3. La stabilisation des crédits d'aides directes
Les aides directes constituent désormais la totalité du titre IV de cet agrégat. Elles sont regroupées dans un seul chapitre (43-71), pour lequel le projet de budget pour 2003 demande 1,303 milliard d'euros de crédits de paiement, dont 1.275 millions d'euros pour les bourses 114 ( * ) , soit près de 98 % du chapitre.
Ces crédits s'inscrivent en baisse de 8 millions d'euros (soit - 0,6 %) ; Cependant, comme votre rapporteur spécial l'a déjà relevé, cette baisse s'explique par une opération de déconcentration : le transfert aux établissements (donc à l'agrégat « Enseignement supérieur ») de la gestion des bourses de mobilité internationale (à hauteur de 9,2 millions d'euros), qui participe d'ailleurs de la clarification de la nomenclature de ce chapitre, qui recouvre en fait des actions d'importance très inégale 115 ( * ) .
A structure constante, ces crédits augmentent donc de 1 million d'euros , en raison :
- d'un côté, de l'augmentation de 0,3 million d'euros des crédits destinés aux transport des étudiants handicapés (à 1,6 million d'euros) ;
- de l'augmentation de 0,55 million d'euros des crédits pour la prise en charge du 4 ème terme de bourse pour les étudiants d'outre-mer ;
- des effets en année pleine de la revalorisation de 1,2 % 116 ( * ) du taux des bourses sur critères sociaux à la rentrée 2002 (soit + 9,15 millions d'euros) ;
- et de l'instauration d'une bourse sur critères sociaux pour les étudiants de DEA (pour un coût de 6,18 millions d'euros), ce dispositif s'ajoutant au dispositif de bourses sur critères universitaires ;
- de l'autre d'une mesure d'ajustement de - 15 millions d'euros pour tenir compte de la situation réelle des dépenses.
On peut rappeler à cet égard que les crédits demandés pour le chapitre 43-71 ont progressé de 30 % entre 1997 et 2001, mais que la Cour des Comptes avait déjà souligné dans son rapport sur l'exécution des lois de finances pour l'an 2000 que les dépenses effectives n'avaient pas suivi le même rythme de progression sur la période 1998-2000, le taux de consommation de ces crédits baissant à 98 % en 1999 et à 95 % en l'an 2000.
La Cour des comptes concluait à cet égard : « certes, cette évolution... est vraisemblablement due à un « effet retard » du plan étudiant, dont les crédits ont été mis en place en fonction de l'échéancier prévu, alors que le rythme de consommation habituel des crédits et la nouveauté de certaines mesures ont été un frein à leur mise en oeuvre. Mais on doit aussi remarquer que la sur-dotation des chapitres concernés est un phénomène ancien, constaté dès avant l'existence du plan social, qui n'a donc pas été résorbé, malgré les mesures successives d'annulation ayant concerné ce même chapitre depuis plusieurs années [8,28 millions d'euros en 1999 et 15,24 millions d'euros en l'an 2000] » ;
De même, votre rapporteur spécial avait observé l'an passé, dans son rapport sur le projet de loi de finances pour 2002 que les systèmes d'information et les capacités de pilotage du ministère en matière de bourses étaient particulièrement défaillants , puisque celui-ci était incapable de dénombrer rétrospectivement les boursiers le, comme d'estimer de manière satisfaisante le nombre d'étudiants boursiers de l'année universitaire en cours. Ainsi, le nombre de boursiers de l'année universitaire 2000-2001 avait été surestimé de plus de 5 % au moment de la rentrée 2000, sans que cet écart ne puisse aucunement se justifier par l'évolution de la démographie étudiante (plus dynamique qu'escompté).
Votre rapporteur spécial s'était alors étonné de l'évolution des crédits demandés pour les bourses pour 2002 et estimé que ces crédits devaient de nouveau avoir été très mal estimés en 2001, sinon en 2002, puis conclu que « la gestion de ce chapitre soulève un problème de sincérité budgétaire (le chapitre servant délibérément de chapitre « réservoir ») et/ou de mal administration du dispositif d'aide sociale du ministère ».
Ce diagnostic s'avère rétrospectivement exact .
Comme le relève la Cour des Comptes dans son rapport sur l'exécution des lois de finances pour 2001, le taux de consommation du chapitre 43-71 ne s'est en effet élevé qu'à 96 % en 2001, et « en prenant en compte les annulations, la sous-consommation s'établit en réalité à 138,4 millions d'euros [soit 11 % du chapitre], signe que la dotation du chapitre reste supérieure aux besoins réels »
De même, le gouvernement a annulé 30 millions d'euros de crédits sur ce chapitre pour 2002 par un décret du 8 novembre 2002.
Cette sous-consommation financière des crédits de bourses et secours d'étude trouve sans doute son origine dans la surestimation des besoins théoriques, dont on peut se demander dans quelle mesure elle résulte de nouvelles erreurs de prévisions économiques ou du nombre d'étudiants 117 ( * ) et dans quelle mesure elle résulte d'une volonté d'affichage politique ou du souhait du ministère de disposer d'un chapitre réservoir lui permettant de faire face sans difficultés aux régulations budgétaires.
