EXAMEN DES ARTICLES RATTACHÉS

ARTICLE 54

Prorogation d'aides au logement en faveur des harkis

Commentaire : le présent article a pour objet de proroger au 31 décembre 2002 le bénéfice de certaines aides au logement en faveur des harkis, instaurées par la loi de 1994.

I. LE TEXTE PROPOSÉ

La loi n° 94-488 du 11 juin 1994 a prévu trois aides au logement en faveur des rapatriés anciens membres des formations supplétives et assimilés ou victimes de la captivité en Algérie (les " harkis ") :

• l'aide à l'acquisition de la résidence principale (article 7) pour 80.000 francs ;

• l'aide à l'amélioration de la résidence principale (article 8) en faveur des foyers non imposables (15.000 francs pouvant être portés à 50.000 francs) ;

• l'aide à la résorption du surendettement d'origine immobilière (article 9), variable et accordée par les commissions d'aide au désendettement immobilier des anciens membres des formations supplétives et assimilés, les COMADEF.

Ces trois aides devaient venir à échéance le 30 juin 1999, mais le Parlement les a prolongées jusqu'au 31 décembre 2000 dans le II de l'article 47 de la loi de finances rectificative pour 1999. Cette prorogation s'inscrivait dans le cadre de la prolongation de l'ensemble des dispositions de la loi de 1994. Elle a été décidée par circulaire interministérielle du 31 mai 1999 pour toutes les mesures dont l'application ne nécessitait pas un support législatif. En revanche, il convenait d'adopter un dispositif législatif pour les articles 7, 8 et 9, la loi prévoyant expressément la date d'arrêt des mesures. Le financement de cette prolongation devait être assuré par les ressources budgétaires existantes.

Ces aides ont représenté une dépense budgétaire décroissante inscrite au chapitre 46-31 du budget de la santé et de la solidarité.

Les aides au logements en faveur des harkis

(en millions de francs)

1998

1999

2000

2001

Aide à l'acquisition de la résidence principale


14,19


10,23


8


5,6

Aide à l'amélioration de la résidence principale


9,98


8,65


8


7

Aide à la résorption du surendettement d'origine immobilière


13


18,8


5,5 *


nd

Total

37,17

37,68

21,5

nd

* Six premiers mois 2000

Leur prolongation est à nouveau demandée, cette fois pour deux ans, en raison d'une part de la situation encore difficile de la communauté harkie, d'autre part du retour en France de certains foyers de harkis qui s'étaient installés en Allemagne dans le cadre des Forces françaises. Ces harkis ont donc rejoint le territoire français à la suite de ces dernières.

II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

La prolongation de l'application de la loi, paraît justifiée par les conséquences qu'entraînerait une clôture au 31 décembre prochain.

En effet, si une date de clôture se justifie d'une manière générale pour les dispositifs d'indemnisation, il serait très regrettable que des cas encore en souffrance ne trouvent pas de solution. La clôture pure et simple engendrerait ainsi des difficultés personnelles alors même que le dispositif de la loi de 1994 a été mis en place afin de parachever un dispositif d'indemnisation globale, pour solder la dette de la Nation, non pour susciter des obstacles administratifs ajoutant à la douleur du passé des ressentiments présents.

Par ailleurs, la partie réglementaire du dispositif ayant été prolongée, il serait pour le moins paradoxal de supprimer le bénéfice des aides visées par cet article alors que d'autres, pas moins importantes, resteraient accessibles.

Décision de votre commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 55

Développement des ressources propres de l'agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS) et de l'agence nationale d'accréditation en santé (ANAES)

Commentaire : le présent article a pour objet de créer deux nouvelles taxes, l'une au profit de l'AFSSAPS, l'autre au profit de l'ANAES, pesant respectivement sur les fabricants de dispositifs médicaux et sur les hôpitaux.

I. LE TEXTE PROPOSÉ

A. UNE " REDEVANCE " AU PROFIT DE L'AFSSAPS

Le I du présent article insère dans le code de la santé publique un article L. 5211-5-1 soumettant à paiement d'une redevance qui ne pourra excéder 30.00 francs l'inscription d'un dispositif médical à usage individuel (dit TIPS) sur la liste de l'article L. 165-1 du code de la sécurité sociale. Le produit de cette redevance est affecté à l'agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS).

