Loi de finances pour 2002 - Tome III - Annexe 33 : Recherche
MARINI (Philippe), Rapporteur général ; TREGOUET (René), Rapporteur spécial
RAPPORT GENERAL 87 (2001-2002) - TOME III - Annexe 33 - COMMISSION DES FINANCES
Rapport au format Acrobat ( 179 Ko )Table des matières
- INTRODUCTION
-
CHAPITRE PREMIER
UN BILAN PEU GLORIEUX EN TERMES DE DÉPENSES- I. UNE ÉVOLUTION BUDGÉTAIRE POUR 2002 QUI DÉFAVORISE LE MINISTÈRE DE LA RECHERCHE AU SEIN DU BCRD
-
II. UN BILAN DE LÉGISLATURE MÉDIOCRE
- A. UNE PROGRESSION DU BCRD INFÉRIEURE À LA CROISSANCE ET SOUVENT MÊME À L'AUGMENTATION DES DÉPENSES CIVILES DE L'ETAT
- B. UN ACCROISSEMENT DU BUDGET DE LA RECHERCHE STRICTO SENSU PARFOIS MOINDRE QUE LA HAUSSE DES PRIX
- C. UN DÉCLIN DE LA PART DANS LE PIB DE LA DÉPENSE INTÉRIEURE GLOBALE DE RECHERCHE QUI S'EST POURSUIVI
- D. UNE POSITION RELATIVE DÉGRADÉE
-
CHAPITRE DEUX
DES FAIBLESSES PERSISTANTES,
MALGRÉ CERTAINS PROGRÈS,
FAUTE DE RÉFORMES D'ENVERGURE- I. SINGULARITÉS ET FAIBLESSES DE NOTRE RECHERCHE
-
II. L'ABSENCE DE RÉFORMES D'ENVERGURE
- A. LES CAUSES POSSIBLES DU REGRETTABLE MANQUE D'AMBITION CONSTATÉ
- B. UNE NÉCESSITÉ ABSOLUE
- C. LES AXES DE CHANGEMENT SOUHAITABLES
-
CHAPITRE TROIS
L'EXEMPLE QUE NOUS MONTRENT PLUSIEURS PAYS ÉTRANGERS -
CHAPITRE IV
L'INSUFFISANTE PROGRAMMATION D'ENSEMBLE
DES TRES GRANDS EQUIPEMENTS
ET LA STAGNATIONDU BUDGET DE L'ESPACE - CONCLUSION
- EXAMEN EN COMMISSION
-
MODIFICATIONS APPORTÉES PAR
L'ASSEMBLÉE NATIONALE
N° 87
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2001-2002
Annexe au procès verbal de la séance du 22 novembre 2001
RAPPORT GÉNÉRAL
FAIT
au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur le projet de loi de finances pour 2002 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,
Par M.
Philippe MARINI,
Sénateur,
Rapporteur général.
TOME III
LES MOYENS DES SERVICES ET LES DISPOSITIONS SPÉCIALES
(Deuxième partie de la loi de finances)
ANNEXE N° 33
RECHERCHE
Rapporteur spécial
: M. René TRÉGOUËT
(1) Cette commission est composée de : MM. Alain Lambert, président ; Jacques Oudin, Gérard Miquel, Claude Belot, Roland du Luart, Mme Marie-Claude Beaudeau, M. Aymeri de Montesquiou, vice-présidents ; MM. Yann Gaillard, Marc Massion, Michel Sergent, François Trucy, secrétaires ; Philippe Marini, rapporteur général ; Philippe Adnot, Bernard Angels, Bertrand Auban, Denis Badré, Jacques Baudot, Roger Besse, Maurice Blin, Joël Bourdin, Gérard Braun, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Jacques Chaumont, Jean Clouet, Yvon Collin, Jean-Pierre Demerliat, Eric Doligé, Thierry Foucaud, Yves Fréville, Adrien Gouteyron, Hubert Haenel, Claude Haut, Alain Joyandet, Jean-Philippe Lachenaud, Claude Lise, Paul Loridant, François Marc, Michel Mercier, Michel Moreigne, Joseph Ostermann, Jacques Pelletier, René Trégouët.
Voir
les numéros
:
Assemblée nationale
(
11
ème
législ.) :
3262
,
3320
à
3325
et T.A.
721
Sénat
:
86
(2001-2002)
Lois de finances. |
INTRODUCTION
Mesdames, Messieurs,
Nul ne conteste l'importance de la recherche comme facteur
d'amélioration des performances de notre économie en
matière de croissance et d'emploi.
Personne ne remet non plus en cause sa contribution à la satisfaction
des aspirations de nos concitoyens aux progrès de la santé et
à un environnement plus sûr et de meilleure qualité (en
réponse, parfois, à des inquiétudes nées des
activités scientifiques elles-mêmes et de leurs
répercussions en matière agricole ou industrielle...).
Mais toutes les conséquences ne semblent pas en être
tirées, qu'il s'agisse du montant des dépenses ou de leur
efficacité, tout aussi essentielle, dont le renforcement suppose de
profonds changements de notre système dans le respect, toutefois, de nos
spécificités.
A l'occasion de la discussion du projet de loi de finances pour l'an 2000,
M. Claude Allègre avait déclaré vouloir faire des
réformes de structures nécessaires
1(
*
)
un préalable à une augmentation
significative des moyens budgétaires de la recherche.
Nous n'avons eu ni l'un, ni l'autre, alors que certains de nos principaux
concurrents (le Japon, l'Allemagne, la Grande-Bretagne...) mènent les
deux de front, accroissant leur effort de recherche tout en modifiant
foncièrement la configuration de leur appareil scientifique et technique.
Ce constat ne signifie pas que rien n'ait été fait depuis 1997,
mais que les actions menées n'ont pas été à la
hauteur des enjeux.
La recherche n'échappe pas à la compétition mondiale.
C'est une activité essentielle. Elle n'a pas fait l'objet de la
priorité qu'elle mérite.
Notre système n'a pas été réformé en
profondeur, ni même repensé dans son ensemble, malgré les
observations de la Cour des comptes, du commissariat au Plan, de MM. Cohen
et Le Déaut, et alors qu'il y avait deux raisons majeures pour le
faire :
- la réforme de la loi organique relative aux lois de finances qui
implique une nouvelle présentation de l'effort budgétaire de
recherche,
- le « choc démographique » que provoqueront
les départs massifs à la retraite de la deuxième
moitié de la présente décennie.
Le statut proposé aux jeunes chercheurs recrutés en ce
début de XXI
ème
siècle doit-il demeurer
identique à celui de leurs prédécesseurs ?
Votre rapporteur est cependant conscient de la difficulté de
réformer la recherche française . Il n'impute pas à
l'actuel ministre la responsabilité unique du caractère qu'il
juge décevant du bilan de la législature qui s'achève
à cet égard. Celui-ci n'exerce en effet ses fonctions que depuis
moins de deux ans, lesquelles sont soumises à de nombreuses contraintes
(arbitrages interministériels, dispersion et rigidité des
structures, inerties budgétaires...).
CHAPITRE PREMIER
UN BILAN PEU GLORIEUX EN TERMES DE
DÉPENSES
Votre
rapporteur n'ignore pas avec quelles précautions les statistiques
doivent être maniées et combien elles se prêtent à
des manipulations et peuvent conduire à des conclusions opposées.
Les périmètres budgétaires changent ; le BCRD
n'inclut pas certaines dépenses consacrées à la recherche
et à l'innovation, comme l'ont souligné aussi bien le CSRT
(conseil supérieur de la recherche et de la technologie) que la Cour des
comptes.
Celle-ci a ainsi fait état, dans son rapport sur l'exécution de
la loi de finances pour 1999 de crédits du budget de l'enseignement
supérieur (notamment au titre de la rémunération
d'ingénieurs techniciens ou de cadres administratifs à temps
partiel) qui ne figurent pas dans cet agrégat ainsi que des financements
européens ou régionaux, du produit de certaines taxes
parafiscales ou encore du « manque à gagner »
dû au crédit d'impôt recherche.
Dans les comparaisons internationales, la comptabilisation des emplois de
chercheurs s'avère, par ailleurs, délicate du fait de la
difficulté à évaluer les prestations des
« post-docs » ou des enseignants-chercheurs à temps
partiel.
Il ne s'agit donc pas de se lancer dans une bataille de chiffres. Celle-ci
serait d'autant plus stérile que l'efficacité des dépenses
importe autant que leur montant.
Dans ces conditions, les développements qui suivent ont essentiellement
pour objet d'inviter le Gouvernement à se garder de tout triomphalisme.
Quel que soit le bilan de la précédente majorité, celui de
l'actuelle législature n'est pas particulièrement glorieux, alors
qu'elle a bénéficié d'une conjoncture plus favorable.
Ses vraies priorités étaient ailleurs.
I. UNE ÉVOLUTION BUDGÉTAIRE POUR 2002 QUI DÉFAVORISE LE MINISTÈRE DE LA RECHERCHE AU SEIN DU BCRD
A. LA PROGRESSION MOYENNE DU BUDGET CIVIL DE LA RECHERCHE ET DU DÉVELOPPEMENT
1. Une augmentation globale passable
L'augmentation prévue pour 2002 du BCRD (budget civil de
recherche et de développement), qui regroupe les contributions au
financement de la recherche civile des différents ministères
concernés, est de 2,2 %.
Pour la deuxième année consécutive, le BCRD
(8.725,3 M€, soit 52.234 MF en 2002) augmente ainsi :
- autant que la moyenne des budgets civils,
- mais moins que ce qui a été prévu pour le PIB ou
d'autres dépenses jugées, elles, prioritaires comme
l'environnement et la justice.
2. Une ventilation des dépenses par ministère qui révèle certaines priorités
Le tableau suivant rend compte de l'évolution des dotations des différents départements ministériels.
a) Structure des dépenses
Ce
tableau appelle les commentaires suivants.
Après celle du ministère de la recherche (70 %), les
participations les plus importantes à l'effort budgétaire de
recherche civile sont consenties par les ministères :
- de l'industrie (913,4 M€ soit un peu plus de 10 % de l'ensemble du
BCRD),
- de l'éducation nationale, au titre de l'enseignement supérieur
(5,3 %),
- enfin, de l'équipement et des transports (environ 4 %).
Les autorisations de programme progressent de 2,9 %.
b) Principales priorités
On note
plus particulièrement l'augmentation, nettement supérieure
à la moyenne, des moyens consacrés :
- à l'enseignement supérieur : + 15,1 % en D.O. + CP.
et + 19,3 % en AP (soutien de base à la recherche
universitaire et dépenses immobilières en sa faveur, dans le
cadre de l'exécution des contrats de plan Etat-Régions et en
conséquence du plan université 2000).
- aux programmes aéronautiques civils (+ 10,1 % en
crédits de paiement, du fait, principalement, du développement
par Airbus du « gros porteur » A 380) ;
- à la sûreté nucléaire (+ 18,8 % pour les
moyens du nouvel Institut de radioprotection et de sûreté
nucléaire) ;
- dans une moindre mesure, à la culture (+ 5 % hors
Cité des sciences, en raison de créations d'emplois dans les
disciplines de l'histoire de l'art et de l'archéologie) et aux affaires
étrangères (+ 3,5 % : contribution à la
recherche communautaire en biologie moléculaire).
En revanche, les crédits afférents à la contribution du
ministère de la Défense aux dépenses de recherche spatiale
duale (à double finalité civile et militaire) se signalent par
leur stagnation, après leur forte baisse de l'an dernier.
3. Analyse thématique
La ventilation prévue en 2002 du BCRD par principales catégories d'objectifs est la suivante :
Le
projet de loi de finances pour 2002 privilégie :
- les STIC (sciences et technologies de l'information et de la
communication) : + 7,1 %, soit + 55 M€) ,
- les sciences du vivant : + 3,4 %, soit + 37,2 M€,
- l'environnement, au sens large (y compris la sécurité,
l'énergie, le développement durable) : + 3,3 %, soit +
46 M€.
B. L'ÉROSION, EN EUROS CONSTANTS, DU BUDGET DU MINISTÈRE DE LA RECHERCHE
1. Aperçu de l'évolution globale des crédits et de leur ventilation
Le
tableau suivant rend compte de l'évolution des dépenses :
- consacrées, d'une part, aux actions propres du ministère ;
- effectuées, d'autre part, par les différents organismes de
recherche (établissements publics à caractère scientifique
et technique, « EPST », ou industriels et commerciaux,
« EPIC », fondations et groupements d'intérêt
public).
Globalement, l'augmentation du budget du ministère n'est que de 1 %
à structure constante
2(
*
)
. Elle est donc
nettement inférieure à celle du BCRD, les AP progressant, il est
vrai, de 6,7 %.
Elle est également moindre que la hausse des prix prévue
(+ 1, %).
2. Des moyens propres limités
Le
budget du ministère de la recherche mobilise, comme indiqué plus
haut, plus de 70 % (72 %) du BCRD.
Mais 91 % des crédits correspondants sont distribués aux
différents organismes publics de recherche.
Les moyens propres du ministère ne représentent ainsi que moins
de 10 % de son budget et concernent un nombre très limité de
chapitres :
Titre
III - Fonctionnement
Ch. 34-98 - moyens de fonctionnement 8,5 M€
(services centraux et délégations régionales)
Titre IV - Interventions
Ch. 43-01 - actions d'incitation, d'information
et de communication 33 M€
Ch. 43-80 - formation à/et par la recherche
(allocations, bourses, conventions avec les entreprises
type CIFRE et CORTECHS) 255,2 M€
Titre V - Investissements
Ch. 56-06 - Etudes, actions en faveur de l'information
et de la culture scientifique et technique 1,2 M€
Titre VI - Subventions d'investissement
Ch. 66-04 - Soutien à la recherche et à la technologie
(y compris FRT
3(
*
)
) 106,7 M€
Ch. 66-05 FNS - (Fonds national pour la science) 114,3 M€
Ch. 66-06 Information et culture scientifique
et technique mémoire
En
outre, la majeure partie (plus de 70 %) des fonds d'intervention du
ministère (FNS et FRT) bénéficie, en fait, à des
laboratoires publics, au titre du soutien à des disciplines ou à
des actions concertées prioritaires.
