Projet de loi de finances pour 2000, adopté par l'Assemblée nationale. TOME XI - Presse écrite
BROISSIA (Louis de)
AVIS 90-TOME XI (1999-2000) - commission des affaires culturelles
Tableau comparatif au format Acrobat ( 32 1 Ko )Table des matières
-
INTRODUCTION
- I. LA SITUATION DE LA PRESSE ÉCRITE ET L'AIDE DE L'ÉTAT
-
II. LES CRÉDITS DE 2000
-
A. LES AIDES DIRECTES
- 1. Evolution globale
-
2. Les différentes aides
- a) L'aide aux quotidiens nationaux à faibles ressources publicitaires
- b) L'aide aux quotidiens régionaux, départementaux et locaux d'information politique et générale à faibles ressources de petites annonces
- c) L'aide au portage des quotidiens
- d) Le fonds d'aide à la diffusion de la presse hebdomadaire régional et locale
- e) Le fonds de remboursement des charges de fac-similé
- f) Les crédits de remboursement à la SNCF des réductions de tarifs accordées à la presse
- g) Le fonds d'aide à l'expansion de la presse française à l'étranger
- h) Le soutien au plan social de la presse parisienne
- i) Le remboursement des cotisations sociales de portage de la presse nationale
- j) Le fonds d'aide aux investissements multimédia
- k) Le fonds de modernisation de la presse
- B. LES AIDES INDIRECTES
-
A. LES AIDES DIRECTES
- III. L'AVENIR DE L'AFP
- EXAMEN EN COMMISSION
- CONCLUSION
N° 90
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1999-2000
Annexe au procès-verbal de la séance du 25 novembre 1999.
AVIS
PRÉSENTÉ
au nom de la commission des Affaires culturelles (1) sur le projet de loi de finances pour 2000 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,
TOME XI
PRESSE ÉCRITE
Par M. Louis de BROISSIA,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de : MM. Adrien Gouteyron, président ; Jean Bernadaux, James Bordas, Jean-Louis Carrère, Jean-Paul Hugot, Pierre Laffitte, Ivan Renar, vice-présidents ; Alain Dufaut, Ambroise Dupont, André Maman, Mme Danièle Pourtaud, secrétaires ; MM. François Abadie, Jean Arthuis, Jean Bernard, André Bohl, Louis de Broissia, Jean-Claude Carle, Michel Charzat, Gérard Collomb, Xavier Darcos, Fernand Demilly, André Diligent, Jacques Donnay, Michel Dreyfus-Schmidt, Jean-Léonce Dupont, Daniel Eckenspieller, Jean-Pierre Fourcade, Bernard Fournier, Jean-Noël Guérini, Marcel Henry, Roger Hesling, Pierre Jeambrun, Serge Lagauche, Robert Laufoaulu, Jacques Legendre, Serge Lepeltier, Louis Le Pensec, Mme Hélène Luc, MM. Pierre Martin , Jean-Luc Miraux, Philippe Nachbar, Jean-François Picheral, Guy Poirieux, Jack Ralite, Victor Reux, Philippe Richert, Michel Rufin, Claude Saunier, René-Pierre Signé, Jacques Valade, Albert Vecten, Marcel Vidal.
Voir
les numéros
:
Assemblée nationale
(
11
ème législ.) :
1805
,
1861
à
1866
et T.A.
370
.
Sénat
:
88
et
89
(annexe n°
10
)
(1999-2000).
Lois de finances
.
INTRODUCTION
Mesdames, Messieurs,
Le projet de budget de la presse pour 2000 augmente de 3,2 %. C'est un
motif de satisfaction.
Votre commission des affaires culturelles se doit aussi d'approuver la
poursuite de la réorientation des aides en faveur de la presse
d'information générale et politique. Ceci correspond aux voeux
qu'elle avait exprimés les années passées.
Le projet de budget consacre par ailleurs le lancement du fonds de
modernisation de la presse, qui facilitera l'adaptation de la presse
quotidienne et assimilée à la conjoncture difficile qu'elle subit
depuis plusieurs années. C'est un motif d'espoir.
Il reste bien entendu beaucoup à faire pour aider la presse a sortir du
marasme dans lequel de nombreux titres sont plongés ou sont en voie de
plonger en dépit du dynamisme des rédactions et des
équipes de direction. C'est que la solution du problème
peut-être le plus crucial, la raréfaction et le vieillissement du
lectorat, dépasse sans doute la presse. Il conviendrait de
réfléchir dans le cadre le plus large possible aux initiatives
à prendre pour susciter dans la jeunesse le goût un peu perdu de
la lecture. L'Éducation nationale a sans doute un rôle essentiel
à jouer à cet égard.
Votre commission souhaite aussi qu'une impulsion soit donnée à
l'idée de pluriannualité des aides : pour ajuster ses
stratégies de développement, la presse a besoin de savoir ce
qu'elle peut attendre de l'Etat en moyenne période.
Ce sont les deux pistes sur lesquelles votre commission des affaires
culturelles souhaite que soit lancée la réflexion pour l'avenir,
au delà du constat de satisfaction globalement tiré de l'examen
du projet de budget 2000.
I. LA SITUATION DE LA PRESSE ÉCRITE ET L'AIDE DE L'ÉTAT
A. UNE ÉCONOMIE TOUJOURS FRAGILE
Le
chiffre d'affaires de la presse a progressé de 2,6 % en 1998, selon
l'enquête rapide du Service juridique et technique de l'information et de
la communication publiée chaque année. Mais cette
évolution est surtout due à l'augmentation des recettes de
publicité commerciale et à la forte progression des recettes
d'abonnement.
Les recettes de publicité ont en effet augmenté de 5,7 % et
celles des petites annonces de 17,8 % grâce à
l'amélioration de la conjoncture et à la reprise du marché
du travail et de celui de l'immobilier.
Cette reprise a particulièrement bénéficié à
la presse nationale, l'information générale et politique (+
11,9 %), à la presse locale d'information générale et
politique (+7,3 %) et à la presse spécialisée
technique et professionnelle (7,4 %). Les recettes publicitaires de la
presse spécialisée grand public n'ont augmenté que de
1,9 %, et celles de la presse gratuite que de 1,4 %.
En revanche, l'année 1998 a enregistré une quasi stagnation des
recettes de vente : + 0,5 %. Dans la mesure où la hausse de
prix est estimée pendant cette période à + 0,3 %, les
recettes de vente n'ont augmenté en volume que de 0,2 %. Ici se
mesure la fragilité des résultats de 1998.
Les recettes de la vente au numéro ont diminué de 0,8 %.
Celles de la vente par abonnement ont augmenté de 3 %, cette
augmentation étant inégalement répartie sur l'ensemble des
catégories de presse. Le total des ventes s'est accru de façon
particulièrement sensible pour la presse locale d'information
générale et politique (+ 2,4 %) et pour la presse
spécialisée, technique et professionnelle (+ 2,7 %).
