3. Le renforcement des moyens de fonctionnement
Le projet de budget de l'enseignement supérieur pour 2003 prévoit d'accroître les moyens de fonctionnement de l'enseignement supérieur de 52 millions d'euros , à 1,225 milliard d'euros.
Ces moyens de fonctionnement sont constitués à près de 99 % de subventions de fonctionnement aux établissements
Les subventions de fonctionnement aux établissements (chapitre 36-11) et les progrès de la politique contractuelle Les subventions de fonctionnement du chapitre 36-11 et les subventions d'équipement constituaient en 2000 (dernière année connue) près de 42 % des ressources des universités , les subventions de recherche et les autres subventions d'État et des organismes publics en constituant par ailleurs 14 %, les droits universitaires 10 %, les ressources en formation continue 7 %, la rémunération des travaux et études 6 %, les contrats de recherche 6 %, les subventions des collectivités locales 5 %, la taxe d'apprentissage 2,5 % et les autres ressources 7 %. En l'an 2000, un sixième de ces subventions ont été attribuées dans le cadre de la politique contractuelle entre l'État et les établissements. D'un montant relativement modeste en moyenne, ces dotations contractuelles présentent toutefois une variance importante, puisque le ratio dotations contractuelles /dotations théoriques de fonctionnement (DTF) appréciées selon les critères SanRemo varient de 1 à 6 entre les universités métropolitaines (de 7 % à Cergy Pontoise ou Lyon I à 41 % à Grenoble II ). Il convient d'ailleurs d'observer que ces dotations contractuelles ne présentent aucun caractère redistributif en fonction des inégalités de dotation globale de fonctionnement des universités au regard des critères SanRemo . Il ressort en effet des calculs effectués à partir des données transmises par le ministère et relatives à l'année 2002 que : - les huit universités métropolitaines les plus richement dotées en subventions de fonctionnement contractualisées (à hauteur de 35 % de leur DTF en moyenne) sont en moyenne également légèrement mieux dotées en dotation globale de fonctionnement (DGF) que les huit universités métropolitaines les moins richement dotées en subventions de fonctionnement contractualisées (à hauteur de 8 % de leur DTF en moyenne). En effet, la DGF des premières représente en moyenne 84,5 % de leur DTF, contre 84 % pour les secondes ; - de même, les huit universités métropolitaines les plus richement dotées en DGF (à hauteur de 100 % de leur DTF en moyenne) sont en moyenne également mieux dotées en subventions de fonctionnement contractualisées que les huit universités métropolitaines les moins richement dotées en DGF (à hauteur de 76 % de leur DTF en moyenne). En effet, les subventions de fonctionnement des premières représente en moyenne 18 % de leur DTF, contre 16,5 % pour les secondes. On peut par ailleurs rappeler que la Cour des Comptes concluait dans son rapport sur l'exécution des lois de finances pour l'année 2000 que « le volet évaluation de la politique contractuelle (dont dépend pourtant la pertinence et la réussite de la démarche) apparaît encore marginal. Le flou des procédures, l'absence de réelles sanctions et la faiblesse des indicateurs ne permettent pas, en particulier d'apprécier l'emploi des moyens contractualisés au regard des objectifs et des priorités qui ont été arrêtés ». En outre, la Cour des Comptes indiquait de manière plus générale que « le chapitre 36-11 illustre la difficulté que rencontre l'administration centrale à suivre l'utilisation des crédits qu'elle alloue aux universités et donc à mettre en place un contrôle de gestion qui suppose des données certaines. En effet, les crédits sont certes définis par leur objet pour certains d'entre eux dans les arrêtés de notification, mais en fait, une fois intégrés dans les budgets des universités, leur utilisation se fond avec celle des autres ressources disponibles dans les établissements. Par ailleurs, les comptes financiers des universités ne sont pas assez fins ni fiables pour connaître avec précision l'utilisation qu'elles font de leurs ressources. Ainsi, les crédits d'heures supplémentaires réellement dépensés par les établissements ne sont pas connus par l'administration centrale, dont les dotations ne couvrent vraisemblablement qu'un quart environ de ce type de dépense ». Interrogé par votre rapporteur spécial sur les suites données à ces observations, le ministère suggère que de réels progrès ont été accomplis en matière d'évaluation tant interne qu'externe puisqu'il indique que « de plus en plus d'universités créent des observatoires de l'insertion et des parcours professionnels des étudiants. Une réflexion est conduite par la direction de la programmation et du développement pour harmoniser les travaux et les méthodologies de ces différents observatoires. S'agissant de l'évaluation externe, afin d'améliorer l'articulation entre la procédure contractuelle et les travaux réalisés par le conseil national de l'évaluation des EPCSCP et l'inspection générale de l'administration de l'éducation nationale et de la recherche, il a été décidé que l'évaluation des établissements serait désormais réalisée dans des calendriers adaptés à leur contractualisation. L'objectif est de disposer des résultats des évaluations réalisées par ces instances pour la négociation du nouveau