TITRE IV
DE LA PARTICIPATION
DU PUBLIC
A L'ÉLABORATION DES GRANDS PROJETS
CHAPITRE PREMIER
CONCERTATION AVEC LE PUBLIC
Article
48
(art. L. 110-1 du code de l'environnement)
Elargissement de la
définition du principe de participation
Cet article modifie l'alinéa 4° du paragraphe II de l'article L. 110-1 du code de l'environnement, qui définit un certain nombre de principes généraux en exergue du code, tels que le principe de précaution et le principe du pollueur-payeur.
Actuellement, le principe de participation est compris comme un simple accès aux informations relatives à l'environnement, y compris celles relatives aux substances et activités dangereuses.
Le texte proposé pour l'article L. 110-1 du code de l'environnement enrichit considérablement ce principe, en prévoyant, d'une part, que chacun a accès (et non plus « doit avoir accès » à ces informations), et d'autre part, que le public doit être associé à l'élaboration des décisions .
Néanmoins, le champ d'application de cette disposition reste circonscrit aux décisions ayant une incidence importante sur l'environnement ou l'aménagement du territoire.
Il s'agit de mettre en conformité avec les dispositions internationales et communautaires le droit français .
En effet, la Déclaration de Rio sur l'environnement et le développement, adoptée le 13 juin 1992, définissait déjà le principe de participation dans son article 10 comme le fait d'avoir « accès aux informations relatives aux substances dangereuses dans leurs collectivités, et avoir la possibilité de participer aux processus de prise de décision ».
Quoique dépourvue de valeur contraignante, la déclaration a connu une première prise en compte par l'article 42 de la loi n° 96-1236 du 3 décembre 1996 sur l'air et l'utilisation rationnelle de l'énergie, qui définit le principe de participation comme celui « selon lequel chacun doit avoir accès aux informations relatives à l'environnement, y compris celles relatives aux substances et activités dangereuses ». Cette définition était cependant très en retrait par rapport à la Déclaration de Rio, puisque seul l'aspect droit d'accès aux informations relatives à l'environnement était retenu. Or il peut s'avérer difficile de contrôler cette « transparence ».
Par ailleurs, lors de la quatrième Conférence ministérielle « un environnement pour l'Europe », tenue au Danemark en juin 1998, a été signée par 39 Etats et la Communauté européenne la Convention d'Aarhus sur l'accès à l'information, la participation du public au processus décisionnel et l'accès à la justice du 25 juin 1998 .
Son article premier prévoit que « chaque Partie garantit les droits d'accès à l'information sur l'environnement, de participation du public au processus décisionnel (...) ».
L'article 6 alinéa 4 prévoit en particulier que « chaque Partie prend des dispositions pour que la participation du public commence au début de la procédure, c'est à dire lorsque toutes les options et solutions sont encore possibles et que le public peut exercer une réelle influence ».
Pour la première fois, un instrument de droit international ayant valeur normative définit donc le principe de participation.
Cependant, il faut noter que cette convention n'a pas encore ratifiée par la France. Un projet de loi de ratification a cependant été déposé le 23 août 2001 au Bureau de l'Assemblée nationale.
Seuls l'Italie et le Danemark ont déjà ratifié la convention dans l'Union européenne. La convention est entrée en vigueur le 30 octobre 2001 avec le dépôt du seizième instrument de ratification.
Le présent article en tire cependant déjà les conséquences, en élargissant la définition actuelle du principe de participation .
Cette nouvelle rédaction doit permettre de satisfaire les attentes exprimées par le public.
Le terme de « public » peut susciter des interrogations. En effet, il est difficile de définir les populations concernées . Dans le cadre de l'enquête publique, il s'agit des habitants des communes dans lesquelles la publicité des documents est organisée. En outre, l'usager est celui pour lequel le projet est potentiellement utile, tandis que le riverain se définit par rapport à sa proximité de la zone d'emprise de tel projet. En pratique, le projet lui-même joue un rôle structurant pour définir la population susceptible de manifester un intérêt. L'intention de circonscrire débat ou enquête à une certaine catégorie est constamment mise en échec.
Le point 4 de l'article 2 de la convention d'Aarhus prévoit que « le terme « public » désigne une ou plusieurs personnes physiques ou morales et, conformément à la législation ou à la coutume du pays, les associations, organisations ou groupes constitués par ces personnes », ce qui constitue une définition extrêmement étendue.
Existe alors le risque, en entretenant le flou sur cette notion, de vider en pratique le dispositif de sa substance, en raison des difficultés à l'appliquer, ou à l'inverse de multiplier de manière excessive les recours contentieux.
Par ailleurs, s'agissant du champ de la participation, l'article 48 du projet de loi prévoit qu'elle concerne « l'élaboration de décisions ayant une incidence importante sur l'environnement ou l'aménagement du territoire ». Se pose donc la question de savoir si le terme « décisions » vise les seules décisions administratives ou si, au contraire, il inclut également les décisions prises par des personnes privées.
En outre, le critère d'une incidence « importante » est particulièrement vague, et peut en conséquence donner lieu à des appréciations très divergentes, d'où un risque de contentieux accru. Ainsi, lors de la discussion du projet de loi en première lecture à l'Assemblée nationale, ont été systématiquement présentés (et rejetés) des amendements présentés par M. Philippe Marchand, du groupe radical, citoyen et vert , tendant à supprimer le terme « importante ». Le rapporteur pour avis de la commission de la Production et des échanges, M. Pierre Cohen, a cependant indiqué que la convention d'Aarhus faisait référence à la notion d' « effet important sur l'environnement ».
En définitive, ces multiples interrogations devraient pouvoir être recadrées, l'article L. 110-1 du code de l'environnement prévoyant in fine que l'inspiration de principes tels que celui de participation se fait « dans le cadre des lois qui en définissent la portée ».
L'application du principe de participation est donc restreinte aux cas prévus par la loi, c'est à dire pour l'essentiel :
- aux procédures prévues par le titre II du livre Ier du code de l'environnement (concernant le débat public, les enquêtes publiques dans le cadre de projets ayant un impact sur l'environnement et le suivi des travaux prévus par le présent projet de loi) ;
- aux procédures prévues par le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique (enquête préalable à une déclaration d'utilité publique) ;
- aux procédures prévues par l'article L. 300-2 du code de l'urbanisme (concertation en cas de modification ou révision d'un plan local d'urbanisme, en cas de création d'une zone d'aménagement concerté ou d'une opération d'aménagement réalisée par la commune).
Votre commission vous propose d' adopter un amendement précisant que le public est associé au processus d'élaboration des projets, et non à l'élaboration des décisions, afin de bien marquer la différence entre le temps de la concertation et le temps de la décision .
Votre commission des Lois vous propose d' adopter l'article 48 ainsi modifié.
Article 49
(art. L. 121-1
à L. 121-14 du code de l'environnement)
Débat public
Cet article réécrit entièrement le chapitre Ier du titre II du livre Ier du code de l'environnement concernant le « débat public relatif aux opérations d'aménagement », qui comprend les articles L.121-1 à L. 121-5. Lui est donc substitué un chapitre intitulé « Participation du public à l'élaboration des projets d'aménagement ou d'équipement ayant une incidence importante sur l'environnement ou l'aménagement du territoire », composé de trois sections, et comprenant les articles L. 121-1 à L. 121-14.
Le rapport du Conseil d' Etat soulignait que l'intervention de l'Etat à plusieurs étapes de la procédure, en tant que maître d'ouvrage, mais aussi en tant que personne habilitée à décider de l'utilité publique d'un projet, par le biais de son représentant dans le département, apparaissait désormais choquante, en raison de l'évolution des attitudes des citoyens.
Il avait ainsi préconisé de mettre fin à ce qui était considéré, à tort ou à raison, comme un mélange des genres préjudiciable à la crédibilité de l'Etat et de ses projets , et de remédier à la suspicion en faisant en sorte que les procédures des débats, consultation et enquêtes, se déroulent sous l'égide d'une instance consultative impartiale que nul ne pourrait regarder comme ayant intérêt à la réalisation du projet comme à son abandon. Le groupe d'étude soulignait que ceci permettrait aux autorités de l'Etat de mieux exercer leurs compétences en acquérant un surcroît d'autorité et de crédibilité.
Le groupe d'étude, jugeant très prometteuses les premières expériences de la Commission nationale du débat public, préconisait qu'elle se voie doter de compétences étendues. Elle veillerait à l'organisation des consultations, au moins pour les projets les plus importants. Elle disposerait d'un pouvoir d'avis ou de recommandation à l'usage des diverses parties prenantes à l'élaboration des projets. Elle pourrait en outre être associée à l'activité normative s'exerçant dans sa sphère de compétence, et prendrait une part active au développement d'une véritable culture du débat public.
Actuellement, les dispositions du code de l'environnement relatives au débat public résultent de la loi n° 95-101 du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l'environnement, dite « loi Barnier » .
Elles prévoient la possibilité (article L. 121-1) d'organiser un débat public « pour les grandes opérations publiques d'aménagement d'intérêt national (...) présentant un fort enjeu socio-économique ou ayant un impact significatif sur l'environnement », et précisent les modalités de saisine, de composition, ainsi que la mission de la Commission nationale du débat public (articles L. 121-1 à L. 121-5).
La Commission nationale du débat public a été instituée par l'article 2 de la loi « dite Barnier », afin de répondre à la forte demande sociale d'information et de participation en amont de la réalisation des grands projets d'aménagement et d'équipement. Elle n'est cependant installée que depuis le 4 septembre 1997.
Elle a connu un bilan modeste, puisque sur la vingtaine de saisines dont elle a fait l'objet, seules quatre ont donné lieu à l'organisation d'un débat public . Il s'agit du projet « Port 2000 » (visant à réaliser un port en eau profonde au Havre), de celui d'une ligne à très haute tension entre Boutre et Carros, de celui de l'autoroute A32 devant relier Metz et Nancy, et enfin du projet de branche sud du TGV Rhin-Rhône.
Par ailleurs, le Premier ministre a demandé au président de la Commission nationale du débat public d'éclairer le choix du Gouvernement sur la nature de la nouvelle plate-forme aéroportuaire susceptible de répondre aux besoins de déplacements générés dans la région Ile de France et dans les régions voisines, pour en retenir la localisation dans une gamme de sites présentés au cours du débat public.
Cette démarche d'utilité concertée pour un site aéroportuaire international (DUCSAI) s'est déroulée de la mi-avril à la mi-octobre 2001. Une commission DUCSAI chargée de veiller à la qualité du débat, présidée par M. Bernard Poignant, député européen, a été installée le 19 avril, tandis que le débat était mené par le président de la Commission nationale du débat public, M. Pierre Zémor.
Actuellement sont en cours des débats publics concernant : l'extension du port de Nice (ouverture le 15 octobre 2001, fin prévue à la mi-janvier 2002) et les contournements autoroutier et ferroviaire de l'agglomération lyonnaise (ouverture également le 15 octobre, fin prévue fin janvier 2002).
Par ailleurs, la Commission nationale du débat public a poursuivi l'instruction de trois débats publics dont le principe a été retenu, et qui vont faire l'objet de mise en place de commissions particulières : le barrage de Charlas en Haute-Garonne, l'aéroport de Nantes - Notre-Dame-des-Landes en Loire-Atlantique et la ligne électrique à très haute tension Lyon-Chambéry.
De plus, la Commission nationale du débat public a recommandé par anticipation du présent projet de loi l'organisation de débats locaux sous la responsabilité du maître d'ouvrage concernant : le conditionnement, l'entreposage de déchets radioactifs au centre de Cadarache (Bouches-du-Rhône) du Commissariat à l'Energie atomique et la ligne à Très haute tension Quercy blanc (Lot et Lot-et-Garonne).
Parallèlement, la Commission nationale du débat public instruit plusieurs nouvelles saisines : la modernisation de l'aéroport d'Orly, le « CDG Express », un projet de liaison ferroviaire rapide « dédiée » entre la gare de l'Est et l'aéroport Charles de Gaulle et la problématique des traversées routières et ferroviaires des Alpes en y incluant la réouverture du tunnel du mont-Blanc et la ligne à grande vitesse Lyon-Turin (l'auteur de la saisine étant France Nature Environnement, les avis du ministre de l'Equipement, du Transport et du Logement et du ministre de l'Aménagement du Territoire et de l'Environnement ont été demandés).
