EXAMEN
DES ARTICLES
PREMIÈRE PARTIE :
CONDITIONS GÉNÉRALES DE
L'ÉQUILIBRE FINANCIER
ARTICLE
PREMIER
Compensations allouées aux collectivités
territoriales au titre des rôles supplémentaires de taxe
professionnelle et de taxe foncière sur les propriétés non
bâties
Commentaire : le présent article tend à mettre fin aux contentieux en cours entre l'Etat et les collectivités territoriales concernant l'absence de prise en compte des rôles supplémentaires pour le calcul des compensations allouées à ces collectivités au titre de divers allègements de fiscalité directe locale, en validant les pratiques administratives. Il propose également une indemnisation forfaitaire des collectivités territoriales au titre de certaines de ces compensations et prévoit les modalités de prise en compte des rôles supplémentaires dans le calcul des compensations pour l'avenir.
I. LES CONTENTIEUX PORTANT SUR L'ABSENCE DE PRISE EN COMPTE DES ROLES SUPPLÉMENTAIRES DANS LE CALCUL DES COMPENSATIONS VERSÉES PAR L'ETAT AUX COLLECTIVITÉS TERRITORIALES
A. LE CONTENTIEUX « COMMUNE DE PANTIN » ET SON RÈGLEMENT
1. L'arrêt du Conseil d'Etat du 18 octobre 2000
Un arrêt du Conseil d'Etat 14 ( * ) en date du 18 octobre 2000 avait donné raison à la commune de Pantin contre l'Etat, sur la non-prise en compte des rôles supplémentaires dans le calcul des dotations de taxe professionnelle allouées en contrepartie de l'abattement de 16 % et de la réduction pour embauche et investissement de la taxe professionnelle 15 ( * ) . D'autres communes engagées dans des contentieux similaires avaient obtenu gain de cause auprès des cours administratives d'appel de Paris et de Marseille.
L'encadré ci-après rappelle la définition des rôles supplémentaires.
Les rôles supplémentaires
Le rôle correspond à la liste des contribuables établie par le centre des impôts, qui indique, pour chacun d'entre eux, la nature de l'impôt auquel il est assujetti, sa base d'imposition, le taux de l'impôt et le montant de la cotisation. C'est le titre officiel qui permet au percepteur de réclamer le paiement de l'impôt et de mettre en oeuvre les dispositions pour en assurer le recouvrement.
Il convient de distinguer les rôles généraux et les rôles supplémentaires :
- les rôles généraux sont ceux qui correspondent à la quasi-totalité des redevables. Ils permettent d'assurer le recouvrement, au profit des collectivités territoriales, des produits que celles-ci ont voté dans leur budget ;
- les rôles supplémentaires sont ceux sur lesquels sont inscrits les contribuables qui ne figurent pas sur les rôles généraux, et sont souvent émis à la suite des contrôles fiscaux effectués auprès des redevables. Ils sont susceptibles d'être émis pendant les trois années suivant celle au titre de laquelle l'imposition est due pour la taxe professionnelle. Pour les taxes foncières et la taxe d'habitation, ils peuvent être mis en recouvrement au plus tard le 31 décembre de l'année suivant celle de l'imposition. Ces rôles ne servent pas à la fixation du taux de l'impôt par les collectivités territoriales et leurs établissements publics. Par conséquent, les rôles supplémentaires procurent aux collectivités territoriales un supplément de recettes fiscales qui n'a pas été pris en compte pour l'établissement de leur budget annuel.
L'arrêt du Conseil d'Etat précité a confirmé le caractère illégal de la minoration par l'Etat de la dotation qu'il versait depuis 1988 aux collectivités territoriales en compensation de la réduction des bases de la taxe professionnelles pour l'embauche et l'investissement (REI) , comme le rappelle l'encadré ci-après.
