Projet de loi de finances pour 2000, adopté par l'Assemblée nationale, TOME - COMMUNICATION AUDIOVISUELLE
HUGOT (Jean-Paul)
AVIS 90 - TOME X (1999-2000) - commission des affaires culturelles
Tableau comparatif au format Acrobat ( 8 2 Ko )Table des matières
- INTRODUCTION
- EXAMEN EN COMMISSION
- CONCLUSION
N° 90
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1999-2000
Annexe au procès-verbal de la séance du 25 novembre 1999.
AVIS
PRÉSENTÉ
au nom de la commission des Affaires culturelles (1) sur le projet de loi de finances pour 2000 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,
TOME X
COMMUNICATION AUDIOVISUELLE
Par M. Jean-Paul HUGOT,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de : MM. Adrien Gouteyron, président ; Jean Bernadaux, James Bordas, Jean-Louis Carrère, Jean-Paul Hugot, Pierre Laffitte, Ivan Renar, vice-présidents ; Alain Dufaut, Ambroise Dupont, André Maman, Mme Danièle Pourtaud, secrétaires ; MM. François Abadie, Jean Arthuis, Jean Bernard, André Bohl, Louis de Broissia, Jean-Claude Carle, Michel Charzat, Gérard Collomb, Xavier Darcos, Fernand Demilly, André Diligent, Jacques Donnay, Michel Dreyfus-Schmidt, Jean-Léonce Dupont, Daniel Eckenspieller, Jean-Pierre Fourcade, Bernard Fournier, Jean-Noël Guérini, Marcel Henry, Roger Hesling, Pierre Jeambrun, Serge Lagauche, Robert Laufoaulu, Jacques Legendre, Serge Lepeltier, Louis Le Pensec, Mme Hélène Luc, MM. Pierre Martin , Jean-Luc Miraux, Philippe Nachbar, Jean-François Picheral, Guy Poirieux, Jack Ralite, Victor Reux, Philippe Richert, Michel Rufin, Claude Saunier, René-Pierre Signé, Jacques Valade, Albert Vecten, Marcel Vidal.
Voir
les numéros
:
Assemblée nationale
(
11
ème législ.) :
1805
,
1861
à
1866
et T.A.
370
.
Sénat
:
88
et
89
(annexe n°
9
)
(1999-2000).
Lois de finances
.
INTRODUCTION
Mesdames, Messieurs,
Il y a deux façons possibles de juger le projet de budget de
l'audiovisuel public pour 2000.
D'un point de vue rétrospectif, il y a quelques raisons de juger
satisfaisants des crédits en augmentation de 9,8 % par rapport
à 1999.
D'un point de vue prospectif, en revanche, la réaction diffère
puisque les dotations accordées aux organismes publics ne leur
permettront vraisemblablement pas de compenser les déficits
prévisibles de l'exercice 1999, et leur permettront moins encore
d'aborder avec quelque dynamisme les défis de l'ère
numérique.
Votre commission des affaires culturelles a fondé sur cette constatation
son analyse critique des propositions du gouvernement.
Tout l'y conduisait, à commencer par le propos du ministre selon lequel
l'exercice 2000 sera " la première étape de la mise en
oeuvre des engagements pris par le gouvernement en vue de redonner au secteur
public audiovisuel toute sa légitimité et d'assurer son
développement ". Ceci incite à mettre les chiffres bruts en
perspective. Par ailleurs, le tournant crucial que l'audiovisuel public va
aborder, avec le prochain déploiement du numérique hertzien
terrestre, invite à faire de cet examen la pierre de touche du projet de
budget.
Le projet de loi sur la communication audiovisuelle que le Sénat
examinera en janvier prochain invite aussi à évaluer le projet de
budget dans une perspective dynamique.
I. LES CRÉDITS DE L'AUDIOVISUEL PUBLIC EN 2000, DES ÉVOLUTIONS GLOBALEMENT POSITIVES
Auditionnée le 27 octobre 1999 par votre commission des affaires culturelles, Mme Catherine Trautmann qualifiait d'excellent son projet de budget. Ce jugement est peut-être excessif, mais l'objectivité oblige à constater les évolutions positives que ce projet comporte de fait, tant en ce qui concerne l'évolution globale des ressources qu'en ce qui concerne l'évolution de la structure de financement des organismes.
A. L'AUGMENTATION DES RESSOURCES DES ORGANISMES
Les
crédits de l'audiovisuel public augmenteront globalement de 9,8 %
en 2000 par rapport à la loi de finances initiale de 1999, ce qui
représente un peu plus de 883 millions de francs répartis entre
les organismes. Cette augmentation, la plus forte enregistrée depuis
1996, traduit le caractère effectivement prioritaire reconnu à
l'audiovisuel public dans un budget général élaboré
en fonction d'une norme d'évolution des dépenses de l'Etat
alignée sur une hausse prévisionnelle des prix à la
consommation de + 0,9 %.
Le tableau ci-après précise la répartition de
l'augmentation globale de la dotation entre les différents organismes.