Le nombre de saisines n'ayant donné lieu à aucun débat public a été critiqué, même si la Commission nationale du débat public assure que le classement des dossiers a été motivé par la tardiveté des saisines.
Après des débuts hésitants (quatre débats publics en quatre ans), la Commission nationale du débat public semble enfin entamer une montée en puissance. Le Gouvernement souhaite permettre un recours plus fréquent à la procédure de débat public, afin de discuter de l'opportunité de projets très en amont de leur réalisation. L'objectif est de passer d'une moyenne d'un débat public par an à une vingtaine de débats publics sur la même période, ce qui suppose une réforme du dispositif actuel.
Le présent article tend donc à élargir le champ du débat public, à assouplir les modalités de saisine de la Commission nationale du débat public et à renforcer ses moyens .
CHAPITRE PREMIER
Participation du
public à l'élaboration des projets d'aménagement
ou
d'équipement ayant une incidence importante
sur l'environnement ou
l'aménagement du territoire
Section I
Missions de la Commission
nationale du débat public
Champ d'application et objet du
débat public
L'intitulé de cette section a été complété en première lecture à l'Assemblée nationale à l'initiative du rapporteur pour avis de la Commission de la Production de l'Assemblée nationale, M. Pierre Cohen, afin de préciser que cette section traite également des missions de la Commission nationale du débat public.
Article L. 121-1 du code de
l'environnement
Nature et missions de la Commission nationale du
débat public
L'actuel article L. 121-1 du code de l'environnement prévoit qu'un débat public peut être organisé pour les grandes opérations publiques d'aménagement d'intérêt national de l'Etat, des collectivités territoriales, des établissements publics et des sociétés d'économie mixte présentant un fort enjeu socio-économique ou ayant un impact significatif sur l'environnement. Un débat public peut alors être organisé sur les objectifs et les caractéristiques principales des projets, pendant la phase de leur élaboration.
L'article 49 du projet de loi réécrit totalement cet article .
1. Un champ d'application du débat public élargi
Le premier alinéa du texte prévu pour l'article L. 121-1 du code de l'environnement prévoit que la Commission nationale du débat public est une autorité administrative indépendante .
Est donc suivie la recommandation du rapport du Conseil d'Etat de 1999. Il s'agit donc de lui donner une autorité morale qui la rende crédible et fasse taire les soupçons entachant les débats publics.
Cet alinéa précise également la mission de la Commission nationale du débat public, qui est de veiller au respect de la participation du public au processus d'élaboration de certains projets , qu'il définit.
Il définit ensuite le champ des projets pour lesquels la Commission nationale du débat public doit veiller au respect de la participation du public.
Actuellement , le champ du débat public (qui constitue la seule modalité prévue) est délimité en fonction de deux critères :
- la nature du projet en cause :
. « une grande opération d'intérêt national », ce qui constitue une terminologie assez vague, en l'absence de mention de seuils, mais permet d'exclure les projets des collectivités locales n'ayant qu'un impact purement local ;
. d'aménagement (ce qui exclut les installations liées à la défense nationale) ;
. une opération publique , puisque sont exclues du champ du débat public les installations classées au titre de la protection de l'environnement dont le maître d'ouvrage serait une personne privée.
- les conséquences du projet :
. un « fort enjeu socio-économique » ;
. ou « un impact significatif sur l'environnement ».
C'est à la Commission nationale du débat public qu'il revient d'apprécier si ces critères sont satisfaits.
Le projet de loi procède à une extension , à plusieurs titres.
Tout d'abord, il est question de participation du public et non plus seulement d'organisation du débat public, qui n'est plus qu'une modalité de la participation.
Par ailleurs, le champ des projets visés est étendu aux projets remplissant de manière cumulative les conditions suivantes :
- avoir le caractère de projets d'aménagement ou d'équipement (à la suite d'un amendement rédactionnel du rapporteur pour avis M. Pierre Cohen adopté par l'Assemblée nationale, avec avis favorable du Gouvernement substituant « ou » à « et ») ;
- la nécessité de l'intérêt national du projet est supprimée. Cette suppression emporte des conséquences très importantes.
- les projets dont le maître d'ouvrage est une personne privée sont également concernés, ce qui représente une extension considérable du champ du débat public. S'agissant des usines privées, il s'agit d'une extension délicate. Il apparaît plus pertinent qu'une telle concertation intervienne au moment de la fixation des plans locaux d'urbanisme et des schémas de cohérence territoriale.
- de plus, sont concernés également les projets, qui, outre présenter de forts enjeux socio-économiques ou avoir des impacts significatifs sur l'environnement, ont des impacts significatifs sur l'aménagement du territoire.
En effet, ce n'est pas l'ensemble du système actuel d'information et de consultation du public qui est défaillant. Plusieurs milliers d'enquêtes sont réalisées en France chaque année. L'insatisfaction, voire la frustration du public se focalisent sur les projets de grande ampleur (pas plus d'une dizaine par an), pour lesquels les modes d'information et de consultation du public paraissent archaïques.
Néanmoins, une précision importante est introduite, puisque ces projets doivent désormais relever de catégories d'opérations dont la liste est fixée par décret en Conseil d'Etat . Selon les informations fournies à votre rapporteur, le décret en Conseil d'Etat devrait reprendre la liste des opérations pouvant être soumises à débat public, qui figure actuellement en annexe du décret n° 96-388 du 10 mai 1996 relatif à la consultation du public et des associations en amont des décisions d'aménagement pris en application de la loi dite Barnier.
Les seuils financiers ou techniques déclenchant une saisine de la Commission seraient cependant revus à la baisse.
Si les grands projets de l'Etat seraient ainsi principalement visés, certains grands projets des collectivités locales pourraient être également concernés, comme par exemple la réalisation d'un tramway en site propre. Or, il n'apparaît pas souhaitable qu'un débat purement local relève d'une instance nationale.
Il convient donc de revoir la définition de cet article et son champ d'application . La difficulté réside cependant par exemple dans le fait que certains projets des collectivités locales ne sont pas fondamentalement différents de ceux de l'Etat (comme des contournements de grandes villes).
Votre commission des Lois vous propose donc d'adopter un amendement rétablissant la condition d'intérêt national du projet .
2. La définition du débat public
Le deuxième alinéa du texte prévu pour l'article L. 121-1 du code de l'environnement prévoit que la participation du public peut prendre la forme d'un débat public . Il précise également son objet.
L'actuel article L. 121-1 du code de l'environnement prévoit que le débat porte alors sur les objectifs et les caractéristiques principales des projets, pendant la phase de leur élaboration .
Le projet de loi ne comprenait quant à lui aucune disposition précisant l'objet du débat public.
Cette lacune a été réparée par un amendement présenté par M. Pierre Cohen, rapporteur pour avis, et adopté par l'Assemblée nationale avec l'avis favorable du gouvernement, tendant à préciser que le débat porte sur l' opportunité , les objectifs et les caractéristiques principales du projet.
La mention de l'opportunité est nouvelle et tout à fait intéressante, car en pratique, la discussion se focalise souvent sur cet aspect, comme l'a montré la démarche d'utilité concertée pour un site aéroportuaire international (DUCSAI) relative au troisième aéroport, qui devait préfigurer les nouvelles attributions de la Commission nationale du débat public.
En effet, il y a actuellement un malentendu sur l'objet de la consultation. La population consultée sur le projet d'une grande ville ne s'intéresse que de façon annexe aux expropriations qu'il engendre, d'autant qu'en général la collectivité publique utilise des terrains expropriés depuis longtemps. Au contraire, les populations demandent à être consultées sur l'ensemble des intérêts, souvent conflictuels.
3. Les modalités de la participation du public aux différentes étapes du projet
Le troisième alinéa du texte prévu pour l'article L. 121-1 du code de l'environnement précise à quel moment la participation du public a lieu .
La participation à l 'élaboration de projets répond à une revendication récurrente du public.
L'enquête publique, de l'avis de tous, intervient trop tardivement. Le public concerné a trop souvent l'impression que les principales options du projet ont déjà été arrêtées et que l'opportunité de l'infrastructure en cause ne peut plus être remise en cause.
La convention d'Aarhus précise pourtant dans son article 6 que cette participation doit intervenir très en amont, alors même que toutes les possibilités sont encore ouvertes.
De plus, le dépistage aussi précoce que possible de projets techniquement ou socialement irréalisables préviendrait l'engagement de dépenses d'études qui pèsent parfois lourdement sur les budgets de certaines administrations ou collectivités, notamment des collectivités locales.
Or, le droit actuel ne semble connaître véritablement qu'une étape de la décision et lui attribuer une importance disproportionnée par rapport à la réalité. L'intervention d'une seule décision reconnaissant l'utilité publique d'un projet méconnaît la réalité de sa maturation progressive (qui continue également après la déclaration d'utilité publique, comme lors de la conclusion des contrats avec les constructeurs).
L'actuel article L. 121-1 du code de l'environnement circonscrit la participation du public à la phase d'élaboration du projet .
Le projet de loi explicite en le complétant ce principe .
En premier lieu, il précise ainsi que la phase d'élaboration du projet va de « l'engagement des études préliminaires jusqu'à la clôture de l'enquête publique » , qu'il s'agisse d'une enquête préalable à la réalisation d'aménagements, d'ouvrages ou de travaux susceptibles d'affecter l'environnement (prévue au chapitre III du Titre II du livre I du code de l'environnement : enquête dite « Bouchardeau »), ou d'une enquête préalable à une déclaration d'utilité publique (prévue par le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique).
Actuellement, le stade à partir duquel le débat public ne peut plus être organisé est défini par l'annexe du décret n° 96-388 du 10 mai 1996 (reproduit en annexe du présent rapport) . Il dépend à la fois de la nature du projet, de son coût ou de son ampleur.
Par ailleurs, le projet de loi introduit une nouveauté puisqu'il précise que « le cas échéant », la Commission veille au respect de bonnes conditions d'information du public du public durant la phase de réalisation du projet jusqu'à la réception des équipements et des travaux .
Dans ce dernier cas, il ne s'agit plus de participation à proprement parler, mais d'information. En effet, de nouveaux problèmes, indécelables lors de la phase d'élaboration proprement dite, peuvent surgir à l'occasion de la réalisation des travaux.
Par cette disposition, le principe de participation semble connaître une nouvelle extension . Un embryon de suivi apparaît donc, même s'il ne s'agit que d'un droit à l'information.
Cette extension s'inspire de la circulaire n° 92-71 du 15 décembre 1992 relative à la conduite des grands projets nationaux d'infrastructure, dite « circulaire Bianco », qui prévoit déjà que les préfets constituent « avec les responsables locaux concernés (élus, forces sociales, économiques, associations locales), un comité de suivi des engagements de l'Etat », devant lequel le maître d'ouvrage doit rapporter régulièrement.
Cependant, ces dispositions ne concernent pour l'instant que les grands projets nationaux d'infrastructure de l'Etat, et en pratique uniquement les lignes ferroviaires à grande vitesse et les autoroutes.
Cet article donne donc, d'une part, une base législative à ces comités de suivi et, d'autre part, en encourage la création, y compris pour les projets locaux.
Cette disposition pose toutefois problème. En effet, elle paraît augmenter les risques contentieux, le terme « le cas échéant » pouvant être utilisé par une association afin de demander l'annulation d'une procédure. Il paraît également opportun de distinguer clairement les deux phases : l'une préalable à la clôture de l'enquête publique, pendant laquelle le public peut participer à l'élaboration, et l'autre, après la clôture de l'enquête publique, pendant laquelle sa participation doit être circonscrite à une bonne information.
Votre commission des Lois vous propose donc d'adopter un amendement en ce sens, qui circonscrit cette information aux projets dont la Commission nationale du débat public a été saisie.
4. Une mission de diffusion de la culture de la concertation
Par ailleurs, le quatrième alinéa du texte prévu pour l'article L. 121-1 du code de l'environnement prévoit que la Commission nationale du débat public, outre veiller au respect de la participation du public, peut exercer une fonction de conseil sur toute question relative à la concertation avec le public, et ce tout au long de l'élaboration d'un projet .
Il s'agit d'une disposition nouvelle. L'Assemblée nationale a cependant adopté en première lecture deux amendements présentés par M. Pierre Cohen, rapporteur pour avis, avec l'avis favorable du gouvernement, afin de préciser, d'une part, que la Commission nationale du débat public peut, outre les autorités compétentes, conseiller tout maître d'ouvrage (ce qui vise les personnes privées) et, d'autre part, que cette fonction de conseil s'exerce à leur demande, afin de ne pas constituer une tutelle rampante.