Les considérants de l'arrêt du Conseil d'Etat du 18 octobre 2000
« Considérant (...) que, par lettre en date du 11 septembre 1991, le maire de la commune de Pantin a demandé au directeur des services fiscaux du département de la Seine-Saint-Denis que la dotation compensatrice ayant été versée à la commune pour les années 1987 à 1991 à raison des réductions des bases d'imposition à la taxe professionnelle pour embauche et investissement soit recalculée de façon à tenir compte des bases d'impositions figurant, non seulement sur les rôles primitifs, mais également sur les rôles supplémentaires de taxe professionnelle ; que sa demande ayant été rejetée et son recours hiérarchique auprès du ministre de l'économie, des finances et du budget étant demeuré sans réponse, la commune de Pantin a demandé l'annulation pour excès de pouvoir de la décision ministérielle implicite de rejet de sa demande née le 2 mai 1992 ; que le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 1 er avril 1999 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a annulé sa décision implicite en tant qu'elle concerne les années 1988, 1989, 1990 et 1991 et a condamné l'Etat à verser, dans un délai de six mois à compter de la notification de son arrêt, la dotation compensatrice revenant à la commune de Pantin à raison des réductions de bases pour embauche ou investissement comprises dans les rôles supplémentaires émis pour cette commune au titre des années 1988, 1989, 1990 et 1991 ;
« Considérant, en premier lieu, qu' il résulte des termes mêmes du IV précité de l'article 6 de la loi de finances pour 1987, dont les dispositions ne limitent pas la dotation qu'il institue à la seule compensation des réductions de base pour embauche et investissement comprises dans les rôles primitifs de la taxe, que la dotation compensatrice au titre d'une année doit être calculée en fonction de la totalité des bases d'imposition à la taxe professionnelle retenues dans les rôles de la commune au titre de cette année, qu'il s'agisse des rôles primitifs ou des rôles supplémentaires ; que, dès lors, contrairement à ce que soutient le pourvoi, la cour administrative d'appel de Paris, qui n'avait pas à se référer aux travaux parlementaires, n'a pas commis d'erreur de droit en donnant cette portée aux dispositions précitées de la loi de finances pour 1987 et en rejetant le moyen tiré par le ministre de ce que la référence aux produits des rôles généraux des impôts locaux pour le calcul de la réduction, à concurrence de 2 % des recettes fiscales de la commune, de sa dotation compensatrice, telle qu'elle figure au IV bis ajouté à l'article 6 précité par la loi de finances pour 1992, impliquerait nécessairement que la dotation compensatrice prévue au IV du même article fût, elle aussi, calculée en fonction des bases comprises dans les seuls rôles primitifs de la taxe professionnelle ;
« Considérant, en deuxième lieu, qu'en jugeant qu'étaient sans influence sur la légalité de la décision attaquée les circonstances, d'une part, que la non prise en compte des rôles supplémentaires serait compensée par l'absence de prise en compte des dégrèvements prononcés en cours d'année et, d'autre part, que les modalités de calcul susindiquées feraient peser une incertitude sur les budgets locaux en faisant varier continuellement leurs ressources en fonction de l'écart positif ou négatif entre les rôles supplémentaires établis et les dégrèvements prononcés, la cour n'a pas commis d'erreur de droit ; (...)
« Considérant qu' il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 75-I de la loi susvisée du 10 juillet 1991 et de condamner l'Etat à payer à la commune de Pantin la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; (...) »
2. L'article 19 de la loi de finances initiale pour 2002
a) La validation de la pratique administrative et l'extinction des contentieux en cours
Le IV de l'article 19 de la loi de finances initiale pour 2002 disposait, afin d'éviter une multiplication de décisions identiques à celle susmentionnée bénéficiant à la commune de Pantin, que « sous réserve des décisions passées en force de chose jugée, les dotations versées sont régulières en tant que leur légalité serait contestée sur le fondement de l'absence de prise en compte des pertes de recettes comprises dans les rôles supplémentaires » 16 ( * ) .
Il s'agissait donc de valider, pour le passé, les pratiques de l'administration fiscale qui avaient été condamnées par l'arrêt du Conseil d'Etat précité, de manière à éviter une explosion des contentieux relatifs à la prise en compte des rôles supplémentaires, ce qui aurait entraîné, outre un coût important à la charge de l'Etat, un engorgement considérable des juridictions administratives.
b) Le versement d'une indemnisation forfaitaire aux communes concernées
La validation des pratiques de l'administration fiscale pour le passé s'est accompagnée d'une indemnisation forfaitaire des communes concernées :
- pour la compensation versée en contrepartie de l'abattement de 16 % des bases de la taxe professionnelle, un abondement forfaitaire de la dotation de compensation de la taxe professionnelle (DCTP) de 177,9 millions d'euros a été prévu, dont le versement interviendrait à hauteur de 45 % en 2002, 25 % en 2003, 20 % en 2004 et 10 % en 2005 ;
- pour la compensation de la réduction pour embauche et investissement (REI), les services fiscaux ont établi un taux forfaitaire de compensation de 8 % sur les rôles supplémentaires émis entre 1998 et 2000. Cette compensation s'est traduite par un abondement de 114,3 millions d'euros de la DCTP, versé à hauteur de 22,9 millions d'euros en 2002, puis 45,7 millions d'euros en 2003 et 2004.