ÉVOLUTION DU BUDGET DU SECTEUR PUBLIC AUDIOVISUEL
EN MF |
LFI 1996 |
LFI 1997 |
LFI 1998 |
LFI 1999 |
PLF 2000 |
INA
|
605,5
|
621,7
|
663,2
|
658,5
|
658,2
|
FRANCE 2
|
4 996,7 |
5
015,2
|
5
187,3
|
5
316,0
|
5
720,7
|
FRANCE 3
|
5 240,3 |
5
505,8
|
5
643,4
|
5
849,2
|
6
156,4
|
LA
SEPT/ARTE
|
992,0 |
940,3
|
1
010,4
|
1
039,7
|
1
078,2
|
LA
CINQUIÈME
|
801,3 |
731,3
|
781,0
|
803,6
|
828,9
|
RFO
|
1 165,6 |
1
179,6
|
1
215,0
|
1
251,8
|
1
296,1
|
RADIO
FRANCE
|
2 656,1 |
2
695,5
|
2
749,5
|
2
814,3
|
2
877,3
|
RFI
|
735,3 |
740,3
|
754,4
|
745,2
|
745,2
|
BUDGET
TOTAL
|
17 192,8 |
17
429,7
|
18
004,2
|
18
478,0
|
19
361,0
|
•
On constate que les dotations de France 2 et de France 3 progressent de
façon accentuée : + 7,6 % pour France 2 et
+ 5,8 % pour France 3, contre + 3,7 % pour la
Sept-Arte et 3,1 % pour La Cinquième. Ainsi se confirme le
rôle prééminent reconnu déjà en 1999 aux
chaînes généralistes du secteur public, qui portent
véritablement les missions et l'avenir de l'audiovisuel public,
• Pour autant, la Sept-Arte et La Cinquième ne sont pas
sacrifiées, puisque le taux de progression de leurs dotations est
supérieur à celui de 1999 : + 3,7 % contre
+ 2,9 % en 1999 pour la Sept-Arte et + 3,1 % contre
+ 2,9 % en 1999 pour La Cinquième. Ceci marque la
reconnaissance, méritée et opportune, de la présence que
ces deux chaînes ont su installer dans notre paysage audiovisuel en
corrigeant peu à peu les " erreurs de jeunesse " dont votre
rapporteur a plus d'une fois dressé la liste.
Mais tous les organismes publics ne sont pas logés à l'enseigne
du bonus budgétaire.
• L'INA voit sa dotation gelée au niveau de 1999,
lui-même en repli de 0,8 % par rapport à 1998. Au cours de
son audition du 27 octobre par la commission des affaires culturelles, Mme
Catherine Trautmann a noté que le plan pluriannuel de sauvegarde des
archives audiovisuelles, plus d'un million d'heures de programmes,
engagé en 1998 verra ses moyens renforcés de 11,5 millions
de francs. Par ailleurs les documents transmis par le Gouvernement à
votre rapporteur exposent que le processus de numérisation et
d'informatisation de la chaîne d'exploitation des archives sera
poursuivi, et estiment que le projet de budget pour 2000 conforte la
démarche stratégique de l'INA en permettant d'assurer
l'équilibre de son exploitation aussi bien que de réaliser les
investissements destinés à assurer la pérennité de
ses activités.
Cette pétition de principe risque de se heurter à une
réalité économique et financière qui contraindra
peut-être l'INA à poursuivre à petite vitesse la sauvegarde
de notre patrimoine audiovisuel au détriment de ses autres
activités, en particulier celles de recherche, de production de
recherche et de formation. Ceci annonce-t-il une régression draconienne
de missions que le plan stratégique adopté le 16 septembre
dernier prévoyait seulement de réorienter vers l'accomplissement
de la mission principale de gestion des archives ?
• RFI voit aussi ses dotations gelées après un repli
de 1,2 % en 1998. Le ministère estime cependant que RFI
bénéficiera en réalité d'une augmentation de 20
millions de francs par rapport à 1999 dans la mesure où le budget
de cet exercice avait été amputé de la même somme,
par une mesure de régulation intervenue au début de
l'année, en faveur de la réforme de la télévision
extérieure.
• La dotation de RFO augmente de 3 %. Cet effort relatif ne
mettra pas fin aux difficultés latentes d'une entreprise dont le budget
de 1999 a été adopté en conseil d'administration le 28
septembre dernier en déficit de 54,5 millions de francs.
Le Gouvernement admet, avec un sens affirmé de la litote, que le projet
de budget de RFO " ne traduit pas un renforcement des moyens de la
société ", mais a pour objet de prendre en compte
l'incidence des " augmentations de charges intervenues depuis 1997
au-delà des lois de finances annuelles qui, eu égard à
leur ampleur, ont conduit à faire apparaître un déficit
structurel ". Il note encore que cette prise en compte n'est que
partielle, qu'un important effort d'économies est mis en oeuvre, et
qu'il est permis de prévoir un retour à l'équilibre
d'exploitation en 2000.
A l'occasion de l'examen du bilan de RFO pour 1998, le Conseil supérieur
de l'audiovisuel avait noté les chantiers importants engagés au
cours de cet exercice : lancement de RFO-Sat, affirmation de
l'identité différente des deux canaux existants,
développement d'une production de programmes de stocks coordonnée
entre les stations, notamment pour alimenter RFO-Sat. Cette démarche,
intéressante dans la mesure où elle permettrait à RFO de
devenir un vecteur international de la culture française
développant une politique de diffusion et de coopération
régionales, risque d'être profondément remise en
cause : pour aller plus loin dans les économies qui lui sont
demandées, RFO devra réduire les programmes diffusés,
restreindre sa production, envisager peut-être des licenciements,
déclenchant un cycle nouveau de remise en question qui portera atteinte
à son potentiel.
Votre rapporteur s'inquiète d'une situation génératrice de
répercussions négatives sur une entreprise qui devrait jouer un
rôle clé pour la connaissance de l'Outre-mer par la
métropole, et en faveur de la francophonie dans les régions
limitrophes de l'Outre-mer. Il est urgent de définir l'avenir de RFO
à la lumière des évolutions technologiques qui devraient
faciliter l'exécution de cette dernière mission, alors que le
développement prévisible de la diffusion des chaînes
métropolitaines en Outre-mer remettra en question les aspects les plus
traditionnels de l'activité de RFO.
• Enfin, le budget de Radio France progressera en 2000 de
2,2 %, pour atteindre 2 milliards 877 millions de francs.
