C. LES PROPOSITIONS DE LA COMMISSION DES LOIS
Votre commission des Lois vous soumet onze amendements ayant pour objet, outre des modifications d'ordre rédactionnel, de mieux assurer l'autonomie financière des collectivités territoriales.
1. Codifier les dispositions du projet de loi organique
Votre commission vous soumet cinq amendements ayant pour objet de codifier les dispositions du présent projet de loi organique dans le code général des collectivités territoriales ( article additionnel avant l'article premier, articles premier, 2, 3 et 4) .
2. Redéfinir les ressources propres des collectivités territoriales
Votre commission des Lois vous soumet un amendement ayant pour objet de prévoir que, parmi les impositions de toutes natures, seules constituent des ressources propres les recettes fiscales dont les collectivités territoriales sont autorisées par la loi à fixer l'assiette, le taux ou le tarif ( article 2 ).
Le Gouvernement et les commissions des Lois et des Finances de l'Assemblée nationale ont exprimé la crainte que la Constitution n'impose de considérer les versements représentatifs d'une part non modulable d'un impôt national comme une ressource propre des collectivités territoriales. Pour étayer leur thèse, ils s'appuient sur la rédaction du deuxième alinéa de l'article 72-2 de la Constitution, aux termes duquel le législateur peut octroyer aux collectivités territoriales des recettes fiscales sans nécessairement les autoriser à en fixer le taux ou l'assiette. Qu'ils soient pleinement rassurés. Cette question a été longuement examinée par la commission des Lois.
En prévoyant, d'une part, que les collectivités territoriales peuvent recevoir tout ou partie du produit des impositions de toutes natures, d'autre part, qu'elles peuvent être autorisées à en fixer l'assiette et le taux dans les limites déterminées par la loi, le deuxième alinéa de l'article 72-2 fonde, au lieu d'interdire, la distinction entre deux catégories d'impositions de toutes natures : les recettes modulables et les recettes non modulables .
Le troisième alinéa du même article dispose sans équivoque possible que seules les recettes fiscales « propres » doivent représenter, avec les autres ressources propres, une part déterminante de l'ensemble des ressources de chaque catégorie de collectivités territoriales .
Il confie à la loi organique de définir ce que sont les recettes fiscales propres. Or que sont des ressources propres sinon des recettes dont les collectivités locales ont la maîtrise ?
La définition des ressources propres des collectivités territoriales retenue par votre commission des Lois est pleinement conforme non seulement à la lettre de la Constitution mais également à l'esprit qui a présidé à sa révision et aux interprétations qui en ont été données .
Dans son rapport sur la loi constitutionnelle relative à l'organisation décentralisée de la République, M. Pascal Clément, président de la commission des Lois de l'Assemblée nationale, définissait justement les ressources propres des collectivités territoriales comme « les ressources libres d'emploi, définitivement acquises et dont l'initiative, quant au principe et au montant, relève d'une décision de la collectivité territoriale 17 ( * ) . »
Cette définition reprenait exactement celle que le Gouvernement avait communiquée à votre commission des Lois en réponse aux questions que lui avait adressé son président, M. René Garrec. Lors des débats au Sénat, M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice, avait d'ailleurs souligné l'importance de « l'idée de responsabilité fiscale, qui est le corollaire de la responsabilité démocratique 18 ( * ) . »
Elle correspond également à celle qu'avait retenue le Sénat en adoptant le 26 octobre 2000, sur le rapport de notre collègue M. Patrice Gélard au nom de votre commission des Lois, une proposition de loi constitutionnelle présentée par MM. Christian Poncelet, Jean-Paul Delevoye, Jean-Pierre Fourcade, Jean Puech et Jean-Pierre Raffarin.
Les trois premiers alinéas du texte proposé pour insérer un article 72-1 dans la loi fondamentale, qui ont directement inspiré la rédaction de l'actuel article 72-2 de la Constitution, prévoyaient respectivement que :
« - la libre administration des collectivités territoriales est garantie par la perception de recettes fiscales dont elles votent les taux dans les conditions prévues par la loi ;
« - les ressources hors emprunt de chacune des catégories de collectivités territoriales sont constituées pour la moitié au moins de recettes fiscales et autres ressources propres ;
« - les collectivités territoriales peuvent recevoir le produit des impositions de toute nature.
Ils établissaient ainsi une distinction claire entre les ressources fiscales propres et le produit des impositions de toutes natures.
Soulignons enfin que la définition proposée par votre commission des Lois rejoint celle retenue aussi bien par l'ensemble des associations représentatives des maires et des présidents d'établissements publics de coopération intercommunale que par la recommandation précitée n° 79 (2000) du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux de l'Europe sur les ressources financières des autorités locales.
L'assimilation du produit d'impositions de toutes natures à des ressources propres résulte, en fait, moins de considérations juridiques éminemment fragiles que de la difficulté, en raison de la conjoncture économique et de la réglementation européenne, de permettre aux collectivités territoriales de faire varier, globalement et d'un territoire à l'autre, le poids de la fiscalité.
* 17 Rapport n° 376 (Assemblée nationale - douzième législature), page 105.
* 18 Journal officiel des débats du Sénat du 6 novembre 2002.