Rapport n° 243 (2001-2002) de M. Alain VASSELLE , fait au nom de la commission des affaires sociales, déposé le 19 février 2002
Disponible au format Acrobat (145 Koctets)
Tableau comparatif au format Acrobat (94 Koctets)
-
AVANT-PROPOS
-
EXAMEN DES ARTICLES
-
Article premier
Création d'un accord-cadre entre la CNAMTS et
le Centre national des professions de santé (CNPS)
-
Art. 2
Contenu des conventions professionnelles
-
Art. 3
Réforme des accords de bon usage des soins
et des contrats de bonne pratique
-
Art. 4
Création des contrats de santé publique
-
Art. 5
Suppression de la régulation unilatérale par les caisses
-
Art. 6
Dispositions diverses
-
Article premier
-
TRAVAUX DE LA COMMISSION
N° 243
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2001-2002
Annexe au procès-verbal de la séance du 19 février 2002 |
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des Affaires sociales (1) sur la proposition de loi, ADOPTÉE AVEC MODIFICATIONS PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE EN NOUVELLE LECTURE, portant rénovation des rapports conventionnels entre les professions de santé libérales et les organismes d'assurance maladie ,
Par M. Alain VASSELLE,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de : M. Nicolas About, président ; MM. Alain Gournac, Louis Souvet, Gilbert Chabroux, Jean-Louis Lorrain, Roland Muzeau, Georges Mouly, vice-présidents ; M. Paul Blanc, Mmes Annick Bocandé, Claire-Lise Campion, M. Jean-Marc Juilhard, secrétaires ; MM. Henri d'Attilio, Gilbert Barbier, Joël Billard, Jean-Pierre Cantegrit, Bernard Cazeau, Jean Chérioux, Mme Michelle Demessine, M. Gérard Dériot, Mme Sylvie Desmarescaux, MM. Claude Domeizel, Michel Esneu, Jean-Claude Étienne, Guy Fischer, Jean-Pierre Fourcade, Serge Franchis, Francis Giraud, Jean-Pierre Godefroy, Mme Françoise Henneron, MM. Philippe Labeyrie, Roger Lagorsse, André Lardeux, Dominique Larifla, Jean-René Lecerf, Dominique Leclerc, Marcel Lesbros, Mme Valérie Létard, MM. Jean Louis Masson, Serge Mathieu, Mmes Nelly Olin, Anne-Marie Payet, M. André Pourny, Mme Gisèle Printz, MM. Henri de Raincourt, Gérard Roujas, Mmes Janine Rozier, Michèle San Vicente, MM. Bernard Seillier, André Vantomme, Alain Vasselle, Paul Vergès, André Vézinhet.
Voir les numéros :
Assemblée nationale ( 11 ème législ.) : Première lecture : 3520 , 3524 et T.A. 758
Commission mixte paritaire : 3590
Nouvelle lecture : 3585 , 3591 et T.A. 786
Sénat : Première lecture : 171 et T.A. 56 (2001-2002)
Commission mixte paritaire : 222 (2001-2002)
Nouvelle lecture : 226 (2001-2002)
Sécurité sociale |
AVANT-PROPOS
Mesdames, Messieurs,
Réunie le 12 février 2002 au Sénat, la commission mixte paritaire n'est pas parvenue à un accord sur la proposition de loi portant rénovation des rapports conventionnels entre les professions de santé libérales et les organismes d'assurance maladie.
Ce résultat était attendu : le rejet de cette proposition par le Sénat en première lecture le 7 février laissait difficilement augurer d'une position commune sur ce texte.
Examinant cette proposition de loi en nouvelle lecture, le 12 février 2002, l'Assemblée nationale a rétabli son texte de première lecture, modifié à la marge par deux amendements présentés par le Gouvernement.
Ces modifications apportées en nouvelle lecture ne changent en rien l'économie de ce texte et les critiques que votre commission avait formulées en première lecture conservent dès lors toute leur pertinence.
Votre commission persiste à penser que cette proposition de loi relève d'une gesticulation politique sans lendemain et vise avant tout à masquer les échecs et l'impuissance du Gouvernement en matière d'assurance maladie et de santé.
Elle vous propose en conséquence d'adopter une motion tendant à opposer la question préalable à la proposition de loi telle que rétablie par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture.
I. UN SYSTÈME DE SANTÉ EN CRISE
Notre système de santé traverse aujourd'hui une crise profonde et paradoxale.
Paradoxale, parce que notre système est bon : l'Organisation mondiale de la santé l'a récemment classé au premier rang mondial.
Profonde, parce que de fortes inquiétudes se font jour qui s'étendent, au-delà des professions de santé, à l'ensemble des Français.
Notre système de santé traverse aujourd'hui une crise de confiance, qui révèle un profond désarroi des professionnels de santé. De nouveaux mouvements revendicatifs naissent chaque jour dans le monde de la santé, des grèves s'installent, qui touchent autant les soins de ville que les établissements de santé.
En prenant ses fonctions en 1997, le Gouvernement disposait :
- d'un instrument, les lois de financement de la sécurité sociale, résultant de la réforme constitutionnelle et organique de 1996,
- et d'un principe posé par la loi de 1994, celui de la séparation des branches de sécurité sociale et de la compensation intégrale à la sécurité sociale des exonérations de cotisations décidées par l'Etat.
Or, cet instrument, le Gouvernement l'a progressivement dévoyé ; ce principe, il l'a constamment violé.