contrat, de sorte que les conclusions et recommandations formulées et relayées par le débat contractuel aient un caractère plus opératoire. Enfin, la mise en place d'un système d'évaluation externe a été fortement encouragée par la direction de la recherche et se retrouve, sous une forme ou sous une autre, dans les contrats récents. Certaines universités, notamment scientifiques, ont ainsi créé un « visiting commitee » composé d'une dizaine de personnalités scientifiques de haut niveau, françaises et européennes, chargé de donner un avis sur la politique scientifique de l'établissement et d'aider celui-ci à définir ses grandes orientations. Pour chaque établissement, la démarche contractuelle donne donc lieu à une évaluation interne et externe, qu'il s'agisse de l'évaluation du précédent contrat et de l'expertise des comités d'évaluation des EPST ou des travaux du Comité National d'Évaluation (CNE) et de l'Inspection Générale de l'Administration de l'éducation Nationale et de la Recherche (IGAENR). Quatre éléments concourent ainsi à la mise en oeuvre d'une démarche d'évaluation directement liée à la politique contractuelle : l'association systématique de représentants de l'IGAENR à la démarche contractuelle ; une meilleure articulation des programmes de travail du CNE et de l'IGAENR avec le calendrier des vagues contractuelles ; la présence dans les contrats d'une annexe spécifique dédiée aux indicateurs permettant d'évaluer avec l'établissement le degré de mise en oeuvre des actions inscrites ; enfin la présentation devant le conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche (CNESER) les orientations générales des contrats d'établissement (actions mises en oeuvre, financements mobilisés) ». S'agissant de l'allocation des crédits contractualisés, le ministère précise par ailleurs que « la phase de bilan du précédent contrat permet de disposer d'une analyse détaillée des opérations réalisées et des moyens mobilisés par l'établissement : dotation ministérielle, ressources propres, subvention des collectivités locales... Le constat qui est alors établi, peut, le cas échéant, conduire le ministère à procéder, dans le cadre de la négociation financière du nouveau contrat, au réajustement des moyens octroyés, en particulier pour les actions qui s'étalent sur plusieurs périodes contractuelles. Le bilan du précédent contrat sert ainsi de base au nouveau projet et nourrit le dialogue entre l'établissement et l'État... Pour mener cette réflexion, l'établissement dispose d'indicateurs définis en commun avec l'administration et qui visent également à situer l'établissement dans son environnement régional, national et international. Afin d'améliorer cette vision globale de l'établissement, la direction de la programmation et du développement a engagé un travail sur la mise au point et la diffusion d'une série d'indicateurs qui permettront à l'établissement de se comparer aux autres établissements». En outre, le ministère précise que « comme le rapport de la Mission d'évaluation et de contrôle (M.E.C.) de l'Assemblée nationale en soulignait la nécessité [dans son rapport de l'an 2000 97 ( * ) sur la gestion des universités], le rôle de la direction de l'enseignement supérieur en qualité de maître d'oeuvre unique du contrat et interlocuteur privilégié des établissements a été réaffirmé à l'occasion du lancement des dernières campagnes contractuelles. Dans le même temps, la coopération inter-directions, corollaire indispensable d'une véritable politique contractuelle, a été renforcée ». Enfin, on peut se féliciter de ce que le ministère ait décidé de « réintégrer la question des moyens dans la démarche contractuelle », c'est à dire « de faire systématiquement le lien entre les objectifs fixés et l'ensemble des moyens qui pourront être mobilisés par l'établissement pendant la durée du contrat », même si l'ambition de moyen terme consistant à « donner aux établissements.. la vision globale des dotations dont ils disposeront... [ce qui représenterait] un acte de confiance leur permettant de mettre en oeuvre une gestion prévisionnelle », paraît encore lointaine au regard de la faible ampleur des moyens contractualisés, et se heurte au principe d'annualité budgétaire. Cela étant, on peut s'inquiéter de la persistance de retards importants pour la signature des contrats quadriennaux . Certes, le ministère affirme en réponse à votre rapporteur spécial que, pour les vagues contractuelles 1999-2002, 2000-2003 et 2001-2004, « la durée de la procédure s'est globalement réduite : le décalage entre la date idéale de signature (décembre de l'année n-1) et la signature effective de la majorité des contrats a progressivement été ramené de 18 mois à 6 mois ». Cependant, cette assertion lénifiante est démentie par l'examen détaillé des dates de signature des contrats transmises en annexe . En effet, sur les 29 contrats quadriennaux de la vague contractuelle 2001-2004, aucun n'a été signé avant décembre 2001, 13 ont été signés en décembre 2001 ; 12 ont été signés au premier semestre 2002 ; 1 a été signé en juillet 2002 et 3 étaient « en cours à la date d'envoi du questionnaire », soit presque à mi-parcours de la période du contrat... |
Les moyens de fonctionnement de l'enseignement supérieur progresseraient ainsi de 4,5 % en 2003, après des hausses de 7,6 % en 2002 et de 3,0 % en 2001.