Questionné lors de son audition par votre commission sur la
compatibilité de cette évolution avec le plan de
développement, récemment soumis au conseil d'administration de
Radio France, qui prévoit, pour un montant de 200 millions de francs, la
numérisation, le développement des radios locales et le
développement sur internet, Mme Catherine Trautmann a observé que
Radio France a reçu en trois ans un supplément de crédits
de 180 millions de francs, se situant en troisième position des
sociétés bénéficiaires des augmentations de
crédits, et n'a été soumise à aucune mesure
importante d'économie, contrairement à ce qui fut le cas de 1996
à 1998.
Le ministère de la culture et de la communication note par ailleurs que
la fixation des moyens de la station prend en compte une structure de
coût moins dynamique que celle des chaînes de
télévision, en l'absence d'investissements dans la production
cinématographique et audiovisuelle, et en raison du niveau moins
élevé des droits sportifs. Il observe aussi que l'effort
budgétaire consenti en 2000 en faveur de la numérisation
(30 millions de francs) a vocation à être poursuivi dans le
cadre des prochains exercices budgétaires.
Le président de Radio-France n'en rétorquait pas moins, lors de
l'université d'été de Hourtin que de 1986 à 1999,
la progression des ressources de l'audiovisuel public a été de
124,8 % contre 52 % pour Radio-France, que le développement
des radios locales du groupe (les 38 radios locales existantes ne couvrent
que 60 % du territoire) est arrêté depuis dix ans, et que le
maintien de la compétitivité de la radio publique dans une
économie de marché nécessite des investissements dans des
programmes et des produits nouveaux.
B. L'ÉVOLUTION DE LA STRUCTURE DE FINANCEMENT
Comme le montre le tableau ci-dessous, et c'est un des titres de satisfaction revendiqués par Mme Catherine Trautmann, le projet de loi de finances pour 2000 engage une mutation de la structure de financement de l'audiovisuel public. Les ressources publiques représenteront en 2000 74 % du total des recettes contre 69,4 % en 1999, les ressources de publicité et de parrainage passant de 26 % à 21,9 %.
|
LFI 1996 |
LFI 1997 |
LFI 1998 |
LFI 1999 |
PLF 2000 |
BUDGET GLOBAL |
17 192,8 |
17 429,7 |
18 004,2 |
18 478,0 |
19 326,0 |
% |
100,0 % |
100,0 % |
100,0 % |
100,0 % |
100,0 % |
DONT
|
|
|
|
|
|
% |
72,9 % |
69,1 % |
69,0 % |
69,4 % |
74,0 % |
PUBLICITÉ + PARRAINAGE |
3 622,3 |
4 473,9 |
4 690,3 |
4 795,4 |
4 247,0 |
% |
21,1 % |
25,7 % |
26,1 % |
26,0 % |
21,9 % |
AUTRES |
1 036,4 |
914,0 |
891,3 |
859,9 |
792,0 |
% |
6 % |
5,2 % |
5,0 % |
4,7 % |
4,1 % |
Cette évolution est rendue possible par l'augmentation sensible du produit de la redevance et par la très importante augmentation des crédits budgétaires de remboursement des exonérations de redevance, que montre le tableau ci-dessous :
EN MILLIONS DE FRANCS |
LFI 1996 |
LFI 1997 |
LFI 1998 |
LFI 1999 |
PLF 2000 |
REDEVANCE AUDIOVISUELLE |
10 743,6. |
10 922,0 |
11 681,5 |
12 205,7 |
12 988,5 |
ÉVOLUTION EN MONTANT |
|
178,4 |
759,5 |
569,2 |
737,8 |
ÉVOLUTION EN % |
|
1,7 % |
7,0 % |
4,9 % |
6,0 % |
CRÉDITS BUDGÉTAIRES DESTINS À REMBOURSER LES EXONÉRATIONS DE REDEVANCE |
1 403,9 |
672,8 |
289,1 |
120,0 |
881,5 |
ÉVOLUTION EN MONTANT |
|
-731,1 |
-383,7 |
-169,1 |
761,5 |
ÉVOLUTION EN % |
|
-52,1 % |
-57,0 % |
-58,5 % |
634,6 % |
SUBVENTION DU MINISTÈRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES À RFI |
386,6 |
447,0 |
452,0 |
452,0 |
452,0 |
ÉVOLUTION EN MONTANT |
|
60,4 |
5,0 |
0,0 |
0,0 |
ÉVOLUTION EN % |
|
15,6 % |
1,1 % |
0,0 % |
0,0 % |
TOTAL DES RESSOURCES PUBLIQUES |
12 534,1 |
12 041,8 |
12 422,6 |
12 822,7 |
14 322,0 |
ÉVOLUTION EN MONTANT |
|
-492,3 |
380,8 |
400,1 |
1 499,3 |
ÉVOLUTION EN % |
|
-3,9 % |
3,2 % |
3,2 % |
11,7 % |
En ce
qui concerne la redevance, il convient de noter que le taux d'augmentation du
tarif sera, comme en 1999, égal à celui de l'inflation
prévisionnelle : + 0,9 %.
Le tarif appliqué à un récepteur couleur
s'élèvera en 2000 à 751 francs contre 744 en 1999.
L'augmentation annoncée des recettes, 737,9 millions de francs, ne
provient donc pas de celle des tarifs, mais pour l'essentiel d'une
amélioration du prélèvement, due aux progrès de la
lutte contre l'évasion fiscale. Le croisement du fichier de la taxe
d'habitation et de celui de la redevance, autorisé par la loi de
finances pour 1999, paraît ainsi avoir des effets positifs sur les
recettes.
En ce qui concerne les crédits budgétaires, en augmentation de
634,6 %, il convient de noter qu'ils seront désormais
affectés, afin de les mettre à l'abri de la régulation
budgétaire, au compte d'emploi de la redevance audiovisuelle,
opération dont votre rapporteur ne peut qu'approuver l'intention tout en
s'interrogeant sur l'orthodoxie d'une opération qui assimile à
des recettes de redevance des crédits budgétaires un peu
arbitrairement affublés de l'étiquette
" remboursement ".