Depuis 1997, le Parlement vote un objectif national de dépenses d'assurance maladie. Or, cet objectif, chaque année dérive, avant d'être « rebasé » pour mieux dériver à nouveau. En 2001, les dépenses du régime général ont ainsi progressé de 6 % alors que l'objectif voté par le Parlement n'était que de 3,5 %.
Une telle dérive n'a rien d'étonnant car le Gouvernement n'a pas su ou n'a pas voulu donner à cet objectif un contenu en santé publique. L'ONDAM ne traduit aucune priorité de santé publique et ne repose sur aucune évaluation des besoins en santé de la population. Tout au plus est-il une indexation nécessairement contestée des moyens qui permettent de faire « tourner le système » cahin-caha.
Une telle dérive n'a rien d'étonnant car il est traditionnel, désormais, qu'au mois de mars au plus tard, cette année dès le mois de janvier, le Gouvernement, qui a demandé au Parlement de voter solennellement ce fameux ONDAM au mois de décembre, entame dans l'urgence des négociations, conclut des protocoles ou des avenants et ouvre des dépenses nouvelles ici ou là.
De fait, on n'a guère entendu, lors des négociations avec les médecins généralistes, évoquer l'objectif de dépenses voté par le Parlement qui aurait été une contrainte pour les négociateurs.
En réalité, dès lors que l'instrument ne fonctionne plus, dès lors que les principes ne sont pas respectés, quelles peuvent être les bases d'une négociation entre les pouvoirs publics et les professionnels ? Sur quels fondements s'opposer aux demandes légitimes des généralistes ?
Naturellement pas sur les déficits persistants de l'assurance maladie (14,7 milliards de francs en 1998, 4,8 milliards en 1999, 17,2 milliards en 2000 et 13,3 milliards en 2001) puisque le Gouvernement, lors de la loi de financement pour 2002, les a lui-même creusés.
L'assurance maladie, qui constitue la branche déficitaire par excellence, s'est vu ainsi ponctionnée à un double titre pour assurer le financement des « trente-cinq heures » : d'une part, pour contribuer au financement du Fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale (FOREC), d'autre part, pour assumer la charge des emplois créés au titre de la réduction du temps de travail dans les hôpitaux.
Cette politique, creusant les déficits de la branche maladie et alourdissant son endettement, demeure incompréhensible et rend illusoire toute action tendant à demander un quelconque effort de maîtrise des équilibres aux différents acteurs de notre système de santé.
Dès lors qu'il y a cette hémorragie financière programmée dans notre système d'assurance maladie, cette confusion organisée des caisses de sécurité sociale et des caisses de l'Etat, comment responsabiliser les partenaires sociaux, les assurés et les professionnels de santé ? A quel titre le Gouvernement peut-il prétendre leur demander la rigueur et la vigilance qui sont pourtant le prix de la préservation des fondements sur lesquels repose notre système de soins ?
Pourquoi les professionnels de santé signeraient-ils des conventions si les efforts consentis, le redressement des comptes attendu, n'ont pour seul effet que de permettre d'opérer des prélèvements supplémentaires ?
La théorie pernicieuse des prétendus retours pour les finances sociales de la politique des trente-cinq heures et la multiplication des tuyauteries financières entre les branches de la sécurité sociale déresponsabilisent l'ensemble des acteurs et conduisent le système à la faillite. Pourtant, les principes posés en 1994 avaient précisément pour objet de s'opposer à cette confusion en clarifiant les responsabilités de chacun.
Le bilan de cette législature apparaît en définitive désastreux : le monde de la santé est en ébullition permanente ; privée de pilote, l'assurance maladie est devenue parallèlement une sorte de bateau ivre, livré à lui-même.
II. LA PROPOSITION DE LOI : UNE GESTICULATION SANS LENDEMAIN.
La proposition de loi portant rénovation des rapports conventionnels entre les professions de santé libérales et les organismes d'assurance maladie, adoptée par l'Assemblée nationale en première lecture le 10 janvier, est la reprise presque à l'identique de l'article 18 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2002, annulé par le Conseil constitutionnel le 18 décembre 2001.
C'est dire que le Sénat est pour beaucoup dans le dépôt et l'examen de cette proposition de loi puisque le Conseil constitutionnel, pour annuler cette disposition, s'est appuyé sur l'argumentation des sénateurs auteurs de la saisine.
Ceux-ci avaient en effet estimé que l'article 18 avait été adopté à l'issue d'une procédure irrégulière, qui n'avait tendu qu'à contourner la jurisprudence du Conseil constitutionnel relative à l'introduction de dispositions nouvelles après la réunion de la commission mixte paritaire.
Deux jours à peine après la décision du Conseil constitutionnel, MM. Jean Le Garrec, Jean-Marc Ayrault et Claude Evin ont déposé la présente proposition de loi, de sorte que ni sous la forme d'amendement, ni sous la forme de proposition de loi, ce texte n'a été délibéré en Conseil des ministres et soumis à l'examen du Conseil d'Etat.
Examiné par la commission le 9 janvier, le texte a été inscrit par le Gouvernement à l'ordre du jour prioritaire dès le 10 janvier et adopté par l'Assemblée nationale. Que de célérité et de sollicitude de la part du Gouvernement pour une simple « proposition de loi » !
