l'Assemblée nationale a prévu, à l'article 28, un rapport d'évaluation du Gouvernement, autant qu'il serve à quelque chose. Je vous proposerai donc un amendement visant à en compléter son contenu par des informations plus précises sur les déterminants de la dépense, qui pourraient se révéler utiles pour envisager des ajustements visant à contenir le coût de ce nouveau dispositif.
La nouvelle prime d'activité a le mérite de remplacer deux dispositifs par un seul en palliant certains de leurs défauts, mais reste une prestation sociale dont le mode de calcul et les modalités d'attribution demeurent très complexes. Il faut espérer que les hypothèses de travail et les simulations réalisées par le Gouvernement seront confirmées afin que l'enveloppe budgétaire initialement prévue soit respectée.
Sous réserve des amendements que je vous propose et tout en réaffirmant la nécessité d'être vigilant quant au coût de cette nouvelle prestation, je vous propose d'émettre un avis favorable à l'adoption du titre IV, qui comprend les articles 24 à 29 du projet de loi relatif au dialogue social et à l'emploi.
M. Serge Dassault . - Alors que la situation financière de la France est catastrophique, c'est une erreur fondamentale d'augmenter encore la dépense de 4 milliards d'euros. Le Gouvernement ne fait que créer des aides sociales, financées par l'emprunt, ce qui nous mettra dans une situation encore plus difficile dès que les taux d'intérêt vont augmenter. Les entreprises cherchent à embaucher en dessous du SMIC, qu'elles jugent trop élevé compte tenu des charges qu'elles payent. Cela pourrait représenter beaucoup d'emplois pour ceux qui n'ont pas de travail.
Vous n'avez rien dit des autres dispositions du texte.
M. Albéric de Montgolfier , rapporteur pour avis . - La saisine de la commission des finances ne porte que sur le titre IV, qui entre dans le champ de sa compétence. C'est la commission des affaires sociales qui est saisie au fond.
M. François Patriat . - On ne peut pas dire que notre rapporteur général fasse preuve d'un enthousiasme débordant en faveur de la prime d'activité. Pourtant, il est clair que l'un des freins à la reprise d'activité tient au fait que certains chômeurs ne gagnent rien à reprendre un emploi. Encourager les gens à aller chercher du travail est donc, en soi, une bonne mesure. J'entends vos objections sur la complexité qui marque encore ce dispositif, malgré un effort de simplification. Peut-être pourra-t-on faire des propositions pour le rendre plus lisible.
M. Richard Yung . - Je rappelle à Serge Dassault que le dispositif est à enveloppe constante : ces 4,1 milliards d'euros ne représentent pas une dépense supplémentaire. Ce Gouvernement s'emploie au contraire à réduire le déficit de l'État, ce qui ne se fait pas sans douleur. D'autres peuvent prétendre qu'ils feraient mieux et réduiraient les dépenses publiques de 100 milliards d'euros. C'est à voir...
Il est vrai, en revanche, que ce dispositif donne un nouvel exemple de la complexité à la française. Au motif d'éviter toute tricherie, on ne cesse de complexifier à outrance. Cela étant, reconnaissons à la mesure ce mérite qu'elle vise à encourager l'emploi, non pas directement, mais en jouant sur les effets de seuil, et qu'elle donne du pouvoir d'achat aux catégories les plus démunies. Or, chacun s'accorde sur la nécessité de relancer le pouvoir d'achat.
J'en viens à vos amendements. Vous envisagez de revenir sur l'ouverture aux étudiants et apprentis. J'avoue que j'étais plutôt favorable à cette initiative du Gouvernement. Sur le rapport, en revanche, je suis prêt à vous suivre.
M. Éric Bocquet . - Vous avez salué, monsieur le rapporteur pour avis, une mesure qui prend en compte les défauts des dispositifs antérieurs. Pouvez-vous préciser lesquels ? S'agissant du RSA « activité », on déplorait sa complexité, qui en fermait l'accès aux personnes qui manquaient d'un accompagnement. On sait aussi que des raisons psychologiques pouvaient arrêter les demandeurs : il est légitime qu'un salarié estime qu'un emploi rémunéré devrait suffire à assurer sa subsistance, sans avoir à être assisté. Ce qui pose la question du niveau des salaires. S'il était plus haut, un tel dispositif n'aurait plus lieu d'être. Il est vrai qu'une hausse généralisée des salaires supposerait de prendre certaines dispositions fiscales...
