III. LE CHANTIER DE LA RÉFORME
A. LA MISE EN OEUVRE DU "PLAN JUPPÉ"
1. L'impact des mesures immédiates de redressement financier
Dans son discours du 15 novembre 1995, le Premier ministre avait présenté, à côté de réformes structurelles, un certain nombre de mesures à incidence financière immédiate destinées à réduire le déficit du régime général de 35 milliards de francs dès 1996.
Le tableau ci-après, tiré des annexes du présent projet de loi de financement, retrace l'écart entre les rendements attendus de ces mesures d'urgence et leurs rendements effectifs, qui atteint 5,6 milliards de francs.
Effets des mesures d'urgence en 1996
(en milliards de francs)
Pour la branche famille, les effets des mesures sont inférieurs de 1,4 milliard de francs aux prévisions. Cette différence s'explique par le moindre rendement de la rationalisation des prestations familiales et des aides au logement (- 700 millions de francs), et par l'absence de hausse du taux de cotisations familiales des entreprises publiques et de l'État (- 700 millions de francs). Dans le rapport annexé au présent projet de loi de financement, le Gouvernement précise toutefois que ce taux sera porté de 4,8 % à 5,2 % en 1997.
Pour la branche vieillesse, l'effet de l'amélioration de la prise en charge des périodes de chômages validées gratuitement (la base forfaitaire étant portée de 60 % à 90 % du SMIC) est au contraire supérieur de 600 millions de francs au rendement espéré.
Pour la branche maladie, les effets des mesures sont inférieurs de 4,5 milliards de francs aux prévisions. Cette différence de près d'un tiers concerne toutes les mesures, à l'exception de la réforme du calcul des indemnités journalières maternité (600 millions de francs) et de la contribution de l'industrie pharmaceutique (2,5 milliards de francs), dont les rendements sont conformes aux prévisions.
Enfin, les économies de gestion des caisses, qui concernent toutes les branches, sont conformes aux prévisions de 1,5 milliard de francs.
Au total, le rendement des mesures de redressement financier atteint 85 % du montant initialement escompté. Cet écart est loin d'expliquer à lui seul l'absence d'amélioration significative du régime général en 1996.
2. Un rééquilibrage contrarié par les moindres rentrées de cotisations sociales
En dépit de la forte progression des contributions publiques, les cotisations constituent toujours la plus grande part des recettes de la sécurité sociale. Pour le régime général, elles constituent 85 % de ses ressources, qui sont donc très dépendantes de la conjoncture économique.
Comme l'ensemble de l'Europe, la France a connu un net ralentissement de l'activité économique à partir du printemps 1995. Il en résulte une croissance sensiblement inférieure à celle initialement prévue pour 1996 : 1,3 % au lieu de 2,8 %. Ce ralentissement explique une part très importante du déficit de la sécurité sociale prévu pour 1996.
Le plan de rééquilibrage présenté devant le Parlement le 15 novembre 1995 était fondé en effet sur une accélération de la progression de la masse salariale. Son taux de croissance était estimé à 5,3 % pour 1996 alors que le rapport de la Commission des comptes de la sécurité sociale de septembre 1996 retient désormais une hypothèse de 2,3 % pour cette année. Cette progression plus faible de la masse salariale a induit d'importantes moins values de rentrées de cotisations sociales.
Par conséquent, le déficit prévisionnel du régime général devrait s'établir à 51,5 milliards de francs en 1996, même en intégrant les mesures d'urgence annoncées le 15 novembre 1995, sans lesquelles il aurait été voisin de 90 milliards de francs.
L'analyse de l'écart entre l'objectif initial du Gouvernement et le déficit tendanciel montre bien que c'est l'atonie de la croissance économique, induisant des moins-values de recettes de près de 30 milliards de francs, qui a retardé le redressement des comptes en 1996 :
(en milliards de francs)