Il faut enfin noter que l'augmentation de 1,499 milliard des ressources
publiques du secteur audiovisuel est supérieur à la baisse des
ressources propres des organismes : 616 millions de francs, dont
572,7 millions de francs de baisse des recettes publicitaires de France 2
et de France 3 imputée à la diminution de la durée horaire
des écrans publicitaires, et 53,3 millions de francs de baisse des
autres ressources propres, généralement surévaluées
par les lois de finances. successives.
Cette évolution globale se retrouve dans la structure du budget de
France 2 et dans celle du budget de France 3, comme les tableaux suivants le
montrent.
ÉVOLUTION DE LA STRUCTURE DE FINANCEMENT DE FRANCE 2
EN MILLIONS DE FRANCS |
LFI 1996 |
LFI 1997 |
LFI 1998 |
LFI 1999 |
PLF 2000 |
BUDGET GLOBAL |
4 996,7 |
5 015,2 |
5 187,3 |
5 316,0 |
5 720,7 |
% |
100 % |
100,0 % |
100,0 % |
100,0 % |
100,0 % |
DONT RESSOURCES PUBLIQUES |
2 653,1 |
2 403,0 |
2 467,5 |
2 588,0 |
3 382,0 |
% |
53,1 % |
47,9 % |
47,6 % |
48,7 % |
59,1 % |
PUBLICITÉ + PARRAINAGE |
2 253,6 |
2 542,2 |
2 649,8 |
2 658,0 |
2 295,5 |
% |
45,1 % |
50,7 % |
51,1 % |
50,0 % |
40,1 % |
AUTRES |
90,0 |
70,0 |
70,0 |
70,0 |
43,2 |
% |
1,8 % |
1,4 % |
1,3 % |
1,3 % |
0,8 % |
ÉVOLUTION DE LA STRUCTURE DE FINANCEMENT DE FRANCE 3
EN MILLIONS DE FRANCS |
LFI 1996 |
LFI 1997 |
LFI 1998 |
LFI 1999 |
PLF 2000 |
BUDGET GLOBAL |
5 240,3 |
5 505,8 |
5 643,4 |
5 849,2 |
6 156,4 |
% |
100 % |
100,0 % |
100,0 % |
100,0 % |
100,0 % |
DONT RESSOURCES PUBLIQUES |
3 618,2 |
3 341,5 |
3 398,1 |
3 543,0 |
4 086,9 |
% |
69,0 % |
60,7 % |
60,2 % |
60,6 % |
66,4 % |
PUBLICITÉ + PARRAINAGE |
1 186,2 |
1 763,9 |
1 844,9 |
1 907,8 |
1 710,7 |
% |
22,6 % |
32,0 % |
32,7 % |
32,6 % |
27,8 % |
AUTRES |
435,9 |
400,4 |
400,4 |
398,4 |
358,8 |
% |
8,3 % |
7,3 % |
7,1 % |
6,8 % |
5,8 % |
Déjà, le budget de 1999 avait limité les
recettes de publicité et de parrainage à 50 % du budget de
France 2 (contre 51,1 % en 1998) et les avait stabilisées à
une part de 32,6 % du budget de France 3.
Le budget de 2000 limite la part des recettes de publicité et de
parrainage à 40,1 % du budget de France 2 et à 27,8 %
de celui de France 3. Les ressources publiques représenteront donc
59,1 % du budget de France 2 et 66,4 % de celui de France 3.
La progression des concours publics atteint 30,7 % dans le budget de
France 2 et 15,4 % dans celui de France 3. D'après le
ministère de la culture, cette progression non seulement compense la
réduction de la durée de la publicité diffusée sur
les deux antennes et permet de mettre fin à la surévaluation
habituelle des recettes autres que commerciales, mais encore -et on verra
ci-dessous que cela est plus discutable- elle procure à France 2 et
à France 3 les moyens de leur développement, notamment en
matière de programmes.
Ainsi se trouve confirmée une évolution que de nombreux
observateurs appelaient depuis longtemps de leurs voeux.
Si votre rapporteur approuve toute réorientation des financements de
l'audiovisuel public qui permettra aux chaînes de desserrer la
dépendance des programmes à l'égard de la cible
emblématique que constitue pour le secteur commercial la
ménagère de moins de 50 ans, il n'en appelle pas moins
l'attention sur la nécessité d'éviter les raisonnements
sommaires.
D'autres facteurs sont à prendre en compte. La pérennité
des dotations budgétaires compensatoires, bien sûr, qu'aucun
mécanisme ne permet de faire prévaloir contre la règle de
l'annualité budgétaire, mais aussi les besoins de financement
liés au développement du secteur public et à sa
diversification dans le multimédia. Il est bon de maîtriser la
part de la publicité dans les ressources des chaînes afin de leur
permettre de réaliser leur vocation clé :
" fédérer " le plus vaste public. Il n'en serait pas
moins dangereux de lancer des " fatwas " doctrinaires contre un
financement publicitaire dont le secteur public peut avoir besoin.
Votre rapporteur réitère à cet égard la remarque
qu'il avançait dans plusieurs travaux antérieurs : le
débat du financement est une équation à beaucoup
d'inconnues qu'il convient d'aborder avec réalisme. Les
développements qui suivent montrent que l'on peut aussi
s'inquiéter de la diminution des recettes publicitaires, quand elle
devance les intentions du Gouvernement. L'avenir pourrait démontrer que
leur plafonnement peut être porteur de régression pour
l'audiovisuel public.
La seconde partie de ce rapport envisage cette hypothèse à la
lumière de l'exercice budgétaire 1998 de France 2 et de France 3,
et de ses prolongements probables sur l'exercice 1999.