Cette mission de conseil pourra donc porter sur tout projet , qu'il remplisse ou non les conditions fixées par décret en Conseil d'Etat pour pouvoir faire l'objet d'un débat public. En pratique , il s'agit donc de conseiller les maîtres d'ouvrage désireux d'organiser une concertation avec le public dans le cadre de petits projets locaux .
Cette disposition est tout à fait conforme à l'esprit du texte qui est que la Commission nationale du débat public contribue essentiellement à développer une culture de la concertation, par la voie de recommandations méthodologiques.
Enfin, le cinquième alinéa du texte prévu pour l'article L. 121-1 du code de l'environnement est en outre prévu que la Commission a également pour mission d'émettre tous avis et recommandations à caractère général ou méthodologiqu e de nature à favoriser et développer la concertation avec le public.
Le rapport du Conseil d'Etat de 1999 « L'utilité publique aujourd'hui » préconisait déjà que la Commission nationale du débat public endosse ce genre de responsabilités et soit chargée d'élaborer des « guides de bonne pratique » en matière de concertation, ce qui justifie qu'elle soit érigée en autorité administrative indépendante. Ces guides, dépourvus de caractère réglementaire , devraient, si la Commission nationale du débat public parvient à asseoir sa crédibilité, s'imposer naturellement aux maîtres d'ouvrages, soucieux de prévenir les risques de contentieux et d'assurer la sécurité juridique de leurs opérations.
La Commission nationale du débat public a donc vocation à devenir une instance permanente de réflexion et de proposition.
Le groupe d'étude du Conseil d'Etat envisageait également que la Commission nationale du débat public puisse être associée à l'activité normative s'exerçant en matière d'information et de consultation. Ceci paraît cependant prématuré.
5. Une magistrature d'influence
D'une manière plus générale, on peut s'interroger sur la crédibilité de la Commission nationale du débat public, qui quoiqu'érigée en autorité administrative indépendante, ne dispose d' aucun pouvoir d'injonction ni de sanction .
Le rapport public du Conseil d'Etat 2001 relatif aux autorités administratives indépendantes soulignait l'extrême hétérogénéité des pouvoirs des autorités administratives indépendantes : « Elles disposent de pouvoirs plus ou moins étendus qui, dans certains cas, combinent à la fois un pouvoir de réglementation, d'autorisation individuelle, de contrôle, d'injonction, de sanction, voire même de nomination et se limitent, dans d'autres cas, à un simple pouvoir d'influence (...) ».
S'agissant de la Commission nationale du débat public, elle exercera principalement une magistrature d'influence puisqu'elle n'aura ni pouvoir réglementaire, ni pouvoir d'injonction ou de sanction . Elle ne sera d'ailleurs pas la seule autorité administrative dans cette situation, puisque tel est également le cas du Médiateur de la République par exemple.
A titre principal, l'influence de la Commission nationale du débat public se construira en fonction de la crédibilité qu'elle acquerra au fil des débats. Ce pouvoir ne s'étend pas à une capacité d'appréciation sur le fond des projets qui lui sont soumis.
Cependant, elle pourra décider de l'opportunité d'un débat public et des modalités de son organisation . Par ailleurs, un avis négatif obérera l'avenir d'un projet et le maître d'ouvrage devra en tenir compte.
Néanmoins, la sanction du non respect d'une décision de la Commission nationale du débat public est envisageable au contentieux à deux étapes :
- à l'issue du débat public , le maître d'ouvrage doit prendre une décision indiquant son intention de poursuivre le projet et ses modalités. Si le maître d'ouvrage n'a pas respecté les prescriptions de la Commission nationale du débat public, cette décision faisant grief (texte prévu pour l'article L. 121-12 du code de l'environnement) pourra être attaquée par la voie du recours pour excès de pouvoir ;
- soit en aval, lors de la déclaration d'utilité publique, si le maître d'ouvrage n'a pas réalisé le débat demandé et s'il n'a pas pris la décision post débat public par la voie de l'exception d'illégalité .
Le système adopté est un système souple, qui minimise les procédures et les décisions supplémentaires afin de ne pas compliquer les textes.
Le juge devra cependant rythmer son intervention en sachant que le développement de réglementations minutieuses crée un risque important d'annulation sur la forme. Ces affaires doivent bénéficier d'un traitement d'urgence. Avec l'arrivée de règles plus souples, entraînant moins de formalisme automatique, il appartiendra au juge de nuancer davantage son contrôle de la forme et de raisonner plus en terme de sincérité de la consultation , comme il le fait en matière électorale. S'il ne retrouve pas cette sincérité, il annule la procédure et demande une nouvelle consultation.
Afin de tenir compte du fait que la Commission nationale du débat public ne dispose ni du pouvoir d'injonction ni du pouvoir de sanction, ont été adoptés en première lecture à l'Assemblée nationale avec l'avis favorable du Gouvernement des amendements du rapporteur pour avis M. Pierre Cohen, remplaçant le terme « garantir » par « veiller à ».
Par ailleurs, si le commissaire enquêteur a pour fonction essentielle de donner son avis sur le bien fondé du projet, il n'en va pas de même du médiateur, à la fois mémoire et modérateur du débat, qui n'aura pas pour mission de donner un avis sur le fond du débat, mais de veiller à la bonne organisation du débat public .
Cependant, cette précision ne figure pas dans le projet de loi.
Un amendement tendant à l'indiquer a été présenté en première lecture à l'Assemblée nationale par MM. Léonce Deprez et Marc-Philippe Daubresse, du groupe UDF. Il a néanmoins été rejeté, M. Pierre Cohen, rapporteur, ayant émis un avis défavorable, ainsi que le Gouvernement, en arguant que l'exposé des motifs précisait bien que la mission de la Commission se limitait à organiser le débat public sans donner d'avis quant au contenu du projet.
L'exposé des motifs n'ayant pas de valeur normative, il parait utile de prévoir expressément cette disposition, et votre rapporteur vous propose d'adopter un amendement en ce sens.
Enfin, ont été adoptés deux amendements rédactionnels du rapporteur ayant reçu l'avis favorable du Gouvernement, ainsi qu'un amendement du rapporteur supprimant une mention aux modalités de l'organisation du débat public, traitées en détail à l'article L. 121-8 du code de l'environnement (avis favorable du Gouvernement).
Votre commission des Lois vous propose donc d' adopter trois amendements, puis d'adopter le texte prévu pour l'article L. 121-1 du code de l'environnement ainsi modifié .
Article L. 121-2 du code de
l'environnement
Dérogations aux dispositions relatives au
débat public
Le projet de loi procède à une réécriture totale de cet article, qui traite actuellement des modalités de saisine de la Commission nationale du débat public, question renvoyée par le projet de loi au nouvel article L. 121-7 du même code.
Cet article prévoit des dérogations aux dispositions du chapitre Ier du titre II du livre Ier du code de l'environnement, tel que modifié par le présent projet de loi, c'est à dire relatif au débat public et à la Commission nationale du débat public.
Ces dispositions ne seront donc pas applicables aux documents d'urbanisme (c'est à dire les plans locaux d'urbanisme, les schémas de cohérence territoriale et les cartes communales), ni aux opérations d'aménagement prévues par le livre III du code de l'urbanisme. Ces opérations sont définies à l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme comme celles ayant pour objet de « mettre en oeuvre un projet urbain , une politique locale de l'habitat, d'organiser le maintien, l'extension ou l'accueil des activités économiques, de favoriser le développement des loisirs et du tourisme, de réaliser des équipements collectifs, de lutter contre l'insalubrité, de permettre le renouvellement urbain, de sauvegarder ou de mettre en valeur le patrimoine bâti ou non bâti et les espaces naturels ». Elles comprennent donc les zones d'aménagement concerté.
Cette dérogation se justifie par l'existence d'une procédure de consultation spécifique, prévue à l'article L. 300-2 du code de l'urbanisme . Aux termes de cet article, le conseil municipal ou l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale adopte une délibération portant à la fois sur les objectifs poursuivis et sur les modalités d'une concertation associant pendant toute la durée d'élaboration du projet les habitants, les associations locales et « les autres personnes concernées ».
Cette procédure, introduite par la loi n° 85-729 du 18 juillet 1985 relative à la définition et à la mise en oeuvre de principes d'aménagement, semble bien adaptée. Afin de ne pas encore alourdir la procédure en superposant des dispositifs de concertation, alors même que les procédures semblent avoir atteint une limite en terme de complexité, il est proposé de ne rendre applicable que la procédure de l'article L. 300-2 du code de l'urbanisme en cette matière.
Par ailleurs, il faut distinguer entre les plans et programmes , d'une part, qui relèvent de la concertation prévue à l'article L. 300-2 du code de l'urbanisme en amont, et certains projets visés à l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme, d'autre part, dont le texte prévu pour l'article L. 121-2 du code de l'environnement prévoit qu'ils pourraient être soumis à la procédure de débat public.
Il s'agit de projets d'investissement dont la liste sera fixée par décret en Conseil d'Etat. Ces projets devraient être ceux déjà listés dans l'annexe au décret n° 96-388 du 10 mai 1996 pris en application de la loi du 2 février 1995, c'est à dire les grandes infrastructures terrestres, d'équipements culturels, sportifs, industriels, scientifiques ou touristiques .
En effet, certains projets d'aménagement particulièrement importants, tant d'un point de vue socio-économique que d'un point de vue environnemental, devraient légitimement pouvoir être soumis à débat public. Tel est par exemple le cas de projets de création de zones d'aménagement concerté devant accueillir de grands équipements, comme le stade de Saint-Denis.
Dans ce cas et dans un souci de simplicité, la procédure de concertation prévue à l'article L. 300-2 du code de l'urbanisme ne serait pas utilisée.
Votre commission des Lois vous propose d'adopter le texte prévu pour l'article L. 121-2 du code de l'environnement sans modification .
Section 2
Composition et fonctionnement de
la
Commission nationale du débat public
Article L. 121-3 du code de
l'environnement
Composition de la Commission nationale du débat
public
1. La composition actuelle
L'actuel article L. 121-3 du code de l'environnement relatif à la composition de la Commission nationale du débat public indique assez succinctement qu'elle se compose « à parts égales » :
- de parlementaires et d'élus locaux ;
- de membres du Conseil d'Etat et des juridictions des ordres administratif et judiciaire ;
- de représentants d'associations de protection de l'environnement agréées au titre de l'article L. 141-1 exerçant leur activité sur l'ensemble du territoire national, de représentants des usagers et de personnalités qualifiées.
Il prévoit en outre qu'elle est présidée par un conseiller d'Etat.
L'article 2 du décret n° 96-388 du 10 mai 1996 précité en a précisé la composition. Actuellement, la Commission compte 18 membres :
- un conseiller d'Etat en activité ou honoraire, qui est son président, actuellement M. Pierre Zémor, le premier président ayant été M. Hubert Blanc ;
- un membre du Conseil d'Etat, un membre de la Cour de cassation, un membre de la Cour des comptes, un membre du corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, un magistrat des cours et tribunaux de l'ordre judiciaire ;
- un député et un sénateur (depuis le 3 mai 2001 et jusqu'au 3 mai 2006, M. Jean Bizet) ;
- un président de conseil régional, un président de conseil général, deux maires ;
- deux représentants d'associations agréées de protection de l'environnement, deux représentants des usagers ;
- deux personnalités qualifiées.
On retrouve donc l'idée d'un équilibre entre trois collèges (magistrats, élus et personnalités qualifiées).
2. Le projet de loi initial
La nouvelle rédaction de l'article L. 121-3 du code de l'environnement ne bouleverse pas cette composition, mais porte à 21 le nombre de membres.
Cependant, la composition de la commission passe du domaine réglementaire au domaine législatif, puisqu'elle acquiert le statut d'autorité administrative indépendante.
Le projet de loi ne précise plus la qualité du président mais introduit deux vice-présidents.
Cette modification devra permettre au gouvernement de choisir plus largement et plus facilement le président de la Commission nationale du débat public.
Ces trois membres permanents sont nommés par décret simple. En effet, la nomination par décret simple est apparue la plus courante pour les autorités administratives indépendantes, et est validée par le Conseil d'Etat.
Ces personnes auront notamment à assurer la montée en puissance de la Commission, puisque l'objectif du Gouvernement est de parvenir à une vingtaine de débats par an.
La Commission ne comptera plus de magistrat des cours et tribunaux de l'ordre judiciaire parmi ses membres.