L'article 19 de la loi de finances initiale pour 2002 a donc conduit à majorer la DCTP entre 2002 et 2005, réduisant ainsi l'impact des réductions successives des montants de cette dotation, liées à son rôle de variable d'ajustement dans le cadre de « l'enveloppe normée » du contrat de croissance et de solidarité.
c) Les règles de calcul des compensations pour l'avenir
L'article 19 de la loi de finances initiale pour 2002 précitée a prévu, s'agissant des règles de calcul, pour l'avenir, des deux compensations précitées :
- pour la compensation versée en contrepartie de l'abattement de 16 %, qu'il convenait de ne pas tenir compte des rôles supplémentaires ;
- pour la DCTP attribuée aux collectivités territoriales en contrepartie de la réduction pour embauche et investissement (REI) de la taxe professionnelle, qu'il convenait de tenir compte des bases intégrées par voie de rôles supplémentaires émis à compter de l'année 2001.
d) La position de votre commission des finances sur l'article 19 de la loi de finances initiale pour 2002
Dans son commentaire de l'article 19 précité de la loi de finances initiale pour 2002, votre rapporteur général indiquait qu'il n'approuvait pas « le principe des validations législatives, qui permettent de « laver l'Etat » des erreurs qu'il a commises et de le faire échapper aux décisions judiciaires qui ne manqueraient pas de le condamner. L'importance du nombre de contentieux en cours - près de 300 - justifie cependant à ses yeux qu'un règlement global soit trouvé à cette question.
« Votre rapporteur général reconnaît les efforts du gouvernement pour mettre en oeuvre une compensation équitable, dans le cadre d'une concertation en amont avec les associations d'élus locaux et avec le Comité des finances locales.
« Cependant, la compensation proposée par le gouvernement ne trouve pas « grâce à ses yeux ». (...) les collectivités ayant un contentieux ancien avec l'Etat seront pénalisées par rapport à celles qui n'ont pas réclamé leur dû, dès lors que les premières ont engagé des frais de justice conséquents (...) » .
B. DE NOMBREUX CONTENTIEUX PORTENT SUR D'AUTRES COMPENSATIONS QUI NE TIENNENT PAS COMPTE DE L'ÉMISSION DES RÔLES SUPPLÉMENTAIRES
L'article 19 de la loi de finances initiale pour 2002 précité a mis fin aux contentieux qui étaient en cours concernant la compensation de la réduction pour embauche et investissement et de l'abattement général de 16 % des bases de la taxe professionnelle, et a réglé cette question pour l'avenir.
Toutefois, de nombreuses autres compensations versées par l'Etat n'ont pas tenu compte de l'émission des rôles supplémentaires et s'exposent donc aux mêmes risques juridiques que ceux mis en avant par l'arrêt du Conseil d'Etat « Commune de Pantin » précité . Par conséquent, de nombreuses collectivités territoriales ont engagé des contentieux devant les juridictions administratives sur le fondement de l'absence de prise en compte des rôles supplémentaires. Les compensations dont le calcul est susceptible d'être remis en cause par les juridictions administratives sur le fondement des recours formulés par ces collectivités territoriales sont :
- la réduction de 20 % à 18 % de la fraction imposable des salaires dans l'assiette de la taxe professionnelle, prévue par l'article 13 de la loi de finances rectificative pour 1982 ;
- l'abaissement du taux plafond communal de taxe professionnelle prévu par l'article 18 de la loi de finances rectificative pour 1982 ;
- la prise en compte de la moitié des augmentations de valeurs locatives des équipements et biens mobiliers prévue par l'article 14 de la loi de finances rectificative pour 1982 ;
- la suppression des parts régionale et départementale de taxe professionnelle et l'abattement de 25 % sur les parts communale et intercommunale de taxe professionnelle en Corse prévue par l'article 2 de la loi n° 94-1131 du 27 décembre 1994 portant statut fiscal de la Corse ;
- la suppression des parts régionale et départementale de la taxe foncière sur les propriétés non bâties des terres agricoles prévue par l'article 9 de la loi de finances pour 1993 ;
- la suppression progressive de la part salaires et la réduction de la fraction imposable des recettes pour les titulaires de bénéfices non commerciaux dans la base de la taxe professionnelle, prévues respectivement par l'article 44 de la loi de finances pour 1999 et par l'article 26 de la loi de finances pour 2003.