II. UNE FRAGILITÉ LATENTE
Les prévisions du projet de budget pour 2000 paraissent assez largement bâties sur le sable des déficits cumulés des exercices précédents. A l'origine de la situation dégradée des comptes des organismes, se trouve une crise des ressources publicitaires dont la prolongation est source d'inquiétude sur la capacité de l'audiovisuel public à mettre en oeuvre les stratégies de développement indispensable à son entrée dans l'ère numérique.
A. LA CRISE DES RESSOURCES PUBLICITAIRES
On peut
saisir cette crise à travers les prévisions de recettes de 1999
à France Télévision.
Les objectifs fixés par la loi de finances de 1999 étaient en
progression, pour France Télévision, de 1,8 % par rapport
à ceux de 1998, mais de 3,5 % par rapport aux réalisations
de la même année, comme le montre le tableau ci-dessous.
En MF H.T. |
1998 |
1999 |
Evolution en % |
||
|
Loi de finances |
Réalisations |
Loi de finances |
/LDF 98 |
/ R 98 |
France 2 |
2 514 |
2 487 |
2 526 |
+ 0,5 % |
+ 1,6 % |
France 3 |
1 744 |
1 701 |
1 807 |
+ 3,6 % |
+ 6,2 % |
Total France Télévision |
4 258 |
4 188 |
4 333 |
+ 1,8 % |
+ 3,5 % |
Avec la
dégradation de l'audience des chaînes publiques, les objectifs de
1999 présentaient un risque non négligeable, notamment pour
France 3, pour laquelle une croissance réelle de + 6,2 %
était irréaliste.
C'est pourquoi, à la suite de la répartition d'un excédent
exceptionnel de perception de redevance, l'Etat a réduit le montant de
publicité nette retenu en 1999 pour les budgets de France 2 et France 3.
Par lettre commune du 8 juin 1999, la ministre de la culture et de la
communication et le secrétaire d'Etat au budget ont notifié les
nouveaux objectifs résultant de cette décision, retracés
dans le tableau suivant.
En MF |
Réalisations 1998 |
Objectifs 1999 modifiés |
Évolution en % |
France 2 |
2 487 |
2 511 |
+ 1,0 % |
France 3 |
1 701 |
1 772 |
+ 4,2 % |
France Télévision |
4 188 |
4 283 |
+ 2,3 % |
Ces
rectifications ne permettront pas pour autant d'équilibrer comptes de
France 2 et de France 3 en 1999.
En effet, comme le montre le tableau ci-dessous, les résultats
enregistrés sur les sept premiers mois de 1999 sont en retard sensible
par rapport aux objectifs modifiés, et le rattrapage est improbable
d'ici la fin de l'année.
En MF (HT) |
Objectifs corrigés au 31 juillet 99 |
Réalisations au 31 juillet 99 |
Ecart sur objectifs 99 (MF) |
France 2 |
1 400 |
1 324 |
- 76 |
France 3 |
999 |
923 |
- 76 |
France Télévision |
2 399 |
2 247 |
- 152 |
Cette
situation s'explique par la conjonction de plusieurs facteurs :
- l'affaiblissement relatif du marché
" télévision " par rapport aux autres grands
supports : au premier semestre 1999, les ventes publicitaires de
l'ensemble des chaîne TV ont crû de + 6 % sur 1998, contre +
9,6 % pour la presse et + 11,7 % pour la radio.
- le renforcement de la concurrence, du fait à la fois de
l'évolution des performances en audience (chacune des deux chaînes
privées gagne près d'1 point de part d'audience sur les
ménagères de moins de 50 ans) et de l'allongement des
écrans de coupure de TF1.
- une réelle déstabilisation du marché, sous l'effet des
différentes mesures de limitation publicitaire envisagées sur les
chaînes publiques, certains annonceurs privilégiant dès
cette année les télévisions commerciales dans
l'affectation de leur budget.
- enfin et surtout, la régression des audiences de France 2 et de France
3 notamment sur les tranches horaires les plus porteuses de chiffre d'affaires,
est sensible et inquiétante, comme le montre le tableau
suivant.
PART D'AUDIENCE (TRANCHE 19 H - 22 H) |
||||||
Ménagères <50 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
||
France 2
|
22,3 |
21,4 |
19,3 |
18,8 |
(-4 %) |
|
Ecrans publicitaires |
20,2 |
18,6 |
17,0 |
15,4 |
(-11 %) |
|
France 3
|
17,0 |
16,1 |
14,9 |
14,3 |
(-6 %) |
|
Ecrans publicitaires |
16,6 |
16,3 |
15,4 |
13,8 |
(-12 %) |
On notera en particulier qu'au premier semestre 1999, l'efficacité des écrans publicitaires diffusés par France Télévision a diminué de 11 à 12 % par rapport aux 6 premiers mois de l'année précédente ; par rapport à 1996, la chute est de- 24 %sur France 2 et de - 17 % sur France 3.
*
* *
Cette situation, qui prolonge celle de 1998, pourrait à la rigueur susciter la satisfaction des partisans les plus virulents de la restructuration à marche forcée des finances de chaînes publiques. Une fois n'est pas coutume : le marché aurait précédé la décision politique. Votre rapporteur y voit plutôt la traduction d'une faiblesse de l'image du secteur public, et la marque d'une fragilité financière qui ne laissent pas de l'inquiéter.
B. UNE SITUATION FINANCIÈRE DÉGRADÉE
Selon
certaines informations, la situation exposée ci-dessus pourrait conduire
France Télévision à enregistrer en 1999 un déficit
budgétaire avoisinant 200 millions de francs. Lors de son audition
par votre commission, le ministre de la culture a estimé, sans
dissimuler le caractère préoccupant de l'évolution des
comptes, que le déficit budgétaire serait inférieur
à cette somme.