Inversement, les ventes de la presse nationale d'information
générale et politique ont diminué de 1,3 %, et celles
de la presse spécialisée grand public ont diminué de
0,5 %.
En conséquence, la part des ventes dans le chiffre d'affaires de la
presse a diminué en 1998 d'un peu plus de 2 points par rapport à
1997.
Quant au tirage total annuel de l'ensemble de la presse, il a augmenté
de 0,2 %. Celui de la presse nationale d'information
générale et politique a diminué de 3,9 %, avec une
baisse du tirage des quotidiens de 2,8 % et une baisse des magazines
d'information de 7,4 %. En revanche, la presse locale d'information
générale et politique a vu son tirage augmenter de 0,7 %,
celui de la presse spécialisée grand public augmentant de
0,6 % et celui de la presse gratuite de 0,3 %.
La presse spécialisé technique et professionnelle a quant
à elle bénéficié d'une progression de son tirage
qui s'est élevé à 6,4 %.
B. L'ADAPTATION PROGRESSIVE DES AIDES
Il
serait intéressant d'interpréter les chiffres bruts qui
précèdent en fonction du régimes des aides publiques, mais
il n'existe, semble-t-il, aucun bilan de l'influence des aides de l'Etat sur
l'économie globale de la presse ou sur la situation des diverses
catégories de presse, aucune estimation de ce que serait la presse
écrite aujourd'hui si le système si complexe et divers que nous
connaissons n'existait pas. On peut le regretter.
En revanche, l'Etat ne ménage pas sa réflexion sur
l'évolution et la rationalisation des aides. Au demeurant, entre le plan
Sarkozy de 1995, élaboré à partir des observations de
groupes de travail constituées sur les aspects cruciaux de
l'économie de la presse, jusqu'à l'annonce par Mme Catherine
Trautmann, en octobre 1997, de l'élaboration d'un plan de soutien
à la modernisation des quotidiens et des hebdomadaires régionaux,
la réflexion a progressivement débouché sur une profonde
modification du système.
Le plan de 1995 apparaît en effet rétrospectivement comme le point
de départ d'une redistribution des cartes qui a été
poursuivie au rythme de la réforme tranquille des instruments existants
et de la création régulière de nouveaux mécanismes
d'aide.
S'agissant des
aides indirectes
, les accords Galmot de 1996 et 1997
entre l'Etat, la presse et la poste ont apporté des modifications
très significatives à la fois en matière de tarifs postaux
et de réglementation du transport des publications par la Poste.
L'expérience d'environ deux ans de mise en pratique de ces relations
nouvelles apparaît très largement positive.
S'agissant des
aides directes,
la politique conduite depuis quelques
années met l'accent sur l'aide à la modernisation des entreprises
de presse, à leur développement par la réduction de
certains de leurs coûts, ainsi que sur la nécessité d'aider
particulièrement la presse quotidienne et assimilée.
Les 11 fonds d'aide directe existants ont été soit
créés depuis moins de 5 ans, c'est le cas pour 6 d'entre eux,
soit, dans le même délai, fortement modifiés dans leurs
conditions de fonctionnement.
L'aide à la modernisation des entreprises de presse s'est traduite
notamment par la création du fonds d'aide au portage et de celui qui
permet le remboursement des cotisations sociales de portage pour les quotidiens
nationaux. Le fonds d'aide à l'investissement dans le multimédia,
créé en 1997, répond à la nécessité
de voir la presse écrite investir dans les nouvelles technologies
d'information. Les fonds d'aide à la transmission par fac-similé
et d'aide à la diffusion de la presse hebdomadaire régionale
répondent à la nécessité d'abaisser certains
coûts pour les entreprises. L'aide complémentaire au plan social
de la presse parisienne, mis en place un peu plus tôt, dès 1992,
répond à la même nécessité.
D'autres aides directes plus anciennes ont été modifiés
depuis quelques années. Il s'agit du remboursement à la SNCF de
réductions de tarif accordées à la presse (l'objectif
étant de donner la priorité aux quotidiens) et des fonds d'aide
aux quotidiens nationaux ou locaux à faibles ressources publicitaires ou
de petites annonces.
Si l'adaptation progressive des instruments d'aide provoque des
difficultés de tous ordres sur lesquelles votre commission a toujours
veillé à attirer l'attention du gouvernement, -et votre
rapporteur relève à nouveau la part minime des aides directes
distribuée à la presse quotidienne régionale, qui
représente pourtant la moitié de la preuve d'information
générale et politique- elle montre aussi que l'on ne peut
reprocher à l'Etat de rester inactif.
Mais où cet effort tranquille de réforme progressive conduit-il ?
C'est au fond la question essentielle à poser. La situation de la presse
ne s'est pas améliorée de façon significative. On peut se
demander en fin de compte si le véritable effort à consentir ne
serait pas du ressort de l'Education nationale. Le principal problème de
la presse est en effet en dernière analyse celui du vieillissement et de
la raréfaction de son lectorat. Il faut éduquer la jeunesse
scolaire à la lecture de la presse. Il y a déjà des
initiatives, des efforts. Peut-être faudrait-il les coordonner un peu
plus, on peut penser à un mécanisme du type fonds de concours.
Votre rapporteur propose d'ouvrir ce chantier.
Il souhaite aussi insister sur deux nécessités de plus en plus
cruciales :
- d'une part, la réorientation des aides poursuivie depuis 1995 trouvera
tout son sens dans l'étape supplémentaire que votre rapporteur
proposait l'année dernière dans son avis sur les crédits
de la presse pour 1999. Il s'agit de la pluriannualité des aides,
nécessaire afin de mettre les efforts de modernisation engagés
par la presse avec l'aide de l'Etat à l'annualité
budgétaire. Votre rapporteur notait à cet égard, et ceci
reste entièrement valable, qu'au moment où le gouvernement
reconnaît au profit de l'audiovisuel public la nécessité
pour l'entreprise moderne de communication de disposer de repères
pluriannuels sur l'engagement financier de l'Etat, il serait nécessaire
de réfléchir à l'élaboration d'instruments
juridiques permettant à la presse de prévoir quels concours elle
peut attendre de la puissance publique en moyenne période.
Tel est le second chantier que votre rapporteur s'obstine à proposer
pour orienter l'évolution du régime d'aides. Ce serait la
contrepartie légitime de la renonciation progressive aux instruments
globaux et non discriminants, pour lesquels la presse s'est longtemps battue,
et de leur remplacement par des aides ciblées et conditionnées,
qui comportent une certaine pérennité au profit des titres
bénéficiaires, et représentant donc une forme embryonnaire
et partielle de pluriannualité. A partir de ce constat, qui montre que
la pluriannualité correspond aux besoins d'aujourd'hui, il conviendrait
d'obtenir de l'Etat des engagements sur l'évolution des aides
traditionnelles ;
- d'autre part, il importe d'effectuer le bilan d'ensemble évoqué
ci-dessus, afin de disposer d'un instrument important d'évaluation de
l'acquis, ou de ce qui n'a pu être acquis.
