II. LA DENSITÉ DES ÉCHANGES HUMAINS
La population concernée par la convention d'établissement apparaît importante : elle représente quelque 40 000 Sénégalais installés en France et 20.000 Français établis au Sénégal.
A. LES SÉNÉGALAIS EN FRANCE : STABILITÉ DE LA PRÉSENCE RÉGULIÈRE ET PRESSION DES FLUX CLANDESTINS
Forte de 42.000 personnes, la communauté des Sénégalais résidant régulièrement en France représente 22 % des ressortissants d'Afrique subsaharienne, anciennement sous administration française, titulaires d'une autorisation de séjour (188.000 personnes, soit 5,8 % des 3,24 millions d'étrangers en situation régulière). Elle dépasse par son importance les Maliens, les Congolais et les Camerounais.
Si le nombre de Sénégalais a doublé entre 1975 et aujourd'hui (passant de 21.000 à 42.000 personnes), il reste relativement stable depuis quinze ans (40.000 titulaires d'autorisation de séjour en 1984 et 1990).
Ces données ne tiennent naturellement pas compte de l'immigration clandestine qui pourrait, selon certaines estimations, représenter un chiffre comparable à la présence régulière, soit 40.000 personnes. Les flux d'irréguliers tendent à croître : à une tradition de migration ancienne s'ajoute en effet la dégradation de la situation économique de nombreux Sénégalais. Bien que la France demeure la destination la plus prisée, elle constitue aussi pour certains clandestins un simple point de passage pour d'autres pays comme l'Italie et l'Espagne.
Les filières extrêmement volatiles reposent sur toutes sortes de fraudes : l'une des pratiques les plus préoccupantes, dont notre consulat de Dakar s'est fait l'écho, concerne l'usurpation d'identité sur la base d'une filiation fictive avec un double national franco-sénégalais (plus de 2.000 cas ont été recensés à ce jour). Malgré leur diligence, les services consulaires apparaissent souvent impuissants à déjouer l'ingéniosité des fraudeurs.
B. LES FRANÇAIS INSTALLÉS AU SÉNÉGAL : UN RÔLE ÉCONOMIQUE MAJEUR
Plus importante communauté étrangère établie au Sénégal, les Français comptent entre 20.000 et 25.000 personnes -pour 40 % des double-nationaux- principalement installées dans la région de Dakar.
Au 31 décembre 2000, le nombre de Français immatriculés auprès de nos postes consulaires au Sénégal s'élevait à 15.000 personnes (13.400 auprès du Consulat général à Dakar, 780 auprès du Consulat général de Saint-Louis).
Les non-immatriculés regroupent pour l'essentiel les double-nationaux résidant pour la plupart dans le Sénégal oriental, ainsi qu'un certain nombre de Français expatriés -de l'ordre de 5.000- qui négligent cette formalité.
Les actifs (37 % des immatriculés) travaillent à plus de 90 % dans le secteur tertiaire. Ils exercent en majorité des fonctions de cadres (33 %), des métiers intellectuels (25 %), des activités de commerçants, chefs d'entreprise ou artisans (22 %).
La communauté française compte plus de 2 000 religieux. Enfin, les personnels employés par l'Etat français représentent 1.800 personnes dont 800 militaires. Le nombre d'assistants techniques a beaucoup baissé passant de 470 en 1994 à 130 en 2002.
Plus de 250 entreprises françaises sont recensées -47 % sont des implantations et 53 % sont des filiales- principalement des PME (61 % emploient moins de 50 salariés).
Les difficultés que peuvent rencontrer nos compatriotes au Sénégal apparaissent pour une large part similaires à celles que connaissent les autres communautés françaises installées en Afrique subsaharienne : grandes disparités de niveau social, de revenu et de mode de vie, qu'il s'agisse des mono nationaux ou des binationaux. Les difficultés économiques du Sénégal conjuguées à la dévaluation du Franc CFA ont conduit le niveau de vie des Français salariés locaux et retraités à se rapprocher de celui des Sénégalais. Par ailleurs, l'aide sociale et les bourses scolaires, en augmentation, bénéficient essentiellement aux binationaux.
La question douloureuse des anciens combattants sénégalais méritent une mention particulière : l'annonce par les autorités françaises d'une « décristallisation » des pensions a suscité beaucoup d'espoir de la part des quelque 5.000 Sénégalais qui pourraient bénéficier de cette mesure. Cependant, une réelle impatience se manifeste face à l'imprécision des dates et l'ampleur de la revalorisation accordée. Ce sentiment est encore aggravé à Dakar par les procédures très lourdes appliquées à près de 400 anciens combattants titulaires d'un carnet de soins gratuits (visites et médicaments) soumis au contrôle a priori -et en France...- des prescriptions médicales.
Les mouvements de personnes répondent souvent à des mobiles de caractère économique et social. C'est pourquoi il est intéressant d'apporter quelques éclairages sur la situation actuelle du Sénégal.