Cette dernière a été créée par la loi n° 98-535 du 1 er juillet 1998 et a la responsabilité de la sécurité sanitaire des produits destinés à l'homme : médicaments, cosmétiques, etc. Elle évalue et contrôle notamment les dispositifs médicaux avant leur inscription sur la liste de l'article L. 165-1 du code de la sécurité sociale. Ils sont pour cela soumis à régime déclaratoire préalable. L'inscription sur la liste ouvre la voie à la prise en charge par la sécurité sociale. Cette inscription fait l'objet du dépôt d'un dossier auprès de l'AFSSAPS. Elle serait ainsi soumise au paiement d'une redevance qui peut se lire comme un droit d'entrée sur le marché.

L'AFSSAPS avait en 2000 un budget total de 506 millions de francs et employait 833 personnes. Ses recettes, énumérées à l'article L. 793-9 du code de la santé publique, provenaient :

• de taxes et redevances : 241,5 millions de francs ;

• de subventions de collectivités publiques autres que l'Etat : 182,7 millions de francs ;

• d'une subvention de l'Etat inscrite au budget de la santé et de la solidarité : 174,5 millions de francs ;

• de produits divers : 65 millions de francs ;

• de ventes de produits et services : 16,8 millions de francs.

La nouvelle redevance devrait rapporter 14,7 millions de francs en année pleine, et seulement 7,4 millions de francs en 2001. La perspective de sa création a permis à l'Etat de diminuer sa subvention de 1,6 % à 171,74 millions de francs.

B. UNE CONTRIBUTION FINANCIÈRE AU PROFIT DE L'ANAES

Le II du présent article insère dans le code de la santé publique un article L. 1414-12-1 instituant une contribution financière des établissements de santé versée pour la procédure d'accréditation à l'agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé (ANAES). Le montant de cette contribution est fixé par décret après avis du conseil d'administration de l'agence. Elle dépendra, ces critères étant appréciés au 31 décembre de l'année précédant la visite d'accréditation, du nombre de lits et places autorisés et du nombre de sites accrédités. Elle sera comprise entre 15.000 et 350.000 francs. Elle sera exigible dès la notification de la date de la visite d'accréditation. Elle sera rétroactive pour les établissements accrédités en 2000.

L'ANAES a été créée par l'ordonnance du 24 avril 1996 et a pour missions de contribuer à la maîtrise médicalisée des dépenses de santé et d'améliorer la qualité des soins en comparant les pratiques médicales. Elle doit par exemple élaborer et valider des recommandations de bonne pratique et des références médicales. Elle est aussi chargée de l'accréditation des établissements de santé publics et privés, des réseaux de soins et des groupements de coopération sanitaire, soit près de 4.000 établissements. Il s'agit d'évaluer un établissement de manière indépendante et d'améliorer la qualité des soins qui y sont dispensés.

L'action de l'ANAES s'est révélée très éloignée des espérances mises en elle et des crédits budgétaires dont elle a disposés. Son budget 2000 s'élevait à 162,32 millions de francs dont 53,5 millions en provenance du budget de la santé et de la solidarité. Cette subvention a été fortement diminuée par les mesures de régulation budgétaire décidées en gestion. La présente contribution devrait rapporter 240 millions de francs en quatre ans, dont 50 millions de francs en 2001, ce qui justifierait une diminution de 89 % de la subvention budgétaire pour 2001 à 38 millions de francs.

II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

A. REDEVANCE OU TAXE ?

L'AFSSAPS disposait en 2000 de pas moins de neuf taxes et redevances pour un montant de 234,5 millions de francs.

Taxes et redevances affectées à l'AFSSAPS

(en millions de francs)

2000

2001

Droits d'auteurs et de reproduction

0,05

0,05

Taxe annuelle sur les spécialités pharmaceutiques

55

55

Redevance pour l'inscription d'un dispositif médical

-

7,35

Taxe annuelle sur les dispositifs médicaux

-

24

Droit progressif sur les demandes d'AMM

121,2

123,945

Contrôle de qualité des réactifs

2

1

Contrôle de qualité des analyses de biologie médicale

11

11

Redevances sur les demandes de visas de publicité

27

27

Redevance sur l'inscription de la modification d'inscription sur la liste des spécialités pharmaceutiques

15

16

Divers

3,2

0,6

Total

234,47

265,945

La nouvelle contribution, à laquelle s'ajouterait celle proposée à l'article 55 bis du projet de loi de finances, a pour but d'établir un mécanisme analogue à celui auquel sont soumis les fabricants de médicaments pour la demande d'inscription sur la liste des spécialités pharmaceutiques remboursables : en vertu de la loi n° 67-1114 du 21 décembre 1967, la demande d'inscription ou de modification d'inscription sur la liste des spécialités remboursables s'accompagne du paiement d'une redevance. De même, pour les médicaments, les demandes d'autorisation de mise sur le marché (AMM) s'accompagnent en vertu de l'article L. 302 du code de la santé publique du paiement d'un droit progressif. Il s'agit par le présent I d'établir un droit équivalent pour les dispositifs médicaux.