Les augmentations de crédits les plus significatives concernent :
- les allocations de recherche (+ 14,6 M€ soit 7,24 %) en faveur des
thésards, à l'article 10 du chapitre 43-80, qui passent
ainsi de 7 400 F à 7 807 F brut par mois ;
- les autorisations de programme du FNS (+ 12 %) qui atteignent le
même niveau que celles du FRT (soit 150 M€, c'est-à-dire
un milliard de francs).
On note que les moyens de fonctionnement de l'administration centrale et des
délégations régionales à la recherche et à
la technologie (DRRT) ont été transférés en 2001,
comme il est logique, du fascicule « enseignement
scolaire » (hors BCRD) vers le budget de la recherche.
3. Evolution des dotations des organismes scientifiques
a) L'inertie des dépenses des principaux établissements
Le
tableau qui précède rend compte tout à la fois du
morcellement de la recherche publique française et du poids
particulièrement important de certains organismes.
Ensemble, et par ordre de subventions décroissant, le CNRS, le CNES,
l'INRA, le CEA et l'INSERM mobilisent, en effet, près de 80 % de ce
budget (77,6 %) et 85,3 % de l'agrégat « organismes
de recherche ».
Les EPST (3,6 M€ + 1,4 %) sont mieux lotis en 2002 que les EPIC
(2 M€ - 0,2 %) mais disposent, il est vrai, de ressources
propres généralement plus élevées.
Dans l'ensemble, les subventions de l'Etat représentent, en effet,
87 % des ressources des EPST (et le personnel 70 % de leurs
dépenses). Or, ces pourcentages n'atteignent, respectivement, que
66 % et 30 % pour les EPIC.
b) Principales tendances pour 2002
Les
priorités essentielles affichées par le ministère pour
2002 concernent, sur le plan thématique, les sciences du vivant, les
NTIC (nouvelles technologies de l'information et de la communication) et
l'environnement.
Transversalement, sont privilégiés l'emploi scientifique (et
celui des jeunes chercheurs en particulier) ainsi que les moyens de
fonctionnement et d'investissement de la recherche publique.
Certaines des évolutions retracées dans le tableau qui
précède sont cohérentes avec ces intentions (augmentation
globale de 6,1 % des AP, progression des subventions accordées
à l'INSERM : + 3,6 % ou l'INRIA : + 10,7 %).
D'autres correspondent à des rattrapages ponctuels, en phase cependant,
avec l'importance accordée aux recherches environnementales (recherches
polaires ou sur la mer menées par l'IFRTP et l'IFREMER).
Les 463 créations d'emplois prévues en 2002, profitent, en
premier lieu, aux organismes spécialisés dans les recherches
prioritaires.
|
Chercheurs |
IT |
Total |
- INRIA |
50 |
60 |
100 |
- INSERM |
15 |
65 |
80 |
- INRA |
11 |
89 |
100 |
- CNRS 4( * ) |
20 |
120 |
140 |
- IRD |
2 |
18 |
20 |
- INED |
2 |
2 |
4 |
- CEMAGREF |
- |
4 |
4 |
- INRETS |
- |
5 |
5 |
TOTAL |
100 |
363 |
463 |
Le tableau suivant extrait du « bleu » de la recherche, montre cependant que la répartition des dépenses des organismes de recherche (y compris celles financées par le FNS, le FRT ou des crédits d'autres budgets) privilégie davantage les sciences du vivant et de l'information que l'environnement.
Répartition par thème des moyens
budgétaires
des organismes de recherches
(en milliers d'euros)
|
2001 |
2002 |
Variation |
Sciences du vivant |
1 687 |
1 718 |
+ 1,8 |
Nouvelles technologies d'information et de communication |
358 |
375 |
+ 4,7 |
Environnement, Sciences de la planète |
500 |
508 |
+ 1,6 |
Energie, transports |
558 |
560 |
+ 0,3 |
Espace |
1 175 |
1 176 |
+ 0 |
Mathématiques, physique |
489 |
501 |
+ 2,4 |
Chimie |
134 |
136 |
+ 1,5 |
Sciences humaines et sociales |
492 |
503 |
+ 2,2 |
R & D en faveur du développement |
161 |
163 |
+ 1,2 |
Autres thématiques (non ventilées) |
71 |
70 |
- 1,4 |
TOTAL |
5 625 |
5 710 |
+ 1,5 |
En
effet, la progression prévue des dépenses est :
- à peine supérieure (+ 1,6 %) à celle du total pour
la ligne « environnement, sciences de la planète » ;
- nettement inférieure (+ 0,3 % au ,lieu de + 1,5 %) pour la
ligne énergie-transports.
Les sciences humaines, les mathématiques et la physique sont mieux lotis
et l'espace, malgré la stagnation de ses crédits, continue de
peser lourd dans l'ensemble.
c) Remarque sur la gestion antérieure des crédits
Le
financement d'actions concertées incitatives (ACI) au profit, notamment
d'équipes de jeunes chercheurs, ou de réseaux, en particulier le
réseau des génopôles, donne lieu à de très
nombreux transferts en cours d'exercice à destination des organismes
scientifiques, avec le concours d'autres ministères.
Cela ne facilite évidemment pas le suivi de l'exécution des
dépenses.
Plus généralement, le découpage des documents
budgétaires en sections et parties altère leur lisibilité.
Concernant la couverture des AP par les CP, leur appréciation est rendue
difficile par le fait qu'il faut distinguer le « soutien des
programmes », pour lequel les montants des AP et CP ouverts dans
chaque loi de finances sont identiques, des « autres autorisations de
programmées », financées avec un
échéancier triennal de versement de CP.
L'écart entre AP et CP tend à se réduire pour les
incubateurs et le FRT (dont les subventions, lorsqu'elles sont modifiées
en fin d'année, donnent lieu inévitablement à, des
reports.)
Il demeure important pour certains organismes de recherche tels le CEA
(360 M€ environ), l'ADEME, le CNRS, l'INSERM, l'INRA et le CNES (dont
la situation, liée à des retards de paiement de la contribution
française à l'Agence spatiale européenne devrait
être normalisée en 2002).
Plutôt que de procéder à un rattrapage, par l'ouverture, au
titre des services votés, de CP correspondant aux AP non
consommées, l'administration préfère apurer le
passé en annulant les AP anciennes, dites
« dormantes », qui, n'ayant pas fait l'objet d'engagements
juridiques, ne requièrent pas de moyens de paiement.
Cette solution semble effectivement, de loin, préférable.
C. UNE APPRÉCIATION GLOBALE NÉGATIVE
1. Des éléments positifs...
Si ce
budget pouvait être considéré, isolément,
indépendamment des évolutions des années
précédentes et des efforts de nos concurrents et avec la garantie
d'une bonne efficacité de ses dépenses, votre rapporteur aurait
pu recommander à votre commission des finances de lui donner un avis
favorable.
Il porte, en effet, un jugement a priori favorable sur la sur :
- la progression des moyens consacrés au soutien de base des
laboratoires ;
- les priorités retenues par le ministre ;
- l'anticipation des départs massifs à la retraite des
années 2005-2010.
Par ailleurs, une certaine modération de la progression des
crédits budgétaires n'est pas, en soi, pour déplaire
à votre commission des finances. Elle peut être une incitation
à un développement des ressources propres des organismes publics
de recherche et de la contribution d'entreprises privées à leurs
travaux, dans le cadre de partenariats plus étroits.
2. ... une impression défavorable qui l'emporte
Cependant, faute de réformes de structures et du fait,
notamment, d'un déficit persistant d'évaluation, accentué
par la complexité et le manque de lisibilité de notre
système de recherche :
- les mesures programmées en faveur de l'emploi scientifique
semblent nécessaires mais néanmoins insuffisantes, en l'absence
de réflexion sur l'évolution du statut des chercheurs ;
- l'efficacité des dépenses est difficile à
apprécier. Les crédits budgétaires ne paraissent pas
exercer un effet d'attraction suffisant sur l'effort de recherche des
entreprises, si on en juge par l'évolution défavorable de la DIRD
(dépense intérieure de recherche et développement) qui
inclut leurs investissements.
Les indicateurs disponibles fournissent un bilan comparatif mitigé des
résultats de la recherche française au niveau international (voir
plus loin).
- enfin, les évolutions budgétaires, ainsi replacées
dans le cadre global de celles de l'ensemble des dépenses de recherche
et dans le contexte international, doivent en outre être
appréciées, en cette fin de législature, sur la
durée de plusieurs exercices budgétaires.
II. UN BILAN DE LÉGISLATURE MÉDIOCRE
A. UNE PROGRESSION DU BCRD INFÉRIEURE À LA CROISSANCE ET SOUVENT MÊME À L'AUGMENTATION DES DÉPENSES CIVILES DE L'ETAT
Le
tableau ci-dessus révèle que l'augmentation du BCRD, en loi de
finances initiale, a été constamment inférieure à
la croissance de l'économie à laquelle celui-ci contribue
pourtant éminemment (un peu à la manière d'un injecteur
dans un moteur à explosion ou d'un dispositif à flux
intégré dans la propulsion d'une fusée).
De 1998 à 2000, la progression de cet agrégat budgétaire a
même été inférieure à celle de la moyenne des
dépenses civiles de l'ensemble des ministères.
Pourtant, comme votre rapporteur le souligne chaque année, les
« jeunes pousses » d'aujourd'hui, issues de la recherche
publique, sont les gros contribuables de demain.
Celle-ci devrait donc faire l'objet d'une priorité budgétaire, ce
qui n'a pas été le cas, à la différente d'autres
actions gouvernementales en faveur de la justice et de la
sécurité, ou des dépenses de fonctionnement du
ministère de l'environnement.
Il faut cependant reconnaître qu'un redressement (qui ne permet pas
cependant un rattrapage) a eu lieu à cet égard depuis la prise de
fonction de l'actuel ministre, à partir de la loi de finances pour 2001,
qui a vu, en outre, en cours d'exercice, des moyens supplémentaires
être accordés à la lutte contre les maladies à
prions.
L'écart entre la croissance du BCRD et celle du PIB devrait
vraisemblablement se réduire, voire devenir positif, en 2002, mais il
n'y a pas lieu de s'en réjouir, s'agissant des conséquences du
ralentissement de l'économie et du creusement du déficit
budgétaire qui, sauf annulation de crédits, devrait en
résulter.
B. UN ACCROISSEMENT DU BUDGET DE LA RECHERCHE STRICTO SENSU PARFOIS MOINDRE QUE LA HAUSSE DES PRIX
A part
l'année particulièrement faste, de 1998, le département
ministériel de la recherche a subi une érosion globale de ses
moyens, en francs constants, durant les exercices suivants.
L'année 2002 ne devrait pas y faire exception.
Or, comme indiqué précédemment, la presque totalité
des crédits concernés est directement affectée aux
organismes de recherche, à des équipes de chercheurs ou à
des actions de soutien au développement technologique.
Même la partie salaires, parfois jugé excessive, de ces
dépenses correspond au financement d'un investissement intellectuel
(dont il reste à mesurer les retombées).
C. UN DÉCLIN DE LA PART DANS LE PIB DE LA DÉPENSE INTÉRIEURE GLOBALE DE RECHERCHE QUI S'EST POURSUIVI
L'agrégat comptable correspondant à
l'appellation DIRD
(dépense intérieure
5(
*
)
de
recherche et développement) est beaucoup plus large que celui, jusqu'ici
évoqué, de BCRD puisqu'il recouvre aussi :
- les dépenses
militaires
de recherche,
- celles des administrations financées à partir d'autres
ressources,
- et, enfin, la contribution, désormais prédominante, des
entreprises.
S'il est exact que la part de la DIRD (dépense intérieure de
recherche et développement) dans le PIB s'est mise à
décroître à partir de 1993, aucun infléchissement
dans cette tendance n'a été constaté depuis 1997, comme le
montre le graphique qui suit, mis à part un faible sursaut en 1999.
Le pourcentage considéré, qui atteignait 2,22 % en 1997 ne
représente plus, en effet, que 2,15 % en 2001, selon un document
émanant des ministères de l'éducation nationale et de la
recherche
6(
*
)
. Les entreprises ont pourtant
accentué leur effort dans le même temps (leur part dans l'ensemble
passant de 62,5 % à 64 %) mais insuffisamment pour enrayer ce
déclin.
Quant à la DIRD des administrations
7(
*
)
(qui inclut les dépenses des institutions privées sans but
lucratif), elle a baissé, d'après la même source, en
2000
8(
*
)
, après avoir faiblement
augmenté en 1999.
Cette regrettable évolution ne s'explique que partiellement par celle
des dépenses de défense qui n'ont connu qu'un léger
effritement durant la période considérée après
avoir subi, antérieurement, un véritable effondrement
9(
*
)
.
Ainsi, la part de notre richesse nationale consacrée au financement de
notre effort de recherche a reculé, ce qui risque d'affecter notre
compétitivité.
D. UNE POSITION RELATIVE DÉGRADÉE
Le
tableau suivant dénote une dégradation relative de l'effort de
recherche de la France par rapport à celui de nos principaux concurrents.
Il ne s'agit cependant que d'indices quantitatifs qui ne permettent pas
d'apprécier le rapport coût-efficacité des dépenses
engagées.