II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR LE PRÉSENT ARTICLE
A. LA VALIDATION DES PRATIQUES PASSÉES
Le VII du présent article valide la pratique administrative consistant à ne pas tenir compte de l'émission des rôles supplémentaires émis pour le calcul des compensations versées par l'Etat aux collectivités territoriales . L'exposé des motifs du présent article précise que cette mesure « répond à l'intérêt général d'assurer une égalité de traitement entre les collectivités territoriales en raison de l'impossibilité de reconstituer les sommes dues à certaines d'entre elles eu égard, notamment, à l'ancienneté de l'émission de certains rôles supplémentaires. Au surplus, il vise à prévenir un abondant contentieux qui ne manquerait pas de survenir et qui serait de nature à perturber gravement le fonctionnement de l'administration et des juridictions administratives ». On notera que cette citation est similaire à celle figurant dans l'exposé des motifs de l'article relatif au contentieux « Pantin » du projet de loi de finances pour 2002, qui évoquait également les « litiges qui ne manqueraient pas de survenir quant au montant des compensations supplémentaires accordées » en l'absence de disposition législative.
La validation proposée par le VII du présent article rendra donc sans objet les contentieux actuellement en cours auprès des juridictions administratives.
B. UNE INDEMNISATION PARTIELLE DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES AU TITRE DE L'ABSENCE DE PRISE EN COMPTE DES RÔLES SUPPLÉMENTAIRES
1. Les compensations versées dans le cadre de la DCTP
Le A et le B du I portent sur les compensations de la diminution de 20 % à 18 % de la fraction imposable des salaires dans l'assiette de la taxe professionnelle et de l'abaissement du plafond du taux communal de la taxe professionnelle prévu par l'article 18 de la loi de finances rectificative pour 2002. Ces deux compensations sont versées aux collectivités territoriales dans le cadre de la dotation de compensation de la taxe professionnelle (DCTP).
Le C du I prévoit le versement d'une indemnisation forfaitaire aux collectivités territoriales concernées : la dotation de compensation de la taxe professionnelle (DCTP) sera en effet majorée de 30 millions d'euros versés, chaque année, à hauteur de 25 % en 2004, en 2005, en 2006 et en 2007 .
D'après les informations recueillies par votre rapporteur général, ce montant de 30 millions d'euros résulte d'une estimation réalisée par les services au titre des années 2001, 2002, 2003 et 2004 17 ( * ) :
- pour la compensation relative à l'abaissement du taux plafond communal de taxe professionnelle, à partir d'une estimation forfaitaire, fixée à 3 %, de la part des bases brutes de la taxe professionnelle de 1983 figurant sur les rôles supplémentaires. Le calcul, réalisé, dont le détail est exposé dans le rapport de notre collègue député Gilles Carrez, rapporteur général du budget à l'Assemblée nationale, représente un supplément de compensation de 4 millions d'euros ;
- pour la compensation relative à la réduction de la fraction imposable des salaires, la même hypothèse que celle susmentionnée a été retenue. Elle conduit à définir un supplément de compensation de 26 millions d'euros pour les collectivités territoriales concernées.
2. Les autres mesures d'indemnisation
Les compensations relatives à la suppression des parts départementale et régionale de taxe foncière sur les propriétés non bâties des terres agricoles et aux allègements de taxe professionnelle en Corse, mentionnées au V et VI du présent article, font l'objet d'une indemnisation forfaitaire pour le passé.
Le B du V prévoit une majoration de la compensation de la suppression des parts départementale et régionale de taxe foncière sur les propriétés non bâties des terres agricoles de 655.000 euros. Ce montant a été calculé en tenant compte des rôles supplémentaires émis au cours des années 2001 à 2004, compte tenu de la prescription quadriennale, et en considérant que les terres agricoles représentent 90 % des rôles généraux de taxe foncière sur les propriétés non bâties.
Le B du VI prévoit une majoration de la compensation relative aux allègements de taxe professionnelle en Corse d'un montant de 332.000 euros. Le calcul de cette somme a été effectué en appliquant aux bases communales ayant fait l'objet de rôles supplémentaires entre 2001 et 2004, les taux départemental et régional de 1994, pour la suppression des parts départementale et régionale de la taxe professionnelle en Corse, et le taux moyen communal et intercommunal de 1994, pour l'abattement de 25 % sur les parts communale et intercommunale de la taxe professionnelle.
