CHAPITRE II :
DU BUDGET INITIAL À LA LOI DE
RÈGLEMENT
A l'occasion de l'examen du projet de loi de finances initiale pour 2000, votre rapporteur général avait déploré que « bénéficiant d'une conjoncture économique favorable et d'une amélioration objective des performances de la sphère privée de l'économie, le gouvernement ne réalise pas, dans le domaine des finances publiques, les indispensables réformes de structure qui permettront de préparer l'avenir et de préserver les générations futures ».
Ce sentiment avait été conforté lors de l'examen de la première loi de finances rectificative pour 2000 1 ( * ) qui consistait à tirer les conséquences budgétaires de l'affaire de la « cagnotte » et à réévaluer le niveau des recettes fiscales et non fiscales pour 2000.
En effet, les 51,4 milliards de surplus de recettes fiscales et non fiscales, avouées tardivement et « sous la contrainte », avaient été affectés à hauteur de 80 %, soit 40,6 milliards de francs, à des mesures éparses de baisse d'impôt, et pour le reliquat, soit 10 milliards de francs, à une augmentation significative de la dépense.
Votre commission avait estimé, s'agissant de ces nouvelles dépenses qu'il n'était « pas de bonne politique de financer en cours d'année des dépenses supplémentaires par un surcroît de recettes non encore perçues ».
Sur le fond, votre rapporteur général avait alors déploré que, dans le projet initial, 49 millions de francs, soit 0,098 % seulement du montant des réévaluations de recettes, soient affectés à la réduction du déficit. Aussi avait-il préconisé que le financement des 10 milliards de dépenses nettes supplémentaires soit assuré par redéploiement, comme cela devrait être la règle, afin d'amplifier l'indispensable effort de réduction du déficit budgétaire.
Examinant le second collectif budgétaire de 2000, la « traditionnelle » loi de finances rectificative de fin d'année 2 ( * ) , votre rapporteur général avait à nouveau, refusé d'en accepter tant le contenu que d'en partager les orientations. En effet, si la progression des recettes fiscales s'élevait à 40,6 milliards de francs, le gouvernement ne réduisait le déficit budgétaire que de 5,8 milliards de francs de sorte que celui-ci restait, dans le projet initial toujours supérieur en 2000 (- 209,5 milliards de francs) au niveau exécuté en 1999 (- 206 milliards de francs).
A bien des égards, le budget 2000 apparaissait donc ainsi comme celui des « occasions manquées », auxquelles ont rapidement succédées, au cours de l'année 2001, « les illusions perdues ».
I. LA LOI DE FINANCES INITIALE POUR 2000
A. DES RÉSERVES SUR LE RESPECT DE LA NORME DE PROGRESSION DES DÉPENSES
L'année 2000 devait constituer une étape importante en matière d'évolution des dépenses de l'Etat.
En effet, dans la loi de finances initiale pour 2000, le gouvernement s'était fixé un objectif à la fois clair et relativement ambitieux : la stabilisation en volume des dépenses de l'Etat, soit une progression des dépenses de 15 milliards de francs (17,5 milliards de francs hors dette), égale à l'augmentation prévisionnelle des prix hors tabac (+ 0,9 %). Sa position officielle n'avait pas changé, en dépit de la présentation, dès le printemps, d'un projet de loi de finances rectificative 3 ( * ) .
Le rapport préliminaire de la Cour des comptes portant sur l'exécution des lois de finances pour 2000 semble confirmer les engagements du gouvernement, mais lui apporte néanmoins plusieurs sérieuses réserves.
Les réserves de la Cour des comptes sur la présentation par le gouvernement de la norme de progression des dépenses de l'Etat en 2000 Dans son rapport préliminaire relatif à l'exécution des lois de finances pour 2000, la Cour indique que « la hausse moyenne des prix ayant été de 1,6 %, la progression des dépenses brutes du budget général, soit 1,6 % en valeur, correspond à une stabilité en volume », et que « dans la présentation faite par le MINEFI 4 ( * ) , le calcul d'un montant de dépenses nettes conduit au même résultat ». Ainsi, pour la première fois depuis 1998, le gouvernement aurait respecté la norme de progression des dépenses de l'Etat qu'il avait annoncée en loi de finances initiale. Toutefois, la Cour des comptes, par ses trois observations, apporte de sérieux tempéraments à cette présentation faite par le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie : - elle s'interroge sur les recettes relatives à la dette, puisqu'il est procédé à une contraction entre des recettes et des dépenses, qui, le plus souvent, n'ont pas lieu au cours des mêmes exercices ; - surtout, elle « note que c'est grâce à l'inflation que le résultat de 0 % en volume a pu être affiché », le taux d'inflation constaté en exécution, soit 1,6 %, étant « moins bon » que celui annoncé en loi de finances initiale, soit 0,9 % ; - enfin, elle pose la question de la sincérité de la présentation retenue par le ministère : « les résultats peuvent être présentés de différentes manières, relativement techniques, avec des « ajustements » divers et variés, qui peuvent alimenter, au plan interne, le débat récurrent sur l'opacité des comptes de l'Etat, consolidés ou non », la Cour déplorant « l'absence dommageable d'un « référentiel » de normes comptables applicables à l'Etat, qu'il paraît impératif d'élaborer sans délai ». Plus généralement, elle note que « la lenteur de l'amélioration [de la situation budgétaire] s'explique aussi par des dépenses de l'Etat qui résistent à la baisse », et souligne « la difficulté à diminuer structurellement les dépenses de l'Etat ». |
* 1 Loi de finances rectificative n° 2000-656 du 13 juillet 2000.
* 2 Loi de finances rectificative n° 2000-1353 du 30 décembre 2000.
* 3 Loi n° 2000-656 du 13 juillet 2000 précitée.
* 4 Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.