Votre rapporteur ne dispose pas des éléments qui lui
permettraient d'affiner ces prévisions. Il est du reste suffisant de
noter qu'elles s'inscrivent dans une tendance à la dégradation
comptable tout à fait préoccupante.
Les bilans pour 1998 de France 2 et de France 3, publiés
dernièrement par le CSA, fournissent des informations
intéressante à cet égard.
Le résultat budgétaire de France 2 a été
déficitaire de 103,6 millions de francs en 1998 (contre
12,2 millions de francs en 1997), en raison d'un fort décalage
entre la progression des charges (+ 77,8 millions de francs) et celle des
recettes (+25,8 millions de francs) par rapport aux prévisions. Les
ressources propres ont été inférieures de
37,1 millions de francs par rapport au projet de budget (dont
- 10,3 millions de francs pour les recettes de publicité et de
parrainage). Cette dégradation a été partiellement
compensée par l'octroi, dans le cadre du collectif budgétaire, de
15 millions de francs de ressources supplémentaires de redevance.
Corrélativement, la part de marché publicitaire de France 2 est
passée de 18,3 % à 1997 à 17,1 % en 1998, M6
dépassant la chaîne publique en emportant 18,4 % de part de
marché publicitaire contre 17,4 % en 1997.
Parmi les facteurs explicatifs de cette situation, il faut citer une nouvelle
fois bien entendu la diminution progressive de l'audience, passée de
24,2 % en 1996 à 23,7 % en 1997, puis 22,5 % en 1998. On
a vu ci-dessus que la tendance 1999 confirme cette dégradation. On peut
remonter plus loin : entre 1996 et 1998, France 2 a perdu 7 % de part
d'audience, situation d'autant plus préoccupante qu'elle ne peut
être présentée, que l'on sache, comme la conséquence
d'une programmation plus exigeante et plus proche de la tonalité
" service public " que l'on attend de la grille de France 2.
Ajoutons à la liste des sujets d'inquiétude que le recul de
l'audience de France 2 touche toutes les tranches horaires, mais
spécialement l'avant-soirée (- 8,5 % de part d'audience
entre 18 H et 20 H 30) et la première partie de soirée
(- 9,8 %). Le même phénomène est à
l'origine de la dégradation, évoquée plus haut,
constatée en 1999.
En ce qui concerne France 3, on notera que l'exercice budgétaire 1998
est moins déficitaire que celui de 1997. Cette amélioration
relative est due à la mise en oeuvre d'un programme d'économie,
les dépenses ayant été inférieures de
3,4 millions de francs aux montants inscrits dans les prévisions,
alors que les ressources l'étaient de 1,1 millions de francs.
La prise en compte de structure des ressources conduit cependant à
nuancer le caractère assez optimiste des chiffres qui
précèdent. Les recettes publicitaires de France 3 ont
été inférieures de 43 millions de francs aux montants
prévus, déficit compensé par le versement d'un
complément de redevance de 35 millions de francs et par une
plus-value de recettes de parrainage de 20,1 millions de francs. La part
de marché publicitaire de France 3 est passée de 11,3 % en
1997 à 10,9 % en 1998. Sa part d'audience moyenne a
été de 17 %, stable par rapport à 1997. Elle recule
néanmoins sur une plus longue période, - 4 % entre
1996 et 1998 sur le public de 4 ans et plus. Si France 3 n'a pas perdu
globalement de téléspectateurs de 1996 à 1998, elle a peu
profité de la hausse globale de 5,1 % de l'audience cumulée
de la télévision, et la baisse de sa part d'audience est
particulièrement accentuée en avant-soirée (-11,3 %)
et en soirée (- 5,5 %). Seule la deuxième partie de
soirée (souvent vouée aux émissions culturelles)
enregistre un redressement de + 3,8 %.
C. UN PARI INCERTAIN SUR LES CRÉDITS BUDGÉTAIRES
Toutes
les informations disponibles sur la situation budgétaire de France 2 et
de France 3 conduisent à un diagnostic de précarité :
un cycle de déficits se profile, que le resserrement autoritaire de la
gamme de ressources va accentuer, à moins que les ministres de la
culture n'obtiennent, année après année, les
crédits budgétaires nécessaires à l'apurement des
comptes et au financement de la diversification. Il n'y aura donc pas
d'embellie budgétaire pour France Télévision, seulement
l'épreuve annuelle d'un processus budgétaire dont aucun montage
juridico-financier ne dissimule le caractère
irrémédiablement aléatoire.
L'inscription des crédits de remboursement des exonérations de
redevance à un compte d'affectation spéciale ne saurait faire
illusion à cet égard. Si ce mécanisme offre des
protections contre la régulation en cours d'exercice, rien n'assure la
pérennité de la dotation initiale, soumise, comme l'ensemble des
crédits budgétaires, aux fluctuations de la conjoncture, et dont
au surplus aucun instrument ne permet de mesurer objectivement le niveau
théorique : les exonérations ne font l'objet que
d'évaluations.
En ce qui concerne la redevance, autre source publique de financement dont
chacun reconnaît les avantages (stabilité et
sécurité de la recette), le gel des taux depuis deux ans en
francs constants montre que le gouvernement a fait le choix du réalisme.
Plus d'une fois, votre rapporteur a mis l'accent sur le caractère
archaïque de ce prélèvement qui finance une part de plus en
plus étroite de l'offre audiovisuelle, une part plus étroite
encore de l'offre effectivement consommée, et qui s'analysera de plus en
plus comme la rémunération arbitraire d'une consommation
virtuelle forcée. A plus long terme, la possibilité de recevoir
des émissions de télévision sur les écrans
d'ordinateur, non taxés, aura les mêmes conséquences
déstabilisatrices sur cette ressource.