II. LES CRÉDITS DE 2000
A. LES AIDES DIRECTES
1. Evolution globale
Dans son
rapport pour avis sur les crédits de 1999, votre rapporteur, tout en
considérant que le projet de budget de Mme Catherine Trautmann
procédait à une " honnête reconstitution " des
crédits de la presse appelait à une consolidation en 2000. Il
faisait ainsi allusion à la nécessaire pluriannualité,
évoquée précédemment. L'expression peut toutefois
être appliquée à l'évolution des aides
proposées en 2000 : + 3,2 %, quand les dépenses de
l'Etat progresseront globalement au rythme de l'inflation
prévisionnelle, c'est-à-dire de + 0,9 %. Les aides
à la presse reçoivent ainsi un caractère prioritaire au
sein du budget de l'Etat, ce dont votre rapporteur ne peut que se
réjouir.
Leur montant total s'établira à 260,8 millions de francs.
Si l'on ajoute à ce montant celui des abonnements souscrits par l'Etat
auprès de l'AFP, qui ne sont pas des aides directes mais contribuent
à la diminution des coûts de production, on atteint un montant de
868,24 millions de francs, en progression de 1,8 % par rapport
à 1999. Il faudra aussi, dorénavant, prendre en
considération le compte d'affectation spéciale du fonds de
modernisation des quotidiens et assimilés, dont les recettes sont
estimées à 200 millions de francs en 2000.
2. Les différentes aides
a) L'aide aux quotidiens nationaux à faibles ressources publicitaires
Elle
augmentera de 33 % en 2000, après avoir progressé de
5,3 % en 1999, pour s'établir à 26,6 millions de francs.
Cette aide est répartie en deux sections dont la première ne
peut-être inférieure à 85 % de la dotation globale.
Les conditions d'éligibilité au titre de la première
section sont les suivantes : être un quotidien de langue
française d'information politique et général à
diffusion nationale, paraissant cinq jours au moins par semaine, imprimé
sur papier journal et dont le tirage et la diffusion payante sont
respectivement inférieurs, en moyenne, à 250 000 et
150 000 exemplaires. Leur prix de vente doit être compris dans une
fourchette de + 30 % et - 10 % du prix de vente moyen
pondéré des quotidiens nationaux d'information politique et
générale. Enfin, les recettes publicitaires ne peuvent
excéder 25 % des recettes totales. Ces conditions sont
vérifiées sur les données de l'année
précédant celle de l'attribution de l'aide.
Le bénéfice de la seconde section est accordé aux journaux
répondant aux mêmes conditions, mais dont le prix de vente ne
dépasse pas 130 % du prix de vente moyen pondéré par
la diffusion annuelle en France des quotidiens nationaux d'information
politique et générale, sans qu'aucun plancher soit fixé.
La première section a été doté de
19,8 millions de francs en 1999 ; la seconde de
200 000 francs.
La répartition des aides s'effectue selon des modalités
nouvelles : elle commence par la détermination d'un taux de
subvention par exemplaire vendu pour chacune des tranches, qui ne doit pas
dépasser 8 % du prix de vente moyen pondéré des
quotidiens nationaux d'information générale et politique.
Ce taux unitaire est ensuite multiplié par le nombre d'exemplaires
vendus par chaque bénéficiaire. Toutefois, pour la
première tranche, il est abattu de 50 % au-delà des vingt
premiers millions d'exemplaires effectivement vendus par chaque
bénéficiaire. Cette disposition vise à favoriser les
journaux à faible diffusion. Il est envisagé de modifier les
critères de répartition des aides afin de mieux tenir compte de
la faiblesse du tirage.
En 1999, cinq titres ont bénéficié de cette aide : au
titre de la première tranche, La Croix et l'Humanité ; et
pour la seconde tranche, Mon Quotidien, le Petit Quotidien, l'Actu.
Les tableaux suivants indiquent la répartition des montants et le taux
des aides de la première section du fonds de 1994 à 1998.
Année |
Montant |
Evolution en % |
Taux |
Evolution en % |
1994 |
12.970.323 |
- 33,74 % |
0,2527 |
- 28,41 % |
1995 |
12.516.362 |
- 3,50 % |
0,2497 |
- 1,20 % |
1996 |
19.335.123 |
+ 54,48 % |
0,3870 |
+ 55,40 % |
1996 |
15.684.855 |
+25,31 % |
0,3180 |
+ 27,71 % |
1997 |
15.696.674 |
+ 0,075 % |
0,3430 |
+ 7,86 % |
1998 |
19.000.000 |
+ 21 % |
0,4597 |
+ 34,02 % |
b) L'aide aux quotidiens régionaux, départementaux et locaux d'information politique et générale à faibles ressources de petites annonces
La
dotation de ce fonds augmentera en 2000 de 3,7 % passant de
8,2 millions de francs à 8,5 millions de francs après
avoir progressé de 5,1 % en 1999.
Les modalités d'attribution des aides ont été
modifiées par le décret n° 97-1068 du 20 novembre 1997
qui distingue deux sections du fonds afin d'apporter une aide aux quotidiens
régionaux, départementaux et locaux à faibles ressources
en petites annonces subissant de fortes augmentations de leurs abonnements
postaux.
Pour chaque section, la répartition du montant global de l'aide est
définie proportionnellement au nombre d'exemplaires vendus, dans la
limite d'un plafond par exemplaire égal à 6 % du prix de
vente moyen des quotidiens éligibles à cette aide.
Les tableaux suivants indiquent, depuis 1994 l'évolution des
crédits du fonds et du taux unitaire de subvention, ainsi que leur
répartition entre les quotidiens éligibles.
Année |
Montant |
Evolution en % |
Taux |
Evolution en % |
1995 |
5.380.501 |
+ 0,00 % |
0,08865 |
- 25 % |
1996 |
8 015 701 |
+ 48,97 % |
0,12729 |
+ 43,5 % |
1997 |
7 813 346 |
- 2,52 % |
- |
- |
1 ère section |
7 032 012 |
- |
0,1288 |
+ 1,2 % |
2è section |
781 334 |
- |
0,0821 |
- |
1998 |
7 800 000 |
- 0,2 % |
- |
- |
1 ère section |
7 020 000 |
- 0,2 % |
0,124 |
- 3,7 % |
2è section |
780 000 |
- 0,2 % |
0,1068 |
+ 30 % |
c) L'aide au portage des quotidiens
En
augmentation de 2 %, cette aide atteindra un montant de 50,5 millions
de francs en 2000, après avoir augmenté de 10 % en 1999.
