Annexe 68 - LES PROCÉDÉS DE TRAITEMENT DE L'EAU DESTINÉE À LA CONSOMMATION HUMAINE
Source : l'eau et les collectivités locales, ouvrage collectif, éditions le Moniteur, 1991
1. La désinfection
La désinfection consiste à éliminer les germes pathogènes qui peuvent être présents dans l'eau brute.
La désinfection est une étape commune à tous les traitements et sans doute la plus importante de toutes. Certes, les eaux souterraines sont souvent naturellement dépourvues de germes pathogènes, mais, par infiltration, une contamination accidentelle est toujours possible dans les nappes des sous-sols calcaires.
Trois principaux agents désinfectants, oxydants
puissants, sont utilisés: le chlore, le bioxyde de chlore et
l'ozone.
• Désinfection par le chlore
C'est le procédé le plus utilisé, car il est peu onéreux et sa technique est très simple : sur un forage de faible débit en zone rurale, une bouteille de chlore gazeux et un organe de dosage peu sophistiqué suffisent.
Dans l'eau, le chlore ou plus exactement l'une des formes du chlore -HCLO- est stérilisante et peut pénétrer la membrane cellulaire pour inhiber les fonctions enzymatiques de la bactérie.
Pour une eau à température de 15 °C et à pH 7,5, une dose de chlore de 0,3 mg/l, maintenue pendant dix à vingt minutes, suffit à assurer la destruction des bactéries. L'efficacité du chlore dépend toutefois de la température de l'eau et du pH. Dans les eaux chaudes et pour les pH élevés, d'une part, la proportion de HClO baisse très vite, d'autre part, les matières oxydables par le chlore, matières organiques et surtout ammoniaque, consomment du chlore et rendent donc une partie de la dose introduite inutilisable pour la désinfection, et il faut alors mettre beaucoup plus de chlore.
Le chlore est efficace également contre les bactéries, mais l'efficacité de son action contre les virus est moins connue. La sécurité impose en général de mettre plus de chlore.
Le moyen le plus sûr de réduire la formation de sous-produits de chloration consiste à ne traiter l'eau qu'après avoir éliminé la matière organique.
• Le bioxyde de chlore (ClO2)
peut être utilisé. Il est instable et doit être fabriqué sur place au dernier moment. Mais il n'oxyde pas l'ammoniaque ; et peut être préféré au chlore, pour éviter de donner à l'eau un goût désagréable.
• Désinfection par l'ozone
L'ozone peut être obtenu industriellement par décharge électrique dans l'air très sec. C'est un oxydant très puissant. Il se présente comme un gaz instable, qui doit donc être produit sur place dans des ozoneurs industriels.
La principale différence entre l'ozonation et la désinfection par le chlore est une efficacité plus sûre contre les virus. Des études ont montré que l'élimination des virus était garantie par la présence dans l'eau d'au moins 0,4 mg/l d'ozone pendant 4 minutes. Une étape de désinfection à l'ozone dans une filière de traitement d'eau s'avère dont être une des meilleures barrières contre les risques de contamination. L'ozonation entraîne la formation de sous-produits de réaction, les bromates. L'utilisation de l'ozone est, par contre, plus complexe et plus onéreuse que celle du chlore ou du bioxyde de chlore.
2. La clarification
• La décantation
Elle consiste à débarrasser l'eau des matières en suspension, algues et particules, qui se présentent pour l'essentiel sous forme colloïdale. (substance dispersée de même signe électrique) Cette phase est très importante car elle élimine les microparticules qui constituent un support pour les bactéries.
La stabilité des suspensions de particules argileuses est due à la couche externe électronégative qu'elles portent. Les forces électrostatiques de répulsion empêchent les particules de s'agglomérer.
Les réactifs coagulants utilisés sont généralement des sels de métaux : fer ferrique ou aluminium. Les argiles et les autres particules colloïdales, acides humiques, minéraux, sont ainsi coagulés.