Au Sénat, le Gouvernement a d'ailleurs déployé toutes les prérogatives de l'ordre du jour prioritaire pour inscrire d'autorité un texte qu'il n'avait cependant pas souhaité signer. C'est dans ces conditions qu'en première lecture, votre rapporteur a dû présenter un rapport oral.
Le texte témoigne ainsi d'un curieux acharnement du Gouvernement et d'une conception pour le moins autoritaire des relations avec les professionnels de santé.
L'annulation de l'article 18 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 aurait pu en effet donner au Gouvernement le temps nécessaire de procéder à une véritable concertation avec les professionnels de santé. Il n'en a rien été.
Cette concertation n'avait naturellement pas pu avoir lieu au moment de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale puisque l'amendement avait été déposé le 20 novembre 2001, soit la veille de son adoption en séance publique à l'Assemblée nationale.
Le Gouvernement avait certes fait valoir que la concertation se poursuivrait avec les professionnels de santé mais c'est une curieuse concertation que celle qui consiste à consulter sur une disposition déjà votée par l'Assemblée nationale !
Il s'agit à l'évidence, pour le Gouvernement, de passer en force avec ce texte, au mépris de toute concertation.
Outre qu'il révèle une méthode détestable, le dispositif proposé présente des faiblesses flagrantes.
S'il retient bien l'idée d'une architecture conventionnelle à trois niveaux, il ne tranche cependant ni la question du mode de régulation des dépenses ni celle des responsabilités respectives de l'Etat et de l'assurance maladie dans cette régulation.
Ainsi, et c'est le principal reproche que l'on puisse formuler à son égard, il laisse subsister, pour les professions non signataires d'une convention, le mécanisme pervers des lettres-clés flottantes, institué par le Gouvernement dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 et auquel le Sénat s'est déjà opposé à de nombreuses reprises.
Ceci explique qu'à l'exception de MG-France, l'ensemble des syndicats de médecins se sont déclarés hostiles à cette réforme, certains jugeant que le maintien du mécanisme des sanctions collectives allait les forcer à négocier « avec un revolver sur la tempe ».
Aux yeux de votre commission, la suppression du dispositif de régulation par les lettres-clés flottantes constitue pourtant un préalable indispensable à la reprise du dialogue avec les professionnels de santé et à l'ouverture d'une véritable négociation sur une nouvelle architecture conventionnelle et un nouveau dispositif de régulation des dépenses.
En outre, la réforme proposée ne résout pas le problème récurrent des relations entre l'Etat et l'assurance maladie.
L'Etat conserve en effet la haute main sur le dispositif : c'est le Gouvernement qui devra approuver les conventions ; c'est encore lui qui pourra, dans certains cas, refuser les éventuelles revalorisations de tarifs proposées par les caisses, c'est-à-dire les partenaires sociaux ; c'est toujours lui qui, en l'absence de convention, définira la règle du jeu et les sanctions collectives.
Dans un avis adopté à l'unanimité le 20 novembre 2001, le conseil d'administration de la CNAMTS a d'ailleurs fait part des fortes réserves que lui inspirait ce texte. Ces réserves constituent autant de critiques sévères de la politique menée depuis cinq ans par le Gouvernement.
Enfin, le dispositif proposé ne modifie en rien le fait que la fixation annuelle de l'Objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM) ne repose sur aucune priorité sanitaire clairement affichée et ne se fonde sur aucune véritable évaluation des besoins en matière de soins.
On est dès lors amené à s'interroger sur la signification que peut revêtir un texte qui, s'il est adopté, sera vraisemblablement le dernier de la législature et qui semble ne pas recueillir l'adhésion des acteurs concernés. A l'évidence, cette réforme n'a pas vocation à être effectivement mise en oeuvre.
Dans le contexte de crise que connaît aujourd'hui notre système de santé, la proposition de loi apparaît en complet décalage avec les attentes des professionnels de santé et avec les défis auxquels ce système est confronté. Elle ne peut contribuer en rien à dissiper les inquiétudes légitimes qui se font jour chez les professionnels et chez les patients eux-mêmes.
Elle n'a au fond pour objet que de répondre au souhait du Gouvernement de pouvoir « afficher » une réforme des relations conventionnelles dont il sait pertinemment qu'elle ne sera pas appliquée avant les prochaines échéances électorales.
A l'évidence, cette proposition de loi relève de la gesticulation politique et vise avant tout à masquer les échecs et l'impuissance du Gouvernement en matière d'assurance maladie et de politique de la santé.
En annulant l'article 18 du projet de loi de financement de la sécurité sociale, qui était censé être « la » réponse apportée par le Gouvernement à l'inquiétude des professionnels de santé, le Conseil constitutionnel avait sanctionné une gesticulation introduite en dernière lecture de la dernière loi de financement de la sécurité sociale de la législature.
En rejetant solennellement ce texte par l'adoption d'une motion opposant la question préalable, le Sénat voudra bien sanctionner à son tour cette nouvelle gesticulation inscrite dans ce qui sera peut-être la dernière loi promulguée de la législature.
EXAMEN DES ARTICLES
Article premier
Création
d'un accord-cadre entre la CNAMTS et
le Centre national des professions de
santé (CNPS)
Cet article institue un accord-cadre regroupant les dispositions communes aux différentes professions.
Le I de cet article crée, au chapitre II du titre VI du livre Ier du code de la sécurité sociale, un article L. 162-1-11 qui met en place un nouveau type d'accord entre les organismes d'assurance maladie et les professions de santé exerçant en ville.