La Grande-Bretagne, par exemple, est particulièrement performante
à cet égard, selon certains indicateurs, notamment
bibliométriques.
Il
apparaît que :
- malgré une amélioration en 1999, année favorable
comme on l'a vu, nous n'avons pas retrouvé notre niveau de 1996 en ce
qui concerne le ratio DIRD/PIB et sommes désormais distancés par
l'Allemagne de ce point de vue ;
- les pays qui nous devançaient au départ (Etats-Unis,
Japon, Suède) ont accentué leur avance en ce qui concerne leur
DIRD évaluée non seulement par rapport au PIB mais aussi par
habitant ;
- nos résultats ne se sont sensiblement améliorés,
dans l'absolu, qu'en ce qui concerne le nombre de chercheurs pour mille actifs,
pour lequel nous dépassons désormais l'Allemagne.
En l'absence de véritables réformes de structures, il est
à craindre que ce relâchement, mesuré en évolution
de part de PIB, de notre effort national de recherche, n'ait pas
été compensé par une amélioration de
l'efficacité des dépenses considérées.
CHAPITRE DEUX
DES FAIBLESSES PERSISTANTES,
MALGRÉ CERTAINS
PROGRÈS,
FAUTE DE RÉFORMES D'ENVERGURE
La législature qui s'achève aura vu également persister beaucoup des faiblesses traditionnelles de la recherche française, à l'exception, notable, du soutien à la création d'entreprises innovantes, faute de réformes suffisamment ambitieuses ;
I. SINGULARITÉS ET FAIBLESSES DE NOTRE RECHERCHE
A. LES SINGULARITÉS FRANÇAISES
1. Concernant la répartition des financements
a) Un rôle important de l'Etat
La part de l'Etat dans le financement de la DIRD 10( * ) bien que désormais conforme à la moyenne européenne, demeure supérieure en France à ce qu'elle est chez les principaux pays de l'OCDE (notamment au Japon).
L'intervention de l'Etat dans le financement de la DIRD
Pays de l'OCDE |
Part de l'Etat dans le financement de la DIRD (%) |
|
1992 |
1998 |
|
Union européenne |
41,3 |
39,1 |
France |
44,8 |
39,1 |
Allemagne |
36,3 |
35,2 |
Royaume-Uni |
37,6 |
35,9 |
Etats-Unis |
41,7 |
33,8 |
Japon |
23,8 |
26,2 |
OCDE |
38,5 |
34,5 |
*
Données 1997
Source : OCDE, traitement MEN-DPD C3
b) Des dépenses militaires dont l'importance a fortement diminué
La proportion de notre DIRD militaire nous distingue de l'Allemagne et du Japon, bien qu'elle ait baissé davantage chez nous qu'aux Etats-Unis ou dans le Royaume-Uni, pays dans lesquels, elle joue aujourd'hui un rôle plus important 11( * ) .
L'orientation civile/militaire de la R&D
Pays de l'OCDE |
DIRD miliaire/DIRD (%) |
|
1992 |
1998 |
|
France |
16,8 |
10,1 |
Allemagne |
4,1 |
2,2 |
Royaume-Uni |
16,3 |
14,8 |
USA |
21,9 |
16,1 |
Japon |
2,2 |
ns |
Source : OCDE, traitement MEN-DPD C3
A ce recul, davantage accentué, correspond une plus forte
régression de la part de la DIRD des entreprises françaises
financées par des crédits publics.
Le rôle de l'Etat dans le financement de la R&D des entreprises
Pays de l'OCDE |
DIRDE/DIRD (%) |
DIRDE*
financée par
|
|
1998 |
1992 |
1998 |
|
France |
62,0 |
16,5 |
9,0 |
Allemagne |
67,8 |
10,1 |
8,7 |
Italie |
53,7 |
11,5 |
13,3 |
Royaume-Uni |
65,8 |
13,8 |
11,6 |
Etats-Unis |
74,6 |
20,8 |
13,1 |
Japon |
71,2 |
1,2 |
2,2 |
Source : OCDE, traitement MEN-DPD C3
La recherche des entreprises n'est donc pas particulièrement
subventionnée en France tandis que celle des administrations l'est
davantage aux Etats-Unis (95 % contre moins de 90 %).
2. Concernant l'organisation de la recherche
a) La place des universités
La place
des universités dans la recherche est moins éminente en France
que dans les pays anglo-saxons.
Il est difficile d'évaluer avec précision l'ensemble des
moyens
dont dispose la recherche universitaire française.
Ceux qui sont recensés dans le BCRD (cf. tableau de la page 9)
apparaissent sensiblement inférieur aux ressources allouées aux
organismes de recherche (480 M € contre 5 659 M€).
Mais, du fait qu'ils se trouvent noyés dans la masse des crédits
de l'enseignement supérieur, il est possible que leur estimation souffre
de certaines omissions ou imprécisions, notamment en ce qui concerne les
dépenses relatives aux ITA (ingénieurs, techniciens,
administratifs) ou aux locaux (en raison du caractère très global
du projet Universités du troisième millénaire).
L'intégration de l'ancien agrégat « recherche
universitaire » dans celui regroupant l'ensemble des moyens de
l'enseignement supérieur rend la tâche plus malaisée encore.
Il conviendrait, en outre, de tenir compte d'un côté de ce que
beaucoup de soi-disant enseignants chercheurs n'effectuent, en
réalité, aucun travail de recherche, mais qu'à l'inverse,
les universités bénéficient de concours du CNRS ( dans le
cadre de contrats quadriennaux qui concernent plus d'un millier d'unités
mixtes ou associées).
Enfin, les ressources de la recherche universitaire comprennent des subventions
des collectivités territoriales (prévues, notamment par les
contrats de plan État-région) ainsi que des contributions des
entreprises au financement de travaux conjoints.
Le budget de l'enseignement supérieur a plus que doublé en France
depuis 10 ans mais dans quelle mesure cela a-t-il
bénéficié aux activités de recherche ?
Une nette amélioration des taux d'encadrement des étudiants
notamment en personnel administratif et technique, a, en outre,
été enregistrée depuis 1995, avec un décalage
cependant par rapport à l'évolution des effectifs qui tendent
à diminuer.
Toutefois, il ne s'agit que d'une simple correction qui n'a pas suffi à
empêcher la position relative de la France de demeurer médiocre
(avec un enseignant chercheur pour 18 ou 19 étudiants contre 13 à
15 au Japon, en Allemagne ou aux Etats-Unis).
Certes, un effort très important en faveur de la recherche universitaire
est poursuivi par les pouvoirs publics avec :
- 1000 créations d'emplois d'enseignants prévus en 2002
- une hausse conséquente, la même année, des
investissements et des dotations en soutien de base.
Mais ces moyens, selon notre comité d'évaluation des politiques
publiques, apparaissent mal gérés et évalués :
l'ajustement aux évolutions démographiques laisse à
désirer, la connaissance, le contrôle et la répartition des
emplois sont jugés déficients par la Cour des Comptes. Les
présidents d'universités ne sont pas à même, comme
aux Etats-Unis, de mener une véritable politique de
recrutement
12(
*
)
et le déroulement des
carrières des enseignants chercheurs ne facilite pas toujours
l'excellence.
Malgré les efforts accomplis et quelle que soit l'imprécision de
leur estimation, les ressources de la recherche universitaire française
apparaissent sans commune mesure avec celles dont dispose son homologue
américaine.
Cette dernière bénéficie, en effet :
- de droits d'inscription élevés et des dons de riches anciens
élèves reconnaissants ;
- de divers concours de la part des entreprises (recherches parrainées
ou menées conjointement, apports en capital...) ;
- enfin, de financements fédéraux (subventions et contrats) et
d'importants revenus de licences.
Le constat qui peut être effectué au sujet des
performances
de la recherche universitaire française aboutit
à des conclusions analogues à celles qui viennent d'être
présentées concernant ses moyens : difficulté
d'appréciation, progrès sensible, infériorité par
rapport aux pays anglo-saxons.
Il existe sur divers campus, d'excellents laboratoires universitaires, le plus
souvent associés au CNRS (aéronomie à Jussieu, physique
à Orsay).
L'université française souffre cependant de la concurrence des
grandes écoles, autre originalité de notre pays, qui
écrèment une grande partie des meilleurs élèves du
secondaire, pour en faire davantage des ingénieurs que des chercheurs.
Par ailleurs, les liens universités-entreprises sont encore
insuffisamment développés en France. L'esprit d'entreprise ne
fait pas partie, comme aux Etats-Unis, de la culture universitaire.
Or, le nombre de CIFRE (Conventions industrielles de formation en entreprise
par la recherche), même s'il a dépassé, en 2000, le seuil
de 700, reste faible, en comparaison de celui des doctorants qui excède
les 10 000.
En outre, les universitaires ne représentent qu'un peu plus de la
moitié de ce total (56,3 %), la proportion d'ingénieurs
demeurant donc importante.
Par ailleurs, le retard de parution du décret de la loi sur l'innovation
et la recherche concernant les SAIC (services d'activités industrielles
et commerciales), toujours non publié à ce jour, n'a
évidemment pas contribué à améliorer la
valorisation des travaux de recherche de nos universités.
Or, les performances des pays anglo-saxons sont, sur ce point, bien
supérieurs aux nôtres :
- aux Etats-Unis, où grâce à des dispositions très
efficaces
13(
*
)
, les résultats des
universités, en matière de transferts de technologie, sont dix
fois supérieurs à ceux des laboratoires
fédéraux ;
- en Grande-Bretagne, où peuvent être citées en exemple les
universités d'Oxford (100 brevets et 10 créations
d'entreprise ces deux dernières années) ou de Leeds, Sheffield et
York qui, ensemble, ont encaissé, ces dix-huit derniers mois,
2 millions de livres sterlings de revenus de licences et ont
été à l'origine de la naissance de
8 sociétés.
Plus généralement, une étude de l'OCDE
14(
*
)
datant de 1999 (mais qui se référe
hélas à des données de 1991) aboutit aux conclusions
suivantes, en ce qui concerne le bilan comparatif de notre système
d'enseignement supérieur ;
- performances moyennes en terme de coût-efficacité sans prise en
compte des activités de recherche (les critères retenus,
étant les ressources consacrées à l'enseignement
supérieur, le taux d'accès et les résultats en terme
d'obtention d'un diplôme et d'un emploi sur le marché du
travail) ;
- détérioration sensible de nos résultats lorsqu'entrent
en considération des mesures quantitatives ou qualitatives des
activités de recherche (nombre de publications, dépenses,
situation des diplômés sur le marché du travail...).
Le meilleur moyen pour les universités françaises de mener des
travaux de recherche de qualité demeure l'association avec le CNRS ou
d'autres organismes publics.
b) Le rôle du CNRS
Créé en 1939 pour remédier aux
déficiences de la recherche universitaire, le CNRS constitue un
organisme unique en son genre par le fait qu'il couvre, par ses propres moyens,
la plupart des disciplines scientifiques et de leurs applications.
La coexistence, dans le domaine des sciences et techniques, d'activités
publiques menées par les universités, d'une part, et par des
organismes entièrement dédiés à la recherche,
d'autre part, n'est pas en revanche, propre à la France.
D'autres pays sont dotés, d'autre part, d'institutions
généralistes comme la National Science Foundation (NSF)
américaine ou pluridisciplinaires comme la société Max
Planck allemande.
Mais il s'agit alors :
- soit d'agences dites de moyens (expression malheureuse dans la mesure
où elle ne disposent justement pas d'instruments de recherche qui leur
soient propres) qui distribuent des aides en fonction de certaines orientations
et procèdent à des évaluations (cas de la NSF, aux
très vastes compétences
15(
*
)
ou
des Research Councils spécialisés britanniques, de la Science and
Technology Agency japonaise) ;
- soit d'établissements intervenant dans des domaines qui, bien que
parfois assez larges, demeurent tout de même limités (sciences
naturelles, biologiques et humaines pour la société Max Planck,
agences thématiques américaines comme le National Institute of
Health ou le Departement of Energy, etc.).
En Allemagne, existent aussi des instances pluridisciplinaires de coordination
des recherches (union des académies allemandes de la science,
communauté des sciences Gottfried Wilhehm Leibniz etc.)
Avec son budget de 13,4 milliards de francs, ses
20.000 employés (10.237 chercheurs permanents et
9.798 ITA en 2000) et ses 136 unités propres de recherche
répartis dans toutes les disciplines, le CNRS est un poids lourd
champion toute catégorie par ses dimensions.
c) Le statut des chercheurs
La
proportion, dans la recherche française, de chercheurs à temps
complet et à vie, bénéficiant d'un statut proche de celui
de la fonction publique constitue une dernière exception
française.
Ce « modèle français » a été
institué par la loi d'orientation et de programmation du 15 juillet
1982 pour la recherche et le développement technologique de la France
(L.O.P.).
Concernant la condition des chercheurs, la LOP avait cherché à ce
qu'elle :
- constitue une sorte de consécration du rôle social
éminent des intéressés (garantie de carrière) ;
- tienne compte des singularités de la recherche, notamment de la
diversité de ses métiers (y compris la formation, l'information,
la valorisation et l'administration...), des nécessités de
favoriser la mobilité (qui devait être favorisée par des
dispositions statutaires communes) et de déroger, sur certains points
(recrutement sur titre, évaluation par les pairs...) aux règles
de la fonction publique.
Par comparaison, les pays anglo-saxons ont beaucoup plus largement recours
à des personnels sous contrat.
Les post-doctorants, notamment, jouent un rôle important dans la
recherche universitaire américaine et britannique.
Ils y occupent souvent des fonctions pendant une durée
déterminée, inférieure ou égale à une
dizaine d'années, dans l'attente d'une situation stable.