3. Les compensations ne faisant pas l'objet d'une indemnisation
Les autres compensations visées par le présent article ne font pas l'objet d'une indemnisation :
- pour la compensation de la réduction pour investissement, mentionnée au II du présent article, aucune indemnisation forfaitaire n'est prévue, dès lors que trouve à s'appliquer la prescription quadriennale, cette compensation n'ayant plus été perçue depuis 1988 ;
- pour la compensation de la suppression de la part « salaires » des bases de la taxe professionnelle et la compensation de réduction de la fraction imposable des recettes pour les titulaires de bénéfices non commerciaux (BNC), aucune indemnisation n'est prévue par le présent article, les rôles supplémentaires étant pris en compte par la pratique administrative.
C. LA FIXATION DES RÈGLES DE CALCUL DES COMPENSATIONS VERSÉES PAR L'ETAT POUR L'AVENIR
1. La validation, pour l'avenir, des pratiques administratives actuelles
a) Les compensations versées dans le cadre de la DCTP
Le A et le B du I du présent article, qui portent sur les compensations de la diminution de 20 % à 18 % de la fraction imposable des salaires dans l'assiette de la taxe professionnelle et de l'abaissement du plafond du taux communal de la taxe professionnelle prévu par l'article 18 de la loi de finances rectificative pour 2002, précisent que, pour le calcul de ces compensations à l'avenir, seront pris en compte les seuls rôles généraux établis au titre de l'année 1983. Il serait d'ailleurs impossible à l'administration fiscale de reconstituer, pour chaque collectivité, les compensations correspondant aux rôles supplémentaires émis en 1983.
Par ailleurs, pour le calcul de la compensation de la réduction pour investissement, mentionnée au II du présent article, il est précisé que la valeur locative des équipements et biens mobiliers imposés en 1982 doit s'entendre comme correspondant aux seuls rôles généraux , et que le pourcentage de variation, constaté au niveau national entre 1982 et 1983, de la valeur locative de l'ensemble des biens et équipements mobiliers compris dans les bases d'imposition de la taxe professionnelle est calculé à partir des seules bases d'imposition correspondant aux rôles généraux.
b) Les autres compensations de taxe professionnelle
- s'agissant de la compensation de la suppression de la part « salaires » des bases de la taxe professionnelle, le III du présent article précise que pour son calcul, « les compléments de bases nettes imposables au titre de 1999 afférents aux salaires imposés par voie de rôles supplémentaires donnent lieu à un complément de compensation à compter de l'année suivant celle de la mise en recouvrement desdits rôles . Les dégrèvements contentieux prononcés au titre de 1999 donnent lieu à une minoration de la compensation à compter de l'année qui suit celle de la décision du dégrèvement ». Il s'agit donc de la confirmation, pour l'avenir, de la pratique administrative actuelle , qui consiste à prendre en compte les rôles supplémentaires l'année suivant celle de leur mise en recouvrement, et à prendre en compte les dégrèvements contentieux à compter de l'année qui suit celle de la décision du dégrèvement.
- s'agissant de la compensation de la réduction de la fraction imposable des recettes pour les titulaires de bénéfices non commerciaux (BNC), le IV du présent article propose que les mêmes dispositions que celles relatives à la compensation de la suppression de la part « salaires » des bases de taxe professionnelle s'appliquent. Il s'agit donc également de la confirmation, dans la loi, de la pratique administrative actuelle , qui consiste en ce que les compléments de bases nettes imposables au titre de 2003 imposés par voie de rôles supplémentaires « donnent lieu à une complément de compensation à compter de l'année suivant celle de la mise en recouvrement desdits rôles. Les dégrèvements contentieux prononcés au titre de 2003 afférents aux recettes imposées donnent lieu à une minoration de la compensation à compter de l'année qui suit celle de la décision du dégrèvement ».
