III. VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL APPELLE PAR AILLEURS À LA REVALORISATION DES FORMATIONS PROFESSIONNELLES AU TRAVERS NOTAMMENT DU DÉVELOPPEMENT DE L'« ÉDUCATION À L'ORIENTATION »
Très attentif à la promotion de l'enseignement professionnel , votre rapporteur spécial estime toutefois que celle-ci ne doit pas seulement passer par une politique d'offre de formation, mais aussi par la revalorisation des formations professionnelles au travers notamment de la réforme de l'orientation afin que celle-ci ne soit plus un processus de tri, mais bien une aide à la construction d'un projet personnel, tenant compte des capacités et des aspirations de chaque élève .
En effet, comme le relève le Haut conseil de l'évaluation de l'école 2 ( * ) , l'orientation dans notre pays est « connotée négativement puisque les élèves orientés sont les élèves en difficulté, voire en échec, ceux que le système scolaire exclut du cursus « normal ». L'image négative attachée à l'enseignement professionnel et technologique y contribue largement ».
L'orientation en lycée professionnel reste ainsi souvent une orientation par défaut ou par l'échec. Dans un rapport de 2003 portant sur l'amélioration du processus d'orientation et des procédures d'affectation au lycée professionnel, l'IGEN observait ainsi que « malgré la priorité donnée au premier voeu, la procédure d'affectation vers le lycée professionnel est plus souvent subie que résultant d'une orientation positive et revendiquée ; le phénomène étant renforcé par l'usage quasi exclusif des résultats scolaires comme critères d'affectation ».
En outre, les enseignants de collège et de lycée général connaissent fort mal les formations professionnelles vers lesquelles ils orientent leurs élèves en difficulté. Ainsi, seule une faible proportion des élèves (environ 15 %) orientés vers le lycée professionnel auraient un projet professionnel étayé.
Cela se traduit par un gâchis budgétaire et social, sous la forme d'abandons en cours de formation (en moyenne deux fois plus important dans l'enseignement professionnel que dans le second cycle général et technologique, soit plus de 15 % en CAP, près de 15 % en 1ère professionnelle et près de 12 % en seconde professionnelle), la majorité de ces abandons étant due selon l'IGEN à une inadéquation de la formation proposée aux attentes de l'élève.
En retour, ce contexte de l'orientation nourrit une image négative de l'enseignement professionnel, considéré comme la voie de relégation des élèves ayant les performances scolaires les plus faibles et qu'il est nécessaire de « caser ». Le rapport de l'IGEN de janvier 2002 relatif à l'orientation vers le lycée professionnel, note ainsi qu'au « au plan académique, il apparaît clairement que l'orientation est, la plupart du temps, pilotée dans une logique gestionnaire plutôt que pédagogique ».
Dès lors, on peut se féliciter du succès de l'opération de revalorisation de l'enseignement professionnel consistant en la délivrance par le recteur du label de « lycées des métiers » à certains établissements (au nombre de 152 lycées en juin 2004).
Cependant la revalorisation de la filière professionnelle et la rénovation de l'orientation (notamment des conditions d'affectation des élèves en seconde professionnelle) sont indissolublement liés , et passent aussi bien par le développement d'une véritable « éducation à l'orientation » que par la diversification des critères d'affectation, en prenant en compte, en sus des résultats scolaires, les habiletés des élèves (ce que font déjà certaines académies à titre expérimental), ainsi que par le développement des stages.
Votre rapporteur spécial souhaite donc que les efforts entrepris soient poursuivis et approfondis, sous peine de voir s'accentuer la concurrence entre les filières afin d'attirer les élèves, avec pour conséquence la multiplication des formations et des structures sans impact autre que budgétaire. Cela étant, il convient de rappeler que l'amélioration de l'orientation des élèves ne dépend pas seulement de l'éducation nationale , mais aussi de l'évolution des représentations et des valeurs attachées aux différents métiers, ce qui passe par un effort partagé de l'ensemble des institutions publiques et des professionnels.
* 2 Avis du Hcée sur l'évaluation de l'orientation à la fin du collège et au lycée, n° 12, mars 2004.