Le nombre d'élus locaux nommés sur proposition des associations représentatives d'élus passe de quatre à cinq, afin d'introduire parmi les membres de la Commission nationale du débat public un représentant d'établissement public de coopération intercommunale.
De plus, il est prévu que le nombre de personnes qualifiées passe de deux à trois et que l'une d'entre elles devra désormais avoir exercé les fonctions de commissaire-enquêteur, cette dernière précision paraissant en effet tout à fait souhaitable.
S'agissant des rémunérations, le projet de loi prévoit que le président, et les vice-présidents, qui exercent leurs fonctions à plein temps, sont rémunérés (les fonctions des autres membres donnant simplement lieu à indemnité). Il s'agit là d'une disposition que l'on retrouve couramment dans les lois régissant les autorité administratives indépendantes. Ceci devrait permettre à la Commission d'asseoir financièrement son indépendance.
3. Les modifications apportées par l'Assemblée nationale
L'Assemblée nationale a adopté un amendement de M. Pierre Cohen, rapporteur pour avis, apportant des précisions quant à la désignation de chacun des membres. Le Gouvernement a indiqué qu'il ne pensait pas entrer dans un tel niveau de détail, mais il s'en est remis à la sagesse de l'Assemblée.
Le rapporteur a cependant indiqué qu'afin de garantir l'indépendance de la Commission nationale du débat public, désormais autorité administrative indépendante, il convenait d'inscrire dans la loi la procédure de désignation de ses membres, ainsi qu'il avait été fait par exemple, pour la Commission nationale de l'informatique et des libertés, la Commission des opérations de bourse, l'Autorité de régulation des télécommunications, ou plus récemment la Commission de régulation de l'électricité.
Les conditions de nomination des membres sont donc minutieusement décrites.
Il est ainsi prévu que le député et le sénateur sont nommés respectivement par le président de l'Assemblée nationale et par le président du Sénat, sur proposition de la commission permanente de leur assemblée compétente en matière d'équipement, de travaux publics et d'aménagement du territoire (la commission des Affaires économiques au Sénat).
Les élus locaux sont pour leur part nommés par décret sur proposition des associations représentatives des élus concernés, les membres du conseil d'Etat, de la cour de cassation, de la Cour des comptes étant quant à eux élus par leur assemblée générale, le membre du corps des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel étant lui nommé par décret sur proposition du Conseil supérieur des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Les représentants d'associations de protection de l'environnement agréées, des consommateurs et des usagers sont nommés par arrêté du Premier ministre, respectivement sur proposition du ministre chargé de l'environnement, du ministre chargé de l'économie et du ministre chargé des transports.
Les personnalités qualifiées sont nommées par décret du Premier ministre sur proposition du ministre chargé de l'environnement, du ministre chargé de l'industrie et du ministre chargé de l'équipement.
Il est toujours prévu deux représentants d'associations de protection de l'environnement, mais les deux représentants des usagers seront désormais des représentants des usagers et des consommateurs.
L'Assemblée nationale a précisé que les membres (y compris le président et les vice-présidents) sont nommés pour 5 ans ou pour la durée de leur mandat . En effet, les élus membres de la Commission nationale du débat public ne le sont pas intuitu personae mais en fonction de leur mandat. A la fin de leur mandat, ils quittent automatiquement la Commission nationale du débat public.
Le décret de 1996 prévoyait que le président et les membres étaient nommés pour une durée de 5 ans, leur mandat étant renouvelable une fois.
Le projet de loi était plus laconique. Il prévoyait que le président et les vice-présidents sont nommés par décret pour une durée de 5 ans et que leur mandat est renouvelable une fois, mais il n'était rien précisé pour les membres. Pour pallier cette imprécision, l'amendement du rapporteur adopté par l'Assemblée nationale en première lecture prévoit que le mandat des membres (y compris le président et les vice-présidents) est renouvelable une fois.
Au contraire, le rapport du Conseil d'Etat préconisait une professionnalisation de la Commission nationale du débat public, dont les membres permanents devraient être des personnalités de haut niveau présentant toutes les garanties d'impartialité et de compétence. Ils devraient selon lui être désignés pour un mandat de 4-5 ans non renouvelable et lui consacrer une part importante de leur activité professionnelle.
4. Les propositions de votre commission des Lois
Il convient de supprimer la limite d'âge de 65 ans . En effet, le rôle du président de la Commission nationale du débat public est essentiellement d'être un modérateur du débat, même si une telle fonction peut apparaître frustrante. Cette disposition, si elle était maintenue, conduirait à se priver de personnalités ayant montré à bien des égards leur aptitude à assumer des missions comme celle de la présidence de la Commission nationale du débat public. Votre commission vous proposera donc d'adopter un amendement en ce sens.
En outre, il apparaît que 5 élus locaux sur 21 membres représente une proportion insuffisante, étant donnée l'implication des élus locaux dans ces projets et leur impact sur le territoire des communes.
Votre commission des Lois vous propose d'adopter un amendement portant de cinq à six le nombre d'élus locaux et supprimant la personnalité qualifiée nommé par le ministre chargé de l'environnement, étant donné que deux représentants d'associations de protection de l'environnement seront membres.
Enfin, il ne parait pas nécessaire de préciser dans la loi la commission compétente afin de proposer les parlementaires amenés à siéger au sein de la Commission nationale du débat public. Votre commission des Lois vous propose donc d'adopter un amendement supprimant cette précision qui n'est pas de nature législative.
S'agissant des commissions particulières qui seront mises en place à l'occasion de débats particuliers, il n'est pas prévu de règles de composition et de désignation. En effet, l'objectif du Gouvernement étant de passer d'un débat public à une vingtaine par an, il ne faut pas leur imposer trop de contraintes, puisqu'il peut être délicat de trouver des personnalités qualifiées mobilisables pendant parfois 6 mois. Il apparaît en outre que l'article L. 121-5 du code de l'environnement, tel que modifié par le présent projet de loi relatif aux incompatibilités, permettra d'assurer l'indépendance et l'impartialité de ces personnes vis à vis notamment du maître d'ouvrage.
Votre commission des Lois vous propose donc d'adopter trois amendements , puis d' adopter le texte prévu pour l'article L. 121-3 du code de l'environnement ainsi modifié .
Article L. 121-4 du code de
l'environnement
Personnels de la Commission nationale du débat
public
Actuellement, l'article L. 121-4 du code de l'environnement traite du bilan du débat public. Tout le chapitre III étant réécrit par le projet de loi, ces dispositions se trouvent insérées dans un nouvel article L. 121-10, que l'on étudiera ultérieurement.
Le projet de loi prévoit que la Commission nationale du débat public disposera de deux catégories de personnels.
- D'une part, elle pourra bénéficier de fonctionnaires mis à disposition 235 ( * ) .
- D'autre part, la Commission nationale du débat public pourra recruter (grâce à son budget) des agents contractuels . Ceux-ci seront donc des agents contractuels de droit public directement recrutés par le président de la Commission nationale du débat public.
Cette solution avait été préconisée par le rapport du Conseil d'Etat de 1999 « L'utilité publique aujourd'hui ». Elle devrait permettre d'avoir des personnes compétentes en fonction des différents sujets dont aura à traiter la Commission nationale du débat public. Une technicité accrue doit également permettre aux commissions particulières d'être plus crédibles, tant vis à vis des maîtres d'ouvrage que du public.
Actuellement, le secrétariat de la Commission nationale du débat public est assuré par la Direction des études économiques et de l'évaluation environnementale du ministère chargé de l'environnement.
Un amendement rédactionnel de M . Pierre Cohen, rapporteur, a été adopté avec l'avis favorable du Gouvernement.
Votre commission des Lois vous propose d' adopter le texte prévu pour l'article L. 121-4 du code de l'environnement sans modification .
Article L. 121-5 du code de
l'environnement
Incompatibilités
Actuellement, l'article L. 121-5 du code de l'environnement précise qu'il revient à un décret en Conseil d'Etat de déterminer les conditions d'application du chapitre Ier du titre II du livre Ier du code de l'environnement. Le projet de loi réécrivant totalement ce chapitre, l'article L.121-5 du code de l'environnement traitera désormais des incompatibilités, qui étaient précédemment traitées à l'article L. 121-3 du code de l'environnement.
Le paragraphe IV de l'actuel article L. 121-3 du code de l'environnement prévoit ainsi que les personnes intéressées à l'opération à titre personnel ou en raison de leurs fonctions ne pouvaient faire partie de la commission particulière chargée d'organiser le débat public sur ladite opération.
Le projet de loi étend cette disposition à la commission nationale et précise que ceci est valable qu'il s'agisse d'un débat ou d'une procédure de concertation . Il est donc tenu compte de l'élargissement des moyens d'action de la Commission nationale du débat public et des commissions particulières.
Il s'agit d'une disposition classique, qui devrait permettre de lever les doutes quant à l'impartialité des membres des commissions particulières soulevés précédemment.
Votre commission des Lois vous propose d' adopter le texte prévu pour l'article L. 121-5 du code de l'environnement sans modification .
Article L. 121-6 du code de
l'environnement
Fonctionnement de la Commission nationale du débat
public
Ce nouvel article du code de l'environnement vise à tirer les conséquences sur le plan financier du nouveau statut d'autorité administrative indépendante acquis par la Commission nationale du débat public.
Actuellement, le décret du 10 mai 1996 précité précise que les crédits nécessaires à l'accomplissement des missions de la commission sont inscrits au budget du ministère de l'environnement .
Or, la Commission nationale du débat public devrait connaître une augmentation importante de ses charges du fait des seuils prévus en matière de saisine ou d'information obligatoire de la Commission nationale du débat public. Pour ce faire, la Commission nationale du débat public disposera d'un budget de fonctionnement (dont les crédits seront inscrits au budget de l'Etat).
En effet, même si l'organisation d'un débat public est supportée financièrement par le maître d'ouvrage, elle devra faire face aux dépenses de gestion courante liées notamment aux travaux d'instruction des dossiers préalablement à la tenue d'un débat public. Elle devra également rémunérer son personnel, cette dépense -contrairement aux frais de tenue du débat public- ne pouvant être mise à la charge du maître d'ouvrage. Cette précision ne figure pas dans le projet de loi, puisqu'elle est de nature réglementaire.
Comme cela est généralement le cas pour les autres autorités administratives indépendantes, il est également précisé que le président de la Commission nationale du débat public est ordonnateur des dépenses et a autorité sur les services.
Pour éviter toute tutelle budgétaire a priori sur la Commission nationale du débat public, qui nuirait, sinon à son indépendance, du moins à sa crédibilité, il est prévu que les dispositions de la loi du 10 août 1922 relative au contrôle financier ne sont pas applicables aux dépenses de la Commission nationale du débat public, ce qui constitue une disposition classique s'agissant des autorités administratives indépendantes.
Votre commission des Lois vous propose d' adopter le texte prévu pour l'article L. 121-6 du code de l'environnement sans modification .
Section 3
Organisation du débat
public
Article L. 121-7 du code de
l'environnement
Modalités de saisine de la Commission nationale du
débat public
Cet article détermine les modalités de saisine de la Commission nationale du débat public.
L'innovation principale consiste dans l'introduction d'une obligation de saisine de la Commission nationale du débat public par le maître d'ouvrage s'agissant des projets les plus importants. De plus, certains projets devront être rendus publics par le maître d'ouvrage, afin de permettre le cas échéant une saisine de la Commission nationale du débat public.
Actuellement, les modalités de saisine de la Commission nationale du débat public sont définies par l'article L. 121-2 du code de l'environnement, qui ne prévoit pas de saisine obligatoire de la Commission et encadre strictement les personnes susceptibles de saisir la Commission.
Cet article reprend dans une large mesure les préconisations du rapport du Conseil d'Etat.
1. Institution d'une saisine obligatoire de la commission nationale du débat public
Le paragraphe I constitue donc l'avancée principale en instituant une saisine obligatoire pour certains projets .
Ces projets sont définis comme étant « tous les projets d'aménagement ou d'équipement qui, par leur nature, leurs caractéristiques techniques ou leur coût prévisionnel, tel qu'il peut être évalué lors de la phase d'élaboration, répondent à des critères ou excèdent des seuils fixés par décret en Conseil d'Etat » .