Cependant la question se pose de connaître la nature juridique de ce prélèvement. On pourrait estimer, au regard de sa qualification de " redevance " et du fait qu'il vient en pendant de l'instruction du dossier en vue de l'inscription sur une liste (puisque la contribution serait exigible au dépôt du dossier et non seulement en cas de réponse favorable), qu'il s'agit de la rémunération d'un service rendu.

Votre rapporteur spécial ne l'estime pas et, en conséquence, regrette l'emploi du terme de redevance qui est de nature à prêter à confusion.

En effet, il n'aurait pas été nécessaire de faire figurer en loi de finances ce prélèvement s'il s'était agi d'une véritable redevance puisque le premier alinéa de l'article 5 de l'ordonnance n° 59-2 du 2 janvier 1959 relative aux lois de finances prévoit que " la rémunération des services rendus par l'Etat ne peut être établie et perçue que si elle est instituée par décret en Conseil d'Etat " . La seule présence en loi de finances suffit donc à disqualifier le terme de redevance pour lui préférer celui de taxe ou de droit. De plus, l'absence de proportionnalité du paiement au service permet d'écarter l'hypothèse d'une rémunération pour service rendu.

N'étant pas une redevance, ce prélèvement s'apparente donc à une imposition de toute nature, pour laquelle la loi doit fixer l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement.

Ainsi, le I prévoit-il que l'assiette serait la " demande d'inscription d'un dispositif médical à usage individuel sur la liste prévue à l'article L. 165-1 du code de la sécurité sociale " ; le barème ne peut dépasser 30.000 francs ; les modalités de recouvrement sont celles des créances des établissements administratifs de l'Etat.

Le I propose donc un barème ce qui suppose que la taxe sera variable et donc qu'il ne s'agira pas d'un droit fixe et forfaitaire. Mais le texte proposé se garde bien de préciser les modalités d'établissement du barème, même de façon allusive. S'agit-il du poids du dossier, de la couleur de la reliure, du chiffre d'affaires attendu ? Le législateur l'ignore.

Certes d'après les informations recueillies par votre rapporteur spécial, le gouvernement et l'AFSSAPS souhaiteraient établir en réalité deux droits fixes, l'un pour la première demande, l'autre pour une modification apportée à un dispositif déjà inscrit. Dans le premier cas, le droit serait de 30.000 francs et dans le second de 15.000 francs.

La transmission de ces informations est intéressante, mais elle ne remplace pas l'inscription dans le texte du projet de loi de finances du critère de variation de la taxe.

Ainsi, votre rapporteur spécial ne souhaite pas contester l'utilité ou non de la création de cette nouvelle taxe. L'AFSSAPS a probablement besoin de développer ses ressources propres et il peut être compréhensible d'appliquer aux dispositifs médicaux ce qui vaut pour les médicaments ou les réactifs de laboratoires, en attendant l'année prochaine son extension aux cosmétiques qui échappent encore à la taxe.

Cependant, il estime qu'il est nécessaire de parler franchement d'une taxe plutôt que de nourrir le doute sur l'aspect rémunération pour service rendu de ce qui viendra allonger la liste des prélèvements obligatoires. De même, il estime que, s'agissant d'une imposition de toute nature, le gouvernement doit préciser dans le corps de l'article les critères qui présideront à la variation des sommes à acquitter, ce qu'il ne fait pas aujourd'hui. Votre rapporteur spécial ne pouvant se mettre à la place du gouvernement et ignorant le détail de ses intentions ne saurait se substituer à lui et espère que ce souci sera réglé au cours de la discussion faute de quoi pèserait sur cet article une présomption d'inconstitutionnalité qui ne manquerait pas d'être soulevée.

Enfin, il ne peut que voir dans cette nouvelle taxe affectée à un organisme exerçant une mission de puissance publique, au produit non retracé en loi de finances, une illustration supplémentaire de la nécessité d'une réforme de l'ordonnance organique (voir infra ).