M. Albéric de Montgolfier , rapporteur pour avis . - Je peux rejoindre Serge Dassault sur un point. S'il est vrai que théoriquement, on reste, avec ce dispositif, à coût constant, par rapport à la dépense de PPE et de RSA « activité » enregistrée en 2014, il est clair que cette dépense n'est pas financée autrement que par la dette, sachant ce qu'il en est du déficit, sur lequel Didier Migaud, que nous avons entendu à plusieurs reprises, a été très clair.
Cette mesure ramènera-t-elle de l'activité ? Je ne le crois pas. L'idée initiale du RSA « activité » était sans doute bonne, puisqu'il s'agissait de parer aux effets de seuil. Une personne au RSA qui voudrait reprendre une activité n'y est pas incitée si elle n'y trouve aucun avantage financier. Or, le faible taux de recours montre que ce n'a pas été une réussite.
Pour simplifier le dispositif, il aurait fallu aller plus loin, et retenir les revenus qui figurent sur l'avis d'imposition ou de non-imposition au lieu de prévoir une déclaration à la CAF. Il est vrai que se pose la question du décalage entre le moment où les revenus sont déclarés et le versement de la prime, et c'est peut-être ce qui explique le débat actuel sur le prélèvement à la source. Je rappelle, également, que certaines prestations sociales sont prises en compte dans la base, tandis que d'autres, au nombre de vingt-quatre, ne le sont pas. Tout cela reste très complexe et crée encore des effets de seuil. Nous aurons ce débat en séance publique.
En quoi ce dispositif remédie-t-il aux défauts de ceux qu'il remplace, me demande Éric Bocquet. Il évite le saupoudrage qui caractérisait la prime pour l'emploi. Il introduit quelques simplifications, comme l'effet figé sur trois mois, qui limitera des indus. Mais quand le Gouvernement nous dit que la procédure sera totalement dématérialisée, et accompagnée d'un simulateur, je m'interroge : je ne suis pas sûr que tous les bénéficiaires potentiels aient accès à un ordinateur. Autre simplification : certaines ressources ne seront plus prises en compte dans la base, et le versement ne sera plus décalé d'une année. Il n'en reste pas moins que le principal défaut perdure : la formule de calcul reste d'une extrême complexité. La base de revenu prise en compte par la CAF ne sera pas le revenu fiscal de référence ; certaines prestations seront inclues dans la base mais pas d'autres. Cela reste une usine à gaz.
EXAMEN DES AMENDEMENTS
M. Albéric de Montgolfier , rapporteur pour avis . - En première lecture, l'Assemblée nationale a adopté un amendement du Gouvernement tendant à intégrer, sous certaines conditions, les élèves, les étudiants et les apprentis parmi les bénéficiaires de la prime d'activité.
Par exception au principe selon lequel ces personnes sont exclues du bénéfice de la prestation, au même titre que pour le RSA « activité » aujourd'hui, il est proposé qu'elles puissent y prétendre si elles justifient percevoir des revenus professionnels dont le montant serait fixé à 0,78 SMIC net mensuel, soit environ 900 euros, et exercer leur activité professionnelle depuis une période déterminée, qui devrait être de trois mois.
L'ouverture à ces publics semble pour le moins paradoxale dans la mesure où la prime, qui a pour principal objectif de faciliter et soutenir la reprise d'une activité professionnelle, serait alors servie à des étudiants conduits, en vertu du seuil retenu, à travailler sur des durées importantes, alors qu'ils devraient bien plutôt être encouragés à se consacrer à leurs études, pour les réussir. De fait, un étudiant payé au SMIC horaire devra travailler un nombre d'heures important, au détriment de ses études, pour bénéficier du dispositif.
Je ne méconnais pas les difficultés financières que peuvent rencontrer certains étudiants pour poursuivre leurs études, mais il semble que, plutôt que de les inciter à avoir une activité salariée, il serait préférable de s'appuyer sur un système de bourses sur critères sociaux efficace et une offre de logements adaptée aux besoins.