Mais on peut également rappeler que la sous-consommation des crédits de bourse trouve également son origine dans la mal administration de certains dispositifs de bourse 118 ( * ) , comme :
- les « allocations d'études » allouées par les recteurs et destinées à aider les étudiants confrontées à des situations personnelles difficiles (par exemple la rupture des liens familiaux) mais ne répondant pas aux critères sociaux (notamment lorsque les ressources de leurs parents sont au dessus des plafonds prévus). Le contingent de ces allocations d'études fut porté de 7 000 à la rentrée 1999 à 11 000 à la rentrée 2001, mais le taux de consommation de ce contingent fut seulement de 77 % en 1999-2000 et de 89 % en 2000-2001 en raison d'un défaut d'information des étudiants et des difficultés de gestion d'un dispositif parcimonieux et par essence relativement discrétionnaire. De même, pour l'année universitaire 2001-2002, seules 4.247 allocations d'études sur 11.000 avaient été mises en paiement entre le 1 er septembre 2001 et le 31 décembre 2001 ;
- les bourses de mérite d'un montant maximum de 6.102 euros par an pour les étudiants bacheliers avec mention très bien issus de familles modestes et se destinant aux études de médecine ou aux études menant vers les concours d'entrée à l'ENA, à l'École nationale de la magistrature (ENM) ou aux grandes écoles scientifiques. Le nombre de ces bourses a été progressivement porté de 200 à la rentrée 1998 à 800 à la rentrée 2001, mais le taux de consommation de ces bourses baissant de 95 % en 1998-1999 à 91 % en 1999-2000 puis à 83 % en 2000-2001 ;
- les bourses sur critères universitaires accordées par les recteurs à partir d'un contingent académique, sur proposition des présidents d'université et en fonction de critères universitaires et sociaux à des étudiants suivant des formations particulières : DEA, DESS, agrégation et préparation des concours de la haute fonction publique. Le nombre effectif de boursiers sur critères universitaires s'est ainsi replié de 14 % à la rentrée 2001-2002 par rapport à la rentrée 2000-2001.
* 114 Ces crédits destinés aux bourses proprement dites sont accordées par le recteur, après instruction des dossiers par les CROUS, aux étudiants suivant des formations habilitées (soit 1,7 million d'étudiants sur 2,1 millions), et se partagent entre :
- 1.222 million d'euros destinés aux bourses sur critères sociaux (environ 463 000 en 2001-2002) attribuées en fonction des ressources et des charges des parents ou du tuteur légal appréciées en fonction du barème national. Leur montant maximum était de 3.456 euros par an en 2001-2002 ;
- 48,5 millions d'euros destinés aux bourses sur critères universitaires (environ 12.600 en 2001-2002) accordées par les recteurs sur proposition des présidents d'université en fonction de critères universitaires et sociaux à des étudiants suivant des formations particulières : DEA (7.042 en 2001-2002), DESS (3.236 en 2001-2002), agrégation (1.613 en 2001-2002) et bourses de services public pour des étudiants préparant des concours de la haute fonction publique, au nombre de 676 en 2001-2002 ;
- 4,9 millions d'euros destinés aux bourses de mérite.
* 115 Ce chapitre regroupe en effet quatre articles d'importance très inégale :
- l'article 43-71.20 regroupe les crédits demandés pour le fonds de solidarité universitaire, soit 3,5 millions d'euros en l'an 2003 (sans changement par rapport à 2002) :
- l'article 43-71.40 regroupe les crédits destinés aux prêts d'honneur sans intérêt, remboursables au plus tard 10 ans avant la fin des études et accordés par un comité académique spécialisé. Les crédits demandés pour cette action s'élèvent comme en 2002 à 3,05 millions d'euros. En cours de gestion, ces crédits sont traditionnellement abondés par les fonds de concours résultant des remboursements effectués par les étudiants (à hauteur de 3,05 millions d'euros en 2001) ;
- l'article 43-71.40 regroupe l'ensemble des « bourses spéciales pour l'étranger », c'est à dire les bourses associées aux stages industriels et commerciaux (à hauteur de 1,83 million d'euros en 2002), les « bourses d'enseignement supérieur et frais de voyage à l'étranger, notamment dans les pays de langue arabe » (à hauteur de 99.275 euros en l'an 2002), les autres secours exceptionnels aux enfants de familles françaises résidant à l'étranger (à hauteur de 2.623 euros seulement en l'an 2002), enfin et surtout les aides complémentaires aux bourses ERASMUS (à hauteur de 4,57 millions d'euros en l'an 2002, soit en moyenne trois euros par an par étudiant des universités, ce qui permet d'allouer aux étudiants concernés une aide très modeste - de l'ordre d'une quarantaine d'euros par mois durant un semestre -) ;
- l'article 43-71.10 comprend en fait en fait 99 % des crédits de ce chapitre. Il regroupe à la fois des crédits destinés à des actions sociales diverses : « voyages de port à port », frais de transport des étudiants handicapés vers les établissements universitaires, etc., pour un montant cumulé de 2 millions d'euros en 2002 ; la contribution de l'Etat au financement de la carte « Imagine R » permettant aux étudiants franciliens de voyager avec 40 % de réduction dans les transports collectifs parisiens (290.000 étudiants étant concernés en 2000-2001), à hauteur de 11,4 millions d'euros en 2003, enfin les bourses proprement dites.
* 116 Soit un rythme légèrement inférieur à celui de l'inflation des prix à la consommation.
* 117 Notamment de la sous-estimation de l'impact de la conjoncture économique. On peut en effet que les plafonds et les taux des bourses ne sont pas indexés sur l'inflation. En outre, la proportion d'étudiants ayant droit à des bourses et le taux des bourses auxquelles ils ont droit tendent à baisse lorsque les revenus des ménages accélèrent.
* 118 Dans son rapport public pour l'an 2000, l'IGAENR soulignait par exemple à cet égard les « conséquences fâcheuses » des » ignorances réciproques » entre les CROUS et les universités en matière de gestion des bourses.