B. QUAND LA SÉCURITÉ SOCIALE FINANCE L'ETAT

La proposition de création d'une contribution bénéficiant à l'ANAES justifie certainement des appréciations plus critiques.

Votre rapporteur spécial n'entend pas entrer dans le débat de la nécessité ou non de créer une ressource propre pour cet organisme. Il entend apprécier cette création à l'aune des besoins de l'agence et de son activité.

Il remarquera cependant que comme toute " bonne mesure fiscale " elle est rétroactive puisque les 65 établissements accrédités en 2000 y seraient soumis, mais, étrangement, pas les 9 de 1999. De même, il ne dira rien de cette curieuse " taxe " destinée à faire participer les établissements aux coûts variables entraînés pour l'agence par leur accréditation, alors que l'on aurait pu considérer, en l'espèce, qu'il s'agissait d'une rémunération pour service rendu.

La première observation portera sur le curieux transfert de recettes auquel donnera lieu la création de cette taxe. En effet, la contribution de l'assurance maladie est indexée sur celle de l'Etat : quand la subvention inscrite au budget de l'Etat diminue de 15,5 millions de francs, comme c'est le cas pour 2001, celle de l'assurance maladie diminue deux fois plus, soit de 31 millions de francs. Ce seront donc 46,5 millions de francs de moins de subventions que devrait recevoir l'ANAES en 2001. Mais parallèlement, la contribution devrait rapporter en 2001 50 millions de francs.  Or qui finance cette contribution sinon la dotation hospitalière, c'est à dire l'assurance maladie ? La création de cette taxe permet donc à l'Etat de diminuer sa contribution tout en faisant augmenter les sommes versées par l'assurance maladie à l'ANAES. La manoeuvre est habile.

Evolution des recettes de l'ANAES en 2001

(en millions de francs)

Recettes 2000

Recettes 2001

Evolution

Etat

53,5

38

- 15,5

Assurance maladie

107

126

+ 19

dont subvention

107

76

- 31

dont taxe

-

50

+ 50

Total

160,5

164

+ 3,5

Ainsi, la création de cette taxe revient à transférer 19 millions de francs de charge de l'Etat vers la sécurité sociale via la dotation hospitalière.

La seconde remarque de votre rapporteur spécial a trait à l'activité de l'ANAES. Elle devait, selon l'ordonnance de 1996, avoir engagé l'accréditation des 3 à 4.000 établissements de santé d'ici au 1 er avril 2001.

Qu'en est-il ? 9 établissements ont été accrédités en 1999, 65 en 2000 et l'ANAES espère passer à un rythme de 350 à 400 établissements par an à partir de 2001, 230 établissements étant déjà engagés dans la démarche. Cette montée en puissance très lente, pour ne pas dire cette très faible activité d'accréditation 23 ( * ) , bien en retard sur des prévisions probablement optimistes, s'est accompagnée d'une sous-consommation patente des crédits alloués à l'ANAES. Ainsi, l'agence se retrouverait avec un fonds de roulement très conséquent. La pertinence d'une nouvelle taxe perd donc de sa force, au moins celle de l'urgence de sa création.

Ainsi, il ne semble pas que le très - trop - lent démarrage de l'agence, justifie déjà l'affectation d'une nouvelle taxe. Si l'année 2001 montre enfin un regain d'activité de l'agence, alors la loi de finances 2002 pourra pourvoir sur des bases plus solides et plus claires à l'attribution d'une nouvelle ressource à cet établissement.

Il semble donc d'une part qu'il soit prématuré de créer cette taxe, d'autre part qu'elle s'apparente à un transfert de charges vers l'assurance maladie. C'est pourquoi votre rapporteur vous proposera de supprimer le II de l'article 55.

C. UNE NOUVELLE ENTORSE À L'UNIVERSALITÉ DES LOIS DE FINANCES

Au delà de ces remarques d'importance, votre commission des finances se montre soucieuse, dans le cadre de la réflexion en cours sur la réforme de l'ordonnance organique n° 59-2 du 2 janvier 1959 relative aux lois de finances de respecter le principe, qu'elle estime sain pour la démocratie, de l'universalité des lois de finances.

Il s'agit ainsi de lutter contre toutes les formes de débudgétisations que constitue au premier chef l'affectation à un organisme sorti du champ de la loi de finances de missions relevant par nature de la puissance publique et financée par des ressources fiscales propres qui lui sont directement affectées sans être retracées dans l'état A.