Il convient, aussi de tenir compte à cet égard de
l'évolution globale de la communication audiovisuelle. Un accroissement
excessif du prélèvement effectué par l'Etat au profit de
la télévision publique peut être analysé comme une
préemption autoritaire sur le budget communication des
téléspectateurs, et serait en profonde contradiction avec les
nouveaux espaces de liberté dont les bouleversements en cours permettent
l'apparition.
Nous sommes loin d'avoir atteint l'excès, estiment les partisans d'une
augmentation sensible de la redevance, en mettant en avant l'expérience
de certains pays étrangers, en particulier l'Allemagne où le taux
dépasse 1 000 francs. Mais ces niveaux ont été
atteints dans un contexte tout à fait différent, marqué
par la rareté de l'offre audiovisuelle et la primauté du secteur
public.
Si l'effet d'accoutumance permet à l'Allemagne de maintenir de tels taux
alors que l'audience de la télévision publique régresse
sensiblement dans ce pays, on ne peut attendre la même attitude de la
part du téléspectateur français, habitué à
un prélèvement plus modeste et dont le désir de choisir
librement l'affectation de son budget communication s'exprime dans le
succès des bouquets satellitaires payants. Il convient donc d'être
attentif au message délivré par les quelque
900 000 abonnés à Canal satellite et 500 000
abonnés à TPS.
Le projet de budget de 2000 traduit après celui de 1999 une conscience
de cette réalité, difficilement compatible avec le choix
affirmé de la régression des recettes publicitaires. Il effectue
donc un pari incertain en liant à l'évolution des crédits
budgétaires l'avenir de l'audiovisuel public.
III. LES MESURES NOUVELLES
Ce n'est
pas par goût du paradoxe que votre rapporteur se penche longuement sur le
pari incertain que constitue la montée rapide de la part des
crédits budgétaires dans le financement de France 2 et de
France 3, en examinant un projet de budget qui les augmente de
façon spectaculaire.
Les montants accordés pour 2000, qui seront peut-être les seuils
de repli de demain, restent insuffisants pour assurer au secteur public les
moyens de son développement et de sa diversification,
c'est-à-dire les moyens de poursuivre l'exécution correcte de ses
missions à l'heure où se profilent la numérisation de la
diffusion hertzienne terrestre et les investissements lourds qui devront
l'accompagner.
Force est en effet de constater que les mesures nouvelles prévues dans
le projet de loi de finances sont modestes, et guère à la hauteur
des enjeux de ce que l'on présente parfois comme la nouvelle
frontière du service public.
A. FAIBLESSE DU RELIQUAT DISPONIBLE
Lors de
son audition du 26 octobre par votre commission des affaires culturelles,
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication,
estimait souhaitable, en réponse à une question de votre
rapporteur, de traiter le problème du déficit budgétaire
de France 2 et de France 3 en 1999 dans le cadre de la loi de finances
rectificative " afin de ne pas empiéter sur les marges de
financement supplémentaires que le budget de 2000 accorde aux
chaînes ". Elle estimait par ailleurs cette marge de
développement à quelque 300 millions de francs.
Si le déficit s'élève à 200 millions de francs,
chiffre communiqué à votre rapporteur, et si la loi de finances
rectificative octroie à France télévision, comme il est
prévu, un supplément de crédits de 95 millions de francs
pris sur les excédents de redevance de 1998, le reliquat disponible sera
bien modeste et le développement des chaînes bien
oblitéré à un moment crucial de leur devenir.
Dans ces conditions, l'exercice budgétaire 2000 sera-t-il
véritablement " la première étape de la mise en
oeuvre des engagements pris par le Gouvernement en vue de redonner au secteur
public audiovisuel toute sa légitimité et d'assurer son
développement ", pour reprendre les termes du ministre ?
La réponse est au moins en suspens. Et si l'on ne peut critiquer la
modestie des prévisions de recettes publicitaires, car le marché
ne permettrait pas d'espérer mieux, on est fondé à
s'inquiéter des réalités qui pointent derrière les
accents triomphalistes du ministre de la culture et de la communication :
si les perspectives publicitaires avaient été meilleures pour
elle, France télévision aurait-elle été
autorisée à en tirer partie pour financer son
développement ? La démarche doctrinaire du gouvernement
suggère une réponse négative.
Cette rigidité, dangereuse pour l'audiovisuel public, constitue
nécessairement un des principaux critères d'appréciation
du projet de budget. Le ministre peut avancer des chiffres séduisants, +
4,8 % pour l'ensemble de l'audiovisuel public, + 7,6 % pour France 2,
+ 5,2 % pour France 3, + 11,7 % de ressources publiques... Certes,
mais pour faire quoi ?
B. MODESTIE DES MESURES NOUVELLES
Si le
gouvernement annonce une enveloppe globale de 755,9 millions de francs
pour l'audiovisuel public, les perspectives qui sont ouvertes en matière
de développement sont en réalité modestes.
Cette somme comprend en effet une enveloppe de 63 millions de francs au
titre des glissements salariaux ainsi que diverses enveloppes destinées
à restaurer l'équilibre des comptes de certaines
sociétés : les 41,4 millions de francs annoncés
pour l'INA sont ainsi destinés à accompagner le plan de retour
à l'équilibre budgétaire en 2000.
Par ailleurs, les 19,6 millions de francs annoncés pour RFI, qui
devraient permettre à la chaîne, selon l'annonce qui a
été faite, d'assumer les coûts liés à la
modernisation des modalités de diffusion de ses programmes et au
renforcement de sa diffusion en direction des zones de conflits (Balkans),
serviront en réalité, selon les renseignements recueillis par
votre rapporteur, à assurer le financement, non assuré par le
projet de budget, des glissements salariaux.