Il conviendra de cadrer la procédure de saisine obligatoire pour éviter que des projets de moindre importance ne viennent encombrer la Commission nationale du débat public . Selon les informations fournies à votre rapporteur, les critères financiers et techniques auxquels devra répondre le projet pour donner lieu à une saisine obligatoire devraient largement s'inspirer de ceux figurant dans l'annexe du décret du 10 mai 1996 précité. Toutefois, certains seuils pourraient être revus à la baisse.
Actuellement, le champ d'action de la Commission nationale du débat public se limite aux seuls très grands projets d'infrastructures, selon des critères physico-financiers : coût minimum de 2 à 4 milliards de francs (300 à 600 millions d'euros), 30 kilomètres d'autoroutes ou de voies ferrées, 10 kilomètres pour les lignes à très haute tension, les centres de production nucléaire de base et un certain nombre d'équipements massifs.
Or, les seuils pressentis, par exemple, pour les grandes infrastructures linéaires, seraient de l'ordre du milliard de francs (150 millions d'euros) pour le seuil haut (saisine obligatoire de la Commission nationale du débat public par le maître d'ouvrage) et de 500 millions de francs (76 millions d'euros) pour le seuil bas (information obligatoire), l'établissement du seuil bas devant correspondre à l'annexe de la convention d'Aarhus pour les projets concernés.
Il apparaît que la fixation de seuils relativement faibles banaliserait la procédure de débat public , alors que l'esprit de la loi est bien de faire du débat public une procédure adaptée aux grands projets.
Particulièrement en matière routière et ferroviaire, on risque d'assister à un engorgement très rapide de la Commission nationale du débat public, au moins au stade de l'instruction des dossiers.
Cependant, il est difficile de déterminer les seuils dans la loi, ceux-ci devant différer en fonction de la catégorie des projets.
Il faut donc obtenir du ministre l'engagement que les seuils retenus respecteront l'esprit de la réforme.
Il est intéressant de noter qu'il reviendra au maître d'ouvrage (ou à la personne publique responsable du dossier, s'il n'est pas identifié) d'en informer la Commission en lui adressant un dossier relatif au projet.
Si le maître d'ouvrage ne saisit pas la Commission nationale du débat public, l'enquête publique ne pourra pas être ouverte (en vertu du texte prévu pour l'article L. 121-11 du code de l'environnement), ce qui constitue une contrainte forte.
Le deuxième alinéa du texte prévu pour le paragraphe I de l'article L. 121-7 du code de l'environnement définit le contenu de ce dossier . Il devra indiquer les objectifs et les principales caractéristiques techniques du projet, ainsi que les enjeux socio-économiques, le coût estimatif et l'identification des impacts significatifs du projet sur l'environnement ou l'aménagement du territoire.
A été adopté un amendement rédactionnel de M. Pierre Cohen, rapporteur pour avis, après avoir reçu un avis favorable du Gouvernement.
Il n'est cependant pas précisé à quel moment le maître d'ouvrage devra saisir la Commission nationale du débat public . Cette omission est volontaire. En effet, il apparaît que le maître d'ouvrage sera mieux à même d'apprécier à quel stade de l'élaboration il est le plus opportun de saisir la Commission nationale du débat public, en sachant que le projet ne doit pas être trop avancé, celui-ci servant surtout de « réactif » afin de susciter le débat et des contre-propositions.
Par ailleurs, les processus d'élaboration des projets étant variables selon les catégories d'ouvrages, il est difficile de définir dans la loi un moment à partir duquel serait défini un délai de saisine.
Toutefois, ceci devra intervenir obligatoirement avant la date au-delà de laquelle un débat n'est plus possible (lors de la publication au Journal officiel des principales caractéristiques de l'ouvrage par exemple).
2. Une saisine élargie de la commission nationale du débat public
Le paragraphe II traite quant à lui des modalités de saisine facultative de la Commission nationale du débat public .
Cette possibilité était également préconisée par le rapport du Conseil d'Etat qui ne prévoyait cependant pas de seuil, tout en insistant sur la nécessité d'une saisine stricte afin de ne pas encombrer la Commission nationale du débat public.
Sont concernés les projets d'aménagement ou d'équipement répondant à l'un de ces deux critères :
- un coût prévisionnel, qui, sans atteindre le seuil défini précédemment, est supérieur à un seuil qui sera défini par décret en Conseil d'Etat ;
- des critères techniques conformes à ceux fixés par décret en Conseil d'Etat pour chaque nature de projets.
Les seuils devraient être abaissés, selon les informations fournies à votre rapporteur. Le Conseil d'Etat insistait cependant sur le fait qu'il ne fallait pas donner à la Commission nationale du débat public une vocation générale. Plusieurs milliers d'enquêtes étant réalisées chaque année, il importe d'éviter que la Commission nationale du débat public soit submergée par des demandes plus ou moins dilatoires pour des projets d'importance modeste.
Dans ce cas également, les projets sont rendus publics par le maître d'ouvrage (ou la personne publique responsable du projet s'il ne peut être identifié), qui en publie les objectifs et les caractéristiques essentielles. Ceci constitue une obligation pour le maître d'ouvrage. Ces projets, même s'ils sont d'une moindre ampleur que ceux qui donnent lieu à saisine obligatoire, peuvent ainsi faire l'objet d'un débat public.
L'information effectuée, il est alors possible de saisir la Commission nationale du débat public qui décide de la pertinence d'organiser un débat public .
Votre commission des Lois vous propose d'adopter un amendement rédactionnel.
3. L'élargissement du mode de saisine facultative de la Commission nationale du débat public
Actuellement, l'article L. 121-2 du code de l'environnement ne connaît que cette saisine facultative.
Le deuxième alinéa du paragraphe II du texte prévu pour cet article indique les personnes habilitées à saisir la Commission nationale du débat public.
Actuellement, l'article L. 121-2 du code de l'environnement prévoit que la Commission nationale du débat public peut être saisie :
- conjointement par les ministres dont dépendent les projets pouvant donner lieu à débat public et par le ministre chargé de l'environnement ainsi que, pour les projets des collectivités territoriales ou de leurs établissements publics, par le ministre chargé des collectivités locales, après consultation desdites collectivités territoriales ;
- par au moins 20 députés ou 20 sénateurs ou par les conseils régionaux territorialement concernés par le projet. Dans ces cas, le décret du 10 mai 1996 précise que la Commission nationale du débat public doit alors solliciter l'avis des ministres intéressés sur le caractère d'intérêt national du projet, sur son enjeu socio-économique et sur son impact sur l'environnement. Au vu de cet avis, la Commission décide alors ou non l'organisation d'un débat public ;
- par les associations agréées de protection de l'environnement exerçant leur activité sur l'ensemble du territoire national. La commission sollicite alors l'avis des ministres intéressés si elle envisage de donner suite à la demande. La Commission nationale du débat public en examine donc la recevabilité avant même de solliciter l'avis des ministres intéressés.
Pour les quatre débats déjà organisés, on compte une saisine conjointe du ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement et du ministre de l'équipement (pour le port du Havre), une saisine parlementaire (pour le projet d'autoroute A 32 Metz-Nancy) et deux saisines par l'Association France Nature Environnement (pour le projet de ligne à très haute tension entre Boutre et Carros et le projet de TGV Rhin-Rhône).
Ces modalités de saisine de la Commission nationale du débat public apparaissent donc assez restrictives, même s'il ne semble pas que le faible taux de saisine de la Commission nationale du débat public depuis son installation soit véritablement lié à cette question, la plupart des saisines ayant été déclarées irrecevables en raison de la publication au Journal officiel de la décision ministérielle de prise en considération.
Cette saisine est d'autant plus restrictive que soumise à l'avis des ministres.
Le projet de loi assouplit considérablement les modalités de saisine, et ceci à plusieurs niveaux.
L'avis des ministres intéressés est supprimé. En effet, la Commission nationale du débat public acquerrant le statut d'autorité administrative indépendante, le maintien d'une telle disposition paraissait difficile.
Enfin, le champ des personnes pouvant saisir la Commission nationale du débat public est élargi :
- au maître d'ouvrage (ou à la personne publique responsable du projet si le maître d'ouvrage ne peut encore être déterminé) ;
- à un seul conseil général ou à un seul conseil régional (une décision de leur organe délibérant saisissant la Commission nationale du débat public) territorialement intéressés ;
- à un établissement public de coopération intercommunale ayant compétence en matière d'aménagement de l'espace territorialement intéressé.
Les associations agréées de protection de l'environnement exerçant leur activité sur l'ensemble du territoire national conservent leur faculté de saisine.
Le projet de loi initial modifiait la condition de vingt sénateurs ou vingt députés pour saisir la Commission nationale du débat public, en prévoyant qu'il s'agissait dorénavant de vingt parlementaires, sans distinguer entre les deux assemblées. A l'initiative de M. Pierre Cohen, rapporteur pour avis, l' Assemblée nationale a en première lecture ramené ce nombre à trois membres du Parlement (sans distinguer sénateurs ou députés), estimant qu'il n'était pas possible qu'un seul établissement public de coopération intercommunale puisse saisir la Commission nationale du débat public, et que soit maintenue l'exigence de vingt parlementaires. Sur ce point, Mme Dominique Voynet, alors ministre de l'environnement, s'en était remise à la sagesse de l'Assemblée nationale, reconnaissant que vingt était un chiffre excessif mais craignant que trois soit trop peu.
Votre commission des Lois considère pour sa part que l'abaissement de la condition à trois parlementaires n'est pas justifiée, ce type de saisine devant avoir un caractère d'intérêt plus national. Par conséquent, elle vous propose d'adopter un amendement rétablissant à vingt le nombre de sénateurs ou de députés pouvant saisir la Commission nationale du débat public .
En contrepartie, votre commission des Lois vous propose de permettre qu'une commune territorialement intéressée puisse saisir la Commission nationale du débat public . Elle vous propose donc d'adopter un amendement en ce sens.
S'agissant de cette saisine facultative, et contrairement au cas où la saisine est obligatoire, le projet de loi prévoit que le délai de saisine sera fixé par décret, afin de ne pas bloquer la procédure et d'éviter des contentieux ultérieurs. Votre commission des Lois vous propose d'adopter un amendement prévoyant que ce délai de saisine est de deux mois à partir du moment où le maître d'ouvrage a rendu public son projet dans un but de clarification, et afin d'éviter d'allonger inutilement la procédure.
Le troisième alinéa du paragraphe II prévoit que sur demande de la Commission nationale du débat public, le maître d'ouvrage constitue un dossier présentant les mêmes caractéristiques qu'en cas de saisine obligatoire. C'est notamment au vu de ce dossier que la Commission décidera ou non d'organiser un débat public .
Votre commission vous propose d'adopter un amendement précisant que le maître d'ouvrage transmet lui-même un dossier à la Commission nationale du débat public .
La teneur de ce dossier, qui est destiné à s'enrichir tout au long du débat, est essentielle. Le dossier final de la DUCSAI a ainsi comporté plus de 1.500 pages. Cependant, il convient avant tout de permettre une meilleure accessibilité de l'information. En effet, trop d'information tue l'information, et la constitution d'un index thématique paraît être un préalable indispensable. Par ailleurs, on constate une véritable asymétrie d'information entre un expert et un citoyen moyen, du fait de la nature très technique et donc difficilement appréhendable de la plupart des documents. La fourniture de synthèses intelligibles constitue une revendication récurrente des associations.
En première lecture à l'Assemblée nationale ont été adoptés des amendements présentés par le rapporteur pour avis, M. Pierre Cohen, tendant à :
- préciser que la Commission nationale du débat public est saisie « d'une demande de débat public » afin de bien préciser qu'elle n'est pas saisie du projet. Le Gouvernement a donné un avis défavorable, estimant que la rédaction de l'amendement introduisait plus de formalisme et donc de risques contentieux ;
- préciser que le maître d'ouvrage doit publier les objectifs de son projet lorsque celui-ci doit donner lieu à une information préalable du public (avis favorable du Gouvernement).
En outre, votre commission des Lois vous propose d'adopter deux amendements rédactionnels.
Votre commission des Lois vous propose donc d'adopter sept amendements, puis d' adopter le texte prévu pour l'article L. 121-7 du code de l'environnement ainsi modifié.
Article L. 121-8 du code de
l'environnement
Suites données à la saisine
de la
Commission nationale du débat public
Ce nouvel article du code de l'environnement précise les critères à partir desquels la Commission nationale du débat public se prononce sur l'organisation ou non d'un débat public, les modalités de cette décision et ses conséquences financières.