Votre commission ne conteste pas le bien fondé de l'affectation à tel ou tel organisme qui permet d'isoler certaines tâches et les ressources nécessaire à leur accomplissement. C'est pourquoi notamment elle attache un très grand prix au maintien de ces procédures modernes et efficaces de gestion publique que sont certains comptes d'affectation spéciale et certains budgets annexes.

Cependant, il lui semble essentiel de préserver l'universalité des lois de finances en prévoyant dans la future loi organique un dispositif permettant d'autoriser le prélèvement et d'évaluer le montant des ressources affectées aux organismes concourant à des missions de puissance publique. Ces taxes diverses et variées seraient donc retracées dans l'état A annexé, verraient leur produit prévu et seraient ensuite rétrocédées aux organismes bénéficiaires par le biais d'une nouvelle catégorie de prélèvement sur recettes 24 ( * ) .

Le présent article, à son paragraphe I, donne un parfait exemple de la nécessité d'une telle réforme. Nul ne contestera que l'AFSSAPS exerce des missions de puissance publique, ne serait-ce qu'en raison de ses pouvoirs de police administrative. Est-il alors normal que ses ressources prélevées échappent à toute évaluation en loi de finances et donc au contrôle annuel du Parlement  ? Votre commission ne le pense pas mais ne peut proposer une telle réforme par la voie d'un simple amendement à cet article. C'est pourquoi elle voit dans le présent article un encouragement à persévérer sur la voie de la transparence et de la réforme de la procédure budgétaire.

Décision de votre commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 55 bis (nouveau)

Taxe sur les ventes de dispositifs médicaux au profit de l'AFSSAPS

Commentaire : le présent article a pour objet de créer une taxe annuelle sur le chiffre d'affaires des fabricants de dispositifs médicaux au profit de l'AFSSAPS.

I. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

A l'Assemblée nationale, le gouvernement a souhaité créer au profit de l'AFSSAPS une taxe sur le chiffre d'affaires des fabricants de dispositifs médicaux.

Ainsi, le présent article propose d'insérer dans le code de la santé publique un article L. 5211-5-2 créant une telle taxe.

Il s'agirait d'une taxe annuelle. En seraient redevables les fabricants de dispositifs médicaux Elle concernerait les dispositifs médicaux définis à l'article L. 5211-1 du code de la santé publique et les dispositifs de diagnostic in vitro de l'article L. 5311-1 du même code, c'est à dire : " tout instrument, appareil, équipement, matière, produit, à l'exception des produits d'origine humaine, ou tout autre article utilisé seul ou en association, y compris les accessoires et logiciels intervenant dans son fonctionnement, destiné par le fabricant à être utilisé chez l'homme à des fins médicales et dont l'action principale voulue n'est pas obtenu par des moyens pharmacologiques ou immunologiques ni par métabolisme, mais dont la fonction peut être assistée par de tels moyens " . Elle serait exigible des fabricants et mandataires. Son taux varierait, selon un barème fixé par décret, entre 0,15 et 0,4 % du chiffre d'affaires annuel hors taxes, avec un minimum de base d'imposition de 500.000 francs de chiffre d'affaires hors taxe.

La taxe serait acquittée par les fabricants et mandataires au moment de la déclaration. Celle-ci devrait avoir lieu avant le 31 mars de chaque année. Le défaut de versement verrait l'application d'une majoration de 10 % et de pénalités de retard sur la fraction non acquittée. Elle serait recouvrée de la même manière que pour les créances des établissements publics administratifs de l'Etat.

D'après les comptes prévisionnels de l'AFSSAPS, elle devrait rapporter 24 millions de francs en 2001. Son rendement serait selon le gouvernement de 35 à 38 millions de francs par an, le chiffre d'affaires annuel hors taxe du secteur étant estimé à 28 milliards de francs

II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

A. LES LIMITES DE L'ORDONNANCE ORGANIQUE

Le gouvernement justifie la création de cette taxe, la seconde au profit de l'AFSSAPS après celle proposée au I de l'article 55, par un double souci de renforcer les ressources propres de l'agence et de rendre cohérent un dispositif fiscal qui prévoit déjà une taxe annuelle sur le chiffre d'affaires pour les spécialités pharmaceutiques (article L. 5121-17 du code de la santé publique), qui fonctionne selon un système un peu différent du droit à acquitter par tranche de chiffre d'affaires et rapportera 55 millions de francs à l'AFSSAPS en 2001.