Plus de la moitié d'entre eux, aux Etats-Unis, devront trouver un emploi
dans le secteur privé, en faisant valoir leurs états de services
universitaires antérieurs que les entreprises sauront, davantage qu'en
France, apprécier à leur juste valeur.
Pour obtenir, dans une université américaine, un poste (tenure)
d'enseignant chercheur à vie (« Full professor »)
vers 40 ans, il faut d'abord avoir fait ses preuves, sous contrat, en tant
qu' « associate professor ».
Comme l'a observé la Cour des comptes, les organismes publics de
recherche français ont, eux aussi, recours à des personnels
contractuels (vacataires, boursiers, contrats emploi-solidarité ou
à durée déterminée), mais dans une proportion
très limitée, si ce n'est à l'INRIA.
B. DES FAIBLESSES PERSISTANTES MALGRÉ CERTAINS PROGRÈS
1. Des insuffisances endémiques
Souvent
liées aux singularités qui viennent d'être décrites,
les faiblesses de la recherche française concernent principalement :
- la mobilité de ses personnels
- son pilotage
- son évaluation
- la valorisation de ses travaux.
a) Le manque de mobilité
La
mobilité des chercheurs demeure insuffisante à tout point de
vue :
- entre secteurs public et privé
- au sein de la recherche publique entre :
- enseignement supérieur et organismes de recherche,
- recherche et métiers associés (formation, administration,
communication...),
- et différentes disciplines.
Cette déficience résulte, en partie, de problèmes
culturels (absence d'esprit d'entreprise et de goût du risque,
corporatisme qui freine l'accueil de chercheurs dans les établissements
d'enseignement supérieur...)
Elle constitue un échec de la loi de 1982.
Elle freine les redéploiements thématiques nécessaires et
l'interdisciplinarité ainsi que la reconversion, lorsqu'elle s'impose,
des chercheurs dont les facultés créatrices commencent à
décliner, vers des métiers associés à la recherche
(tâches administratives, enseignement, expertise, diffusion de la culture
scientifique, etc.)
Dans son dernier rapport public, la Cour des comptes observe que la
mobilité des chercheurs est particulièrement faible dans les EPST
(à l'exception de l'INRIA qui a su profiter du dynamisme du secteur des
STIC pour faciliter les départs vers l'entreprise ou l'enseignement
supérieur).
Le ministère de l'Education nationale, de la recherche et de la
technologie admet, en réponse, que « le statut adopté
en 1983 n'a pas eu d'effet positif sur la mobilité des personnels, ni en
ce qui concerne la mobilité inter-établissement, ni en ce qui
concerne la mobilité vers l'industrie. »
De fait, le taux d'accueil de chercheurs extérieurs n'a
été, en 2000, que de 0,16 pour le CNRS, 0,57 à l'INRA,
0,15 à l'INSERM, selon l'une des réponses au questionnaire
budgétaire de votre rapporteur.
Aux Etats-Unis, la mobilité de la recherche est assurée par le
renouvellement des « post-docs ».
Ces derniers sont affectés à plein temps mais, pour une
durée déterminée, à des travaux dans les
disciplines émergentes, encouragés par la NSF. Ces investigations
peuvent, lorsqu'elles motivent suffisamment les enseignants, les conduire
à demander un congé pour s'y consacrer pleinement pendant un
certain temps.
b) Les problèmes de « gouvernance » de la recherche
En
réaction aux cloisonnements excessifs entre différentes
catégories d'acteurs de la recherche et au morcellement des institutions
publiques concernées, le Gouvernement a multiplié les structures
de coordination et les modes de coopération :
- actions concertées incitatives (ACI)
- réseaux nationaux de recherche dans différents domaines
(télécommunications, santé, etc...)
- programmes de recherche interdisciplinaires (transports terrestres,
composants...)
- GIS (groupement d'intérêt scientifique) comme l'institut de
la longévité qui vient d'être créé ;
- IFR (instituts fédératifs de recherche)
- CNRT (centres nationaux de recherche technologique) pour coordonner les
efforts publics et privés de recherche par exemple sur les piles
à combustible (Belfort), le génome humain (Evry) ou les
micro-nanotechnologies (Grenoble).
Le FNS et le FRT sont également utilisés pour la promotion
d'actions nouvelles ou à caractère pluridisciplinaire.
Le dispositif de valorisation de la recherche (transferts de technologie,
développement de l'innovation, aides à la création) est
tout aussi foisonnant.
Ces créations qui correspondent à de louables intentions n'ont
fait que généraliser le phénomène
« d'empilement des structures » dénoncé par
le Cour des comptes, dans le domaine biomédical.
Elles ont aggravé la complexité et le manque de lisibilité
de notre système de recherche et rendu plus difficile encore son
évaluation.
Le foisonnement des organismes de recherche n'est certes pas propre à la
France.
Il existe
- en Allemagne plus de 800 institutions subventionnées par
l'État dont 30 centres Max Planck, 300 fondations etc...
- au Japon 565 universités, 15 instituts nationaux de
recherche technologique.
Mais la coordination de l'ensemble des intervenants, y compris au niveau
gouvernemental, semble généralement plus simple et plus claire
à l'étranger qu'en France.
On y distingue généralement :
- des organismes consultatifs chargés d'éclairer les choix
du Gouvernement :
Office for Science and Technology Policy (OSTP aux Etats-Unis
Office of Science and Technology (OST) en Grande-Bretagne,
Wissenschaftsrat (WR) en Allemagne,
« Science Council of Japan » et « Council
for Science and Technology» au Japon
- des agences de « moyens », déjà
évoquées, qui coordonnent les financements : NSF aux Etats-Unis,
Research Councils spécialisés britannique, Deutsche
Forschungsgemeinschaft (DFG) et Fraunhofer Gesellschaft (FHG)
allemands
16(
*
)
, Science and Technology Agency
japonaise
17(
*
)
,
- des agences « thématiques » travaillant dans
les différentes disciplines, aux côtés des
universités, sans qu'un organisme équivalent au CNRS vienne
compliquer la donne.
Certes, le système germanique est lui aussi complexe, du fait de la
structure fédérale de l'État allemand et le FNS et le FRT
français jouent un peu, sans le dire, le rôle d'une agence
gouvernementale de moyens mais la répartition des rôles à
l'étranger paraît plus rationnelle. Il n'y a pas notamment, de
multiplication de conseils et de comités placés auprès de
l'exécutif (CSRT, CNER, Conseil national de la Science...).
Les rigidités liées au statut de chercheur fonctionnaire à
vie, les cloisonnement divers, l'existence du CNRS, l'empilement des structures
rendent très difficile le pilotage du système de recherche
français qui souffre aussi d'un déficit d'évaluation
c) Le déficit d'évaluation
Votre
rapporteur qui insiste chaque année sur ce point, ne peut que
déplorer qu'aucun progrès n'ait été
réalisé dans l'évaluation de l'ensemble de la recherche
française (pour ne pas évoquer celle des chercheurs et de chaque
organisme).
Les difficultés qu'il a éprouvés pour obtenir des
données lui permettant d'effectuer des comparaisons internationales
sont, à cet égard, révélatrices.
Les travaux de l'OST sont certes remarquables mais ils n'ont qu'un
caractère statistique.
Les indicateurs 2001 ne sont pas encore disponibles et le rapport annuel
d'évaluation du CSRT pour l'année qui s'achève n'est
toujours par paru.
L'actuel directeur de l'observatoire, précité, des sciences et
des techniques (OST), M. Barré, a déclaré, en novembre
1999, au cours d'une conférence débat sur le bilan de la loi de
1982 :
« Je suis scandalisé de cette incapacité
que nous semblons avoir à développer notre connaissance sur notre
système de recherche, ce qui limite aujourd'hui notre analyse et nos
possibilités d'action. C'est également l'un des syndromes de
notre mal ».
Votre rapporteur partage cette indignation, particulièrement en ce qui
concerne l'appréciation de l'efficacité des dépenses du
FNS et du FRT, sur laquelle le Parlement manque toujours aussi cruellement
d'éléments.
La capacité d'expertise et d'étude dont dispose notre
ministère de la recherche ne semble pas être à la hauteur
de celle des conseils, précités, qui évaluent les
recherches américaines (NSF), britannique (OST et Research Councils),
allemandes (WR) ou japonaises (Science Council et Council for Science and
Technology) pour le compte de leurs gouvernements respectifs.
d) Une valorisation décevante
« Les redevances de brevet ne sont pas à la
hauteur
de notre potentiel scientifique » : le constat a
déjà été dressé, en juillet 1998, par le
rapport Guillaume.
Ce document déplorait, en outre, une particulière faiblesse de la
France concernant les domaines industriellement les plus prometteurs
(biotechnologies et technologies de l'information).
Un rapport ultérieur du Commissariat au Plan a ensuite insisté ,
en 1999, sur l'ampleur du retard de la France par rapport aux autres pays en
matière d'appropriation de la recherche publique et la
nécessité de sensibiliser nos institutions à la
défense, étrangère à leur culture, de leurs droits
de propriété industrielle.
Il y était souhaité que soit étudiée la
possibilité de prendre en compte les effets de divulgations
antérieures tout en maintenant le système du premier
déposant.
La situation ne semble guère, malheureusement, s'être
améliorée sur le plan global.
Un récent rapport de la Commission européenne nous place, en
effet, (secteurs public et privé confondus), au dernier rang des quinze
pays de la communauté en ce qui concerne le pourcentage de croissance
annuel de nos dépôts de brevets européens et
américains.
Il s'agit, en outre, d'un point faible de l'Europe dans son ensemble par
rapport aux Etats-Unis et au Japon.
Le succès américain résulte de la mise en place,
dès 1980, d'un cadre législatif et opérationnel
particulièrement attractif pour les universités et les PMI.
Le Bayh-Dole University and Small Businesse Patent Procedure Act de 1980 leur a
accordé, en effet, lorsque leur recherche était cofinancée
par des fonds fédéraux, la propriété intellectuelle
de leurs découvertes et a donné aux universités le droit
de les transférer sur la base de licences exclusives.
Fonctionnant de façon totalement indépendantes, des offices of
Technology Licencing (OTL) constituent des interfaces et des médiateurs
institutionnels au sein des universités et des laboratoires
fédéraux, vis-à-vis des investisseurs privés.
L'activité de transfert de technologies des universités est dix
fois plus importante que celle des laboratoires fédéraux.
La législation applicable à ces derniers
18(
*
)
a été moins incitatrice et le
caractère majoritairement non exclusif des licences qu'ils accordent
paraît inadapté aux impératifs stratégiques et
technologiques des industriels.
Au contraire, les universités cherchent à obtenir des concessions
d'exclusivité (option agreement) ou à échanger, dans le
cadre de leur politique d'essaimage, un apport de brevet contre une
participation dans la startup qui en est issue (Equity Policy).
Au total, près de 75 % des brevets pris par l'industrie
américaine sont liés aux recherches publiques. Le fait que les
performances des universités (dont les travaux sont plus
académiques) soient nettement meilleurs que celles des agences
fédérales (aux activités plus finalisées) prouve
que la recherche fondamentale ne pâtit pas du dynamisme des transferts de
technologie.
Sans doute la loi sur l'innovation et la recherche a-t-elle voulu s'inspirer de
cette réussite américaine. Mais on ne peut, encore une fois, que
déplorer à ce sujet le retard de publication de son décret
d'application sur les SAIC.
Cette loi a eu néanmoins des effets incontestablement positifs.
2. Des progrès en matière d'incitation à la création d'entreprises innovantes
Concernant les créations d'entreprises par les
chercheurs,
elles auraient atteint, selon le ministère, la centaine en 2000, contre
20 seulement en moyenne pour les années précédentes,
grâce à l'application de la loi sur l'innovation et la recherche
du 12 juillet 1999.
Selon la cinquième édition du tableau de bord de l'innovation,
5.370 entreprises auraient été crées durant le second
semestre 2000 dans les secteurs technologiquement innovants, soit une quasi
stabilité par rapport au premier semestre 2000, mais une forte
progression (+ 33 %) par rapport au second semestre 1999.
De nombreux organismes publics de recherche ont créé des filiales
spécialisées dans la valorisation (FIST, au CNRS, INRIA
transfert), des incubateurs (comme Paris-Biotech) ou des fonds
d'amorçage.
Le rapport Busquin, précité, de la Commission européenne,
souvent peu flatteur à notre égard, nous place en position
honorable en ce qui concerne la croissance de 1995 à 2000 du capital
risque (nous figurons au 4
ème
rang devant l'Allemagne, le
Royaume-Uni et le Japon mais en moins bonne place en pourcentage de notre PIB
avec un taux de 0,39 millièmes contre 1,16 aux Etats-Unis,
0,99 au Japon, 0,50 en Allemagne).
II. L'ABSENCE DE RÉFORMES D'ENVERGURE
Mise
à part la promulgation de la très importante loi de juillet 1999
sur l'innovation et la recherche, aucune réforme de grande portée
n'aura marqué la législature qui s'achève.
Encore doit-on regretter, à propos de cette loi :
- la non-parution, à ce jour, du décret relatif au SAIC (vague
équivalent des offices of tehnnology licensing américains).
D'aucuns craignent que ce texte contienne des disposition peu susceptibles
d'attirer du personnel non fonctionnaire (limitation de la durée du
contrat, non adhésion aux systèmes paritaires) ;
- le caractère restrictif de certains décrets concernant les
rémunérations des fonctionnaires concernés
19(
*
)
.
Une accumulation d'initiatives, telles celles déjà
évoquées multipliant les structures de conseil de concertation de
coopération et de financement, notamment dans le domaine des sciences du
vivant où nous accusons un retard important, ne constitue pas de vraies
réformes.