Le premier alinéa de ce nouvel article précise qu'il s'agit d'un « accord-cadre » conclu entre la CNAMTS, au moins une autre caisse nationale d'assurance maladie et le Centre national des professions de santé (CNPS). Les professions concernées sont les médecins généralistes et spécialistes, les chirurgiens-dentistes, les sages-femmes et les auxiliaires médicaux (orthophonistes, orthopédistes et pédicures-podologues), les infirmiers, les masseurs-kinésithérapeutes, les biologistes et les transporteurs sanitaires.
Le deuxième alinéa prévoit que cet accord-cadre ne sera applicable à une profession donnée que si au moins une organisation syndicale représentative de cette profession y a adhéré. Il s'agit donc d'un dispositif contractuel complémentaire aux conventions spécifiques à chaque profession.
Le troisième alinéa précise la durée et le contenu de l'accord-cadre. Ce dernier est conclu pour une durée maximale de cinq ans. Il a d'abord pour vocation de fixer des dispositions transversales, « communes à l'ensemble des professions » et qui entrent dans le champ des conventions actuelles. La seconde phrase de l'alinéa donne à titre indicatif des exemples de mesures pouvant figurer dans l'accord-cadre :
- les obligations respectives des caisses et des professionnels de santé exerçant en ville, c'est-à-dire le cadre général des relations entre caisses et professionnels ;
- des mesures que les partenaires conventionnels jugent appropriées pour garantir la qualité des soins dispensés et une meilleure coordination des soins, ou pour promouvoir des actions de santé publique.
Le II de cet article modifie l'article L. 162-15 concernant les conditions d'application des conventions, de leurs annexes et avenants, compte tenu de la création de l'article L. 162-1-11.
L'accord-cadre connaîtra les mêmes conditions d'application que les conventions professionnelles. Il sera donc soumis à l'approbation des ministres chargés de la santé, de la sécurité sociale, de l'agriculture, de l'économie et du budget. Comme les conventions, il sera soumis à l'adhésion individuelle des professionnels de santé. Chaque professionnel aura la possibilité d'y adhérer ou non.
En nouvelle lecture, l'Assemblée nationale a adopté au II de cet article deux amendements présentés par le Gouvernement : le premier précise que la transmission des accords conventionnels par la CNAMTS est faite au nom de l'ensemble des signataires ; le second prévoit que, lorsqu'il s'oppose à l'approbation d'un accord, le Gouvernement doit le notifier à l'ensemble des signataires, et non aux seules caisses signataires comme le stipulait le texte initial.
On notera que, si l'accord-cadre institué par le présent article est censé fixer « les dispositions communes à l'ensemble des professions » , son contenu n'est toutefois pas clairement défini.
De même, l'article mentionne explicitement le Centre national des professions de santé, ce qui confère ainsi et de manière assez surprenante un rôle quasi institutionnel à cette organisation constituée sous la forme d'une association loi 1901.
L'objectif politique est limpide : il s'agit d'obtenir ainsi le soutien du CNPS à cette réforme. Le résultat est pour le moins décevant si l'on en juge par les dernières déclarations du Dr Reignault, Président du CNPS, dans le Quotidien du médecin du 5 février, où il explique comment le Gouvernement s'est trompé en voulant engager une réforme de fond des soins de ville alors que la première attente des professionnels portait sur leurs honoraires.
Art. 2
Contenu des conventions professionnelles
Cet article traite du contenu des conventions professionnelles. Celles-ci devront définir le niveau des tarifs ainsi que les engagements collectifs et individuels des professionnels en matière d'organisation des soins, de respect des bonnes pratiques, d'évolution des pratiques ou de l'activité. Elles pourront mettre en place un fonds de modernisation.
Dans ce nouveau cadre, il est prévu que les modifications tarifaires feront désormais l'objet d'une appréciation globale, incluant l'ensemble des professions, ainsi que les modifications de nomenclature envisagées par les partenaires conventionnels.
Cet article crée donc deux nouveaux articles du code de la sécurité sociale fixant le contenu commun des conventions professionnelles des différentes professions de santé.
Le I de cet article crée un article nouveau L. 162-14-1 qui détermine la durée, désormais fixée par la loi à cinq ans, et le contenu des conventions.
Chaque convention définira le niveau des tarifs (1°), les engagements collectifs et individuels des professionnels en matière d'organisation des soins, de respect des bonnes pratiques, d'évolution des pratiques ou de l'activité (2°) et pourra, le cas échéant, mettre en place un fonds de modernisation de la profession considérée (3°).
Le II de cet article crée un article L. 162-14-2 prévoyant que les tarifs seront fixés dans le cadre d'avenants à chaque convention.
Ces avenants comporteront en annexe les modifications de nomenclature envisagées par les partenaires conventionnels et dont devront tenir compte les ministres lorsqu'ils mettent en oeuvre des modifications de celle-ci, « sauf en cas d'urgence ou d'impérieuse nécessité de santé publique » .
Les ministres devront motiver leurs décisions en matière de nomenclature des actes lorsqu'elles s'écartent des propositions faites sur le sujet par les partenaires conventionnels.
Le présent article a pour conséquence de mettre fin, pour les professionnels de santé ayant signé une convention, à l'application du mécanisme des lettres-clés flottantes.