La mesure adoptée par l'Assemblée nationale propose ainsi, selon moi, une mauvaise réponse aux difficultés rencontrées par des étudiants qui, disposant de peu de moyens financiers, pourraient être incités à travailler davantage pour bénéficier de cette prime.
Le fait de cibler les étudiants percevant plus de 0,78 SMIC conduit, en effet, à soutenir ceux qui ont a priori un temps de travail hebdomadaire difficilement compatible avec leurs scolarité et susceptible de remettre en cause leurs chances de réussite, comme l'ont déjà démontré plusieurs études économiques.
Enfin, il ne paraît pas raisonnable d'étendre le champ des bénéficiaires alors que la réforme doit être réalisée à périmètre financier constant, soit une enveloppe de 4,1 milliards d'euros. Alors qu'il est d'ores et déjà permis de douter de la soutenabilité financière de la réforme proposée, cette extension aux étudiants et apprentis aurait un coût de 100 millions d'euros. Sera-t-il couvert par l'enveloppe prévue ? La question n'est toujours pas tranchée. Je ne manquerai pas d'interroger le Gouvernement sur ce point.
Je vous propose donc, par mon amendement FINC 1, de n'ouvrir le bénéfice de la prime d'activité qu'aux apprentis répondant aux critères envisagés par le Gouvernement - être rémunéré au moins 0,78 SMIC net mensuel et exercer cette activité depuis plus de trois mois. Sont ainsi visés les apprentis déjà bien avancés dans leur scolarité et pour lesquels le bénéfice d'une telle prestation peut se justifier par le souci d'encourager et de faciliter leur intégration dans le monde du travail.
Il s'agit, par cet amendement, de pousser le Gouvernement à répondre de ses contradictions. Affirmer que la prime vise avant tout à inciter à l'exercice d'une activité professionnelle, pour finir par en ouvrir le bénéfice aux étudiants et aux apprentis selon des modalités très circonscrites, qui conduiront à détourner de leur scolarité les étudiants les plus en butte à des difficultés financières en est une. Le texte initial me semblait plus cohérent.
M. Philippe Dallier . - Ne risque-t-on pas de rencontrer ici le même problème de cumul avec la demi-part fiscale qui se posait avec les APL ? Pour les étudiants rattachés au foyer fiscal de leurs parents, l'avantage est-il cumulable avec la demi-part fiscale ?
M. Albéric de Montgolfier , rapporteur pour avis . - C'est une question qui se pose effectivement. La ministre, Marisol Touraine, a rappelé, à l'Assemblée nationale, que les jeunes en formation initiale qui bénéficient d'un revenu d'activité supérieur à 0,78 SMIC sont considérés comme des actifs pour le calcul des allocations familiales ou des allocations logement.
M. Michel Bouvard . - Je voterai cet amendement. Tant qu'il n'existera pas un réel contrôle de l'assiduité des étudiants boursiers, problème sur lequel la Cour des Comptes a appelé à plusieurs reprises l'attention, il ne me paraît pas souhaitable d'étendre ce dispositif aux étudiants. Il nous faut des assurances du Gouvernement en ce sens. C'est, au-delà, l'ensemble des dispositifs concernant les étudiants, et leur cumul, qu'il convient de remettre à plat, y compris les aides au logement et la demi-part fiscale.
M. Albéric de Montgolfier , rapporteur pour avis . - L'assiduité des étudiants boursiers fait partie de notre programme de contrôle de l'année. Philippe Adnot pourra vous en dire plus. Si ce dispositif encourage de faux étudiants, en réalité salariés, sans qu'aucun contrôle d'assiduité n'entrave de telles pratiques, ce serait en effet un problème. On ne saurait encourager l'activité professionnelle des étudiants sans prévoir aucun contrôle de leur assiduité dans leurs études. La situation des apprentis, qui sont déjà dans le monde du travail, est différente.