Le développement important de la dotation de ce fonds, passée
depuis 1997 de 15 millions à 50,5 millions de francs, traduit
la priorité que le gouvernement accorde à juste titre à
cette forme particulièrement prometteuse de distribution que constitue
le portage. Cette inflexion remonte à l'adoption du plan de
réforme des aides à la presse d'avril 1995, et répond
à la conviction, partagée par les éditeurs, que la
diffusion par portage constitue un des axes principaux des stratégies de
développement de la presse. Le portage est perçu comme
complémentaire de la vente au numéro, et est pris en charge, dans
certains cas, par le réseau de vente au numéro, le diffuseur de
presse se chargeant de porter les exemplaires aux lecteurs
intéressés. La poste elle-même propose un service de
portage susceptible de porter remède, à un coût plus
élevé, aux insuffisances de la distribution postale.
En 1999, 59 titres ont bénéficié de cette aide, soit 7
quotidiens nationaux, 30 régionaux et 22 départementaux. Aux
termes du décret du 6 novembre 1998, la dotation est
répartie pour un quart en fonction du nombre d'exemplaires
portés, et pour les trois autres quarts, en fonction de la progression
de ce nombre au cours des deux dernières années.
Cette clé de répartition permet d'aider prioritairement les
journaux qui réalisent des efforts de prospection destinés
à leur permettre de gagner de nouveaux lecteurs.
d) Le fonds d'aide à la diffusion de la presse hebdomadaire régional et locale
La
dotation de ce fonds progresse de 3,6 % après avoir
progressé de 5 % en 1999 et s'établit ainsi à
8,7 millions de francs.
L'aide, instituée par le décret n° 96-410 du 10 mai
1996, est destinée à alléger les coûts de diffusion
au numéro des titres de la presse hebdomadaire régionale
d'information politique et générale. Le développement des
réseaux de vente, situés très majoritairement en zones
rurales et semi-rurales, appelle en effet, la prise en charge de coûts
importants :
- livraison par l'éditeur d'un grand nombre de points de vente dans des
petites communes, ce qui nécessite la mise en place d'une structure de
distribution coûteuse ;
- ramassage des invendus ;
- opérations de facturation pour des volumes de vente très
faibles par points de vente.
Quelque 200 publications reçoivent une aide au titre de ce dispositif.
e) Le fonds de remboursement des charges de fac-similé
Cette
aide va diminuer de 2,4 % en 2000, s'établissant à
6,5 millions de francs. Elle avait remplacé en 1999
l'allégement des charges téléphoniques des correspondants
de presse, avec une dotation de 51,7 % inférieure. Votre rapporteur
avait regretté, dans son rapport sur le budget de 1999, le remplacement
d'une aide profitant essentiellement à la presse quotidienne
régionale par un instrument destiné à favoriser
l'impression en province des quotidiens parisiens.
Ce transfert n'a pas même la justification de l'efficacité au
regard des objectifs poursuivis, puisque les crédits 1998 du fonds de
remboursement ont été partiellement consommés, qu'il en
sera vraisemblablement de même en 1999, et que la diminution progressive
de la dotation ne paraît donc pas en voie de stabilisation.
En revanche, le crédit de remboursement était largement
consommé puisque le montant inscrit au budget de 1998 avait dû
être abondé de 7,5 millions de francs en cours d'année
afin de faire face aux demandes.
On notera que, d'un fonds à l'autre, ces crédits auront
diminué de 75 % de 1997 à 2000. Telle est peut-être
l'explication majeure du remplacement d'un système supposé
archaïque par un système sous doute plus " moderne " mais
moins consommateur de crédits.
On pourrait par ailleurs utilement réfléchir à la
création d'une aide qui allégerait le coût de la
transmission numérique, par la presse quotidienne régionale, des
données et des images.
f) Les crédits de remboursement à la SNCF des réductions de tarifs accordées à la presse
Ils
passent de 102 millions de francs en 1999 à 101 millions en
2000, enregistrant ainsi une diminution de 1 %.
En 1999, et conformément à la convention signée entre
l'Etat et la S.N.C.F., 90 MF auront été versés à
l'entreprise nationale pour lui permettre d'abaisser le coût de transport
et 12 MF auront été consacrés au remboursement de la dette
de l'Etat envers la S.N.C.F. (une cinquantaine de millions à fin 1998).
Une répartition identique est envisagée pour 2000.
Rappelons que le tarif de transport ferroviaire de la presse est calculé
à partir des prix de revient des différents moyens mis en
oeuvre : moyens de transport (fourgons et espaces fourgons des trains de
voyageurs, trains rapides de marchandises spécialisés,
véhicules routiers), moyens de manutention dans les gares, et de
distribution aux dépositaires. L'estimation des prix de revient est
actualisée périodiquement en fonction de l'évolution des
coûts et des progrès techniques (TGV).
A partir du 1
er
janvier 1996, l'Etat a reversé à la
SNCF 70 % du tarif accordé aux quotidiens, contre 35 % pour
les périodiques, les éditeurs acquittant le complément.
Depuis 1998, le taux de la compensation reste fixé à 70 %
pour les quotidiens et a été abaissé à 22 %
pour les autres publications. Cette modulation avait pour objectif d'une part
d'inciter les partenaires du transport ferroviaire de la presse à une
certaine maîtrise des coûts, et d'autre part, de réagir
à l'évolution qui fait des magazines les principaux
bénéficiaires d'un mécanisme destiné initialement
aux quotidiens. En effet, cette aide, progressivement étendue à
l'ensemble des 18 000 publications inscrites à la commission
paritaire des publications et agences de presse, est le premier poste d'aide
directe. Il serait nécessaire d'obtenir une utilisation plus rationnelle
des crédits, qui auront diminué de 28,1 % de 1997 à
2000 grâce à l'utilisation plus rationnelle des moyens de la SNCF
(le même degré d'urgence ne s'attache pas à tous les
envois) et à un redéploiement en faveur d'autres moyens de
transport, notamment les moyens spécifiques des messageries. C'est
pourquoi une réflexion en ce sens sera lancée à l'issue
des travaux en cours sur l'évolution du système de
distribution.
g) Le fonds d'aide à l'expansion de la presse française à l'étranger
Les
crédits de ce fonds augmenteront en 2000 de 4,5 % pour
s'établir à 23 millions de francs.
Votre rapporteur rappelle que trois grandes catégories de
bénéficiaires se répartissent ces crédits :
d'une part, les Nouvelles messageries de la presse parisienne (NMPP) et l'Union
pour la diffusion de la presse française dans le monde (Unipresse), qui
sont des organismes collectifs d'exportation ; d'autre part, les
éditeurs individuels.
Tous les types de publications françaises inscrites à la
commission paritaire des publications et agences de presse et justifiant d'une
part d'un marché à l'étranger, d'autre part d'un plan de
promotion sérieux, peuvent prétendre à une aide du fonds.
Ces publications doivent, de surcroît, être rédigées
" tout ou partie " en français et " contribuer au
rayonnement de la langue, de la pensée et de la culture française
à l'étranger ".
En 1999, 41 titres ont reçu une aide directe pour 5,8 MF environ au
total ; la collectivité des éditeurs a
bénéficié d'un concours de 16 millions de francs par
l'intermédiaire de ses organismes collectifs (N.M.P.P. et Unipresse).
