ANNEXE II -
ETUDE D'IMPACT -
CONVENTION N° 1669
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Projet de loi autorisant la ratification de la Convention n° 166 de l'Organisation internationale du Travail concernant le rapatriement des marins (révisée)
I - Etat de droit et situation de fait existants et leurs insuffisances
Dans la pratique, un marin est dit abandonné lorsqu'il n'a plus de lien avec l'armateur ou son représentant. Ceci se traduit soit par la cessation du versement de la rémunération, soit par l'absence d'instructions de la part de l'armateur, soit enfin par la perte de contact avec son représentant.
La multiplication récente des affaires d'abandon d'équipages sans ressources dans les ports français par des armateurs, dont le navire avait été jugé hors d'état de reprendre la mer par un contrôle de l'inspection maritime, illustre l'utilité de l'entrée en vigueur de la Convention n° 166. La Convention n° 23 de 1926 sur le rapatriement des marins ne correspondait plus aux réalités modernes et il convenait de donner aux Etats membres de nouvelles armes juridiques pour lutter contre les armateurs indélicats.
II - Bénéfices escomptés en matière :
* d'emploi :
La ratification de la Convention n° 166 constitue un signal fort pour le secteur maritime dans la mesure où elle manifeste la volonté de résorber les situations de marins abandonnés dans les ports nationaux. Elle renforce par là l'attractivité du métier, même si elle n'engendre pas d'effet direct sur le niveau de l'emploi des navigants français.
* d'intérêt général :
La ratification de la Convention n° 166 présente un particulier intérêt lorsqu'il n'y a pas de retard dans le paiement des salaires et qu'il est possible de réduire sans délai un équipage d'exploitation à une équipe de garde.
L'intérêt de la France, comme du secteur maritime en général, serait de s'engager sur la voie d'une ratification coordonnée de cet instrument au sein de l'Union Européenne, afin qu'il soit ultérieurement intégré dans la Convention n° 147 de l'OIT (via l'annexe B du Protocole de 1996), autorisant ainsi son contrôle par l'Etat du port dans le cadre du Memorandum de Paris.
* financière :
L'article 4 point 2 de la Convention prévoit que le rapatriement du marin est à la charge de son armateur.
Le rapatriement est actuellement organisé en liaison avec les autorités de l'Etat du pavillon, les autorités administratives françaises, les organisations représentant les marins et notamment la Fédération Internationale des Transports.
Si l'employeur n'assume pas son obligation de rapatriement, la situation du ressortissant français est examinée comme celle d'un ressortissant français en difficulté à l'étranger et peut donner lieu, sous certaines conditions, à un rapatriement pris en charge par les autorités consulaires françaises.
Le remboursement des frais avancés, s'il ne s'effectue pas de manière amiable, se fait par saisine de l'autorité juridictionnelle compétente.
La France ne recourt pas à des procédures de rapatriement forcé, d'expulsion ou de refoulement pour régler la situation des marins abandonnés.
Le régime obligatoire de sécurité sociale français, dans le cadre de son action sanitaire et sociale, vient en aide aux gens de mer affiliés à l'ENIM dès lors qu'ils rencontrent des difficultés dues à la maladie ou à un accident. Cette aide ne s'étend ni aux non affiliés, ni aux conséquences d'autres difficultés que la maladie ou l'accident. Il n'existe donc pas de fonds d'aide aux gens de mer.
* de simplification des formalités administratives :
Conformément à l'article 6, tout marin en instance de rapatriement doit être en mesure d'obtenir son passeport et toute autre pièce d'identité. En conséquence, la France pourra faire pression sur l'Etat d'origine des marins, afin qu'il leur délivre d'urgence un nouveau passeport ou un laissez-passer dans le cas, fréquent, ou l'armateur a saisi les passeports de l'équipage et a disparu.
* de complexité de l'ordonnancement juridique :
La législation française est déjà conforme aux dispositions de la Convention et il n'y aura donc pas de modification de l'ordre juridique interne.
En effet, la France a ratifié la Convention OIT n° 108 (décret du 16 janvier 1968). A ce titre, elle reconnaît les marins titulaires d'un livret professionnel correspondant aux prescriptions de cette convention comme possédant une véritable pièce d'identité, constituant un document international de transport. En application de cette convention, les marins étrangers titulaires d'un tel document sont autorisés, sans visa, à descendre à terre pendant la durée des escales et à transiter par le territoire français pour rejoindre leur port d'embarquement.
La durée de séjour de ces marins peut cependant être limitée dans le temps : elle est subordonnée, dans tous les cas, à la durée d'escale du navire et peut être précisée dans le cadre d'accords maritimes bilatéraux. Par ailleurs, et notamment dans la situation particulière d'abandon, certaines directions départementales du contrôle de l'immigration et de la lutte contre l'emploi des clandestins limitent leur liberté de circulation à la zone portuaire « stricto sensu ».