Le système issu de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000, aujourd'hui en vigueur, prévoit en effet que, pour chaque profession, les caisses et les syndicats médicaux déterminent dans l'annexe à la convention, un objectif de dépenses, les tarifs et les mesures propres à faire respecter l'objectif. Ces moyens sont, premièrement la fixation des tarifs des honoraires et deuxièmement « les mesures de toute nature propres à garantir le respect de l'objectif fixé » : la réduction du volume des actes non justifiés au plan médical (maîtrise médicalisée) et la possibilité de modifier dans la limite de 20 % la cotation des actes (« lettres-clés »).
Pour les professionnels ayant signé une convention, ce système est supprimé et remplacé par le nouveau dispositif proposé au présent article.
En revanche, comme on le verra à l'article 5, pour les professions non signataires d'une convention, le mécanisme pervers des lettres-clés flottantes, institué par le Gouvernement dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 et auquel le Sénat s'est déjà opposé à de nombreuses reprises, est maintenu.
Art.
3
Réforme des accords de bon usage des soins
et des contrats de
bonne pratique
Cet article vise, selon le Gouvernement, à donner une nouvelle dynamique à des dispositifs incitatifs créés par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 : les accords de bon usage des soins sont élargis à l'ensemble des professions ; il est prévu qu'ils peuvent donner lieu, comme les contrats de bonne pratique, à des rémunérations forfaitaires.
Le I de cet article modifie l'article L. 162-12-17 du code de la sécurité sociale concernant les accords de bon usage des soins afin d'élargir ces derniers, qui étaient réservés aux médecins principaux prescripteurs, à l'ensemble des professionnels de santé exerçant en ville (1° et 2° du I).
Les accords de bon usage des soins ont été créés par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000. Il existe deux types d'accords de « bon usage de soins » à destination des médecins généralistes et spécialistes : un contrat national conclu entre la CNAMTS et les syndicats de médecins et un contrat régional signé entre les unions régionales de caisses d'assurance maladie (URCAM) et les représentants désignés par les syndicats signataires des conventions nationales. Même à défaut de convention, les médecins peuvent conclure à l'échelon national et à l'échelon régional des accords.
En nouvelle lecture, l'Assemblée nationale a adopté au 2° du I de cet article un amendement rédactionnel présenté par M. Claude Evin, rapporteur.
Le 3° du I précise que ces accords peuvent donner lieu à des rémunérations forfaitaires.
Le II de cet article modifie l'article L. 162-12-18, qui définit les contrats de bonnes pratiques.
Le 1° du II permet aux professionnels de bénéficier d'un complément forfaitaire de rémunération en contrepartie du respect des engagements pris dans le cadre du contrat de bonnes pratiques. Il étend également le contrat de bonnes pratiques aux transporteurs sanitaires.
Le 2° étend l'évaluation de la pratique du professionnel aux références opposables et aux recommandations de bonne pratique.
Le 3° supprime la référence aux actions de formation continue dans la mesure où le projet de loi relatif aux droits de malades, en attente d'adoption définitive par le Parlement, institue un dispositif de formation médicale continue obligatoire pour l'ensemble des professionnels de santé exerçant en ville.
Les 4° et 5° modifient la rédaction des sixième, septième et huitième alinéas afin de tenir compte du fait que le contrat de bonnes pratiques pourra concerner des professionnels non habilités à prescrire.
Le 6° supprime l'engagement facultatif pouvant figurer dans un contrat de bonnes pratiques de « favoriser, par une participation à des réseaux de soins, une meilleure coordination des soins ou permettre des regroupements professionnels » . Cet engagement figure désormais de manière obligatoire dans les contrats individuels de santé publique créés à l'article 4 de la proposition de loi.
Le 7° est une disposition de cohérence tenant compte de l'entrée dans le dispositif prévu au 1° des transporteurs sanitaires.
Le III habilite l'Etat à proposer à l'adhésion individuelle des professionnels de santé des accords de bon usage des soins ou des contrats de bonne pratique lorsque les partenaires conventionnels ne l'ont pas fait ou en l'absence de convention nationale.
Art.
4
Création des contrats de santé publique
Cet article crée des contrats de santé publique, complémentaires aux dispositions de l'accord-cadre ou de la convention professionnelle, qui permettront aux professionnels y adhérant de percevoir des rémunérations forfaitaires en contrepartie des engagements qu'ils prendront en matière d'actions de prévention ou d'amélioration de la coordination et de la permanence des soins.
Cet article crée, dans le code de la sécurité sociale, un article L. 162-12-20 instituant le contrat de santé publique.
Le premier alinéa de l'article L. 162-12-20 précise, d'une part, quels seront les professionnels de santé concernés -il s'agit de tous les professionnels de santé exerçant en ville pouvant signer une convention (à l'exception des transporteurs sanitaires)- et, d'autre part, la nature individuelle de ces contrats. Ces contrats seront définis par les conventions des professions concernées ; les professionnels adhérant à ces contrats pourront percevoir des rémunérations forfaitaires.
Le deuxième alinéa précise le contenu général de ces contrats : les contrats fixent les engagements des professionnels concernés et précisent les modalités d'actualisation de la rémunération forfaitaire qui leur est associée.
Le troisième alinéa énumère les éléments obligatoires que devront comporter ces contrats s'agissant des engagements des professionnels : il s'agit de la participation soit à des actions destinées à renforcer la permanence et la coordination des soins, notamment à des réseaux de soins, soit à des actions de prévention.
Art.