Il est prévu d'affecter les moyens supplémentaires de 2000 aux
aides directes consenties aux éditeurs.
h) Le soutien au plan social de la presse parisienne
Le crédit sera maintenu à 13,5 millions de francs. Son objectif est de financer pour la moitié de l'allocation versée, les congés de reconversion de 872 ouvrier et cadres techniques de plus de 50 ans et de moins de 55 ans au-delà du 10è mois (en deçà, l'allocation de reconversion est financée dans les conditions de droit commun).
i) Le remboursement des cotisations sociales de portage de la presse nationale
Ce crédit sera maintenu à 7,5 millions de francs.
j) Le fonds d'aide aux investissements multimédia
Le fonds d'aide aux investissements multimédia, géré conjointement par l'I.F.C.I.C. et le S.J.T.I.C. sera, comme les deux années précédentes, doté de 15 millions de francs. Depuis sa création en 1997, 54 projets ont été aidés pour un total de près de 40 millions de francs dont, en moyenne, un quart en subventions et trois quarts en avances remboursables. Il n'est pas apparu nécessaire d'augmenter les crédits de ce fonds puisque la presse quotidienne peut désormais faire appel, pour la réalisation de ce type d'investissements au fonds de modernisation créé par la loi de finances pour 1998.
k) Le fonds de modernisation de la presse
Le fonds
d'aide à la modernisation de la presse quotidienne et assimilée
et des agences de presse a été créé par la loi de
finances pour 1998. Il a été mis en place en 1999 avec un
crédit de 150 millions de francs, non consommé l'année
dernière. Les recettes sont estimées en l'an 2000 à 200
millions de francs auxquels s'ajoutera le report des 150 millions de francs non
consommés en 1999.
Ces montants restent assez éloignés des estimations de recettes
avancées lorsque la taxe sur la publicité hors médias a
été créée pour financer le fonds de modernisation.
Le chiffre de 300 millions de francs avait alors été
évoqué.
Cet écart est d'autant plus criant que le taux de taxe est de 1% et que
le chiffre d'affaires estimé de la publicité hors médias a
été de plus de 50 milliards de francs en 1998.
Interrogé sur les raisons de cette situation par votre rapporteur, le
service juridique et technique de l'information a répondu que la base
taxable pouvait se situer autour de 35 à 40 milliards de francs, pour
autant qu'on puisse l'évaluer avec quelque précision à
partir du poste 63 du plan comptable général, qu'il conviendrait
d'opérer d'autres déductions, dont le montant est difficiles
à identifier, pour évaluer la base effectivement taxable, et
qu'au demeurant le ministre avait demandé au ministre chargé du
budget d'analyser les conditions de la perception en 1999 et d'envisager les
améliorations envisageables. Cette explication suggère une
certaine difficulté des comptables d'entreprise, et peut-être des
services fiscaux, à identifier les dépenses susceptibles d'entrer
dans l'assiette de la taxe.
Il est certain en revanche que la presse a de son côté
préparé ses demandes de subventions avec pas mal d'espoir et sans
doute beaucoup d'illusions. Votre rapporteur ne dispose pas du montant des
demandes. On sait simplement que le niveau des concours proposés par le
comité de gestion du fonds a été revu à la baisse
afin de laisser à chacun sa chance. On entre donc manifestement dans une
logique de saupoudrage. En revanche on doit approuver, d'une part, le report en
2000 des crédits non consommés, et, d'autre part, le fait que
contrairement à ce que l'on avait pu craindre lors de la mise en place
du fonds, la modernisation de l'AFP ne sera pas financée avec ces
crédits.
B. LES AIDES INDIRECTES
•
L'aide au transport postal de la presse
Pour 2000 comme pour 1999, le coût global du transport a
été ajusté sur les bases dégagées par la
mission d'évaluation menée en 1995 par l'Inspection
générale des finances et l'Inspection générale des
postes et télécommunications. La contribution de l'Etat a
été maintenue au même niveau, soit 1 850 millions de
francs.
•
Le régime de l'article 39 bis du code général
des impôts
La moins-value fiscale pour le budget de l'Etat résultant de
l'application de l'article 39 bis du code général des
impôts est estimée à 150 millions de francs pour 1999,
soit un montant comparable à celui constaté en 1998, après
la forte baisse constatée entre 1997 et 1998 (-28,5 %). Les
prévisions pour 2000 ne sont pas disponibles.
•
Le régime préférentiel en matière de
TVA
Depuis 1988, toutes les publications de presse inscrites à la commission
paritaire sont soumises à une TVA de 2,10 % en France
métropolitaine quelle que soit leur périodicité.
Pour 1999, la dépense fiscale qui en résulte est
évaluée à 1,2 milliard de francs par rapport à
un taux à 5,5 % et à 6,528 milliards de francs par
rapport au taux normal de 20,6 % (auquel sont soumises les publications
non inscrites à la commission paritaire).
•
Les exonérations de taxe professionnelle (article 1438 du
CGI)
Les éditeurs de feuilles périodiques et, sous certaines
conditions, les agences de presse ainsi que, depuis le 1
er
janvier
1995, les correspondants locaux de presse régionale ou
départementale sont exonérés de taxe professionnelle.
Le coût de ces exonérations est supporté par les
collectivités locales qui participent ainsi, aux côtés de
l'Etat, à l'effort public en faveur de la presse. Son montant peut
être évalué à 1 235 millions de francs
pour 1998 et 1 206 millions de francs pour 1999.
III. L'AVENIR DE L'AFP
L'AFP
est à la croisée des chemins. Les difficultés
financières qui s'abattent périodiquement sur elle,
l'improbabilité d'une amélioration durable, les incertitudes
pesant sur son positionnement dans la société de l'information,
rendent inéluctable, selon son président, un choix rapide entre
régression et développement sur des bases nouvelles.
Il est utile de rappeler, en marge du débat budgétaire, les
principales données de ce débat que le législateur sera
appelé à trancher.
A. LE CONSTAT
L'avant-projet de plan stratégique de développement à 5 ans de l'AFP présenté par M. Eric Giuily dresse un constat en demi-teinte de la situation de l'Agence.
1. Un manque chronique de moyens financiers
L'exploitation de l'AFP est, aux dires de ses présidents
successifs, structurellement déséquilibrée par une
croissance des charges, et spécialement des frais de personnel, plus
rapide que celles des produits.
Des mesures sont prises périodiquement. Ainsi, un plan à 4 ans
lancé au début des années 1990 avait-il fait descendre les
frais de personnel à 60 % du chiffre d'affaires contre 70 %
auparavant. Mais dès 1996, la tendance a repris son cours naturel, les
frais de personnel remontant à 65 % du chiffre d'affaires en 1998,
alors que la marge annuelle d'exploitation passait de 140 millions de
francs en 1995 à 87 millions de francs en 1998.