Les sels métalliques utilisés produisent également des hydrates qui se constituent en flocons, formant ainsi de véritables petites éponges qui ramassent au passage les particules en suspension. Il se constitue donc un « floc » qui tombe très lentement. De nombreuses molécules organiques sont éliminées par la même occasion par adsorption sur le floc. L'ensemble de ces premières étapes de la clarification est généralement appelé « coagulation-floculation ».
• La flottation
Certaines qualités d'eau contiennent peu de matières en suspension, mais plutôt des matières organiques dissoutes que l'ajout d'un sel métallique va transformer en particules insolubles.
Il est alors plus avantageux de procéder à la séparation entre ce floc et l'eau par une opération de flottation plutôt que par décantation.
Cette opération consiste à mettre tout ou partie de l'eau floculée en contact avec de l'air dans une enceinte maintenue à une pression de 5 à 8 bars, puis à ramener brutalement le mélange à la pression atmosphérique. Tout l'air préalablement dissous sous pression se dégage alors sous forme de micro-bulles.
Ces bulles s'attachent au floc qu'elles ramènent ainsi à la surface du bassin d'où il est évacué sous forme d'une écume gorgée d'air. L'eau clarifiée est, elle, soutirée au fond du flottateur.
3. La filtration
La filtration est un procédé essentiellement mécanique qui consiste à faire passer l'eau à travers un filtre physique qui va retenir toutes les particules plus grandes que les tailles des pores du filtre.
Le premier filtre est la filtration sur lit de sable. La filtration de l'eau potable, les volumes considérables concernés ont imposé la technique simple et peu coûteuse de la filtration sur sable. Les grains de sable, dont les dimensions sont de l'ordre du millimètre, forment un empilage qui est traversé par l'eau et va arrêter, par simple effet de tamisage mécanique, les particules plus grosses que les intervalles situés entre les grains.
Ainsi, les grosses particules seront arrêtées dès la surface du filtre. Des particules plus petites seront également retenues par effet de paroi sur la surface des grains.
Le pouvoir d'arrêt du filtre sera d'autant plus grand que le diamètre des grains sera plus faible et que le temps de séjour de la particule dans le filtre sera plus long, les chances de rencontre avec la surface d'un grain étant ainsi accrues. Pour avoir un long temps de séjour, il faut que la vitesse soit faible ou que la hauteur du filtre soit grande.
La granulométrie du sable est un facteur déterminant pour l'efficacité du filtre. Cette dernière est caractérisée par deux chiffres : la dimension moyenne des grains et la dispersion des dimensions autour de cette moyenne. Au cours du lavage, de bas en haut qui fluidise le lit de sable, s'effectue un classement des grains par taille, les plus fins étant en haut et les plus gros en bas. C'est exactement le contraire de la position idéale : les grains fins rencontrent l'eau sale et les gros grains l'eau propre. On ne peut éviter ce phénomène et on en minimise les effets en utilisant des grains de taille uniforme, après un calibrage très soigné du sable.
L'efficacité de la filtration est attestée par la valeur de la turbidité de l'eau filtrée. Une eau correctement filtrée doit accuser moins de 0,5 unité néphélométrique ou NFU.
Effectuer un lavage complet du filtre colmaté pour lui faire retrouver son pouvoir filtrant initial est un impératif absolu. Il faut donc en extraire tout le floc qu'il a arrêté.
• La microfiltration sur membranes
La filtration sur membrane est de plus en plus fréquemment utilisée pour le traitement de l'eau en remplacement des filtres traditionnels à sable.
Le principe de la filtration sur membranes consiste à utiliser une fine surface filtrante garnie de pores réguliers de très petite dimension. Les membranes sont constituées de polymères organiques ou de fines poudres minérales agglomérées (alumine, zirconium, carbone).
Contrairement aux filtres à sables qui fonctionnent par tamisage vertical, les filtres à membranes sont des cylindres dans lesquels l'eau est sous pression et part à travers des pores de très petite dimension. Les membranes sont classées par taille d'orifices : on distingue la microfiltration, l'ultra filtration, la nanofiltration dont la taille des pores est de l'ordre de quelques dizaines d'Angströms (soit quelques millionièmes de millimètres).