Pas plus que la modification a minima de l'organisation et du fonctionnement du
CNRS réalisée à l'automne dernier.
Certes, il existe des raisons de s'abstenir de réformer, mais celles qui
plaident, en sens inverse, pour de profonds changements, l'emportent
largement.
A. LES CAUSES POSSIBLES DU REGRETTABLE MANQUE D'AMBITION CONSTATÉ
1. Le bilan global mitigé de la recherche française
Le bilan de la recherche française est mitigé. Elle ne mérite, ni l'excès d'honneur, ni l'excès d'indignité qui lui sont parfois accordés. Dans ces conditions, certains peuvent considérer que le verre est plutôt à moitié plein qu'à moitié vide et s'abstenir de remettre en cause le système.
a) En terme d'efforts quantitatifs
Les développement qui précèdent montrent que la France, certes largement distancée par les Etats-Unis, le Japon et l'Allemagne pour la ratio DIRD/PIB devance, à cet égard, le Royaume Uni. Elle se place devant l'Allemagne aussi pour la proportion de chercheurs dans la population active.
b) En terme de résultats.
Le
tableau suivant, extrait du dernier rapport de l'OST montre, par ailleurs que
nos résultats en matière de brevets, qui constituent pourtant
notre principal point faible, sont néanmoins meilleurs que ceux de la
Grande-Bretagne.
Ces données ne datent cependant,
hélas, que de 19997. Elle ne permettent donc pas d'apprécier
l'évolution qui s'est produite durant l'actuelle législature.
Si le rapport Busquin précédé de la commission
européenne témoigne, on l'a vu, de performances françaises
très médiocres en termes de progression de dépôts de
brevets de 1995 à 2000, il nous situe, en revanche, à un rang
honorable en ce qui concerne le nombre de publications scientifiques par
million d'habitants (derrière la Grande-Bretagne mais, pratiquement
à égalité avec l'Allemagne, devant les Etats-Unis et le
Japon).
Malheureusement, notre situation est nettement moins favorable en ce qui
concerne l'impact de ces travaux mesuré par la fréquence des
citations dans les revues scientifiques où nous sommes au niveau du
Portugal derrière non seulement la Grande-Bretagne, l'Allemagne et les
Etats-Unis mais aussi l'Italie !
Votre rapporteur considère donc, pour sa pat, que le verre est
plutôt à moitié vide qu'à moitié
plein !
2. Les obstacles politiques
Réformer, en France (depuis l'ancien
régime !),
est toujours une tâche difficile.
La communauté scientifique française, dévouée et
compétente, est dans son ensemble attachée au modèle
français.
Très sensible, elle craint une remise en cause de la liberté du
chercheur et de la recherche fondamentale par un volontarisme excessif en
matière de valorisation.
L'esprit d'entreprise ne fait pas partie des valeurs inculquées en
priorité à nos scientifiques, par ailleurs peu enclins à
une mobilité, il est vrai trop peu encouragée.
L'édulcoration, par M. Claude Allègre, de son projet initial de
réforme du CNRS, témoigne de la difficulté de modifier les
structures de la recherche française.
Or, braquer les chercheurs s'avère, naturellement, contre productif.
Les problèmes, déjà évoqués, de gouvernance
de la recherche, l'implication de ministères et d'autres structures fort
nombreux, chacun attaché à sa survie et au maintien de ses
prérogatives, constituent d'autres obstacles.
Il faut une volonté politique très forte, au sommet de
l'exécutif, pour réformer en profondeur -comme il convient -
notre système de recherche, celle-ci fait actuellement
défaut !
B. UNE NÉCESSITÉ ABSOLUE
En
réalité de vraies réformes paraissent indispensable pour
des raisons :
- de compétitivité (c.f. chapitre III), le rapport
coût-efficacité de notre recherche paraissant, comparativement,
insuffisant tandis que nos concurrents accentuent leur effort ;
- d'opportunités qui ne se renouvelleront pas.
1. Des opportunités à saisir
a) Un choc démographique de grande ampleur.
40 % de
la population scientifique devra être renouvelée d'ici à
2010 avec un maximum de départs à la retraite à partir de
2002.
Il y a là une opportunité unique non seulement de
redéploiements thématiques et de dynamisation de la recherche,
mais aussi de renouvellement des modalités de recrutement et de
déroulement de carrières des chercheurs.
Votre rapporteur approuve les mesures prévues par le plan
décennal de l'emploi scientifique en ce qui concerne l'anticipation des
départs qui permet de lisser les recrutements et d'offrir dès
maintenant un débouché aux jeunes chercheurs.
Mais il juge ce plan nécessaire mais pas suffisant car il ne
s'accompagne pas d'une réflexion sur le statut du chercheur en France.
b) Une nouvelle loi organique relative aux lois de finances
Une autre occasion de repenser le système de recherche français est offerte par l'entrée en vigueur de la nouvelle loi organique relative aux lois de finances du 14 août 2001. Celle-ci doit conduire, en effet, à présenter l'effort budgétaire de recherche sous forme de missions et de programmes (ensembles cohérents d'actions), auxquels doivent être associés des objectifs précis et des indicateurs de résultats en permettant l'évaluation.
2. Des améliorations nécessaires
Les
opportunités qui viennent d'être présentées doivent
absolument être saisies pour améliorer, quantitativement et
qualitativement (les deux sont indissociables), nos activités de
recherche.
Il semble en effet impossible de se contenter de nos résultats actuels,
tels que ce rapport les a décrits, alors surtout que nos concurrents
risquent d'accentuer encore l'écart qu'ils ont creusé entre eux
et nous.
C. LES AXES DE CHANGEMENT SOUHAITABLES
Sans
proposer de faire table rase du passé, ni prétendre
détenir la vérité à aucun point de vue, votre
rapporteur juge indispensable de mener une réflexion avec tous les
acteurs concernés, sur les trois thèmes suivants :
- le statut des chercheurs ;
- la « gouvernance » de la recherche et la
répartition des tâches entre ses principales composantes ;
- son évolution.
1. Réexaminer le statut des chercheurs
a) L'échec de la loi de 1982
Le 4
novembre 1999, a eu lieu une conférence débat sur le bilan du
« modèle français » institué par la
loi d'orientation et de programmation du 15 juillet 1982 pour la recherche et
le développement technologique de la France (LOP).
Y participait notamment le directeur de l'OST, M. Rémi Barré,
récemment entendu par votre commission dans le cadre des travaux du
comité d'évaluation des politiques publiques sur la politique de
recrutement et la gestion des enseignants-chercheurs et des chercheurs.
Ont été rappelés à l'occasion de cette
réunion :
- les ambitions initiales de la LOP : priorité à la
recherche (
publique et privée
) pour sortir de la crise ;
- ses excellentes intentions, toujours actuelles : réponse à
la demande sociale, rajeunissement des équipes, mobilité (entre
les différents métiers de la recherche, les organismes, avec les
entreprises...) ;
- mais aussi ses lacunes et ses échecs : absence de prise en compte
de la recherche universitaire, d'implication des entreprises dans la formation
à et par la recherche, de progrès dans la mobilité, de
programmation budgétaire réelle, etc...
Imputant à une défaillance des acteurs et à un
problème de gouvernance les déceptions causées par
l'application de la loi, M. Barré :
- constatait son incapacité à permettre à la recherche
française de s'adapter de façon satisfaisante à
l'évolution de son environnement (marquée par l'avènement
d'une société de la connaissance plus exigeante vis-à-vis
des activités concernées et qui tend à les
contractualiser, à les banaliser, à promouvoir
l'interdisciplinarité) ;
- s'interrogeait sur le point de savoir s'il convient de refonder le
système français ou d'en bâtir un nouveau de type
anglo-saxon (tout mélange entre les deux étant à ses yeux
voué à l'échec).
Le statut des chercheurs de 1982 a offert la garantie à vie de l'emploi
en récompense aux chercheurs pour leur rôle social éminent
et a été rapproché, tout en tenant compte des
singularités de la recherche, de celui de la fonction publique, pour
favoriser la mobilité.
Or :
- l'immersion de la recherche dans une société de la connaissance
crée un nouveau contexte dans lequel cette activité s'apparente
moins à une sorte de sacerdoce faisant du chercheur « le
dépositaire d'une mission exigeant des conditions spécifiques de
travail et de statut » (cf. M. Barré).
- n'y a-t-il pas contradiction (M. Barré
ibid
) entre la place
limitée des contractuels dans la recherche publique et la
généralisation du contrat dans le monde (y compris dans les
programmes européens ou pour tout ce qui touche aux transferts ou
à la valorisation...) ?
b) Aller au-delà du défi du nombre
L'effort
d'anticipation dont témoignent les créations d'emplois depuis
2001 et le plan décennal de gestion prévisionnelle de l'emploi
scientifique présenté le 24 octobre, est louable.
Mais selon la très bonne expression de notre collègue Yves
Fréville
20(
*
)
, il est nécessaire
d'aller au-delà du défi du nombre.
Comment améliorer la mobilité des chercheurs ? Faut-il
placer tous les jeunes recrutés aujourd'hui par les organismes publics
sous le statut actuel de chercheur à vie et à temps complet ?
Le plan
décennal de l'emploi scientifique
prévoit un réexamen
dans trois ans de ses priorités scientifiques. Il se fixe, entre autres,
pour objectif de soutenir à long terme les disciplines émergentes
et de dégager une capacité de réaction suffisante face aux
évolutions de la science.
20 % des postes libérés par les départs à la
retraite seront dédiés aux redéploiements
interdisciplinaires de 2001 à 2010.
Mais les rigidités et les cloisonnements actuels, ne risquent-ils par de
réapparaître ensuite du fait du maintien du statut actuel de
chercheur « à vie » et de l'insuffisance des mesures
prévues pour accroître la mobilité des personnels de
recherche ?
Il est seulement question, en effet, dans ce plan d'augmenter les
capacités d'accueil réciproques concernant les échanges
entre universités et organismes de recherche. Mais ces
possibilités seront-elles pleinement utilisées ?
Il est à craindre que les mêmes causes produisent les mêmes
effets.
Est-il certain que les jeunes post-doctorants qui vont être
recrutés aspirent à une carrière de chercheur à vie
ou en soient nécessairement dignes ?
La quasi obligation de les titulariser ne freine-t-elle pas leur embauche ?
Selon la correspondante en France de la revue Nature
21(
*
)
il n'y a pas de politique post-doctorale dans notre
pays. L'absence d'étape intermédiaire entre le doctorat et
l'entrée dans la fonction publique décourage l'emploi des jeunes
diplômés et rigidifie notre système (chaque organisme a
tendance à fixer ses propres critères de recrutement en
perspective d'une intégration définitive, ce qui entrave toute
mobilité)
Ce manque de souplesse, selon la même personne, conduit certains
organismes a créer de facto leur propre programme post-doctoral qui
comporte une période d'essai préalable à l'embauche
(c.f ; Instituts Pasteur et Curie et programme Avenir de l'INSERM).
Ne convient-il pas dans ces conditions de réfléchir
à :
- des
critères de recrutement qui ne soient plus seulement académiques
mais fassent appel à des aptitudes qui peuvent être
appréciées dans le cadre d'activités autres que la
recherche (goût de la communication, esprit d'entreprise), en cas de
reconversion ultérieure vers d'autres métiers ?
- développer des passerelles vers l'enseignement et le privé en
concertation avec les universités et les entreprises, moyennant des
incitations fortes et spécifiques ?
- prévoir des contrats à durée déterminée
correspondant soit à des options de carrière courte soit à
une mise à l'essai des intéressés (en s'efforçant
de leur trouver un autre emploi s'ils ne sont pas titularisés) ?
- créer une obligation de mobilité (comme il en existe chez les
administrateurs civils) en cas d'intégration dans la fonction
publique ?
Ces éventuels changements n'affecteraient que les nouveaux chercheurs.
Rien ne serait changé au statut de ceux actuellement en fonction.
De même, il est envisagé actuellement au Japon, sans modifier le
statut des personnels fonctionnaires actuels, d'effectuer certaines nouvelles
embauches sur contrat à durée déterminée, dans le
cadre de projets précis. Plus de 30.000 chercheurs travaillent en
Grande-Bretagne sous ce régime.
2. Améliorer le pilotage de la recherche française et la répartition des tâches entre ses différentes composantes
a) La mise en oeuvre de la politique de la recherche au sein du gouvernement.
Il semble souhaitable à votre rapporteur :
- de
placer sous l'autorité d'un même ministre l'enseignement
supérieur et la recherche,
- éventuellement de créer auprès de lui , ou du Premier
ministre, une administration de mission, sur le modèle de la DATAR,
chargée de coordonner les différentes actions gouvernementales en
matière de recherche ;
- de séparer la fonction de conseil (aide à la décision)
de celles d'évaluation (suivi de son exécution), chacune
étant assurée par une seule structure ;
- d'envisager de regrouper le FNS et le FNRT au sein d'une agence
gouvernementale de moyens, transparente, dont l'efficacité des
interventions serait rigoureusement évaluée.
Par ailleurs, une synergie accrue avec les activités civiles, dans le
cadre des recherches dites « « duales », devrait
venir atténuer les effets de la baisse des crédits militaires,
qui paraît regrettable, notamment dans le domaine spatial.
Or le protocole de coopération signé en janvier dernier par les
ministères de la Défense et de la Recherche n'a donné,
pour le moment, aucun résultat
22(
*
)
.
- Enfin, l'amélioration de la gouvernance de la recherche
française passe, pour votre rapporteur, par une programmation des
très grands équipements (TGE) d'infrastructures qu'il a
réclamée, sans effet pour le moment, dans le rapport de
l'OPECST
23(
*
)
qu'il a rédigé avec
son collègue député Christian Cuvilliez.
b) La répartition des tâches entre les différents acteurs
Il
importe de simplifier les structures de coordination et de valorisation de la
recherche.