Les créances des marins résultant de leur contrat d'engagement maritime sont protégées par la loi n° 67-5 du 3 janvier 1967 portant statut des navires et autres bâtiments de mer. En application de cette loi (article 31), les créances résultant du contrat d'engagement du capitaine, de l'équipage et des autres personnes engagées à bord sont des créances privilégiées de troisième rang.
La loi précise en outre (article 60) que la limitation de responsabilité de l'armateur n'est pas opposable aux créances des marins résultant du contrat d'engagement ainsi qu'aux créances de toute autre personne employée à bord du navire en vertu d'un contrat de travail.
Ces dispositions sont également applicables aux marins étrangers embarqués sur un navire battant pavillon français. Elles s'appliquent également aux marins embarqués sur les navires immatriculés sous registre des Terres australes et antarctiques françaises (TAAF) sous l'égide d'un contrat de travail de droit français, la loi du 3 janvier 1967 étant applicable à ce territoire.
La France n'applique pas de procédure de « rapatriement forcé » tant que les marins assurent la garde de leur navire. En principe, le rapatriement du marin abandonné ne s'effectue, au plus tôt, qu'après la prise de garantie des marins (saisie du navire et assignation devant les tribunaux).
L'assistance aux marins abandonnés pour la fourniture de nourriture et de vêtements est assurée :
- par les associations bénévoles et caritatives et notamment les associations d'accueil de marins ;
- par les services d'action sociale de la commune concernée ;
- par le service social des gens de mer (réseau d'assistantes sociales notamment) ;
- par les syndicats de marins.
Les services portuaires peuvent être conduits à fournir le navire en eau et électricité.
Les soins de santé de ces marins sont assurés par les associations humanitaires, ainsi que par les hôpitaux locaux, mais le service de santé des gens de mer peut être conduit à intervenir dans certaines situations.
Les marins, y compris étrangers, bénéficient de l'accès au système judiciaire. Ils peuvent, s'ils remplissent les conditions d'obtention, bénéficier d'une assistance juridictionnelle. Ils sont souvent aidés dans leur démarche, par les syndicats représentant les marins et leur réseau d'avocats.
Les marins bénéficient dans certaines situations particulièrement difficiles de l'action sociale communale. Ils peuvent, pour de courtes durées, être hébergés dans des foyers de marins, le problème étant la prise en charge financière de ce type de séjour.
En application des articles 87 à 90 du code du travail maritime, l'armateur a l'obligation légale de veiller au rapatriement du marin. Le marin a ainsi le droit d'être reconduit jusqu'à son port d'embarquement. Si le marin a été embarqué dans un département ou un territoire d'outre mer, le rapatriement est assuré jusqu'au port d'embarquement, à moins qu'il n'ait été stipulé qu'il serait ramené en France métropolitaine.
En cas de non prise en charge du rapatriement par l'armateur, il appartient au marin de saisir l'autorité maritime d'une demande de conciliation et en cas d'échec de saisir le tribunal d'instance compétent et faire valoir le manquement de l'armateur aux articles 87 à 90 du code du travail maritime.
Ces dispositions s'appliquent aux marins étrangers embarqués sur les navires battant pavillon français. En effet :
- d'une part, l'article 119 alinéa 2 du code du travail maritime dispose que l'armateur sera considéré comme ayant satisfait à l'obligation de rapatriement lorsque les marins étrangers sont ramenés à leur port d'embarquement.
- d'autre part, la Convention n° 23 de l'OIT ratifiée par la France, prévoit que l'autorité publique du pays dans lequel le navire est immatriculé est tenue de veiller au rapatriement de tous les marins sans distinction de nationalité, conformément à la législation de l'Etat du pavillon.
Sont à la charge de l'armateur le transport, le logement et la nourriture ; en cas de nécessité, à la suite d'un évènement de mer, par exemple, le capitaine doit faire l'avance des frais indispensables. En cas de difficultés sérieuses, les autorités consulaires peuvent également intervenir pour veiller au rapatriement du marin, ressortissant français, dans les meilleures conditions.
Il n'existe pas de dispositions législatives ou réglementaires assurant la prise en charge par l'Etat du port du rapatriement des marins de l'Etat du pavillon. La France a néanmoins conclu avec un certain nombre d'Etat des accords maritimes bilatéraux où figurent des clauses relatives notamment à l'assistance et au rapatriement des marins. Selon le principe de la primauté de ces accords sur la législation interne l'assistance et le rapatriement des marins ressortissants de ces états s'effectuent conformément aux dispositions de ces accords.
Enfin, dans certains cas limités d'une exceptionnelle gravité, la France a, en tant qu'Etat du port, pris en charge le rapatriement de marins étrangers à la place de l'armateur et de l'Etat du pavillon.
* 9 Texte transmis par le Gouvernement pour l'information des parlementaires.