5
Suppression de la régulation unilatérale par les caisses
Cet article tire les conséquences des modifications précédentes en supprimant le pouvoir unilatéral des caisses de prendre des mesures pour les professions placées sous une convention.
Le système des lettres-clés flottantes reste cependant applicable aux professions qui n'ont pas signé de convention.
Le I de cet article modifie l'article L. 162-15-2 du code de la sécurité sociale relatif à l'objectif de dépenses déléguées et aux annexes fixant pour chacune des professions l'objectif de dépenses et les moyens de l'atteindre.
Le 1° réécrit le premier alinéa du I de l'article 162-15-2 : le pouvoir unilatéral des caisses en matière de fixation de l'objectif des dépenses et des tarifs et/ou de lettres-clés n'est prévu qu'en l'absence de convention. Par conséquent, le système des annexes aux conventions disparaît et la notion d'objectif de dépenses ne s'applique plus qu'aux professions non conventionnées.
Le 2°, qui supprime le dernier alinéa du I, est une disposition de cohérence avec la suppression des annexes.
Le 3° prévoit que le suivi deux fois par an des dépenses par la CNAMTS ne se fera qu'en l'absence de convention et non de manière systématique comme c'est le cas aujourd'hui.
Le 4°, qui supprime le deuxième alinéa du II, est une disposition de cohérence avec la suppression des annexes.
Le 5° modifie en conséquence les dispositions concernant l'annexe modificative que les parties conventionnelles doivent aujourd'hui mettre en place lorsqu'elles constatent que l'évolution des dépenses n'est pas compatible avec le respect de l'objectif fixé dans l'année.
Le 6°, qui supprime le quatrième alinéa du II, est l'abrogation du pouvoir du ministre de fixer les tarifs au cas où les annexes ne l'auraient pas fait.
Le 7° est un nouveau décompte d'alinéas tenant compte des modifications du II de l'article L. 162-15-3.
Le II de cet article modifie l'article L. 162-15-3 portant sur les relations entre les caisses d'assurance maladie et l'Etat au travers des rapports d'équilibre.
Les 1°, 3°, 4°, 5° et 6° modifient l'article L. 162-15-3 en conséquence de la suppression des annexes et des annexes modificatives.
Les 2° modifie les dispositions concernant les rapports d'équilibre. La CNAMTS doit aujourd'hui -en théorie parce qu'elle ne le fait plus- élaborer deux rapports intermédiaires à transmettre aux ministres compétents et au Parlement les 15 juillet et 15 novembre. Désormais, il n'y aura qu'un seul rapport le 15 juillet.
Le 7° prévoit qu'en l'absence de convention, les tarifs en vigueur au 31 décembre de l'année précédente sont prorogés jusqu'à l'entrée en vigueur des mesures nouvelles fixées par les caisses.
Le III de cet article modifie l'article L. 162-5-9 définissant le règlement conventionnel minimal (RCM).
Le règlement conventionnel minimal est étendu à l'ensemble des professionnels de santé exerçant en ville alors qu'auparavant il ne concernait que les médecins généralistes et spécialistes. En outre, il voit son champ de compétences élargi. Il aura désormais le même champ que les conventions nationales.
Art.
6
Dispositions diverses
Cet article tire, dans les textes qui leur sont applicables, les conséquences rédactionnelles de l'extension du dispositif commun aux transporteurs sanitaires privés. Il comporte une disposition transitoire afin que les partenaires conventionnels assurent la mise en conformité des conventions en vigueur avec les nouvelles dispositions législatives avant le 31 décembre 2002. Il valide enfin tous les actes pris en application de la convention nationale des masseurs-kinésithérapeutes, de ses annexes et avenants.
Le I de cet article est une disposition de cohérence. La disposition selon laquelle le règlement conventionnel minimal peut prévoir que les caisses prennent en charge une partie de la cotisation vieillesse n'est plus réservée aux seuls médecins (généralistes et spécialistes) dans la mesure où le règlement conventionnel minimal a été étendu à l'ensemble des professionnels de santé par l'article 5.
Le II tire, dans les textes qui leur sont applicables, les conséquences rédactionnelles de l'extension du dispositif commun aux transporteurs sanitaires privés.
Le III prévoit que les conventions en vigueur à la date de la publication de la loi, y compris les conventions dont la date d'échéance se situe en 2002 et qui font l'objet d'un renouvellement tacite, sont réputées conformes aux dispositions de la présente loi jusqu'au 31 décembre 2002.
Le IV valide, en raison de contentieux les menaçant, tous les actes pris en application de la convention nationale des masseurs-kinésithérapeutes, de ses annexes et de ses avenants.
TRAVAUX DE LA COMMISSION
Réunie le mardi 19 février 2002 sous la présidence de M. Nicolas About, président , la commission a procédé à l'examen, en nouvelle lecture , du rapport de M. Alain Vasselle , sur la proposition de loi n° 226 (2001-2002), adoptée avec modifications par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, portant rénovation des rapports conventionnels entre les professions de santé libérales et les organismes d'assurance maladie .
M. Alain Vasselle, rapporteur, a rappelé que la commission mixte paritaire, réunie au Sénat le 12 février 2002, n'était pas parvenue à un accord sur la proposition de loi portant rénovation des rapports conventionnels entre les professions de santé libérales et les organismes d'assurance maladie. Il a estimé que ce résultat était attendu, le rejet de cette proposition par le Sénat en première lecture le 7 février laissant difficilement augurer d'une position commune sur ce texte.