La recherche de solutions tendant à simplifier notre système
pour en améliorer l'efficacité, oblige à s'interroger sur
la répartition des rôles entre le CNRS et, d'une part les
universités, d'autre part les organismes spécialisés.
Il paraît difficile de transformer le CNRS en agence de moyens, en le
cantonnant à la promotion de l'interdisciplinarité scientifique,
car on voit mal à qui transférer ses plus grosses unités
comme l'IN2P3 (physique nucléaire et corpusculaire) ou le
département des sciences physiques et mathématiques.
Faut-il, pour renforcer le potentiel de la recherche des universités,
placer certains de ses laboratoires, mixtes ou associés, sous
l'autorité de ces dernières ?
Cela supposerait de les doter par ailleurs d'une réelle autonomie et de
créer entre elles (notamment en matière de recrutements),
à la fois une émulation et des coopérations
24(
*
)
permettant l'émergence de pôles
d'excellence, de façon à éviter une dispersion de moyens.
Leur « standing » se rapprocherait ainsi celui des grandes
écoles.
Comment s'assurer par ailleurs que les activités, par exemple, des
départements des sciences de la vie ou des sciences de l'information et
de la communication du Centre national sont bien coordonnées avec celles
de l'INSERM et de l'INRIA et n'entraînent pas un gaspillage de deniers
publics ?
Concernant la valorisation, le système actuel, très foisonnant,
distingue des structures dites d'interface (qui ne jouent qu'un rôle
d'orientation et de conseil), de structures dites
« prestataires ».
Le rapport Guillaume précité de 1998 avait pourtant conclu que
« le dispositif de transfert et de diffusion de la technologie est
trop complexe » et prônait sa restructuration autour d'un
Centre national de la recherche technologique (inspiré du Fraunhoffer
allemand).
Mais rien n'a été simplifié, sous prétexte de
travailler « en réseau » et « près
du terrain ».
Dans le domaine des sciences de la vie, où les distinctions entre
recherche fondamentale, appliquée et technologique sont peu
marquées, les circuits de valorisation gagneraient à être
raccourcis. L'essentiel est pour les entreprises d'accéder directement
à des travaux de qualité.
Il s'agit d'un domaine où nos universités, ayant moins à
subir la concurrence des grandes écoles, sont susceptibles d'exceller
comme leurs consoeurs américaines.
Pour d'autres activités, il importe, au contraire de bien marquer la
transition entre la recherche amont et le développement, ce qui implique
de faire appel à des « technologues », qui manquent
à la France et dont l'importance n'est pas suffisamment reconnue.
3. Renforcer l'évaluation
Renforcer la capacité d'expertise et d'étude du ministère de la recherche pour éclairer ses décisions et en apprécier l'impact semble à votre rapporteur une priorité indiscutable.
a) Evaluation et conseil
Faut-il
confier à des instances différentes l'aide à la
décision et le suivi de son exécution ?
Cela semble garantir une plus grande objectivité de l'évaluation
ex pos
t mais cette distinction ne semble pas être toujours
nettement opérée à l'étranger (les conseils et les
agences de moyen font parfois les deux).
L'essentiel est que ces tâches soient effectuées par des personnes
indépendantes et compétentes.
En Grande-Bretagne, l'OST (Office of Science and Technology) conseille le
ministre responsable
25(
*
)
et gère le
budget de la recherche. Les activités de recherche sont
évaluées par les Research Councils spécialisés qui,
sauf le Medical Reseach Council
26(
*
)
,
constituent des agences de moyens distribuant des fonds publics.
Aux Etats-Unis, où il n'y a pas de ministère de la recherche,
l'Office For Science and Technology Policy (OSTP) conseille le Président
et la NSF,qui finance la recherche universitaire, accorde la plus grande
importance à l'évaluation
ex ante
et
ex post
des
programmes qu'elle soutient et à celle de ses propres activités
(il est fait appel à des experts extérieurs).
b) Contenu des évaluations
L'évaluation de l'ensemble de la politique de
recherche, aux
résultats de laquelle le Parlement doit naturellement pouvoir
accéder, doit reposer sur :
Des statistiques, suffisamment récentes, permettant des comparaisons
internationales (rassemblées en France par l'OST et le National Science
Board aux Etats-Unis) et constituant un « tableau de bord de la
recherche » (comme il en existe pour l'innovation) :
- des études interprétatives approfondies,
générales ou portant sur des domaines particuliers, à
caractère stratégique et critique.
L'analyse de l'environnement juridique et fiscal des activités de
recherche ne doit pas être négligée (problèmes de
propriété intellectuelle, d'application de la
réglementation des marchés publics, réforme du
crédit d'impôt recherche...).
Il faut parfois savoir dépenser plus pour dépenser mieux :
votre rapporteur estime que le développement de la capacité
gouvernementale d'évaluation de la recherche doit permettre d'optimiser
l'efficacité des dépenses dont elle fait l'objet.
Il souhaiterait, pour commencer, davantage de transparence budgétaire
(quel sera le coût de la résorption des emplois précaires
dans la recherche prévue par le plan décennal ? Quel est le
ratio ITA/chercheurs idéal pour les différentes
disciplines ?...).
*
* *
En
définitive, l'évolution, plutôt défavorable, du
montant des dépenses en faveur de la recherche française n'a pas
été compensée par un progrès de leur
efficacité.
Il n'y a pas eu d'amélioration des performances ni des structures de
notre recherche, si ce n'est en matière de création d'entreprises
innovantes, avec un décollage, tardif, du capital risque
français, et la loi de juillet 1999 qui, cependant, n'est toujours pas
intégralement applicable.
Par ailleurs, aucune réforme d'envergure n'a été
entreprise, malgré les recommandations des divers rapports sur la
recherche qui se sont succédé, à l'exception du plan
décennal de gestion prévisionnelle de l'emploi scientifique.
La perpétuation du statut de 1982 risque malheureusement d'en annuler,
à terme, une partie des effets en ce qui concerne la mobilité des
chercheurs.
Or, pendant ce temps, plusieurs des principaux pays de l'OCDE ont
accentué leur effort et réformé leurs structures (ou
prévu de le faire).
CHAPITRE TROIS
L'EXEMPLE QUE NOUS MONTRENT PLUSIEURS PAYS
ÉTRANGERS
I. LES ETATS-UNIS
A. DES DÉPENSES CROISSANTES TRÈS FINALISÉES
Les
Etats-Unis ont accru leur dépense intérieure de recherche et
développement (DIRD) qui est passée de 2,54 en 1996 à 2,64
de leur PIB en 1999, ainsi que le nombre de leurs chercheurs qui était
de 8,1, en 1999, au lieu de 6,2 pour mille habitants en 1981.
Après une stagnation au début des années 1990, les
investissements américains en recherche ont augmenté à
partir de 1994, principalement grâce à l'industrie qui en
financent
27(
*
)
près des deux tiers (65,1
%).
Ce n'est qu'à partir de l'apparition, en 1998, d'un excédent
budgétaire que les dépenses publiques ont, elles aussi,
recommencé à croître.
La priorité allait, au début de la dernière
décennie, à la recherche appliquée.
Le président Clinton a ensuite plaidé la cause de la recherche
fondamentale qui a fini par bénéficier d'un consensus dans la
classe politique américaine.
C'est donc elle qui a été privilégiée par le repli
des dépenses militaires qui ne représentent plus aujourd'hui que
50 % des crédits fédéraux de recherche contre les deux
tiers il y a dix ans, mais vont être à nouveau choyées par
le président Bush.
Les sciences biomédicales, et plus particulièrement le NIH
(National Institute of Health), devenus la plus importante agence
Fédérale américaine, ont plus particulièrement
profité de cet engouement pour les travaux académiques.
Néanmoins la part de la recherche fondamentale n'et que de 17 % de la R
& D totale américaine.
Ainsi, les dépenses américaines de recherche se
répartissent en 61,8 % pour le développement, 22,6 % pour la
recherche appliquée et 15,6 %, seulement, pour la recherche fondamentale.
En 1998, l'industrie a accru ses dépenses de recherche de 7,7 % et le
budget fédéral pour la recherche fondamentale a pour sa part
augmenté également de plus de 7 % en 1999 (on est loin des taux
français !).
Selon les dernières données de la NSF, les entreprises
industrielles américaines auraient accru leurs investissements de 10,8 %
en 2000 et, malgré la récession de 8,1 % en 2001.
B. UNE VALORISATION REMARQUABLE
Durant
la dernière décennie, les Etats-Unis ont notablement
renforcé leur potentiel scientifique et technologique et pris une nette
avance sur l'Europe dans les technologies de l'information et les
biotechnologies.
Leur remarquable système de transfert de technologies,
déjà présenté dans ce rapport, a été
mis en place dès 1980 et s'est avéré
particulièrement efficace (davantage cependant pour les
universités que pour les laboratoires fédéraux
28(
*
)
).
Ils encouragent l'innovation et le progrès technologique dans les
petites entreprises
29(
*
)
ainsi que la
coopération technologique entre les agences gouvernementales et le
secteur privé.
30(
*
)
D'après le document précité de la commission
européenne (rapport Busquin), les Etats-Unis sont proportionnellement
à leur population, leaders pour le capital risque (en millième de
PIB) et les dépôts de brevets sur leur propre marché (par
million d'habitants), mais ne brillent pas particulièrement dans la
recherche académique (nombre de publications et de citations). Mais
leurs performances y sont néanmoins globalement supérieures, dans
l'absolu, à celles de l'Union européenne considérée
dans son ensemble.
II. LA GRANDE-BRETAGNE
A. DES RÉSULTATS BRILLANTS SUR LE PLAN ACADÉMIQUE
1. Un rapport coût-efficacité élevé
Avec une
DIRD qui ne représentait plus que 1,87 % de leur PIB en 1999 contre 2,08
en 1999 et une proportion de chercheurs de moins de 6 pour mille habitants, la
part mondiale de la Grande-Bretagne dans les publications scientifiques est
supérieure à 8 %, avec une fréquence de citations
très honorable.
Ces performances, ainsi que celles mesurées en nombre de
récompenses internationales, sont supérieures aux nôtres
pour un PIB comparable avec une dépense totale et une part de
financement public (35,9 % au lieu de 39,1 %) inférieures.
Les positions britanniques par ailleurs sont très fortes dans les
sciences de la vie ainsi qu'en opto électronique.
2. Des faiblesses indéniables
Néanmoins, bien que ses exportations en produits de
haute
technologie, soient les plus élevées du G7, la Grande-Bretagne
est pratiquement absente, par exemple, du secteur des activités
spatiales
31(
*
)
.
Sa position en matière de brevets est plus mauvaise que la nôtre
et ses équipements universitaires sont délabrés.
Mais les pouvoirs publics britanniques, depuis l'arrivée au pouvoir de
M. Tony Blair, ont décidé de réagir.
B. UNE HAUTE AMBITION POUR LE 21E SIÈCLE
Depuis
le changement de majorité, la croissance des dépenses publiques
de recherche est d'environ 7 % par an en volume mais les droits d'inscription
des étudiants aux universités ont en même temps
considérablement augmenté).
Le ministère de l'industrie et du commerce Stephen Byers, chargé
de la recherche, vient, en outre, de publier un livre blanc
32(
*
)
traçant pour la science britannique des
perspectives ambitieuses pour le 21
e
siècle.
Ce livre annonce deux séries de mesures destinées respectivement
à améliorer l'excellence scientifique britannique et à
développer l'innovation.
1. La poursuite de l'excellence scientifique
Les
principales décisions prises sont les suivantes :
- Programme de un milliard de £ cofinancé par le Wellcome
Trust
33(
*
)
pour renouveler les locaux et les
équipements des centres de recherche.
Cette somme sera rassemblée au sein d'un nouveau fonds de la recherche
scientifique
34(
*
)
. Les universités, en
contrepartie du libre choix de leur priorité, devront prendre en charge
25 % du coût de leurs investissements.
750 milliards de £ ont déjà été
consacrés par le gouvernement et le Wellcome Trust au soutien des
infrastructures universitaires à partir d'un Joint Infrastructure Fund
(JIF).
- Affectation d'un supplément de crédits de 250 millions de
£ à l'accélération des recherches dans des domaines
clés (génomique, science de l'information et de la communication,
nanotechnologies, bio ingénierie, ordinateurs quantiques)
- Augmentation des allocations versées aux chercheurs
diplômés (mais le niveau atteint, 9000 £ par an, demeure
faible)
- engagement d'une dépense de 4 millions de £ par an pour le
recrutement de 50 chercheurs du plus haut niveau.
2. Le développement de l'innovation
Pour
encourager l'innovation, le gouvernement britannique a l'intention de :
- créer un nouveau fond (le « Higher Education Innovation
Fund ») doté sur trois années, de 140 M £, soit un
triplement des moyens actuels, destiné à améliorer les
liens entre les universités et les entreprises (particulièrement
les plus petites) ;
- consacrer davantage de moyens aux centres Science-entreprises
- créer des fonds régionaux de l'innovations et un fonds de
prospective
- augmenter de un milliard de livre les moyens de recherche et
développement des petites entreprises dans le cadre d'une
« small Business Reserch Initiative »
- changer certaines règles concernant le fonctionnement de la recherche
financée sur fonds publics (en ce qui concerne la prise de risque, la
valorisation, l'intéressement des personnels).
Les différents corps de recherche détiendraient désormais
les droits de propriété intellectuelle de leurs
découvertes.
En rupture avec la philosophie tatcherienne, le livre blanc conclut que le
marché ne peut, seul, financer la recherche fondamentale et les
infrastructures ni obtenir la confiance du public qui sont nécessaires
à l'épanouissement de l'innovation.