M. Francis Delattre . - Il est moins que certain, nous l'avons compris, que cette mesure se fera à dépense constante. Vous qui êtes en contact privilégié avec le ministère des finances, pouvez-vous nous dire quelle est l'évolution du produit de l'impôt ? S'il est, comme je le crains, sur la même pente que l'an dernier, on peut craindre que cette mesure ne fasse qu'aggraver notre déficit qui, je le rappelle, malgré tous les propos rassurants qui nous ont été servis en début d'année, s'est accru, l'an dernier, de près de 10 milliards d'euros.
M. Albéric de Montgolfier , rapporteur pour avis . - C'est toute la difficulté : personne n'est en mesure de dire, à ce stade, si cette mesure tiendra ou non dans l'enveloppe.
M. Richard Yung . - La politique idéale serait d'offrir davantage de bourses et d'avoir suffisamment de places en cités universitaires ; nous sommes tous d'accord là-dessus. Mais ainsi que vous ne manquez pas de le souligner, le budget est contraint... J'observe aussi qu'alors que vous n'êtes pas les derniers à vous plaindre de contrôles jugés trop tatillons, vous réclamez ici plus de contrôle. Fort bien, mais n'oubliez pas que contrôler l'assiduité des étudiants a un coût. Je ne suis pas favorable à cette approche par le soupçon.
M. Michel Bouvard . - C'est à l'université qu'il revient de faire des contrôles.
M. Philippe Adnot . - Laissez-moi le temps de rendre mon rapport sur la question !
J'estime que l'amendement de notre rapporteur est loin d'être anecdotique. Il est même hautement symbolique. Quand on élargit le nombre de bénéficiaires potentiels d'un dispositif, il faut dire, si l'on prétend agir à coût constant, qui va, en retour, en sortir.
Fixer un seuil de 0,78 SMIC incitera d'évidence tous ceux qui sont en dessous à l'atteindre. C'est une absurdité. Mieux vaudrait améliorer le sort des boursiers en faisant en sorte que ceux qui n'en ont pas besoin n'aient pas accès aux bourses.
M. Albéric de Montgolfier , rapporteur pour avis . - Que signifie ce seuil de 0,78 SMIC ? Qu'un étudiant payé au SMIC, comme cela est souvent le cas, devra travailler, pour bénéficier de la mesure, 80 % d'un temps plein soit 30 heures par semaine. Autant de temps qu'il ne consacrera pas à ses études. Nombre d'études économiques montrent que des étudiants décrochent à cause d'une activité professionnelle trop prenante. Inciter les étudiants à travailler davantage n'est pas une bonne réponse. Le texte initial était mieux calibré, sur le seul objectif de favoriser l'activité.
M. Maurice Vincent . - Améliorer le niveau des bourses serait sans doute la meilleure solution, mais faut-il rappeler que la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, Geneviève Fioraso, a dû se battre, après sa nomination, pour trouver les 150 millions d'euros de la dixième mensualité de bourses, annoncée par son prédécesseur, Laurent Wauquiez ? Depuis 2012, les budgets votés pour l'enseignement et la recherche ont prévu des enveloppes non négligeables pour l'amélioration des bourses ou l'exemption de droits d'inscription.
Il est vrai que le système des aides aux étudiants, très complexe, mériterait une remise à plat, comme le soulignait Michel Bouvard. De nombreuses associations revendiquent l'autonomie pour les étudiants, mais il ne faut pas oublier que de nombreux étudiants sont aidés par des parents qui en ont largement les moyens.
Cela étant, les risques qui ont été évoqués me paraissent surestimés. Seront surtout concernés par cette mesure, à mon sens, les étudiants de deuxième ou troisième cycle. Ceux qui travaillent à temps presque plein sont généralement en fin de cursus. Cet apport supplémentaire leur permettra de terminer leurs études dans de meilleures conditions. Je ne crois pas, en revanche, qu'il incitera les étudiants de licence à se précipiter sur le marché du travail.
L'amendement FINC 1 est adopté.