En fait, cette progression résulterait à hauteur de 22 millions d'euros des effets conjugués de deux opérations de déconcentration : d'une part, les effets en année pleine du transfert à partir du 1 er septembre 2002 des crédits relatifs aux primes de charges administratives et aux primes de responsabilités pédagogiques du chapitre 31-12 « Indemnités et allocations diverses » au chapitre 36-11 « Subventions de fonctionnement », d'autre part le transfert précité des crédits afférents aux bourses de mobilité (à hauteur de 9,2 millions d'euros) du chapitre 43-71 « Bourses et secours d'étude » au chapitre 36-11, afin de faciliter la préparation des mobilités des étudiants à l'étranger.
Compte tenu par ailleurs de ce que le solde des autres opérations de transfert est relativement faible, l'augmentation des moyens de fonctionnement de l'enseignement supérieur ressort ainsi à structure constante à un peu plus de 30 millions d'euros dans le projet de budget pour 2003 (contre + 78 millions d'euros en 2002), soit une hausse de 2,5 % (contre + 7,1 % en 2002), imputable en quasi-totalité à la progression des subventions aux établissements, puisque les crédits demandés pour les examens et concours et pour le comité national d'évaluation sont, pour la seconde année consécutive, reconduits presque à l'identique, et que les crédits de fonctionnement des services (notamment pour l'informatique), n'augmentent que de 0,38 millions d'euros, à 7,46 millions d'euros (soit + 5 %).
Comme votre rapporteur spécial le relevait déjà l'an passé, il convient toutefois de remarquer qu'au cours des quinze dernières années, les fluctuations des « réserves » des établissements ont partiellement amorti celles des subventions de fonctionnement. On peut ainsi craindre que l'accélération des subventions de fonctionnement ne conduise à une nouvelle hausse de ces « réserves ».
Or, le fonds de roulement des établissements a déjà progressé de 30 % entre 1995 et l'an 2000 pour atteindre 1,043 milliard d'euros, ce qui équivalait à presque un an de subventions de fonctionnement ou à 235 jours de dépenses de fonctionnement, alors que la norme retenue pour le niveau du fonds de roulement par le ministère de l'éducation nationale est de 90 jours de dépenses de fonctionnement .
La Cour des Comptes concluait ainsi la monographie consacrée au budget de l'enseignement supérieur dans son rapport sur l'exécution des lois de finances pour 2000 : « ... ce montant signifie que les ressources disponibles dans les établissements d'enseignement supérieur représenteraient ainsi un volume de près de 4 milliards de francs. Un tel montant, qui ne peut [certes] pas être assimilé à la seule thésaurisation des subventions reçues de l'État, appelle [toutefois] analyse et action de la part du ministère ».
A ce jour, l'action entreprise semble toutefois pêcher par manque d'efficacité, sinon par manque d'ambition. Le ratio fonds de roulement/dépenses de fonctionnement s'est en effet accru en l'an 2000, (à 235 jours, contre 230 jours en 1999 et 228 jours en 1998). En outre, la description par le ministère de l'action entreprise est cette année encore identique à celle de l'an passé 98 ( * ) si ce n'est que le groupe de travail réuni à l'initiative du ministère a publié en 2001 une estimation réalisée à partir d'un échantillon de 36 universités selon laquelle la part des fonds de roulement réellement mobilisable s'établissait à environ 25 % du fonds de roulement comptable, soit en moyenne 48 jours de dépenses de fonctionnement 99 ( * ) (ou, par extrapolation, plus de 0,26 milliard d'euros pour l'ensemble des établissements), puis élaboré une grille d'analyse du fonds de roulement qui a été transmise aux établissements.
Votre rapporteur spécial regrette à cet égard que la maîtrise des réserves des établissements d'enseignement supérieur ne figure pas parmi les objectifs d'amélioration de la gestion assignés à l'agrégat « Enseignement supérieur ».