III. L'ALLEMAGNE
A. UN EFFORT FINANCIER EN HAUSSE
La part
de la DIRD dans le PIB de l'Allemagne est passée de 2,26 en 1996
à 2,44 en 1999 (soit un pourcentage désormais supérieur
à la France).
Le budget Fédéral pour l'éducation et la recherche
alimenté, à hauteur de 600 millions de marks, par la manne UMTS,
atteindra, en 2002, son plus haut niveau.
Les sciences de la vie, les NTIC (nouvelles technologies de l'information et de
la communication) bénéficieront d'une nette hausse de
crédits.
Un réseau national de recherche sur le génome sera notamment
créé.
B. DES RÉSULTATS APPRÉCIABLES
1. en terme de brevets
L'Allemagne, dont la recherche est financée pour près des deux tiers par les entreprises privées, obtient de bien meilleurs résultats que la Grande-bretagne et la France en terme de dépôts de brevets (avec une part de 17,30 % en Europe et de 7,20 % aux Etats-Unis).
2. La réussite de la réunification de la recherche allemande
La
Wissenschaftsrat (WR), qui est le plus ancien organe de conseil scientifique en
Europe, a joué un rôle important dans l'évaluation des
établissements scientifiques de l'ex RDA.
L'accroissement du budget a profité en premier lieu aux nouveaux
landër (qui ont bénéficié de 40 % des subventions du
ministère de la recherche) avec une priorité aux sciences de
l'environnement et de la vie (biotechnologies).
L'Allemagne de l'Est possèdera, dans quelques années, une
infrastructure de recherche très moderne et peut s'enorgueillir de la
présence, sur son territoire, de quelques institutions de
réputation internationale (en sciences de la terre, médecine
moléculaire ou physique des plasmas).
3. Des initiatives pour promouvoir des nouvelles technologies
Un
nouveau programme « Bio chance » a été
créé pour renforcer le secteur des biotechnologies ainsi que six
centres de compétence dans les nanotechnologies.
Par ailleurs, 100 millions de marks seront investis, chaque année,
pendant quatre ans, dans les techniques des micro-systèmes.
Les bénéficiaires de subventions ont désormais le droit
d'exploiter exclusivement les résultats de leurs recherches et le devoir
de les commercialiser.
C. DES PROJETS DE RÉFORME EN PROFONDEUR DES UNIVERSITÉS
Le
gouvernement Schröder veut encourager les universités, renforcer
leur autonomie et leur créativité en leur déléguant
plus de responsabilités, leur donner une vocation plus internationale et
les rendre plus performantes.
Au printemps 2000, une commission internationale d'experts a proposé des
réformes du droit du service public dans le secteur universitaire.
Les enseignants seraient payés en partie selon leur mérite, les
contrats entre la science et l'industrie facilités, et les jeunes
diplômés qui le désirent encouragés à se
lancer dans l'enseignement supérieur et la recherche.
En conclusion, les efforts importants de l'Allemagne dans le domaine de la
recherche, n'ont pas porté sur une simplification des structures, qui
demeurent complexes, comme en France, avec l'excuse, toutefois, du
fédéralisme.
Cependant, on doit noter que la coopération entre les différents
centres de recherche, notamment publics et privés, a un caractère
plus spontané que chez nous, ce qui témoigne d'un moindre
cloisonnement institutionnel.
IV. LE JAPON
A. UNE MOBILISATION D'ORES ET DÉJÀ EXCEPTIONNELLE
1. Un engagement sans pareil
Aussi
bien en pourcentage dans le PIB de la DIRD (3,01) qu'en nombre de
chercheurs pour mille habitants (9,7), le Japon se situe au premier rang
mondial et a, notablement, augmenté ses efforts ces dix ou vingt
dernières années.
C'est également le pays, devant l'Allemagne ou le pourcentage des
dépenses de recherche financées par les entreprises est le plus
important (72,2 %).
2. Des insuffisances sur le plan académique
Les
résultats japonais sont excellent en terme de parts de brevets (avec un
second rang mondial, derrière les Etats-Unis), mais nettement moins en
ce qui concerne les publications scientifiques (quantitativement et, surtout,
qualitativement avec une avant dernière place, juste devant la
Grèce, pour le nombre de citations dans les revues scientifiques de 1997
à 1999, selon le classement publié par le rapport Busquin).
S'inquiétant de sa faiblesse dans ce domaine, le Japon met l'accent sur
la recherche fondamentale dans le cadre d'un effort budgétaire global
soutenu, malgré la récession, et d'une vaste
réorganisation d'ensemble.
B. DE VASTES CHANGEMENTS EN PERSPECTIVE
1. Au niveau financier
Le
désengagement, avec la récession, du monde industriel dans le
financement de la recherche est compensé par une augmentation du budget
public (et notamment de l'effort de l'Etat dont la part devrait passer de 20
à 40 %).
Le gouvernement a augmenté sa contribution de 38 % en 1998, sa part de
financement de la recherche et développement atteignant alors 20 %, soit
son plus haut niveau historique.
Elle devrait s'accroître encore de 5,4 % en 1999.
Les dépenses sont réparties de la manière suivante :
- Recherche fondamentale 13,8 %
- Recherche appliquée 24,5 %
- Développement 61,7 %
La R & D industrielle représente toujours la grande majorité
du total (près de 80 % en 1997).
2. Au niveau structurel
a) Une organisation déjà rationnelle...
L'organisation de la recherche japonaise parait
déjà
assez rationnelle, chaque intervenant, au niveau gouvernemental, disposant de
sa propre agence :
- La STA (Science and technology agency) au niveau du premier ministre, qui
exerce une mission de coordination et à laquelle sont rattachés
six instituts nationaux de recherche
35(
*
)
- La JSPS (Japon society for the promotion of science), auprès du
Monbusho (ministre de l'éducation, de la science et de la culture), dont
les actions n'interfèrent pas avec celles de la STA ;
- l'AIST (Agency for Industriel Science and Technology pour le MITI (Ministre
de l'industrie et du commerce extérieur) chargé de la R&D
industrielle, qui finance la NEDO (New Energy and Industrial Technology
Development Organization), laquelle gère des projets faisant intervenir
à la fois des partenaires publics et industriels.
b) ... mais perfectionnée encore
En 1996
ont été fusionnés au sein de la JST (Japan Science and
technology Corporation), chargée de l'exécution de la politique
scientifique de la STA, deux organismes d'information et d'aide à la
recherche.
Il est question en outre :
- de regrouper le Monbusho et la STA dans un ministère de
l'éducation, de la science et de la technologie ;
- d'inciter l'AIST a encourager des programmes de recherche plus
fondamentaux ;
- d'élargir à l'ensemble des sciences les compétences du
CST actuel (Conseil de la science et de la technologie) au sein d'un nouveau
Conseil général de la Science et de la Technologie qui jouerait
un rôle important dans l'évaluation des grands projets et la
préparation des choix budgétaires gouvernementaux.
L'autonomie des universités et des instituts nationaux de recherche
serait renforcée, certaines nouvelles embauches pouvant, comme il a
été vu, s'effectuer sous forme de contrats à durée
déterminée.
Le Japon cherche ainsi à tirer parti de la recherche pour sortir de la
crise.
Les maîtres mots de la réforme sont : coordination,
évaluation, contractualisation et internationalisation.
Trois principaux objectifs sont visés : élévation du
niveau de la recherche, autonomie des laboratoires, rationalisation du
transfert de connaissances entre la recherche et l'industrie.
Cette stratégie semble très cohérente et bien
inspirée à votre rapporteur.
* * *
De
l'analyse, qui précède, de la situation des principaux pays de
l'OCDE, il ressort que ces derniers ont souvent su concilier une accentuation
de leur effort budgétaire (moins important, il est vrai, au
départ en proportion du total de leurs dépenses
budgétaires) et des réformes d'envergure.
La part des entreprises dans le financement de la recherche est
généralement plus importante mais comporte aussi davantage de
subventions, notamment, aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne, au titre des
activités militaires.
La recherche fondamentale fait fréquemment l'objet d'une sollicitude
particulière de la part des pouvoirs publics (cas notamment du Japon,
et, du fait du repli des dépenses militaires, des Etats-Unis) notamment
dans les sciences de la vie.
Les difficultés économiques ne freinent pas la progression de
l'engagement dans la recherche de l'Etat et des plus grandes entreprises.
Les réformes de structures vont souvent assez loin (paiement au
mérite des professeurs en Allemagne, recrutement de contractuels au
Japon, changement des règles de la propriété
intellectuelle en Grande-bretagne...).
L'importance de l'évaluation et de la prospective (en Grande-Bretagne)
est reconnue.
Sans vouloir transposer aucun de ces modèle en France, il est possible
de s'en inspirer par exemple en ce qui concerne la valorisation de la recherche
aux Etats-Unis ou la rationalisation des structures gouvernementale au Japon.
CHAPITRE IV
L'INSUFFISANTE PROGRAMMATION D'ENSEMBLE
DES TRES
GRANDS EQUIPEMENTS
ET LA STAGNATIONDU BUDGET DE L'ESPACE
I. LES TGE : DES BESOINS CROISSANTS À SATISFAIRE AU MOINDRE COÛT
A. LES RECOMMANDATIONS DE L'OPECST
Le
ministère n'ayant pas encore répondu à la
question n° 51 de son questionnaire budgétaire relative
aux grands équipements transversaux pluridisciplinaires
nécessaires à la recherche française, votre rapporteur,
s'est contenté, en commission, de réitérer les
observations qui figurent dans l'étude sur les TGE (très grands
équipements), dont il est co-auteur, publiée par l'OPECST (office
parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques).
Les principales conclusions, sur les suites desquelles votre rapporteur avait
interrogé le ministère, étaient les suivantes :
- distinguer les
TGE d'infrastructure, devant faire l'objet d'urgence d'un
plan d'équipement de la France,
des TGE de grands programmes et des
TGE thématiques
;
- améliorer les conditions d'organisation et de valorisation des travaux
réalisés au moyen de ces équipements de façon
à rentabiliser les investissements correspondants et à en
maximiser les effets d'entraînement ;
- proposer la prise en charge communautaire (qui améliorerait la
coordination des investissements sur notre continent) des frais d'étude
des futurs TGE, d'une quote-part de leurs dépenses de fonctionnement et
de leur amortissement ainsi que des frais d'accès des chercheurs
européens ;
- renforcer les puissances de calcul et les réseaux à hauts
débits dans l'Union européenne.
Il ne semble pas que les 900 millions d'euros prévus par le
6
ème
PCRD (programme communautaire de recherche et
développement), pour les infrastructures de recherche permettent de
financer la réalisation de ces deux derniers objectifs.
La forte progression des besoins de la science en TGE, en traitement,
échange et stockage de données est, en tout état de cause,
un phénomène irréversible.
B. MESURES NOUVELLES
Les
chercheurs français, et on ne peut que s'en réjouir, sont en
train d'être équipés de nouveaux supercalculateurs :
- au CINES (centre informatique national de l'enseignement supérieur)
à Montpellier ;
- à l'IDRIS (institut du développement et des ressources en
informatique scientifique), qui dépend du CNRS, à Orsay ;
- enfin à la direction des applications militaires du CEA à
Bruyères-le-Châtel (Essonne).
L'année 2002 sera marquée aussi par le début de la
construction du synchrotron SOLEIL. Fin 2000 et début 2001, suite
à l'annonce du 11 septembre 2000 du Ministre de la Recherche,
le CEA et le CNRS ont signé une convention pour mettre en place les
structures nécessaires.
Le projet de société civile « Synchrotron
Soleil » a été adopté par les conseils
d'administration du CEA et du CNRS en juillet. Les statuts ont
été déposés. Une solution satisfaisante a
été trouvée pour les personnels du LURE et la convention
entre l'Etat et les collectivités est en cours de finalisation.
En ce qui concerne le projet DIAMOND, un arrangement a été
signé entre les ministres de la science français et britannique
début 2001. Cet arrangement ne comporte aucune clause financière
et une décision ne sera prise qu'en avril 2002.
Les problèmes liés aux sources de neutrons vont prendre une
importance particulière dans les prochains mois. En effet, la convention
intergouvernementale France/Allemagne/Grande-Bretagne qui vient à
expiration en 2003 doit être renouvelée pour l'Institut
Laue-Langevin à Grenoble (ILL). Il s'agit en particulier de savoir si la
Grande-Bretagne, qui avait réduit unilatéralement sa
participation de 33 % à 25 %, reviendra à sa participation
initiale. D'autre part, une utilisation rationnelle de cette installation
conduit à renouveler les guides et les instruments, dont beaucoup datent
de trente ans. Une telle modernisation permettrait de conserver la
compétitivité de l'ILL par rapport à la source de
spallation américaine en cours de construction et livrée en 2006.
A plus long terme (horizon 2015), l'Europe doit se doter d'une source de
spallation (European Spallation Source)
36(
*
)
,
deux fois plus puissante que la source américaine. Les discussions pour
la définition de cette source sont en cours.
C. CONCLUSIONS DU MINISTERE DE LA RECHERCHE
Parvenues à votre rapporteur après l'examen du
budget
de la recherche en commission, les principales conclusions du ministère
relatives aux TGE sont les suivantes :
Si les grands centres nationaux (CEA, CINES ET IDRIS) ont connu une
évolution satisfaisante, le plus grand manque apparaît dans des
équipements de taille moyenne distribués sur les grands campus
scientifiques, à partir desquels doit être constituée une
« grille nationale » de calcul, s'appuyant sur le
réseau Renater 3. De plus, les progrès spectaculaires de la
biologie moléculaire, de la bioinformatique et de diverses technologies
comme le séquençage à haut débit ont permis
à la génomique internationale d'entrer dans l'ère du post
séquençage qui va demander une exploitation rapide de masses
considérables de données brutes. Des moyens de traitement de
l'information conséquents dans les centres
« thématiques » mis en place par les chercheurs en
génomique, doivent accompagner ce formidable changement d'échelle.