Dans le même temps, les marges de manoeuvre dans la gestion se sont
resserrées, en raison notamment des succès enregistrés
entre 1990 et 1995 en terme de maîtrise des coûts de fonctionnement
et de gains de productivité. Alors qu'en 1970 le personnel de l'agence
se partageait entre 900 journalistes et 1 100 techniciens, administratifs
et commerciaux, en 1999 la répartition est inversée, avec 1200
journalistes pour 800 techniciens, administratifs et commerciaux, ce qui
traduit les efforts faits pour accroître la production et la couverture
mondiale. Cette évolution semble avoir supprimé toute marge de
manoeuvre sur la masse salariale sauf à transformer profondément
l'outil de production et à réduire la couverture
géographique, ce qui n'est, bien entendu, pas envisagé.
Par ailleurs, la capacité d'investissement, de l'ordre de
100 millions de francs par ans, et sur laquelle 60 à
80 millions de francs sont préemptés par l'entretien de
l'outil existant, ne peut que diminuer.
En effet, la croissance du chiffre d'affaires de l'AFP est limitée par
la réduction des marchés traditionnels, représentés
par la presse écrite. Le chiffre d'affaires conquis ces dernières
années auprès de nouveaux clients (250 millions de francs) a
servi en grande partie à compenser la diminution du chiffre d'affaires
auprès de la clientèle traditionnelle. Cette régression
paraît irrémédiable en raison de la concentration
croissante de la presse.
Il faut aussi tenir compte du fait que la valeur de l'information brute
détenue et collectée par l'agence sera de moins en moins
importante en raison de l'explosion des sources d'information, ce qui rend
indispensable de créer une valeur ajoutée.
Enfin, les tendances développées depuis 1996 indiquent que
l'équilibre financier de l'agence sera compromis à partir de 2002
ou de 2005, selon que le prêt participatif consenti antérieurement
par l'Etat sera ou non remboursé.
Dans ces conditions, l'AFP se trouve incapable de faire face à la
révolution en cours du marché de l'information.
C'est, d'ailleurs, autant faute de moyens financiers suffisants que de
volonté stratégique qu'elle a raté la diversification dans
l'information et les transactions financières réussie par Reuters
dans les années 70. De la même façon, dans la
première moitié des années 1990, elle n'a pu prendre le
virage de l'information audiovisuelle, contrairement à ses principales
concurrentes, Associated Press et l'agence Reuters.
2. Un moment crucial
L'avant-projet de plan stratégique analyse ces retards
comme
des occasions manquées sans effets significatifs sur le coeur de
l'activité traditionnelle de l'AFP. Avec le multimédia, les
conséquences d'un nouvel échec seraient plus sérieuses,
car il s'agit d'une révolution technologique et commerciale qui concerne
tous les métiers de l'information. A terme rapproché, dans moins
de 10 ans, une agence mondiale d'information ne pourra pas subsister si elle
n'est pas multimédia, estime M. Eric Giuily avec quelque
crédibilité.
En effet, avec l'évolution brutale du marché de l'information
consécutif à la révolution numérique, une
clientèle nouvelle souhaite disposer de services plus
personnalisés et avoir accès non seulement à des flux
d'informations, mais aussi à des archives rassemblées dans des
banques de données. Ces services sont le plus souvent des
" services groupés " c'est-à-dire comportant du texte,
de la photo, et à terme des images animées, du son, des
graphiques. Alors que le marché des médias traditionnels,
particulièrement celui de la presse écrite, stagne, le
marché du hors média semble appelé à un important
développement, sur internet en particulier.
3. Des atouts et des faiblesses
Pour
faire face aux défis de l'avenir, l'AFP reste forte de son réseau
et de la qualité de son personnel.
Avec des bureaux implantés dans 165 pays, 2000 collaborateurs (1200
journalistes dont 200 photographes), 2000 pigistes répartis sur les cinq
continents, elle couvre tous les événements mondiaux en temps
réel, dans tous les secteurs : politique, diplomatie,
économie, sports, faits divers, vie quotidienne, culture, sciences, ...
Elle diffuse plus de deux millions de mots par jour en six langues :
français, anglais, espagnol, allemand, arabe et portugais, 24h sur 24 et
365 jours par an. Cette production est assurée par des journalistes
de toutes nationalités, écrivant dans leur propre langue, avec
une mise en perspective de l'information originale par rapport à la
démarche des agences concurrentes.
Si l'AFP garde son centre de décision et d'impulsion en France, elle
reflète ainsi la diversité des régions du monde. Leader en
Asie avec son service anglais et en Afrique avec son service francophone, elle
est la première agence arabophone et compte parmi les trois
premières agences de presse présentes dans la plupart des pays
européens ; elle a, en outre, repris son développement en
Amérique du Sud et s'est séparée de l'Agence Associated
presse en Amérique du Nord, où elle a fortement
développé sa position dans le secteur de la photo. Le chiffre
d'affaires sur les marchés internationaux est ainsi passé de
18 % du chiffre d'affaires total en 1990 à 28 % en 1999.
L'AFP dispose enfin d'un stock très important de contenus valorisables
et son chiffre d'affaires de 1,4 milliard de francs lui offre une bonne base de
départ pour sa diversification.
Mais elle présente également des problèmes.
Auditionné le 9 juin dernier par votre commission des commission
des affaires culturelles, M. Eric Giuily estimait que l'agence ne disposait pas
d'un " management " efficace. Elle souffrirait en outre de
cloisonnements très forts : entre journalistes et autres
métiers, entre directions, sans compter les clivages syndicaux. Une
culture d'entreprise très prégnante rendrait les changements
lents et coûteux. La décentralisation amorcée au milieu des
années 1980 n'est d'ailleurs pas encore achevée. La direction
générale reste engorgée par une centralisation très
forte. Par ailleurs, le poids des " us et coutumes " de l'entreprise
et la pratique très développée du consensus feraient
obstacle au changement.
En définitive, l'agence aurait du mal à définir un projet
collectif et à se forger une vision de son devenir. Elle vivrait ainsi
une crise permanente que le renouvellement de son président tous les
trois ans porte à son paroxysme.
Le retrait du projet d'ouverture du capital de l'AFP, élément
clé du plan de développement, annoncé le 29 septembre
dernier, semble confirmer la pertinence de ces analyses. Le document
élaboré par M. Eric Giuily présentait en effet des
propositions dont le dynamisme avait sans doute quelques raisons de
dérouter les gardiens des " us et coutumes ".
B. LE PROJET
Il est construit autour d'un certain nombre d'axes stratégiques dont la mise en oeuvre comporte des implications institutionnelles.
1. Les axes stratégiques
Le
propos central est d'élaborer un outil susceptible de répondre
aux besoins d'une clientèle qui ne sera plus purement française.