Il a indiqué que l'Assemblée nationale, examinant cette proposition de loi en nouvelle lecture, le 12 février 2002, avait rétabli son texte de première lecture, modifié à la marge par deux amendements présentés par le Gouvernement. Il a considéré que les modifications apportées en nouvelle lecture ne changeaient en rien l'économie de ce texte et que les critiques formulées par la commission en première lecture conservaient dès lors toute leur pertinence.
M. Alain Vasselle, rapporteur, a estimé que notre système de santé traversait aujourd'hui une crise profonde et paradoxale. Paradoxale, parce que notre système est bon, l'organisation mondiale de la santé (OMS) l'ayant récemment classé au premier rang mondial. Profonde, parce que de fortes inquiétudes se font jour qui s'étendent, au-delà des professions de santé, à l'ensemble des Français.
Il a considéré qu'en prenant ses fonctions en 1997, le Gouvernement disposait d'un instrument, les lois de financement de la sécurité sociale, résultant de la réforme constitutionnelle et organique de 1996, et d'un principe posé par la loi de 1994, celui de la séparation des branches de sécurité sociale et de la compensation intégrale à la sécurité sociale des exonérations de cotisations décidées par l'Etat.
Il a considéré que le Gouvernement avait progressivement dévoyé cet instrument et constamment violé ce principe. Depuis 1997, le Parlement vote un objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM). Or, cet objectif, chaque année dérive, avant d'être rebasé pour mieux dériver à nouveau. En 2001, les dépenses du régime général ont ainsi progressé de 6 % alors que l'objectif voté par le Parlement n'était que de 3,5 %.
M. Alain Vasselle, rapporteur, a considéré qu'une telle dérive n'avait rien d'étonnant, le Gouvernement n'ayant pas su, ou pas voulu, donner à cet objectif un contenu en santé publique. L'ONDAM ne traduisait aucune priorité de santé publique et ne reposait sur aucune évaluation des besoins en santé de la population. Tout au plus constituait-il une indexation nécessairement contestée des moyens permettant de faire « tourner le système » cahin-caha.
M. Alain Vasselle, rapporteur, a constaté en outre qu'il était traditionnel, désormais, qu'au mois de mars au plus tard, cette année dès le mois de janvier, le Gouvernement, qui avait demandé au Parlement de voter solennellement ce fameux ONDAM au mois de décembre, entame dans l'urgence des négociations, conclue des protocoles ou des avenants et ouvre des dépenses nouvelles ici ou là. En réalité, dès lors que l'instrument ne fonctionnait plus, dès lors que les principes n'étaient pas respectés, quelles pouvaient être les bases d'une négociation entre les pouvoirs publics et les professionnels ? Sur quels fondements s'opposer aux demandes légitimes des généralistes ? Naturellement pas sur les déficits persistants de l'assurance maladie puisque le Gouvernement, lors de la loi de financement pour 2002, les avait lui-même creusés.
M. Alain Vasselle, rapporteur, a ainsi souligné que l'assurance maladie, qui constitue la branche déficitaire par excellence, s'était vue ponctionnée à un double titre pour assurer le financement des « trente-cinq heures » : d'une part, pour contribuer au financement du Fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale (FOREC), d'autre part, pour assumer la charge des emplois créés au titre de la réduction du temps de travail dans les hôpitaux. Il a jugé que cette politique creusant les déficits de la branche maladie et alourdissant son endettement demeurait incompréhensible et rendait illusoire toute action tendant à demander un quelconque effort de maîtrise des équilibres aux différents acteurs de notre système de santé.
M. Alain Vasselle, rapporteur, s'est demandé pourquoi les professionnels de santé signeraient des conventions si les efforts consentis, le redressement des comptes attendu, n'avaient pour seul effet que de permettre d'opérer des prélèvements supplémentaires. Il a estimé que la théorie pernicieuse des prétendus retours pour les finances sociales de la politique des trente-cinq heures et la multiplication des tuyauteries financières entre les branches de la sécurité sociale déresponsabilisaient l'ensemble des acteurs et conduisaient le système à la faillite.
Il a fait valoir que, dans ce contexte, le dispositif prévu par la proposition de loi présentait des faiblesses flagrantes. S'il retenait bien l'idée d'une architecture conventionnelle à trois niveaux, il ne tranchait cependant ni la question du mode de régulation des dépenses ni celle des responsabilités respectives de l'Etat et de l'assurance maladie dans cette régulation. Ainsi, et c'était le principal reproche que l'on pouvait formuler à son égard, il laissait subsister, pour les professions non signataires d'une convention, le mécanisme pervers des lettres-clés flottantes, institué par le Gouvernement dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 et auquel le Sénat s'était déjà opposé à de nombreuses reprises.
M. Alain Vasselle, rapporteur, a ajouté que la réforme proposée ne résolvait pas le problème récurrent des relations entre l'Etat et l'assurance maladie. L'Etat conservait en effet la haute main sur le dispositif : c'est le Gouvernement qui devra approuver les conventions ; c'est encore lui qui pourra, dans certains cas, refuser les éventuelles revalorisations de tarifs proposées par les caisses, c'est-à-dire les partenaires sociaux ; c'est toujours lui qui, en l'absence de convention, définira la règle du jeu et les sanctions collectives. Dans un avis adopté à l'unanimité le 20 novembre 2001, le conseil d'administration de la CNAMTS a d'ailleurs fait part des fortes réserves que lui inspirait ce texte. Ces réserves constituent autant de critiques sévères de la politique menée depuis cinq ans par le Gouvernement.