En ce qui concerne Radio France, 45,8 millions de francs devraient
permettre d'engager une nouvelle étape du chantier stratégique de
la modernisation de son outil de production, tout en développant les
services associés innovants. A ce rythme le besoin de financement
correspondant, évalué à 200 millions de francs par le
plan stratégique de la chaîne, devrait être assez rapidement
satisfait. Mais ici encore, il semble que la réalité des comptes
soit un peu différente : la mesure nouvelle servira en fait
à financer les augmentations glissantes de charges, telles que
l'augmentation des tarifs de l'AFP.
En ce qui concerne enfin France Télévision, les moyens
supplémentaires accordés à France 2 iront au renforcement
des investissements de la chaîne en matière d'information et de
coproduction de fictions cinématographiques et
télévisuelles, et permettront à la société
de conduire une politique plus active d'acquisitions de droits, notamment
cinématographiques et sportifs.
Le numérique et le multimédia ne sont guère
évoqués dans ces perspectives.
Il en est de même pour France 3 dont les moyens supplémentaires
seront consacrés pour la plus grande part à la poursuite du
développement des programmes régionaux, le développement
de l'offre régionale étant complétée, sur l'antenne
nationale, par une augmentation des moyens consacrés aux coproductions
de fictions cinématographiques et télévisuelles.
*
* *
EXAMEN EN COMMISSION
Au cours
d'une séance tenue le
mercredi 17 novembre 1999
, la commission a
procédé à l'examen du rapport pour avis
de M. Jean-Paul
Hugot sur les crédits de la communication audiovisuelle pour 2000.
Un débat a suivi l'exposé du rapporteur pour avis.
M. Louis de Broissia
a demandé si les répercussions de
l'application de la diminution à 35 heures du temps de travail avaient
été chiffrées par les organismes de l'audiovisuel public,
si les chaînes publiques avaient élaboré des plans de
développement dans le numérique et le multimédia, et si le
budget de 2000 confirmait l'engagement du Gouvernement en faveur de la
pluri-annualité du financement des organismes.
Mme Danièle Pourtaud
a rappelé l'amputation des
crédits de l'audiovisuel public effectué en 1997, l'augmentation
très forte de la part des ressources publicitaires depuis plusieurs
années, la diminution des crédits affectés à la
production des programmes, avant de juger que le projet de budget de 2000
était une étape importante pour le développement du
service public. Elle a estimé que la diminution des recettes
publicitaires de France 2 et de France 3 était un choix politique qui
donnerait aux chaînes la liberté d'accomplir leur mission et a
appelé la commission à adopter le projet de budget, afin de
rester cohérente avec ses positions passées en faveur de la
diminution de la part des recettes publicitaires.
M. Gérard Collomb
a demandé au rapporteur ce qu'il
proposait de faire pour rectifier les défauts du projet de budget et
donner au secteur public les moyens de se développer.
M. Jean Bernard
a demandé si la répartition des
crédits entre les différents organismes tenait compte des besoins
de financements liés à leur développement.
M. Ivan Renar
a remarqué qu'il serait plus facile
d'évaluer le projet de budget si le projet de loi réformant la
loi du 30 septembre 1986 avait déjà été
adopté. Il a demandé si Radio France disposait des moyens
financiers nécessaires pour s'adapter au numérique, et a
estimé qu'il fallait engager une réflexion dynamique sur la
création de nouveaux modes de financement du secteur public. Il s'est
enfin prononcé en faveur de l'adoption des crédits de
l'audiovisuel public pour 2000.
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur pour avis
, a présenté les
éléments de réponse suivants :
- le projet de budget est tourné vers la restauration d'une situation
qui continue de se dégrader et non vers le développement des
organismes publics. Il n'ouvre pas de perspectives dynamiques. Le projet de loi
que le Sénat discutera en janvier prochain permettra d'identifier des
voies de développement.
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur pour avis
, a précisé
à cet égard qu'il comptait proposer à la commission, dans
le domaine de la diffusion hertzienne terrestre numérique, des mesures
susceptibles d'ouvrir ces voies nouvelles aux chaînes publiques ;
- en ce qui concerne le financement à terme des organismes publics,
l'évolution de l'Agence France Presse constituera un
précédent intéressant. Il est utile de noter que le
président de France Télévision a développé
récemment dans la presse l'idée d'asseoir l'audiovisuel public
sur un système de fondation. Cette notion mérite d'être
approfondie. Elle repose sur l'ambition de mettre en oeuvre des objectifs
d'intérêt public en évitant les critiques que peut susciter
l'implication exclusive de l'Etat dans une activité soumise à la
liberté de la concurrence. Un des éléments majeurs du
statut des fondations prenant en charge des missions relevant du secteur public
de l'audiovisuel serait l'absence de but lucratif ;
- en l'absence des moyens financiers suffisants, les organismes de
l'audiovisuel public ont de la difficulté à élaborer de
véritables plans de développement. Un montant de 300 millions de
francs est prévue pour France Télévision dans le projet de
budget de 2000 mais le déficit, qui devrait dépasser 200 millions
de francs, va très sérieusement écorner cette marge ;
- la négociation du passage aux 35 heures a provoqué une
grève à France Télévision. La discussion achoppe
sur le nombre de jours qui devraient être libérés en
contrepartie de la flexibilité du temps de travail. En l'absence de
mandat écrit de négociation du Gouvernement aux
présidents, il n'est pas possible d'avoir connaissance de la marge de
manoeuvre disponible ;
- le président de l'Institut national de l'audiovisuel souhaite
opérer la numérisation de l'entreprise dans un délai de
trois ans. Le gel de ces crédits de 2000 ne permet pas de disposer des
moyens nécessaires. Le projet de budget de Radio France ne dégage
pas non plus les moyens nécessaires à la numérisation.
A l'issue de ce débat, a commission a décidé de
s'en
remettre à la sagesse du Sénat pour l'adoption ou le rejet des
crédits de la communication audiovisuelle en 2000
.