D'ores et déjà, l'AFP réalise 28 % de son chiffre
d'affaires à l'étranger. Les principales marges de croissance se
situent dans cette direction. De nouveaux types de clientèles
apparaissent aussi. C'est ainsi que la clientèle d'internet
représente aujourd'hui 30 millions de chiffre d'affaires et que des
entreprises demandent des contenus destinés à leur service
intranet et à leur site web.
Le second axe prioritaire est le renforcement des métiers de base et la
création, en aval, de services spécialisés. L'agence
espère faire passer de 60 % actuellement à 45 % dans cinq ans la
part du chiffre d'affaires effectué avec l'Etat et avec la presse
française. La mission de couverture mondiale généraliste
restera donc en tout état de cause essentielle.
C'est en effet à partir du métier traditionnel de l'agence que
doivent être élaborés, selon le plan, des services plus
spécialisés, notamment dans quelques secteurs : l'économie
et la finance en France et à l'étranger, les sports -une banque
de données sportives est en cours d'élaboration-, les
phénomènes de société et tout ce qui concerne la
vie pratique, la consommation, le divertissement, la santé, les hautes
technologies.
Le troisième axe stratégique est la fixation d'un objectif de
croissance du chiffre d'affaires. Celui-ci devrait passer de 1,4 milliard
à 2 milliards en cinq ans, essentiellement grâce aux
activités internationales. La part de l'Etat resterait constante en
volume mais diminuerait en valeur relative.
Le dernier axe stratégique est l'obtention des moyens financiers
nécessaires, estimés à 800 millions de francs sur la
durée du plan, la majeure partie étant investie dans les deux ou
trois premières années. Cet effort d'investissement se traduirait
par une augmentation significative des effectifs, dont l'ampleur
dépendra des partenariats réalisés et de la croissance
externe effectuée dans le cadre du plan.
2. Le nouvel équilibre juridique et financier
L'idée centrale de l'avant-projet était à
cet
égard l'établissement de partenariats industriels afin d'obtenir
les moyens financiers nécessaires mais aussi de croiser les savoir-faire
technologiques, et d'avoir accès aux images animées et au son.
Il est utile de préciser que le besoin de financement de 800 millions de
francs a été évalué en fonction des partenariats
industriels envisagés. En leur absence, les financements nouveaux
nécessaires seront beaucoup plus importants.
Ceci a conduit à envisager l'adaptation du statut élaboré
en 1957, dont l'objectif était alors de doter la France d'une grande
agence mondiale d'information généraliste écrite.
Cet objectif a été atteint. Mais l'explosion de l'information
financière et de l'audiovisuel, alors imprévisible. Par ailleurs,
le statut de 1957 comporte des dispositions qui font obstacle au
développement de l'agence, telle en particulier la règle de
l'équilibre budgétaire, qui oblige, pour en illustrer
concrètement les implications, à augmenter le chiffre d'affaires
à hauteur du coût du recrutement d'une personne, dès
l'année du recrutement.
En outre, l'agence, n'ayant pas d'actionnaires, ne peut pas opérer
d'augmentation de capital, émettre des obligations convertibles et des
prêts participatifs, et n'a donc pas la possibilité de se financer
sur le marché. Elle est condamnée à l'emprunt bancaire, au
taux le plus élevé, dans la mesure où elle n'est pas
adossée à un groupe bénéficiant d'une notation de
qualité.
Tout cela freine considérablement son développement et doit
être pris en compte dans le débat sur son statut, débat qui
ne doit pas néanmoins, selon M. Giuily, aboutir à une remise en
cause des principes fondateurs.
C'est pourquoi l'avant-projet de plan stratégique s'employait à
garantir juridiquement la pérennité de ces principes. Tout
d'abord, il était exclu d'adosser l'AFP à une seule entreprise.
L'avant-projet de plan stratégique présentait une liste de cinq
catégories de partenaires potentiels, la sélection de quatre ou
cinq partenaires effectifs au minimum. Les partenaires " historiques " de
l'agence, l'Etat et la presse devront permettre le contrôle de
l'entreprise. L'objectif de substituer à l'équilibre voulu par le
statut de 1957 un équilibre élargi entre l'Etat, la presse, des
opérateurs privés ou publics et le personnel. Il s'agissait
d'élargir la base de l'AFP en réaffirmant sa vocation
d'entreprise d'intérêt national et d'entreprise mondiale.
Une " charte du partenariat " devait traduire ces principes et orienter la
recherche des partenaires. Les statuts réformés de l'AFP devaient
aussi garantir le respect de ces principes, le président n'ayant donc
pas de blanc-seing pour négocier les modalités de l'association
de nouveaux partenaires à l'agence.
Pratiquement, la mise en oeuvre de l'avant-projet de plan stratégique
impliquait la constitution d'un capital social. La propriété de
ce capital devait appartenir initialement à une entité commune
aux partenaires historiques, prenant la forme d'une fondation. Une augmentation
du capital social serait ensuite effectuée afin d'associer à
cette entité les nouveaux partenaires et le personnel. Ces projets
exigeaient l'adaptation de la loi de 1957.
C. LE DÉBAT
Si la
nécessité de donner à l'AFP les moyens de son
développement n'est guère contestée, et si de nombreux
observateurs estiment difficile de le faire sans remettre en cause le statu quo
institutionnel et financier actuel, les propositions de M. Eric Giuily ont
soulevé de vives objections de la part des syndicats de l'agence.
Ceux-ci estiment que le statut actuel de l'agence permet de lever des fonds sur
les marchés financiers, qu'il serait par conséquent possible
d'emprunter les 800 millions de francs nécessaires, selon la
direction de l'entreprise, à la mise en oeuvre d'un plan de
développement. Ces syndicats observent au passage qu'une partie de cette
somme serait destinée à financer des départs en
pré-retraite alors que les effectifs anglophones seraient
renforcés, éventuellement au détriment des réseaux
francophones d'Afrique ou d'Amérique latine. Les syndicats notent aussi
qu'il ne faut exclure l'hypothèse d'un concours financier de l'Etat
à la diversification, la BBC ayant été de son
côté dotée d'un capital de 3 milliards de francs pour
investir dans le multimédia sans que la commission de Bruxelles s'y
oppose.
La nécessité de créer un capital social ouvert à
des groupes privés pour assurer le financement du développement
de l'AFP a donc fait l'objet d'une vive contestation des présentations
de l'avant-projet de plan stratégique.
Les syndicats estiment à cet égard que, quelles que soient les
garanties prévues au départ en ce qui concerne les seuils de
détention des parts du capital, le risque est réel que de futures
augmentations de capital, rendues indispensables par l'éventuel
échec de l'augmentation prévue du chiffre d'affaires, ne
provoquent la privatisation progressive de l'agence.
Ils mettent au demeurant en cause ce qu'ils considèrent comme le choix
du " tout multimédia ", estimant dangereuse la perspective
d'un repli du métier traditionnel de diffuseur d'information
généraliste en flux.