1. Pouvoir d'appréciation de la Commission nationale du débat public
En effet, la Commission nationale du débat public a un pouvoir d'appréciation lui permettant de refuser de se saisir d'une affaire lorsqu'elle estime son intervention est inutile. Cette précision est essentielle afin de déterminer la nature de la Commission nationale du débat public.
La solution préconisée par le rapport du Conseil d'Etat de créer des instances déconcentrées dont le nombre (de 5 à 10) et le ressort pourraient être calqués sur ceux des cours administratives d'appel, l'instance nationale disposant d'un pouvoir d'évocation, n'a finalement pas été retenue, car il lui a été préféré une instance plus souple, contribuant à diffuser une culture de la concertation et des prescriptions méthodologiques plutôt que se saisissant de tous les projets.
Cette volonté, à laquelle souscrit totalement votre commission, pourrait cependant être battue en brèche par l'imprécision des dispositions relatives aux seuils, respectivement prévus pour définir les projets devant obligatoirement être soumis à la Commission nationale du débat public, et d'autre part ceux devant faire l'objet d'une publicité du maître d'ouvrage afin d'être éventuellement soumis à la Commission nationale du débat public.
L'étude de l'opportunité de l'organisation d'un débat public se fait dans les mêmes conditions, que la Commission nationale du débat public ait été saisie dans le cadre de la procédure obligatoire, ou dans celui de la procédure facultative.
Le premier alinéa du paragraphe I définit le faisceau de critères en fonction duquel la commission décide de l'opportunité de l'organisation du débat public, pour chaque projet.
La Commission nationale du débat public décide en « fonction de l'intérêt national du projet , de son incidence territoriale, des enjeux socio-économiques qui s'y attachent et de ses impacts sur l'environnement ou l'aménagement du territoire ». Ces critères sont extrêmement larges et le projet de loi ne prévoyant pas de hiérarchie entre eux, la Commission nationale du débat public devrait disposer d'une marge d'appréciation non négligeable.
On remarquera qu' à ce stade, la Commission nationale du débat public peut donc prendre en considération l'intérêt national du projet qui ne constitue cependant plus une condition pour une saisine de la Commission. Cette mention est très importante, afin d'éviter que des projets ayant une incidence purement locale soient soumis à l'instance nationale, ce qui paraît incompatible avec la décentralisation.
Votre commission a toutefois rétabli cette condition d'intérêt national à l'article L. 121-1 du code de l'environnement.
Lors de l'examen à l'Assemblée nationale a été discuté l'intérêt de laisser à la Commission nationale du débat public le pouvoir de décider en opportunité de l'organisation d'un débat public.
MM. Philippe Marchand, André Aschieri, Yves Cochet, Noël Mamère et Mme Aubert, du groupe radical, citoyen et vert, ont présenté un amendement afin de réfuter cette possibilité de filtre. En revanche, M. Pierre Cohen, rapporteur pour avis, a souligné que certains événements très importants pouvaient exiger une grande célérité (citant l'exemple de la construction du stade de France).
Mme Dominique Voynet, alors ministre de l'Environnement, a également récusé cette idée, en soulignant que le Gouvernement, en transformant la Commission nationale du débat public en autorité administrative indépendante, avait fait le pari de la responsabilité et de l'engagement des membres de la Commission nationale du débat public. Elle a estimé important que celle-ci puisse concentrer ses moyens, qui seront nécessairement limités, sur les sujets les plus intéressants.
Cet amendement n'a donc pas été adopté, ce dont votre commission des Lois se félicite.
2. Détermination des modalités d'organisation du débat public
Le deuxième alinéa du paragraphe I du texte proposé pour l'article L. 121-8 du code de l'environnement définit ensuite les modalités d'organisation du débat public , lorsque la Commission l'estime nécessaire.
Deux procédures sont alors possibles :
* La commission peut décider d'organiser elle-même un débat public.
Dans ce cas, elle doit mener un travail d'investigation et d' instruction , ce qui justifie son budget de fonctionnement ainsi que le recrutement de personnels spécialisés. Elle devra par exemple vérifier que le projet se situe à un stade suffisamment avancé pour assurer un débat public de qualité. En outre, elle valide le dossier présenté par le maître d'ouvrage, et demande éventuellement des études complémentaires.
Enfin, elle organise des réunions publiques, diffuse des informations sur ces dernières dans la presse et des dossiers établissant les positions des différents intervenants, et tient un journal du débat public.
Ainsi, lors de la DUCSAI, près de 40 réunions publiques ont été organisées, dont huit sur les sites pressentis pour accueillir un nouvel aéroport. Le dossier, enrichi tout au long du débat, comprend près de 1.500 pages. Ceci a nécessité un important travail de mise en forme.
Il est précisé que le débat public sera animé par une commission particulière constituée par la Commission nationale du débat public. Cette précision a été apportée par un amendement du rapporteur pour avis, M. Pierre Cohen, adopté en première lecture par l'Assemblée nationale, qui a reçu un avis favorable du Gouvernement. Tel est déjà le cas actuellement, la DUCSAI ayant là encore constitué une exception, puisque le président de la Commission nationale du débat public, M. Pierre Zémor, a directement organisé le débat public, une commission de suivi destinée à évaluer le débat et présidée par M. Poignant, député européen, ayant été ultérieurement mise en place.
L'objectif étant d'atteindre une vingtaine de débats publics par an, il est clair que les commissions particulières ne pourront être intégralement composées de membres de la Commission nationale du débat public .
Selon les informations fournies à votre rapporteur, elles devraient comprendre de 4 à 7 personnes, des personnalités locales et, le cas échéant, un ou plusieurs membres de la Commission nationale du débat public, la participation de ces derniers n'étant pas systématique. On peut regretter, dans ces conditions, que ne soient précisés ni les critères, ni les modalités selon lesquels les personnalités seront désignées pour être membres de commissions particulières. Celles-ci ayant une mission d'animation du débat public, elles auront à piloter chacune des réunions publiques, ce qui exige de leur part une totale indépendance.
Cependant, il faut rappeler que le texte prévu pour l'article L. 121-5 du code de l'environnement prévoit déjà des règles strictes relatives aux incompatibilités.
* Si la Commission nationale du débat public peut décider d'organiser le débat public elle-même en créant une commission particulière, elle peut également décider d'en confier l'organisation au maître d'ouvrage ou à la personne publique responsable du projet (si le projet se situe à un stade insuffisamment avancé pour permettre de le déterminer).
Cette solution peut sembler assez paradoxale .
En effet, on se retrouve clairement dans une situation dans laquelle un mélange des genres , qui a trop souvent été reproché à l'Etat, est transposé au niveau du débat public. Il est à craindre que le public doute de la crédibilité d'un tel débat, dans lequel le maître d'ouvrage choisirait les questions et déciderait du droit à la parole.
Afin d'éviter une telle situation, il est uniquement prévu que la Commission nationale du débat public définit les modalités d'organisation du débat et veille à son bon déroulement. La Commission nationale du débat public pourra ainsi intervenir en cours de débat et demander au maître d'ouvrage de compléter certaines phases ou d'apporter de nouveaux éléments d'information.
On peut cependant douter de la portée effective d'une telle disposition, en l'absence de pouvoir d'injonction ou de sanction de la commission, si elle juge que l'information fournie au public est erronée ou insuffisante. La Commission aura pour mission de veiller à ce que le droit à la contre-expertise soit effectivement mis en oeuvre. Il lui appartiendra de veiller à ce que les conclusions du débat soient entièrement tirées et à ce que les interrogations soulevées par le public reçoivent des réponses adaptées et suffisantes. Sa fonction principale sera de veiller à la transparence et à la sincérité du débat, notamment au regard de la pertinence des éléments soumis au public. Elle pourra également faire fixer par les administrations concernées un calendrier pour instruire les dossiers.
La question de faire bénéficier la Commission nationale du débat public d'un pouvoir d'injonction à l'encontre du maître d'ouvrage est complexe. Elle conduirait à faire de la Commission nationale du débat public une instance quasi-juridictionnelle ayant compétence pour suspendre un débat public en cours. Les procédures, déjà longues, pourraient être considérablement alourdies en cas de suspension d'un débat public. Si celui-ci répond à une exigence légitime de nos concitoyens, il doit cependant être mis en parallèle avec l'intérêt général qui peut s'attacher au projet soumis à débat public. Il convient de ne pas tomber dans des excès.
En outre, pourrait se poser un problème de constitutionnalité, un tel pouvoir pouvant être analysé comme une atteinte au principe de libre administration des collectivités territoriales, lorsqu'elles sont maîtres d'ouvrages.
Néanmoins, la Commission nationale du débat public n'est pas totalement dépourvue de pouvoir.
Si un maître d'ouvrage ne prenait pas en compte les observations émises par la Commission sur le déroulement du débat public, il serait possible de contester ultérieurement les modalités d'organisation du débat devant le juge administratif .
En effet, il est prévu au nouvel article L. 121-10 du code de l'environnement qu'il revient à la Commission nationale du débat public de publier, à l'issue du débat, un compte-rendu et d'en dresser le bilan. Ses observations au maître d'ouvrage devront donc figurer dans ce bilan .
En outre, le nouvel article L. 121-12 du code de l'environnement dispose que dans un délai de six mois après la publication du bilan, le maître d'ouvrage doit décider, par un acte publié, du principe et des conditions de la poursuite du projet .
Selon les informations transmises à votre rapporteur, l'acte du maître d'ouvrage serait attaquable, notamment sur le fondement du non-respect par ce dernier des observations émises par la Commission nationale du débat public sur le bon déroulement du débat.
Ainsi, si le débat public n'est pas organisé dans de bonnes conditions, la possibilité serait ouverte, à l'issue de débat public, d'en contester le déroulement.
Le gouvernement a fait le pari d'une autorité administrative indépendante aux pouvoirs limités à une « magistrature d'influence ».
La portée des observations faites par la Commission nationale du débat public ne pourra être constatée que dans la pratique .
Le troisième alinéa du paragraphe I du texte proposé pour l'article L. 121-8 du code de l'environnement prévoit que, lorsque la commission estime qu'un débat public n'est pas nécessaire, elle peut toutefois recommander au maître d'ouvrage l'organisation d'une concertation selon des modalités qu'elle propose .
La non organisation d'un débat public n'est donc pas synonyme d'absence de participation du public.
Là encore se pose la question de la portée juridique des recommandations de la Commission. A priori, elle n'a aucune valeur contraignante, puisqu'il est dit que la Commission « propose » des modalités de concertation et qu'elle ne fait que recommander au maître d'ouvrage ou à la personne publique responsable du projet l'organisation d'une concertation. Cependant, il est de l'intérêt du maître d'ouvrage de réaliser une concertation dans de bonnes conditions, afin de prévenir des contentieux ultérieurs qui retarderaient la réalisation du projet.
Là encore, la Commission nationale du débat public a anticipé le présent projet de loi en recommandant l'organisation de débats locaux sous la responsabilité du maître d'ouvrage concernant :
- le conditionnement, l'entreposage de déchets radioactifs au centre de Cadarache (Bouches-du-Rhône) du Commissariat à l'Energie atomique. Neuf réunions publique sont intervenues jusqu'à la fin novembre 2001, sous le regard d'un groupe de scrutateurs ;
- la ligne à Très haute tension Quercy blanc (Lot et Lot-et-Garonne). Le « Réseau de transport d'électricité » envisage un débat local et devrait prochainement en communiquer les modalités à la Commission nationale du débat public.
3. Principe d'une concertation continue
Le quatrième alinéa du paragraphe I du texte proposé pour l'article L. 121-8 du code de l'environnement prévoit que la commission peut émettre des recommandations à caractère particulier sur la participation du public, s'agissant de projets dont elle a été saisie . Ceci couvre donc également les projets pour lesquels elle n'a pas jugé opportun d'organiser un débat public.
Dans ce cas, ses recommandations peuvent porter sur les modalités de la participation du public jusqu'à la mise en oeuvre du service . Elles peuvent donc préciser la forme que doit prendre la concertation et l'information du public, au-delà de la réception des équipements et travaux , sur les conditions de gestion et d'exploitation de l'aménagement ou de l'équipement. Cela revient en pratique à recommander la création de l'équivalent des « comités de suivi » prévus par la circulaire dite « Bianco », et qui visent à assurer un suivi des engagements du maître d'ouvrage.