Votre rapporteur spécial ne contestera ni le premier objectif, même si l'agence paraît dotée d'un empilement déjà complexe de 9 taxes et redevances qui sera porté à 11, ni le second.

Il ne peut que réitérer sa vive réserve, développée au sujet de l'article 55, devant un nouveau démembrement des prélèvements obligatoires et espérer que la réforme de l'ordonnance organique relative aux lois de finances permettra de créer une nouvelle catégorie de prélèvements sur recettes conciliant l'universalité de la loi de finances et la souplesse de l'affectation de certaines ressources.

B. DES INCERTITUDES

Deux incertitudes se font jour à l'examen du dispositif proposé par le gouvernement.

La première a trait à la marge extrêmement importante de variation laissée au pouvoir réglementaire pour fixer le taux : si en apparence le niveau en est bas, de 0,15 à 0,4 %, la fourchette d'écart est très grande puisque varie dans un rapport de 1 à 1,7. Il aurait été probablement préférable de la réduire.

La seconde a trait à la base de ce nouveau prélèvement. Le premier doute porte sur le marché considéré, donc la base. Le gouvernement l'estime à 28 milliards de francs ; les professionnels évoquent quant à eux 40 milliards de francs. Le Parlement attend cependant des dossiers fiables avant de se prononcer : la marge d'erreur est ici trop importante pour être passée sous silence.

De plus, la comparaison entre le prélèvement relatif sur les fabricants de dispositifs médicaux (35 à 38 millions de francs pour un chiffre d'affaires de 120 milliards de francs) montre un déséquilibre absolument injustifiable aux yeux de votre rapporteur spécial.

Enfin, existe un doute sur l'application de cette taxe aux fabricants de dispositifs médicaux installés dans l'Union européenne qui, au nom de la libre-concurrence, pourraient vendre directement leurs produits en France sans être soumis à la taxe. Votre rapporteur spécial exprime sa vive préoccupation devant les règles de distorsions de concurrence que pourrait susciter la nouvelle taxe.

Votre commission, malgré toutes ces précisions, n'a pas souhaité entrer dans le débat technique sur l'amélioration de la nouvelle taxe, ayant disposé de trop peu de temps entre l'adoption définitive à l'Assemblée nationale -le 21 novembre- et l'examen de cet article -le 22 novembre- pour statuer. Elle appréciera cependant les initiatives qui pourraient être prises durant la discussion en séance publique et se garde la possibilité d'intervenir à ce moment. En attendant, elle ne proposera qu'un amendement rédactionnel justifié par une erreur matérielle.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 56

Prise en charge du financement du FASTIF

Commentaire : le présent article a pour objet de faire prendre en charge par l'Etat la subvention précédemment versée par la branche famille de la sécurité sociale au fonds d'action sociale des travailleurs immigrés et de leurs familles (FASTIF).

I. LE TEXTE PROPOSÉ

A. UN FEUILLETON À ÉPISODES

En contrepartie du transfert progressif de l'Etat vers la branche famille du financement de la majoration de l'allocation de rentrée scolaire (MARS), il avait été annoncé par le Premier ministre, lors de la conférence de la famille de 1999, la prise en charge par l'Etat de la subvention versée jusqu'alors par la branche famille au fonds d'action sociale des travailleurs immigrés et de leurs familles (FASTIF).

Ainsi, en 2000, la branche famille a pris à sa charge 2,1 milliards de francs de la MARS. En revanche, l'Etat n'avait pas inscrit en loi de finances 2000 la subvention au FASTIF.

Votre commission s'était émue de cette situation et avait dénoncé à ce titre l'insincérité manifeste de la loi de finances pour 2000, s'agissant d'engagements fermes du Premier ministre.

Le second projet de loi de finances rectificative pour 2000 a néanmoins prévu cette prise en charge, pour un montant de 947 millions de francs. Cette somme est cependant partielle puisque l'Etat n'a pas prévu, fait du prince ou marché de dupes, de rembourser à la MSA les 39 millions de francs qu'elle a versés au FASTIF en 2000.

En 2001, cette subvention est consolidée en loi de finances initiale par la création d'un article spécifique, l'article 80 du chapitre 46-81 " Action sociale de lutte contre l'exclusion et d'intégration ", doté de 1,12 milliard de francs.