Quoi qu'il en soit, on peut préciser que l'augmentation des moyens de fonctionnement des établissements prévue dans le projet de budget pour 2003 (soit 29 millions d'euros à structure constante) se décompose pour l'essentiel entre :
- la hausse de 22 millions d'euros (soit + 2,4 %, après + 7,6 % en 2002 et + 2,2 % en 2001), à 966 millions d'euros, des subventions de fonctionnement aux universités ;
- la hausse de 5,5 millions d'euros (soit + 4,5 %, après + 5,3 % en 2002 et + 2,6 % en 2001), à 126 millions d'euros, des crédits de fonctionnement des bibliothèques universitaires et des musées sous tutelle du ministère (dont + 5,0 millions d'euros de subventions de fonctionnement pour les bibliothèques ; + 0,3 million d'euros de subventions de fonctionnement pour les musées et + 0,05 million d'euros en tiers d'année pour la création de 5 emplois non budgétaires au musée des arts et métiers) ;
- la hausse de 0,5 million d'euros (soit 3,1 %, après + 26 % en 2002 et + 23 % en 2001), à 25,9 millions d'euros 100 ( * ) , des crédits réservés à l'action internationale . Alors que la forte progression de 2001 avait principalement bénéficié à EduFrance, à l'agence Socrates-Leonardo da Vinci et aux universités franco-allemande et franco-italienne, puis celle de 2002 au développement des « universités européennes d'été », la progression des crédits demandée pour 2003 devrait être consacrée exclusivement à l'université franco-allemande ;
- la hausse de 0,1 million d'euros (+0,6 %, contre + 8 % en 2002), à 16,6 millions d'euros, des subventions de fonctionnement de fonctionnement de l'Institut national de la recherche pédagogique (INRP) ;
- l'augmentation de 0,7 million d'euros (+ 12 %, après + 23 % en 2002), à 6,0 millions d'euros, des crédits de fonctionnement de l'établissement public du musée des arts et civilisations Paris (le musée des arts premiers), cofinancé par l'enseignement supérieur sans que la pertinence de ce cofinancement de dépenses de fonctionnement n'apparaisse clairement. Cette augmentation des crédits demandée pour 2003 devrait notamment permettre la création de 16 emplois supplémentaires inscrits pour ordre sur le budget de la culture ;
- la hausse de 0,1 million d'euros (+ 0,3 %, contre + 1,6 % en 2002 et + 13 % en 2001), des subventions de fonctionnement accordées aux laboratoires universitaires de recherche.
* 97 Cf. « Moderniser la gestion des universités : quels outils pour quels enjeux », rapport de l'Assemblée nationale n°2357, onzième législature.
* 98 Cette réponse indique : « depuis 1997, le ministère mène en liaison avec les établissements une politique visant à une meilleure connaissance et une meilleure utilisation des réserves. Cette politique s'est déjà traduite par la modernisation de la gestion financière des universités, à travers notamment la refonte de la réglementation comptable et financière et la mise en place de l'application informatique NABUCO (nouvelle approche budgétaire et comptable) qui ont conduit les établissements à réfléchir sur leurs orientations et leur organisation budgétaire et comptable. Des avancées concrètes sont désormais visibles, par exemple avec la conception d'outils modernes, facilitant une meilleure définition des objectifs, une allocation des ressources plus efficiente et des bilans d'activités mieux à même de déterminer les besoins futurs. Dans ce nouveau contexte, la mobilisation des réserves s'opère progressivement. Elle est fortement recommandée par le ministère, dans le cadre de l'autonomie des établissements, à la fois au travers de la politique contractuelle (le niveau des réserves constituant un élément des discussions entre l'administration et chaque établissement) et des réflexions qui peuvent être menées conjointement par le ministère et les universités afin de mieux connaître la composition de ces réserves et, donc, les réelles disponibilités de financement qu'elles peuvent offrir ».
* 99 En réponse aux questions de votre rapporteur spécial, le ministère précise « la part non mobilisable du fonds de roulement comptable est constituée des éléments suivants :
- les ressources pluriannuelles représentent environ 30 % des fonds de roulement. Elles regroupent notamment les crédits de construction alloués aux établissements dans le cadre de la délégation de maîtrise d'ouvrage ou encore certains crédits d'équipement pédagogique ou scientifique ne pouvant être utilisés sur la seule année au cours de laquelle ils ont été délégués ;
- les crédits ayant reçu une affectation particulière représentent 23,30 % des fonds de roulement. Ils comprennent les subventions de la direction de la recherche du ministère de la recherche et celles des grands organismes de recherche, ainsi que toutes les autres subventions notifiées avec un objet spécifique ; |
- les reports de crédits correspondant à des dépenses obligatoires (14,6 % des fonds de roulement) ;
- les excédents dégagés sur ressources affectées pouvant être reversés aux bailleurs de fonds (4,27 %) ;
- les excédents dégagés par les services communs de formation continue (4,75 %) ».
* 100 Y compris les bourses de mobilité (soit 9,15 millions d'euros).