M. Albéric de Montgolfier , rapporteur pour avis . - L'article 28, introduit par l'Assemblée nationale, a prévu un rapport : autant que celui-ci serve à quelque chose. C'est pourquoi je propose de l'enrichir d'une analyse relative au poids des différentes composantes de la prime d'activité et à l'effet « volume », lié à l'évolution du nombre de bénéficiaires. Une grande incertitude pèse en effet sur le coût réel de la nouvelle prime, qui repose sur des taux de recours et des paramètres de calcul impossibles à vérifier à ce stade. En cas de dépassement important de l'enveloppe prévue, il faudra s'interroger sur les conditions d'attribution de la prime. Les précisions ici demandées sur l'évaluation du coût du dispositif pourraient se révéler utiles pour identifier les raisons d'un éventuel dépassement et identifier les ajustements à opérer.
L'amendement FINC 2 est adopté.
À l'issue de ce débat, la commission a émis un avis favorable à l'adoption des articles 24 et 28 (nouveau) tels que modifiés par ses amendements et à l'adoption sans modification des articles 25, 26, 27 et 29 (nouveau). Elle a autorisé le rapporteur pour avis à déposer en vue de la séance publique les amendements que la commission des affaires sociales, saisie au fond, n'aurait pas intégrés à son texte.
AMENDEMENTS
PRÉSENTÉS PAR LA COMMISSION DES FINANCES
ARTICLE 24
Alinéa 16, seconde phrase
Remplacer la première occurrence du mot :
personnes
par le mot :
apprentis
ARTICLE 28
I. - Alinéa 3
Compléter cet alinéa par les mots :
, en précisant l'impact de la part familialisée, de la bonification individuelle et des autres composantes de la prime d'activité
II. - Alinéa 4
Compléter cet alinéa par les mots :
, son évolution au cours de la période évaluée et son impact sur la dépense budgétaire
* 1 Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), Résultats de l'enquête « Emploi » au premier trimestre 2015.
* 2 Sylvain Catherine, Augustin Landier et David Thesmar, « Marché du travail : la grande fracture », Institut Montaigne, février 2015.
* 3 INSEE, Enquête Revenus fiscaux et sociaux 2012 et séries longues.
* 4 Rapport d'information n° 445 (2007-2008) de Bernard Seillier fait au nom de la mission commune d'information sur les politiques de lutte contre la pauvreté et l'emploi.
* 5 INSEE, Enquête Emploi 2013.
* 6 Rapport du comité d'évaluation des dépenses fiscales et des niches sociales, juin 2011.
* 7 Cour des comptes, « La prime pour l'emploi : une dépense fiscale aux objectifs de plus en plus confus », Rapport public annuel, février 2011.
* 8 Christophe Sirugue, Rapport au Premier ministre relatif à la réforme des dispositifs de soutien aux revenus d'activité modestes, juillet 2013.
* 9 Dominique Lefebvre et François Auvigne, Rapport sur la fiscalité des ménages, mai 2014.
* 10 Cour des comptes, « La prime pour l'emploi : une dépense fiscale aux objectifs de plus en plus confus », op. cit.
* 11 Cour des comptes, « La prime pour l'emploi : une dépense fiscale aux objectifs de plus en plus confus », Rapport public annuel, février 2011.
* 12 Rapport du comité d'évaluation des dépenses fiscales et des niches sociales, juin 2011.
* 13 Ibid.
* 14 Étude d'impact annexée au projet de loi relatif au dialogue social et à l'emploi.
* 15 Cour des comptes, « La prime pour l'emploi : une dépense fiscale aux objectifs de plus en plus confus », Rapport public annuel, février 2011.
* 16 Rapport final du conseil national d'évaluation du RSA, décembre 2011.
* 17 Ibid.
* 18 Ibid.
* 19 Voir notamment de rapport final du conseil national d'évaluation du RSA de 2011.
* 20 Cette augmentation est directement liée à la revalorisation du RSA « socle » qui accroit mécaniquement le nombre de personnes éligibles à la prestation.
* 21 Le revenu supplémentaire temporaire d'activité (RSTA) a été instauré par le décret n° 2009-602 du 27 mai 2009 afin de soutenir le pouvoir d'achat des salariés des départements et collectivités d'outre-mer par une prestation mensuelle versée aux salariés ayant un revenu inférieur ou égal à 1,4 fois le SMIC. Il a été prorogé jusqu'au 31 mai 2013 par le décret n° 2013-146 du 18 février 2013.