Le ministère appelle également de ses voeux :
- une politique plus énergique de fermeture des équipements
obsolètes ;
- une maîtrise des dépenses spatiales, responsable d'une large
part du poids des TGE dans le BCRD (de 9,6 % en 2000).
Mais ces dernières sont en stagnation.
II. LA STAGNATION DES DÉPENSES SPATIALES
A. ÉVOLUTION GLOBALE
En
baisse par rapport à 2000, la dotation du CNES est seulement reconduite
en 2002 à son niveau de 2001, soit 1 343 M€ .
La contribution à l'agence spatiale européenne (ESA) en hausse de
5,4 % est supérieure (693,2 M€) au montant des programmes
menés dans un autre cadre (510,4 M€) qui sont en baisse de
6,6 %.
L'ESA souhaite faire croître de 5 % en volume le financement de ses
activités obligatoires (fonctionnement et programmes scientifiques)
durant les prochaines années, ce qui serait très
contraignant
37(
*
)
.
B. LA CONFÉRENCE D'EDIMBOURG
Votre
rapporteur se félicite des arbitrages rendus le 15 Novembre par les
ministres européens de la recherche en faveur :
- du programme GALILEO de positionnement par satellite ;
- du développement de la fusée Ariane 5.
Il regrette la diminution, par rapport aux demandes des moyens consacrés
aux développements technologiques pour les satellites de communication
et comprend le gel de l'utilisation de la majeure partie des crédits
destinés à la station orbitale internationale, dans l'attente
d'une clarification des intentions de la NASA.
C. AUTRES OBSERVATIONS
L'espace
constitue une activité essentielle d'un point de vue stratégique,
industriel et scientifique, dans laquelle la France excelle et a toujours fait
preuve d'une grande efficacité dans ses dépenses, avant de se
voir imputer la majeure partie du surcoût lié aux
difficultés de mise au point du nouveau lanceur Ariane V.
Notre industrie spatiale représente environ 40 % de la
capacité européenne et notre PIB 17,35 % de l'ensemble de
ceux des membres de l'ESA.
Est-il justifié, dans ces conditions, que nous prenions en charge :
- 70,4 % du programme Arte 4 (maintien de la fiabilité
d'Ariane 4)
- 54,5 % du programme d'accompagnement Ariane 5 ;
- 50,6 % du programme ARIANE 5 plus ;
- 27,6 % (soit 784 MF) pour le programme de station spatiale
internationale ?
Quel avantage industriel ou technologique retirons-nous de tels niveaux de
contribution ? Sont-ils indispensables au maintien de notre
« leadership » spatial ?
Enfin, malgré les succès de la société franco-russe
Starsem, il convient de considérer avec circonspection le projet
d'installation à Kourou d'un pas de tir spécifique pour le
lanceur Soyouz, quel qu'en soit l'intérêt
38(
*
)
la partie russe ne semblant pas disposée
à en assumer sa part de financement.
CONCLUSION
Le
présent rapport ne se veut pas un réquisitoire.
Il reconnaît, avec objectivité, les progrès accomplis en
matière d'aide à la création d'entreprises innovantes et
de gestion prévisionnelle des emplois scientifiques.
Cependant, par delà les clivages politiques, qui tendent, naturellement,
à s'accentuer à la veille d'élections, votre rapporteur a
voulu manifester sa déception.
Il regrette, en effet, profondément que notre pays n'ait pas su profiter
de la période assez longue de croissance et de stabilité qu'il
vient de traverser, pour allier, comme d'autres ont su le faire, une forte
augmentation de crédits à de profondes réformes de
structures. La première aurait pu servir d'incitation aux secondes.
L'efficacité des dépenses s'en serait trouvée
renforcée, ce qui les aurait mieux fait contribuer au progrès des
connaissances, à l'activité économique et aux autres
demandes de la société.
L'organisation de la recherche française a besoin de davantage de
cohérence et de souplesse : cela implique, d'un côté,
une simplification des structures, une meilleure coordination des actions et un
renforcement de l'évaluation et, de l'autre, davantage d'autonomie des
différents intervenants et une plus grande utilisation des contrats dans
le monde de la recherche (pour la détermination des objectifs, l'emploi
scientifique...).
La prochaine majorité devra régler le problème, essentiel,
de l'insuffisance de mobilité, à tous les niveaux, dans la
recherche française. Elle devra renforcer l'autonomie, les moyens et
l'excellence des universités, en les incitant à coopérer
davantage entre elles et avec les entreprises.
Déplorant l'insuffisance des réformes et de la progression du
montant et de l'efficacité des dépenses de la recherche, votre
commission vous propose de rejeter ce budget.
EXAMEN EN COMMISSION
Réunie le mardi 6 novembre 2002 sous la
présidence de
M. Michel Sergent, secrétaire, la commission a examiné les
crédits de la recherche
Le rapporteur spécial a tout d'abord souligné que contrairement
aux propos du ministre de la recherche, l'évolution des dotations
budgétaires depuis cinq ans ne marquait pas de rupture par rapport
à la tendance constatée de 1993 à 1997 : la part de
la dépense intérieure de recherche dans le produit
intérieur brut a continué de décliner, l'effort des
entreprises ne compensant pas le désengagement des administrations.
Cette évolution résulte pour lui de deux facteurs : le
freinage relatif de la progression des dépenses publiques par suite du
retour de la croissance, le fléchissement accentué des
dépenses de recherche militaire.
Le rapporteur spécial a reconnu, toutefois, la forte progression des
autorisations de programme dont bénéficient depuis 2001 les
équipements de recherche des universités et des grands organismes
scientifiques.
Ainsi, selon le rapporteur spécial, la position relative de la France en
termes de part de dépenses de recherche dans le produit intérieur
brut, loin de marquer un rattrapage, a plutôt tendance à se
détériorer : la France est désormais non seulement
derrière le Japon et les États-Unis mais également
derrière l'Allemagne et la Suède.
Le rapporteur spécial a également indiqué que si avec
39,1 % en 1998, la France se trouvait dans la moyenne européenne
pour ce qui est de la part des financements publics de la recherche, ce
pourcentage restait sensiblement plus élevé que chez nos
principaux partenaires et concurrents. Cela signifie à la fois que nos
entreprises interviennent moins dans le financement de l'effort national de
recherche et qu'elles reçoivent moins de subventions à ce titre
que dans les pays anglo-saxons.
Ensuite,
M. René Trégouët
a évoqué les
performances de la recherche française, dont il a estimé qu'elles
étaient à peu près honorables, à considérer
les trois indicateurs pertinents que sont les publications, les brevets et les
créations d'entreprises.
S'agissant des structures, il a rappelé que la France se
caractérise par la faiblesse relative des moyens de la recherche
universitaire, la coexistence du CNRS et d'organismes spécialisés
et le statut de chercheur fonctionnaire, trois singularités qui ne sont
pas favorables à la valorisation des résultats de la recherche
française.
Le rapporteur spécial a conclu son exposé en évoquant un
certain nombre de facteurs qui devraient nous conduire à repenser le
système de recherche français : la nouvelle loi organique
qui obligera à présenter le budget de la recherche sous forme de
missions et de programmes ; le choc démographique consécutif
aux départs en retraite des générations nées
après la seconde Guerre mondiale qui va se faire sentir à partir
de 2004. A cet égard, il s'est demandé s'il ne convenait pas
d'envisager un recours accru aux contrats dans l'organisation de la recherche
et éventuellement de modifier les missions et les moyens du Centre
national de la recherche scientifique (CNRS).
Après cet exposé,
M. Philippe Marini, rapporteur
général,
est intervenu pour souligner qu'il était
important d'adapter le régime de l'emploi scientifique en termes de
carrière et de mobilité et que l'évolution
nécessaire des statuts passait par celle en cours des mentalités.
M. Maurice Blin
a, de son côté, évoqué
notamment la question des « chercheurs à vie » qui
n'existent pas aux États-Unis, tandis que
M. François
Marc
a tenu à signaler que la pratique des contrats avait tendance
à se développer de plus en plus notamment dans les
universités de l'ouest de la France.
A l'issue de ce débat, la commission a décidé de
réserver son vote sur les crédits du budget de la recherche
jusqu'à l'audition du ministre de la recherche.
MODIFICATIONS APPORTÉES PAR
L'ASSEMBLÉE
NATIONALE
Modifications des crédits
Les
crédits du titre IV du budget de la recherche ont été
majorés, à titre non reconductible, de 303.800 euros
(1,9 million de francs).
Ont été, plus précisément, abondés :
- les articles 20 (« diverses interventions ») et 60
(« soutien aux actions technologiques et scientifiques »)
du chapitre 43-01 « action d'incitation, d'information et de
communication » ;
- l'article 10 du chapitre 45-13 « commissariat à
l'énergie atomique » (CEA).
1
Il évoquait les structures
budgétaires mais qui reflètent celles de notre système
public de recherche.
2
Une partie de la subvention de l'Etat au CEA sera
transférée, en 2002, du budget de la recherche à celui de
l'industrie afin de rétablir entre les contributions des deux
départements ministériels un équilibre rompu par la prise
en charge par le ministère de l'environnement des dépenses de
sûreté nucléaire.
3
FRT : Fonds de la recherche et de la technologie
4
avec affectation privilégiée aux départements
des services du vivant de l'information.
5
C'est-à-dire exécutée sur le territoire
national.
6
Références statistiques sur les enseignements, la
formation et la recherche - Edition 2001.
7
DIRDA.
8
En valeur absolue.
9
La part de la dépense intérieure de défense
est passée entre 1992 et 1999 :
- de 20 % à 7 % de la DIRDA
- de 16,8 % à 10,1 % de la DIRD totale.
Elle est stabilisée aux alentours de 5 milliards de francs.
10
Source : note d'information 00-47 des ministères de
l'Education nationale et de la recherche
11
La National Science Foundation estime que les financements
Défense représentent 75 à 80 % des aides publiques
aux entreprises, contre les deux tiers en France
12
les modalités de recrutement apparaissent marquées
à la fois par une centralisation de principe en ce qui concerne les
affectations d'emplois mais un « localisme » et un
corporatisme (cooptation) de fait.
13
Bayh-Dole Act, offices of Technology Licensing (OTL)
14
Performances des activités d'éducation et de
recherche des systèmes d'enseignement supérieur de l'OCDE (Annals
of Public and Cooperation Economies 70 :4 - 1999)
15
prospective, éducation, orientation, aides
financières à toute activité d'enseignement ou de
recherches (principalement universitaires), évaluation...
16
Il existe aussi un comité permanent regroupant des
représentants du Bund et des Länder le
« Bund-Länderkommission » et d'autres structures de
coordination.
17
pour laquelle intervient la Japan Science and Technology
Corporation (JST). Le MITI a aussi sa propre agence : « Agency
for Industrial Science and Technology » (AIST)
18
FTTA (Federal Technology Transfer Act)
19
décrets n° 2000-632 du 30 juin 2000 et 99-1081 du 20
décembre 1999. Celui du 13 février 2001 relatif à
l'intéressement des auteurs d'invention semble également bien
limitatif.
20
Dans son rapport au nom du comité d'évaluation des
politiques publiques sur la politique de recrutement et la gestion des
enseignants chercheurs et des chercheurs.
21
Sally Goodman Nature - 8 novembre 2001 - 414
22
Il a été répondu à une question de
votre rapporteur que « les procédures de programmation
triannuelle de la DGA imposent un cycle qui ne permettra sans doute pas
d'intégrer dans la programmation 2002 des actions duales
repérées trop tardivement, ou qui intégrées ne
pourraient démarrer qu'après une période trop longue pour
les instances ou les procédures civiles » (sic).
23
office Parlementaire d'Evaluation des Choix Scientifiques et
Technologiques - TOME II - Le rôle des très grands
équipements dans la recherche publique et privée en France et en
Europe.
24
La notion de masse critique, essentielle au regard des aspects
financiers des activités de valorisation a conduit à des
coopérations entre universités aux Etats-Unis et en
Grande-Bretagne, c.f. plateforme de biotechnologies commune aux
universités de Leeds, Sheffield et York.
25
Ministre de l'Industrie et du Commerce
26
qui dispose de ses propres laboratoires
27
Pas intégralement sur leurs ressources propres.
28
Les entreprises n'apprécient pas en effet la longueur des
procédures et la non exclusivité des licences prévues par
le Federal Technology Transfer Act (FTTA)
29
Small Business Innovation Research Program (SBIR)
Small Business Technology Transfer Program (STTR)
30
Coopérative Research and Development Agreements (CRDA)
31
sauf en ce qui concerne les minisatellites (c.f.
université du Surrey)
32
A science policy for the 21 st century
33
Fondation caritative liée, patrimonialement, au groupe
pharmaceutique Glaxo mais totalement indépendante
34
675 M £ : budget de la science et Fonds du Conseil de
l'éducation
225 M £ : Wellcome Trust dont 75 M £ pour les sciences
biomédicales
100 M £ : Office of science and Tehnology (OST)
35
notamment pour le spatial et l'énergie nucléaire
36
Spallation : réaction nucléaire
provoquée par des particulaires accélérées
37
Le taux de notre participation à ces dépenses,
calculée au prorata de notre PNB, est de 17,35 %.
38
Il s'agit de ne pas laisser aux américains
l'exclusivité d'une coopération avec les russes dans le domaine
des lanceurs, sans faire concurrence à Ariane V.