4. L'absence de réflexion sur l'aide juridictionnelle
L'aide juridictionnelle s'est fortement développée depuis la loi n ° 91-647 du 10 juillet 1991 et elle constitue désormais la principale ressource d'un nombre non négligeable d'avocats, ce qui n'est pas sans poser des difficultés quant à l'évolution de cette profession. Par ailleurs, le développement des tâches demandées aux avocats, qui doivent désormais être présents dès la première heure de la garde à vue, lors de la pose du bracelet électronique et dans les prisons, ainsi que l'inadaptation du mode de calcul de leurs prestations tendent à " gripper " le système de l'aide juridictionnelle et à créer des mécontentements au sein de la profession d'avocat.
Votre rapporteur regrette qu'aucune valorisation de l'unité de valeur ne soit intervenue cette année et demande qu'une réflexion d'ensemble soit engagée sur l'aide juridictionnelle afin que chaque avocat participe à la défense des " moins aisés " sans pour autant que cette tâche ne le pénalise financièrement.
5. L'enterrement de certaines réformes pourtant très attendues
Alors que la loi n ° 98-1163 relative à l'accès au droit et à la résolution amiable des conflits est promulguée depuis le 18 décembre 1998, certaines dispositions ne sont toujours pas entrées en vigueur faute de décret d'application. Il s'agit notamment de l'extension du domaine de l'aide juridictionnelle à la transaction avant la saisine d'une juridiction ainsi que de l'application des dispositions relatives à l'aide juridictionnelle, sans condition de ressources, aux personnes formulant une demande devant les juridictions des pensions militaires.
Par ailleurs, l'ancienne ministre de la justice, Madame Elisabeth Guigou, avait fait de la réforme de la carte judiciaire une priorité et avait créé une mission dans cet objectif. En trois ans, celle-ci a supprimé 36 tribunaux de commerce et il semble que le deuxième décret de suppression de certains tribunaux de commerce soit bloqué depuis plus de six mois. Par ailleurs, le chef de la mission en charge de la réforme de la carte judiciaire a été nommé récemment à la direction des services judiciaires sans être remplacé. Cette réforme n'apparaît donc plus urgence pour le gouvernement sans qu'il ait expliqué ce changement d'attitude...
La réforme de la carte judiciaire doit être précédée d'une réflexion d'envergure sur le rôle et la place de la justice dans la société, à condition de ne pas l'assimiler à une politique de réduction du nombre des juridictions. Lors de ses déplacements, votre rapporteur a pu constater que ce sont les petits tribunaux de grande instance qui rendent la justice la plus rapide et la plus humaine.
Par ailleurs, ces visites ont confirmé à votre rapporteur la nécessité d'une justice de proximité, accessible aux plus défavorisés. En effet, il s'est rendu compte que la paupérisation croissante d'une partie de la société française s'accompagnait d'une très faible mobilité. En effet, de nombreux justiciables ne disposent pas de leurs propres moyens de transports et vivent dans des régions enclavées, qui souffrent d'un manque de transports en commun. En conséquence, au lieu de vouloir supprimer les petits tribunaux d'instance, il faudrait étoffer leurs compétences et y multiplier les audiences. Votre rapporteur a eu écho de certaines initiatives locales intéressantes, comme la tenue de permanences dans l'enceinte du tribunal d'instance par des notaires ou des avocats, qui mériteraient d'être étendues à d'autres tribunaux. Il s'interroge également sur le développement d'activités relevant des maisons de justice et du droit dans certains tribunaux d'instance situés principalement en zone rurale.