Ils expriment enfin une préférence pour l'établissement de
partenariats ponctuels, par le biais de filiales constituées dans les
domaines où l'AFP ne dispose pas actuellement d'un savoir-faire, tout en
rappelant qu'un certain nombre de filiales multimédias existantes ont
été supprimées.
Le débat a porté aussi sur le processus de mise en oeuvre de
l'avant projet de plan stratégique.
Notant la nécessité de passer par la voie législative pour
modifier le statut actuel de l'Agence, M. Eric Giuily observait que le
calendrier parlementaire semble exclure l'examen d'un projet de loi avant la
fin 2000 ou même le début 2001. C'est pourquoi un dispositif
transitoire a été proposé afin de faire face à
l'urgence de la situation. Il s'agissait d'autoriser l'AFP à recourir
à des prêts participatifs ou à des obligations convertibles
sur le marché, afin d'essayer de réunir un premier noyau de
partenaires. Il s'agissait aussi de créer éventuellement une
filiale transitoire de financement permettant de réunir ces partenaires
et de les associer au développement de l'AFP.
Ces mesures anticipaient partiellement le débat législatif, mais,
estimait le président de l'AFP, la nécessité d'agir est
immédiate. A titre d'exemple, il indiquait qu'il n'a pas
été possible, faute de moyens et en raison de la règle de
l'équilibre budgétaire, de constituer une base de données
pour la coupe du monde de rugby, à l'image de ce qui avait
été fait avec succès à l'occasion de la coupe du
monde de football. Si la loi de 1957 était modifiée assez
rapidement, les mesures transitoires les initiatives les plus urgentes
étant prises dans le cadre du projet de budget pour 2000.
L'ensemble de ce débat a été provisoirement conclu par
l'annonce, le 29 novembre dernier, de la décision de M. Eric Giuily de
retirer définitivement le projet de transformation de l'AFP en
société anonyme et d'ouvrir son capital en vue d'établir
un partenariat stratégique global.
La ministre de la culture et de la communication s'est de son côté
félicitée de cette position en soulignant que la stratégie
de l'AFP devait " être élaborée avec les personnels de
l'agence et ses administrateurs, c'est-à-dire les représentants
de la presse et de l'Etat ". " Ce n'est qu'au terme de cette
concertation, a indiqué la ministre dans un communiqué, que le
gouvernement proposera au Parlement les mesures législatives qui
s'avéreraient nécessaires, à la suite de la table ronde
dont l'annonce a déjà été faite. "
Votre rapporteur souligne cependant qu'à trop reporter la
décision de rassembler les moyens financiers lourds nécessaires
au développement de la seule Agence française, la situation de
celle-ci se fragilisera vite : le surplace ne peut plus être payant
dans un monde devenu " une grande tribu médiatique " où
des initiatives concurrentes de l'AFP peuvent être prises chaque jour en
Amérique, en Asie, et en Europe.
EXAMEN EN COMMISSION
La
commission a examiné le
mercredi 17 novembre 1999
le
rapport
pour avis de M. Louis de Broissia sur les crédits pour 2000 de la
presse écrite.
Un débat s'est ensuite engagé.
M. Ivan Renar
a demandé si, au-delà de l'augmentation
incontestable des crédits, il ne serait pas utile de
réfléchir à l'évolution générale de
la presse au vu de la concentration qui affecte de plus en plus la presse
régionale. Il a aussi noté que l'Agence France Presse devait
résoudre la contradiction latente entre les moyens proposés pour
financer son développement et la pérennité d'une mission
axée sur le respect du pluralisme de l'information, la promotion de la
francophonie, la recherche de la qualité.
Mme Danièle Pourtaud
a demandé au rapporteur son avis sur
la situation des entreprises de presse, spécialement au regard du
mouvement de concentration en cours. Elle a souhaité savoir si la presse
régionale avait la capacité financière de se diversifier
dans la télévision locale. Elle a enfin estimé qu'il
appartenait aussi bien au Parlement qu'au Gouvernement de prendre des
initiatives en faveur du développement de l'AFP, sur la
nécessité duquel chacun partage la même analyse.
M. André Maman
a demandé s'il existait des instruments
permettant d'aider la presse francophone à l'étranger. Il a
proposé de mettre en place un crédit permettant de financer
l'envoi d'un nombre significatif de quotidiens aux 440 écoles
françaises accréditées à l'étranger.
M. Pierre Laffitte
a noté que les nouvelles technologies de la
communication favorisaient l'apparition de nouveaux titres de presse à
l'initiative de toutes petites équipes de rédaction ou de
journalistes indépendants. Il peut s'agir de produits mêlant
l'information écrite à des images animées. Il a
souhaité savoir si les grands quotidiens avaient saisi les
opportunités offertes par ces technologies, et si les initiatives
déjà prises tenaient compte de la logique éditoriale
spécifique des produits en ligne.
M. Ivan Renar
a estimé qu'il fallait encourager la lecture de
l'écrit et réconcilier le support papier et l'écran.
Mme Danièle Pourtaud
a souhaité que la commission puisse
contribuer à faire avancer la réflexion sur les rapports des
journalistes avec la diffusion en ligne.
M. Louis de Broissia, rapporteur pour avis,
a présenté les
éléments de réponse suivants :
- il est légitime d'évaluer l'efficacité des
crédits de la presse en prenant en compte l'évolution du nombre
des titres. Le problème le plus important que connaît la presse
est toutefois l'effritement du lectorat. Il est indispensable de redonner aux
enfants le goût de l'écrit. Les collectivités publiques
mobilisent des financements très importants pour le branchement des
établissements scolaires sur Internet. Il serait regrettable de se
satisfaire dans le même temps de la marginalisation de l'écrit ;
- il faut que les parlementaires réfléchissent aux initiatives
législatives à prendre en faveur de l'AFP ;
- la situation financière de la presse s'est améliorée,
alors que le lectorat continuait à se dégrader. La presse
quotidienne régionale a abordé le multimédia avec beaucoup
de dynamisme et les crédits d'aide sont assez bien consommés dans
ce domaine. Peu de journaux disposent des capacités d'investissement
nécessaires pour lancer des télévisions locales, mais la
complémentarité nécessaire entre les formes de
médias les condamne à engager et à réussir ce pari
;
- le fonds d'aide à l'exportation de la presse française à
l'étranger augmente de 4,4 % en 2000, mais ce chiffre est
dépourvu de significations par rapport à l'ampleur des enjeux. Il
est arrivé à la Fédération nationale de presse
française d'aider, spécialement au Moyen-Orient, des journaux
francophones en difficulté. Il n'existe pas de fonds globalisant l'aide
à la diffusion de la presse en milieu scolaire français ou
à l'étranger. Il serait donc utile de réfléchir
à la création, dans ce domaine, d'un fonds de concours
alimenté par l'Etat et les collectivités locales.
Suivant les propositions de son rapporteur, la
commission
a ensuite
décidé, à l'unanimité, de
donner un avis
favorable à l'adoption des crédits d'aide à la presse pour
2000.