B. PRENDRE ACTE

Le présent article prévoit seulement de remplacer dans l'article L. 767-2 du code de la sécurité sociale le 1° qui décrit comme ressource du FASTIF " les contributions des organismes, services et administrations assurant le versement des prestations familiales ; le montant de ces contributions et les modalités de leur versement sont fixés chaque année par décret, compte tenu du nombre de travailleurs étrangers relevant de chacun de ces régimes ".

Le FASTIF est un établissement public doté de l'autonomie financière qui " met en oeuvre une action sociale familiale s'adressant à l'ensemble de la population immigrée résidant en France " . Ses autres ressources sont composées d'une partie des ressources tirées de la participation des employeurs à l'effort de construction (article 313-4 du code de la construction et de l'habitation) et d'une " contribution de l'Office national d'immigration prélevée sur le montant de la contribution forfaitaire " qu'acquittent les employeurs recrutant un travailleur immigré en application du I de l'article 64 de la loi de finances pour 1975. Ces deux ressources n'ont jamais été mobilisées par l'Etat.

Par ailleurs, il dispose de crédits du Fonds social européen, sans que cela soit prévu par le code de la sécurité sociale (70 millions de francs en 1999 et 2000).

Budget du FASTIF

(en millions de francs)

1999

2000

2001

Dépenses

1.264,61

1.260,53

nd

Fonctionnement

117,91

119,53

nd

Interventions

1.147,7

1.141

nd

Recettes

1.264,61

1.260,53

nd

Sécurité sociale

986

-

-

Etat

-

986

1.120

FSE

70

70

nd

Autres

208,61

204,53

nd

L'Assemblée nationale a, par un bienheureux souci de clarification, remplacé le 2° et le 3 ° de l'article L. 767-2 par la possibilité pour le FASTIF de bénéficier de financements communautaires et l'évocation de " diverses autres ressources ".

II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Votre commission ne peut que prendre acte de ce transfert de charge, contrepartie d'une mesure six fois plus coûteuse pour la branche famille. Elle a déjà à maintes reprises dénoncé la gestion de ce dossier qui a occupé l'examen de cinq textes différents (projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2000 et 2001, second projet de loi de finances rectificative pour 2000). Elle souhaite seulement attirer l'attention sur deux points.

Le premier a trait aux ressources du FASTIF. Alors que le code de la sécurité sociale prévoit des contributions issues des employeurs par le biais de l'effort de construction et de la contribution à l'office national d'immigration, le FASTIF n'a reçu aucune ressource de ces deux voies en 2000 et n'en prévoit pas plus en 2001. Il a même dû prélever sur son fonds de roulement, ce qui ne paraît d'ailleurs pas illégitime, pour tout juste maintenir ses interventions. Il s'agirait peut-être soit de réactiver ces sources de financement, soit de les supprimer.

Parallèlement, il convient de s'interroger sur les frais de fonctionnement du FASTIF. De 1999 à 2000, son budget a diminué de 4,08 millions de francs, mais ses interventions ont quant à elles baissé de 6,7 millions de francs en raison de la progression de ses charges de fonctionnement, qui s'élèvent à 9,5 % de son budget total. En 2001, la dotation de l'Etat augmentera de 13,6 %. Votre commission espère seulement que cette hausse n'ira pas alimenter une nouvelle progression des dépenses de fonctionnement mais servira bien aux interventions sociales.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

* 23 L'ANAES n'a pas seulement en charge l'accréditation. Elle a par ailleurs en 2000 réuni quatre conférences de consensus (par exemple sur la maladie de Parkinson, la prise en charge de la bronchiolite du nourrisson ou la crise suicidaire). Elle a publié vingt recommandations professionnelles et un ouvrage de compilation de 25 thèmes de recommandations et références médicales (par exemple sur l'hyperthyroïdie, la prise en charge du diabète de type 2, le suivi des malades hypertendus, la prise en charge de la douleur, le dossier en masso-kinésithérapie, l'information du patient, l'interruption volontaire de grossesse). Elle a réalisé 11 études d'évaluation des technologies (par exemple sur le traitement chirurgical de la cataracte), et mis au point quatre guides d'évaluation des pratiques professionnels en établissement de santé. Elle a enfin rendu 369 avis sur des actes de nomenclature.

* 24 Voir le rapport d'information de M. Alain Lambert au nom de la commission des finances, Doter la France de sa nouvelle Constitution financière , n° 37 (2000-2001).

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