2. La prise en compte des rôles supplémentaires pour certaines compensations
Pour la compensation de la suppression des parts départementale et régionale de la taxe foncière sur les propriétés non bâties des terres agricoles, le A du V du présent article prévoit que, à compter de 2005, elle sera calculée « à partir des pertes de recettes constatées dans les rôles généraux de l'année courante et dans les rôles supplémentaires d'imposition émis au cours de l'année précédente ». Il est précisé que « le bénéficiaire de cette compensation est la collectivité territoriale qui bénéficie au titre de l'année courante, du rôle général de taxe foncière sur les propriétés non bâties ou de taxe spéciale d'équipement additionnelle à la taxe foncière sur les propriétés non bâties en ce qui concerne l'Ile-de-France ».
Pour la compensation des allègements de taxe professionnelle en Corse, le A du VI du présent article prévoit que, à compter de 2005, elle sera calculée « à partir des pertes de recettes constatées dans les rôles généraux de l'année courante et dans les rôles supplémentaires d'imposition émis au cours de l'année précédente ». Il est précisé que « le bénéficiaire de cette compensation est la commune ou l'établissement public de coopération intercommunale doté d'une fiscalité propre qui bénéficie du rôle général de taxe professionnelle au titre de l'année courante ainsi que la collectivité territoriale de Corse et les départements de la Corse-du-sud et la Haute-Corse ».
III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES
Votre commission des finances ne considère jamais d'un « très bon oeil » les mesures de validation par voie législative : le législateur ne se prête qu'avec prudence et retenue au jeu consistant à contraindre le droit à s'adapter au fait afin de permettre à l'Etat d'échapper aux décisions juridictionnelles qui pourraient être décidées à son encontre.
Elle rappelle que ces validations sont désormais largement encadrées tant par la jurisprudence du Conseil d'Etat que par celles du Conseil constitutionnel ou de la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH). Ces jurisprudences font valoir que les validations doivent reposer sur des motifs suffisants d'intérêt général. Depuis sa décision du 22 juillet 1980 (n° 80-119 DC), le Conseil constitutionnel n'admet ainsi la validation rétroactive des actes administratifs qu'à la condition que cette validation ne méconnaisse pas l'autorité d'une décision de justice passée en force de chose jugée et, qu'elle ait été opérée pour « un motif d'intérêt général suffisant ».
Votre commission concède que ces deux conditions sont réunies par le présent article :
- il ne méconnaît pas l'autorité d'une décision de justice passée en force de chose jugée, puisqu'il écarte de manière explicite l'application de ses dispositions dans ce cas ;
- la validation est justifiée par des motifs d'intérêt général : le gouvernement indique en effet, dans l'exposé des motifs, que le dispositif « répond à l'intérêt général d'assurer une égalité de traitement entre les collectivités territoriales en raison de l'impossibilité de reconstituer les sommes dues à certaines d'entre elles » et à « prévenir un abondant contentieux qui ne manquerait pas de survenir et qui serait de nature à perturber gravement le fonctionnement de l'administration et des juridictions administratives ».
Votre commission des finances considère que la validation proposée par le gouvernement est nécessaire et équilibrée, puisqu'elle s'accompagne d'une indemnisation forfaitaire pour certaines compensations et d'une prise en compte des rôles supplémentaires pour les allègements de fiscalité directe locale les plus récents.
Votre commission des finances relève enfin que les dispositions du présent article permettront d'atténuer la diminution des ressources de la DCTP, liée à son rôle de variable d'ajustement de l'enveloppe normée du contrat de croissance et de solidarité, alors que l'année 2005 est la dernière année d'abondement de cette dotation en application de l'article 19 de la loi de finances initiale pour 2002 précité. Elle rappelle que la DCTP devait diminuer de 10,64 % en 2005, compte tenu de la croissance très favorable de la dotation globale de fonctionnement et des dotations dont l'indice de progression est identique.
Décision de la commission : votre commission propose d'adopter cet article sans modification.
* 14 N° 206324, 8 ème et 3 ème sous-sections réunies, « ministère de l'économie et des finances c/ commune de Pantin », 8 octobre 2000.
* 15 Ces dotations étaient prévues au troisième alinéa du IV et au IV bis de l'article 6 modifié de la loi de finances pour 1987.
* 16 On notera que seules 6 décisions prises par les juridictions administratives étaient passées en force de chose jugée au moment de la promulgation de la loi de finances initiale pour 2002.
* 17 En application du principe de la prescription quadriennale, le présent article ne propose en effet de compenser le manque à gagner pour les collectivités territoriales qu'au titre des quatre dernières années. On rappellera que l'article 1 er de la loi du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics dispose que « sont prescrites , au profit de l'Etat, des départements et des communes, sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi, et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis » .