Relance de la négociation collective en matière de licenciements économiques
GOURNAC (Alain)
RAPPORT 105 (2002-2003) - Commission mixte paritaire
Rapport au format Acrobat ( 36 Ko )Table des matières
Document
mis en distribution le
19 décembre 2002
N° 509
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N° 105
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Enregistré à la Présidence de
l'Assemblée nationale
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Annexe au
procès-verbal de la séance
|
RAPPORT
FAIT
AU NOM DE LA COMMISSION MIXTE PARITAIRE (1) CHARGÉE DE PROPOSER UN TEXTE SUR LES DISPOSITIONS RESTANT EN DISCUSSION DU PROJET DE LOI portant relance de la négociation collective en matière de licenciements économiques ,
PAR
M. J
EAN-MICHEL
D
UBERNARD
,
|
PAR
M.
ALAIN GOURNAC
,
|
(
1)
Cette commission est composée de
:
M. Pierre Morange,
député, président ;
M. Nicolas About, sénateur, vice-président ;
M. Jean-Michel Dubernard, député, M. Alain
Gournac,sénateur, rapporteurs.
Membres titulaires : MM.Dominique Dord, Claude Gaillard, Mme Chantal
Bourragué, M. Gaëtan Gorce, Mme Catherine Génisson,
députés ; MM. Serge Franchis, Jean-Louis Lorrain, Mme
Valérie Letard, MM. Gilbert Chabroux, Roland Muzeau,
sénateurs.
Membres suppléants : Mmes Muriel Marland-Militello,
Brigitte Le Brethon, MM. Christian Kert, Edouard Landrain, Francis
Vercamer, Jean le Garrec, Mme Muguette Jacquaint, députés ;
MM.Guy Fischer, Jean-Pierre Fourcade, Jean-Pierre Godefroy, Jean-Marc Juilhard,
André Lardeux, Bernard Seillier, Louis Souvet, sénateurs.
Voir les numéros
:
Assemblée nationale
(
12
ème
législ.) : Première lecture :
375
,
386
.
Sénat
:
91
,
92
et T.A.
41
(2002-2003).
Emploi. |
Mesdames, Messieurs,
Conformément au deuxième alinéa de l'article 45 de la
Constitution et à la demande de M. le Premier ministre, une
commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les
dispositions restant en discussion du projet de loi relatif portant relance de
la négociation collective en matière de licenciements
économiques s'est réunie le 18 décembre 2002 à
l'Assemblée nationale.
La commission a tout d'abord procédé à la constitution de
son bureau. Elle a élu :
-
M. Pierre Morange
, député,
président ;
-
M. Nicolas About
, sénateur, vice-président.
Elle a ensuite désigné :
-
M. Jean-Michel Dubernard
, député, rapporteur
pour l'Assemblée nationale ;
-
M. Alain Gournac
, sénateur, rapporteur pour le
Sénat.
La commission mixte paritaire a ensuite procédé à l'examen
du texte.
M. Alain Gournac, rapporteur pour le Sénat,
a tout d'abord
rappelé que le Sénat a adopté sans modification les six
articles du texte transmis par l'Assemblée nationale, suivant en cela la
position de sa commission des affaires sociales. Il est vrai que
l'équilibre de ce texte sur les licenciements est satisfaisant. En
effet, il ne vise pas à réformer au fond le droit du
licenciement, mais se borne à suspendre, à titre transitoire,
l'application de certaines dispositions de la loi du 17 janvier 2002. En
cela, il renvoie au dialogue social le soin de faire évoluer les
règles applicables et à une future loi la tâche d'apporter,
au vu des résultats de la négociation interprofessionnelle, les
nécessaires modifications d'ordre législatif.
Le champ des articles de la loi du 17 janvier, dont l'application est
suspendue, est défini de sorte que la future négociation
interprofessionnelle puisse se dérouler dans les meilleures conditions
et aboutir à un accord. Les débats parlementaires ont permis de
préciser, de façon claire, la portée des accords
expérimentaux prévus à l'article 2. Ils n'ont bien
sûr pas vocation à déroger aux dispositions d'ordre public
des livres III et IV du code du travail, mais visent seulement
à permettre l'aménagement des modalités de mise en oeuvre
de ces dispositions, dans le respect des prérogatives du comité
d'entreprise.
Les nouvelles dispositions relatives au harcèlement moral introduites
à l'Assemblée nationale ont paru très raisonnables. Il est
vrai qu'elles reprennent la position défendue par le Sénat l'an
passé sur ce sujet, tant sur le régime de la charge de la preuve
que sur la procédure de médiation.
S'agissant de l'article 6, le Sénat a fait part de sa grande
réserve quant à l'intervention du Fonds de solidarité
vieillesse (FSV) dans le champ de la protection sociale complémentaire.
Il a néanmoins jugé possible d'accepter, à titre
transitoire, une telle extension des missions du FSV, compte tenu des
engagements pris par le gouvernement pour une rapide mise en ordre des circuits
financiers de la sécurité sociale.
Le Sénat a toutefois souhaité introduire trois nouveaux articles
qui, sans être dénués de tout lien avec le texte,
n'abordent pas directement la question centrale des licenciements.
L'article 7 ouvre explicitement un nouveau cas de recours au contrat
à durée déterminée (CDD) : le remplacement
temporaire d'un chef d'exploitation agricole, de son conjoint collaborateur ou
d'un collaborateur non salarié. Il s'agit ainsi de sécuriser une
pratique dont la base juridique apparaît fragile. Mais il sera sans doute
nécessaire d'insérer ultérieurement dans le code du
travail une disposition générale autorisant le remplacement de
tous les non-salariés par un salarié en CDD, plutôt que
d'introduire progressivement une série de dispositions visant chaque
profession non salariée.
L'article 8 tend à favoriser l'accès des salariés en
CDD à la formation professionnelle. Il s'agit d'un véritable
impératif car le manque de qualification des salariés en CDD fait
trop souvent obstacle à leur embauche en CDI ou à l'obtention
d'un autre travail.
Le dispositif revient en partie sur l'article 125 de la loi du
17 janvier 2002. Cet article avait relevé de 6 % à
10 % de la rémunération perçue
« l'indemnité de précarité »
en
fin de CDD. L'article 8 prévoit qu'un accord de branche
étendu peut maintenir cette indemnité au taux de 6 %,
à la condition que cet accord organise le développement de la
formation professionnelle et l'accès au bilan de compétences des
salariés en CDD dans le cadre du plan de formation de l'entreprise. Lors
des débats sur la loi de modernisation sociale, une telle solution avait
d'ailleurs été envisagée par le gouvernement
précédent et la majorité d'alors avant d'être
curieusement écartée.
Enfin, l'article 9 est une mesure de validation législative des
actes pris après avis de la Commission supérieure du personnel et
des affaires sociales du service public des postes et
télécommunications entre 1991 et 1995. Ces actes apparaissent en
effet juridiquement fragiles, compte tenu d'une irrégularité dans
la composition de cette commission. Il importe donc d'apporter une
réponse aux quelque 300 000 fonctionnaires dont le statut pourrait
être remis en cause par une éventuelle décision de justice.
M. Alain Gournac, rapporteur pour le Sénat,
a conclu son
propos en estimant que la commission mixte paritaire pourrait sans nul doute
aboutir à un accord, ces trois ajouts du Sénat étant des
mesures de bon sens.
Après avoir remercié le rapporteur du Sénat pour les
précisions apportées sur les travaux du Sénat,
M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur pour l'Assemblée
nationale
, est convenu que les trois articles additionnels introduits par
le Sénat paraissent de bon sens et doivent donc être inclus dans
les conclusions de la commission mixte paritaire.
M. Roland Muzeau, sénateur
, a regretté l'absence
totale de débat ayant présidé à l'examen de ce
texte au Sénat alors qu'il s'agit d'une réforme de très
grande importance. Des dispositions visant à mieux défendre les
salariés, à améliorer l'information des comités
d'entreprise, à permettre la saisine d'un médiateur et à
définir de façon précise le harcèlement moral ont
été supprimées sans même qu'une réponse ait
été apportée par la majorité sénatoriale aux
critiques soulevées par l'opposition.
M. Gaëtan Gorce, député
, a renouvelé les
critiques du groupe socialiste à l'encontre du recours à la
procédure d'urgence pour l'examen de ce texte, ce qui a privé les
assemblées d'un véritable débat et rendu impossible un
dialogue réellement constructif et respectueux avec les partenaires
sociaux.
Il a ensuite rappelé ses très fortes réserves quant au
texte lui-même qui, sous couvert de suspension, procède en
réalité à une abrogation non avouée de nombreuses
dispositions de la loi de modernisation sociale. Il est évident, en
effet, que les dispositions suspendues ne seront nullement rétablies en
cas d'échec des négociations entre les partenaires sociaux.
Les critiques du groupe socialiste ont également porté sur le
contenu de l'article 2 qui permet à des accords collectifs de
déroger à des pans entiers du code du travail en matière
de consultation des institutions représentatives du personnel. Cet
article rend en réalité possible des remises en cause de droits
essentiels pour ces institutions comme la capacité d'être
assisté par un expert-comptable. Ces accords pourront en outre
réduire le nombre des réunions du comité d'entreprise. Il
s'agit donc d'une véritable régression.
Enfin, la réduction à 6 % du taux de la prime versée
en fin de contrat aux salariés détenteurs d'un contrat à
durée déterminé est également très
contestable. Les intérimaires, qui perçoivent une
indemnité de précarité de 10 %, ont aujourd'hui
droit, grâce à une convention signée à ce sujet,
à un dispositif de formation performant. Il aurait donc
été tout à fait envisageable, tout en mutualisant le
dispositif de formation des salariés concernés, de maintenir un
montant d'indemnité de fin de contrat égal à celui des
intérimaires.
Mme Chantal Bourragué, députée,
s'est
réjouie que le texte ait été examiné dans le
même esprit par les deux assemblées, avec la double
préoccupation de maintenir la nécessaire protection des
salariés et de mettre fin à une insécurité
juridique liée au formalisme excessif des procédures. Par
ailleurs, l'article additionnel adopté par le Sénat sur
l'indemnité de précarité, sans rien changer au coût
du travail, étendra l'accès à la formation pour les
salariés en CDD.
M. Nicolas About, vice-président
, a formulé les
remarques suivantes :
- Le procès fait par l'opposition quant au recours à la
procédure d'urgence mérite que l'on rappelle que le projet de loi
de modernisation sociale avait fait initialement l'objet d'une
déclaration d'urgence lors de son dépôt ; les
protestations suscitées par ce projet avaient conduit le gouvernement
à lever l'urgence et à accepter en deuxième lecture
l'introduction, dans la précipitation et en deuxième
délibération, de très nombreux amendements. Dans le cas
présent, la procédure de l'urgence est appliquée à
un texte mesuré, équilibré et cohérent.
- S'agissant de la critique relative au nombre réduit d'amendements
du Sénat, l'opposition elle-même montre son incapacité
à faire mieux que le texte simple et cohérent adopté par
l'Assemblée nationale puisqu'elle n'a guère proposé que
des amendements de suppression.
- Enfin, on ne peut prétendre qu'il n'y a pas eu de
véritable débat ou que le Parlement se dessaisirait de ses
droits, puisqu'il devra au contraire dans dix-huit mois se prononcer sur un
nouveau texte relatif au droit du licenciement économique. L'opposition
ne peut critiquer le fait que, par le présent texte, soit
réintroduit le dialogue social précédemment rompu.
M. Pierre Morange, président
, a souligné que le
primat donné au dialogue social constitue en effet le fil conducteur de
ce texte empreint d'équilibre et de pragmatisme.
La commission mixte paritaire est ensuite passée à l'examen des
articles restant en discussion.
EXAMEN DES ARTICLES
Article 7
(article L. 122-1-1 du code du travail)
Extension des cas de recours au contrat à durée
déterminée
La commission mixte paritaire a adopté cet article dans la rédaction du Sénat.
Article 8
(article L. 122-3-4 du code du travail)
Indemnité de précarité due au salarié en fin de
contrat à durée déterminée et contreparties en
termes de formation professionnelle
La commission mixte paritaire a adopté cet article dans la rédaction du Sénat.
Article 9
Validation législative
La commission mixte paritaire a adopté cet article dans la rédaction du Sénat.
*
La commission mixte paritaire a ensuite adopté l'ensemble du texte ainsi élaboré et figurant ci-après.
TEXTE
ÉLABORÉ PAR LA COMMISSION MIXTE PARITAIRE
PROJET DE LOI PORTANT RELANCE DE LA NÉGOCIATION COLLECTIVE
EN MATIÈRE DE LICENCIEMENTS ÉCONOMIQUES
................................................................................
..........................
Article 7
(Texte du Sénat)
L'article L. 122-1-1 du code du travail est
complété par un 5° ainsi rédigé :
« 5° Remplacement d'un chef d'exploitation agricole ou
d'entreprise tels que définis aux 1° à 4° de l'article
L. 722-1 du code rural, d'un aide familial, d'un associé d'exploitation,
ou de leur conjoint visé à l'article L. 722-10 du même
code dès lors qu'il participe effectivement à l'activité
de l'entreprise ou de l'exploitation agricole. »
Article 8
(Texte du Sénat)
Le
deuxième alinéa de l'article L. 122-3-4 du code du travail
est complété par trois phrases ainsi rédigées :
« En vue d'améliorer la formation professionnelle des
salariés sous contrat de travail à durée
déterminée, une convention ou un accord collectif de branche
étendu peut également prévoir de limiter ce versement
à hauteur de 6 %, dès lors que des contreparties sont offertes,
dans cette perspective, à ces salariés, notamment sous la forme
d'un accès privilégié à la formation
professionnelle. Dans ce cas, la convention ou l'accord collectif de branche
étendu peut prévoir les conditions dans lesquelles ces
salariés peuvent suivre, en dehors du temps de travail effectif, une
action de développement des compétences telle que définie
à l'article L. 932-2, ainsi qu'un bilan de compétences. Ces
actions sont assimilées à des actions de formation ou de bilan de
compétences réalisées dans le cadre du plan de formation
au titre du dixième alinéa (1°) de l'article L. 951-1
et au titre de l'article L. 952-1. »
Article 9
(Texte du Sénat)
Sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, sont validés les actes pris après avis de la Commission supérieure du personnel et des affaires sociales instituée par le décret n° 90-1122 du 18 décembre 1990 relatif à la Commission supérieure du personnel et des affaires sociales du service public des postes et télécommunications, en tant que leur régularité serait mise en cause sur le fondement de la composition irrégulière de cette commission entre le 1 er janvier 1991 et le 18 juillet 1995.
TABLEAU COMPARATIF
___
Texte
adopté par l'Assemblée nationale
|
Texte
adopté par le Sénat
|
Projet de loi portant relance de la négociation collective en matière de licenciements économiques |
Projet de loi portant relance de la négociation collective en matière de licenciements économiques |
Articles |
1 er à 6 |
.......................................................................Con |
formes.................................................................. |
|
Article 7 (nouveau) |
|
L'article L. 122-1-1 du code du travail est complété par un 5° ainsi rédigé : |
|
« 5° Remplacement d'un chef d'exploitation agricole ou d'entreprise tels que définis aux 1° à 4° de l'article L. 722-1 du code rural, d'un aide familial, d'un associé d'exploitation, ou de leur conjoint visé à l'article L. 722-10 du même code dès lors qu'il participe effectivement à l'activité de l'entreprise ou de l'exploitation agricole. » |
|
Article 8 (nouveau) |
|
Le deuxième alinéa de l'article L. 122-3-4 du code du travail est complété par trois phrases ainsi rédigées : |
|
« En vue d'améliorer la formation professionnelle des salariés sous contrat de travail à durée déterminée, une convention ou un accord collectif de branche étendu peut également prévoir de limiter ce versement à hauteur de 6 %, dès lors que des contreparties sont offertes, dans cette perspective, à ces salariés, notamment sous la forme d'un accès privilégié à la formation professionnelle. Dans ce cas, la convention ou l'accord collectif de branche étendu peut prévoir les conditions dans lesquelles ces salariés peuvent suivre, en dehors du temps de travail effectif, une action de développement des compétences telle que définie à l'article L. 932-2, ainsi qu'un bilan de compétences. Ces actions sont assimilées à des actions de formation ou de bilan de compétences réalisées dans le cadre du plan de formation au titre du dixième alinéa (1°) de l'article L. 951-1 et au titre de l'article L. 952-1. » |
|
Article 9 (nouveau) |
|
Sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, sont validés les actes pris après avis de la Commission supérieure du personnel et des affaires sociales instituée par le décret n° 90-1122 du 18 décembre 1990 relatif à la Commission supérieure du personnel et des affaires sociales du service public des postes et télécommunications, en tant que leur régularité serait mise en cause sur le fondement de la composition irrégulière de cette commission entre le 1 er janvier 1991 et le 18 juillet 1995. |