M. Alain Vasselle, rapporteur, a souligné que le dispositif proposé ne modifiait en rien le fait que la fixation annuelle de l'Objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM) ne repose sur aucune priorité sanitaire clairement affichée et ne se fonde sur aucune véritable évaluation des besoins en matière de soins.
Il s'est dès lors interrogé sur la signification que pouvait revêtir un texte qui, s'il était adopté, serait vraisemblablement le dernier de la législature et qui semblait ne pas recueillir l'adhésion des acteurs concernés. Il a jugé que cette réforme n'avait, à l'évidence, pas vocation à être effectivement mise en oeuvre.
Il a souligné que, dans le contexte de crise que connaît aujourd'hui notre système de santé, la proposition de loi apparaissait en complet décalage avec les attentes des professionnels de santé et avec les défis auxquels ce système est confronté. Elle ne pouvait contribuer en rien à dissiper les inquiétudes légitimes qui se font jour chez les professionnels et chez les patients eux-mêmes. Elle n'avait au fond pour objet que de répondre au souhait du Gouvernement de pouvoir « afficher » une réforme des relations conventionnelles dont il savait pertinemment qu'elle ne serait pas appliquée avant les prochaines échéances électorales.
M. Alain Vasselle, rapporteur, a estimé que la proposition de loi relevait de la gesticulation politique et visait avant tout à masquer les échecs et l'impuissance du Gouvernement en matière d'assurance maladie et de santé. Il a proposé à la commission de rejeter solennellement ce texte par l'adoption d'une motion opposant la question préalable.
M. Claude Domeizel a estimé que, sur un sujet aussi difficile, la majorité sénatoriale serait peut-être amenée, à l'image du Président de la République, à faire prochainement son mea culpa.
M. Guy Fischer a considéré que le rapporteur était dans son rôle lorsqu'il critiquait l'action menée par le Gouvernement depuis 1997. Il a jugé que les modalités de financement de la protection sociale restaient insatisfaisantes dans la mesure où ce financement reposait essentiellement sur les salaires. Il a estimé que la situation actuelle résultait d'une dramatisation des positions respectives, liée pour une large part au contexte électoral. Il a indiqué que le groupe communiste républicain et citoyen s'opposerait à la motion proposée par le rapporteur.
Estimant que la proposition du rapporteur était courageuse, M. Paul Blanc a souligné que le dérapage des dépenses de santé résultait aussi du comportement des malades qui multipliaient par exemple les demandes d'arrêts de travail. Il a regretté que l'on n'ait jamais eu le courage de mettre les usagers du système de santé, comme le projet de loi relatif aux droits des malades les dénommait désormais, en face de leurs responsabilités. Il a mis l'accent sur les coûts engendrés par les progrès de la médecine, tels que les nouvelles molécules destinées à combattre la maladie d'Alzheimer.
Evoquant les dépenses hospitalières, il a rappelé que celles-ci étaient composées à 70 % de dépenses de personnels. Il a regretté que, dans un contexte de pénurie de personnels hospitaliers, le Gouvernement ait choisi d'imposer aux établissements de santé le passage aux « 35 heures » sans réflexion préalable sur les conséquences lourdes de cette décision.
Jugeant que le seul moyen de sortir de la crise actuelle était de réunir autour d'une table ronde médecins, usagers et caisses de sécurité sociale, il a considéré, pour sa part, que la proposition de loi n'était qu'un texte purement électoraliste.
Après avoir rappelé que notre système de santé était tout de même le meilleur du monde, M. André Vantomme a mis l'accent sur les risques d'une approche uniquement comptable des problèmes de santé.
Estimant que ces questions de société méritaient un véritable débat, il a regretté que l'adoption d'une question préalable ne permette pas de discuter des problèmes au fond. Il a indiqué que le groupe socialiste voterait contre la motion présentée par le rapporteur.
M. Jean Chérioux a estimé qu'il s'agissait pour le Gouvernement, avec ce texte, comme l'avait pertinemment démontré le rapporteur, de sauver les apparences. Il a jugé que l'on s'intéressait surtout aux professionnels de santé libéraux mais que l'on oubliait souvent les dépenses hospitalières. Il a considéré que cela avait été une erreur que d'étendre les « 35 heures » au secteur hospitalier et au secteur associatif privé, pour lesquels cela représentait une charge énorme. Il a estimé que les problèmes devaient être abordés avec réalisme, sans oublier leur dimension financière.
M. Jean-Louis Lorrain a souligné que le conventionnement ne pouvait être que le résultat d'un long processus. Il a craint que l'on aboutisse au même résultat que celui observé aujourd'hui si l'on repartait des mêmes bases.
M. Alain Vasselle, rapporteur, a observé que les critiques formulées par certains intervenants sur son rapport portaient davantage sur la forme que sur le fond. Il a considéré qu'il faudrait, le moment venu, trouver ensemble une solution qui permette de concilier le souci d'offrir le meilleur système de soins et le respect des équilibres financiers. Il a estimé que, si le Président de la République faisait aujourd'hui son mea culpa, il serait souhaitable que Mme Martine Aubry et Mme Elisabeth Guigou fassent de même.
La commission a ensuite adopté la motion tendant à opposer la question préalable .