Rappelons que l'article L. 121-1 du code de l'environnement, qui concerne plus largement la participation du public au processus d'élaboration de certains projets, prévoit que « le cas échéant », la Commission nationale du débat public veille au respect de bonnes conditions d'information du public durant la phase de réalisation du projet jusqu'à la réception des équipements et travaux . La présente disposition va encore au-delà, puisqu'on parle de participation du public et non plus seulement de son information.
Cette disposition pose problème. En effet, si on maintient un seuil très bas comme cela semble être le cas, on risque d'aboutir en fait à une concertation continue pour un très grand nombre de projets, alors même que la circulaire Bianco s'appliquait seulement à un nombre restreint de projets de grandes infrastructures de l'Etat.
Votre commission des Lois vous propose donc d'adopter un amendement de suppression de cette disposition , le texte prévu par cet article pour l'article L. 121-1.1 du code de l'environnement paraissant suffisant. Il convient en effet de dissocier clairement la période de concertation, qui intervient avant la clôture de l'enquête publique, de la période de réalisation des travaux.
En outre ont été adoptés trois amendements rédactionnels du rapporteur pour avis, M. Pierre Cohen.
Le paragraphe II précise que la Commission doit se prononcer sur la suite à donner aux saisines (facultatives ou obligatoires) dans un certain délai . Le projet de loi prévoit que ce délai sera fixé par décret.
Votre commission des Lois vous propose d'adopter un amendement précisant que ce délai est de deux mois, toujours dans un souci de clarification, et afin d'éviter de rallonger inutilement la procédure.
4. Motivation de la décision de la commission sur les suites à donner aux saisines
A l'initiative de M. Pierre Cohen, rapporteur pour avis, a été adopté par l'Assemblée nationale un amendement tendant à préciser d'une part, que cette décision devait être motivée et, d'autre part, que la décision portait sur la demande de débat 236 ( * ) . Cette précision semble tout à fait utile, puisque la convention d'Aarhus préconise une motivation, en tant que facteur de transparence.
Enfin, il est prévu qu'en l'absence de décision explicite à l'issue de ce délai, la commission sera réputée avoir renoncé à organiser le débat public, ou à en confier l'organisation au maître d'ouvrage ou à la personne publique responsable du projet.
Actuellement , l'annexe du décret du 10 mai 1996 précité indique que le débat public ne peut plus être organisé à partir de la parution au Journal officiel de la décision du ministre intéressé de prendre en considération le projet . Cette règle, qui implique de suivre attentivement le Journal officiel, a été source de nombreuses saisines irrecevables, car postérieures à la parution au Journal officiel.
Le rappel à la règle générale devrait au contraire permettre d'éviter de nombreux contentieux .
5. Charge des dépenses d'organisation du débat public
Le paragraphe III tend à clarifier le régime des dépenses relatives à l'organisation matérielle du débat public .
Actuellement, l'article 8 du décret du 10 mai 1996 prévoit que le maître d'ouvrage prend en charge les frais d'organisation et de déroulement du débat public, notamment ceux relatifs à l'élaboration et à la reproduction des documents mis à disposition du public, aux annonces dans les journaux, aux communications audiovisuelles et aux frais d'organisation des réunions publiques.
La règle demeure.
Néanmoins, s'agissant des indemnités attribuées aux membres des commissions particulières , actuellement à la charge du maître d'ouvrage 237 ( * ) , elles sont désormais à la charge du budget de fonctionnement de la Commission nationale du débat public prévu à l'article L. 121-6 du code de l'environnement par le projet de loi. En effet, il s'agit de dépenses destinées à financer une mission de l'Etat. Cette disposition est cependant de nature réglementaire.
Ont été adoptés, avec l'avis favorable du Gouvernement, plusieurs amendements identiques présentés par MM. Bernard Derosier, rapporteur et Jean-Antoine Leonetti, M. Pierre Cohen, rapporteur pour avis et MM. Léonce Deprez, Marc-Philippe Daubresse et Philippe Marchand, tendant à préciser que le coût des expertises complémentaires est à la charge de la Commission nationale du débat public .
Ceci paraît tout à fait logique, puisque la Commission nationale du débat public a vocation à assurer le droit à la contre-expertise.
Cette disposition est de nature à faciliter la mise en oeuvre de l'expertise et à en réduire les délais et les formalités, dès lors que le maître d'ouvrage n'en sera plus le payeur.
Au sens des marchés publics, il est en effet illogique que le maître d'ouvrage paie. Lorsque dans le cadre de la DUCSAI il a été décidé de faire droit à une demande de contre-expertise formulée par une association, la direction générale de l'aviation civile, le maître d'ouvrage, a ainsi dû verser une subvention à l'association qui a ensuite librement choisi un expert.
Ont été en outre adoptés, après avoir reçu l'avis favorable du Gouvernement, un amendement de correction matérielle et un amendement rédactionnel présentés par M. Pierre Cohen, rapporteur pour avis.
En outre, votre commission des Lois vous propose d'adopter un amendement rédactionnel.
Votre commission des Lois vous propose donc d'adopter trois amendements, puis d' adopter le texte proposé pour l'article L. 121-8 du code de l'environnement ainsi modifié .
Article L. 121-9 du code de
l'environnement
Saisine de la Commission nationale
du débat public
par les ministres
Ce nouvel article élargit considérablement les possibilités de saisine de la Commission nationale du débat public par les ministres. Il vise à répondre à une disposition prévue au dernier alinéa de l'article 7 de la convention d'Aarhus relatif à la participation du public en ce qui concerne les plans, programmes et politiques relatifs à l'environnement, qui stipule que « chaque Partie s'efforce autant qu'il convient de donner au public la possibilité de participer à l'élaboration des politiques relatives à l'environnement ».
Si les ministres peuvent d'ores et déjà saisir la Commission nationale du débat public sur un projet répondant aux critères énoncés à l'article L. 121-1 du code de l'environnement, le ministre de l'environnement (qui apparaît ainsi comme le ministre tête de file) pourra désormais également saisir, conjointement avec le ministre intéressé, la Commission nationale du débat public en vue de l'organisation du débat public sur un dossier « présentant des questions générales ou sur les diverses options préalables à l'élaboration d'un ou plusieurs projets d'aménagement ou d'équipement ».
Il n'est pas précisé que la Commission nationale du débat public est tenue de donner suite à la saisine, ce qui semblerait incompatible avec le statut d'autorité administrative indépendante.
En pratique, les ministres pourront donc demander la tenue d'un débat public sur des sujets tels que la politique des transports dans le massif alpin ou la réintroduction de l'ours dans les Pyrénées.
Il s'agira de débats publics en amont de tout projet, qui devraient permettre de fixer un cadre à l'élaboration de véritables projets. Il s'agit de développer une réflexion à plus long terme et non plus de répondre à une difficulté ponctuelle.
Le débat public organisé en 2001 sur un projet de nouvel aéroport international était une anticipation à titre expérimental des débats sur des questions générales institués par cet article, puisqu'il n'entrait pas dans le champ d'application de la loi n° 95-101 du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l'environnement, ne portant pas sur un projet à proprement parler, mais sur des problématiques d'implantation d'infrastructures.
A la suite d'une lettre de mission conjointe en date du 13 février 2001 du ministre de l'équipement, des transports et du logement, et du ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement au président de la Commission nationale du débat public a donc été organisé le débat public par le président de la Commission nationale du débat public, M. Pierre Zémor, tandis qu'une commission de suivi et d'évaluation du débat de 27 membres présidée par M. B. Poignant était chargée d'en surveiller le déroulement.
Le débat public s'est déroulé sur six mois, d'avril à octobre 2001, au cours desquels 37 réunions ont été organisées, soit près de 300 heures de débat. Plusieurs phases se sont succédé, au cours desquelles les problématiques des besoins, du type de plate-forme, des solutions techniques et enfin de l'implantation du site ont été étudiées. Dans un premier temps, dix réunions se sont tenues à Paris, puis douze dans les grandes villes régionales ou aéroportuaires, avant la tenue de huit débats sur les sites candidats en septembre et octobre. Le dossier, enrichi au cours du débat, a fini par atteindre près de 1.500 pages.
Ce débat public exceptionnel a coûté 18 millions de francs, contre 17 millions de francs pour le débat sur les transports en 1990, sachant qu'un débat « normal » de la Commission nationale du débat public coûte entre 5 et 15 millions de francs.
Cependant, l'expérience de la DUCSAI n'a pas véritablement été concluante. En effet, le débat était largement biaisé, puisque le Gouvernement avait décidé de l'opportunité de principe de réaliser un troisième aéroport par un arbitrage du 26 octobre 2000. Néanmoins, la question de l'opportunité a été débattue continuellement, et a été qualifiée par certains intervenants de « véritable serpent de mer ». Or, le débat public ne peut être une instance d'appel de décisions ministérielles.
Par ailleurs, le débat a souffert d'un manque de temps en amont pour préparer le dossier (durée nécessaire pour réaliser l'appel d'offres pour la communication et pour l'écriture des dossiers de base).
De plus, la Commission nationale du débat public y a joué un rôle à la fois de garant du débat public et de conseil au Gouvernement, ce qui a été mal perçu.
La phase de réunions sur les sites en particulier a été marquée par le plus grand chaos, face à de violentes manifestations de collectifs, particulièrement à Laon. Les intervenants ont en effet dû affronter la colère de ceux que l'on plaçait par anticipation en situation de riverains, alors même si seul un site serait finalement choisi. En effet, il parait très difficile de faire comprendre aux riverains potentiels qu'il ne s'agit pas d'une enquête publique, que ce débat se situe très en amont et que, par conséquent, il n'y a pas encore de dossier très précis .
Ainsi, lors du référendum local du 9 décembre dernier (déclaré illégal par le préfet), 91,42% des habitants des 46 communes de Picardie concernées par le projet de construction du troisième aéroport parisien à Chaulnes (Somme) ont refusé ce projet.
La participation s'est élevée à 61,78%, ce qui montre qu'un tel débat public sur des questions générales n'est pas opératoire.
Il revient au Parlement et au Gouvernement de se saisir de telles questions.
Cette expérience ayant révélé de graves difficultés intrinsèques et structurelles, votre commission des Lois vous propose donc d'adopter un amendement tendant à supprimer le texte prévu pour l'article L. 121-9 du code de l'environnement .
Article L. 121-10 du code de
l'environnement
Durée maximale du débat public -
bilan et
compte rendu
Actuellement, l'article 6 du décret du 10 mai 1996 prévoit que le débat public ne peut avoir une durée supérieure à quatre mois, ce délai pouvant cependant, par décision motivée de la Commission nationale du débat public, être prolongé pour une durée maximum de deux mois en cas d'expertise complémentaire.
Le projet de loi maintient ce délai de quatre mois ainsi que la possibilité de le proroger de deux mois. Cependant, cette prolongation n'est plus conditionnée au recours à des expertises complémentaires.
En effet, un délai de 4 mois peut être trop court s'agissant de projets donnant lieu à une participation massive du public. Ainsi, l'expérience de la DUCSAI a montré qu'il fallait particulièrement préparer la tenue des réunions publiques, et qu'un travail important d'information préalable de la population était nécessaire avant de pouvoir véritablement envisager d'entamer le débat public de façon constructive.
Par ailleurs, le deuxième alinéa du texte prévu pour cet article précise que, dans le cas où la Commission nationale du débat public demande au maître d'ouvrage de compléter le dossier soumis au public, le délai de 4 mois (voire de 6 mois) ne court qu'à compter de la constitution du dossier complet par le maître d'ouvrage. Ceci doit permettre d'avoir un débat public effectif, le public étant correctement informé des enjeux, grâce au dépôt de demandes de renseignements complémentaires.
Cette précision résulte de l'adoption par l'Assemblée nationale avec l'avis favorable du Gouvernement de deux amendements identiques présentés par MM. Pierre Cohen, rapporteur pour avis et Philippe Marchand, ainsi que par MM. Philippe Marchand, André Aschieri, Yves Cochet, Noël Mamère et Mme Marie-Hélène Aubert, du groupe radical, citoyen et vert.
Votre commission des Lois vous propose d'adopter un amendement tendant à fixer avec précision le commencement du débat public , en prévoyant que la Commission nationale du débat public établit et publie le calendrier de déroulement du débat public. Par ailleurs, il précise que le débat public ne peut être prolongé que par une décision motivée de la Commission nationale du débat public. Il prévoit en outre que le délai ne court, lorsque la Commission nationale du débat public a demandé au maître d'ouvrage de compléter le dossier, qu'à compter de la réception du dossier complet par la Commission nationale du débat public .
Le troisième alinéa du texte prévu pour l'article L. 121-10 du code de l'environnement dispose ensuite que le président de la Commission nationale du débat public publie un compte-rendu du débat et en dresse le bilan dans les trois mois à compter de la date de clôture du débat public .
Le projet de loi prévoyait simplement que le bilan devait intervenir à l'issue du débat, renvoyant le délai exact à un décret. Cependant, un amendement présenté par M. Pierre Cohen, rapporteur pour avis, et adopté avec l'avis favorable du Gouvernement, a repris les dispositions de l'article 7 du décret du 10 mai 1996, qui enserrent ces actes dans les trois mois à compter de la date de clôture du débat public.
L'imposition d'un délai semble indispensable afin d'éviter de bloquer ou de retarder les procédures ultérieures du débat public. En effet, la publication du compte rendu et du bilan n'est pas dépourvue de portée juridique, puisque l'ouverture de l'enquête publique y est subordonnée.
Ce délai a été respecté pour la publication du compte-rendu et du bilan des débats sur les projets du port du Havre et de la ligne à très haute tension entre Boutre et Carros. En revanche, il a fallu plus de 4 mois pour publier ces deux documents s'agissant de l'autoroute A 32 et du TGV Rhin-Rhône branche sud (la fin du débat ayant coïncidé avec la période estivale).
Le compte-rendu du débat sera rédigé soit par une commission particulière désignée à cet effet si la Commission nationale du débat public a décidé d'organiser elle-même le débat, soit par le maître d'ouvrage si la Commission nationale du débat public lui a délégué l'organisation du débat.
Le bilan est établi par le président de la Commission nationale du débat public. Il s'agit uniquement d'un bilan de forme. Il apparaît par conséquent, de l'avis même du président de la Commission nationale du débat public, que ce délai pourrait être réduit à deux mois, la Commission nationale du débat public devant voir ses moyens en personnel fortement étoffés. Votre commission des Lois vous propose donc un amendement en ce sens.
En outre, votre commission des Lois vous propose d'adopter un amendement rédactionnel.
En définitive, votre commission des Lois vous propose d'adopter trois amendements , puis d' adopter le texte prévu pour l'article L. 121-10 du code l'environnement ainsi modifié .
Article L. 121-11 du code de
l'environnement
Date d'ouverture de l'enquête publique
Cet article précise expressément que l'enquête publique ne peut intervenir qu'après la fin du débat public. Il s'agit de s'assurer que toutes les questions soulevées lors du débat public pourront être prises en compte lors de l'enquête publique, qui cette fois-ci, doit se prononcer sur le fond du projet.
Actuellement, il n'existe pas de disposition énonçant expressément cette règle de bon sens. L'article 7 du décret du 10 mai 1996 indique simplement que le compte-rendu et le bilan sont mis à disposition du commissaire enquêteur ou de la commission d'enquête lors des enquêtes publiques. Cependant, il n'est pas précisé à quel moment de l'enquête publique cette remise intervient.
Le projet de loi précise donc la règle d'antériorité du débat public sur l'enquête publique.
Ceci concerne les projets ayant donné lieu à saisine obligatoire ou facultative de la Commission nationale du débat public.
L'ouverture de l'enquête publique ne peut être décidée qu'à compter :
- soit de la date à partir de laquelle un débat public ne peut plus être organisé (c'est à dire à l'expiration du délai de deux mois après la saisine de la Commission nationale du débat public si elle ne se prononce pas explicitement sur l'organisation du débat) ;
- soit de la date de publication du bilan ;
- soit à l'expiration du délai de trois mois (deux mois selon votre commission) fixé précédemment pour publier le compte-rendu et le bilan.
Cette précision vise à ne pas entraver la suite des opérations et résulte d'un amendement présenté par M. Pierre Cohen, rapporteur pour avis, et adopté avec l'avis favorable du Gouvernement à l'Assemblée nationale.
L 'ouverture de l'enquête publique devra intervenir au plus tard cinq ans après ces dates . Au-delà de ce délai, l'avis de la commission sera sollicité avant de pouvoir ouvrir l'enquête publique.
Ceci résulte de l'adoption par l'Assemblée nationale avec l'avis favorable du Gouvernement d'un amendement présenté par MM. Philippe Marchand, André Aschieri, Yves Cochet, Noël Mamère et Mme Marie-Hélène Aubert du groupe radical, citoyen et vert.
Cette disposition vise à éviter que des projets ne soient trop modifiés entre la clôture du débat public et l'ouverture de l'enquête publique .
M. Pierre Cohen, rapporteur pour avis, a indiqué qu'après discussion, il était apparu à la commission opportun de ne pas laisser indéfiniment le débat public en suspens, pour éviter qu'une opération ne soit réalisée à un moment où elle ne serait plus en concordance avec le débat, et que le délai fixé paraissait raisonnable, étant donné que les autorisations de police spéciale et la mise en place des éléments nécessaires à la réalisation de l'enquête publique nécessitaient déjà plus de deux ans.
Cette disposition, bien que justifiée, pose des difficultés pratiques.
Tout d'abord, un délai de cinq ans ne semble pas exorbitant s'agissant d'un projet d'infrastructure. Un projet routier nécessite ainsi après le débat public des concertations plus techniques s'agissant de la faune, de la flore (celles-ci devant être menées pendant les quatre saisons), des reconnaissances archéologiques et autres études.
De plus, tel qu'est actuellement rédigé le texte, rien n'interdit à la Commission nationale du débat public d'exiger, cinq ans après un premier débat, d'en organiser un second, sur des motifs qui ne sont pas précisés dans le texte. La procédure de débat public pourrait alors se transformer en procédure dilatoire. On peut même envisager qu'un projet n'ayant pas substantiellement changé en cinq ans, mais ayant vocation à être inséré dans un environnement économique, social ou naturel modifié nécessite un nouveau débat. Or, il est pratiquement certain que l'environnement aura changé, la réalisation d'un projet se faisant sur le moyen terme.
Votre commission des Lois vous propose donc d'adopter un amendement encadrant cette disposition, en prévoyant que la Commission nationale du débat public ne peut décider de rouvrir un débat public que si l'économie générale du projet a été altérée .
Votre commission des Lois vous propose d'adopter cet article ainsi modifié .
Article L. 121-12 du code de
l'environnement
Décision prise par le maître d'ouvrage de
poursuivre le projet
Cet article vise à remédier aux critiques visant l'après débat public . En effet, il arrive fréquemment que des études complémentaires soient décidées après la fin du débat public, et que leur prise en compte conduise à l'adoption de modifications, parfois importantes, par rapport à ce qui était exposé.
Les populations ont alors un sentiment de frustration, lorsqu'après avoir été abondamment informées, elles découvrent plusieurs mois plus tard un projet totalement bouleversé.
Le projet de loi oblige donc désormais le maître d'ouvrage (ou, à défaut, la personne publique responsable du projet) à rendre publiques, dans un délai de six mois après la publication du bilan du débat public, sa décision de poursuivre ou non le projet, ainsi que les modalités de cette poursuite et les modifications éventuellement apportées au projet .
Le maître d'ouvrage a intérêt à prendre et à publier la décision post-débat public afin de purger le contentieux de légalité externe au plus tôt et de rompre ainsi avec la théorie des opérations complexes. S'il ne le fait pas, la déclaration d'utilité publique pourra être annulée en aval, au motif de l'absence de cette décision et/ou en invoquant l'exception d'illégalité à l'encontre d'actes irréguliers relatifs au débat en amont.
Il s'agit de responsabiliser le maître d'ouvrage. De plus, cet acte pourrait emporter des conséquences juridiques et permettre au juge administratif de vérifier si le maître d'ouvrage a bien tenu compte des observations formulées par la Commission nationale du débat public ou la commission particulière ayant suivi le projet.
Afin d'assurer la plus grande transparence, cet acte est publié et transmis la Commission nationale du débat public. Il est donc attaquable dans les deux mois de cette publication dans le cadre d'un recours pour excès de pouvoir.
En outre, le deuxième alinéa de cet article prévoit lorsque le maître d'ouvrage ou la personne publique responsable du projet est une collectivité territoriale , cet acte donne lieu à une délibération , toujours dans un objectif de responsabilisation du maître d'ouvrage.
Il apparaît en effet normal que le public soit dûment informé des suites du débat public.
Le délai de six mois prévu pour que le maître d'ouvrage publie sa décision de poursuivre le projet semble excessif. Votre commission des Lois vous propose donc d'adopter un amendement le réduisant à trois mois.
En outre, votre commission des Lois vous propose d'adopter un amendement rédactionnel.
Votre commission des Lois vous propose donc d' adopter deux amendements , puis d' adopter le texte prévu pour l'article L. 121-12 du code de l'environnement ainsi modifié.
Article L. 121-13 du code de
l'environnement
Forclusion du délai de recours à l'encontre
d'irrégularités de la procédure de débat
public
Le présent projet de loi vise à réduire le risque contentieux par une plus grande participation du public, en désamorçant en amont les difficultés .
Le rapport du Conseil d'Etat avait indiqué qu'un consensus existait pour affirmer que les limites en matière de complexité étaient atteintes, et qu'il ne pouvait être question d'augmenter encore les risques d'annulation pour vice de procédure.
Par conséquent, cet article indique les règles de forclusion des délais de recours à l'encontre de la procédure de débat public, afin d'assurer une sécurité juridique aux actes intervenant ultérieurement .
Ainsi, aucune irrégularité relative à la procédure de débat public ne peut être invoquée :
- lorsque l'acte par lequel la Commission nationale du débat public a renoncé à organiser un débat public (elle-même ou par l'entremise du maître d'ouvrage) est devenu définitif , c'est à dire deux mois à compter de la date à laquelle la Commission nationale du débat public a renoncé au débat public (soit deux mois à compter de sa décision explicite, soit deux mois à compter de sa décision implicite, c'est à dire en tout quatre mois après sa saisine) ;
- lorsque l'acte par lequel le maître d'ouvrage décide de la poursuite du projet après la fin du débat public est devenu définitif ;
. si le maître d'ouvrage est une personne publique, l'acte devient définitif à l'expiration d'un délai de deux mois à compter de sa publication ;
. si le maître d'ouvrage est une personne privée, un recours devant le juge civil reste ouvert si l'acte a causé un dommage à autrui. A cette occasion, le requérant peut demander au juge de constater la nullité de l'acte pour non conformité aux lois et règlements.
Cette décision pourra faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir mais ne pourra être ultérieurement contestée par la voie de l'exception d'illégalité après l'expiration du délai de recours contentieux.
A ensuite été adopté avec l'avis favorable du Gouvernement par l'Assemblée nationale un amendement rédactionnel présenté par M. Pierre Cohen, rapporteur pour avis.
Cette disposition revêt une importance considérable. Reste cependant l'hypothèse d'un projet dont le maître d'ouvrage est une personne privée.
Votre commission des Lois vous propose d' adopter le texte prévu pour l'article L. 121-13 du code de l'environnement ainsi modifié .
Article L. 121-14 du code de
l'environnement
Décret en Conseil d'Etat
Cet article prévoit qu'un décret en Conseil d'Etat précisera les conditions d'application du chapitre Ier du titre II du livre Ier du code de l'environnement.
En première lecture à l'Assemblée nationale a été adopté un amendement présenté par M. Pierre Cohen, rapporteur pour avis, avec l'avis favorable du Gouvernement, tendant à supprimer des dispositions que ce décret devait « notamment » prendre, au motif que cette précision était sans portée normative, précision à laquelle votre rapporteur ne peut que souscrire.
Ce décret définira essentiellement la listes des catégories de projets d'équipement ou d'aménagement soumis à débat public.
Votre commission des Lois vous propose d' adopter le texte prévu pour l'article L. 121-14 du code de l'environnement sans modification .
* 235 Aux termes des articles 41 à 44 bis de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, les fonctionnaires mis à disposition restent dans leur corps d'origine, qui les rémunère. Leur mise à disposition ne peut avoir lieu qu'avec leur accord et ils doivent remplir des fonctions d'un niveau hiérarchique comparable à celui des fonctions assurées dans leur administration d'origine. La durée de la mise à disposition ne peut excéder trois ans, mais peut être renouvelée.
* 236 La ministre avait indiqué qu'elle n'était pas favorable à cette précision dans un premier temps, mais qu'un amendement semblable ayant déjà été adopté, était logique.
* 237 Article 9 du décret du 10 mai 1996.