* 22 Cour des comptes, « Le RSA « activité » : une prestation peu sollicitée, un impact restreint », Rapport public annuel, février 2013.
* 23 Rapport final du conseil national d'évaluation du RSA, décembre 2011.
* 24 Ibid.
* 25 Ce seuil était évalué, en 2012, à 993 euros (avec un seuil de 60 % du niveau de vie médian retenu).
* 26 Cour des comptes, rapport public annuel, février 2011.
* 27 Rapport précité au Premier ministre établi par Christophe Sirugue, député de Saône-et-Loire, sur la réforme des dispositifs de soutien aux revenus d'activité modestes, juillet 2013.
* 28 Dominique Lefebvre et François Auvigne, « Rapport sur la fiscalité des ménages », avril 2014.
* 29 Décision n° 2014-698 DC du 6 août 2014.
* 30 Article 28 de la loi n° 2014-1655 du 29 décembre 2014 de finances rectificative pour 2014.
* 31 En septembre prochain, plus de 5 millions de ménages devraient encore voir le montant de leur impôt sur le revenu 2015 réduit voire annulé grâce à la PPE, au titre de leurs revenus de 2014. En revanche, les revenus d'activité perçus depuis le 1 er janvier 2015 n'ouvrent plus droit à la PPE.
* 32 Article 1 er de la loi n° 2014-892 du 8 août 2014 de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014.
* 33 Article 1 er de la loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015.
* 34 Ce coût correspond à la suppression de la tranche à 5,5 % et à l'amplification de la décote, sans tenir compte du dégel du barème, dont le coût est estimé à 500 millions d'euros.
* 35 Étude d'impact annexée au projet de loi relatif au dialogue social et à l'emploi, p. 184.
* 36 Étude d'impact annexée au présent projet de loi.
* 37 À condition que le déclarant ait coché la case de la déclaration d'impôt indiquant qu'il souhaite, le cas échéant, bénéficier de la PPE.
* 38 Loi n° 2000-1257 du 23 décembre 2000 de financement de la sécurité sociale pour 2001.
* 39 Décision n° 2000-437 DC du 19 décembre 2000.
* 40 Article 3 de la loi n° 2002-1575 du 30 décembre 2002 de finances pour 2003.
* 41 À condition d'avoir coché la case correspondante sur sa déclaration d'impôt.
* 42 Cependant, la prime n'est pas due lorsque son montant total avant imputation est inférieur à 30 euros.
* 43 Rapport du comité d'évaluation des dépenses fiscales et des niches sociales, juin 2011.
* 44 Article 3 de la loi n° 2003-1311 du 30 décembre 2003 de finances pour 2004.
* 45 Article 6 de la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006.
* 46 Loi n° 2008-1249 du 1 er décembre 2008 généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d'insertion.
* 47 Ordonnance n° 2010-686 du 24 juin 2010.
* 48 Ordonnance n° 2011-1641 du 24 novembre 2011.
* 49 Article 1 er de la loi n° 2008-1249.
* 50 En particulier le cumul intégral du RMI et du revenu d'activité lors des trois premiers mois suivant une reprise d'emploi.
* 51 L'article 135 de la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010 a permis aux jeunes actifs âgés de moins de 25 ans de pouvoir bénéficier du RSA sous certaines conditions. Celles-ci ont été précisées par le décret n° 2010-961 du 25 août 2010 : avoir exercé une activité professionnelle pendant au moins deux ans à temps plein (soit au moins 3 214 heures) au cours des trois années précédant la date de la demande du RSA - cette durée est prolongée dans la limite de six mois pour ceux qui ont connu des périodes de chômage indemnisé.
* 52 Cette condition n'est toutefois pas applicable aux réfugiés, aux bénéficiaires de la protection subsidiaire, aux apatrides et aux étrangers titulaires de la carte de résident ou d'un titre de séjour prévu par les traités et accords internationaux et conférant des droits équivalents.
* 53 Cette condition n'est toutefois pas applicable aux personnes exerçant une activité professionnelle déclarée.
* 54 Le décret n° 2010-1783 du 31 décembre 2010 précise les prestations sociales non prises en compte dans le calcul du RSA. Il s'agit d'un ensemble varié de 24 prestations comme l'allocation de rentrée scolaire, l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé ou encore la prime à la naissance ou à l'adoption.
* 55 Depuis le 1 er janvier 2015, les montants forfaitaires retenus pour les aides personnelles au logement et les avantages en nature liés à la disposition d'un logement sont les suivants : 61,67 euros pour un foyer composé d'une personne ; 123,33 euros pour un foyer composé de deux personnes ; 152,62 euros pour un foyer composé de trois personnes ou plus.
* 56 Cette majoration du montant forfaitaire est prolongée jusqu'à ce que le plus jeune enfant à charge ait atteint l'âge de trois ans.
* 57 Dominique Lefebvre et François Auvigne, « Rapport sur la fiscalité des ménages », avril 2014.
* 58 Toutefois, le RSA « activité » n'est pas versé lorsque le montant dû est inférieur à six euros.
* 59 Depuis la loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014, cette fraction était de 1,37 %, pour un montant affecté au FNSA d'environ 1,5 milliard d'euros en 2014. La forte volatilité des prélèvements de solidarité fragilisait le budget du FNSA. Ainsi, pour 2014 le rendement attendu était estimé à 1 840 millions d'euros, mais il n'a été que de 1 573 millions d'euros (soit 267 millions d'euros de moins), obligeant l'État à ouvrir des crédits supplémentaires à destination du FNSA dans le cadre de la loi n° 2014-1655 du 29 décembre 2014 de finances rectificatives pour 2014.
* 60 Cette contribution de 1 % sur les rémunérations des fonctionnaires et agents publics alimente le Fonds de solidarité, qui finance le régime de solidarité des personnes privées d'emploi ou n'ayant pas droit à l'allocation chômage.
* 61 Rapport de la commission « Familles, vulnérabilité, pauvreté », avril 2005.
* 62 Christophe Sirugue, Rapport au Premier ministre relatif à la réforme des dispositifs de soutien aux revenus d'activité modestes, juillet 2013.
* 63 Ibid.
* 64 Cf. infra l'article L. 842-7 du code de la sécurité sociale.
* 65 Au sens de l'article L. 124-1 du code de l'éducation : « Les enseignements scolaires et universitaires peuvent comporter, respectivement, des périodes de formation en milieu professionnel ou des stages. Les périodes de formation en milieu professionnel sont obligatoires dans les conditions prévues à l'article L. 331-4 du présent code.
« Les périodes de formation en milieu professionnel et les stages ne relevant ni du 2° de l'article L. 4153-1 du code du travail, ni de la formation professionnelle tout au long de la vie, définie à la sixième partie du même code, font l'objet d'une convention entre le stagiaire, l'organisme d'accueil et l'établissement d'enseignement, dont les mentions obligatoires sont déterminées par décret.
« Les périodes de formation en milieu professionnel et les stages correspondent à des périodes temporaires de mise en situation en milieu professionnel au cours desquelles l'élève ou l'étudiant acquiert des compétences professionnelles et met en oeuvre les acquis de sa formation en vue d'obtenir un diplôme ou une certification et de favoriser son insertion professionnelle. Le stagiaire se voit confier une ou des missions conformes au projet pédagogique défini par son établissement d'enseignement et approuvées par l'organisme d'accueil.
« L'enseignant référent prévu à l'article L. 124-2 du présent code est tenu de s'assurer auprès du tuteur mentionné à l'article L. 124-9, à plusieurs reprises durant le stage ou la période de formation en milieu professionnel, de son bon déroulement et de proposer à l'organisme d'accueil, le cas échéant, une redéfinition d'une ou des missions pouvant être accomplies. »
* 66 Au sens de l'article L. 6211-1 du code du travail : « L'apprentissage concourt aux objectifs éducatifs de la nation. Il a pour objet de donner à des jeunes travailleurs, ayant satisfait à l'obligation scolaire, une formation générale, théorique et pratique, en vue de l'obtention d'une qualification professionnelle sanctionnée par un diplôme ou un titre à finalité professionnelle enregistré au répertoire national des certifications professionnelles. »
* 67 Cf infra le 2° du présent A.
* 68 Au sens de l'article L. 1261-3 du code du travail : « Est un salarié détaché au sens du présent titre tout salarié d'un employeur régulièrement établi et exerçant son activité hors de France et qui, travaillant habituellement pour le compte de celui-ci, exécute son travail à la demande de cet employeur pendant une durée limitée sur le territoire national dans les conditions définies aux articles L. 1262-1 et L. 1262-2. »
*
69 Article R. 262-1 du code de
l'action sociale et des familles : «
Le montant forfaitaire
mentionné au 2° de l'article L. 262-2 applicable à un foyer
composé d'une seule personne est majoré de 50 % lorsque le
foyer comporte deux personnes. Ce montant est ensuite majoré de
30 % pour chaque personne supplémentaire présente au foyer
et à la charge de l'intéressé. Toutefois, lorsque le foyer
comporte plus de deux enfants ou personnes de moins de vingt-cinq ans à
charge, à l'exception du conjoint, du partenaire lié par un pacte
civil de solidarité ou du concubin de l'intéressé, la
majoration à laquelle ouvre droit chacun de ces enfants ou personnes est
portée à 40 % à partir de la troisième
personne.
« Dans le cas des personnes isolées au sens de
l'article L. 262-9, le montant majoré est égal à
128,412 % du montant forfaitaire mentionné à l'article
L. 262-2 applicable à un foyer composé d'une seule personne.
S'y ajoute, pour chaque enfant à charge, un supplément
égal à 42,804 % du montant forfaitaire applicable à
un foyer composé d'une seule personne, mentionné à
l'article L. 262-2. Le même supplément s'applique lorsque le
foyer comporte d'autres personnes à charge que des
enfants.
»
* 70 Le choix de ces âges permet d'éviter tout effet sur le calcul du revenu disponible mensuel, lié notamment à la majoration pour enfant existant pour les allocations familiales, à partir de 14 ans.
* 71 Actuellement, un couple biactif avec deux enfants bénéficie de 87 euros de RSA « activité » et 19 euros de PPE avec 2 SMIC et de 60 euros de PPE pour 2,5 SMIC.
* 72 Un ménage est considéré comme gagnant lorsque son revenu disponible après réforme augmente de plus de 1 %.
* 73 Un ménage est considéré comme perdant lorsque son revenu disponible après réforme diminue de plus de 1 %.
* 74 INSEE, Économie et statistique, « L'impact du travail salarié des étudiants sur la réussite et la poursuite des études universitaires », Magali Beffy, Denis Fougère et Arnaud Maurel, novembre 2009.
* 75 Cour des comptes, « Le RSA « activité » : une prestation peu sollicitée, un impact restreint » », Rapport public annuel, février 2013.
* 76 Ibid.
* 77 Il est en effet estimé que les personnes qui auront recours à la prime d'activité seront davantage celles dont les revenus sont les plus modestes, qui bénéficient de montants importants, plutôt que celles éligibles à des montants moindres.
* 78 Cf. commentaire de l'article 28 du présent projet de loi.
* 79 Article 28 de la loi n° 2014-1655 du 29 décembre 2014 de finances rectificative pour 2014.
* 80 L'article 32 de la loi n° 2008-1249 du 1 er décembre 2008 généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d'insertion prévoyait ainsi : « Dans un délai de trois ans à compter de la publication de la présente loi, le Gouvernement réunit une conférence nationale associant notamment des représentants des collectivités territoriales, les organisations syndicales de salariés et d'employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel, des associations de lutte contre les exclusions et des représentants des bénéficiaires du revenu de solidarité active aux fins, d'une part, d'évaluer la performance du revenu de solidarité active et des autres dispositifs sociaux et fiscaux en matière de lutte contre la pauvreté et d'incitation à la reprise d'activité et, d'autre part, d'établir un bilan financier de coûts induits par cette prestation ».
* 81 À cet égard, il convient de rappeler qu'en vertu de l'article 40 de la Constitution, tout amendement qui viendrait exclure certains revenus de la « base ressources » de la prime d'activité créerait une charge publique et serait, à ce titre, irrecevable.